Notion introductive La pertinence d’étudier la psychologie dans le cadre d’études de droit L’avocat « idéal » est habile pour communiquer, questionner, planifier, résoudre des conflits, collaborer avec autrui et prendre les meilleures décisions éthiques Écart entre le contenu de la formation universitaire en droit et la réalité du terrain Les professionnels du droit se disent peu préparés à répondre aux besoins de leurs clients Les étudiants en droit reconnaissent et affirment qu’ils bénéficieraient d’une meilleure formation en relations interpersonnelles et en habiletés de résolution de problèmes Les liens entre la psychologie et le droit Psychologie et droit La psychologie légale (ou psychologie juridique) est un domaine de la psychologie plutôt vaste référant à l’application de connaissances en psychologie aux diverses institutions qui font partie du système judiciaire, aux individus qui œuvrent au sein de ces institutions et à ceux qui font l’objet de leurs interventions (Melton et al., 2018). Il est clair que les connaissances en psychologie sont pertinentes et disponibles à la discipline du droit Sont-elles bien exploitées/utilisées? (Freckelton, 2005) Jusqu’à quel point la psychologie et le droit sont-ils disposés au travail interdisciplinaire? (Carson et Bull, 1995). En droit, les professeurs ont des parcours assez homogènes ce qui peut influencer. Dès la fin du 19e siècle: Intérêt des chercheurs à l’application au droit des connaissances en psychologie (Clapardès, 1905). Domaine d’abord dominé par les psychiatres, particulièrement lorsque ces spécialistes ont été invité à participé aux processus judiciaire. Fait appel aux psychologues de plus en plus, dès la fin des années 60. La recherche en psychologie légale se développe considérablement depuis les années 1970 et ce, partout dans le monde (Kapardis, 2009) Premières revues scientifiques portant sur la psychologie et le droit, dès la fin des années 70. Tout d’abord centrée sur l’examen de l’état mental des accusés criminels, la recherche a englobé plusieurs autres aspects du fonctionnement de nos systèmes de justice Arrêts charnières en droit criminel canadien R c. Wray (1971): Recherche de la vérité c. Recherche de l’équité procédurale R c. Hubbert(1977): Impartialité des jurés R c. Sophonow(1986): Témoignages oculaires R c. Lavallée (1990): Lignes directrices du témoignage expert en lien au syndrome de femme battue. Le syndrome de la femme battue reconnue, accusé d’avoir tué son conjoint de fait (innocenté). Des expert (psychiatres) sont venus expliquer qu’elle n’a pas accepter par masochisme de se faire battre mais va progressivement prendre connaissance de la menace et qu’elle va mourir si elle ne met pas fin à la menace. Les experts sont allés trop loin et opinion par preuve non explicité. R c. Levogiannis (1993): Témoignage de l’enfant derrière un paravent. Enfant victime d’un agresseur adulte. Preuve par expert pour devancer le témoignage de l’enfant pour expliquer les appréhension de l’enfant victime en présence de l’agresseur allégué. Distingue qu’en droit criminel canadien et le droit pénal continental, que la confrontation visuelle entre la victime et l’accusé n’est pas pertinente en droit canadien. R c. Mohan (1994): Critères formels en lien à l’admissibilité de la preuve expert R c. Oickle (2000): Techniques d’interrogatoire admissibles même lorsque coercition psychologique. Les juges de CSC ont accepté que les techniques policières peuvent être ratoureuse. Suspect soumis au polygraphe, avec succès. Les policiers l’ont berné en disant qu’il n’avait pas réussi et à avouer par la suite. De tels aveux étaient libres et volontaires. La CSC a été amener à soupeser la preuve par témoins spécialistes en droit criminel. Les tribunaux se soucient de tenir compte de l’évolution des connaissances scientifiques, notamment des enseignements en psychologie. Certaines notions juridiques sont caractérisées par leur perméabilité aux tendances sociales et aux connaissances en psychologie (p. Ex. Meilleur intérêt de l’enfant, responsabilité criminelle). Les tribunaux apprennent à se méfier des pseudosciences et souhaitent utiliser les connaissances acquise de façon rigoureuse, la qualité des opinions sont importantes. Les liens entre la psychologie et le droit Compétences relationnelles o Pour accomplir efficacement son rôle au sein de la collectivité, un juriste doit établir avec son client et les autres, un climat de compréhension et de confiance. o Les 3 composantes des rencontres avocat-client: (Sternlight & Robbennolt, 2014) 1) cueillette d’informations; 2) conseils juridiques 3) construction du rapport avocat-client o Il faut savoir “décoder” l’autre pour aller vers lui. L’empathie : quelques notions Définition : l’empathie se décrit comme l’identification partielle et temporaire avec autrui. Pertinence : Favorise la collaboration de l’individu (Shirk et al., 2012) Agit comme modèle auprès de l’aidé (Schwenck et al., 2011) Favorise la qualité de la collecte de données Augmente la pertinence des interventions La capacité empathique varie d’un individu à l’autre et elle peut se développer Habiletés de persuasion et de négociation Notions de psychologie soutiennent les habiletés de persuasion et de négociation L’avocat habile aura de meilleures compétences pour écouter, considérer les émotions, construire et maintenir un rapport de confiance avec son client et identifier les meilleurs arguments de négociation en fonction de ses observations (Sternlight & Robbennolt, 2014) Persuasion : Les plaideurs étudient les techniques de plaidoirie les plus efficaces pour convaincre la/le juge Les juges font de la « rétroingéniérie » et se font expliquer les astuces qu’utilisent les plaideurs pour les convaincre L.L. Berger et K.M. Stanchi, Legal Persuasion: A Rethorical Approach to the Science, Routledge, 2018 Utilisation de la preuve : Un des apports de la psychologie au fonctionnement du système judiciaire se traduit par la réalisation de l’expertise psychologique (théorique ou clinique) de même que son utilisation par les tribunaux. L’expertise psychologique permet ainsi au tribunal d’emprunter des connaissances au domaine de la psychologie afin d’apprécier une partie ou l’ensemble de la preuve déposée et d’utiliser ces connaissances au soutien de la décision qu’il rendra. Les juges se préoccupent ainsi de la crédibilité des témoins et de la fiabilité des témoignages (mémoire détection du mensonge) Exigences de la profession : Exigence relationnelle Exigence organisationnelle/culturelle Exigence de l’expérience adversarielle Modifications législatives ou réglementaires et services psycho judiciaires La Loi sur la protection de la jeunesse : redéfinition du meilleur intérêt de l’enfant, impact de la théorie de l’attachement (modifications dans le sillage de la Commission Laurent) exemple de raffinement, chaque disciplines peut apporter à l’autre Tribunaux de santé mentale : démarrer une thérapie pour essayer de régler à la source leur problèmes psychiques en évitant l’amende et la prison. Gestion des tribunaux tout au long de la pandémie : faire fonctionner les dossiers et les tribunaux L’apport des connaissances en psychologie La psychologie cognitive La psychologie cognitive est une branche de la psychologie qui étudie la cognition (Fortin et Rousseau, 2013) Elle traite des processus mentaux, donc de l’activité du cerveau Elle analyse la performance de l’humain dans l’exercices de ses fonctions (perception, mémorisation, rappel, résolution de problème et prise de décision) Approche de traitement de l’information Les contributions de la psychologie cognitive au droit sont évidentes Témoins oculaires et mémoire Suggestibilité de la mémoire et faux souvenirs (Ceci and Friedman, 2000; Loftus, 1979) La psychologie sociale (Nadler et Muller, 2017) La psychologie sociale est l’étude scientifique des processus par lesquels les pensées, émotions et comportements humains sont influencés par la présence d’autrui, que celle-ci soit réelle, implicite ou imaginée (Allport, 1924) Les contributions de la psychologie sociale au droit sont évidentes Interrogatoires et confessions Compréhension par les jurés des directives que leur donne le juge Processus décisionnel à l’intérieur d’un jury Processus de négociation et de résolution de différends La psychologie du développement (Miljkovitch, Morange-Majoux, et Sander, 2017) Discipline scientifique qui s’intéresse à l’évolution psychologique de l’individu tout au long de la vie. Elle décrit les étapes de cette évolution et les processus qui la sous-tendent * Elle permet de comprendre ce qui distingue les bambins, les enfants, les adolescents, les adultes, les aînés quant à leur attitude face à diverses expériences communes Applications évidentes au droit civil et pénal Développement moral (capacité de discerner le bien du mal et se comporter en conséquence, planification de l’intention) Lien d’attachement Enseigner la psychologie dans les facultés de droit: les défis L’application de connaissances en psychologie au système judiciaire rencontre plusieurs obstacles qui ont été identifiés au cours des quatre dernières décennies (Grisso, 1987; Heilbrun & Brooks, 2010; Otto & Heilbrun, 2002; Poythress, 1979) Formation interdisciplinaire exigeante: psychologues, juges et avocats Rôles et responsabilités des acteurs judiciaires et psychosociaux Et pourtant… Les expériences interdisciplinaires permettent le développement planifié et réflexif des compétences relationnelles (Bernheim, 2020) Les grandes habiletés des meilleurs juristes (J.K. Robbennnolt et J.R. Sternlight) La cognition : analyser, raisonner, innover, résoudre le problème La collecte d’information pertinente et complète, la capacité d’interviewer « ceux qui savent » La communication : parler, écrire, plaider, militer L’organisation : planifier, bien utiliser le temps et les ressources disponibles La résolution : parvenir à trouver une solution acceptable pour son client L’entrepreneurship : générer une clientèle, se rendre crédible parmi ses pairs L’interaction : parvenir à travailler avec ses alliés, avec ses adversaires, avec les gens du « système » La personnalité : implication, diligence, intégrité, perfectionnement continu Quatre grands paradigmes La vérité Les juristes aiment se présenter comme les « professionnels de la vérité » Nos systèmes de justice servent au départ à établir ce que sont les faits véridiques : Que s’est-il vraiment passé ? Qui dit vrai ? Qui est crédible ? Qui est fiable ? Comment peut-on reconstituer la trame des événements ? Mais quelle place la vérité laisse-t-elle à la justice ? La justice La justice est une valeur essentielle et universelle chez les êtres humains Nos systèmes de justice ont besoin de la vérité pour rendre justice La contribution des juristes à la société : utiliser la règle de droit pour prévenir ou solutionner les litiges Bien appliqué, le droit vise à établir un sentiment de justice G.P. Fletcher, Basic Concepts of legalthought, Oxford University Press, 1996 Plusieurs règles de droit bloquent la recherche de la vérité Le secret professionnel Le privilège relatif au litige Le privilège de l’indicateur de police La protection par un journaliste de ses sources Les secrets d’État La protection des secrets commerciaux La protection contre l’auto-incrimination La preuve obtenue en contravention des droits fondamentaux Les règles procédurales limitant la durée des instances Des faits dont les jurés ne seront pas informés Notre droit renonce à connaître TOUTE la vérité Lagacé c. Gestion Michel Lagacé inc., 2021 QCCA576 Le respect L’administration de la justice requiert idéalement le respect de toutes les personnes qui y participent : justiciables, témoins, experts, notaires, avocat/e/s, officiers de justice, juges En particulier, la justice procédurale veille, non pas tant au résultat, plutôt au processus suivi, à la façon dont la justice substantielle est établie Un processus équitable est censé mener à un résultat juste. Même le perdant, bien que déçu, pourra concéder qu’il a été traité avec respect, avec équité Le respect et la psychologie : Certaines connaissances élémentaires de la psychologie aident les juristes à mieux comprendre les ressorts qui animent les autres êtres humains avec lesquels ils/elles interagissent Il ne s’agit pas de se servir de ces connaissances pour manipuler autrui Il s’agit plutôt de respecter autrui, malgré les désaccords et la poursuite d’objectifs opposés (fondamental en procédure civile) Le (premier) pari est que la psychologie peut former des juristes plus respectueux des gens, plus efficaces et mieux appréciés L’éthique Toutes connaissances peuvent, à la rigueur, être utilisées à bon ou à mauvais escient Nos systèmes de justice confèrent de vastes pouvoirs (exclusifs aux juristes) : lier par des actes juridiques, menacer de poursuites, convoquer au tribunal, requérir des documents, obliger de répondre aux questions, saisir des biens en cas de non-paiement, etc. Nos systèmes souffrent quand les juristes abusent de leurs pouvoirs, en font usage sans égard à l’éthique (les tricheurs) L’éthique va au-delà de l’observation des normes déontologiques L’éthique des juristes assure qu’ils/elles n’utilisent pas leur formation et leurs connaissances pour nuire à la société L’éthique, un autre pari de ce cours : Les notions enseignées peuvent être utilisées à des fins contraires à la justice (et à l’établissement de la vérité) Il est parfois tentant de tricher quand on est juriste L’éthique est inhérente à la fonction de tout officier de justice Il est beaucoup plus valable de miser à long terme sur l’établissement et la préservation de sa réputation d’intégrité Psychologie cognitive, biais et procédés heuristiques La psychologie cognitive La psychologie cognitive est une sous-discipline de la psychologue qui s’intéresse spécifiquement à la cognition, c’est-à-dire la manière dont l’humain se construit une représentation pour: comprendre, raisonner, trouver des solutions, prendre des décisions : Perception. Intelligence, langage, raisonnement/résolution de problème, mémoire et attention. Parce que les ressources attentionnelles sont limitées : le système cognitif face à la surcharge d’informations privilégie une information au détriment des autres qui sont atténuées (Shapiro, Caldwell, & Sorensen, 1997) parfois le cerveau va s’attarder a des informations accessoires ou peut importante et discarter des informations essentielles. L’approche de traitement de l’information considère le processus mentaux comme une succession d’étape. La fonction attentionnelle (attention) est associée à la vigilance (cherche à détecter) à l’orientation (attire l’attention, évènement inattendu) et à l’état d’éveil (en fonction de l’état général, du moment et des substance, l’attention peut varier). Les émotions Émotions affectent le traitement de l’information. Pleins d’éléments viennent affecter la succession d’étape. L’information pris en considération par l’attention peut varier en fonction de l’émotion. Encodage peut être perturbé o Témoignage oculaire ex : vol à main armé, la victime va s’attarder sur l’arme et pas à quoi ressemble le voleur. Hypervigilance aux émotions négatives chez les individus souffrant de SSPT ou PTSD (Vythilingam, et al., 2007). Certains individus sont plus vigilants à certains détails à cause de conditions personnelles. Cela est intéressant pour les juristes, car nous sommes amenés à écouter des récits personnels. Caractéristiques individuelles associées aux biais attentionnels Ainsi, le traitement attentionnel préférentiel et/ou l’évitement attentionnel de certaines informations va entraîner des conséquences sur l’ensemble des traitements cognitifs de ces mêmes informations. Le parti pris attentionnel en faveur et/ou au détriment de certaines informations peut être associé à des biais mnésiques (encodage et récupération), des biais d’interprétation, des biais d’évaluation ou encore des biais dans la prise de décision. Certaines variances sont observées chez les personnes souffrant de douleur chronique (QuistrebertDavanne, Labat, & Nizard, 2016), chez les personnes traumatisées (Fani, et al., 2012), celles présentant un trouble de l’humeur (Blanchette, Richards & Cross, 2007; Rinck & Becker, 2005) Cécité attentionnelle (attentionnal blindness) Situation où l’observateur se concentre sur la cueillette de certaines informations au point où certaines autres lui échappent La cécité peut être attribuable à l’observateur lui-même (tente de colliger trop d’informations à la fois, considère devoir cibler une catégorie d’informations) Action filtrante ou modératrice de l’attention sélective Cécité attentionnelle (Mack et Rock) o Indiçage/ consignes o Similarité avec les autres objets et contrôle sur la tâche (ou niveau d’exigence attentionnelle) o Stimuli (leur trop grand nombre, le caractère dominant de l’un d’entre eux) Théorie de Daniel Kahneman À la fois psychologue et économiste Prix Nobel en économie (2002) A développé, avec Amos Tversky, une théorie dominante en psychologie cognitive, sur les processus décisionnels Thinking, Fast and Slow (2012) Noise, a Flaw in the Human Judgment (2021) Comment opèrent les processus décisionnels chez tous les humains Pertinent pour tous les professionnels qui ont à prendre des décisions, dont la communauté juridique Théorie reprise par Robbennolt et Sternlight, Psychology for Lawyers (2012) Théorie reprise par Malcolm Gladwell (vulgarisateur et journaliste), Blink, The Power of Thinking Without Thinking (2005) Système 1 : système automatique Celui qui a permis à l’homme de Cro-Magnon de survivre Involontaire, rapide, sans effort Il sert dans la vie de tous les jours Permet de réagir par réflexe, sans besoin de réfléchir, en cas d’urgence Alerte à ce qui est insolite, anormal Détecte l’humeur dans la voix et l’expression faciale d’autrui (impact sur les audiences virtuelles durant la pandémie) Calculer approximativement des nombres, des distances (p. Ex. Traverser la rue entre deux autos qui circulent) La fragilité du Système 1 Réagit à ce qu’il perçoit, sans chercher d’informations additionnelles Opère sur des préjugés, ne s’encombre pas du doute Est sensible aux illusions, ne cherche pas le vrai du faux Tend à considérer vrai ce qui est plus facile à comprendre (crédulité) pas de pour ou contre Est sensible à la fatigue, aux émotions, à l’inattention Interfère avec le bon fonctionnement du Système 2 Préfère la vitesse à la précision Saute aux conclusions Plusieurs études se soucient que les juges s’en remettent trop souvent au Système 1 Système 2 : système réflexif Délibéré S’alimente d’un maximum de données Permet de soupeser le pour et le contre, donc capacité d’observer méthodiquement et de mémoriser Capacité de se concentrer en éliminant les sources de distraction Capacité d’analyser, de distinguer une information valable d’une autre qui ne l’est pas Lent Exige concentration et effort, dépense de l’énergie. La facilité d’utiliser le système 2 dépend de la personne, certains sont plus efficaces. Attention sélective pour nourrir le système 2 efficacement. Retourne automatiquement au Système 1 si on n’y prend garde Carbure au glucose, dont le taux varie durant la journée, mais est capable de gérer l’énergie et de la recharger périodiquement Les huit juges israéliens (Goslagier p. 515). Juges de la commission de libération conditionnelle. Les prisonniers sont de plusieurs religions différentes. Pourquoi au fur et mesure que la journée progresse le nombre de libération conditionnel chute considérablement avant le midi et vers 4h pm? Porte sur plus de milles décisions. 65% d’obtenir gain de cause le matin et après le dîner, mais la tendance chute à pratiquement zéro. Attribuer à l’état de fatigue des juges et que le niveau de glucose baissait. Étude simpliste, mais intéressante. Les exigences du Système 2 Effort mental Requiert du temps Est mis en danger par l’efficacité du Système 1 Croskerry, P. (2005). The theory and practice of clinical decision-making. Canadian Journal of Anesthesia, 52(1), R1-R8. Guthrie, C., Rachlinski, J. J., & Wistrich, A. J. (2007). Blinking on the bench: How judges decide cases. Cornell L. Rev., 93, 1. Pertinence pour les juristes L’attention est fragile, l’inattention peut être dommageable Le Système 2 est primordial pour la perception, l’interprétation et la prise de décision Les processus décisionnels peuvent être mis à l’épreuve par les caractéristiques personnelles et contextuelles de chaque juriste Le décorum judiciaire s’explique par le maintien de conditions optimales pour que les parties, les témoins, les avocat/e/s, les juges puissent se concentrer sans distraction et faire plein usage de leur Système 2 Les biais et procédés heuristiques Les heuristiques Ressources cognitives limitées: reposent sur un traitement partiel des informations disponibles (Drozda-Senkowska, 1997) Les heuristiques sont des règles qui conduisent à des approximations souvent efficaces, mais faillibles, car ce sont des raccourcis du système 1. Permettent de simplifier les problèmes donc plus efficace (Yachanin et Tweney, 1982) Permettent, dans la vie de tous les jours, de prendre d’innombrables décisions courantes sans devoir délibérer à chaque fois Fiables la plupart du temps, même avec des informations incomplètes Exemple d’un heuristique qui nous permet de réfléchir à un lien causal: Je me suis couchée tard; ce matin, je me sens fatiguée. Biais cognitifs Si les heuristiques nous permettent bien souvent de trouver des réponses satisfaisantes très rapidement, elles peuvent aussi mener à des jugements et des perceptions incorrects. Lorsque ces erreurs sont systématiques, on les appelle des biais cognitifs. Les biais cognitifs sont composés de distorsions de perception, de jugements inappropriés et d’interprétations illogiques. Susceptibles d’entraîner des erreurs. Erreur commune, partagée, prévisible Un exemple de biais de modèle mental: le biais de confirmation Tendance à retenir et privilégier les informations confirmant ses hypothèses ou d'accorder moins d'importance aux données allant à l'encontre de ces mêmes hypothèses Tendance à faire la sourde oreille face aux informations et arguments qui contredisent sa thèse Peut miner le travail des experts judiciaires (Dror & Charlton, 2006; Taylor, Laber, Kish, Owens & Osborne, 2016) ou des policiers enquêteurs dans la recherche du suspect et mettent de côté des informations. Peu de gens changent de camp durant une campagne électorale, vu leur tendance à ne pas porter attention à ce qui défavorise « leur » candidat Interprétation d’empreintes digitales (Dror & Charlton, 2006), Interprétation d’analyses sanguines (Taylor, Laber, Kish, Owens, & Osborne, 2016), Importance de favoriser les analyses à l’aveugle Formation Opinions d’experts (Kulucka, Kassin, Zapf, & Dror, 2017) Reconnaissent le rôle du biais de confirmation Ne reconnaissent pas l’intérêt/nécessité d’être aveugles lors de l’analyse Se reconnaissent comme peu influencés par les informations (Il suffit d’un peu de volonté…) Un exemple de biais de modèle mental: Biais d’expérience Biais qui font en sorte que la personne réfère à ses expériences passées et surévalue sa capacité à poser un jugement sans faire toute la démarche rationnelle. Les professionnels y sont vulnérables « j’ai déjà vu ça », « Je connais ce type de témoin », excès de confiance et donne l’autorisation insidieuse d’écarter des informations. Un exemple de biais d’inertie: le biais d’ancrage Phénomène qui décrit l’influence de « valeurs » (par exemple, montants d’argent) aléatoires et subjectives sur le processus décisionnel subséquent. Bien que sans pertinence en soi, ces valeurs affectent la décision finale L’effet de ce biais d’ancrage est d’autant plus important lorsqu’on n’a pas accès à notre Système 2. Dans ce contexte, l’être humain s’accroche au premier chiffre qu’il voit. Montant d’une réclamation en dommages-intérêts. Prix demandé pour une maison Expérience de Kahneman et Tversky quant au nombre de pays africains membres de l’onu. Roue truquée qui arrêtait à un nombre très faible (10%) ou élevé (65%), pas un indice probant pour trouver la réponse, ceux qui voyaient le petit chiffre moyenne de 25% et élevé réponse moyenne de 45%, donc moyen d’influencer une décision de façon illogique. Quand un demandeur institue une action en justice, les avocats vont gonfler le montant des DI en espérant signifier qu’ils n’accepteront pas un montant dérisoire. Expérience de Guthrie, Rachlinski et Wistrich avec deux groupes de juges. Un exemple de biais d’action: le réalisme naïf Considérer que l’on est soi-même un modèle de compréhension de l’univers, de raison et d’objectivité. Ne pas réaliser que notre perception de la réalité dépend de nos schémas, scripts et stéréotypes. Inversement, penser que des gens soutenant un point de vue opposé sont incapables de voir pareillement certaines réalités Considérer qu’il y a quelque chose qui cloche chez tous ceux qui voient les choses autrement et réfutent nos arguments Les juges de la CSC des États-Unis dans Scott c. Harris (2007), alors que ceux-ci visionnent le même vidéo de l’accident et en donnent chacun une interprétation « évidente » mais différente. Harris est un conducteur de 19 ans et commet un excès de vitesse important et est prit en charge par la police. Scott, le policier, provoque une collision avec Harris qui devient quadraplégique. Harris poursuit la police pour abus de la force policière. Caméra monté dans le tableau de bord d’une autre police. Le juge dit que la vidéo révèle ce qu’on doit savoir. Mais la minorité parle du fait que la conduite était en campagne et la seule vie en danger était celle de Harris. Sondage auprès de citoyens et la majorité en sont venu aux mêmes conclusions que la majorité. Proportion très déterminante de citoyen noir, pauvre et progressiste à l’encontre de la majorité. Un/e bon/ne juriste apprend à regarder les deux côtés de la médaille et à se placer dans les souliers de la partie adverse Un exemple de biais d’action: l’excès de confiance Manifestation du réalisme naïf Heuristique qui nous amène à nous surévaluer ou surévaluer nos chances. Heuristique qui a des effets positifs… c’est bien d’avoir confiance! Lorsque cette heuristique mène à une erreur de jugement, il s’agit d’un biais d’excès de confiance Tendance à simplifier l’ampleur des tâches à accomplir pour réaliser un travail (et la durée de temps requise) À combien estimez-vous vos chances de décrocher un emploi dès après votre stage du Barreau? (52%). Et celle de vos collègues? (16%) Comment se répartit l’exécution des tâches ménagères au sein de votre couple? (La réponse dépasse 100%) Un exemple de biais de groupe: la cascade La cascade d’information se produit lorsque les individus, en carence d’information, imitent celui ou ceux qui semblent savoir. Ex. Je ne sais pas où se trouve le stade, alors je me contente de suivre les individus qui portent un drapeau. La cascade de réputation, qui conduit les individus à endosser le point de vue du plus grand nombre pour éviter le coût social dont doit s’acquitter tout contestataire. Stéréotypes Stéréotypes : schémas positifs ou négatifs reflétant notre perception de certaines catégories de personnes (les Russes, les personnes obèses, les fumeurs). Influencent l’ensemble des étapes du traitement séquentielle de l’information Biais raciaux et identification d’armes (Payne, 2001; Correll, Park, Judd, & Wittenbrink, 2002; Greenwald, Oakes, & Hoffman, 2003). Décision de tirer (Correll et al., 2002; Greenwald et al., 2003) La même information sera traitée différemment par diverses personnes dont les stéréotypes divergent. (Joyce Echaquan, de la communauté Atikamekw de Manawan). « Le racisme et les préjugés auxquels Mme Echaquan a fait face ont certainement été contributifs à son décès. » coroner.gouv.qc.ca/fileadmin/Enquetes_publiques/2020-EP00275-9.pdf Noise/Bruit D. Kahneman, O. Sibony et C. R. Sunstein, Noise, A Flaw in Human Judgment, 2021, Little, Brown Spark. Traduction : Noise, Pourquoi nous commettons des erreurs de jugement et comment les éviter, 2021, Odile Jacob Bruit: variabilité imprévisible/variabilité indésirable (vs créativité). Le bruit correspond à la variabilité indésirable dans le processus décisionnel, qui mène souvent à des injustices envers des gens soumis à un traitement censé uniforme et équitable. Il y a du bruit dès qu’intervient le jugement humain. Le biais est une cause du bruit Bruit inter-juges Bruit intra-juges: variabilité qui est fonction de l’humeur, de la période du jour Stratégies pour éviter l’effet du bruit, des biais et des raccourcis décisionnels Identifier le bruit, en vue de le réduire, de sorte que les décisions des humains souffrent aussi peu du bruit que si ces décisions étaient prises par un algorithme Hygiène de la décision Parfois le bruit est souhaité pour que « du choc des idées, jaillisse la lumière » : le bruit génère des désaccords qui entraînent des discussions, des prises de conscience, des remises en question Ainsi, le principe directeur de la contradiction (art. 17 C.p.c.) Colliger les faits de la façon la plus complète possible Analyser méthodiquement la situation Identifier ses biais et tenter de les neutraliser Qualifier juridiquement le problème Vérifier les solutions (variées?) Que procurent la doctrine et la jurisprudence Élaborer une solution raisonnée (litigation plan) Noter par écrit les Pour et les Contre Se méfier des décisions qu’il faut prendre précipitamment (Système 1) Kahneman et Tversky (1982) concluent qu’il faut apprendre aux individus à raisonner, à éviter les erreurs inférentielles et à utiliser les lois de la probabilité plutôt que des heuristiques. Tout ce qui précède s’applique au processus décisionnel par un/e juge S’assurer d’obtenir un maximum d’informations Se méfier de son impression première Se méfier du biais de confirmation, qui nous incite à ne noter que les éléments d’information qui coïncident avec cette impression première, et à ne poser que des questions dont la réponse validera cette première impression Être son propre avocat du diable (ou en désigner un) Un/e juge est censé/e développer et maintenir la capacité de réserver son appréciation d’une situation qu’après avoir colligé toute l’information (an attitude of suspended conclusion) Indépendance des « juges » Démarches rationnelle/éviter la décision portant sur l’impression globale. Le doute est notre allié o Aller chercher la contradiction : chercher pourquoi ne serait pas une bonne idée o Expression des désaccords o Incertitudes discutées o Critères explicites : si ABCD La mémoire « La mémoire, c’est compliqué. C’est un cousin de la vérité, mais pas son jumeau » Barbara Kingsolver, romancière Seuls contre le système sur la presse +. The wisdom of psycopaths de Kevin Dutton Mémoire: quelques mots d’introduction Modèle de Atkinson-Shiffrin (1968) (modèle du traitement de l’information) Registre sensoriel : fractions de secondes, on ne s’en rend pas compte Mémoire à court terme : moins de 30 secondes Mémoire à long terme : plus de 30 secondes La quantité d’informations pouvant être contenue en mémoire à court terme est limitée à moins qu’on cherche à l’encoder dans la mémoire à long terme. Pour qu’une information soit rappelée, il est nécessaire qu’elle se soit rendue en mémoire à long terme Entrevue avec Sylvie de Bellefeuille (la pandémie : cocktail explosif pour la mémoire) la détresse a affecté notre capacité d’encodage. Baisse de stimulation cognitive, isolement, dépression, anxiété et diminution de mouvement physique. La mémoire : le danger de certains A priori La mémoire est une enregistreuse audio-vidéo Un témoin honnête, sincère et sûr de lui est nécessairement fiable On peut raviver sa mémoire défaillante On se souvient mieux d’un événement impressionnant, traumatisant On distingue facilement nos souvenirs de nos suppositions et déductions Éclaircissements en analysant la réponse aux six questions de Blanchette et Viau-Quesnel Quels éléments peuvent affecter l’exactitude des souvenirs? Encodage L’encodage est le processus se déroulant au moment de l’événement, lorsque le témoin acquiert et comprend l’information. L’encodage dépend: Des connaissances antérieures et des attentes des témoins (Howe et al., 2020; Zacks, 2020) o Attention! Ces connaissances peuvent mener les témoins à combler les informations manquantes dans leurs souvenirs parce que c’est ce à quoi on s’attend d’eux (Shaw, 2017) De son niveau de développement (Morrison & Conway, 2010) De ses intérêts De façon générale, le souvenir combinera des éléments qui ont réellement été perçus et des éléments de connaissance qui permettent de comprendre ce dont on est témoin. Rétention/consolidation La rétention se déroule entre le moment de l’encodage et la récupération du souvenir. L’encodage dépend du passage du temps « La courbe de l’oubli n’est cependant pas une ligne droite. » On oublie énormément d’informations très rapidement après un événement et le taux d’oubli se stabilise ensuite (Schacter, 1996). « les détails qu’un témoin peut encore récupérer quelques mois après un événement seront généralement accessibles plusieurs années plus tard, voire toute la vie. » Le temps affecte davantage la mémoire pour les détails (richesses) d’un événement que pour son sens. Récupération La récupération est le moment où le témoin tente de réactiver ces informations, spontanément ou en réponse à une interrogation. Les indices de récupération permettent au témoin de se replonger dans le passé (question, association d’idées, se retrouver dans un endroit particulier, son, image, etc.) Plus les indices sont riches, plus il sera facile de récupérer le souvenir. La récupération dépend: De l’état de la personne (limite sur le plan cognitif, humeur, …) De ses connaissances au moment de la récupération o Ces informations/connaissances peuvent provenir de l’événement ou peuvent être acquis pendant la période de rétention o Suggestibilité (informations d’autres sources va être récupéré dans mon propre souvenir) Est-il possible d’avoir des souvenirs complètement faux? Faux souvenirs Phénomène bien étudié depuis les années 1970 (p. Ex., Loftus, 2003) Deux sous-types : Souvenirs parfois précis et détaillés… mais entièrement faux ! Souvenirs en partie vrais… mais introduisant des éléments s’étant produits avant ou après l’événement ciblé Faux souvenir ≠ délire (Zhu et al., 2010) Mais le témoin peut être persuadé de sa véracité Applications du concept de faux souvenirs au droit (Zhu et al., 2010) Précision et fidélité des témoignages oculaires Véracité des témoignages d’enfants dans le contexte d’allégations d’abus Souvenirs induits par hypnose Caractéristiques individuelles associées aux faux souvenirs Capacités cognitives (Zhu et al., 2010). Le nombre de faux souvenirs est négativement corrélé aux éléments suivants : Intelligence (limite cognitive) Perception Mémoire Jugement facial Implication : les personnes ayant des limitations intellectuelles ou perceptuelles sont davantage suggestibles à la désinformation, et donc, susceptibles de produire des faux souvenirs Facteurs contextuels associés aux faux souvenirs L’information reçue après l’événement Les fortes émotions L’influence et le renforcement des personnes en autorité La manipulation Le désir de satisfaire aux attentes L’imagerie guidée, l’hypnose et l’interprétation des rêves Erreurs judiciaires : une tare (états-unis) En mars 1976, Leonard Mack reconnu coupable de viol et possession d’armes (White Plains, au nord de Manhattan). Incarcéré 7 ans et demi; casier judiciaire depuis. En septembre 2023, jugement déclarant qu’il avait été injustement condamné. Exonéré grâce aux avancées scientifiques permettant une nouvelle analyse de l’adn. Comme dans la majorité des cas, M. Mack a été victime d’identification visuelle erronée par un témoin (la victime). Enquête policière bâclée. M. Mack était à l’époque un jeune homme Noir. Réussite d’Innocence Project. National Registry of Exonerations: surtout de jeunes Noirs (homicides, agressions sexuelles, trafic de drogue) Erreurs judiciaires : une tare (canada) Erreurs judiciaires au Canada, pour diverses raisons, et particulièrement parce que l’accusé est identifié à tort par un témoin visuel. Des analyses de l’adn permettent parfois de réviser l’enquête. Il s’agira de crimes ayant mené la police à conserver des prélèvements biologiques (pas une fraude ou un braquage de banque) Des procès civils peuvent mener à des erreurs judiciaires graves, notamment à la suite d’une identification erronée. Innocence Canada, Innocence Québec (www.innocencequebec.com) Elizabeth Loftus, témoin expert (pour la défense) Procès de Ghislaine Maxwell, en Cours fédérale à New York, sous 6 chefs d’accusation, dont incitation à des actes sexuels illégaux. Témoignages incriminants de femmes devenues majeures mais affirmant avoir été recrutées alors qu’encore mineures. Témoignage d’Elizabeth Loftus pour la défense : plusieurs phénomènes ont pu déformer les souvenirs (sincères) de ces femmes au fil des décennies : motivations pécuniaires, recherche de notoriété, influences médiatiques, solidarité entre « victimes ». La Professeure Loftus n’a pas commenté les témoignages incriminants eux-mêmes. Le 29 décembre 2021, verdict du jury déclarant Ghislaine Maxwell de 5 chefs sur 6. Https://lapresse.ca/international/etats-unis/2021-12-17/proces-de-ghislaine-maxwell/la-defense-entre-enscene/php Quelles sont les particularités des souvenirs émotifs et traumatiques? Les émotions et traumas Une gradation : Le stress Les vives émotions Les traumatismes Impact du stress sur la mémoire des témoins oculaires Les témoins de crimes sont souvent soumis à un niveau de stress élevé Une revue méta-analytique a révélé que de hauts niveaux de stress ont certains impacts (Deffenbacher et al., 2004) : Diminuer la précision de l’identification faite par les témoins oculaires Diminuer la précision des détails reliés à un crime Le stress Le stress entraîne la sécrétion d’une hormone, le cortisol, qui amène le cerveau à noter les événements de façon très particularisée. Source de la « vision tunnel » Le faux camp de prisonniers de guerre Entraînement pour des militaires susceptibles de capture par l’ennemi Interrogatoires musclés de 30-40 minutes Seulement 30% capables de décrire adéquatement leur interrogateur Les émotions D’un seul et même événement, la mémoire emmagasine différemment ses éléments émotifs et ses éléments neutres. Les émotions peuvent bonifier le souvenir d’un événement, tout comme elles peuvent les atténuer. Distinction entre les éléments centraux (résistant aux états émotionnels et au passage du temps) et les éléments périphériques (disparaissent le plus) Les traumatismes Un événement traumatique est celui qui menace l’intégrité physique de l’individu couplé à des sentiments intenses de peur, d’impuissance ou d’horreur o Accidents avec blessures o Agressions physiques o Agressions sexuelles o Agressions verbales (violence domestique et familiale) Un trouble du stress post-traumatique (TSPT) doit impliquer la survenue d’un événement traumatique, mais un TSPT n’est pas développé systématiquement à la suite d’un événement traumatique. Tout comme pour les événements émotifs moins intenses, les traumas peuvent bonifier la mémoire tout comme elles peuvent l’affecter négativement Deux individus vivant le même événement traumatique peuvent y réagir différemment Amnésie et hypermnésie de la personne traumatisée : débat scientifique en cours La plupart des adultes peuvent se souvenir des abus sexuels à l’enfance. Mais un sous-groupe ne conserve qu’un souvenir flou ou nul (hypothèse de l’évitement) ce qui peut être une faille pour la preuve. Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) est une psychopathologie. L’individu souffrant de TSPT peut revivre constamment l’événement, mais en oublier des détails spécifiques Peut-on se fier aux souvenirs des témoins âgés? (âgisme) Connaissent une diminution de leur acuité sensorielle et vivent des changements sur le plan cognitif. Plus susceptibles de faire des erreurs d’identification. Moins fiables sur les détails périphériques. Plus vulnérables aux techniques d’entrevue inappropriées. Il faut songer à adapter les techniques d’entrevue, tout comme pour les enfants (à venir) Est-ce que la confiance est reliée à l’exactitude? La confiance ne garantit pas la fiabilité et l’exactitude Tendance des jurés (et des juges) à favoriser ceux qui témoignent avec aplomb Un bon menteur peut dégager plus de confiance qu’un témoin honnête mais hésitant Avec une rétroaction, un témoin hésitant devient plus confiant, sans que la fiabilité de sa mémoire se soit améliorée Un témoin peut vouloir paraître plus confiant et fiable qu’il ne l’est en réalité (jugement Salvail) On peut améliorer l’assurance du témoin en l’aidant à préparer son témoignage (risque d’influence indue) Quelles sont les techniques fiables pour aider les témoins à récupérer des souvenirs? L’entrevue cognitive (ec) Pas tant un protocole qu’une méthode générale, destinée aux témoins adultes. Quatre outils mnémotechniques : 1) Restituer mentalement le contexte de l’événement 2) Rappeler tous les détails sans égard à leur importance 3) Utiliser l’ordre temporel inverse 4) Demander de relater d’une perspective différente Associé à une augmentation de 20 à 40 % du nombre de détails rappelés (voir Memon et al., 2010 & Köhnken et al., 1999). Enseignée notamment au sein des corps policiers Application de l’ec dans la pratique policière déficitaire (voir p. Ex. Dando, Wilcock & Milne,2010 ; 2009). Voir le Chapitre 8, Psychologie du témoignage et de l’interrogatoire, Michel St-Yves National institute of child health and human development protocol (NICHD) Description sommaire (Cyr, 2016; La Rooy et al., 2015) : Protocole structuré basé sur les données probantes afin de procéder à l’entrevue d’enfants faisant l’objet d’allégations d’abus. Conçu pour les intervenants psychosociaux et les policiers Objectif : remplacer les pratiques d’entrevue risquant d’induire des faux souvenirs chez les enfants (p. Ex., questions fermées et tendancieuses) Principes scientifiques qui sous-tendent le protocole : Fonctionnement de la mémoire Potentiel de développement des enfants Conditions facilitant la discussion des abus avec des enfants Étapes du protocole NICHD (Cyr, 2016; La Rooy et al., 2015) Phase prédéclarative : création d’un climat de confiance et explication des consignes à l’enfant Phase déclarative : énoncés très ouverts permettant un rappel libre, l’enquêteur doit intervenir le moins possible Exemple : « Pense très fort à [activité ou événement] et dis-moi ce qui s’est passé ce jour-là du moment où tu t’es levé(e) le matin, jusqu’à [une partie de l’événement mentionné par l’enfant en réponse à la question précédente]. » Phase de clôture : permettre à l’enfant de dire des choses qu’il n’a pas encore eu l’occasion d’exprimer, puis le remercier de sa participation Avantages (Cyr, 2016) Témoignages plus détaillés et « purs » Témoignages plus crédibles Plus grande proportion de témoignages débouchant sur des mises en accusation Limites (La Rooy et al., 2015) Bien que les intervieweurs aient reçu une formation, ils dérogent souvent en partie au protocole… Problème de continuité entre théorie et pratique, lorsqu’il n’y a pas de mise à jour et de pratique À retenir En regard des informations présentées, il est possible de dégager certaines hypothèses pouvant guider la pratique Conseils quant à l’individu 1. Se rappeler que les enfants, les ados et les adultes sont suggestibles (Cyr, 2014) 2. Considérer les capacités intellectuelles des témoins (Zhu et al., 2010) Une personne ayant une intelligence plus faible risque davantage de créer des faux souvenirs 3. Considérer l’âge de l’enfant (p. Ex., Eisen et al. 2002) Un âge plus avancé augmente la mémoire et réduit la suggestibilité 4. Considérer les habiletés langagières de l’enfant (expression et compréhension; p. Ex., Culp et al., 1991; Eigsti & Cicchetti, 2004; La Rooy et al., 2015) De faibles habiletés réduisent la cohérence des récits et le nombre de détails rapportés Conseils quant au contexte 1. Prioriser la véracité des informations à la précision Dire au témoin qu’il est légitime et préférable de reconnaître qu’il ne sait pas une information (Cyr, 2014; Sternlight & Robbennolt, 2008) 2. Utiliser des questions ouvertes du début à la fin (inspiré du NICHD; Cyr, 2014; La Rooy et al., 2015) Être tolérant, patient et accepter que la personne n’aille pas droit au but Par une question ouverte, demander à la personne de décrire en détails ce qui s’est passé Éviter les questions oui/non, à choix de réponse ou pouvant être répondu en très peu de termes (p. Ex., quoi, qui, quand, comment, etc.), sauf si c’est absolument nécessaire Ne pas faire appel aux propos de quelqu’un d’autre (p. Ex. : « telle personne m’a dit quelque chose. Est-ce vrai ? ») 3. Être attentif à son langage verbal et non verbal (p. Ex. : être chaleureux en tout temps, ne pas montrer de désapprobation quand le témoin ne donne pas l’information espérée) 4. Quoi faire avec un enfant ? (Cyr, 2014; Lyon, Ahern, et al., 2010; Lyon, Malloy, et al., 2008; Quas & Lench, 2007) Utiliser une personne spécialement entraînée pour conduire l’entrevue Cette personne doit être en mesure de créer un climat d’entrevue rassurant et chaleureux Climat rassurant ≠ rassurer à propos des événements La seconde option risque de miner la fidélité du témoignage… Seulement intervieweur et enfant dans la pièce Filmer tous les entretiens Éviter de poser plusieurs fois la même question, car l’enfant risque de changer sa réponse en croyant qu’il n’a pas encore dit la « bonne » chose (Cyr, 2014) Implications pour les avocat/e/s Importantes considérations déontologiques et éthiques Limites à raviver les souvenirs d’un témoin qui a oublié Possibilité de trop/trop bien préparer un éventuel témoignage Risque d’altérer la mémoire d’un témoin Risque à laisser les témoins s’influencer entre eux Risque d’insister qu’un témoin répète exactement ce qu’il avait écrit longtemps avant dans sa déposition Respecter que le témoin ait des souvenirs précis, flous ou nuls de certains éléments de l’événement Proulx c. R, 2012 QCCA 1302 : Communications permises et interdites entre l'avocat/e et "son" témoin aux étapes successives de son témoignage. La psychopathologie Santé mentale et pertinence pour les juristes La santé mentale comme « un état de bien-être permettant à chacun de reconnaître ses propres capacités, de se réaliser, de surmonter les tensions normales de la vie, d’accomplir un travail productif et fructueux et de contribuer à la vie de sa communauté (L’Organisation mondiale de la santé) La maladie mentale : changements qui affectent la pensée, l'humeur ou le comportement d'une personne. De la détresse (pas systématiquement) ou de la souffrance. Manifestations: Des signes de changement: observables par autrui Des symptômes: ressentis par la personne, inconfort ressenti Facteurs de risque cumulatifs liés à la maladie mentale Certaines personnes ont plus de risques d’avoir une maladie mentale (pas exhaustifs) : Les enfants et les adolescents qui ont vécu des expériences familiales ou relationnelles difficiles ou qui sont exposés à la violence à l’école; Les personnes qui assument seules la charge d’une famille; Les personnes qui ont subi une agression sexuelle ou de la violence conjugale; Les adultes qui ne travaillent pas ou qui perdent leur emploi ou instable à l’emploi; Les personnes à faible revenu; Les personnes âgées seules ou en perte d’autonomie. Pertinence pour les juristes Surreprésentation d’individus dans le système de justice (35% des prisonniers) Exacerbation des signes et symptômes en contexte de stress notamment en procédure judiciaire Enjeux pour les juristes (Redding, 2004) : capacité à témoigner, difficulté à représenter les intérêts d’un individu présentant un trouble de santé mentale, établissement de la sentence juste (comme diminuant la responsabilité ou comme facteur aggravant) et utilisation de la preuve expert Influence le rapport avocat-client Met à l’épreuve les compétences relationnelles pour le juriste Très peu ou pas enseigné dans les facultés de droit (Redding, 2004) Affecte le fonctionnement personnel (comportemental, affectif et relationnel), professionnel, conjugal et familial Permet de comprendre les enjeux liés à la blessure psychologique et à la responsabilité criminelle ou civile La psychopathologie Qui peut se prononcer sur un trouble mental? Avec l’adoption du PL-21, la compétence diagnostique du psychologue est devenue non seulement reconnue, mais légitimée dans un ensemble d’actes réservés, notamment le diagnostic de troubles mentaux, de retard mental ou de troubles neuropsychologiques. Le médecin et le psychologue peuvent évaluer les troubles mentaux. Diagnostic médical vs diagnostic psychologique Classification Différents systèmes de classification des maladies mentales En Amérique du Nord, le Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorder (DSM) est le plus utilisé American Psychiatric Association en est à sa cinquième édition Système qui fournit un langage commun pour décrire la psychopathologie Très bonne fidélité; moins bonne validité (certains troubles sont définit de façon trop hétérogène ce qui peut amener à poser le mauvais diagnostic) Pour chaque trouble: caractéristiques diagnostiques, prévalence, étiologie et évolution, facteurs de risque et pronostiques, questions diagnostiques liées à la culture ou au genre, retentissement fonctionnel, diagnostic différentiel et comorbidité Les troubles de l’humeur L’humeur est un état d’esprit dominé par une émotion. Le trouble de l’humeur implique: Des émotions négatives plus intenses et plus durables (intensité et chronicité) Problèmes de régulation des émotions Un fonctionnement perturbé: difficultés à remplir ses obligations professionnelles, familiales et sociales Les formes les plus fréquentes : La dépression Les troubles bipolaires La dysthymie Prévalence 6 % des personnes âgées de 12 ans et plus a reçu un dx de trouble de l’humeur en 2021 (Institut de la statistique, 2023) 14 % des personnes âgés de 15 ans et plus ont déjà souffert de dépression majeure au cours de leur vie et 3,4 % de trouble bipolaire (Statistiques Canada, 2023) Dépression Au moins 5 des symptômes durant la même période de deux semaines et représentent un changement par rapport au fonctionnement précédent : au moins un de ces symptômes est soit (1) une humeur dépressive, soit (2) une perte d'intérêt ou de plaisir Humeur dépressive présente la plus grande partie de la journée, presque tous les jours, Diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir Perte de poids significative en l'absence de régime ou gain de poids (p. Ex., changement de poids excédant 5 % en un mois), ou diminution ou augmentation de l'appétit Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours Fatigue ou perte d'énergie presque tous les jours. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours Diminution de l'aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision presque tous les jours (signalée par la personne ou observée par les autres) Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider Les symptômes entraînent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d'autres domaines importants. L'épisode n'est pas imputable aux effets physiologiques d'une substance ou d'une autre affection médicale. Remarque : Faire attention aux réactions normales à la perte. L'apparition de l'épisode dépressif majeur n'est pas mieux expliquée par un trouble schizoaffectif, une schizophrénie, un trouble schizophréniforme, un trouble délirant, ou un autre trouble du spectre schizophrénique et un autre trouble psychotique. Il n'y a jamais eu d'épisode maniaque ou d'épisode hypomaniaque. Il y a des indications à donner au niveau de la sévérité, de la chronicité et de la récurrence. Vignette clinique : M. Trudel vient de se séparer de son épouse. Ils ont deux enfants d’âge préscolaire. Il est anéanti et sollicite un avocat, aux conseils de ses parents. La première consultation a lieu un mois après que sa conjointe lui a demandé de quitter. Il a pris congé de son emploi aussitôt. Il pleure sans cesse et est confus. Il n’a pas de domicile et est hébergé chez des amis et de la famille. Il a une apparence négligée et a piètre mine. Il n’a pas revu ses enfants depuis son départ; il demande le divorce et veut revoir ses enfants. Qu’est-ce qu’un avocat devrait anticiper dans pareille situation? Quels sont les défis pour l’avocat? Quels sont les conseils qu’il devrait donner à son client? Les troubles bipolaires (labilité de l’humeur) Un épisode de manie se reconnaît à la présence continuelle, pendant au moins 1 semaine, de plusieurs des signes et symptômes suivants chez la personne : Sentiment de bonheur et de plaisir très intense ou, au contraire, d’irritabilité excessive; Hyperactivité, agitation et énergie débordantes; Idées de grandeur. Par exemple, une estime de soi démesurée; Débit de parole accéléré. Par exemple, la personne parle sans arrêt, coupe la parole aux autres; Augmentation importante du nombre d’activités professionnelles, scolaires, sociales ou familiales; Diminution du besoin de dormir. Par exemple, la personne peut se sentir reposée après seulement 3 heures de sommeil; Accélération de la pensée. Par exemple, la personne ressent un trop-plein d’idées ou se perd parfois dans ses idées; Manque de jugement; Grande distraction. Par exemple, la personne est incapable de fixer son attention sur un sujet; Comportements à risque qui procurent du plaisir. Par exemple, des achats impulsifs, des investissements financiers risqués ou hâtifs, des comportements sexuels à risque. Un épisode de dépression se caractérise par la présence continuelle, pendant au moins 2 semaines, de plusieurs des signes et symptômes suivants chez la personne : Fatigue; Manque d’énergie ou grande agitation; Problèmes de sommeil : la personne dort trop ou pas assez; Diminution ou augmentation de l’appétit, pouvant causer une perte ou un gain de poids; Diminution ou perte d’intérêt sexuel; Apparition de malaises tels que des maux de tête, des douleurs au dos ou à l’estomac; Grande tristesse. Par exemple, la personne pleure souvent; Très importante perte d’intérêt pour les activités professionnelles, sociales et familiales; Sentiment de culpabilité ou d’échec; Diminution de l’estime de soi; Difficulté à se concentrer sur une tâche; Difficulté à prendre des décisions; Pensées suicidaires. Manie Démêlés avec la justice potentiels liés à des comportements excessifs: Conduite dangereuse Irritabilité Conflits au travail Agitation Lien : voisin demande des DI à la dame qui se dit affecter par la bipolarité. Dame agité, sonne, appelle sans arrêt. Application de 1457, sauf si elle est privée de raison car impossible de commettre une faute civile et ne peut être tenu civilement de ses actes. Les troubles anxieux L’anxiété devient problématique quand : Elle ne disparaît pas quand la situation préoccupante revient à la normale; Elle occasionne un niveau de détresse important; Elle n’est liée à aucun événement de vie, c’est-à-dire qu’elle apparaît sans raison; Elle préoccupe continuellement la personne; Elle empêche la personne de fonctionner et d’agir normalement au travail, en société ou dans d’autres domaines de la vie quotidienne. Les formes de troubles anxieux les plus fréquentes sont : La phobie; L'anxiété sociale; L'anxiété généralisée; Le trouble panique et l’agoraphobie. La personne présentant un trouble anxieux peut ressentir divers malaises physiques et psychologiques plus ou moins intenses qui accompagnent son sentiment d’anxiété. Fatigue; troubles du sommeil; Maux de tête; étourdissements, vertiges ou impression d’évanouissement imminent; Nausées; Diarrhée ou inconfort abdominal; Palpitations cardiaques ou accélération du rythme cardiaque; Sensation d’étouffement ou d’étranglement; Transpiration excessive; Tremblements ou secousses musculaires parfois généralisées à tout le corps; serrements et douleurs à la poitrine; Sentiment d’irréalité et de perte de contrôle; Engourdissements ou picotements; Difficulté à se concentrer; Sentiment d’inquiétude; peur de mourir. Les troubles liés aux traumatismes et au stress Revivre des événements (ou symptômes de reviviscence) Éviter les situations qui rappellent le traumatisme (symptômes d'évitement) le client peut en venir à éviter son avocat. L’anesthésie émotionnelle : mal à exprimer vos sentiments L’hypervigilance (aussi appelée hyperexcitation) : nerveux, ou toujours aux aguets et à l'affût des dangers. Le trouble de l'adaptation est caractérisé par la présence de symptômes émotionnels ou comportementaux en réponse à un stress identifiable. Élément identifiable (stresseur) et ensemble de symptôme Il peut s’accompagner d’humeur dépressive ou anxieuse Le diagnostic est posé lorsque ces symptômes ne rencontrent pas les critères d'un autre trouble tel que dépression, trouble anxieux, état de stress aigu, état de stress post-traumatique Les troubles de la personnalité Critères diagnostiques généraux des troubles de la personnalité du DSM-5: Modalité durable de l'expérience vécue et des conduites qui dévie notablement de ce qui est attendu dans la culture de l'individu. Cette déviation est manifeste dans au moins deux des domaines suivants : o La cognition o L'affectivité (c'est-à-dire la diversité, l'intensité, la labilité et l'adéquation de la réponse émotionnelle) o Le fonctionnement interpersonnel o Le contrôle des impulsions Ces modalités durables sont rigides et envahissent des situations personnelles et sociales très diverses. Ce mode durable entraîne une souffrance cliniquement significative OU une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d'autres domaines importants. Ce mode est stable et prolongé et ses premières manifestations sont décelables au plus tard à l'adolescence ou au début de l'âge adulte. Ce tableau n'est pas mieux expliqué par les manifestations ou les conséquences d'un autre trouble mental. Ce mode durable n'est pas dû aux effets physiologiques directs d'une substance (ex., drogue) ou d'une affection médicale générale. 10 troubles de la personnalités : La personnalité paranoïaque est caractérisée par une méfiance soupçonneuse envers les autres dont les intentions sont interprétées comme malveillantes. La personnalité schizoïde est caractérisée par un détachement des relations sociales et une restriction de la variété des expressions émotionnelles. La personnalité schizotypique est caractérisée par une gêne aiguë dans les relations proches, par des distorsions cognitives et perceptuelles et des conduites excentriques. La personnalité antisociale est caractérisée par un mépris et une transgression des droits d'autrui. o Psychopathe : les psychopathes ont beaucoup de succès dans la société et un peu de psychopathie n’est pas trop grave. Intrépide, charismatique, confiant, déterminés La personnalité limite (borderline) est caractérisée par une impulsivité marquée et une instabilité des relations interpersonnelles, de l'image de soi et des affects. La personnalité histrionique est caractérisée par des réponses émotionnelles excessives et une quête d'attention. La personnalité narcissique est caractérisée par des fantaisies ou des comportements grandioses, un besoin d'être admiré et un manque d'empathie. Rend la personne confortable et les autres sont souffrants (doute, malaise, …) La personnalité évitante est caractérisée par une inhibition sociale, par des sentiments de ne pas être à la hauteur et une hypersensibilité au jugement négatif d'autrui. La personnalité dépendante est caractérisée par un comportement soumis et « collant » lié à un besoin excessif d'être pris en charge. La personnalité obsessionnelle-compulsive est caractérisée par une préoccupation de l'ordre, la perfection et le contrôle. À considérer Affecte le fonctionnement individuel, parental, conjugal et familial Affecte les relations et la régulation des émotions Associé au niveau de conflit parental et au conflit au travail (Paquin-Boudreau, Poitras, & Cyr, 2023) Stigmatisation (Grenier Gauvin, Poitras, & Janelle, 2018) Le diagnostic peut être plus compliqué et le pronostic peut varier M. F Abus sexuels dans l’enfance Déni massif pendant les 30 premières années de la vie adulte Conflit au travail = précipitant un épisode de dépression Demande de services, est vue comme exigeant Procédures judiciaires Relation avec l’avocate Les troubles psychotiques Sommeil et son appétit sont perturbés; Hygiène personnelle et son apparence; Manque d’énergie et de motivation; Humeur changeante Difficulté à se concentrer ou à maintenir son attention pendant de longues périodes; Ses activités habituelles, son travail, ses études ou ses amis ne l’intéressent plus comme avant; Ses émotions se modifient Idées délirantes, c’est-à-dire des idées étranges ou fausses, des préoccupations bizarres Pensées confuses et incohérentes : par exemple, elle a de la difficulté à suivre une conversation et ses propos sont illogiques ou vagues; Des comportements inhabituels : par exemple, elle éclate de rire ou se fâche sans raison, refuse de manger de peur que sa nourriture soit contaminée; S’isole : par exemple, elle demeure dans sa chambre toute la journée; Se met à consommer de l’alcool ou des drogues alors qu’elle n’en a jamais consommé, ou elle en consomme plus qu’habituellement. Les symptômes peuvent varier d’une personne à l’autre et changer avec le temps Durant un épisode psychotique, la personne peut : Avoir des hallucinations : o Entendre une ou des voix que personne d’autre n’entend; o Voir des choses que personne d’autre ne voit; o Sentir des odeurs que personne d’autre ne sent; o Ressentir des sensations physiques inhabituelles, par exemple, avoir l’impression qu’une personne invisible la touche; Avoir des idées délirantes, par exemple : o Avoir l’impression de pouvoir contrôler la pensée des autres ou que d’autres personnes contrôlent ses pensées; o Avoir l’impression d’être surveillée, suivie ou persécutée; o Avoir le sentiment d’être différente des autres ou d’avoir changé. Les idées délirantes peuvent angoisser la personne atteinte ou la rendre anxieuse. Elle peut par exemple ressentir une insécurité permanente. À l’apparition d’un trouble psychotique, plusieurs personnes atteintes accordent peu d’attention aux symptômes et pensent qu’ils disparaîtront d’eux-mêmes. En agissant ainsi, elles retardent le moment où elles pourraient recevoir de l’aide et des traitements et en bénéficier. Affectent le fonctionnement du cerveau de façon majeure Modifient les pensées, les croyances, les perceptions Perturbent différences entre ce qui est perçu et ce qui est réel Perte de contact avec la réalité Apparition graduelle ou de façon soudaine. Débutent habituellement à l’adolescence ou au début de l’âge adulte (différent chez les hommes et les femmes). La personne atteinte d’un trouble psychotique a beaucoup de difficulté à fonctionner au quotidien. Schizophrénie : perte de contact avec la réalité; affecte les pensées, les émotions, les sentiments et les comportements; difficulté à fonctionner dans ses activités quotidiennes Trouble schizoaffectif : symptômes de la schizophrénie ET symptômes associés aux troubles de l’humeur (dépression et troubles bipolaires). Trouble délirant : affecte principalement les pensées et les idées. Difficulté à se concentrer ou à suivre une conversation; Croire qu’une vedette est tombée amoureuse d’elle; Avoir la sensation de dégager une mauvaise odeur, ou l’impression d’être poursuivie ou d’être contaminée. Épisode psychotique bref : Apparition subite; souvent déclenchés par un stress important; ne dure pas plus d’un mois. Trouble psychotique secondaire à la consommation d’une substance Complications Estime de soi Relations avec les autres perturbées et isolement social Détresse des membres de l’entourage et conflits Risques accrus: o Pauvreté; o Trouble de l’usage de substance; o o o Itinérance Troubles de santé mentale en comorbidité (ex: dépression); Démêlés avec la justice Responsabilité criminelle La santé mentale et la criminalité Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes – Santé mentale de 2012 (Boyce, 2015) 5 millions de personnes qui ont eu des démêlés avec la police (2011-2012): o 1/5 (18,8 %) avaient un trouble mental ou un trouble lié à l’utilisation de substances. o 1/3 déclaraient avoir eu des démêlés avec la police Même quand facteurs démographiques et socioéconomiques considérés En 2013, 1/5 personnes étaient présumés avoir un trouble mental ou un trouble du développement Responsabilité criminelle Un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM) est rendu lorsque le juge ou le jury conclut que l’accusé était atteint, au moment où il a commis l’infraction reprochée, de troubles mentaux de nature à ne pas engager sa responsabilité criminelle (Code criminel, L.R.C. 1985, art. 672.34). La personne NRCTM n’est ni acquittée ni déclarée coupable (Latimer et Lawrence, 2006); o La libération inconditionnelle o La libération sous réserve o La détention dans un hôpital (Code criminel, L.R.C. 1985, art. 672.54). 2005 et 2012: 7,5 causes pour 10 000 causes annuellement à environ 9,1 pour 10 000 Augmentation du nombre de lits et de services consacrés à la psychiatrie légale est observée (Jansman-Hart, Seto, Crocker, Nicholls, & Côté, 2011) L’infraction la plus fréquente = voies de fait majeures (environ 20 %) Trouble psychotique, trouble du spectre de la schizophrénie ou trouble de l’humeur dans 80 % à 95 % des personnes NCRTM (Crocker, Nicholls, Seto, Charette, et al., 2015; Latimer & Lawrence, 2006). Diagnostic de trouble psychotique étant le plus fréquent Trouble de la personnalité ou diagnostic d’abus de substances psychoactives présents dans près du tiers des cas ¾ sont connues du système de santé mentale (Crocker, Nicholls, Seto, Charette, et al., 2015) Évaluation de la responsabilité criminelle Bernard-Arevalo,Naccarato et Dumais, 2020 Manque d’outil objectifs et fragilité de l’opinion clinique (Aravelo) Délai entre l’évaluation psychiatrique/psychologique et le délit Invitation à examiner les mécanismes psychologiques et neuropsychologiques sous-jacents la RC Toute maladie ou tout état anormal qui affecte la raison humaine ou son fonctionnement permet d’évaluer la possibilité de non-responsabilité criminelle o La capacité de juger de la nature et de la qualité de l’acte ou de l’omission prohibés o La capacité de savoir que l’acte ou l’omission prohibés étaient mauvais Apport de l’interdisciplinarité: les connaissances/techniques issues des neurosciences et de la psychologie cognitive et évaluation du jugement pratique et moral. R. C. Turcotte 2013 QCCA 1916 : tue ses enfants et tente de se suicider en prenant de l’éthanol. Trouble de santé mental ou ingurgitation? [36] Les psychiatres, tant en défense qu'en poursuite, s'entendent sur un point : à l'époque, l’intimé souffrait d'un trouble d'adaptation avec anxiété et humeur dépressive, ce qu'on appelait autrefois une dépression réactionnelle ou situationnelle. La personne est alors incapable de s'adapter à divers facteurs de stress et la souffrance engendrée est beaucoup plus importante que celle à laquelle on s’attendrait normalement. [37] Ce trouble, répertorié au DSM-IV, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l'American Psychiatric Association, constitue un élément de classification, mais c'est le jugement clinique de l'expert qui en déterminera la sévérité et l'impact véritable sur la condition mentale de la personne. C'est sur ces deux derniers points que les psychiatres entendus divergent d'opinion. [38] La psychiatre Dominique Bourget, en défense, explique que, le 20 février 2009, l’intimé présentait les symptômes d’une maladie mentale majeure. Elle décrit un processus en cinq étapes : 1. La charge émotionnelle importante vécue dans les semaines précédant le drame; 2. L'installation d'un tableau dépressif évolutif; 3. L'impulsion suicidaire aiguë; 4. Le passage à l'acte (l'intoxication); 5. Le dénouement fatal des gestes suicidaires (les homicides). [39] La charge émotive devient trop lourde et l’intimé est complètement absorbé et obnubilé par une préoccupation suicidaire. Il est en proie à un état dépressif qui évolue et il passe à l'acte. Pour se suicider, il absorbe le liquide lave-glace. Soulignons que le liquide lave-glace est un produit contenant du méthanol, ou alcool méthylique, un type d'alcool utilisé comme antigel. [45] Le psychiatre Sylvain Faucher, témoin de la poursuite en contre-preuve, ne remet pas en question le diagnostic de trouble d'adaptation. Il en conteste toutefois les effets sur la capacité de jugement de l'intimé. Certes, une charge émotive significative se développe chez ce dernier au cours des heures et même des semaines précédentes, mais elle n'atteint pas l'intensité d'un état psychotique. Le trouble d'adaptation n'altère pas de façon suffisamment significative le jugement d'une personne pour l'empêcher de comprendre la nature des gestes qu'elle pose, de juger de leur qualité ou encore de savoir qu'ils sont mauvais. De plus, la crise suicidaire n'a pas amené l’intimé à faire abstraction de son environnement ou des conséquences de ses actes. [106] Le psychiatre Faucher, précise que « le trouble d'adaptation ce n'est pas suffisant pour arriver à la conclusion qu'un individu est incapable de comprendre la nature des gestes qu'il commet ou d'en apprécier la qualité, savoir s'ils sont bons ou mauvais. Il faut autre chose. Il faut un ingrédient de plus ou des ingrédients de plus ». Il n'y a ici aucun de ces ingrédients, puisque, selon lui, même l'intoxication était insuffisante pour perturber son jugement à ce point. Tribunaux de santé mentale Https://www.justice.gc.ca/fra/nouv-news/photo/video9.html Surreprésentation des personnes avec troubles de santé mentale dans le système de justice pénale Désinstitutionalisation et manque de services Liens entre la santé mentale et la criminalité sont complexes (lien causal?) TSM s’attaquent à la problématique au niveau du passage à la cour Ils n’y ont pas les soins adéquats Sans réponse adéquate, risque de récidive Objectifs: prévenir la criminalisation, améliorer le bien-être du contrevenant et le référer aux ressources appropriés, assurer la sécurité publique, soutenir l’autonomie et de la responsabilité personnelle Effet positif: accès aux services et diminution de la récidive. Respect des droits procéduraux/inéquité Les avocats et la santé mentale Santé mentale et pratique du droit Exigences relationnelles Exigences organisationnelles/culturelles Exigences de l’expérience adversarielle Clients Parties adverses, représentées ou PNR Quérulents Juges Autres professionnels voulant tout autant savourer la victoire Autres professionnels à l’affût de vos clients Collègues, de nouveau hiérarchique égal ou supérieur La pratique du droit est exigeante et stressante, et peut être anxiogène… Pratique du droit auprès des clientèles difficiles Comment les repérer ? (Bow, Gottlieb, & Gould-Saltman, 2015; lebrun & Penhale, 2016) Pas toujours si facile lors de la première consultation Présentation pouvant être charmeuse, aimable Signes à considérer : Recours à de nombreux avocats par le passé Attentes irréalistes (résultat et délai) En mission (poursuit pour « détruire » l’autre, peu importe ce que cela implique) Eddy (2016) propose une définition des personnes hautement conflictuelles. Personnes avec un trouble de la personnalité ou des traits pathologiques (typiquement : borderline, antisociale, narcissique, histrionique, paranoïaque) Forte expression émotionnelle (p. Ex., colère, mépris) Comportements inappropriés (p. Ex., manipulation) Propension à blâmer les autres (y compris leur avocat, leur médiateur ou leur travailleur social) Rigides Déraisonnables (Susceptibles de s’engager dans des escalades) Centrées sur elles-mêmes Manquant d’insight Menaces et violence à l’endroit des avocats : qu’en est-il au Canada ? Une étude britanno-colombienne (N = 1152 avocats; Brown & macalister, 2006) : o 59,2% des avocats sondés rapportent avoir été l’objet de menaces ou de violence o Pas de différence dans le risque de victimisation selon les générations d’avocats, mais risque augmentant avec le nombre d’années de pratique o Très faible différence du genre de l’avocat o Sévérité des actes : de communication légèrement inappropriée jusqu’à violence physique causant des blessures o Champs de pratique particulièrement à risque : Avocats de la défense en matière criminelle Procureurs provinciaux et fédéraux Avocats en matière de famille et de divorce Quelques conseils pour les avocats Ajuster les attentes des clients Documenter le processus dès le début (autoprotection) Être calme, clair, patient et compréhensif vis-à-vis de la détresse du client Discuter et régler les problèmes (même mineurs) au fur et à mesure Bien se connaître en tant que personne Plan de travail concerté avec le personnel de bureau qui est en contact avec le client (par soucis de cohérence) Des politiques claires concernant les comportements inappropriés et inacceptables vis-à-vis de l’avocat et de son personnel Faire attention au langage verbal et nonverbal utilisé (p. Ex., ton, posture, gestuelle, etc.) Détresse psychologique et pratique du droit Professionnels du droit plus susceptibles de faire face à un trouble de santé mentale dans leur vie (Baraldi et al., 2015 ; Pierson et al., 2018 ; Organ, 2011 ; Hess 2018). Près de 43 % des avocats québécois souffrent de détresse psychologique (Cadieux et al., 2019) 19% sont en épuisement (professionnel, personnel ou relationnel) Jeunes avocats (<10 ans) sont les plus touchés par la détresse psychologique (50 %) Femmes plus nombreuses à rapporter de la détresse psychologique (20,7 % contre 15,9 %) o Cette tendance s’inverse chez les jeunes avocats Secteur privé plus touché par la détresse psychologique, droit des affaires, commercial, de la famille Trouble de santé mentale associé à la réussite chez les avocats (Koltai et al., 2018) Sur le plan organisationnel: insécurité de l’emploi, exigences d’heures facturables, exigences de performance Demandes d’aide Augmentation de demandes au PAMBA de plus de 300 % depuis sa création. Près de 70 % des demandes proviennent des femmes. Demandes proviennent majoritairement des jeunes avocats o Entre 22 et 35 ans (55 %) o Entre 36 à 45 ans (26 %) Étudiants en droit (Université mcgill, Healthy Legal Mind, 2017) 2/3 des étudiants en droit font face à des défis au plan du bien-être personnel 1/5 ont eu des idées suicidaires dans les 3 derniers mois 4 facteurs à considérer: o (1) la culture de performance ; (2) la lourde charge de travail et l’ambiguïté des attentes des autorités facultaires ; (3) la discrimination et l’intimidation ; (4) l’accès restreint aux services d’aide en santé mentale (HLM, 2017). Violences sexuelles: conséquences pour les victimes et traitement judiciaire Violences sexuelles: prévalence, facteurs de risque et conséquences pour les victimes Quelques chiffres Au Canada, 1 femme sur 3 et 1 homme sur 11 ont rapporté avoir été victime d’agression sexuelle depuis l’âge de 15 ans. Les jeunes adultes de moins de 25 ans sont le groupe d’âge rapportant la proportion la plus élevée d’agressions sexuelles. 96,8 % des agresseurs sont des hommes (Sécurité publique, 2013) Les deux tiers des infractions sexuelles sont commis dans une résidence privée (Sécurité publique, 2013) Au Québec, en 2019, plus du tiers (38 %) de l’ensemble des victimes d’infractions sexuelles rapportées par la police sont des adultes (18 ans et plus). Jeunes Au Québec, environ 1 femme sur 9 et 1 homme sur 20 ont déclaré avoir subi une agression sexuelle par une personne adulte avant l’âge de 15 ans. Les filles sont de 3 à 5 fois plus nombreuses à être victimes d’agression sexuelle que les garçons, même si ces derniers en sont aussi victimes. Les filles sont plus souvent victimes d’infractions sexuelles à l’adolescence, alors que les garçons le sont davantage pendant l’enfance. Les agressions sexuelles commises sur les jeunes se manifestent majoritairement par des contacts sexuels et sont souvent multiples. Dans près de 9 cas sur 10, les agressions sexuelles sont commises par une personne connue de la jeune victime, comme un ou une membre de la famille, une connaissance, un ou une amie, un ou une partenaire intime. Dans les dernières années, au Québec, on remarque une hausse importante du nombre d’infractions de publication non consensuelle d’images intimes, de pornographie juvénile et de leurre d’enfants. La majorité des victimes connaissent l’auteur présumé, soit 85,6 % des victimes mineures et 68,3 % des victimes adultes. (Sécurité publique, 2013). Facteurs de risque associés à la victimisation et à l’agir sexuel dans les cas d’ase Victimisation - - Âge de l’enfant (Black et al., 2001; Laaksonen et al., 2011; Ventus et al ., 2017) intrafamiliaux pour les plus jeunes et plus vieux plus souvent extrafamiliale Genre (Assink et al., 2019; Black et al., 2001; Koçtürk & Yüksel, 2019; Pereda et al., 2009; Stoltenborgh et al., 2011; Sullivan & Knutson, 2000) femme plus à risque de rencontrer de la violence sexuelle et d’en vivre. Troubles de santé mentale (Assink et al., 2019) risque supérieur, fragilise. Troubles neurodéveloppementaux, tels qu’une déficience intellectuelle (Sullivan & Knutson, 2000; Westcott & Jones 1999) ou un trouble du langage (Sullivan & Knutson, 2000). Historique d’abus sexuel ou de maltraitance (Assink et al., 2019; Black et al., 2001) roue sans fin Structure familiale (Assink et al., 2019; Black et al., 2001) séparation, monoparentalité, instabilité. - Difficultés psychosociales des figures parentales (Assink et al., 2019; Black et al., 2001; Koçtürk & Yüksel, 2019) Agir sexuel (agresseur) (Pullman et al., 2017; Seto et al., 2015; Whitaker et al., 2008) - Tendances antisociales ou psychopathiques : incapacité de remord, égocentrisme dans les relations, … Troubles de santé mentale Comportements et intérêts sexuels atypiques (Christian joyale) Difficultés dans les habiletés sociales Attitudes défavorables eu égard à la criminalité Histoire familiale de l’abuseur (ex., d’abus sexuel durant l’enfance) fragilise l’individu Limite : Importance de comprendre les ASE dans le contexte social dans lequel ils surviennent (ex., Azzopardi, 2022; Bolen, 2001; Kahn et al., 2020). Conséquences des abus sexuels à l’enfance Les conséquences des abus sexuels à l’enfance (ASE) sont bien documentées; elles se manifestent tout au long de la vie et dans plusieurs sphères de celle-ci (Nagtegaal & Boonmann, 2022). o Comportements sexuels problématiques (Paolucci et al., 2001) o Troubles de santé mentale (Chen et al., 2010) o Problèmes de comportement (Pollock & Farmer, 2005; Lewis et al., 2016) o Régulation émotionnelle et adaptation au stress (Gruhn et Compas, 2020) o Difficultés relationnelles et académiques (Pollock & Farmer, 2005; Tourigny et al., 2005). Résultats suggèrent une multitude de problématiques plutôt qu’un syndrome spécifique à l’abus sexuel dans l’enfance (Paolucci et al., 2001) Conséquences des violences sexuelles à l’âge adulte Sentiment de honte et de culpabilité (Aakvaag et al. (2016) Troubles sexuels (Blais et al., 2018; Bornefeld-Ettmann et al., 2018; Denis et al., 2020) Anxiété/évitement (Granot et al., 2018) Relations interpersonnelles (Meyer et al., 2017) Santé physique sexuel Violences sexuelles et mythes Lilley, C., Willmott, D., Mojtahedi, D., & Labhardt, D. (2023). Intimate Partner Rape: A Review of Six Core Myths Surrounding Women’s Conduct and the Consequences of Intimate Partner Rape. Social Sciences, 12(1), 34. Les femmes qui sont agressées sexuellement par leur partenaire ne restent pas avec eux et les dénoncent à la police. Plusieurs facteurs internes (par ex. Lien affectif, peur d’être seule, cycle de violence) et externes (par ex. Ressources financières, isolement social, accès à l’éducation et à l’emploi) compliquent cette rupture avec le partenaire violent (Edin and Nilsson 2013; Herman 2019; Lacey et al. 2011; Payne and Wermeling 2009). Ce mythe réduit l’empathie aux victimes (Debowska et al. 2019). C. Ce mythe semble utilisé chez les avocats de la défense pour discréditer la victime (étude anglaise: Temkin et al., 2018) Être violé.e par quelqu’un que l’on connaît est moins traumatique qu’être violé par un étranger Pourtant, risque d’être agressé.e de façon répétée (Du Mont et al., 2017) Le contraire est pourtant démontré par Temple et al. (2007) en lien à l’état de stress posttraumatique On constate que ce mythe est présent dans les systèmes de justice. Ces allégations de violence qui s’inscrivent dans une relation où il y a eu des rapports sexuels consentants sont moins susceptibles de mener à des accusations (Ellison and Munro 2013; Hester and Lilley 2017; Hohl and Stanko 2015). Les fausses allégations de viols sont fréquentes et sont généralement initiées dans un conflit de garde d’enfant. Des taux de 1% à 6% de fausses allégations de viols sont observés aux États-Unis (Lisak et al. 2010; mcmillan 2018). Les policiers tendent à adhérer aux stéréotypes de la “parfaite victime” (Gunby et al. 2013) et à ne pas croire celles qui ne le sont pas. 83% des plaignantes qui avaient une relation significative précédant les allégations de viol sont perçues comme suspectes (Jordan, 2004) Seulement les hommes homosexuels sont violés. Ont subi des contacts sexuels non désirés avec ou sans violence: 16,6% des hommes hétérosexuels; 39% des hommes bisexuels et 37,7% des hommes homosexuels (Chen et al., 2020) Les agressions sexuelles commises par un étranger sont plus fréquentes chez les hommes (par ex. Murphy et al. 2022). Un peu de moins de la moitié des hommes homosexuels aurait subi une agression sexuelle de la part de leur partenaire (NCADV 2018). Pertinence d’aborder les violences sexuelles pour les juristes Perméabilité des systèmes de justice aux divers mythes Études incluant l’observation en milieu naturel montrent que les avocats de la défense exploitent ces mythes pour influencer le juge ou les jurés (Burgin 2019; Burgin and Flynn 2019; Durham et al. 2016; Smith and Skinner 2017; Temkin et al. 2018). Les jurés qui sont davantage en accord avec les mythes tendent davantage à proposer un verdict de nonculpabilité (Dinos et al. 2015; Eyssel and Bohner 2011; Hammond et al. 2011; Klement et al. 2019; mckimmie et al. 2014; Süssenbach et al. 2013; Willmott et al. 2018) Besoins de formation des juristes Les tribunaux manquent de connaissances en matière d’abus sexuel (Comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale, 2021) Défis quant à la preuve Preuves physiques sont rares : Les agressions sexuelles commises avec une arme ou causant des blessures physiques ne constituent que 3 % des agressions sexuelles commises à l’endroit des adultes. Conséquences des agressions sexuelles sont multiples, hétérogènes et sont parfois incohérentes aux préjugés Dénonciations et accusations 5% des crimes sexuels sont rapportés à la police (JURISTAT, 2014). 3 plaintes pour agressions sexuelles sur 1000 se soldent par une condamnation Faire partie de la réflexion Les normes sociales jouent un rôle dans la prévalence du phénomène ET dans la réponse de la société face à l’agression sexuelle (Jewkes, Sen et garciamoreno, 2002) Facteurs sociétaux liés au risque d’agression sexuelle: inégalités de genre, système de croyances culturelles et de normes sociales soutenant l’agression sexuelle, tolérance et faible sanctions légales (Centers for Disease Control and Prevention (CDC), 2004; OMS et LSHTM, 2010) Réflexion nécessaire sur la réponse judiciaire Traitement judiciaire des violences sexuelles Trois volets esquissés Volet criminel Volet civil Volet administratif Droit criminel Protection de la personne accusée Charte canadienne des droits et libertés (11) Droit de ne pas être contraint de témoigner contre soi-même Droit à la présomption d’innocence Droit au bénéfice du doute raisonnable Droit de ne pas être déclaré coupable d’une conduite non-criminalisée au moment de l’infraction Droit de contre-interroger les témoins (exceptions) donc droit de défense pleine et entière Droit d’être jugé dans un délai raisonnable – Jordan Protection de la personne plaignante (d’âge mineur ou d’âge majeur) Charte canadienne des droits de la victime, L.C. 2015, c. 13 (simple loi qui pourrait être abrogée qui rassemble, codifie pour que les victimes se sentent mieux traité dans le processus judiciaire) La Charte reconnaît le droit à l’information, à la protection, à la participation et à la réparation Imprescriptibilité d’une infraction en droit criminel canadien Protection contre l’identification publique de la victime (C.cr. 486.4 et 486.31) Possibilité de témoigner à huis-clos (a. 486) Possibilité d’isoler visuellement l’accusé (a. 486.2) Limites à investiguer le passé sexuel et la réputation de la plaignante (a. 276) Accès contrôlé aux « dossiers » de la plaignante (a. 278.1) Ordonnance de contre-interrogatoire par un avocat (486.3) mandater un avocat qui va conférer avec l’accusé. Possibilité de la présence d’une personne « rassurante » à ses côtés (486.1) Possibilité pour la victime de lire (à l’audience sur le prononcé de la peine) sa déclaration d’impact (722, Formulaire 34.2) Possibilité qu’un témoin (dont la personne plaignante) témoigne virtuellement (714.1) Possibilité de se limiter à la transcription du témoignage rendu lors de l’enquête préliminaire (715) Possibilité d’une ordonnance de dédommagement Dans le cas d’un témoin de moins de 18 ans, production de l’enregistrement vidéo du témoignage (715.1) Plusieurs arrêts de la CSC ont validé la conformité à la Charte Can de ces mesures de protection Pour chaque mesure, le C.cr édicte la grille d’analyse que le juge doit utiliser pour appliquer la mesure ou non Division spécialisée de la Cour du Québec CQ, Chambre criminelle et pénale, Division des accusations dans un contexte conjugal et sexuel (ACCES) Salle d’audience appropriée Gestion particulière par un seul et même procureur Gestion d’instance accrue par les juges Accompagnement des personnes plaignantes Programme de perfectionnement des juges Rappel des droits de la personne accusée Le/la juge ou le jury ne peuvent présumer que l’accusé a commis l’infraction (test de la preuve prépondérante inapplicable) La version des faits de la personne plaignante ne résiste pas toujours aux règles de preuve Il suffit rarement de croire la partie plaignante : R. C. Rozon, 2020 QCCQ 8498 R. C. Letellier, CS Richelieu no. 765-01-034486-197. Faire attention à la pensée magique. Le système judiciaire ne peut pas y aller par des statistiques, les apparences, le plus normal en société. Letellier a subit un procès pour harcèlement criminel et extorsion, déclarée coupable par la juge et condamnée à 9 mois d’emprisonnement. Professeur de médecine vétérinaire et sa victime est un homme mariée, collègue et directeur de thèse de madame. Se furent des amants torrides pendant une vingtaine d’année. Lui a demander de quitter sa femme et a décidé de mettre fin à sa vie avec madame. Elle l’a mal pris et s’est mise à l’accusé d’avoir fait d’elle une exclave sexuel, chantage dans la progression et dénigrement. Écrit à la police, à son épouse et à un enfant de monsieur. Série de plainte au doyen. Conclu à l’acharnement à la réputation du plaignant. Volet civil (Depuis 2022) Imprescriptibilité d’une réclamation pour préjudice corporel résultant de violence subie pendant l’enfance, de violence sexuelle ou de violence conjugale (2926.1 C.c.Q.) Preuve prépondérante suffit (2804) Plusieurs moyens de preuve sont permis (2811) La partie défenderesse est contraignable et ne peut refuser de répondre (285 C.p.c.) (exceptions) Certaines protections issues du droit criminel peuvent être mises en œuvre en faveur de la partie demanderesse Impact d’une déclaration de culpabilité criminelle (ou d’un acquittement) Volet administratif IVAC Victimes d’infractions criminelles (y compris, depuis 2021, pour infractions commises hors du QC) Pas nécessaires que la victime ait portée plainte à la police ou qu’un condamnation judiciaire ait été obtenue ou que l’auteur du crime ait été identifié Aide financière d’urgence (AFU) SOS violence conjugale ou info-aide violence sexuelle Résiliation du bail résidentiel (1974.1 C.c.Q.) Sur attestation par un officier public qu’il a reçu une déclaration assermentée Résiliation effective un ou deux mois après le préavis (selon la durée du bail) Permet à la victime de se relocaliser. Constats et motivations à faire les choses autrement Problèmes d’accès à la justice sont communs dans les systèmes de droit criminel de type accusatoire. Critiques de la part des victimes d’agression sexuelle en termes d’accès à la justice. Influence des mythes et stéréotypes Victimisation secondaire Rebâtir la confiance Rapport du comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale Corte et Desrosiers (2020) Mars 2019: le Comité d’experts sur l’accompagnement des personnes victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale est formé Décembre 2020: dépôt du rapport Rebâtir la confiance (190 recommandations visant à remettre la personne victime au cœur des interventions). Septembre 2021: Projet de loi 92 visant la création d’un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale 26 janvier 2022: Identification des cinq premiers districts judiciaires retenus pour le projet pilote de tribunal spécialisé Le projet pilote prendra fin le 30 novembre 2024. Le tribunal spécialisé sera permanent dans l’ensemble du Québec d’ici le 30 novembre 2026. Se centrer sur les besoins des victimes et leur expérience de la justice Favoriser l’accès aux services Répondre aux violences sexuelles et conjugales en contexte autochtone Donner accès à services juridiques compétents Soutenir la victime dans tous les systèmes de droit Assurer la sécurité des victimes Instaurer un tribunal spécialisé en matière d’agressions sexuelles et de violence conjugale Promesses du tribunal spécialisé Augmentation des taux de condamnation Amélioration de la qualité des témoignages Diminution des délais, de la victimisation secondaire et de l’impact des mythes et stéréotypes Amélioration de la connaissance des juges sur les réalités des victimes, etc. Initiative prometteuse pour l’amélioration de l’accès à la justice des victimes québécoises d’agression sexuelle. Limite des tribunaux spécialisés L’objectif de ces tribunaux n’est pas d’obtenir plus de condamnations, mais plutôt d’offrir un meilleur accompagnement de la victime à toutes les étapes du processus (voir Boisvert, 2022) R. C. Salvail : Afin de protéger à la fois la protection des victimes de violences sexuelles et la protection des droits constitutionnels des droits des accusés, que proposer? R. C. Kasher : infirmier à l’hôpital accusé d’agression sexuelle sur une femme en thérapie fermée pour sevrage en toxicologie. Éléments de corroboration. The risk of risk in child sexual abuse: A mixed methods analysis of judicial decisions Objectifs Documenter : 1. Les critères associés à la décision de retenir un signalement en matière de RAS; 2. Les critères associés à la décision d’ordonner une mesure de placement dans une situation de RAS. Méthodologie : Phase quantitative Échantillon N = 81 décisions judiciaires prononcées par la Cour du Québec en Chambre de la jeunesse et identifiées à l’aide du moteur de recherche géré par la Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ) qui répondent aux critères d’inclusion suivants : 1. DJ entre janvier 2016 et janvier 2021 2. Enfants âgés de 12 ans et moins 3. RAS discuté 1. Phase QUANTI Analyses bivariées effectuées afin d’identifier les associations entre les V.I. : - individuelles (ex., âge de l’enfant) - familiales (ex., cumul de difficultés psychosociales) - celles associées au signalement (ex., nombre de motifs de compromission) Et les V.D. : - décision de déclarer la sécurité et le développement de l’enfant compromis; - décision d’ordonner le placement de l’enfant. Résultats descriptifs Vulnérabilité de l’enfant « Quant à ses caractéristiques personnelles et son âge, X a deux ans. Elle dépend entièrement de ses donneurs de soins. Elle n’est pas en mesure de parler si quelque chose lui arrive. Elle est donc hautement vulnérable. » (193096, SDC) Dynamique familiale « [La mère de l’enfant] dépend grandement de sa mère et de son beau-père tant au niveau matériel qu’affectif. Cette dépendance a un impact important sur sa capacité de protection de son bébé. » (193096, SDC) Capacité de protection du parent non-abuseur (surtout des mères) « Hormis, la capacité de la mère à protéger adéquatement ses enfants, on ne semble pas lui reprocher autre chose. Toutefois, il s’agit d’un élément important soit de laisser son enfant avec un potentiel suspect d’agression. » (203689, SDC) « La rétractation de la mère de X est compréhensible dans les circonstances. L’adolescente vit une grande culpabilité lorsqu’elle voit les impacts du dévoilement. Toutefois, du point de vue de son bébé, il reste que la capacité et la volonté de sa mère de mettre un terme à la situation de compromission en sont affectées. L’adolescente niant les gestes ne prend pas les moyens pour les faire cesser puisqu’elle refuse de recevoir les services offerts par l’ivac. Elle laisse également X seule avec son beau-père malgré ses craintes exprimées. » (193096, SDC) Risque d’agir sexuel « La preuve révèle donc que le père peut être impulsif et agressif au point d’agresser sexuellement des conjointes qui sont majeures avec qui il est en relation. » (207153, SDNC) « Le Tribunal en arrive à cette conclusion positive du fait que le père nie catégoriquement avoir abusé de son fils alors que le tribunal conclut le contraire, qu’il ne se reconnaît généralement aucune difficulté et que sa famille se range derrière lui. Il faut ajouter son tempérament bouillant, « péteux de coche ». Ce sont indéniablement là des facteurs de risque sérieux. » (16441, SDC) Collaboration des parents « Il faut souligner qu’elle n’est pas convaincue qu’il soit responsable des gestes qui lui sont reprochés, car elle a eu plusieurs autres fréquentations durant cette période. Toutefois, elle ne désire pas fournir la liste de ces personnes aux policiers. Ce faisant, elle ne collabore pas à trouver le responsable de l’agression de sa fille, et ce, sous prétexte qu’elle est tannée de cette histoire. Cela est tout à fait incompréhensible et discutable comme attitude de la part de la mère. » (203689, SDC Parole de l’enfant « X désire ardemment aller vivre chez sa mère le plus tôt possible, tout en entretenant des contacts avec son père. Elle a dit à la travailleuse sociale [intervenante 3] qu’elle voulait voir son père plus souvent. Dans son témoignage, elle ne demande pas à ce que de tels contacts soient supervisés. » (18855, SDNC) Rôle de la mère (normes sociales qui traduisent des attentes importantes) « d’abord, elle doit se mobiliser pour être en mesure de réguler ses propres émotions et cesser de faire vivre ses sautes d’humeur aux enfants. Elle doit se montrer sécurisante, rassurante et leur offrir un milieu de vie calme. Elle doit assurer les suivis de santé et les suivis scolaires dont ils ont besoin. Finalement, il est primordial que les enfants ne soient plus exposés à un risque d’abus sexuel par qui que ce soit. » (1810934, SDC) Discussion En cohérence avec les résultats de Fallon et ses collaborateurs (2011), les enfants RAS présentent peu de difficultés psychosociales et vivent dans des situations familiales plus complexes La vulnérabilité de l’enfant est prise en compte par le juge dans l’analyse du risque o La vulnérabilité de l’enfant perçu par les professionnels du DPJ et par le juge pourrait contribuer à l’exclure des procédures et donc, à limiter l’exercice de leur droit à être entendu (Gouvernement du Québec, 2021; Paré 2020) – La collaboration des parents occupe une place importante du processus décisionnel o Facteur associé aux capacités de protection de la mère (Coohey, 2006) o Collaboration unidirectionnelle qui s’inscrit dans un contexte d’autorité Les normes sociales à l’égard des mères non-abuseuses qui se dégagent de l’analyse qualitative témoignent des relations de pouvoir basées sur le genre dans le contexte des ASE (Azzopardi, 2022; Henry et al., 2020) LES PARTIES NON REPRÉSENTÉES ET LES PARTIES SUJETTES À AUTORISATION Pertinence du sujet Les juristes doivent souvent traiter avec des personnes dont la personnalité est difficile. Certains justiciables présentant des difficultés relationnelles affichent plus de difficultés à gérer et à solutionner leurs conflits Le stress des conflits à teneur juridique accentue les symptômes de détresse psychologique et certains de traits de personnalité. Les juristes se retrouvent parfois en conflit avec leur propre client Identifier sommairement la nature du trouble aide le/la juriste à réagir adéquatement Règles de base pour tous Respect et politesse Patience en termes de semaine, souvent pas préparé. Ajournement du juge. Transparence et familiarisation, verbalisation, ne pas attiser la méfiance. Cohésion, mettre les menaces à exécution, suivre l’échéance Souplesse procédurale (ce qui n’englobe pas les règles de preuve et le droit substantiel) LE RÔLE DE L’AVOCAT Information : genre de traducteur, gérer les attentes, mieux comprendre leurs situations et ce qui sera décidé par le juge. Soutien technique : délai, mécanique, rouage, écriture de procédure. LA PARTIE NON-REPRÉSENTÉE (OU AUTO-REPRÉSENTÉE) Partie à une procédure contentieuse qui agit devant les tribunaux sans être représentée par avocat/e. Droit constitutionnelle d’agir en justice sans mandater quelqu’un, pas nécessairement une personne du barreau (exception). Souvent incapable de suivre la procédure ou dépassé. Nécessairement une personne physique, puisque les personnes morales doivent être représentées par avocat (87 C.p.c.) 23 C.p.c. : Les personnes physiques peuvent agir pour elles-mêmes devant les tribunaux sans être représentées; elles doivent le faire dans le respect de la procédure établie par le Code et les règlements pris en son application. (principe directeur) Un phénomène en croissance L’accès à la justice et l’autoreprésentation sont des phénomènes grandissants dans plusieurs pays, incluant le Canada (Birnbaum, Bala, & Bertrand, 2012) Phénomène qui a été documenté tant en matière criminelle qu’en matière civile Phénomène important: o 35-43 % des parties en matière familiale (63% en Ontario) (Farrow, Currie, Aylwin, Jacobs, Northrup, & Moore, 2016; Ontario Report on Civil Needs, 2010; Reid & Malcolmson, 2008) o 15% des parties en matière criminelle (cs) o Au moins autant en Cour du Québec et devant les tribunaux administratifs o De plus en plus en Cour d’appel et même en Cour suprême Facteurs économiques Le facteur le plus fréquemment énoncé (Birnbaum & Bala, 2012) Coûts élevés des avocats (Birnbaum & Bala, 2012; Farrow, Currie, Aylwin, Jacobs, Northrup & Moore, 2016) Épuisement du budget bien avant la tenue du procès Accès à l’Aide juridique plus ou moins généreux (Ontario vs Québec) Facteurs personnels Désaccords irréconciliables entre le client et son avocat Volonté de soutenir une position contraire aux principes d’un avocat Transfert d’avocat en avocat, qui décourage le prochain pressenti Perception par la PNR que son affaire est simple, facile à débattre (accès aux outils) Perception que le/la juge va pallier l’absence de l’avocat Colère… quérulence Taux de non-représentation Birnbaum, R., Poitras, K., Saini, M., Bala, N. Et Cyr, F. (2021) Views and Experiences of Parents in the Family Justice Process in Ontario and Quebec: Report on the First Stage of a Longitudinal Research Project, Journal of Divorce & Remarriage, 62:7, 532-550 Objectif: décrire l’expérience du système de justice familiale chez les justiciables (représentés et non représentés) et examiner leurs préoccupations Temps 1: questionnaire de 35 éléments, complété avec les justiciables présents dans les palais de justice du Québec (Montréal, Laval, Longueuil, Sherbrooke et Québec) et de l’Ontario (Toronto, Windsor, London) Temps 2: suivi longitudinal après 6 et 12 mois: entretiens de recherche Les participants ont été recrutés dans les palais de justice Ontario : n = 865; Québec : n = 674 Ontario : 63 % non représentés; le taux est nettement supérieur chez les hommes Québec : 14,0% non représentés Plus de justiciables sont représentés au Québec (86%) qu’en Ontario (37%) Aide juridique et accès aux avocats semblent expliquer cette différence importante Motifs pour se représenter seul en matière familiale Ne peuvent assumer les coûts d’un avocat et ne sont pas éligibles à l’Aide juridique Attendent de voir s’il y aura contestation Sentent qu’un avocat va augmenter les coûts et le temps requis par la résolution du problème Autres raisons (2-5% des justiciables): o Veulent traiter directement avec l’autre partie (dynamique de violence) o Considèrent qu’ils connaissent suffisamment le droit familial pour se représenter; o N’ont pas suffisamment de temps pour traiter avec un avocat; o Croient qu’un avocat viendra amplifier le conflit et la complexité des procédures Frustrations exprimées par les parties non-représentées «The court system is extremely biased and subjective: If you have a lawyer, you are more likely to win » (male) « Lawyers add fuel to the flame » (male) « Everything takes too long. People in different income brackets get treated differently » (female) Aurait-il dû mandater un avocat? « …..Forms are designed for lawyers. The family court system assumes that everyone should have a lawyer or that everyone has a lawyer…hard to represent yourself in a system like this… » « Either lawyers should charge less; or there should be more legal aid. Something’s gotta give, or they can’t say it’s really justice, right? » « It’s time wasting, frustrating and ineffective when you’re on your own and if you do not know what you are doing » Autres constats de l’étude Certains justiciables non-représentées (surtout les hommes) sont des « do-it yourselfers » Se représentent seuls même s’ils ont les moyens d’assumer les honoraires d’un avocat Croient pouvoir obtenir de bons résultats, voire de meilleurs résultats, sans avocat Certains recherchent la confrontation directe avec l’autre partie Recette pour l’échec? (Prof. Emmanuelle Bernheim, UQÀM, après analyse de 25 000 jugements de la Cour supérieure, chambre civile) 7% de succès pour une PNR en défense affrontant une partie représentée par avocat 16% de succès en défense pour une PNR affrontant une autre PNR 70% de succès en demande pour une PNR affrontant une autre PNR Sur les 25 000 dossiers, près de 15 000 impliquent au moins une PNR La Prof. Bernheim retient qu’un biais structurel favorise les PNR en demande, mieux préparées que les PNR en défense La Prof. Bernheim relève que certains avocats refusent de collaborer avec une PNR adversaire Défis auxquels la PNR est confrontée Difficultés à lire les documents, à les comprendre, à rédiger des actes de procédure succincts et intelligibles Méconnaissance du droit substantiel, des règles de procédure, des règles de preuve Risques de lacunes et oublis (C.p.c., art. 268, 323) Attentes irréalistes quant au résultat et aux pouvoirs du juge de faciliter le débat Absence de distanciation entre ses arguments et son expérience du litige Confusion des rôles et des étapes (contre-interroger son ex-conjoint, plaider une fois la preuve close généralement) Unilinguisme et vouvoiement Défis de l’avocat/e qui fait face à une PNR L’avocat a un Code de déontologie, la PNR n’en a pas L’accroissement de communications inefficaces L’avocat est parfois (mal) cité, hors contexte (discussions de règlement) D’où l’importance accrue de tout confirmer par écrit Certaines procédures requièrent la collaboration de toutes les parties Pente glissante quand l’avocat aide la PNR à accomplir sa part Réaction d’incompréhension et d’hostilité du client de l’avocat Audience non paritaire durant laquelle le/la juge consacre du temps et de l’énergie à donner des explications à la PNR, dont l’avocat/e n’a pas besoin (ex. : ce qu’est le contre-interrogatoire, impact de déclarer la preuve close généralement) Le Code de déontologie de l’avocat/e Art. 4. L’avocat agit avec honneur, dignité, respect, modération et courtoisie. Art. 119. L’avocat ne doit pas agir de manière à induire en erreur une partie ou son avocat, ou de manière à surprendre leur bonne foi. Zones grises Initiatives de l’avocat de la partie adverse auxquelles la PNR pourrait objecter, ce qu’elle ignore Preuve documentaire contrevenant aux règles de preuve ou de procédure Questions formulées irrégulièrement Arguments ou conclusions en droit qui n’ont pas été annoncées convenablement Abus possibles au détriment de la PNR Accrocs aux règles concernant les délais et la production de documents Exagération quant aux questions suggestives ou autrement illégales Objections intempestives pour désarçonner la PNR Communication au/à la juge de communications confidentielles Pouvoirs d’intervention que le/la juge doit utiliser avec circonspection (ex.: objections) Nouvelles règles pour la PNR qui contre-interroge son conjoint ou sa conjointe Droit de la famille-212413, 2021 QCSC 5330 commission d’office d’un avocat payé par l’aide juridique, soumettre les questions à l’avocat et contre-interroge pour lui. 278 C.p.c. Un témoin a droit à la protection du tribunal contre toute manœuvre d’intimidation lors de son témoignage et contre tout interrogatoire abusif. Le tribunal peut, sur demande ou d’office, empêcher une partie non représentée d’interroger ou de contreinterroger l’autre partie ou un enfant, lorsqu’elle est visée par un acte d’accusation ou assujettie à une ordonnance, à une promesse ou à un engagement prévu au Code criminel (L.R.C. 1985, c. C46) concernant cette autre partie ou cet enfant en lien avec de la violence familiale, y compris conjugale, ou en lien avec de la violence sexuelle, ou lorsqu’elle est assujettie à une ordonnance civile de protection ou visée par une demande, une entente ou une décision relative à la protection de la jeunesse concernant également cette autre partie ou cet enfant ou lorsque le tribunal considère qu’un tel contexte de violence existe. Le cas échéant, le tribunal ordonne qu’un avocat soit désigné pour procéder à l’interrogatoire ou au contre-interrogatoire. L’obligation d’informer L’état de la jurisprudence correspond à la position exprimée dans l’Énoncé de principes concernant les plaideurs et les accusés non représentés par un avocat (2006) du Conseil canadien de la magistrature : « Les juges, les tribunaux et les autres participants au système judiciaire ont la responsabilité de s’assurer que toutes les personnes, qu’elles soient représentées ou non, puissent comprendre et présenter efficacement leur cause. » « Ce devoir a toutefois ses limites, le juge ne pouvant jouer à la fois le rôle de l’avocat et celui de l’arbitre impartial du débat qui se déroule devant lui », Guenette c. R, 2002 canlii 7883 (QCCA) au para 21 Le juge ne doit pas fournir de conseils juridiques, Droit de la famille — 11418, 2011 QCCA 338 Le juge ne doit pas expliquer les avantages et les désavantages d’une stratégie particulière, Guenette c. R, 2002 canlii 7883 (QCCA) Le juge ne doit pas donner de conseils juridiques indirectement par l’entremise d’un amicus curiae (quelqu’un qui va éduquer le tribunal et faire valoir des connaissances théorique), Ontario c. Criminal Lawyers’ Association of Ontario, 2013 CSC 43 Le degré d’intensité de l’obligation du tribunal doit être évalué au cas par cas l’obligation d’informer Défis du/de la juge Conseil canadien de la magistrature, Énoncé de principe concernant les plaideurs et les accusés non représentés par avocat (2006) Renseigner et fournir assistance raisonnable mais sans conseiller, sans la favoriser ni la défavoriser, sans alléger les règles de preuve, de procédure et de droit substantiel (=Équité procédurale) Matière criminelle : Parkinson-Makara c. R., 2012 QCCA 2011 Matière civile et administrative : Ménard c. Gardner, 2012 QCCA 1546 Garder à l’esprit que toutes les parties ont droit à un procès “correct” La jurisprudence en matière de déontologie judiciaire illustre que plusieurs PNR ont mal compris le rôle du juge durant le procès. Williams c. Valeurs mobilières Desjardins inc. 2019 QCCA 1842 (13) ...Il est vrai qu’un tribunal de première instance siégeant en matière civile doit apporter une certaine assistance à une personne qui agit en justice sans avocat ou avocate et faire montre d’une certaine indulgence. Il n’a pas pour autant à remédier à tous les inconvénients découlant d’une telle situation ni à conseiller le justiciable, et il ne pourrait d’ailleurs le faire sans risquer de franchir les limites que lui impose son devoir d’impartialité… André c. Centre de santé et de services sociaux de Laval, 2018 QCCA 1589; Droit de la famille - 16532, 2016 QCCA 417; Green c. Agence du revenu du Québec, 2019 QCCA 466. Approche optimale de l’avocat/e face à une PNR Manifester du respect et réclamer la réciprocité S’abstenir de faussetés, d’exagérations et de menaces excessives Fournir des efforts en vue de simplifier plutôt que de compliquer les choses simples S’entendre sur une façon de correspondre et d’échanger, avant de tenter de s’entendre sur le fond du litige Confirmer par écrit et réclamer la réciprocité Ne pas se formaliser d’agir comme paratonnerre Rester zen Ressources pour les PNR (ne règles pas les problèmes au fond) Aide juridique Pro Bono Québec Éducaloi Guides « Seul devant la Cour » (matières civile, familiale et criminelle) Services de référence du Barreau (Québec, Montréal, Longueuil, Province) Ligne info-juridique de la Chambre des notaires Centres de justice de proximité (Québec, Montréal, Rimouski, Trois-Rivières, Jonquière, Brossard, Sept-Îles, Chandler, Saint-Jérôme, Inukjuak, Gatineau) SAGE (Service d’avocats de garde) (en lien avec les salles 2.11 et 2.12, Montréal seulement) Tenter d’endiguer le phénomène des PNR Expliquer la valeur ajoutée de l’avocat/e et en faire la promotion La Magistrature doit faire sa part, le Barreau également Expliquer les défis auxquels une PNR doit se préparer Discuter de l’option des mandats à portée limitée (“unbundling”) (Boyd, 2018) Référer aux outils de référence disponibles Proposer des arrangements budgétaires Les juges proactifs : Qui posent des questions et donnent des explications Qui traduisent quand il le faut Qui font montre d’empathie Qui recourent à la « technique du miroir » Qui assouplissent les règles de procédure Qui agissent comme « pacificateur » entre les avocats et les PNR, au besoin Bernheim, E., Laniel, R.-A. Et Jannard, L.-P. « Les justiciables non représentés face à la justice : une étude ethnographique du Tribunal administratif du Québec » (2018) Revue des affaires sociales et juridiques de Windsor 67. Vignette Un couple parental avec deux enfants est impliqué dans un litige en matière familial. Aucun des parents n’est représenté par un avocat. La mère demande que l’accès aux enfants soit supervisé à cause d’antécédents de violence conjugale. Le père dément les allégations de violence conjugale et demande la garde partagée des enfants; il déplore l’instabilité affective de la mère. Le premier jour du procès, le père est bien organisé; ses documents sont en ordre. La mère, très perturbée, assure qu’elle n’est pas capable de faire directement affaire avec son ex-époux et refuse d’être contreinterrogée de cette façon. 1. Quels défis peut-on anticiper? Y a-t-il des défis spécifiques à la mère? Au père? 2. Quelles sont les principales consignes à donner? Y en a-t-il qui sont particulièrement pertinentes pour la mère? Pour le père? 3. Que peut-on faire pour rendre l’audience plus efficace? 4. Que peut-on faire pour rehausser leur sentiment de justice, le sentiment d’avoir été traité de manière équitable? Scinder, 278 C.p.c., informer, faire des propositions, assouplir la procédure, écouter le père et la mère faire leur interrogatoire et reporter le contre-interrogatoire, gestion d’instance et mesure de sauvegarde LES PLAIDEURS SUJETS À AUTORISATION (QUÉRULENTS) VEXATIOUS LITIGANTS Définitions de la quérulence Réaction hostile et revendicatrice de certains sujets qui se croient lésés, considèrent qu’il y a sousestimation dans l’appréciation du préjudice causé et passent facilement de la plainte à l’attaque. “Le quérulent fait référence à un plaignant infatigable en procédures abusives, multipliant les recours et les plaintes; il a une volonté irréductible d’obtenir réparation très au-delà d’un registre acceptable pour un tort ou une injustice perçus”. (Gamache et Villeneuve, 2018) Description de la quérulence (Lester, 2017) Plaintes persistantes et acharnées auprès des tribunaux ou d’agences (gouvernementales, groupes de défense, etc.), avec des éléments de « contagion » Croyance d’avoir subi une perte ou une injustice, et ce, depuis une période d’au moins six mois Objectifs = compensation, réparation ou vengeance, justice parfaite Maintien actif du lien de persécution o Au moins une sphère de vie importante affectée o Gestes associés à détresse ou perturbations significatives chez les personnes/ organisations ciblés par les plaintes. Prévalence 5 à 6 % de clients présentent quelques formes de comportements quérulents (cité dans Lester et al.; 2004) o Tableau clinique complet = 0,1 à 0,2 % o Les protecteurs des citoyens estiment que ces clients mobilisent de 15 à 20% de leur temps Prévalence de la quérulence dans la population psychiatrique: entre 0,02 % et 0,7 % (Lester, 2017) Utilisation démesurée des ressources judiciaires Distinction entre le quérulent et le persistant (Lester, 2017) Caractéristiques de la quérulence selon Morissette (jurisprudence québécoise) Le plaideur quérulent fait preuve d’opiniâtreté et de narcissisme; Il se manifeste plutôt en demande qu’en défense; Il multiplie les recours vexatoires contre tous ceux qui croisent sa route, y incluant les avocats et les juges; Il reprend les mêmes questions par des recours successifs et recherche les mêmes résultats malgré l’échec de ses procédures antérieures; Ses arguments sont souvent inventifs et incongrus; Il porte les décisions défavorables en appel, en demande la révision ou la rétractation. Quérulence et santé mentale Villeneuve, & Gamache, 2018 Généralement déclenchée par un revers dans la vie personnelle, familiale ou professionnelle. o La quérulence fait suite à l’expérience d’un préjudice qui, même minime, revêt une portée traumatique (Lévy, 2015) Contamination des objets de litige Ce n’est pas un des troubles de santé mentale o Le trouble délirant de type persécution incluait la mention de « paranoïa quérulente ». Celle-ci disparaît dans la cinquième édition du manuel (DSM-5, American Psychiatric Association, 2013). La classification internationale des maladies (CIM-10) reconnait à la paranoia querulans un statut autonome et distinct du délire de persécution Quérulence primaire (Lester, 2017) et quérulence secondaire (verdict qui agit comme brèche et mène à la multiplication) à la présence d’indices psychopathologiques Distinctions : o Trouble de pensée: relation de persécution à l’objet de revendication; totale absence d’autocritique, hostilité peut être présente; terreau fertile o Trouble de la personnalité: relation de domination à l’objet de revendication; absence d’autocritique; hostilité omniprésente o Causes de la quérulence Souvent, au départ, une véritable injustice que le système judiciaire n’a pas solutionnée de façon satisfaisante (rupture conjugale, garde d’enfants, congédiement, perte d’un actif important) Litige à haute intensité émotionnelle, qui met en cause l’estime de soi, qui dépasse la capacité de résilience de l’individu Trouble de la personnalité : paranoïa, narcissisme, grandiosité, trouble délirant, trouble caractériel (rarement diagnostiqué dans le cadre judiciaire) Caractéristiques psychologiques du quérulent Constellation de traits de personnalité à l’avant-plan chez le quérulent : attitudes hostiles et envieuses, défenses projectives, sentiment d’amertume pour les torts subis par le passé et fantaisies de vengeance. Facteurs pronostiques défavorables au traitement (Gamache et al., 2017; Gamache, Savard, Lemelin, Côté, & Villeneuve, 2018) persuader qu’il a raison, rigidité et peu perméable à l’intervention. Facteurs contextuels Les protecteurs du citoyen : accès sans frais ET Accès facilité à la justice (ex: services d’information judiciaire, auto-représentation, plaintes disciplinaires, etc.) Moyens technologiques donnant accès à une quantité de preuves documentaires (courriels, messagerie, enregistrements audio, vidéo, etc.) Et permettant de disséminer le point de vue à d’innombrables destinataires. Les cibles du quérulent La partie adverse et son avocat/e Son propre avocat (incompétent, négligent, corrompu par la partie adverse) Sa propre association de salariés (qui l’a mal représenté) Les témoins (profanes et experts) défavorables à son point de vue Les fonctionnaires qui ont fourni des renseignements à la partie adverse Les juges ayant décidé défavorablement, en première instance et en appel Les juges en chef, impliqués dans la conspiration Les ministres et premiers ministres, qui omettent d’intervenir Les journalistes, qui pervertissent les faits Armes typiques du quérulent Colère, hostilité, refus de faire des compromis et de conclure des ententes Méfiance envers ceux et celles qui détiennent le pouvoir de solutionner son litige Insultes envers quiconque manifeste un désaccord Refus de se conformer aux règles, directives, ordonnances de gestion Refus de se conformer aux échéances procédurales Propension à mentir, à tricher, à altérer des documents (puisque ses adversaires font pire) Procès d’intention envers tous ceux qui participent au complot contre lui Procédures répétitives, excessivement longues, qui remontent chaque fois dans le temps Mehrdad Golzarian Citoyen canadien d’origine iranienne. Embauché comme policier, juin 1992. Dernier jour travaillé, décembre 1997 Plainte à la Commission des droits de la personne, novembre 1998. Rapport de l’enquêteur concluant à discrimination et harcèlement, décembre 2000 (refus par la SQ d’honorer les recommandations) Perte d’emploi (congédiement? Refus de reprendre le travail après un congé maladie?), 2002 Désistement du grief de congédiement à la veille de l’audition, août 2003 Premières procédures en CS, 2002. 10 jugements de la CS, de 2002 à 2016, 14 arrêts de la CA, de 2003 à 2018 et 4 tentatives infructueuses de saisir la CSC Poursuites contre le PGQ et l’Association des policiers provinciaux M. Golzarian a perdu sur toute la ligne 2018 QCCA 2017 : la fin de la saga? Non! 2021 QCCS 1459: déclaration d’abus procédural (pas quérulent) 2021 QCCA 1370: rejet de l’appel et condamnation à des dommages et intérêts L’approche albertaine* Phénomène plus intense dans l’Ouest canadien (influence des États-Unis) Jugement historique du juge en chef associé Rooke en 2012 dans Meads Création à la Cour du banc du Roi du poste de conseiller en gestion de litiges complexes (Complex Litigant Management Counsel) Le Québec serait bon deuxième Meads c. Meads, 2012 ABQB 571 Jugement de 180 pages, 736 paragraphes : mise en garde à la communauté juridique nord-américaine Litige conjugal interminable (couple marié, 30 ans de vie commune, six enfants dont deux encore mineurs) Documents de M. Meads défiant les autorités judiciaires (juges et officiers de justice) et affirmant n’être soumis qu’aux lois divines et non celles des humains Longue analyse par le juge en chef Rooke des divers groupes de OPCA (Organized Pseudolegal Commercial Argument Litigants) et de leur argumentaire Cliques dirigées par un gourou qui prétend détenir un « truc » permettant de neutraliser le système judiciaire Detaxers, Freemen-on-the-Land, Sovereign Citizens, Church of the Ecumenical Redemption International, Moorish Law Citoyen face à un tribunal dépourvu d’autorité pour le contraindre par jugement ou autrement Citoyen lié à l’État par un contrat auquel ce citoyen ne consent pas Paradoxalement, citoyen imposant unilatéralement aux autres un contrat stipulant de lourdes amendes si on lui déplaît Fléau qui requiert une réaction vigoureuse du système judiciaire Propos du conseiller spécial Netolitzky en 2023 (Donald J. Netolitzky, un microbiologiste et non un juriste) Initiative en Cour du banc du Roi de référer à ce conseiller tous les dossiers où un quérulent semble présent (conseille les juges) Ces quérulents tendent à s’éloigner de l’enjeu objectif du litige, pour invoquer la Charte canadienne et les droits de la personne, pour se plaindre de l’attitude biaisée des acteurs judiciaires et de leurs activités criminelles (collusion, corruption) Leur présence requiert une gestion hâtive, ferme, proportionnée, progressive et adaptée selon la catégorie à laquelle chacun appartient Nécessité de désigner un greffier chargé de détecter des procédures et arguments quérulents dès leur dépôt au dossier Tout documenter (par écrit) Catégories de Netolitzky 1) Justiciables souffrant de limitations psychiatriques (qui déforment leur perception de leur situation réelle) 2) Quérulents dont la paranoïa est alimentée par le litige lui-même (qui se proposent souvent comme porteétendard - mais de qui?) 3) Plaideurs abusifs motivés par l’idéologie, les convictions, la philosophie politique et sociale (qui font appel au tribunal de l’opinion publique) 4) Justiciables recherchant un gain pécuniaire (chantage, extorsion de la partie adverse) 5) Justiciables terroristes (cherchant surtout à embourber le système judiciaire) Jurisprudence récente et lectures additionnelles College of Registered Nurses of Manitoba c. Hancock, 2023 MBCA 70 Unrau c. National Dental Examining Board, 2019 ABQB 283 Droit de la famille-2154, 2021 QCCS 172 S. Guillemard et B. Lévy, La quérulence : Quand le droit et la psychiatrie se rencontrent, PUL, 2023 Sanctions possibles par les tribunaux Rejet sommaire des procédures et ordonnance de demander au juge en chef Gestion de l’instance rigoureuse pour élaguer les volets abusifs Dommages punitifs Condamnation ou cautionnement aux frais de justice et aux honoraires extrajudiciaires Amendes (règle albertaine) Déclaration de quérulence Déclaration d’inhabileté de l’avocat agissant pour le quérulent Registre public des plaideurs sujets à autorisation de la Cour d’appel du Québec, de la Cour supérieure du Québec, de la Cour du Québec, des Cours municipales du Québec Règles procédurales régissant les quérulents (Québec) Cpc arts. 51 à 56 Règlement de la Cour supérieure du Québec en matière civile, arts. 68 à 75 Registre public des personnes assujetties à une demande d’autorisation (CA, CS, CQ, CM) Toute personne inscrite au registre doit préalablement faire approuver ses nouveaux actes de procédure par le ou la juge en chef La Cour supérieure a compétence pour rendre des ordonnances régissant les procédures devant toutes les instances soumises à son pouvoir de surveillance Règles déclarées constitutionnelles Grenier c. PGQ, 2018 QCCA 266 (autorisation de pourvoi refusée par la CSC) Tout justiciable a le droit d’ester en justice sans être représenté Ce droit n’est pas absolu La Constitution ne protège pas le droit d’exercer un recours abusif Nul n’a le droit d’infliger indûment à autrui le feu nourri de recours abusifs Le maintien en tout temps de la dignité et de l’autorité de l’appareil judiciaire constitue une condition inaltérable de l’usage que quiconque prétend en faire Le quérulent ne peut se plaindre de stigmatisation publique parce que le Registre regroupe des jugements qui étaient déjà publics Conclusions typiques envers un quérulent Droit de la famille - 141961, 2014 QCCS 3773, confirmé en appel 2016 QCCA 1168 Ordonnance de protection, quant à toutes les instances judiciaires et administratives, en faveur de L’ex-conjointe et les enfants L’avocate actuelle de Madame, l’avocate des enfants et tous ceux les ayant précédés au dossier Tous les juges impliqués dans le dossier, tant personnellement qu’ès qualités Exécution provisoire malgré appel Les juges ne peuvent tout régler seuls Les clients sont réticents à défrayer des coûts supplémentaires pour partir en guerre contre le quérulent Mais il faut plus souvent qu’autrement une demande documentée et appuyée de déclarations assermentées À moins que le dossier soit déjà en gestion particulière, les juges qui se succèdent au même dossier sont difficilement en mesure de saisir la balle au bond Il faut demander au juge de rédiger un procès-verbal détaillé pour bien renseigner le prochain juge au dossier Psychologie des modes de PRD Le rôle du droit et du système de justice 1. Assurer la prévisibilité des comportements sociaux /réguler les relations sociales, encadrer, diriger, orienter 2. Construire/baliser le cadre du bien commun; 3. Sanctionner les abus 4. Répondre aux besoins de justice – créer un sentiment de justice, permet d’avoir confiance L’adjudication ne donne pas satisfaction, laisses-en appétit, pas la solution unique et miraculeuse Pourquoi? L’émergence de la justice participative « Selon les résultats de ces consultations, les Canadiens et les Canadiennes souhaitent pouvoir choisir entre plusieurs modes de résolution des conflits, et nombre d’entre eux veulent avoir la possibilité de participer activement au processus de résolution. La Commission croit que la justice participative, en mettant l’accent sur le rétablissement des rapports interpersonnels par le dialogue et sur l’acceptation par les parties de solutions qu’elles ont elles-mêmes élaborées, répond à ce besoin. » Canada, Commission du droit du Canada, La transformation des rapports humains par la justice participative, Ottawa, 2003. Vers une vision renouvelée de l’accès à la justice au canada À partir de 2013 D’un point de vue historique, l’accès à la justice est un concept axé sur le système de justice officiel (les cours, les tribunaux, les avocats et les juges) et sur ses procédures. Bien entendu, ce système officiel est important. Mais une vision plus large, et qui soit basée sur les utilisateurs, d’un système de justice en matière civile et familiale accessible est nécessaire. Le point de départ du Comité d’action, auquel il est constamment revenu, est l’éventail large des problèmes juridiques que rencontre le public – et non seulement ceux à l’égard desquels les tribunaux rendent des décisions. D’après les recherches et les consultations menées dans le cadre du projet Avenirs, nous avons découvert que les clients demandent : Des frais moins élevés et une certitude quant aux frais à payer (valeur et prévisibilité); Des renseignements plus clairs sur le processus et l’utilisation de technologies et de procédés qu’ils connaissent bien (clarté, transparence et connaissance); Des résultats (compétence et expérience); Un rôle à jouer (participation au processus); Du respect (un partenariat mutuel plutôt qu’une approche autoritaire) Les clients recherchent aussi encore un soutien non juridique pendant qu’ils sont aux prises avec l’incertitude, les émotions et les complexités que suscite un processus juridique. Ils veulent de l’accès, de l’empathie et un contact personnel avec des avec des avocats qui peuvent montrer qu’ils ont une vision et une compréhension globale de la situation et des besoins du client. Code de procédure civile du Québec (2016) Disposition préliminaire : Le Code vise à permettre, dans l’intérêt public, la prévention et le règlement des différends et des litiges, par des procédés adéquats, efficients, empreints d’esprit de justice et favorisant la participation des personnes. Il vise également à assurer l’accessibilité, la qualité et la célérité de la justice civile, l’application juste, simple, proportionnée et économique de la procédure et l’exercice des droits des parties dans un esprit de coopération et d’équilibre, ainsi que le respect des personnes qui apportent leur concours à la justice. L’obligation continue de considérer le règlement à l’amiable Les parties doivent considérer de manière continue le règlement à l’amiable et coopérer. 1. Les parties doivent considérer les modes privés de PRD avant de s’adresser aux tribunaux. 2. Les parties ont l’obligation de « coopérer activement dans la recherche d’une solution et, le cas échéant, dans l’élaboration et l’application d’un protocole préjudiciaire. » 19. (Les parties) peuvent à tout moment de l’instance, (…) choisir de régler leur litige en ayant recours à un mode privé de PRD ou à la conciliation judiciaire. 148. Les parties sont tenues de coopérer pour régler l’affaire et d’indiquer la considération portée aux modes de PRD. L’avocat a une obligation d’informer et de conseiller en continue sur les moyens pour régler 42 Code de déontologie. Tout au cours du mandat, l’avocat informe et conseille le client sur l’ensemble des moyens disponibles pour régler son différend, dont l’opportunité de recourir aux modes de prévention et de règlement des différends. Les intérêts économiques et les besoins. Liquidités nécessaires à court terme Solvabilité et recouvrement de créance incertain Disparité de ressources disponibles importantes (argent et liquidités, accès à un avocat, accès à des tiers influents) entre les parties au litige Impact négatif sur la réputation (personnelle, milieu de travail, commerciale, etc.) ou le capital de sympathie (politique, familial, etc.) Acceptabilité sociale d’un projet controversé Relations à préserver (amicales, chaînes d’approvisionnement, travail, référencement, etc.) Les excuses peuvent être exprimées directement et favoriser le règlement d’un litige Art. 2853.1 C.C.Q. « Une excuse ne peut constituer un aveu. De plus, elle ne peut être admise en preuve, avoir d’incidence sur la détermination de la faute ou de la responsabilité, interrompre la prescription ou annuler ou diminuer la garantie d’assurance à laquelle un assuré ou un tiers a droit. Constitue une excuse toute manifestation expresse ou implicite de sympathie ou de regret. » Conclusions: (1) les excuses sont inadmissibles comme aveu et (2) inadmissibles pour faire la preuve d’un fait. Au Canada seules 3 provinces, territoires n’ont pas une disposition législative sur les excuses (N-B, IPE, Yukon). Aux États-Unis, 36 états ont une législation sur le sujet. Les excuses peuvent être utiles au règlement des litiges notamment en matière de diffamation, responsabilité professionnelle médicale, en génie civil ou architecture, etc., droit du travail (harcèlement, congédiement déguisé, etc.), litige entre associés d’affaires ou actionnaires, litige familial ou successoral, violence sexuelle ou conjugale, communautés religieuses, etc. Permet aux « victimes » de tourner la page, et donner un sens à un évènement injuste… surtout si on a l’assurance qu’il ne se reproduira pas… Le demandeur ne veut pas toujours de l’argent Tamara Relis, Perceptions in Litigation and Mediation, Cambridge University Press, 2009 et 2011 Traitant de poursuites en dommages-intérêts contre des médecins et des hôpitaux Le demandeur ne recherche pas toujours une grosse indemnité pécuniaire : Il veut qu’on lui explique ce qui est arrivé, que le fautif lui offre des excuses, être rassuré que des correctifs sont apportés pour éviter à d’autres de subir la même chose Souvent le défendeur aimerait s’excuser Le problème concret : l’assureur interdit à son assuré de discuter avec le demandeur, et surtout pas pour avouer quoi que ce soit. Le demandeur se considère face à une omerta, ce qui accroît sa perception qu’on lui cache quelque chose de répréhensible. Une solution : la médiation est une avenue permettant des discussions qui ne pourront être invoquées comme des aveux. Le nouvel article 2853.1 C.c.Q. (12 juin 2020) Une excuse ne peut pas constituer un aveu. De plus, elle ne peut être admise en preuve, avoir d’incidence sur la détermination de la faute ou de la responsabilité, interrompre la prescription ou annuler ou diminuer la garantie d’assurance à laquelle l’assuré ou un tiers a droit. Constitue une excuse toute manifestation expresse ou implicite de sympathie ou de regret. Pourquoi cet amendement? Le Québec rejoint un mouvement en Amérique du Nord et en Occident Pour la victime : une forme de réparation « qui n’a pas de prix », qui peut mener au pardon (ou pas) Pour l’auteur de la faute : pour soulager sa conscience, faire acte d’humilité et d’humanité, échapper au châtiment prévisible ou le réduire Pour le système judiciaire : la reconnaissance qu’une norme sociale a été transgressée, une approche qui peut faciliter les règlements hors cour Excuses et « excuses » Les excuses doivent être sincères et être ainsi perçues Les excuses ne doivent pas être mitigées, donc éviter ceci: « Je m’excuse si mes propos légitimes ont pu blesser des gens exagérément sensibles qui se sont sentis indument offensés » Les excuses ne doivent pas être conditionnelles au pardon par la victime Ces dernières années, les Gouvernements et les organismes publics présentent des excuses à des groupes de victimes : Autochtones Employés maltraités Automobilistes et passagers coincés sur l’Autoroute 13 durant la tempête du 14 mars 2017 Rapport de recherche – CS et CQ Satisfaction globale DISTINCTION ENTRE JUSTICIABLES ET AVOCATS Qualité et rapport coûts-bénéfices Réparateur – mieux d’aller au tribunal La médiation est un procédé de justice de même importance que le procès Association de médiation familiale du Québec c. Bouvier, 2021 CSC 54 La mise en vigueur du nouveau Code de procédure civile en 2016 a permis d’élever les modes de prévention et de règlement des différends — dont la médiation familiale — à titre de procédés de justice de même importance que le processus judiciaire traditionnel. Ce virage important dans la culture judiciaire québécoise est explicitement entrepris par le législateur comme mesure d’accès à la justice, visant à rendre le système plus accessible, plus rapide, moins lourd et moins coûteux. Le droit spécial de la médiation familiale se distingue du droit général de la médiation, notamment en ce qu’il ne permet pas aux parties d’être accompagnées de conseillers juridiques durant les séances, mais cela n’est pas incompatible avec l’idée de justice participative et de culture de l’entente. Certes, la confidentialité est nécessaire dans toute médiation pour permettre des échanges francs entre les parties en vue d’encourager les règlements. Toutefois, la protection des personnes vulnérables est assurée non pas par une confidentialité absolue, mais par un ensemble de normes spéciales — certaines d’origine législative, d’autres consacrées par les usages de la pratique et dans le contrat-type de médiation — qui offre des « garanties procédurales » aux conjoints, parents et enfants, tout en assurant la protection de l’ordre public. Comment? La justice réparatrice : mauvaise « bonne idée »? Asseoir ensemble le fautif et la victime, pour se parler « c’est l’idée que la réparation va non seulement réparer les victimes dans leur dignité et leur permettre de faire la paix avec ce qui leur est arrivé et passer à autre chose, mais aussi à aider la personne qui a commis l’offense, parce que ça va lui permettre de mieux connecter avec les victimes et prendre davantage connaissance de ce qu’elle a fait » Prof. Rachel Gagnon, UQÀM, novembre 2022 Inspiré des traditions de plusieurs peuples autochtones Mehmet Ali Agca et le Pape Jean-Paul II (1981) Mais : Certaines victimes n’y sont pas prêtes et en ressortent plus meurtries Certains fautifs sont maladroits et tentent avant tout de se justifier La justice transitionnelle à travers le monde, des succès et des critiques Au Canada, au Rwanda, en République d’Afrique du Sud, en Argentine, au Chili, au Cambodge, au Sierra Leone, etc. Parfois en mode hybride avec des tribunaux habilités à prononcer des condamnations criminelles. Compromis politique pour éviter les tourments sociaux de procès à des milliers de tortionnaires et de génocidaires. Exemplarité d’aveux publics et médiatisés, entremêlés d’excuses plus ou moins sincères. Sentiment d’injustice exprimé par des victimes, réalisant que des criminels échappent à une peine individuelle et continuent de les côtoyer. Dissuasion trop faible, invitant les criminels à tenter leur retour au pouvoir peu après. La médiation / conciliation au Canada CPC (1 à 7, 161 à 165, 535.12, 605 à 619) Art. 1. Les parties doivent considérer le recours aux modes privés de prévention et de règlement de leur différend avant de s'adresser aux tribunaux. Art. 7. Si les parties exercent leur droit d’agir en justice, la demande alors introduite en toute matière autre que familiale est instruite par priorité si elle est accompagnée d’une attestation délivrée par un médiateur accrédité ou par un organisme offrant la médiation en matière civile et confirmant qu’elles ont eu recours à un mode privé de prévention et de règlement des différends ou d’une preuve que les parties ont convenu d’un protocole préjudiciaire. (si tente une médiation et pas réglé peut demander un procès en priorité sauf en matière familiale) Art. 535.12. Une conférence de règlement à l’amiable est tenue au plus tôt 130 jours à compter de la signification de l’avis d’assignation et au plus tard 160 jours à compter de cette signification. Si aucun règlement à l’amiable n’intervient, cette conférence est convertie en conférence préparatoire à l’instruction. 161. CRA (…) si les parties le demandent (…) La charge de présider une conférence de règlement a l’amiable entre dans la mission de conciliation du juge. 162. La conférence de règlement a l’amiable a pour but d’aider les parties à communiquer en vue de mieux comprendre et évaluer leurs besoins, intérêts et positions et à explorer des solutions pouvant conduire a une entente mutuellement satisfaisante pour régler le litige. 163. La conférence est tenue en présence des parties et, si elles le souhaitent, de leurs avocats. Elle a lieu à huis clos, sans frais ni formalités. (…) Tout ce qui est dit, écrit ou fait au cours de la conférence est confidentiel. 164. De concert avec les parties, le juge établit le calendrier des rencontres, les règles applicables à la conférence et les mesures propres à en faciliter le déroulement. 165. Si un règlement à l’amiable intervient, le juge peut, sur demande, homologuer la transaction. Si aucun règlement n’intervient, le juge peut prendre les mesures de gestion appropriées ou, avec le consentement des parties, convertir la conférence de règlement à l’amiable en conférence de gestion. Il ne peut cependant par la suite instruire l’affaire ou décider d’une demande incidente à celle-ci. Médiation obligatoire Règlement sur la médiation et l’arbitrage des demandes relatives à des petites créances Code de procédure civile (chapitre C-25.01, a. 570, 1er al.; 2023, chapitre 3, a. 16) Article 21. Une demande relative au recouvrement d’une petite créance dans laquelle la valeur en litige est d’au plus 5 000$, sans tenir compte des intérêts, est obligatoirement soumise à la médiation avant que l’affaire ne puisse être entendue par le tribunal. Toutefois, une demande n’est pas soumise à la médiation obligatoire dans les cas suivants: 1° l’une des parties a déposé au greffe, conformément au deuxième alinéa de l’article 570 du Code de procédure civile (chapitre C-25.01), une attestation qui confirme qu’elle s’est présentée à un service d’aide aux personnes victimes reconnu par le ministre de la Justice en invoquant être une personne victime de violence conjugale ou sexuelle de la part de l’autre partie; 2° les parties ont demandé que le jugement soit rendu sur le vu du dossier; 3° la demande met en question le caractère opérant, l’applicabilité constitutionnelle ou la validité d’une disposition d’une loi du Québec ou du Canada, de tout règlement pris sous leur autorité, d’un décret gouvernemental ou d’un arrêté ministériel ou de toute autre règle de droit; 4° la demande concerne une réparation fondée sur la violation ou la négation des droits et libertés fondamentaux prévus par la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12) ou la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de l’annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l’année 1982) Article 22. Une partie peut être exemptée, à sa demande, de participer à la médiation obligatoire lorsqu’un motif sérieux justifie l’exemption, notamment: 1° l’existence d’une ordonnance empêchant une partie d’être en présence d’une autre partie ou de communiquer avec elle; 2° le fait que la médiation ne peut être tenue à distance et qu’en conséquence les frais de déplacement relatifs à la participation de la partie à la séance de médiation en excèdent les avantages probables; 3° le fait que les parties aient déjà participé à une séance de médiation pour le même litige, attesté par écrit par le médiateur ou un organisme qui offre de la médiation en matière civile. Dans le cas visé au paragraphe 1°, l’affaire est référée au tribunal. Dans les autres cas, l’affaire est soumise à l’arbitrage sans frais prévu au présent règlement. Le greffier en avise les parties Art. 24. La décision initiale du service de médiation et d’arbitrage quant à l’assujettissement d’une affaire à la médiation obligatoire, prise en application de l’article 21, de même que la décision du greffier spécial sur la demande d’exemption d’une partie, visée à l’article 22, peuvent être révisées par un juge en son cabinet. 30. Le tribunal ou l’arbitre peut, sur demande d’une partie, sanctionner le défaut d’une partie de participer à la médiation obligatoire constaté par le médiateur. Il peut notamment la condamner à payer des dommages intérêts aux autres parties, notamment pour compenser toute perte subie et toute dépense engagée en raison de leur participation à la séance de médiation obligatoire. Il peut aussi, si la partie en défaut est le créancier, réduire ou annuler les intérêts qui lui sont dus. Toutefois, seul le tribunal peut ordonner à une partie de payer les frais de justice Arbitrage automatique Règlement sur la médiation et l’arbitrage des demandes relatives à des petites créances Code de procédure civile (chapitre C-25.01, a. 570, 1er al.; 2023, chapitre 3, a. 16) Art. 31. Si la médiation obligatoire ne met pas fin au litige, l’affaire est soumise à l’arbitrage sans frais prévu au présent règlement. Le greffier notifie alors aux parties un avis d’arbitrage au moyen du formulaire prescrit par le ministre de la Justice. Cet avis doit indiquer, en termes clairs et concis: 1° que le fait de ne pas répondre à cet avis dans les 30 jours de sa notification constitue une renonciation libre et éclairée à soumettre le litige à un juge de la Cour du Québec et une acceptation de le soumettre à un autre mode privé de règlement des différends, c’est-àdire l’arbitrage; 2° que le défaut de se présenter devant l’arbitre permet à celui-ci de rendre une sentence par défaut; 3° que la sentence arbitrale lie les parties et ne peut être annulée que par un tribunal pour les motifs suivants: a) une partie n’avait pas la capacité pour consentir à l’arbitrage; b) le recours à l’arbitrage est invalide en vertu de la loi choisie par les parties ou, à défaut d’indication à cet égard, en vertu de la loi du Québec; c) les règles de désignation de l’arbitre ou de la procédure arbitrale applicable n’ont pas été respectées; d) la partie contre laquelle la sentence ou la mesure est invoquée n’a pas été dûment informée de la désignation d’un arbitre ou de la procédure arbitrale, ou il lui a été impossible pour une autre raison de faire valoir ses moyens; e) la sentence porte sur un différend qui n’était pas visé par l’arbitrage. Dans les 10 jours de la dernière séance de médiation, le médiateur avise le service de médiation et d’arbitrage que la médiation n’a pas mis fin au litige Art. 43. Toute affaire relative au recouvrement d’une petite créance qui a fait l’objet d’une médiation est admissible à l’arbitrage sans frais. Une affaire dont les parties ont été exemptées de la médiation obligatoire est aussi admissible. Art. 44. Ne sont pas admissibles à l’arbitrage : 1° un litige qui concerne une matière visée à l’article 2639 du Code civil 2° un litige auquel l’État est partie 3° une demande qui met en question le caractère opérant, l’applicabilité constitutionnelle ou la validité d’une disposition d’une loi du Québec ou du Canada, de tout règlement pris sous leur autorité, d’un décret gouvernemental ou d’un arrêté ministériel ou de toute autre règle de droit 4° une demande qui concerne une réparation fondée sur la violation ou la négation des droits et libertés fondamentaux prévus par la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C 12) ou la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de l’annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du royaumeuni pour l’année 1982). Art. 45. Une partie qui reçoit l’avis d’arbitrage prévu à l’article 31 peut refuser que l’affaire soit soumise à un arbitre. Pour ce faire, elle doit transmettre au greffe, dans les 30 jours de la notification de l’avis d’arbitrage, un avis de refus de l’arbitrage au moyen du formulaire prescrit par le ministre de la Justice ; l’affaire est alors soumise au tribunal. Ce délai est de rigueur. La partie qui ne transmet pas d’avis de refus est présumée consentir à l’arbitrage. Lorsque le greffier ne reçoit aucun avis de refus dans les 30 jours de la notification de l’avis d’arbitrage, le service de médiation et d’arbitrage réfère l’affaire à un arbitre. Projet de gestion et médiation pour les litiges de petites créances CQ – district de Montréal depuis l’automne 2021 25 ou 14 dossiers appelés en gestion / médiation 5 ou 3 médiateurs accrédités avocats disponibles sur place pour la journée, Gestion préliminaire par le juge – droit applicable et fardeau de preuve – invitation à la médiation, nécessite une lecture et préparation préalable du dossier Si un règlement intervient, le juge homologue l’entente Si aucun règlement survient, le juge fait une gestion de l’instance et rédige un procès-verbal avec ordonnances (documents à déposer, témoins à assigner, durée du procès, etc.) Rôle du médiateur Art. 7. Lors de la séance de médiation, le médiateur procède à l’analyse de la demande et des documents à son appui. Il s’informe des prétentions et des arguments des parties, leur fournit toute information utile, suscite chez les parties des options de règlement en regard de leur situation et leur en suggère au besoin. Il crée un climat favorable au règlement à l’amiable du conflit. Le médiateur peut demander aux parties les documents à l’appui de la demande. Art. 25. Les parties doivent participer à la séance de médiation à laquelle le médiateur les convoque. Elles sont tenues d’y participer de bonne foi, de faire preuve de transparence l’une envers l’autre, à l’égard notamment de l’information qu’elles détiennent, et de coopérer activement dans la recherche d’une solution. 605. Le médiateur est choisi par les parties d’un commun accord, directement ou par l’entremise d’un tiers. Il aide les parties à dialoguer, à clarifier leur point de vue, à cerner leur différend, à identifier leurs besoins et leurs intérêts, à explorer des solutions et à parvenir, s’il y a lieu, à une entente mutuellement satisfaisante. Les parties peuvent le charger d’élaborer avec elles une proposition pour prévenir ou régler le différend. Le médiateur est tenu de signaler aux parties tout conflit d’intérêts ou toute situation qui pourrait laisser croire à l’existence d’un tel conflit ou mettre en doute son impartialité. Une bonne médiatrice, Un bon médiateur… N’exerce aucun pouvoir décisionnel Préserve son impartialité Contrôle proactivement le processus Favorise la communication entre les parties Recherche les motivations des personnes, et connaît le droit applicable Construit la confiance et l’équité Est sensible à la psychologie du conflit et de la coopération Autrement dit, il/elle est formé et devient médiateur… De nets avantages sur l’adjudication classique Choix du tiers Confidentialité, plutôt que rendre public le litige Capacité de préserver les relations futures entre les parties, plutôt que de les antagoniser Possibilité de s’exprimer librement sans aveu, et réduction du formalisme Créativité et souplesse – solutions adaptées Choix de la solution par les parties et engagement volontaire Préparer son client à une médiation pour être un allié Adopter le bon état d’esprit : ouvert et à l’écoute Accepter la médiation comme une dynamique différente du procès avec ses règles et insister sur le respect Rechercher les motivations de votre client à régler / les motivations de l’autre Élaborer un Plan A, i.e. Plusieurs options de solution que vous trouvez acceptables et qui le sont aussi pour l’autre Élaborez un Plan B, C, D, i.e. Plusieurs alternatives si vous n’arrivez pas à vous entendre avec l’autre. Vous ferez quoi? Expliquez au client qu’il va s’exprimer sans que l’on soit son porte-parole Expliquer au client que de convaincre le médiateur n’est pas l’objectif Expliquer au client que l’objectif est de créer une solution adaptée aux réalités des parties, i.e. Acceptable pour tous et idéalement satisfaisante Expliquer au client l’importance d’établir avec le médiateur une relation claire, franche et collaborative Reconnaître les limites de la médiation Participants qui n’ont pas le bon état d’esprit Participants « peu motivés » à régler, ou dossier pas « mûr » Participants « obstinés » et convaincus d’avoir raison Participants « écornifleux » venus pour gagner du temps Participants « stratégiques » venus pour vérifier quel renseignements détient la partie adverse Participants « frondeur » venus décourager/intimider/narguer la partie adverse Dossier qui nécessite une décision du Tribunal pour clarifier le droit et favoriser la prévisibilité et les décisions futures Médiateur qui perd son impartialité Le bien-être psychologique tout au long de sa carrière Santé mentale et pratique du droit Exigences relationnelles : extrêmement exigent, affaire de leur vie pour les clients vs dossier comme un autre, récit de vie et d’évènement chargé, demande des ressources. Pas équipé ou de connaissances qui les préparent à ça Exigences organisationnelles/culturelles Exigences de l’expérience adversarielle (« adversarial ») Compétences relationnelles et capacité de mentalisation Pertinence Accompagner des clientèles vulnérables ou en crise, gérer et comprendre des situations délicates et litigieuses, collaborer avec des professionnels ayant des formations et mandats différents Ces défis ont des impacts à la fois sur le bien-être des professionnels et sur la qualité des liens avec les clientèles et les autres professionnels Charge émotionnelle particulièrement grande lors d’interventions auprès de clientèles présentant une problématique de santé mentale ou ayant vécu des traumas tels que de la maltraitance ou des abus Ces clientèles induisent des émotions vives et troublantes chez les professionnels, notamment en raison de la nature relationnelle des traumas vécus par celles-ci. Les juristes se disent d’ailleurs peu préparés pour composer avec cette réalité de la pratique. Cette charge émotionnelle répétée + l’exposition directe ou indirecte à du contenu potentiellement traumatique = risque de compromettre le bien-être psychologique des professionnels et leur capacité à effectuer leur travail de façon optimale Cette charge émotionnelle est associée à des difficultés physiologiques, psychologiques et comportementales o Problèmes de santé physique et psychosomatique, comme de l’insomnie, des maux de tête et des problèmes cardiaques o Stress traumatique secondaire (STS) ou traumatisme vicariant : en écoutant une histoire de trauma pourrait vivre des symptôme de stress post-traumatique o Sentiment d’impuissance o Dépression, anxiété, épuisement professionnel La mentalisation La mentalisation est la capacité à comprendre, à réguler et à verbaliser ses propres émotions et réactions, ainsi que celles d’autrui en contexte émotionnellement chargé o Peut porter à la fois sur soi ou sur l’autre o Permet de comprendre l’autre de façon plus sensible, même lorsqu’il présente des comportements hostiles, confrontant, inattendus ou un vécu très différent De bonnes capacités de mentalisation sont liées à moins de détresse psychologique et de problèmes de santé mentale, à un meilleur bien-être La mentalisation est aussi susceptible d’améliorer la qualité des interactions interpersonnelles au sein des équipes, ainsi que la capacité des professionnels à s’entourer pour répondre adéquatement à leurs besoins émotionnels. Programme d’intervention La mentalisation se développe dès le jeune âge au sein d’interactions sociales significatives Par des programmes d’entraînement personnel ou professionnel spécifiques 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. Clientèles difficiles: comment intervenir, comment les réfléchir? Le client en colère ou hostile : le client était en colère avant de retenir vos services et il sera probablement toujours en colère. Vous devez faire attention de ne pas laisser le client vous maltraiter ou maltraiter votre personnel. Si vous tolérez les comportements violents, ces comportements continueront ou empireront en toute probabilité. Le client qui a une mission ou un désir de vengeance qui n’est pas lié aux affaires juridiques : si vous ne pouvez pas atteindre son objectif, il sera mécontent et pourra causer des problèmes. Il faut veiller à ce que le client ne prenne pas de mesures inappropriées ou illégales pour atteindre ses objectifs. Le client qui s’en mêle trop ou devient obsessionnel : ce client peut consacrer toute son énergie à l’affaire juridique en négligeant tous les autres aspects de sa vie. Il a besoin de beaucoup d’attention et il est obsédé par son affaire ; il peut présenter des cartables et des boîtes bourrés de documents portant sur l’affaire. Il voudra que vous lisiez le tout. Il faut persuader un tel client de limiter le nombre de documents qu’il porte à votre attention, lui donner des notes fréquemment afin qu’il comprenne les coûts liés au temps et aux efforts que vous consacrez à son affaire et faire en sorte qu’il reçoit une copie de tout document portant sur son affaire. Le client qui dépend de son avocat et qui ne peut pas ou ne veut pas assumer la responsabilité de sa propre vie. Il peut essayer de vous convaincre de prendre des décisions en son nom ou il peut simplement éviter de prendre des décisions. Ne le faites pas. S’il n’aime pas le résultat, il vous en blâmera. Encourager ce client à trouver une autre personne qui peut lui prodiguer des conseils et inviter cette personne à l’accompagner aux réunions afin qu’elle puisse l’aider à examiner vos conseils. Le client secret, menteur ou malhonnête : cette personne ne comprend peut-être pas l’importance de l’ouverture et de l’honnêteté dans la relation avocat-client. Toutefois, si le client est menteur ou malhonnête à votre égard, il faut songer à mettre fin à la relation. Le client dépressif : les gens dépressifs peuvent être incapables de prendre des mesures ordinaires, telles que vous téléphoner ou vous donner des instructions. Il est important de bien documenter les relations, de consigner par écrit tous les avis que vous fournissez et de demander au client de vous donner ses instructions par écrit. Si vous ne pouvez pas obtenir des instructions écrites, il faut confirmer par écrit le manque d’instructions ou les instructions verbales que vous pouvez recevoir. En fin de compte, si vous ne pouvez pas obtenir du client les instructions dont vous avez besoin pour mener à bien son affaire, vous devez fermer le dossier et en informer le client par écrit. Tenez toujours compte de vos obligations en vertu du Code de déontologie et n’agissez pas en sorte à mettre les droits de votre client en danger. Le client atteint d’une maladie mentale, qui peut prendre des mesures imprévisibles et modifier souvent ses instructions. Comme c’est le cas d’un client dépressif, vous devez documenter vos communications et les autres aspects de votre relation à toutes les étapes. Vous devez aussi vous demander constamment s’il est compétent pour donner des instructions à son avocat. Une personne atteinte d’une maladie mentale n’est pas nécessairement incapable de vous donner des instructions, mais il faut toujours tenir compte de son aptitude. Si vous vous préoccupez de la possibilité que sa capacité mentale entre en jeu, vous devez songer à la possibilité qu’une procuration soit nécessaire. Ne vous mêlez pas dans sa vie personnelle. Recommandez au client de consulter un professionnel de la santé mentale. 8. Le client difficile qui a une affaire difficile : cette personne a peut-être des attentes peu réalistes quant au résultat de son affaire, aux coûts liés à son affaire et au temps qu’il faut y consacrer. Assurez, dès le début, des conseils précis quant à ces aspects de l’affaire. 9. Le client qui n’est pas prêt à accepter, à croire ou à suivre vos conseils : encore une fois, il faut bien documenter tous les aspects de la relation, y compris les conseils que vous assurez, les résultats, les coûts et les délais. Exercice en équipe Identifier un client difficile dans la liste précédente Développer brièvement une illustration, un cas Activez vos capacités de mentalisation o Quels sont les émotions, perceptions, pensées sous-jacentes aux comportements du client? Quelles sont les meilleures stratégies relationnelles à utiliser? Quelques stratégies relationnelles Informer Questionner/explorer sur les attentes, les perceptions, les émotions, etc. (Faire parler) Refléter les attentes, les perceptions, les émotions Reformuler les attentes, les perceptions, les émotions Confronter Comment préserver son mieux-être Compétences relationnelles permettant de bonnes relations avec leurs clients diminuent les risques d’épuisement Valorisation dans le milieu de travail (particulièrement chez les jeunes avocats) Compétences individuelles: affirmation de soi, mentalisation, résistance au stress Identifier les facteurs qui influencent notre mieux-être o Personnels (insatisfaction conjugale, conflits familiaux, maladie, endettement, manque de sommeil, mauvaises habitudes de vie, etc.) o Liés au travail (mauvais climat de travail, manque de ressources/soutien, surcharge, etc) Reconnaître les manifestations de détresse psychologique Difficultés de sommeil, d’alimentation, irritabilité, impulsivité, problèmes de consommation, etc. Quand trop c’est trop… o Cumul de stresseur o Intensité du stresseur o Fragilité personnelle Préserver sa santé psychologique Ne pas investir 100% de son énergie dans son travail. Cultiver des intérêts distincts. Concilier la vie professionnelle et la vie privée Miser sur le positif Aux employeurs et aux gestionnaires Plans de conciliation travail-famille Programme de mentorat Programme de valorisation qui n’est pas exclusivement basé sur la performance Vigilance et bienveillance des pairs et des gestionnaires Droit à la déconnexion Formations sur le bien-être Harcèlement en milieu de travail « Le harcèlement psychologique ou sexuel au travail est une conduite vexatoire qui se manifeste par des comportements, des paroles ou des gestes répétés qui : o Sont hostiles ou non désirés o Portent atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique de la personne salariée o Rendent le milieu de travail néfaste » Acritas, un cabinet de conseil juridique basé au Royaume-Uni, 2018 4 000 réponses reçues dans plus de 120 juridictions du monde 25% des avocates déclarent avoir été victimes de harcèlement sexuel. Une femme sur trois et un homme sur 15. o Dans 78 % des cas, le harcèlement n'a jamais été signalé o Et quand cela a été fait, l’auteur du harcèlement n’a pas été sanctionné dans 73 % du temps. 43 % des avocats déclarent être victimes d’intimidation (1/2 femme et 1/3 homme) o Dans 57 % des cas, l'intimidation n'a jamais été signalée o Et quand cela a été fait, l’auteur du harcèlement n’a pas été sanctionné dans 76 % du temps. La formation plus utile que les politiques o Les principaux obstacles à la dénonciation subsistent Le profil ou le statut hiérarchique de l'auteur La peur des répercussions Effets collectifs de la victimisation d’un employé Évidemment, l’intimidation et le harcèlement au travail ont un effet dévastateur sur la victime Les dégâts sont moindres quand, à l’intérieur de l’organisation, la victime se sent soutenue, écoutée, épaulée par un collègue L’existence d’un cas isolé de “souffre-douleurs”, connue des collègues, a un effet négatif sur le groupe et l’organisation : démotivation, déloyauté, absentéisme, départs, baisse de productivité, etc. Se protéger contre les comportements excessifs Être attentif aux comportements excessifs et aux émotions induites chez vous et vos collègues Déceler le harcèlement psychologique et sexuel Identifier ses meilleures stratégies de résolution de problèmes Confronter le harcèlement dans son milieu de travail, même quand la victime est un/e collègue (effet de contamination) Tendre la main à la victime Dialoguer Le leadership positif Being a strong (person) includes being kind. There’s nothing weak about kindness and compassion. There’s nothing weak about looking out for others. You’re not a sucker to have integrity and to treat others with respect. Aux funérailles de l’Hon. Elijah Cummings, Chambre des représentants Notre collectivité recherche parmi les juristes des leaders pour diverses organisations (chambres de commerce, syndicats, associations, OSBL, etc.) Même au sein de grandes organisations, de jeunes juristes se font confier la fonction de chef d’équipe Les attentes envers un leader ont évolué à travers les époques. Un/e bon/ne leader doit développer son intelligence organisationnelle et émotionnelle Un/e bon/ne leader doit savoir faire la différence qui importe dans la vie de chacun de ses coéquipiers Certaines caractéristiques du leadership positif Sensible à la psychologie humaine Digne de confiance, loyale à la fois à l’organisation et à son équipe Inspirante Capable de susciter la convivialité et la civilité, par tous et envers tous Consciente que ses subordonnés en savent parfois plus qu’elle Menant par le bon exemple Juste et équilibrée avec chacun (ce qui requiert parfois des mesures disciplinaires ou administratives), sans favoritisme Capable d’ajuster ses interactions en fonction de chaque individu Capable d’introspection, de remise en question et d’ajustement Le leadership pathologique existe Le meilleur avocat ne fait pas nécessairement le meilleur gestionnaire, le meilleur leader Ce ne sont pas toutes les organisations qui font la distinction Le leadership est une habileté qui s’apprend, se cultive L’hubris Un des fondements de la philosophie de la Grèce antique Démesure provoquée par les passions (l’orgueil) qui amène les humains à vouloir se hisser au statut des dieux résidant sur le Mont Olympe. Punie sévèrement, tôt ou tard Commentée par les philosophes anciens (Démosthène) qui proposaient la tempérance et la modération comme mode de vie en société (in medio stat virtus) On trouve en tout temps des acteurs de la communauté juridique qui paraissent affectés par l’hubris Power causes brain damage Le syndrome de l’hubris peut affecter la capacité d’empathie chez les détenteurs du pouvoir Le paradoxe du pouvoir : une fois qu’on a atteint un poste de pouvoir, notre cerveau paraît mettre en veilleuse certaines des habiletés qui nous ont servi à nous hisser au pouvoir La vérité et le mensonge Quelqu’un dit que c’est arrivé, cette personne s’exprime avec confiance, relate des souvenirs détaillés, manifeste des émotions durant le récit. Mais ça ne signifie pas que c’est vrai. - Elizabeth Loftus, 2011 La vérité La vérité, un paradigme géant, mais aux pieds d’argile La propagande gouvernementale, en temps de guerre, en temps de paix Pravda veut dire Vérité en russe Fake news et Post-truth : démagogie au 21ème siècle « Je sais que ce n’est pas vrai, mais je le pense tout de même » La recherche de la vérité est-elle un objectif démodé? Le culte de la Vérité est-il mort et enterré, victime du cynisme ambiant? « Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose » (Voltaire, 1736) Le système judiciaire recherche la vérité La vérité juridique vise à trouver une certitude relative à la responsabilité ou à la culpabilité quand la vérité scientifique propose dans le questionnement et le doute (2012) Christian Byk, juge de la Cour d’appel de Paris, secrétaire général de l’Association internationale Droit, éthique et sciences Les ingrédients de la recette dans notre régime de droit : Recueillir les faits véridiques (prouvés) du litige (fact finding) Qualifier juridiquement le litige Identifier les règles juridiques connues et prévisibles qui s’appliquent au litige ainsi circonscrit Solutionner le litige en appliquant ces règles aux faits avérés « The justice system can never fully uncover the truth, but that doesn’t mean it shouldn’t try » Philip Slayton, ex-doyen, U. Western, 2018 R. c. Nikolovski, (1996) 3 R.C.S. 1197 Braquage d’un dépanneur Le commis peine à identifier le voleur Une bande vidéo de bonne qualité amène le juge du procès à reconnaître l’accusé présent en salle d’audience La CA casse le verdict en reprochant l’absence d’une identification indépendante (par un témoin ou autrement) La CSC restaure le verdict de culpabilité à 7 contre 2 (dissidence des juges Sopinka et Major) Problèmes avec les témoins o Juge Cory pour la majorité : 13 L’objectif ultime d’un procès, criminel ou civil, doit être la recherche et la découverte de la vérité. Dans un procès criminel, on recherche la vérité afin de déterminer si l’accusé devant le tribunal est, hors de tout doute raisonnable, coupable du crime dont il est inculpé. La preuve produite doit être pertinente et admissible. C’est-à-dire qu’elle doit être probante sur le plan de la logique et recevable sur le plan juridique. La preuve peut émaner de témoins oculaires ou être circonstancielle, on peut également produire des éléments de preuve tangible, souvent appelés « preuve matérielle ». Dans toute affaire criminelle, pour qu’il y ait déclaration de culpabilité, la preuve doit être suffisamment concluante pour que le juge des faits soit convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l’accusé. (…) 20 Il ne faut pas oublier qu’un vol qualifié peut constituer un événement terriblement traumatisant pour la victime et les témoins. Ce ne sont pas tous les témoins qui possèdent le sang froid de James Bond et son indéfectible capacité d’observer la situation et d’agir en présence de balles qui sifflent et des lames de couteau qui brillent. Même Bond pourrait avoir de la difficulté à décrire avec précision ceux qui cherchent à l’assassiner. Il pourrait certes désirer ardemment que son agresseur soit déclaré coupable et avoir un parti pris en ce sens. les avantages d’une bande vidéo o (j. Cory, suite) 21 À l’opposé, la caméra vidéo n’est jamais soumise à la pression. Pendant des événements tumultueux, elle continue d’enregistrer fidèlement et imperturbablement tout ce qui entre dans son champ. Bien que silencieuse, elle reste un témoin constant et impartial, capable de se rappeler instantanément et totalement de tout ce qu’il a observé. Le juge des faits peut revoir la preuve fournie par ce témoin silencieux aussi souvent qu’il le désire. La bande peut être stoppée pour étudier un moment critique de l’action. o Rappel: Scott c. Harris en Cour suprême des États-Unis Règles de procédure et de preuve pour soutenir la vérité (matière civile) Tout acte de procédure doit alléguer les faits que l’on entend prouver pour obtenir les conclusions recherchées, de façon à ne pas prendre par surprise la partie adverse (Cpc 99). Mais en défense? Certains actes de procédure doivent être accompagnés du serment de son signataire (Cpc 105) Chaque témoin doit prêter serment, soit un engagement solennel de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité (Cpc 21, 24, 277) En principe, l’interrogatoire principal doit se confiner à des questions objectives et non suggestives-pour ne pas souffler la réponse (Cpc 280) En revanche, le contre-interrogatoire peut ratisser large, pour tester la crédibilité et la fiabilité (Cpc 280) Le/la juge du procès peut poser des questions additionnelles à la recherche d’éclaircissements (Cpc 280) On protège le témoin contre l’intimidation et les procédés abusifs (Cpc 278), devoir de ramener à l’ordre les avocats par les juges. Quelques précisions Même un enfant doit dire la vérité, qu’il ait été assermenté ou non (CCQ 2844, LPJ 85.1) Un mineur ou un majeur inapte peut témoigner selon des modalités moins intimidantes (Cpc 291) On a tendance à rejeter le témoignage d’une personne inapte à témoigner (en raison de son âge, de limitations intellectuelles) (Cpc 276) Un témoin profane ne peut témoigner que sur les faits dont il a eu connaissance. Seul un témoin expert peut émettre son opinion sur les faits (CCQ 2843) Le témoin expert signe son rapport et témoigne sous son serment professionnel (Cpc 235) Le témoin et le juge d’instance En principe, le témoin doit venir témoigner à l’audience, pour que le juge et les parties puissent l’observer pendant qu’il livre son témoignage (CCQ 2843) C’est par exception que l’on se contentera de la déposition écrite d’un témoin absent (CCQ 2869 à 2874, Cpc 292) Le juge d’instance apprécie plus que les mots prononcés, il/elle observe l’attitude du témoin Le défi pandémique des audiences virtuelles, V. Denault et Miles L. Patterson, Justice and Nonverbal Communication in a Post-pandemic World: An Evidence-Based Commentary and Cautionary Statement for Lawyers and Judges, Le témoin, chaînon faible? Souvent, Les témoins mentent délibérément Les témoins ont des souvenirs flous des événements Les témoins confondent la réalité et ce que leur mémoire en a retenu Les témoins ont un parti pris Scripta manent, la devise des notaires, mieux vaut écrire et signer preuve avec valeur probante Rappelons les réflexions du juge Cory dans Nikolovsky Rôle capital du juge d’instance Le juge du procès détermine en fin de compte ce qui est vrai, ce qui est faux, ce qui est prouvé, ce qui ne l’est pas (CCQ 2845) Même quand le témoin n’est pas contredit, le juge n’est pas tenu de le croire : Sarrazin c. PGQ, 2010 QCCA 996 Le juge du procès n’est pas lié/e par la preuve d’expert : 9119-3557 Québec inc. c. Laliberté, 2012 & Service de Marie de Québec, 2019 Les tribunaux d’appel n’interviennent qu’exceptionnellement pour remettre en question ce que le juge d’instance a retenu comme vérité prouvée : Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33 Limites inhérentes de ce régime Droit criminel et pénal : preuve hors de tout doute raisonnable Droit civil : preuve prépondérante (50% +1) et fardeau de la preuve incombant parfois à la défense (CCQ 2804 et 2805) Les témoins ont-ils relaté tout ce qu’ils savaient? Parfois on ne pose pas les bonnes questions, réticence du témoin Les parties ont-elles VOULU et ont-elles PU tout relater, produire tous les documents? Le juge du procès a-t-il tout su? Limites dictées par les principes directeurs de la procédure civile Proportionnalité et raisonnabilité (Cpc 18) Nécessité (et non utilité) (Cpc 19) Obligation de tenir compte des ressources judiciaires limitées (Cpc 18) …même si une partie voudrait utiliser le processus judiciaire pour aller au fond des choses… Une approche utilitariste (qui peut nous priver de parcelles de vérité) « Dans toute affaire civile, c’est le juge qui a le contrôle des procédures. Un de ses défis est de cerner les enjeux véritables du litige puis de s’assurer que ceux-ci soient tranchés diligemment et économiquement. Les avocats des parties ont le devoir d’assister le juge dans l’atteinte de cet objectif. Les parties n’ont pas un droit d’accès illimité aux ressources judiciaires et au temps disponible en salle d’audience. D’autres justiciables attendent leur tour. Les justiciables n’ont droit d’accès au juge que pour le temps nécessaire en vue de solutionner le litige. » Lord Roskill de la Chambre des Lords, Ashmore and Others c. Corporation of Lloyd’s, (1992) 1 W.L.R. 446 (un juge britannique, il y a 32 ans!) La vérité ou la justice Les règles de procédure civile ont délaissé leur obsession pour la vérité et ont adopté un objectif de justice (Bachand, 2015) Charland c. Lessard, 2015 QCCA 14 Abou-Jouadé c. Université Laval, 2017, QCCS 4141 On ne tient pas tant à faire éclater la vérité coûte que coûte, on opte plutôt de trouver une solution juste et proportionnée au litige Y a-t-il un prix à payer? Concède-t-on plus de place au mensonge, aux demivérités, aux renseignements approximatifs, aux récits incomplets? Hryniak c. Mauldin, 2014 CSC 7 Juge Karakatsanis, au sujet des requêtes pour jugement sommaire (qui n’existent pas au Québec) : o Faire des choix pour améliorer l’accès à la justice o Nécessaire virage culturel des juristes o Gérer le tiraillement entre l’accès à la justice et la recherche de la vérité o Appliquer le principe de la proportionnalité (pas de procès devant jury pour un excès de vitesse) o Vérifier s’il existe une véritable question litigieuse o Vérifier si l’audition de témoins est nécessaire Faire prévaloir l’intérêt de la justice Au Québec, demandes de rejet selon l’article 51 C. CRÉDIBILITÉ ET DE LA FIABILITÉ 14 critères d’évaluation de la crédibilité et de la fiabilité (Foomani c. R, 2023 QCCA 232) 1. Intégrité générale et intelligence du témoin 2. Sa capacité d’observation 3. Sa capacité de communiquer 4. La fidélité de sa mémoire 5. L’exactitude de sa déposition 6. Sa volonté de dire la vérité de bonne foi 7. Sa sincérité, sa franchise, ses préjugés 8. L’intérêt du témoin 9. Le caractère évasif ou les réticences de son témoignage 10. Le comportement du témoin avec la prudence requise 11. La compatibilité du témoignage avec l’ensemble de la preuve, y compris la preuve confirmative 12. L’existence de contradictions avec les autres témoignages et les éléments de preuve 13. La plausibilité du témoignage 14. La cohérence intrinsèque du témoignage Crédibilité et fiabilité Crédibilité : sincérité, détermination à dire la vérité Fiabilité : capacité de se remémorer les faits Daher c. DPCP, 2018 QCCS 4272 Strano (Succession de), 2008 QCCS 3396 Fiabilité Un témoin peut vouloir répondre le plus honnêtement possible mais se révéler incapable de fournir des renseignements fiables : Il n’a pas vraiment vu, lu, entendu, ou encore de façon fragmentaire Il a oublié et peine à se rappeler malgré ses efforts (et malgré l’aide que certains lui prodiguent) Sa mémoire lui joue des tours de sorte qu’il confond ce dont il a été témoin avec: o Ce que d’autres lui ont dit o Les rationalisations de son subconscient après coup Crédibilité Un témoin n’est pas toujours motivé à ce que l’on sache tous les faits qu’il sait être vrais et rien que des faits qu’il sait être vrais On peut être réticent sans prononcer un mot qui soit faux Le système judiciaire connaît quelques outils pour apprécier la crédibilité du témoin : La cohérence du récit (Vrij, 2005) ⍉ Le comportement du témoin (Denault et Jupe, 2018) La forme et le contenu du discours (Oberlader et al., 2016; Vrij, 2005) ⍉ La qualité de la mémoire Le mensonge et sa détection Le mensonge est un acte délibéré ayant pour but de tromper l’interlocuteur en amenant celui-ci à croire quelque chose qui est faux dans l’esprit du menteur (Denault, 2015; Vrij, 2008; Zuckerman, DePaulo & Rosenthal, 1981) Chacun de nous ment tous les jours « Ça va bien, et toi? » (ah oui! vraiment?) Être humain, c’est entre autres apprendre à mentir efficacement, dès le jeune âge Alors que plusieurs mentent pour faciliter leurs interactions sociales (Spence et al., 2003), d’autres utilisent le mensonge pour obtenir un gain ou éviter une perte (Vrij, 2002) Il existe des raisons (presque) acceptables de mentir : o Pour éviter de déplaire à autrui o Pour faire excuser ses propres manquements o Pour se rendre intéressant, populaire o Pour séduire o Pour obtenir un résultat avec de moindres efforts Formes atténuées de mensonge Perception imparfaite de l’événement, que l’on cherche à bonifier Souci de bien paraître en s’attribuant un meilleur rôle que dans la réalité Jennifer K. Robbennolt et Jean R. Sternlight, Psychology for Lawyers, 2012 Des gens par ailleurs honnêtes considèrent que la fin justifie les moyens, ou encore que leur adversaire est un menteur qu’il convient de battre à son propre jeu Quatre formes habituelles de mensonge *** La falsification : donner délibérément de faux renseignements La dissimulation : quand on répond à la question posée, omettre délibérément des détails ou des éléments d’information pertinents. Prétendre que la réponse est complète. L’équivocation : donner délibérément des réponses vraies mais vagues et incomplètes, notamment en attendant de mieux jauger ce que sait déjà la personne qui interroge. Comportement du témoin qui attend de voir ce que la personnes qui l’interroge sait. Réponse vague La simulation : augmenter faussement des troubles physiques ou psychologiques, pour échapper à sa responsabilité criminelle, pour obtenir une indemnisation maximale Un bon menteur entremêlera ces quatre formes Écueils courants Certains mensonges sont faciles à concevoir et à énoncer Parfois la vérité est difficile à expliquer, à justifier Quelqu’un peut, d’une fois à l’autre, donner des versions différentes et même contradictoires, sans mentir pour autant. Cette personne pourra rester crédible. Mais sera-t-elle fiable pour autant? Certains mensonges ont de graves conséquences Dénouement injuste du processus judiciaire (le/la juge a cru un menteur) Diffamation d’une personne qui ne le méritait pas Erreur judiciaire (illustration à venir) Pertes économiques Fake news et méfiance envers ceux et celles qui prennent des décisions affectant la collectivité Recommandation 53 : Tous les ordres de gouvernement devraient poursuivre l’étude de l’impact des médias sociaux sur la société canadienne, y compris la mésinformation et la désinformation, en mettant l’accent sur la préservation de la liberté d’expression et des avantages des nouvelles technologies, tout en s’attaquant aux graves problèmes que la mésinformation, la désinformation et d’autres préjudices en ligne posent aux personnes et à la société canadienne. - Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 Médias sociaux et désinformation (simulation) Les informations concernant les divers symptômes psychiatriques sont accessibles (Conroy & Kwartner, 2006) Augmentation du nombre de verdicts de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (Jansman-Hart, Seto, Crocker, Nicholls, & Côté, 2011) La simulation est une problématique importante en Amérique du Nord (Chafetz & Underhill, 2013; LoPiccolo, Goodkin, & Baldewicz, 1999). N'importe quel trouble physique ou psychologique peut être exagéré ou simulé (Halligan, Bass, & Oakley, 2003) Certains avocats admettent ouvertement qu'ils enseignent à leurs clients des techniques qui leur permettront d'obtenir une compensation financière maximale lors d'un litige pour lésions corporelles (Bury & Bagby, 2002; Lees-Haley, English, & Glenn, 1991). Détecter la simulation Symptômes rares ou étranges Symptômes plus sévères Difficultés à maintenir les symptômes Propension à la suggestibilité Batterie de tests psychométriques La psychologie à la rescousse de la détection du mensonge Les artisans du système judiciaire se préoccupent des ravages du mensonge sur l’établissement de la vérité La psychologie aide à comprendre ce qu’est le mensonge et à mieux le détecter Cependant, la capacité demeure faible de discriminer ce qui est vrai de ce qui est faux, même pour des décideurs expérimentés (Bon et DePaulo, 2006) La détection du mensonge n’est pas une science exacte La synergologie, généralement discréditée en tant que pseudoscience o Il n’y a pas de comportement non verbal qui a une seule et même signification (Denault, Larivée, Plouffe, & Plusquellec, 2015; Harrigan, Rosenthal, & Schrer, 2005) Il faut se méfier des stéréotypes, surtout au sein d’une collectivité au sein de laquelle plusieurs membres proviennent d’ailleurs, où la culture amène des différences, particulièrement quant à la façon d’interagir avec des personnes en autorité (telles des juges) Malgré cela, la science reconnaît le caractère universel de certaines expressions faciales spontanées et involontaires : peur, colère, dégoût, mépris, surprise, joie, tristesse Mais encore, dans certaines sociétés, les gens sont entraînés à manifester le moins possible leurs réactions spontanées Il existe des différences culturelles (même à l’intérieur du Québec), donc prudence Quatre manifestations psychologiques du mensonge Les émotions L’activation sensorielle : rythme cardiaque, pression sanguine, conductivité de la peau (d’où l’usage du polygraphe) Les efforts cognitifs du témoin La tentative de contrôler ses réactions *Aucun de ces indices ne permet, à lui seul, d’établir la crédibilité d’un témoin. Il existe d’excellents menteurs Beaux parleurs habitués à broder des récits crédibles et vraisemblables Personnes avec des troubles de personnalité les amenant à mentir sans hésitation et sans remords Personnes détenant l’habilité de se rendre sympathiques Personnes entraînées à déjouer les techniques des enquêteurs (regarder droit dans les yeux, neutraliser ses expressions faciales) Personnes entraînées avant de rendre témoignage Nos systèmes de justice ne comportent pas de garantie que tous les menteurs seront débusqués Conseils pour mettre la crédibilité à l’épreuve Utiliser les techniques d’entrevue cognitive (Vrij, 2015) Demander de faire le récit des événements à rebours (Zimmerman et al., 2010) Demander de maintenir le contact visuel avec le/la juge ou l’intervieweur (Vrij, Mann, Leal, Fisher, 2010) Demander d’élaborer, de fournir des détails (Vrij et al., 2017) Poser des questions étonnantes, auxquelles le témoin ne s’attend pas Rappel : Chapitre 8, Psychologie du témoignage et de l’interrogatoire, par Michel St-Yves Indices de mensonge Travaux de recherche portant sur le mensonge proviennent principalement de la psychologie (Laforest et al., 2020) Indices verbaux o L’usage fréquent d’énoncés négatifs (Zhou et al., 2004) o L’évitement de la référence à soi-même (Burgoon et al., 1996) o Les énoncés plus courts (Sporer et Schwand, 2006) ou plus longs (Anolli et al., 2003) Manque de validité écologique de ces études Les menteurs ne se comportent pas tous de la même façon Laforest et al. (2020) o Analyse de 45 appels 911 (appelant dissimulateur et de 40 appels 911 (sincères) o Les traits rapportés dans les études (par ex. évitement de la référence à soi-même, énoncés négatifs) ne permettent pas de différencier les 2 groupes o 8 éléments: clarté du motif, contradictions, réponses peu adéquates aux questions, surplus d’informations sans lien direct avec la question, surplus d’informations apportant une précision, pauses, doubles manifestations d’émotion, structure Je + imparfait Techniques utiles aux avocat/e/s qui contre-interrogent Poser plusieurs fois les mêmes questions (le contexte évolue) Briser l’ordre logique et chronologique du récit Demander d’expliquer les contradictions Faire le lien entre la version du témoin et certains faits « certains » (documentés) Prêter attention quand la question porte sur des éléments stressants RAPPEL : dans le système de justice civile, il n’est pas toujours nécessaire de démasquer le mensonge. On retient la version la plus vraisemblable L’appréciation du comportement nonverbal du témoin Un aspect du témoignage que le décideur doit observer et dont il doit tenir compte : R. c. D.A.I., 2012 CSC 5 Mais il doit s’agir du comportement durant le témoignage lui-même, et non de l’attitude (perturbatrice) de cette personne durant d’autres phases du procès, qui ne fait pas partie de la preuve : L.L. c. R., 2016 QCCA 1376 Défis fondamentaux du décideur Éviter de réagir au fur et à mesure (poker face) Éviter de sauter aux conclusions à la moindre contradiction, hésitation, manifestation d’inconfort Garder l’esprit ouvert et continuer de colliger tous les indices et informations disponibles avant l’appréciation finale Se méfier qu’on s’expose à croire le « meilleur menteur » Se méfier de ses propres biais cognitifs Même en matière criminelle, l’application de la règle du doute raisonnable n’empêche pas la survenance de certaines erreurs judiciaires R. c. X., 2015 QCCQ 21199 (j. Gervais, Chambre de la jeunesse) Deux frères adolescents au moment des crimes reprochés, devenus quinquagénaires au moment du procès en 2014-2015 Accusés d’inceste, de viol et de sodomie envers leur jeune sœur, entre 1978 et 1982 (celle-ci a 43 ans au moment du procès, mais avait entre 4 et 14 ans à l’époque des gestes reprochés) Actes « quotidiens », pendant des années, selon la sœur. Les frères nient tout Dans un jugement de 56 pages, le juge Gervais déclare les accusés coupables Ce jugement est porté en appel LSJPA-195,2019 QCCA 379 (juges Bich, Vauclair et Schrager) Au nom des trois juges, le juge Vauclair rejette l’appel et confirme le verdict de culpabilité Bien que la victime soit « un témoin difficile », parce que : o Son témoignage (durant quatre jours) comporte de multiples contradictions, dont certaines plus importantes o Elle a vécu toute son enfance dans une famille dysfonctionnelle, marquée par des comportements sexuels répréhensibles par les enfants et leurs parents, ces derniers imposant une culture familiale du secret o La victime a eu une vie compliquée, et témoigne d’une longue période de toxicomanie Motifs du juge Vauclair Un enfant ne perçoit pas les événements de la même façon qu’un adulte Les détails n’ont pas la même importance pour un enfant que pour un adulte L’adulte qui témoigne de faits survenus durant son enfance est évalué comme un témoin adulte, avec ses forces et ses faiblesses C’est une (banale) évidence que d’importants laps de temps séparent souvent l’événement vécu du récit qu’en fait le témoin; le présent cas ne se distingue pas significativement Un témoin peut n’être cru que pour une partie de son témoignage 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. Les 8 critères du juge Vauclair (pour apprécier la crédibilité et la fiabilité) La capacité du témoin d’observer La capacité de se souvenir La capacité de rendre compte Son désir de donner des réponses complètes Son intelligence La présence ou l’absence de motifs de nuire à l’autre partie La présence ou l’absence d’un intérêt dans l’issue du litige La concordance du récit avec d’autres éléments de preuve Échange sur le jugement R. c. Salvail Donald Duguay, un homme, accuse de harcèlement criminel, de séquestration et d'agression sexuelle Salvail. Se passe chez Radio-Canada, dans le moment de leur travail. 1993, les faits, et 2020 pour le jugement. Salvail dit qu’il n’aurait jamais fait ça et ne travaillait pas là à ce moment et pas de souvenirs de ça. Contre-preuve de la couronne pour démontrer le caractère de Salvail. Test en 3 volets : Est-ce que le décideur croit Salvail? (Si oui, acquittement) Ici, non. Est-ce que même si on ne le croit pas, Salvail soulève-t-il un doute raisonnable? Ici, non Est-ce que la poursuite réussit à prouver chacun des chefs hors de tout doute raisonnable? Ici, non, donc acquittement. Différentes version des faits, l’impossibilité que Salvail soit présent, exagération et se donne pour mission de convaincre le tribunal au détriment de la vérité (voir 250290) Les faux aveux Phénomène rare mais sournois au Québec (Michel St-Yves et Michel Tanguay, Psychologie de l’enquête criminelle, 2007) Faire cesser un interrogatoire excessif (la torture) Recherche de notoriété, besoin d’attirer l’attention (bébé Lindbergh, 1932) Manipulation d’un témoin « vulnérable » qui finit par croire qu’il a commis un crime (Julia Shaw, UBC) Calcul d’avouer (peu) avant que l’enquêteur continue et découvre pire Nécessité de protéger un être cher (Unité 9), crainte d’un criminel dangereux et menaçant Un cas célèbre à Ste-Foy : Simon Marshall Série d’agressions sexuelles à Sainte-Foy, entre 1995 et 2003 Simon Marshall, schizophrène et déficient mental d’une trentaine d’années Aveux menant à sa condamnation en 1997 et à son incarcération jusqu’en 2003, sous 15 chefs d’agression sexuelle Malgré qu’une des victimes le disculpe Police de Sainte-Foy a omis de vérifier la preuve d’ADN exonérant Marshall Simon Marshall : bilan quasi-désastreux Acquitté par la Cour d’appel en septembre 2005 après analyse de la preuve d’ADN (2005 QCCA 852) Désignation d’un expert pour déterminer une indemnité, notamment pour sévices infligés par d’autres prisonniers Indemnité de 2,3 millions $ en décembre 2006 (la plus élevée au Québec, à l’époque) versée aux parents tuteurs aux biens, vu l’incapacité légale de leur fils Réforme de l’enseignement des techniques d’interrogatoire à l’Institut national de police (Nicolet) et plaintes déontologiques contre les enquêteurs L’ENFANT ET LES SYSTÈMES DE JUSTICE MOT D’INTRODUCTION L’accueil de la parole de l’enfant L’enfant a le droit d’être entendu, c’est un sujet de droit en développement À la Cour du Québec, chambre de la jeunesse, la représentation de l’enfant vient d’office Modalités multiples d’accueillir la voix de l’enfant, de façon directe ou indirecte (Tétrault, 2014) o Le témoignage o L’expertise psychologique o L’entrevue d’enquête o La représentation de l’enfant Rôle privilégié de l’avocat comme dispositif de voix de l’enfant (Bala et Hébert, 2014; Taylor, 2009) accompagne et représentation L’intérêt de l’enfant Concept qui est central à la LPJ, au C.c.Q. et à la Loi sur le divorce Préséance des besoins et des intérêts de l’enfant sur les besoins et intérêts de la famille ou des parents L’intérêt de l’enfant nécessite une connaissance des conditions physiques, psychologiques, familiales et sociales dans le but de favoriser le développement de l’enfant La définition de ce concept est controversée puisqu’il est principalement interprété en regard de facteurs psychologiques (Emery, Otto, & O'Donohue, 2005; Goubau, 2009; Godbout et al., 2014). Le concept d’intérêt de l’enfant est: o Un concept emprunté au domaine de la psychologie de l’enfant o Un concept qui met en valeur le rôle des connaissances en sciences sociales dans le système judiciaire Déterminer l’intérêt de l’enfant revient à choisir, dans une situation particulière, la meilleure solution pour un enfant compte tenu de toutes les possibilités et en prenant en considération les effets à court, moyen et long terme de la décision (Lavallée, 2005). o Les besoins des enfants varient selon les stades développementaux o La capacité des parents à répondre à ces besoins peut être minée o Le développement de l’enfant s’inscrit dans un contexte familial et les liens entre les besoins et la réponse parentale sont bidirectionnels (Laprise, Verlaan, Bernard, Letarte, & Capuano, 2009) La notion de MIE est perméable aux tendances sociales et aux connaissances scientifiques (Poitras et al., 2020) Certains contours du MIE sont plus clairement inscrits dans la loi, notamment : o Besoin de continuité des liens o Besoins de protection Par ailleurs, « L’enfant a la possibilité de se faire l'interprète de son propre intérêt… » (M. Tétrault) L’ENFANT ET LES SYSTÈMES DE JUSTICE L’enfant est un sujet de droit L’enfant est un être vulnérable à protéger La maturité Critère à partir duquel l’avocat peut mesurer: o Le mandat qu’il peut accueillir (Cantin, 2016) o Ce qui peut ou non être dit à l’enfant sur sa situation familiale et personnelle (Cantin, 2016) o Le poids à accorder aux désirs exprimés par l’enfant (Tétrault, 2020) Critères juridiques pour apprécier la maturité: o L'enfant est bien articulé et n'est pas capricieux o Il est vif d’esprit, ouvert et s’exprime bien o L'enfant s'exprime clairement et avec assurance. Il perçoit la réalité avec assurance; il est réaliste, conscient de sa situation et n'a pas peur de dire ce qu'il pense. La maturité : les éléments déterminants (Tétrault, 2014) Le stade de développement de l’enfant (développement au plan émotif, au plan de la socialisation et au plan cognitif); L’habileté de l’enfant à communiquer avec l’avocat et d’articuler les motifs qui sous-tendent sa position; Le processus décisionnel de l’enfant (caractère influençable, l’exploitation, la coercition, le souci de se conformer aux autres, le caractère variable de sa position ou encore la persistance dans son point de vue); La capacité de comprendre les conséquences de ses décisions; Tout autre élément contextuel pertinent. Désir de l’enfant et meilleur intérêt Prise en compte du désir de l’enfant Droit de la famille-23535, 2023 QCCA 534 « (35) Il faut être en présence de circonstances véritablement exceptionnelles pour écarter la volonté exprimée par des enfants de cet âge. » (NDLR : garçons de 16 ans et 13 ans) « (36) Aucune circonstance exceptionnelle ne justifiait d’outrepasser la volonté exprimée par les enfants dans cette affaire… » Selon la Cour d’appel, la juge de la Cour supérieure a indûment tenu compte que le père avait impliqué les enfants dans son projet de déménager vers une autre localité. DF-232021 (2023) : kidnapping de l’enfant, l’enfant est envoyé au Mexique. Traité international qui dit qu’un des critères est le désir de l’enfant et ne lie pas le juge. Maturité: concept psychologique? Le concept de maturité est très rarement discuté en psychologie Toutefois, plusieurs données de recherche appuient ce concept juridique o Développement cognitif, langagier et socioaffectif Capacité d’entrevoir les conséquences d’une décision Capacité à formuler et exprimer une opinion propre Résistance à la suggestibilité Modalités multiples d’accueillir la voix de l’enfant La représentation de l’enfant Le témoignage L’expertise psychologique L’entrevue d’enquête La représentation de l’enfant Deux types de mandats sont possibles: o Mandat légal o Mandat conventionnel Mandat légal vise à assurer que les droits et les intérêts de l’enfant soient préservés Mandat conventionnel: o L’évaluation du degré de maturité de l’enfant est centrale à l’élaboration du mandat o Capacité à exprimer ses désirs et une compréhension des motifs de sa situation de compromission (Cantin, 2016 ; Paré, 2014 ; Tétrault, 2014). Importance de connaitre le développement de l’enfant et de l’adolescent (Arredondo, 2003) L’aptitude à témoigner L’enfant de moins de 14 ans est présumé apte à témoigner. Deux exceptions: L’inaptitude de l’enfant à témoigner Le risque de porter préjudice à son développement La capacité à exprimer son désir propre peut être altérée dans les contextes familiaux vulnérables et, particulièrement, lorsque des pressions agissent sur l’enfant Maltraitance Conflit sévère de séparation Perturbations relatives au témoignage Fragilité psychologique Trouble de santé mentale Nature du litige Faible préparation par l’avocat Conséquences pour les enfants L’impact des procédures judiciaires sur la santé mentale des enfants Conséquences négatives sur la santé mentale des enfants (anxiété, dépression, agressivité, comportements délinquants, faible estime personnelle, réactions d’évitement ou de déni) ((Tippett-Leary, 2015; Quas & Goodman, 2012) Pas d’impacts négatifs associés au fait de témoigner (Henry, 1997 ; Mudaly et Goddard, 2006 ; Runyan, Everson, Edelsohn, Hunter et Coulter, 1988 ; Tedesco et Schn Important puisque donne à l’enfant une voix, un rôle et un sentiment de pouvoir plus important (Troxel et al., 2009) Le témoignage: capacité de l’enfant Capacité de l’enfant (Cyr, Daignault et Dion, 2020): Mémoire : attention, connaissances, capacité mnésique Suggestibilité Motivation Besoins de l’enfant témoin (Cyr, Daignault et Dion, 2020): Soutien Adaptation à la fragilité du témoignage o o o Questions ouvertes, qu’ils s’agissent d’invitation (p. ex., « dis-moi tout ce qui s’est passé après ? ») ou de questions directives (p. ex., où, quand, quoi, comment, quel, etc.). Questions simples Éviter la répétition des questions Bala et Hébert (2014) Des déclarations écrites d’un enfant sous forme de lettres ou d’affidavits; Un rapport d’un avocat, d’un travailleur social ou d’un psychologue qui a réalisé une entrevue (ou plus d’une entrevue) et qui a préparé un Rapport sur le point de vue de l’enfant; L’avocat d’un enfant; Le témoignage de l’enfant devant la cour; Une rencontre ou une entrevue dans le cabinet du juge o Les juges reconnaissent l’importance d’entendre l’enfant et vont souvent préférer rencontrer l’enfant de cette façon, plutôt que de le faire témoigner de manière formelle (Birnbaum & Bala, 2010 ; Paré, 2014). o Inquiétudes exprimées quant au manque de balises entourant ce type d’entretien plus informel (Bourassa, 2006). o Certains juges ne se sentent pas assez outillés pour mener une telle rencontre avec un enfant (Birnbaum & Bala, 2010 ; Paré, 2014). o La formation des juges fait la différence Le témoignage C’est au juge de déterminer la valeur probante de ces preuves tout comme c’est à lui d’appliquer la loi, notamment le droit à l’enfant d’être entendu. Un mineur ou un majeur inapte peut témoigner selon des modalités moins intimidantes (Cpc 291) Même un enfant doit dire la vérité, qu’il ait été assermenté ou non (C.c.Q., 2844, LPJ 85.1) L’expertise psychologique ou psychosociale Participation de l’enfant à l’expertise psychologique ou psychosociale est requise en matière familiale et en matière de jeunesse (Lignes directrices…, 2007) Réticence de plusieurs enfants à se soumettre à une expertise psychosociale (Molpeceres, 2024) Dilemme exprimé par les juges semble opposer le recours à l’EPP à la représentation juridique (Poitras et al., 2023) L’entrevue d’enquête Modalité d’écoute indirecte de la parole de l’enfant qui est intégré à l’Entente multisectorielle depuis 2001 Procédure impliquant la collaboration interprofessionnelle face à des situations incluant des allégations d’abus physiques ou sexuels sur des enfants Déclenchée lorsqu’il existe un motif raisonnable de croire que la sécurité ou le développement de ces enfants est compromis et qu’un crime a été commis à leur endroit Les Directions de la protection de la jeunesse (DPJ), les policiers et les substituts du procureur général travaillent de concert o But commun = la protection des enfants La qualité de l’entrevue d’enquête est cruciale o Les sources alternatives d’information concernant les événements allégués sont rarement disponibles Améliorer la qualité de ces entrevues permettrait donc non seulement d’améliorer la qualité du témoignage de l’enfant, mais également une possible augmentation de la capacité à protéger les enfants (Cyr, 2014 ; Lamb, Sternberg & Esplin, 1998 ; London, 2001) LA RELATION AVOCAT-CLIENT LORSQUE LE CLIENT EST UN ENFANT OU UN ADOLESCENT La Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (2021) S’assurer que l’avocat de l’enfant est d’abord un conseiller Communiquer les renseignements concernant la situation d’un enfant à l’avocat qui le représente sans frais et dans les meilleurs délais Favoriser et promouvoir le rôle de conseil et d’accompagnement de l’avocat de l’enfant dans toutes les étapes décisionnelles, et pas seulement au tribunal Développer une formation appropriée et obligatoire pour les avocats représentant les enfants Attentes des enfants Les enfants souhaitent être entendus et rassuré qu’ils ne sont pas maître de la décision (Birnbaum & Bala, 2017; Birnbaum, Bala, & Cyr, 2011; Birnbaum & Saini, 2012a; 2012b). Having a voice, not a choice (Birnbaum, Bala & Cyr, 2011) Impacts des procédures judiciaires Expérience pénible des enfants victimes d’abus sexuels (Eastwood, 2003) Délais Contacts avec la personne accusée Contre-interrogatoire Expérience des services de protection de la jeunesse par les enfants (Wilson et al., 2020) Besoin de normalité Besoin d’informations claires Processus d’enquête très stressant Préparer le témoin sans l’influencer Conseils quant à l’individu 1. Établir un lien de confiance 2. Se rappeler que les enfants, les ados et les adultes sont suggestibles (Cyr, 2014) 3. Considérer les capacités intellectuelles des témoins (Zhu et al., 2010) a. Une personne ayant une intelligence plus faible risque davantage de créer des faux souvenirs 4. Considérer l’âge de l’enfant (p. ex., Eisen et al. 2002) a. Un âge plus avancé augmente la mémoire et réduit la suggestibilité 5. Considérer les habiletés langagières de l’enfant (expression et compréhension; p. ex., Culp et al., 1991; Eigsti & Cicchetti, 2004; La Rooy et al., 2015) a. De faibles habiletés réduisent la cohérence des récits et le nombre de détails rapportés Conseils quant au contexte 1. Prioriser la véracité des informations à la précision a. Dire au témoin qu’il est légitime et préférable de reconnaître qu’il ne sait pas une information (Cyr, 2014; Sternlight & Robbennolt, 2008) 2. Utiliser des questions ouvertes du début à la fin (inspiré du NICHD; Cyr, 2014; La Rooy et al., 2015) 3. Ne pas faire appel aux propos de quelqu’un d’autre (p. ex. : « telle personne m’a dit quelque chose. Est-ce vrai ? ») Besoins de l’enfant / témoignage (Cyr, Daignault et Dion, 2020) Soutien Adaptation à la fragilité du témoignage Questions ouvertes, qu’il s’agisse d’invitation (p. ex., « dis-moi tout ce qui s’est passé après ») ou de questions directives (p. ex., où, quand, quoi, comment, quel, etc.). Questions simples Éviter la répétition des questions Protection de la jeunesse ou comment la psychologie soutient le développement du droit de la jeunesse Portrait des familles prises en charge par la DPJ Au Québec et au Canada: Les familles prises en charge par la DPJ présentent une plus grande précarité sociale (p. ex. plus de familles monoparentales, plus faible niveau d’éducation des parents); Entre 46,0 et 70,0% des enfants présentent au moins une difficulté de fonctionnement (p. ex. difficultés scolaires, dépression, anxiété ou isolement, idées suicidaires, etc.); Entre 65,0 à 78,0% des enfants vivent auprès d’une première figure parentale qui présentent au moins une difficulté de fonctionnement (p. ex. toxicomanie, faible soutien social, etc.); Surreprésentation des enfants issus des Premières Nations et Inuits : o 3 à 4 fois plus à risque d’être signalés pour une situation de maltraitance; o 17 fois plus à risque d’être placés en milieu substitut. Cyr et al., 2014; Hélie et al., 2017; Fallon et al., 2021; Trocmé et al., 2010 Vulnérabilité des enfants suivis par les SPJ Combinaison de facteurs de risque: Mauvais traitements intra-familiaux en bas âge (Cicchetti & Carlson, 1989); Expérience de grande négligence (Manly, Kim, Rogosch & Cicchetti, 2001); Exposition à l’alcool et aux drogues (Singer et al., 2002; Testa, Quigley & Eiden, 2003); Exposition au conflit parental (Ayoub, Deutsch, & Maraganore, 1999). Traumatismes complexes (Cyr,et al., 2012) Risque accru de présenter: Retards développementaux (Fondren et al., 2020; Sylvestre et al., 2016) Difficultés d’apprentissage et d’attention (de Bellis et al., 2013; Font & Berger, 2015; Piescher et al., 2014; Roos et al., 2016), Difficultés de régulation des émotions (Cicchetti & Rogosch, 2012; Speidel et al., 2019; Spieker et al., 2018) Problèmes internalisés, dont l’anxiété, la dépression ou la somatisation (Bouvette-Turcot et al., 2017; Carmody et al., 2015; Wagner et al., 2016; Windhorst et al., 2015) Problèmes externalisés, tels que des problèmes d’opposition avec provocation, de l’agressivité ou d’hyperactivité (Bouvette-Turcot et al., 2017; Carmody et al., 2015; Fearon et al., 2010; Windhorst et al., 2015). Troubles psychopathologiques au cours de leur vie (Madigan, Atkinson, Laurin & Benoit, 2012). Vignette clinique Léa a 10 ans. Elle a vécu de la violence physique sévère dans son milieu familial. Elle exprime clairement son souhait de demeurer dans sa famille d’accueil et refuse tout contact avec ses parents. Elle parle de la situation de façon stoïque. Vous vous questionnez sur les risques d’un témoignage pour elle. Que faire? La loi sur la protection de la jeunesse L’intervention d’autorité de l’État dans la vie des familles doit être réservée à des situations graves et exceptionnelles Cette loi intervient dans les situations de mineurs de moins de 18 ans dont la sécurité/le développement est ou peut être compromis et leurs parents. Vise la fin de la situation de compromission par des mesures de contrôle, de surveillance et d'aide. C'est le signalement qui est l'élément déclencheur. Ces mesures sont déterminées par une entente sur des mesures volontaires ou par une ordonnance du tribunal. Modifié en 2007 o Sécurité et développement de l’enfant o Maintien de l’enfant dans son milieu familial o Continuité des soins et stabilité des liens o Délais maximaux de placement Sécurité Situations ayant un caractère de gravité qui peut nécessiter une intervention immédiate Décès des parents (38a) Absence ou négligence de soins requis par santé physique ou mentale (38b 1 ii) Abus sexuels ou physiques (38d et 38e) Développement Le développement s’apprécie à la lumière des seuils reconnus sur le plan clinique (ex: stades de développement) Quelques exemples: o Négligence sur le plan physique (38b 1 i) o Négligence sur le plan éducatif (38 b 1 iii) o Mauvais traitements psychologiques (38c) La notion de risque sérieux Aliénas o 38b)2) risque sérieux de négligence o 38d)2) risque sérieux d’abus sexuel o 38e)2) risque sérieux d’abus physique Introduite dans la LPJ en 2007 o Notion non définie o Clarification de la visée préventive de la LPJ et élargissement de la portée des interventions par les services de protection de la jeunesse o À l’évaluation, absence d’outils standardisés Responsabilité individuelle du risque o La source du risque et le levier de prévention o La vulnérabilité des enfants est considérée Évocation à des croyances erronées Perméable aux représentations sociales de la parentalité Facteurs d’analyse de la situation Nature, gravité, chronicité et fréquence des faits signalés L’âge et les caractéristiques personnelles de l’enfant Capacité et volonté des parents de mettre fin à la situation de compromission Les ressources du milieu pour venir en aide à l’enfant et à ses parents L’intervention de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) en quelques chiffres La mesure de placement La mesure de placement est une mesure de protection de l’enfant qui exige de l’enfant et des milieux familiaux concernés des efforts adaptatifs exceptionnels (Dozier, Higley, Albus, & Nutter, 2002; Dubois-Comtois et al., 2015; Stovall & Dozier, 2000). Avec plus de 50% des 21 486 enfants québécois pris en charge par la DPJ qui sont placés en milieu substitut (Association des centres jeunesse du Québec, 2016), force est d’admettre que le placement est une intervention de protection couramment utilisée. Des interventions juridiques et psychosociales sont déployées afin de minimiser les risques liés au placement, notamment en favorisant la stabilité des placements et la réunification familiale, lorsque la situation le permet. Au Québec, la Loi sur la protection de la Jeunesse privilégie : 1) le maintien de l’enfant dans son milieu familial; 2) la réunification familiale. 77% des enfants retournent dans le milieu familial biologique l’année suivant un placement (Hélie et al., 2011); Pour d’autres enfants, la rupture importante et peut être prolongé pour 20% des enfants au-delà d’une année (Drapeau et al., 2015; Esposito et al., 2014). Entre 15 et 40 % des familles expérimentent un échec de la réunification familiale (Berrick et al., 1998; Terling, 1999; Wulczyn, 2004). Réunification familiale amène plusieurs défis : o Vulnérabilités et fragilisation du rôle parental de la mère (Broadhurst & Mason, 2020; Noel, 2018; Schofield et al., 2011); o Perturbations de l’enfant (Maaskant, van Rooij, & Hermanns, 2014; Vasileva & Petermann, 2018; Sinclair et al., 2005); o Difficultés personnelles des mères biologiques (Noel, 2018; Sen & Broadhurst, 2011 ; Schofield et al., 2011). Placement et défis liés au placement Ici comme ailleurs, l’instabilité des mesures de placement est un sujet de préoccupation avec des épisodes de placement ponctués de nombreux déplacements et de tentatives de réunification familiale qui mèneront à un nouveau placement (Bellamy, 2008; Leathers, 2006; Wells & Guo, 2004). L’instabilité de la trajectoire de placement est un facteur de risque supplémentaire pour ces enfants qui cumulent déjà de nombreux risques au plan psychosocial (Fisher, Gunnar, Chamberlain, & Reid, 2000; Newton et al., 2000; Linares et al., 2010). Fragilisation de l’enfant La mesure de placement et le principe de permanence Selon l’article 4 de la LPJ, toute décision prise en vertu de cette dernière doit privilégier le maintien de l’enfant dans son milieu familial et si la situation ne le permet pas, privilégier la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de vie appropriées. Durée maximale de placement : déterminée selon l’âge de l’enfant. o Enfant de 2 ans et moins : 12 mois o Enfant âgé de 2 à 5 ans : 18 mois o Enfant âgé de 6 ans et plus : 24 mois Projet de vie : inscrit au dossier de chaque enfant o Maintien dans le milieu familial o Réunification familiale o Placement (en FAR ou en FAP) jusqu’à la majorité o Adoption o Tutelle Délais maximaux de placement: efforts juridiques pour assurer la stabilité de l'enfant Impact des modifications législatives sur les décisions rendues o Plusieurs décisions exposent que selon les tribunaux une ordonnance permanente ne signifie pas nécessairement jusqu’à la majorité de l’enfant o Quelques décisions concluaient que seule une telle ordonnance pouvait être qualifiée de permanente Disparité des décisions Dans une vision de permanence Ces délais maximaux s’accompagnent de la nécessité d’élaborer un projet de vie permanent Le calcul de la durée de l’hébergement doit tenir compte de la durée d’une mesure d’hébergement dans une entente sur mesures volontaires et des mesures d’hébergement antérieures dans la même situation Le tribunal peut considérer les mesures d’hébergement antérieures. À l’expiration des délais, lorsque la sécurité et le développement sont toujours compromis, o Continuité des soins, stabilité des liens et permanence Le tribunal peut passer outre ces délais si 1) le retour dans le milieu familial est prévu à courtterme; 2) l’intérêt de l’enfant l’exige; 3) pour des motifs sérieux (absence de services) Quand le meilleur intérêt de l’enfant permet de passer outre les délais maximaux de placement o Lorsque le retour dans le milieu familial est envisagé o Lorsque cela est justifié par l’intérêt de l’enfant o Lorsque cela est justifié pour des motifs sérieux. Lorsque le projet de vie proposé par le directeur n’est pas suffisamment élaboré, Lorsque l’importance des liens unissant l’enfant et ses parents ne permet pas au tribunal de rendre immédiatement une ordonnance visant la permanence, Lorsque l’ampleur des difficultés comportementales de l’enfant rend imprévisible la trajectoire de vie. Le fait de ne pas avoir rendu les services attendus Désignation de la famille d’accueil par le tribunal o La famille d’accueil est le cœur du projet de vie d’un enfant puisque c’est par son engagement que pourront être atteints les objectifs de stabilité et de continuité visés par la Loi (Protection de la jeunesse — 112010). o En juin 2011, la Cour d’appel s’exprime : [34] À mon avis, les changements apportés par le législateur à la Loi, en 2007, ont modifié le rôle du tribunal et l'autorisent à s'assurer que le projet de vie pour l'enfant favorisera réellement sa stabilité. Le DPJ désigne un établissement qui choisit la famille d'accueil pour le projet de vie et le tribunal prononce une ordonnance basée sur ce qui est proposé. Permettre au DPJ de changer l'enfant de famille d'accueil sans revenir devant le tribunal pour en expliquer les raisons et proposer une alternative aurait comme conséquence d'enlever à ce dernier le rôle qui lui a été confié par le législateur, c'est-à-dire, «rendre une ordonnance qui tend à assurer la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de vie de cet enfant, appropriées à ses besoins et à son âge, de façon permanente» (art. 91.1 (3) de la Loi), laquelle repose sur le projet de vie tel que proposé. Cohérence avec le principe de stabilité vs limitation de l’autorité sociale (Charrette, 2016) o LPJ et maintien des contacts avec le milieu d’origine L’article 91 de la LPJ confère au Tribunal un pouvoir clair quant aux modalités des relations personnelles de l’enfant avec ses parents ou d’autres personnes Seul le tribunal détient le pouvoir d’augmenter, de restreindre, de suspendre ou d'interdire les contacts à la suite de la preuve présentée devant lui. La Direction de la protection de la jeunesse joue toutefois le rôle crucial de planifier et soutenir la réalisation de ces contacts. La formulation régulièrement retenue, assujettissant les contacts à une entente entre les parties, fait en sorte que l’opposition de l’une d’elles les ramène aux modalités de contacts à défaut d’entente, ouvrant ainsi une porte à des décisions prises en fonction des points de vue plutôt qu’en fonction du véritable intérêt de l’enfant (Poitras, Cantin, Buisson, & Janelle, 2020). 91. Si le tribunal en vient à la conclusion que la sécurité ou le développement de l'enfant est compromis, il peut, pour la période qu'il détermine, ordonner l'exécution de l'une ou de plusieurs des mesures suivantes : a) que l'enfant soit maintenu dans son milieu familial ou qu'il soit confié à l'un ou à l'autre de ses parents, et que les parents fassent rapport périodiquement au directeur sur les mesures qu'ils appliquent à eux-mêmes ou à leur enfant pour mettre fin à la situation qui compromet la sécurité ou le développement de l'enfant; b) que l'enfant et ses parents participent activement à l'application de l'une ou l'autre des mesures qu’il ordonne; c) que certaines personnes qu'il désigne n'entrent pas en contact avec l'enfant; d) que l'enfant n'entre pas en contact avec certaines personnes qu'il désigne; e) que l'enfant soit confié à d'autres personnes; f) qu'une personne qui travaille pour un établissement ou un organisme apporte aide, conseil ou assistance à l'enfant et à sa famille; g) que l'enfant soit confié à un établissement qui exploite un centre hospitalier ou un centre local de services communautaires ou à un organisme afin qu'il y reçoive les soins et l'aide dont il a besoin; h) que l'enfant ou ses parents se présentent à intervalles réguliers chez le directeur pour lui faire part de l'évolution de la situation; i) que l'enfant reçoive certains soins et services de santé; j) que l'enfant soit confié à un établissement qui exploite un centre de réadaptation ou à une famille d'accueil, choisi par l'établissement qui exploite le centre de protection de l'enfance et de la jeunesse; [...] o) qu'une période de retour progressif de l'enfant dans son milieu familial ou social soit fixée. Le tribunal peut ordonner plusieurs mesures dans une même ordonnance, en autant que ces mesures ne soient pas incompatibles les unes avec les autres et qu'elles soient ordonnées dans l'intérêt de l'enfant. Il peut ainsi, dans son ordonnance, autoriser le maintien des relations personnelles de l'enfant avec ses parents, ses grands-parents ou une autre personne, selon les modalités qu'il détermine; il peut également prévoir plus d'un endroit où l'enfant serait hébergé et indiquer les périodes de temps pendant lesquelles l'enfant doit demeurer hébergé à chacun de ces endroits. Le droit québécois de la protection de la jeunesse est différent du droit des autres provinces canadiennes. En effet, dans plusieurs provinces canadiennes, il semble y avoir présomption que le maintien de contact avec les parents est contraire à son intérêt. L’intérêt de l'enfant = critère central a la décision de maintenir ou non les contacts parent-enfant. Caractère exceptionnel de la suspension ou de l’interdiction des contacts parent-enfant en contexte de placement à long terme Le fardeau de la preuve repose sur les épaules de celui qui entend les restreindre ou les interdire (Goubau, 2014). De nombreux juges insistent sur le fait que les contacts ne peuvent être supprimés que s'il est démontré qu'ils risquent de porter préjudice à l'enfant. D'autres juges rejettent explicitement ou implicitement une telle exigence en retenant, par exemple, que la simple démonstration que les contacts n'apporteront pas grand-chose dans la vie à l'enfant ou que les contacts ne se déroulent pas de manière optimale, suffit à mettre fin à ceux-ci, qu'il y ait une preuve de risque de préjudice ou non (Goubau, 2016). Dans le contexte du droit québécois, le risque de préjudice devient a fortiori le critère pertinent. Maintien des contacts parent-enfant et enjeux juridiques sous-jacents Goubau et Langlois, 2016: 69 jugements répertoriés pour l'année 2013 (11 décisions ordonnent l'arrêt des contacts) 62 jugements répertoriés pour l'année 2014 (19 décisions ordonnent l'arrêt des contacts) Facteurs retenus par les juges: o L'exercice irrégulier ou le non-exercice du droit de visite o Les conflits de loyauté entre la famille biologique et d’accueil o Les réactions négatives de l'enfant o Les désirs exprimés par l'enfant (dans une moindre mesure) Chaque critère n’est pas nécessairement interprété de la même manière o Impact des contacts sur l'intégration de l'enfant dans son milieu d'accueil o Impact de la réaction négative de l'enfant aux visites Recension systématique (Poitras et al., 2022) Quatre constats généraux peuvent être générés de ces études : 1. L’absence de contact parent-enfant a un impact négatif sur l’adaptation de l’enfant (Bell et al., 2013; McWey & Cui, 2017; Rees, 2013). 2. Un consensus existe entre les contacts et la qualité de la relation parent-enfant (Bell et al., 2013; Chesmore et al., 2017; McWey & Mullis, 2004; McWey, 2004). 3. Aucune association entre la performance académique et les contacts parent-enfant (Aldgate et al., 1992; Cantos et al., 1997), ni entre les contacts et la qualité de la relation avec le parent d’accueil (Joseph et al., 2014; McWey & Cui, 2017). 4. Associations mitigées entre les contacts et les perturbations comportementales de l’enfant. Variables potentiellement confondantes Caractéristiques du placement : Projet de vie de réunification familiale (McWey, 2004; McWey & Mullis, 2004); Durée du placement. Âge? Principales variables examinées : Variable dichotomique(absence/présence de contact) Modalité des contacts; Le fonctionnement comportemental de l’enfant. Qualité des études: Les études ayant une faible qualité révèlent des liens clairs qui sont défavorables (Gean et al., 1985; Strijker & Knorth, 2009) ou favorables (McWey, 2004; Rees, 2011); Les études révèlent des liens secondaires et indirects entre les contacts et le fonctionnement de l’enfant (Leathers, 2003 ; Bell et al., 2015). Ces études ont une qualité se situant entre acceptable et élevée et contrôlent des variables confondantes. La qualité des contacts : plus grosse faille est qu’on étudie pas la qualité des contacts. Commission Laurent Quelques conclusions du rapport en lien aux contacts : Réaffirmer et renforcer les droits des enfants a. Faciliter les contacts avec les personnes significatives pour l’enfant b. Primauté du choix et de l’intérêt de l’enfant dans l’établissement des contacts Considérer ce qui est exprimé par l’enfant et l’impliquer dans les décisions qui le concerne Réfléchir le maintien des contacts et leur fréquence dans l’intérêt de l’enfant Conflits sévères de séparation et litiges en matière familiale Conflits sévères de séparation Défis de la séparation parentale et coparentalité Deuil de la relation conjugale et nouvelles frontières relationnelles Pour la majorité, deux années sont suffisantes pour s’adapter à cette nouvelle réalité Réussite de ce défi relationnel dépend notamment des caractéristiques individuelles des parents (Drapeau, Bellavance, Robitaille, & Baude, 2014) Conflits sévères de séparation Pour 6 à 10 %, la séparation parentale est accompagnée d’un niveau de conflit parental très élevé et par un mode de communication non fonctionnel Chronicité des problèmes de communication Maintien d’un climat de méfiance Allégations de violences familiales Recours récurrent aux tribunaux pour trancher les sujets litigieux Exposition des enfants aux conflits parentaux Coparentalité dysfonctionnelle Situations familiales à haut niveau de conflit Les méthodes alternatives de résolution de conflit sont souvent mises en échec ou peu utilisées par les familles à haut niveau de conflit. Peu de services publics ou communautaires spécialisés et peu d’intervention ne repose sur un réel partenariat psychojudiciaire. FACTEURS LIÉS À L’ADAPTATION DE L’ENFANT ET AUX CAPACITÉS PARENTALES Sept besoins fondamentaux: T. B. Brazelton et S. I. Greenspan (2003) 1) le besoin de relations chaleureuses et stables 2) le besoin de protection physique, de sécurité et de régulation 3) le besoin d’expériences adaptées aux différences individuelles 4) le besoin d’expériences adaptées au développement 5) le besoin de limites, de structures et d’attentes 6) le besoin d’une communauté stable, de son soutien, de sa culture 7) le besoin de protection de notre avenir CAPACITÉS PARENTALES Il fait consensus que les conduites parentales positives (caractérisées par la chaleur, la prévisibilité et la cohérence aux besoins de l'enfants) prédissent sa santé psychologiques Le conflit parental prédit le fonctionnement de l’enfant avant la séparation parentale et après la séparation parentale Le portrait des capacités des deux parents peut être très différent et il ne faut pas négliger le caractère parfois complémentaire des rôles maternels et paternels Facteurs de risque liés aux CAPACITÉS parentales Situation socio-démographique Psychopathologie Consommation de substances chez le parent Intéractions parents-enfants insécurisantes Présence de traumas non résolus (Cohen, Hien & Batchelder, 2008) Satisfaction conjugale (Harold, Shelton, Goeke-Morey & Cummings, 2004) Conflit parental (Krishnakumar & Buehler,2004) Violence conjugale (Spencer, Mallory, Cafferky, Kimmes, Beck, & Stith, 2019) Séparation peut mettre à l'épreuve o La capacité parentale à superviser l’enfant adéquatement o À lui offrir un encadrement consistant (Hetherington,Cox & Cox, 1979) o À lui offrir chaleur et affection Ainsi, la notion d’intérêt de l’enfant doit être pensée en fonction de l’identification des besoins développementaux de l’enfant; ces besoins étant mis en relation avec les comportements, attitudes et caractéristiques parentales (Elrod & Spector, 2004 ; Patel & Choate, 2014). Cette réflexion doit être mis en relation selon le contexte, ex; pourrait malmener habilité des parents la séparation parentale. Trois consensus scientifiques 1) les premières expériences relationnelles sont déterminantes tout au long du développement de la personne. 2) les comportements de l’enfant et du parent interagissent de façon étroite Ex : parfois il est plus facile d’être parent d’un certain enfant et moins d’un autre selon les attributs de l’enfant et le fait qu’il soi plus ou moins facile. 3) certains contextes familiaux (ex. violence, maltraitance) présentent des risques importants pour le bienêtre de l’enfant. Difficultés d’accès Pertinence de dépister les difficultés d’accès • Ces difficultés d’accès constituent un sujet de préoccupation majeur. Pour certaines familles peuvent être temporaires, réactions chez les jeunes enfants qui se dissiperont avec le temps. Pour les enfants avec bonnes capacités parentales, ces réactions lors d’échanges vont se dissiper de façon plus efficaces. Le temps de vient parfois un acteur, Ex : bébé parents se séparent tôt, pas de confiance mutuelle de l’autre, enfant a des réactions, un des parents ne mets pas en application les accès et ne voit pas son enfant, période charnière. Possibilité d’améliorer les choses = diminuée. Juriste = lenteur devient problématique, doit donc avoir méthodes alternative à la judiciarisation ou autres méthodes en attendant cela. • Les difficultés de contacts induisent de la détresse chez les parents • Les transitions entre les deux milieux de vie sont éprouvantes pour les enfants (Neugebauer, 1989). • La présence d’un conflit sévère qui persiste entre les parents à la suite de la séparation demeure le meilleur prédicteur d’une mauvaise adaptation psychologique chez l’enfant. • Ces difficultés peuvent se cristalliser et compromettre le lien entre l’enfant et l’un de ces parents. Environ 8 à 19 % des cas (Peacy et Hunt, 2008). Rupture de liens est un facteur de risque associé aux difficultés académiques, la psychopathologie et la détresse à l’âge adulte • Ces difficultés peuvent nourrir le maintien de procédures judiciaires et prolonger ainsi le litige en matière de garde. Il s’avère important de déceler le plus tôt possible ces difficultés. Difficultés d'accès et rupture de liens parent-enfant : Facteurs individuels et familiaux Les parents Les comportements de désengagement o Parent ne se présente pas, n’honore pas les accès. Les comportements d’obstruction o Un parent se trouve inquiet des conduites parentales de l’autre parent, ne respectera pas les ententes et retiendra l’enfant. o Parfois = justifiée – violence o Malveillante = évincé autre parent de la vie de l’enfant. L’enfant (rôle actif dans famille) L’anxiété de séparation o Peut expliquer réticence d’aller chez l’autre. Qualité des interactions et lien d’attachement o Certaines peuvent favoriser son adaptation L’âge de l’enfant o Plus de difficultés chez les jeunes et reviennent en force à l’adolescence. Ex : ado veut voir ami, ne pourra pas à cause que doit voir autre parent. Ces comportements, parfois diamétralement, peuvent être interreliés et gagnent à être analysés de façon systémique. Caractéristiques des parents et enfants peuvent s’inter-influencer. Comme juris, pas penser que un est responsable, doit voir l’apport de chacun à la situation. L’enfant, comme chacun de ses parents, joue un rôle actif dans les difficultés d’accès vécues Difficultés d’accès: le rôle des intervenants psychojudiciaires Les avocats et les juges Saisir l’urgence des difficultés et contribuer à identifier les causes sous-jacentes. Les juges et les avocats peuvent contribuer à dépister ces situations familiales à risque de rupture de lien (Fidler et Bala, 2010). En dépistant plus tôt difficulté d’accès permet de proposer une solution plus ajustée au problème et pour identifier devra avoir fait une analyse. L’expert psychosocial • Se pencher sur les difficultés d’accès, en proposant une compréhension systémique claire et en accompagnant les recommandations en matière de garde et de droits d’accès par une intervention sur mesure. On attend revu nuancée facteurs relationnels et familiaux qui expliquent les difficultés d’accès. L’intervenant psychosocial • • • • Offrir des interventions psychoéducatives ciblées et des interventions portant sur la qualité de la relation parent-enfant (Gaudet, Devault et Bouchard, 2005). Dénouer les enjeux personnels de chacun par la psychothérapie. Favoriser la communication parentale par le soutien de la psychothérapie ou la médiation familiale. Nécessité d’intervenir de façon systémique (Poitras et Drapeau, 2014) Violence familiale Tous les enfants et les adolescents qui vivent dans une famille affectée par une dynamique de violence conjugale sont considérés comme exposés à la violence conjugale (Lessard, 2018) Pas besoin d’être impliquée directement dans la violence conjugale pour en subir les conséquences. Ampleur du phénomène ▸ Le tiers des femmes de la planète ont déjà été victimes de violence physique ou sexuelle (OMS, 2013) ▸ Le tiers des Canadiennes ont vécu au moins une agression physique ou psychologique de la part de leur partenaire. ▸ 25% des dossiers familiaux qui vont à procès (Poitras et al., 2020) ▸ Exposition à la violence conjugale est une forme de maltraitance envers les enfants ○ 34% des cas de protection de la jeunesse au Canada Parents qui sollicitent service psycho judiciaire ont été marqué par violence conjugale. • • • • • Conséquences à la violence conjugale Détresse psychologique, dépression, anxiété, idées suicidaires, état de stress post-traumatique, baisse d’estime de soi, problème de consommation, confusion, difficulté à prendre des décisions, isolement social, absentéisme et diminution de la performance au travail Ces conséquences persistent dans le temps (Adkins et Kamp Dush, 2010). La violence conjugale affecte le fonctionnement de la mère qui, à son tour, affecte le fonctionnement de l’enfant (Levendosky et al., 2006) Conséquences de la violence conjugale sur les enfants Conséquences à court, moyen et long termes: problèmes de santé physique et mentale, problèmes de fonctionnement social et scolaire, troubles d’adaptation (intériorisés et extériorisés), état de stress post-traumatique Lien bidirectionnel avec les comportements parentaux Amendements à la Loi sur le divorce entrés en vigueur le 1er mars 2021 Selon connaissances scientifiques. ▸ Art. 16 (3) Pour déterminer l’intérêt de l’enfant, le tribunal tient compte notamment : (…) j) de la présence de violence familiale et de ses effets sur, notamment : (i) la capacité et la volonté de toute personne ayant recours à la violence familiale de prendre soin de lui et de répondre à ses besoins; (ii) l’opportunité d’une ordonnance qui nécessite la collaboration des personnes qui seraient visées par l’ordonnance à l’égard de questions le concernant; (…) ▸ Art. 16 (4) Facteurs relatifs à la violence familiale dont le tribunal tient compte : (pas juste si oui/non ont des backgrounds de violences conjugale) ▸ sa nature, sa gravité, sa fréquence ▸ la présence chez un membre de la famille d’un comportement coercitif et dominant (et les mesures par cette personne pour améliorer son comportement) ▸ l’exposition directe ou indirecte de l’enfant à la violence familiale (dirigée contre lui ou non) ▸ le tort physique, affectif ou psychologique causé à l’enfant, ou le risque de tel tort ▸ la compromission de la sécurité de l’enfant ou d’un autre membre de la famille (ou la crainte de l’enfant pour sa sécurité ou celle d’autrui) Art. 2 Définition de « violence familiale » : ▸ Toute conduite, contraire ou non au Code criminel ▸ Par un membre de la famille (défini largement) envers un autre membre de la famille ▸ Conduite cumulative et violente ou menaçante ▸ Traduisant un comportement coercitif et dominant ▸ À laquelle l’enfant est exposé directement ou indirectement ▸ Qui porte à craindre pour sa propre sécurité ou celle d’une « autre personne Partage du temps parental et critères judiciaires Critères juridiques pour établir la garde et les droits d’accès Droit de la famille – 071666 • • • • • • • • • • • Les besoins de l’enfant; La capacité parentale de répondre aux besoins de l’enfant; La relation affective entre l’enfant et les parents; La relation affective entre l’enfant et les membres de la famille ; La stabilité de l’enfant; L’environnement psychosocial de l’enfant; La santé physique et mentale de l’enfant et de celui qui en revendique la garde; La disponibilité réelle des parents; Les habitudes de vie des parents, si celles-ci ont une incidence directe sur l’enfant; ▸ La nonséparation de la fratrie; Le désir de l’enfant; La disposition à favoriser la relation avec l’autre parent. Présence ou non de violence conjugale – ajoutée depuis la modif à la loi sur le divorce. CRITÈRES JURIDIQUES ET PREUVE PSYCHOLOGIQUE Conflit est le plus néfaste pour l’enfant. Petite plus-value de la garde partagée, mais cela est exclusivement étude de parents qui ont pas eu à voir tribunaux pour déterminer la garde. • • • L’importance de la continuité des liens parentaux est soutenue par les lois en place. Lorsqu’il attribue du temps parental, le tribunal applique le principe selon lequel l’enfant devrait passer avec chaque époux le plus de temps compatible avec son propre intérêt. D’ailleurs, il existerait, à l’heure actuelle, une tendance lourde en faveur de la garde partagée de la part des tribunaux (Goubau, 2003; Tétrault, 2006). Le bien-être des jeunes en garde partagée : un bilan des controverses et des connaissances scientifiques Par Amandine Baude Défis pour le système de justice familiale ▸ Plusieurs instances judiciaires impliquées ▸ La preuve repose sur des témoignages contradictoires – les deux parlent avec confiance ▸ Le parent qui est victime peut être éprouvé au plan de sa parentalité Parent qui a eu violence conjugale, ça va ébranler sa conjugalité. Son rôle parental. ▸ Maintien de la relation parent-enfant et intérêt de l’enfant Doit être favorisé. Absence de lien avec un parent est délétère, mais pas de soutient de la rechercher d’une formule de garde plutôt que l’autre Écart décision du tribunal VS données de recherches disponibles. ▸ Situations extrêmement complexes Médiateurs ▸ Processus de négociation qui repose sur le principe d’équité et celui de la parité ▸ Absence de consensus sur l’exclusion de ces familles ou l’adaptation des processus de médiation ▸ Violence conjugale ne semble pas freiner l’utilisation des services de médiation (Poitras et al., 2023) ▸ Obligation de dépister et défi du dépistage Mais c’est dur de dépister. Mm travailleurs sociaux ont ce défi. Médiateurs ont pas été formés à ce dépistage. Experts psychosociaux ▸ Défi de distinguer les enjeux de violence coercitive et les conflits sévère de séparation (Godbout et al., 2020) ▸ Faible utilisation des mesures spécifiques de violence (Bow et Boxer, 2003) (elles sont disponible mais peu utilisées) ▸ Défi de mesurer les allégations de violence sans preuve factuel des allégations (Austin, 2000) Avocats Le discours des parents est contradictoire et chacun tente activement de convaincre des torts de l’autre parent (Fidler & Bala, 2020) Risque du rôle traditionnel de l’avocat/e = défense du désir de son client sans tenir compte de la dynamique familiale et de l’adaptation des enfants (Bala, Hebert & Birnbaum, 2017; Firestone & Weinstein, 2004 ; Target, Hertzmann, Midgley, Casey & Lassri, 2017). Défi de conserver une distance relationnelle avec son client et de lui offrir les conseils les plus judicieux Risque de contribuer à augmenter l’animosité et l’hostilité entre les parents (Pruett & Jackson, 1999). Me Gauthier Comment se protéger comme professionnel pour avoir vision plus familiale quand représente un des clients. Parents ne pensent pas à l’enfant en contexte de séparation. En cours sup; on peut juste demander une expertise psychosociale et après avocat fait ce qu’il peut avec. Ça prend 4-5-6 mois avant d’obtenir l’expertise et avant de la montrer au juge cours sup un autre 4 à6 mois. Donc au total quand tu vois que plus de contact entre un parent enfant – 12 mois, Montréal peut être 2-3 ans. Procure grande frustration. Rôle de l’avocat : on enseigne encore qui sera le meilleur plaideur, qui va gagner. C’est encore le modèle contradictoire qui est de mise. Il faut réflexion qui favorise la compréhension chez le client, qui améliorerait son comportement dans la situation. À court terme = pourrait marcher de faire juste une ordonnance de sauvegarde pour réussir à rendre ton client heureux. Mais long terme, marchera pas, pas bon pour l’enfant ni pour le parent. Article du code de déontologie – 20, 23 et 48. 20 – devoir de prudence envers ton client, l’aider à comprendre que son comportement peut le nuire à sa famille. 23 – dans le meilleur intérêt du client, parfois lui forcer ses idées pour lui expliquer qu’à long terme brisera un lien de confiance. 48 – on est indépendant. Peut cesser d’agir pour le client si pas conforme à ce que c’est mieux pour l’enfant. Si je sais que ce père fait ciement entrave au droit de la mère de voir son enfant, alors là tes valeurs entre en jeux, tu as le droit de dire je ne te représente plus. 3 outils : (doctrine) Communication privilégiée : premier professionnel qui aura écoute de la situation. Façon de recevoir le client. Dès la première rencontre, attitude de plus de retenue. Formation spécialisée : tu dois comme professionnel aller te chercher des formations supplémentaires. Dans le domaine de la psycho pour être performant dans ton métier. Ne pourra pas diriger ton client vers de bonnes ressources si tu ne sais pas de quoi tu parles. Connaissance stratégique du processus judiciaire : tu connais les procédures, le système judiciaire. Pas utiliser le processus judiciaire pour mettre des bâtons dans les roues, ou bien de faire preuve d’imagination, qu’il y a d’autres méthodes d’intervention, même si pas écrit noir sur blanc. Modèle de gestion psycho judiciaire Dans doctrine. (situation ou la médiation donne rien, trop complexe) ces modèles sont basés sur la frustration des délais des professionnels. PCR – 2 : QC et Saguenay. Projet pilote de la cours sup. Coordination parentale – à Montréal. Procédure judiciaire adaptée Intervention psychosociale novatrice Parentset avocats qui veulent Interdisciplinarité fluide. 1 juge – 1 famille. Demande conjointe des parents sur le site de la cours sup Éval de l’admissibilité : jugement non-respectée, hostilité élevée entre les parents, Exclusion de violence conjugale, protection de la jeunesse, quérulence… Désignation du juge et de l’IDF ( intervention thérapeutique avec la famille) Si ok alors Audience préliminaire : chaque parent s’exprime, pas de contre interro. Début du suivi avec IDF Audience de suivi et interventions au besoin Audience finale 12 à 18 mois. Si fin du PCR, même juge demeure saisi du dossier Normalement juge pourrait choisir quand et cb de temps sera entendu par lui dans le processus. Programme FÉE Psychoéducatif, pas une thérapie de groupe. 3 séances de 2 heures sur 2 semaines Introspectifs Habiletés de communications 2 séances de 3 h Deux animateurs 6 à 8 parents par groupe Subvention gouv et ou parents paient honoraire, ajd parents doivent payer et surtout pour l’IDF. IDF – intervenant sur la dynamique familiale Intervention systémique sur la famille selon le besoin identifié par le juge Professionnel expérimenté 45 h minimum Collaboration avec équipe judiciaire (juge, avocat et rapport périodiques) Peut et doit communiquer avec avocat et juge Pas de recommandations Juge va dire Mme idf je vous alloue 10h si ça marche on vous donne un aura 35h et on veut un rapport. Pour voir si ça avance. S’il faut juge pourra ramener tout le monde en cours. Jamais perdre de temps = objectif. Avocat et parents engagés à collaborer Parents Mm juge jusqu’à la fin Engagement à la collaboration identifiée par la juge Consentement à l’échange d’info entre professionnels Avocat Doit collaborer S’assurer du respect de l’engagement des parents Promouvoir collabo parents Travailler dans l’intérêt des enfants et objectif identifié par la juge. Interdisciplinarité et communication fluide Intérêt de l’enfant est au centre du juge, de l’IDF et de l’avocat. Il y a un guide de communication Avocat et IDF doivent communiquer si impasse Objectif : utiliser le potentiel d’influencer de l’Autre professionnel pour favoriser la mobilisation des parents. Utiliser notre lien de confiance pour conseiller au client l’écoute du pt de vue de l’IDF. La juge soit savoir rapidement les parents se mobilisent ou non pour intervenir en temps utile. PCP – projet de coordination parentale Mm procédure judiciaire et admin. Mm temps alloué. Eux sont subventionné depuis novembre 2023. Mm approche, mm exclusion, mm non contraignable (pas contraindre un IDF comme témoin expert) Différence : pas idf dans coordination parentale : peut-être travailleur social, avocat, psychologue (moins axée thérapeutique ici). Grande différence aussi : IDF peut pas faire de recommandation, dans la coordination le coordonateur peut faire des recommandations sur les solutions au juge. Similitude : Objectifs similaire à peu de choses près Mm procédures judiciaire et admin Mm temps alloués (45h) Mm approche collaboratrice Mm engagement des avocats et des parents Mm exclusions Mm guide de communication Mm non contraignabilité Différence Pas une IDF (psychologue) Mais un coordonnateur parental (psychosocial ou avocat) Pour être admins, nécessaire d’Avoir déjà un jugement rendu La coordonnatrice parentale peut faire des recommandations au juge ou à l’avocat. Avocat reste lui qui coach IDF reste lui qui travaille dans l’atteinte de ces objectifs. Juge tranche. Dur de travailler en interdisciplinarité ex : temps pour intervenant psycho a besoin de bcp de temps, juge a pas bcp de temps. Avocat le temps, le client est en urgence, le client veut que ça soit réglé depuis hier. Recentrer éval sur le bien-être de l’enfant. L’EXPERTISE PSYCHOLOGIQUE ET PSYCHOSOCIALE : GÉNÉRALITÉS ET SPÉCIFICITÉS L’expertise psychologique et psychosociale: quelques mots d’introduction Le recours aux expertises est de plus en plus fréquent (Brunet, 2014; Krauss, Cassar, & Strother, 2009). Les dossiers soumis à une demande d’expertise sont de plus en plus complexes (Bala, 2004) La preuve d’expert est généralement déterminante (Semple, 2011) La réalisation de l’expertise a des coûts o Exigeante pour le système de justice familiale (et les autres) o Exigeante pour la famille au plan financier et personnel o Risquée pour les professionnel.le.s qui expriment leur opinion d’expert Pertinence de l’expertise ET importance d’en optimiser l’utilisation Diversité des mandats et des contextes de pratique La preuve psychologique : un incontournable pour éclairer les tribunaux devant trancher divers litiges (Emery, Otto, & O'Donohue, 2005 ; Goubau, 2009). Les psychologues sont appelés devant les tribunaux pour se prononcer sur le fonctionnement individuel, relationnel, familial et social d’un individu. Pratique très encadrée Ces éléments de preuve sont prisés par les juristes et déterminants pour les tribunaux qui suivent généralement les recommandations reçues (Saini, 2008; Semple 2011) Les préoccupations judiciaires ne sont pas en parfaite adéquation avec les connaissances en psychologie. L’évaluation de séquelles neuropsychologiques L’expertise en matière de garde d’enfants L’évaluation des capacités parentales en contexte de protection de la jeunesse L’évaluation de séquelles psychologiques à la suite d’un événement traumatique ou d’une blessure Matière civile L’expertise en matière familiale (partage du temps parental) L’expertise en matière de protection de la jeunesse L’expertise en matière d’état ou de blessure psychologique o Choc post-traumatique subi par des victimes d'incidents préjudiciables; o Limitations professionnelles découlant de tels incidents; o Harcèlement psychologique au travail et ailleurs; o Séquelles psychologiques liées à un renvoi présumé illégal Matière criminelle L’expertise en matière de dangerosité L’expertise en matière de séquelles psychologiques L’expertise sur la capacité de formuler une intention criminelle (Responsabilité criminelle) Santé mentale Surreprésentation d’individus présentant un trouble de santé mentale dans le système de justice Témoins vulnérables et détermination de la crédibilité Exacerbation des signes et symptômes en contexte de stress Les difficultés sur le plan de la santé mentale compliquent l’interprétation de certaines notions juridiques (ex. responsabilité criminelle; meilleur intérêt de l’enfant) Participation biaisée Désir de se présenter sous un jour favorable (ex. matière familiale) Désir de se présenter sous un jour défavorable, simuler (ex. évaluation d’une blessure psychologique) o Capacité du professionnel à se prononcer sur la présentation biaisée du client; peut soutenir l’analyse de la crédibilité effectuée par le ou la juge. Enjeux pour les juristes (Redding, 2004) Aide à l’appréciation des caractéristiques individuelles du client pour établir meilleure stratégie, réfléchir à sa capacité à témoigner Influence le rapport avocat-client Permet l’anticipation des difficultés à représenter les intérêts d’un individu présentant un trouble de santé mentale D’inscrit dans utilisation stratégique de la preuve d’expert Contexte judiciaire et accueil de la preuve d’expert Règles de preuve contrôlant l’admissibilité de la preuve d’expertise Par exception, l’expert peut témoigner non seulement sur les faits dont il a connaissance personnelle, mais il peut aussi donner son opinion (article 2843 C.c.Q) Il peut donner son opinion sur tous les faits litigieux, y compris ceux qui constituent pour lui du ouï-dire Cependant, la preuve devra être apportée autrement (autre témoin, écrit, etc.) quant aux faits que le témoin ne connaît que par ouï-dire Vu l’exception, une procédure préalable est requise (« voir dire ») pour faire déclarer recevable le témoignage durant lequel l’expert entend livrer son opinion Plusieurs experts sont mal prévenus et préparés à l’étape du voir dire, où l’on vérifie s’ils ont les qualifications requises pour livrer leur opinion L’article 241 C.p.c. permet le rejet hâtif du rapport d’expertise en cas d’irrégularité, erreur grave ou partialité (situations restrictives) peut rejeter un rapport d’expertise avant le procès Comme avec tout témoin, le tribunal vérifie la valeur probante (si l’expert est crédible et fiable) La vérification de la valeur probante s’appuie sur des facteurs objectifs: o Nombre d’années d’expérience, scolarité, expérience comme témoin expert o Capacité d’expliquer, d’articuler une trame logique entre les faits et le domaine d’expertise Et sur des facteurs subjectifs: o Attitude en salle d’audience o Honnêteté, objectivité et prudence o Confiance o Qualité du rapport écrit Le contre-interrogatoire de l’expert o Étape dont l’expert semble parfois mal prévenu et auquel il peut être mal préparé o Plusieurs avocat/e/s semblent considérer qu’avec un témoin expert, leur marge de manœuvre est beaucoup plus ample avant de frôler l’abus (art. 278 C.p.c.) o L’expert est parfois confronté à des jugements antérieurs dans lesquels ses rapports et témoignages ont été discrédités par le tribunal o Le/la juge doit alors déterminer si l’expert a ainsi été discrédité à tout jamais (rarement) ou s’il a pu faire depuis amende honorable Appréciation finale du juge Les motifs du jugement sont censés refléter que la juge a analysé et tenu compte de chaque avis d’expert Le jugement doit souvent motiver pourquoi l’avis d’un expert a été préféré à celui d’un autre Il arrive que le jugement discrédite une expertise, un expert, avec plus ou moins de sévérité (utilité de chasser du système les pseudo-experts ou les mercenaires) Ce jugement est publié, rapporté, recensé : ce même expert peut, dans une autre affaire, être confronté aux propos négatifs du juge L’avocat ne doit pas « mener son expert à l’abattoir » Contexte judiciaire et accueil de la preuve d’expert psychologique/psychosocial Le rôle des psychologues ne diverge pas fondamentalement de celui des autres experts judiciaires. Les règles de base sont les mêmes, que l’on soit expert sur les vices cachés affectant un immeuble, sur la juste valeur marchande d’une petite entreprise ou sur les capacités parentales du père et de la mère d’un enfant. Les juges sont généralement réceptifs à l’expertise psychologique, tant qu’elle ne s’aventure pas à opiner sur la crédibilité des parties et des témoins, cette appréciation relevant exclusivement du juge d’instance. L’avis de l’expert influe considérablement sur les décisions prises par le tribunal. Comme pour tout témoignage d’expert, le juge d’instance n’est pas lié par les recommandations du psychologue expert. Cependant, la Cour d’appel insiste pour que le juge motive adéquatement l’adoption de mesures qui dérogent à de telles recommandations. Certains experts aux yeux des tribunaux G.C. c. Brahm, 2020 QCCS 1844 (j. Brodeur) : Psychiatre qui, en soutien à son patient, rédige un rapport recommandant la garde partagée en blâmant la conjointe du patient sans jamais l’avoir rencontrée. Dommages punitifs de 20 000 $. Permission d'appeler refusée, 2021 QCCA 303, 18 février 2021 A.L. c. Tribunal administratif du Québec, 2020 QCCS 2665 (j. Immer) : Cas de fibromyalgie qui résulterait ou non d’un accident d’auto. Rejet de l’avis d’un neurologue, parce qu’il omet de l’appuyer sur quelque élément objectif prouvé. On ne se satisfait pas d’une opinion basée uniquement sur son expérience. AIG Insurance Company of Canada c. Mécano Mobile RL inc.,2023 QCCS 1935 Pelle excavatrice incendiée. Recours subrogatoire de l’assureur ayant indemnisé l’acheteur de la pelle (GFC). L’enjeu : cause de l’incendie (vice caché?). Expertises contradictoires (trois experts). Rejet de l’opinion de l’expert Bouchard (mandaté par le vendeur Strongco) : il n’a pas examiné la pelle incendiée, il s’appuie sur des faits qui n’ont pas été prouvés au procès et son rapport comporte des inexactitudes. Surtout, il utilise un ton excessif en vue de démolir systématiquement l’opinion de l’expert Allard (mandaté par l’assureur). Trudeau c. Cérat, 2021 QCCQ 12824 (j. Thibodeau, 9 décembre 2021) Poursuite en responsabilité médicale à la suite d'une chirurgie gynécologique Opinions opposées de deux obstétriciens-gynécologues L'un d'eux s'écarte des faits spécifiques et énonce des opinions catégoriques ne reposant ni sur la preuve ni sur les publications scientifiques Le Tribunal en vient à se questionner sur le degré d'impartialité et d'objectivité avec lequel cet expert a rédigé son rapport. Responsabilité civile vs immunité de l’expert Les tribunaux reconnaissent à l’expert une immunité relative, dont il est dépouillé quand il outrepasse les limites de sa fonction Audet c. Landry, 2009 QCCS 3312 et 2011 QCCA 535 (mention diffamatoire de « fraude ») chirurgie buccale et querelle dans l’équipe, une patiente poursuit son chirurgien pour intervention qui lui a donner plus de problèmes. Mandate un expert (Landry) poursuivit en responsabilité par le chirurgien car l’expert prétend à une faute et soupçonne une fraude : pas fait l’intervention tel que décrit. Amie de l’expert est rival d’Audet. Et sujet pas dans son champ d’expertise. Fortier c. Lavoie, 2009 QCCS 6604 et 2012 QCCA 754 (non-respect des règles de l’art, analyse superficielle et incomplète). Docteur Lavoie fait un rapport d’expertise sur des données erronées, omit de vérifier la vérité et la fiabilité des données. Le cas de l’expert du syndic de l’ordre professionnel Touchette c. Ordre des psychologues, 2022 QCCA 1498 (extension de l’immunité statutaire du syndic à l’expert mandaté par celui-ci) L’expertise psychologique et psychosociale: le critère de nécessité La commission d’enquête Goudge (2008) Preuve utilisée à répétition par la Poursuite criminelle À Toronto, plusieurs verdicts de culpabilité prononcés contre des adultes (parents) sur la base des rapports d’expertise du Dr Charles Smith, pathologiste pédiatrique, à la suite du décès d’un enfant Témoignage impressionnant du Dr Smith qui incriminait les accusés de façon catégorique et sans concéder que ses méthodes comportaient des risques d’erreur Impact démesuré sur les biais cognitifs des jurés (et des juges) Le Dr Smith ne détenait pas la formation et les connaissances spécifiques pour soutenir son opinion Le critère de nécessité et coût pour le système de justice L’expertise doit être nécessaire et non simplement utile : articles 19, 158 (2), 232 C.p.c.) L’ajout de témoins experts au débat judiciaire a un coût pour les systèmes de justice (Poitras et Gagnon, 2020) : o Débat plus complexe o Débat plus long o Procédure plus coûteuse Si l’effet préjudiciable de l’expertise surpasse sa valeur probante, l’expertise ne doit pas être admise en preuve Admissibilité de la preuve par expertise R. c. Mohan, (1994) 2 RCS 9 : quatre critères (Premier volet) o Pertinence o Nécessité d’éclairer le décideur o Absence de toute règle d’exclusion, ex : le secret professionnel o Qualification suffisante de l’expert White Burgess Langille Inman c. Abbott and Haliburton Co., 2015 CSC 23 (Ajout du deuxième volet) o Analyse coût-bénéfices : « si la valeur probante est surpassée par son effet préjudiciable » Méfiance face aux pseudo-sciences (Gatekeeping, judges as gatekeepers) Phénomène des experts témoignant en matière criminelle (surtout mais pas exclusivement en défense) sur la base de tests et d’analyses débordant les normes généralement approuvées par leur communauté scientifique respective (« les pairs »), ou appliquant la science reconnue dans un objectif inédit - Vitesse réelle du véhicule au moment du contrôle radar - Taux d’alcool dans le sang selon le volume consommé et l’écoulement du temps - Ton de voix d’une personne contactant la ligne 9-1-1 - Analyse de cheveux prélevés sur la scène de crime Juge Binnie dans R. c. J-LJ, 2000 CSC 51 : - Accusation d’agressions sexuelles sur deux jeunes garçons. - En défense, expert psychiatre référant à un test de pléthysmographie pénienne. - Test utilisé en tant qu’outil médicolégal (par les psychiatres) pour identifier des déviants sexuels, mais jamais utilisé dans une affaire criminelle. Utilisation nouvelle d’une technique éprouvée. - (55) La possibilité qu’une telle preuve- « empreinte de la mystique de la science » (...) fausse le processus des faits était réel. - Témoignage de l’expert exclu parce qu’ « inapproprié » thérapeutique vs disculpation Juge Cromwell dans White Burgess (2015): - (23) Une opinion fondée sur une science nouvelle ou contestée ou sur une science utilisée à des fins nouvelles requiert une démonstration (scientifique)(…) À défaut, elle ne répond pas au critère de nécessité. Application en droit civil québécois de l’arrêt White Burgess : Cardinal c. Bonnaud, 2018 QCCA 1357 - Patiente poursuivant son médecin en raison de la naissance d’un enfant en dépit du dispositif contraceptif prescrit par ce médecin - Test polygraphique (produit en demande) amenant l’expert à conclure que la patiente n’a pas menti sur la teneur des propos échangés durant la consultation médicale préalable. - Le rapport d’expertise est succinct et n’indique pas la méthodologie utilisée. - C’est au juge du procès et non à cet expert qu’il incombe d’apprécier la crédibilité de Mme Cardinal. L’expertise n’est pas fiable, elle n’est ni utile ni nécessaire. Le critère de nécessité et coût pour les professionnel.les Domaine de pratique jugé risqué pour les professionnel.le.s : hauts niveaux de stress, questionnement de leurs pratiques évaluatives et demandes d’enquêtes professionnelles fréquentes Pénurie de professionnels disponibles et entrave possible au principe d’accès à la justice (Bala, 2004). Le critère de nécessité et coût pour l’expertisé.e Exigeant sur le plan financier Exigeant sur le plan personnel Expérience mitigée (voire douloureuse) de la participation à une expertise (Dessureault, 2010). Pratique qui est perçue par certains comme intrusive (Godbout et al., 2017). Le critère de nécessité et obligation du/de la professionnel.le 45. Le psychologue ne pose ni ne multiplie des actes professionnels sans raison suffisante et s’abstient de poser un acte inapproprié ou disproportionné au besoin de son client. 3.02.11. Dans l'exercice de sa profession, le travailleur social agit avec modération et évite de multiplier, sans raisons suffisantes, des actes destinés à répondre aux besoins de son client. Le travailleur social évite également de poser des actes qui seraient inappropriés ou disproportionnés aux besoins de son client. Maximiser les bienfaits et minimiser les risques du service Points de vue des parties prenantes en matière familiale Point de vue des familles expertisées Expérience généralement insatisfaisante chez les familles expertisées (Locat et al., en prép). Certaines familles rapportent une expérience douloureuse quant à leur participation à une expertise. L’enquête québécoise Séparation parentale Recomposition familiale indique que des 103 parents (N = 1551) ayant participé à une démarche d’expertise, près de la moitié perçoit que ce service a nui ou n’a pas aidé au règlement du conflit (Poitras et Godbout, en préparation) Nous en connaissons très peu sur l’expérience des individus ayant participé à une expertise psychologique ou psychosociale Point de vue des experts Les attentes envers les experts sont très élevées et seule une évaluation rigoureuse et approfondie permet de formuler des recommandations bien appuyées; L’expert a accès à la littérature scientifique, à des lignes directrices et des balises déontologiques pour guider son travail, mais le point de vue des experts sur l’utilité de ces ressources est peu connue; Les travaux portant sur les pratiques des experts suggèrent une disparité des procédures d’évaluation, ainsi qu’un manque d’objectivité et de cohérence des procédures Il existe des disparités dans la manière de distinguer le rôle de psychologue expert de celui de clinicien (Guerreiro et al., 2018) Peut avoir des réticences à exécuter des mandats d’expertise dans des dossiers litigieux et souvent controversés Aucune formation offerte aux psychologues en lien aux systèmes de justice. Certains constatent leur piètre connaissance du système judiciaire Point de vue des juristes Certaines études font ressortir les critiques/reproches des juristes (Bow et al., 2011) Satisfaction mitigée quant à la qualité des rapports d’expertise et observation d’une disparité dans les pratiques des experts Les avocats et les juges requièrent les services des experts et déplorent une pénurie de professionnels disponibles, y voyant une entrave possible au principe d’accès à la justice Peu de connaissance sur les attentes des juristes relatives à la présentation, à la structure du rapport ainsi qu’à l’analyse de l’expert qui seraient les plus utiles aux tribunaux Points de vue divergents? Les perceptions respectives des pratiques professionnelles de même que les attentes varient entre experts et juristes On constate des écarts entre ce que les professionnels du droit considèrent important et ce que livrent les rapports d’experts (O’Neil et al., 2018) Décideurs judiciaires et experts travaillent en silo, ce qui nuit à l’utilisation optimale de l’expertise psychologique (Guerreiro et al., 2018) Étude portant sur l’analyse de la qualité des expertises (O’Neill et al., 2018) 4 groupes sondés: EP (Expert psychologue), ICL (Independant Child Lawyer), FL (Family Lawyer) et Juge Caractéristiques importantes pour les 4 groupes: 1. Les recommandations découlent du corps du rapport 2. Les opinions sont liées aux faits 3. Les capacités parentales des deux parties sont présentées 4. Description de la relation parent-enfant 5. La santé mentale des participants 6. Les documents sont répertoriés dans le rapport 7. Les recommandations sont spécifiques et appropriées 8. Les dynamiques parent-enfant sont décrites 9. L’analyse inclut une perspective développementale Peu de variation dans l’évaluation de la qualité d’un rapport entre les 3 groupes de juristes. Certaines caractéristiques semblent plus importantes pour les juristes. Par ex: o La participation des parties dans les évaluations o Les documents sont bien répertoriés o Les qualifications et l’expérience de l’expert Chocs des cultures Vocabulaire Critères juridiques n’ont pas le même appui scientifique Méconnaissance des besoins des juges pour éclairer leur décision (ex. désir de l’enfant) Méconnaissance de l’exigence de l’expertise pour le système de justice (ex. nombre de pages) Méconnaissance des enjeux liés à la crédibilité Etc. Possibilité de collaboration Il y a une divergence entre ce que les juristes veulent dans un rapport d’expertise et ce que les experts produisent (O’neill et al., 2018). Communication des attentes et des limites respectives sont requises. Espace de discussion encouragé (Guerreiro et al., 2018) Comment optimiser les retombées de l’expertise Ce que les experts peuvent faire Compétence, intégrité, objectivité et modération o l’expert doit utiliser des informations issues de sources multiples, à partir de méthodes d’évaluation variées (Drozd et al., 2013; Poitras et al., 2014) Rigueur scientifique est le meilleur garde-fou contre les mauvaises pratiques (Kelly et Johnston, 2005) o sujets délicats et controversés qui sont soumis à l’expert o biais cognitifs (Garber, 2020; Saunders et al., 2013; Amundson et Lux, 2019). Formation aux psychologues/travailleurs sociaux en lien avec les systèmes de justice (Guerreiro et al., 2018) Écrire en fonction des besoins du client (ce client multiple) o Écriture sensible aux besoins des parents, des avocats et des juges o Exposer et analyser les données contradictoires o Respecter les délais Ce que les avocats peuvent faire Soigner la forme et la teneur du mandat Respecter l’indépendance professionnelle de l’expert Donner des consignes limpides o Ne pas tolérer les délais déraisonnables o Préciser le format du rapport attendu Être courtois et respectueux (cela ne vous empêche pas d’être redoutable en contre-interrogatoire) Préalablement à l’analyse du document: o Revérifier les attentes de votre client face à la démarche d’expertise o Rappeler au client la compétence de l’expert et son obligation d’impartialité Faire un résumé des conclusions à votre client, de même que des éléments favorables et défavorables du rapport en lien avec le mandat qu’il vous a confié Demander à votre client d’en faire une lecture annotée et d’identifier les imprécisions, les erreurs ou les éléments avec lesquels il est en désaccord. Dans le cas où le rapport est défavorable: o Amener le client à réfléchir à son contenu calmement et objectivement o Rassurer votre client sur votre capacité d’utiliser constructivement le document : les opinions se discutent et se nuancent Anticiper avec votre client les réactions potentielles de la partie adverse. Qu’est-ce que les juges peuvent faire? En principe, un litige s’annonce plus complexe quand des témoins experts sont annoncés (moins le cas qu’auparavant) Le/la juge doit acheminer dès que possible des messages aux experts (via les avocat/e/s) : arts. 22, 293 C.p.c. Le/la juge doit autant que possible obliger les experts à se rencontrer pour concilier leurs opinions : art. 240 C.p.c. Le hot tubbing peut s’avérer efficace pour départager les désaccords entre experts Conclusion et période d’échanges Conclusion Importance d’optimiser le recours à l’expertise en matière familiale Nécessité d’une évaluation rigoureuse et approfondie pour formuler des recommandations les plus adaptées et clarifier les enjeux judiciaires discutés (Drozd et al., 2013; Poitras et al., 2017). Importance d’optimiser les interventions autour de cet élément de preuve o Éclairer le tribunal o Soutenir le développement/rétablissement/réhabilitation du ou des clients examinés Réflexions Réflexions sur l’utilisation de l’expertise devraient se faire tant chez les experts, les avocats que chez les juges Formation en contexte interdisciplinaire (Godbout, Poitras & Da Silva, 2020) Promotion du rôle d’expert auprès des psychologues/des travailleurs sociaux