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Allogreffes Osseuses Et Banques De Tissus 2010

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Allogreffes osseuses et banques de tissus
L. Vastel
L’utilisation des allogreffes osseuses en chirurgie orthopédique s’organise désormais autour de standards
de plus en plus précis, tant pour ce qui concerne les aspects sanitaires de l’activité des banques de tissu,
que pour les techniques opératoires, qui bénéficient d’évaluations nombreuses avec un recul désormais
significatif. Le but de cet article est donc d’éclairer les différentes facettes de cette activité au vu des
résultats publiés et de l’état actuel des textes et contraintes sanitaires. Après un bref historique, les
auteurs précisent les protocoles actuels de sécurisation des allogreffes au sein des banques de tissus,
évoquent l’état actuel des connaissances biologiques sur l’ostéo-intégration des allogreffes, précisent les
différents traitements stérilisateurs actuellement utilisés et leurs conséquences mécaniques et biologiques
et concluent par une synthèse des indications chirurgicales en pratique orthopédique avec leurs résultats
actuellement validés scientifiquement.
© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Allogreffes osseuses ; Banque de tissus ; Sécurisation ; Stérilisation des greffes ;
Techniques de reconstruction osseuse
Plan
¶ Introduction
1
¶ Historique des allogreffes
1
¶ Banques de tissus osseux
2
¶ Origine des greffons
2
¶ Bilan de sécurisation
Antécédents
Bilan biologique
Autres recommandations
2
3
3
3
¶ Traitements complémentaires appliqués aux allogreffes
osseuses
Conséquences mécaniques des traitements complémentaires
Conséquences biologiques des traitements complémentaires
3
3
4
¶ Immunologie des allogreffes osseuses
5
¶ Compatibilité Rhésus et ABO
5
¶ Principales indications et résultats
Reprises de prothèse totale de hanche
Reprises de prothèses totales de genou
Reconstructions osseuses en chirurgie tumorale
Utilisation d’allogreffes ostéochondrales massives en chirurgie
traumatologique
5
5
6
6
¶ Conclusion
8
8
■ Introduction
L’utilisation croissante depuis 30 ans des allogreffes osseuses
a permis, avec le recul et l’expérience, de mieux connaître leur
potentiel et leurs limites pour la reconstitution du capital
osseux en chirurgie orthopédique. Les modalités techniques de
leur utilisation et leurs résultats à moyen, voire à long terme,
sont désormais connus et validés. En 2007, plus de 18 000
greffes osseuses ont été réalisées dans notre pays (source Agence
Appareil locomoteur
de la biomédecine). Leur utilisation est cependant soumise à des
contraintes sanitaires fortes et les indications et techniques de
greffe doivent intégrer un certain nombre de notions élémentaires pour garantir un taux de réussite optimal.
■ Historique des allogreffes
L’utilisation de greffe articulaire est décrite dans son principe
dès le haut Moyen-Âge, dans la légende du diacre justinien : un
moine atteint de gangrène s’endort en prière au Ve siècle de
notre ère devant des icônes de Saint-Côme et Saint-Damien. Il
voit en rêve les deux saints couper la jambe malade, la remplacer par celle d’un homme noir décédé le jour même. À son
réveil, il est guéri, une jambe noire et l’autre blanche.
En 1668, Job Van Meeferen aurait greffé pour la première fois,
un fragment de crâne de chien à un noble russe. L’opération
réussit mais le patient est excommunié.
En fait, il faut attendre le milieu du XIXe siècle pour qu’Ollier,
à Lyon en 1858, rapporte les premiers travaux relevant d’une
approche scientifique sur les greffes osseuses, ciblée sur les
xénogreffes, tandis que la première allogreffe osseuse chez
l’homme est attribuée à Mac Ewen, à Glasgow en 1878. Néanmoins, les indications restent essentiellement traumatiques et le
taux d’infections majeur, malgré l’avènement de l’antisepsie à la
suite des travaux de Pasteur.
Il faut attendre la deuxième moitié du XXe siècle et l’arrivée
des antibiotiques pour rendre viables ces techniques.
À partir de 1980, deux évolutions majeures de la chirurgie
orthopédique accroissent considérablement l’utilisation des
allogreffes osseuses : d’une part, les progrès de la chimiothérapie, qui permettent de développer une chirurgie de reconstruction après exérèse tumorale, notamment des ostéosarcomes ; et,
d’autre part, le développement considérable de la chirurgie
prothétique de la hanche et du genou, qui amène, du fait de
l’usure et du descellement des pièces, un accroissement de la
chirurgie de reprise.
1
14-015-A-10 ¶ Allogreffes osseuses et banques de tissus
notamment pour le tissu osseux trabéculaire, des traitements
stérilisateurs complémentaires, physiques et chimiques.
“ Point fort
Définitions élémentaires concernant les greffes
osseuses
• Autogreffe : on parle d’autogreffe lorsque donneur et
receveur sont une seule et même personne. Cette
situation est optimale biologiquement, puisqu’elle
n’entraîne aucune réaction immune et qu’elle autorise la
greffe de cellules vivantes si le délai entre prélèvement et
implantation n’est pas trop important. C’est la greffe « de
référence ».
• Isogreffe : on parle d’isogreffe lorsque donneur et
receveur sont deux sujets distincts, mais de patrimoine
génétique identique (jumeaux monozygotes, lignées
animales sélectionnées).
• Allogreffe/homogreffe : on parle d’allogreffe, ou
d’homogreffe, qui est synonyme, lorsque donneur et
receveur sont deux individus de la même espèce.
• Xénogreffe/hétérogreffe : On parle de xénogreffe ou
d’hétérogreffe lorsque donneur et receveur sont d’espèces
différentes.
• Ostéogénèse : il s’agit, littéralement de « naissance d’os
nouveau ». Production de trame osseuse protéique par les
ostéoblastes (avec ou sans résorption d’os existant par les
ostéoclastes), qui se minéralise progressivement pour
acquérir ses propriétés mécaniques optimales.
• Ostéo-induction : accélération, stimulation de
l’ostéogénèse par l’allogreffe elle-même ou par des
substances issues d’elle. En pratique, cette propriété n’est
démontrable qu’en montrant la capacité d’induire la
formation d’os en site extraosseux.
• Ostéoconduction : propriété passive d’un matériau à
recevoir la repousse osseuse, par invasion vasculaire et
cellulaire à partir du tissu osseux receveur au contact du
matériau. Exemple : os nettoyé de sa moelle et de ses
cellules ostéogéniques. Il peut être recolonisé par des
cellules du receveur, mais de façon uniquement passive.
• Greffe orthotopique/hétérotopique : une greffe osseuse
est dite orthotopique lorsqu’elle est implantée dans sa
position anatomique habituelle, hétérotopique dans le cas
contraire.
• Traçabilité : ensemble des informations et des mesures
prises pour suivre et retrouver rapidement l’ensemble des
étapes allant de l’examen clinique du donneur à
l’utilisation thérapeutique de la greffe, en passant par le
prélèvement, la transformation, la conservation, le
transport, la distribution et la dispensation à un patient. La
traçabilité permet donc d’établir un lien entre le donneur
et le ou les receveur(s). Elle est établie à partir d’une
codification préservant l’anonymat des personnes. Le lien
n’est donc réalisable qu’au sein du fichier de la banque.
• Quarantaine : la quarantaine a une définition
réglementaire ; il s’agit du délai nécessaire à l’obtention
des résultats des examens réalisés dans le cadre du bilan
de sécurisation de la greffe, permettant une décision
définitive quant à son utilisation ultérieure.
• Transplant/implant : on parle plus volontiers d’implant
pour un composant ou tissu inerte (os lyophilysé après
extraction de la moelle par exemple), et de transplant
lorsque la greffe contient des cellules vivantes issues du
donneur.
Aujourd’hui, les contraintes renforcées de sécurité sanitaire
amènent à l’application de protocoles de plus en plus lourds visà-vis du risque de transmission d’agents pathogènes avec,
2
■ Banques de tissus osseux
Une banque de tissus est une structure chargée de la collecte,
de la sécurisation, de l’éventuelle transformation, puis de la
distribution des greffes osseuses.
La loi de bioéthique, votée en 1994 et revue de 2002 à 2004,
et les nombreux textes réglementaires français qui l’ont complétée, ainsi que de plus récentes directives européennes (2004/
23/CE et 2006/17/CE), imposent un contrôle strict de l’État sur
cette activité, via deux agences complémentaires :
• l’Agence de biomédecine, d’une part, qui gère l’organisation
logistique des prélèvements multiorganes et qui assure une
tutelle « médicale » consultative, notamment pour la mise au
point des bonnes pratiques de banking, ou les recommandations en cas d’alerte sanitaire ;
• l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé
(AFSSAPS), qui délivre les agréments, statue sur la validité et
la qualité des protocoles utilisés dans chaque banque et opère
les contrôles de terrain, étant dotée d’un corps d’inspection
spécifique. Les agréments sont renouvelables tous les cinq
ans. Trente-sept banques de tissus avaient un agrément pour
l’activité de sécurisation des greffes osseuses en 2007.
Les bonnes pratiques constituent un référentiel d’obligations
qualitatives dans la prise en charge des tissus, dont le respect
doit être garanti par un système d’assurance qualité développé
au sein de la banque. Ces obligations contribuent au respect des
grands principes qui régissent l’activité de greffe d’éléments du
corps humain et qui figurent dans la loi :
• anonymat donneur receveur ;
• traçabilité des greffes ;
• gratuité du don ;
• sécurité sanitaire du don (chaîne du froid, transmission
d’agents pathogènes, compétences des personnels de la
banque).
■ Origine des greffons
.
.
Les allogreffes osseuses ont actuellement deux sources :
• les têtes fémorales prélevées à l’occasion d’arthroplasties
totales de hanche, qui ont le statut juridique de résidus
opératoires. Elles peuvent être prélevées, avec le consentement du donneur, dans tous les établissements de soins, puis
transmises à une banque de tissus agréée ;
• les segments osseux massifs, prélevés en règle dans le cadre de
prélèvements multiorganes, dans des établissements autorisés,
sous le contrôle de la coordination régionale de l’Agence de
biomédecine. Les prélèvements de tissus sont réalisés après les
prélèvements d’organes, à cœur arrêté. Les donneurs doivent
ne pas avoir fait connaître de leur vivant une opposition à un
tel don, notamment grâce au registre national des refus ;
néanmoins, le témoignage de la famille est systématiquement
recueilli en complément de la vérification du registre. La loi
fixe un impératif de reconstruction corporelle de qualité après
le prélèvement.
■ Bilan de sécurisation
Il est classiquement composé de trois phases distinctes :
• analyse des antécédents ;
• bilan biologique ;
• troisième volet consistant, soit en un nouveau bilan sérologique à distance, une biologie moléculaire pour le virus
d’immunodéficience humaine (VIH) et le virus de l’hépatite C
(HCV) réalisés d’emblée, ou un traitement stérilisateur
secondaire de la greffe (recommandations de l’Association
pour l’étude de greffes et substituts tissulaires en orthopédie
[GESTO] toujours valides).
Appareil locomoteur
Allogreffes osseuses et banques de tissus ¶ 14-015-A-10
Tableau 1.
Critères d’exclusion au don (source : conseil scientifique de l’Agence de
biomédecine).
Antécédents connus :
Infection ou suspicion d’infection par le VIH ou le HTLV ou l’hépatite
virale B ou C
Présence de facteurs de risque authentifiés vis à vis de ces infections
dans les 12 derniers mois
- partenaires sexuels multiples homo- ou hétérosexuels, concernant
le donneur ou son partenaire régulier
- toxicomanie par voie intraveineuse concernant le donneur
ou son partenaire régulier
- accident d’exposition au sang ou à ses dérivés suspects d’être
contaminés
- séjour en milieu carcéral
Traitement par hormones hypophysaires (notamment de croissance)
extractives
Greffe de dure mère d’origine humaine
Antécédents chirurgicaux intéressant le système nerveux central
Démence ou maladie neurologique pouvant évoquer une
encéphalopathie subaiguë spongiforme
Antécédents familiaux entrant dans le cadre des encéphalopathies
spongiformes
Hémopathie maligne
Cancer
Maladie de système
Infection généralisée active
Maladies virales avérées ou probables (notamment hépatites virales,
VIH, HTLV, rage)
Tuberculose active, lèpre
Maladie parasitaire, mycose systémique
Traitements connus
Stéroïdes au long cours
Il est fixé par les textes réglementaires jusque dans ses
modalités techniques (Vastel et al.) [1, 2] . Il comprend les
sérologies des hépatites B et C, du human T cell leukemia virus
(HTLV), de la syphilis (utilisée ici comme un marqueur de
comportement sexuel « à risque ») et du virus VIH (deux
sérologies par deux techniques différentes et dosage de l’antigène P24).
Une anomalie de ce bilan est un critère de rejet du greffon.
Un examen bactériologique est par ailleurs systématiquement
réalisé, dont la positivité impose également l’élimination de la
greffe.
Autres recommandations
Le troisième volet correspond à des recommandations déjà
anciennes (GESTO, 1994), mais toujours valables, soit :
• un bilan de biologie moléculaire par réaction de polymérisation en chaîne (PCR) concernant le VIH et le virus de
l’hépatite C, dont le principe est la détection directe du
génome des virus par amplification. L’intérêt de cette technique, extrêmement sensible, est de détecter des patients en
phase de séroconversion virale et dont la sérologie serait
encore négative, tout en étant de plus un marqueur quantitatif d’infectiosité ;
• un deuxième bilan sérologique, sensiblement identique au
premier et réalisé 4 mois au moins après le premier prélèvement. Il s’agit d’une solution classique, qui présente cependant les inconvénients de sa réalisation pratique
(reconvocation du donneur). Des cas de séroconversion
tardive pour les virus des hépatites B et C sont cependant
non exceptionnels, ce qui rend difficile un consensus sur le
délai entre les deux bilans. Sont rapportés enfin des cas, plus
rares, de non-séroconversion persistante pour l’hépatite C [3] ;
• un traitement complémentaire appliqué à la greffe dans un
but de stérilisation. Ce traitement peut être physique (irradiation gamma ou bêta, chaleur) ou chimique (délipidation par
éthanol, solvants, dénaturants protéiques puissants).
Irradiation, chimiothérapie
Pathologie locale
Antécédents d’irradiation ou de pathologie locale connue
Infection bactérienne pouvant contaminer le tissu à prélever
Examen lors du prélèvement
Adénopathies multiples, hépatosplénomégalie
Ictère
Pathologie dans la zone à prélever
Traces de piqûres pouvant évoquer une toxicomanie intraveineuse
Antécédents de vaccination pour l’hépatite B
VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; HTLV : human T cell leukemia virus.
Antécédents
L’analyse des antécédents vise à exclure des catégories de
patients présentant un risque accru de transmission d’un agent
pathogène au receveur. On dispose d’un catalogue d’antécédents
qui sont, de ce fait, autant de critères d’exclusion au don.
S’ajoutent à ces critères des antécédents susceptibles d’altérer la
qualité mécanique du greffon ou des pathologies systémiques
d’étiologie mal connue (Tableau 1). L’utilisation des greffes
osseuses dans le cadre d’une chirurgie fonctionnelle impose en
effet une très grande rigueur dans la sélection des greffes.
La fiche de prélèvement doit être signée par le médecin
préleveur. Il convient de préciser que la notion d’antécédent
connu ne signifie pas de la part du préleveur un certificat de
non-pathologie. La loi place le prélèvement, comme l’implantation de la greffe, sous la responsabilité du chirurgien qui
réalise l’acte.
Bilan biologique
Le deuxième volet du bilan de sécurisation est la réalisation
d’un bilan biologique.
Appareil locomoteur
■ Traitements complémentaires
appliqués aux allogreffes osseuses
Les traitements complémentaires appliqués à l’os ont pour
objectif d’accroître la sécurité microbiologique de la greffe et
correspondent donc, le plus souvent, à des processus de stérilisation. Ils ont nécessairement des conséquences pour l’allogreffe, qui peuvent être de deux ordres, biologiques et
mécaniques.
Conséquences mécaniques des traitements
complémentaires
Os trabéculaire
La congélation n’est pas à proprement parler un traitement
complémentaire et ne modifie que peu les propriétés du tissu
osseux. Elle altère cependant de façon minime les propriétés
mécaniques de l’os trabéculaire [4], de l’ordre de 1 % d’altération
de la contrainte à rupture lors de tests mécaniques classiques
pour chaque cycle de congélation-décongélation.
L’os natif est un matériau biphasique, composé d’une phase
fluide (moelle osseuse) et d’une phase solide, expliquant son
comportement viscoélastique, particulièrement pour le tissu
spongieux. Le nettoyage de la greffe, physique et/ou chimique,
ou la lyophilisation, entraîne une rigidification des greffons
« délipidés » [5] avec un accroissement de leur module d’élasticité, sans toutefois que la fragilisation soit significative [6].
L’irradiation gamma ou bêta altère peu la résistance mécanique des greffes trabéculaires aux doses utilisées (de l’ordre de
25 kGy), la baisse de résistance mécanique à ces doses étant de
l’ordre de 2,5 % [7]. Elle ne devient importante qu’à partir de
60 kGy [8].
Le chauffage, à partir d’un certain seuil de température et de
durée d’exposition, altère la structure tertiaire des protéines
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14-015-A-10 ¶ Allogreffes osseuses et banques de tissus
fibrillaires et entraîne alors une altération des propriétés
mécaniques de la greffe. L’altération observée est très variable
selon les protocoles utilisés : elle peut atteindre 60 % de la
résistance mécanique en compression [9] ou rester dans des
limites voisines des altérations observées avec l’irradiation
simple [10].
Des procédés chimiques plus complexes font intervenir des
solvants apolaires (acétone, benzène), des solutions alcooliques
ou des détergents, dans le but de dissoudre les corps gras de la
moelle osseuse et d’ôter les éléments figurés qui s’y trouvent [10].
Lorsque l’objectif est d’inactiver les agents transmissibles non
conventionnels (ATNC), et pas seulement d’éliminer les cellules
potentiellement contaminantes, des dénaturants puissants de la
structure protéique sont utilisés (soude ou urée plusieurs fois
molaire), qui ont pour effet d’altérer le collagène fibrillaire et
entraînent une altération structurelle de la greffe. Les baisses de
résistance mécanique peuvent alors être significatives (35 %
d’altération de la résistance mécanique pour un traitement
utilisant de l’urée 6M) [7].
Os cortical
L’irradiation aux doses habituelles de 25 kGy altère d’environ
20 % la résistance mécanique en flexion de baguettes corticales,
10 kGy supplémentaires altérant de 15 % de plus cette même
résistance [11, 12].
La chaleur humide produit des effets sensiblement identiques
pour un chauffage à 120 °C pendant 20 minutes. L’altération de
la résistance mécanique en flexion est également, dans ce cas,
de 20 % [13].
Les procédés chimiques séquentiels associant divers produits
antiseptiques (éthanol, méthanol, eau oxygénée, acétone, urée
ou soude à des concentrations variables, etc.) ont peu été
appliqués à l’os cortical.
Conséquences biologiques des traitements
complémentaires
Diminution de l’immunogénicité des greffes
L’antigénicité des greffes est réduite par la congélation [14, 15].
Les différents procédés de nettoyage, physiques ou chimiques,
en supprimant les principales cibles de la réaction immunitaire,
c’est-à-dire les cellules de la moelle osseuse, contribuent à
réduire la réaction immune du receveur [16].
Les traitements physiques réduisent également l’antigénicité
de la greffe par altération des protéines cellulaires et extracellulaires globulaires. C’est le cas de l’irradiation [17, 18] ou de la
chaleur [19].
Les traitements chimiques plus sophistiqués, souvent appliqués à l’os spongieux, n’ont pas fait l’objet d’évaluation de leurs
effets sur l’antigénicité résiduelle des greffons traités.
Certains cryopréservateurs, comme le diméthylsulfoxyde
(DMSO), appliqués aux allogreffes fraîchement prélevées, en
diminuent l’antigénicité [20].
Toxicité éventuelle de certains traitements
L’irradiation gamma d’os frais congelé oxyde les lipides
présents dans la moelle osseuse. Ces lipides peroxydés développent une cytotoxicité sur les ostéoblastes cultivés in vitro [21].
Cette même irradiation est, de ce fait, parfois tenue pour
responsable d’échecs à moyen terme de reconstructions cotyloïdiennes [22, 23] . La chaleur peut probablement aboutir aux
mêmes effets. Ses résultats cliniques sont volontiers contradictoires [11]. Enfin, la plupart des traitements séquentiels industriels sont susceptibles d’induire une toxicité par relargage, qui
nécessite leur évaluation par un organisme indépendant avant
leur utilisation en pratique clinique.
Durée de conservation dans les congélateurs
Il est habituel de considérer comme maximale une conservation de 5 ans avant implantation. Toutefois, cette notion a été
validée par l’usage et ne repose pas sur la mise en évidence d’un
effet délétère biologique d’une trop longue conservation. Le
4
problème limitant semble plus lié à la qualité de l’emballage,
susceptible de vieillir et de se rigidifier, risquant alors de perdre
son étanchéité à la suite de mobilisations itératives au sein du
congélateur.
Ostéo-intégration des allogreffes osseuses
Elle ne peut être parfaitement connue que par l’examen de
pièces d’exérèse et étudiée de façon systématique à partir
d’études histologiques animales qui ont, bien sûr, leurs limites,
ou d’analyses post-mortem chez l’homme, rares et difficiles à
interpréter [24, 25]. Les résultats des différentes études montrent,
d’une manière générale, que les allogreffes non supplémentées :
• n’ont pas de pouvoir ostéo-inducteur ; elles ne sont en règle
qu’ostéoconductrices ;
• l’ossification est centripète, à partir de l’os hôte, ce qui
conduit à distinguer en premier lieu la fusion entre greffe et
os hôte, généralement acquise, et l’ostéo-intégration proprement dite du greffon, plus inconstante, et qui peut dépendre
de la technique opératoire utilisée.
Greffes trabéculaires
L’incorporation des allogreffes trabéculaires se déroule en
plusieurs étapes. La première est sous la dépendance de la
qualité du lit receveur de la greffe. S’y développe une réaction
inflammatoire avec production de bourgeons conjonctivovasculaires qui infiltrent l’hématome local [26] . Ces bourgeons
pénètrent directement dans les mailles du tissu osseux trabéculaire greffé.
Cette pénétration à partir du lit receveur est l’étape qui
conditionne l’évolution ultérieure de la greffe. Elle nécessite une
fixation de bonne qualité entre os greffé et os receveur et un lit
d’implantation vivant et bien vascularisé. Sans revascularisation,
la greffe se comporte comme un implant inerte isolé du
receveur. Revascularisée, elle se comporte comme un transplant
vivant (en l’absence de rejet par le receveur).
Cette première phase peut être stimulée par la présence de
cellules vivantes au sein de la greffe (celles ci sont nourries par
« imbibition » sur une épaisseur d’environ 5 mm [26]. Elle est
également dépendante du volume de tissu osseux greffé (lorsque
ce volume est trop important, elle ne peut être que périphérique). Dans les bons cas, l’angiogenèse au sein du greffon permet
sa revascularisation, avec, comme pour une autogreffe, des
anastomoses capillaires en son sein en 3 à 4 jours et revascularisation complète en 6 semaines [27].
En l’absence de sensibilisation préalable, cette première phase
est modérément influencée par la réaction immune (Goldberg
trouve cependant des variations de 50 % à 100 % de revascularisation en présence ou absence d’inhibition de la réaction
immune). Dans un deuxième temps, soit la réaction immune
secondaire réduit la perfusion de la greffe par occlusions
capillaires successives [20] et aboutit à son exclusion progressive,
voire à sa résorption, soit s’établit une situation de « tolérance
immune », qui permet son ostéo-intégration progressive, c’està-dire la formation de tissu osseux qui est ensuite résorbé et
remplacé dans le processus normal de renouvellement osseux,
constitutif du classique phénomène de creeping substitution.
Ainsi, in vitro, il est possible d’observer à 6 semaines jusqu’à
75 % de la surface de l’allogreffe trabéculaire recouverte d’une
apposition osseuse nouvelle, pour une greffe de petit volume et
en l’absence de rejet immun [27].
En fait, en pratique clinique orthopédique, les volumes
greffés sont importants et il faut comprendre que ces différentes
options évolutives coexistent au sein d’une greffe spongieuse.
Ainsi, des zones nécrotiques se comportent comme des implants
et sont sollicitées mécaniquement « en fatigue » et d’autres
zones sont vivantes et renouvelées normalement. L’ostéointégration d’une greffe de grande taille est donc en règle
partielle.
L’ostéo-intégration des allogreffes spongieuses en pratique
clinique est donc plus lente et plus incomplète qu’in vitro. Une
greffe cotyloïdienne s’incorpore progressivement en 12 à
18 mois, aboutissant à un os « mosaïque », constitué d’os mort
et d’os revascularisé.
Appareil locomoteur
Allogreffes osseuses et banques de tissus ¶ 14-015-A-10
sensiblement la réaction immunitaire. Certains produits additifs,
tels que le DMSO, semblent également réduire l’antigénicité des
greffes massives corticospongieuses, tandis qu’ils permettent la
survie transitoire de cellules ostéogéniques du donneur au sein
de la greffe [20].
L’immunité humorale est également concernée, comme le
prouve la mise en évidence d’anticorps anti-HLA du donneur [38], mais son effet pratique reste mal connu.
L’incorporation d’une allogreffe osseuse dépend donc de
multiples facteurs :
• la taille de la greffe intervient et la recolonisation par des
bourgeons vasculaires ne concerne que des greffes de petit
volume, trabéculaires ;
• la compatibilité antigénique semble préférable pour les greffes
spongieuses, se rapprochant alors de l’autogreffe [15]. Pour des
greffons massifs, une réaction de rejet immun aboutissant à
l’exclusion complète de la greffe et à sa transformation en
implant inerte peut correspondre à un excellent résultat
clinique, dans une situation de tolérance immune. À
l’inverse, une revascularisation trop rapide, favorisée par une
excellente compatibilité HLA peut possiblement favoriser une
résorption importante de la greffe massive.
Ces considérations complexes expliquent sans doute les
observations cliniques de Musculo et al., en 1987 [39] , ou
d’Enneking et Mindell, en 1991 [40], qui ne retrouvent pas de
corrélation entre la compatibilité HLA et l’incorporation de la
greffe.
Ostéo-intégration des allogreffes corticales
L’absence de pénétration possible par des bourgeons vasculaires contribue à réduire et ralentir l’intégration des allogreffes
osseuses corticales. La revascularisation doit suivre l’ostéolyse
périphérique progressive de l’os par les ostéoclastes dans le cadre
du renouvellement osseux normal. On ne voit apparaître de
l’apposition osseuse au sein de la greffe qu’à partir de la
12e semaine, alors que se forme un cal périosté aux extrémités
de la greffe.
L’ostéo-intégration se poursuit pendant des années et a
toujours un caractère incomplet. En fait, l’appréhension du
phénomène est difficile, car sa durée est souvent supérieure à la
durée de vie du montage orthopédique réalisé ou à celle du
patient. Dans des conditions favorables (exemple du double
fourreau de reconstruction fémorale proximale de M. Kerboull),
l’ostéo-intégration peut toutefois être significative et atteindre
5 mm d’épaisseur corticale en 10 années [28], mais ne correspond souvent qu’à la zone sous-périostée [29] , faisant alors
disparaître toute limite nette entre os greffé et os receveur.
Ces données architecturales expliquent que les différences
mesurées soient faibles, qu’il s’agisse d’autogreffe ou d’allogreffe
pour ce qui concerne l’os cortical.
Baguettes d’allogreffes corticales apposées
La fixation d’une baguette corticale à la surface de l’os se
traduit par une réaction périostée qui aboutit presque constamment à une fusion entre l’allogreffe et l’os receveur [30]. Cette
technique est intéressante, car elle permet dans certains cas un
renforcement osseux au niveau de zones déficientes ou altérées,
en particulier dans le cadre de la chirurgie de reprise prothétique (corticale perforée par une tige prothétique descellée, par
exemple) ou de résection tumorale (zone de jonction entre
résection et os sain). Cette option n’est cependant susceptible
d’être efficace que s’il persiste suffisamment de périoste sous la
zone greffée ; ainsi, des reconstructions en « fagot » de pertes de
substance segmentaires significatives aboutissent à l’échec [31].
Enfin, certains auteurs utilisent avec succès des baguettes
fémorales d’allogreffe, utilisées comme des plaques « biologiques », pour traiter les fractures périprothétiques [32, 33].
■ Compatibilité Rhésus et ABO
Les immunisations sanguines du receveur Rhésus négatif
recevant un greffon d’un donneur positif sont rares. Stassen et
al. [41] n’en détectent aucune sur une série de 144 greffes Rhésus
positif implantées chez des receveurs négatifs. De rares cas sont
cependant rapportés dans la littérature d’immunisation Rhésus.
La mise en évidence d’anticorps dans le système ABO [42] est
également rapportée. Il est de ce fait classique de considérer que
la compatibilité sanguine Rhésus, ABO et probablement Kell, est
préférable dans le cas d’implantations chez la femme en période
d’activité génitale.
■ Immunologie des allogreffes
osseuses
Les allogreffes osseuses sont antigéniques, donc susceptibles
de déclencher une réaction de rejet immunitaire, médiée par les
cellules immunocompétentes et dirigée contre les antigènes de
classe I et II du complexe majeur d’histocompatibilité présent à
la surface des cellules de la moelle osseuse [34, 35]. Cette réaction
a été mise en évidence de façon indirecte par certains auteurs :
Goldberg améliore ainsi la revascularisation de greffes spongieuses de 50 % en administrant un immunosuppresseur ; d’autres
études montrent une accélération du rejet d’allogreffes de peau
après allogreffe osseuse préalable du même donneur [14, 36].
La vascularisation d’allogreffes trabéculaires progresse de
façon identique à celle d’une autogreffe au cours des deux
premières semaines, puis décline progressivement au cours des
semaines suivantes pour plafonner à 50 % de celles d’autogreffes à 6 semaines in vitro [27] , ceci étant lié à la survenue
d’occlusions capillaires successives en rapport avec la réaction
immune (elle est améliorée par un immunosuppresseur).
Certains auteurs ne trouvent cependant pas de conséquences de
cette sensibilisation immune sur la qualité de l’intégration in
vitro finale de la greffe [37], permettant pendant de nombreuses
années de ne pas tenir compte de ce paramètre en pratique
clinique. Des études plus récentes semblent remettre cependant
cette notion en question, en établissant une corrélation entre
résultat à long terme et compatibilité human leukocyte antigen
(HLA) [14].
Cette immunogénicité cellulaire peut être réduite par les
traitements appliqués à la greffe. Ainsi, la congélation, la
lyophilisation, réduisent l’antigénicité des greffes. L’ablation de
la moelle osseuse et de ses cellules, d’une manière générale,
supprime les principales cibles de la réaction immune et réduit
Appareil locomoteur
■ Principales indications
et résultats
Reprises de prothèse totale de hanche
La réaction aux débris d’usure du couple de frottement, puis
le descellement des implants entraînent une altération du
support osseux, qui peut être majeure. Sa reconstruction est une
des conditions de succès de la reprise chirurgicale.
Cotyle
.
L’utilisation d’allogreffes morcelées ou taillées à façon pour
combler le défaut osseux, généralement protégées par un
anneau métallique de renforcement (Fig. 1), donne des résultats
variables dans la littérature, allant de 96 % de succès à 10 ans
pour Kerboull et al. [43], à 58 % d’échecs à 10 ans pour Kwong
et al. [22].
Cette variation semble plutôt refléter les différences liées au
matériel de renforcement utilisé, qui doit être suffisamment
rigide pour absorber une partie des contraintes et éviter un
échec précoce, mais pas trop pour ne pas priver la greffe de
contraintes mécaniques et compromettre son ostéo-intégration.
Des résorptions tardives, attribuées par certains à l’irradiation
préalable de la greffe, sont cependant rapportées [23].
Certains cas extrêmes peuvent nécessiter l’emploi d’allogreffes
massives pour reconstruire le cotyle détruit, une extrémité
inférieure de fémur, ou supérieure de tibia encastrée dans le
cotyle résiduel étant alors utilisée, un cotyle étant scellé au sein
de l’allogreffe, elle-même protégée par un renforcement métallique, ou un cotyle entier de cadavre étant implanté et ostéosynthésé en lieu et place du cotyle disparu [44].
5
14-015-A-10 ¶ Allogreffes osseuses et banques de tissus
45°
A
B
Figure 1. Principe de la reconstruction par plaque en croix de Kerboull
au niveau du cotyle (A, B).
Techniques de reconstruction fémorales
.
Elle sont les plus nombreuses.
Les altérations de la zone proximale (lyse du Merckel),
peuvent être reconstruites à l’aide de fragments de têtes
fémorales, notamment de col, encastrés en force entre la
prothèse et le fémur au moment de la mise en place de
l’implant fémoral. Ces apports osseux ont tendance à se
résorber, sans conséquences néfastes pour la survie de la
prothèse [45].
Pour ce qui concerne les altérations plus étendues, trois
techniques sont actuellement les plus utilisées :
• le comblement du fémur proximal par de l’os spongieux
tassé, selon la technique dite d’Exeter [46-48] (Fig. 2), spongieux au sein duquel est scellé l’implant fémoral, donne des
survies à 10 ans supérieures à 90 % [49].
Certains auteurs recommandent de mélanger des fragments
de spongieux et d’os cortical « mixés », technique qui semble
améliorer la stabilité des implants et réduire les enfoncements
initiaux parfois observés [50]. Cette technique autorise une
remise en charge immédiate de la greffe tassée [51] ;
• l’utilisation d’une allogreffe massive peut, quant à elle, être
nécessaire et se faire selon deux techniques. Soit le fémur
altéré est ouvert en deux valves et une prothèse longue tige,
manchonnée par l’allogreffe, est scellée dans le fémur restant
distal, les deux valves étant ensuite ramenées et cerclées sur
la greffe (Fig. 3) [52-54], soit le fémur de banque est encastré
dans le fémur du patient receveur par son orifice proximal,
selon la technique du double fourreau décrite par M. Kerboull [55, 56], une prothèse standard étant alors scellée dans
l’allogreffe ;
• enfin, pour des pertes osseuses corticales plus localisées
(corticale fémorale externe en particulier), des baguettes
d’allogreffes corticales peuvent être apposées et fixées par des
cerclages métalliques. La consolidation avec l’os du receveur
est pratiquement constante [57-59] . Elles ne permettent
toutefois pas une reconstruction plus importante, et les
tentatives de « fagot » ou shish kebab reconstruction décrites par
Oakeshott et al. [31] , destinées à reconstruire un fémur
proximal disparu, se sont soldées par des échecs.
Reprises de prothèses totales de genou
Devenue une intervention courante depuis les années 1980,
les prothèses totales de genou occasionnent désormais également des altérations parfois majeures du capital osseux fémoral
et tibial. Dans la majorité des cas, le defect tibial et/ou fémoral
peut être comblé par des fragments de têtes de banque, une
prothèse à tige longue scellée permettant éventuellement
6
Figure 2.
Principe de la technique d’Exeter.
d’obtenir une tenue en zone saine [60]. Lorsque l’altération des
condyles osseux est plus importante, des fragments de tête de
banque peuvent être vissés de façon à restaurer la courbure
condylienne [61, 62]. À un stade plus important, lorsque tibia
et/ou fémur sont réduits à l’état de cornets, des épiphyses
massives peuvent être utilisées, retaillées à façon puis encastrées
dans le cornet osseux restant (Fig. 4). Une prothèse à tige
longue permettant de ponter la zone d’allogreffe [63] ou une
ostéosynthèse par plaque vissée est employée pour stabiliser la
greffe [64].
Reconstructions osseuses en chirurgie
tumorale
La multiplicité des situations rencontrées rend difficile la
description de techniques standardisées. Toutefois, un certain
nombre de tendances semblent se dégager de l’expérience des
différentes équipes spécialisées dans la chirurgie osseuse
tumorale.
Après les résultats très encourageants à court et moyen termes
des reconstructions par allogreffes massives rapportés dans les
années 1980, la survenue régulière de lyses et de fragmentations
des allogreffes à partir de la 7e ou 8e année postopératoire a
amené à un recul certain des indications et à la recherche de
montages incluant avec l’allogreffe de l’autogreffe, libre ou, au
mieux, pédiculée. Les enseignements actuellement admis sont
de plusieurs ordres [65] :
• les allogreffes massives ostéocartilagineuses remplaçant une
épiphyse ou une articulation dans son ensemble sont inéluctablement vouées à un échec mécanique ;
• toute reconstruction massive par allogreffe impose d’armer
cette dernière avec une ostéosynthèse ou une prothèse ;
• l’adjonction d’une autogreffe doit être systématiquement
réalisée lorsqu’elle est techniquement possible.
Les résultats sont significativement altérés par l’administration de la chimiothérapie [64], qui augmente considérablement
le taux de complications, en particulier infectieuses, et semble
influer sur le devenir de l’allogreffe elle-même en altérant son
Appareil locomoteur
Allogreffes osseuses et banques de tissus ¶ 14-015-A-10
Figure 3. Reconstruction par allogreffe
massive dans un fémur ouvert en bivalve.
A. Principe.
B. Aspect préopératoire.
C. Aspect postopératoire.
A
.
Figure 4. Reconstruction épiphysaire par allogreffe massive encastrée et
taillée à façon au cours d’une reprise de prothèse totale de genou (RPTG).
environnement biologique. Au niveau du tibia supérieur ou du
fémur distal, la plupart des équipes préfèrent désormais utiliser
des prothèses massives de résection, plutôt que manchonnées
Appareil locomoteur
par des allogreffes, qui se fragmentent fréquemment et correspondent majoritairement à des résultats médiocres [66]. Pour le
fémur supérieur, et même si ce type de complication est parfois
constaté, les résultats sont cependant fonctionnellement
meilleurs pour des prothèses manchonnées par une allogreffe
que pour des prothèses de résection massives [67, 68].
À l’humérus, l’utilisation d’homogreffes humérales est grevée
d’un taux de pseudarthrose et de résorption très élevé [11]. Pour
cette raison, les arthrodèses d’épaule font appel le plus souvent
à un segment d’homogreffe tibiale, aux corticales beaucoup plus
épaisses et résistantes, avec adjonction d’autogreffe libre et d’un
péroné vascularisé.
Les résections de bassin posent des problèmes complexes de
reconstruction. C’est le cas, en particulier, pour les résections de
la région péricotyloïdienne. Quand la résection reste limitée
(conservation du toit ou d’une colonne), il est possible de
réaliser une reconstruction à l’aide d’autogreffe et d’un anneau
de renforcement cotyloïdien métallique. Lorsque la résection
intéresse toute la région péricotyloïdienne et déborde sur le
cadre obturateur ou sur l’aile iliaque, Puget et Utheza [69] ont
proposé une technique séduisante. La tête fémorale et la région
trochantérienne du patient sont utilisées, après trochantérotomie, comme autogreffe. Le greffon est orienté tête en haut ou
7
14-015-A-10 ¶ Allogreffes osseuses et banques de tissus
en bas et solidement ostéosynthésé au bassin. Une cavité est
ensuite fraisée dans le massif trochantérien et un cotyle
prothétique y est scellé. Grand et petit trochanter sont laissés à
leur place anatomique et synthésés à une allogreffe permettant
de reconstruire le fémur proximal (tête fémorale de banque ou
épiphyse), manchonnée sur la tige prothétique fémorale.
Utilisation d’allogreffes ostéochondrales
massives en chirurgie traumatologique
Le remplacement d’un plateau tibial enfoncé et détruit par
une allogreffe de plateau tibial fraîche, en urgence ou à distance, permet de retrouver un genou vivable et deux tiers des
genoux n’ont pas nécessité d’arthroplastie totale à 12 ans [70].
Cette technique nécessite cependant la disponibilité d’une
allogreffe fraîche non congelée. Avec les allogreffes congelées,
les résultats sont nettement moins favorables [71].
■ Conclusion
Les connaissances à propos des allogreffes osseuses ont
progressé ces dernières années, notamment grâce à de meilleurs
reculs cliniques. Outre les intérêts et avantages des différentes
techniques chirurgicales, certains critères sont incontournables
pour la réussite d’une greffe osseuse :
• stabilité du montage orthopédique ;
• qualité du lit receveur, notamment sa vascularisation ;
• régime optimal de contraintes mécaniques traversant la
greffe : ni trop, ni trop peu.
.
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Pour en savoir plus
Loi n°2004-800 du 06 août 2004 relative à la bioéthique.
Directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004
relative à l’établissement de normes de qualité et de sécurité pour
le don, l’obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le
stockage et la distribution des tissus et cellules humains.
Directive 2006/17/CE de la commission du 8 février 2006 portant application
de la directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil
concernant certaines exigences techniques relatives au don, à l’obtention et au contrôle de tissus et de cellules d’origine humaine.
L. Vastel (laurent.vastel@cch.aphp.fr).
Service de chirurgie orthopédique, Hôpital Avicenne, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 125, rue de Stalingrad, 93009 Bobigny cedex, France.
Banque de tissus osseux, Hôpital Cochin, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 27, rue du Faubourg Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Vastel L. Allogreffes osseuses et banques de tissus. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Appareil locomoteur,
14-015-A-10, 2010.
Disponibles sur www.em-consulte.com
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