Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle : le cas des responsables formation François Grima, Olivier Brunel, Ludovic Taphanel Dans Revue de gestion des ressources humaines 2019/4 (N° 114), pages 53 à 71 Éditions ESKA © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Article disponible en ligne à l’adresse https://www.cairn.info/revue-de-gestion-des-ressources-humaines-2019-4-page-53.htm Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s’abonner... Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info. Distribution électronique Cairn.info pour ESKA. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) ISSN 1163-913X ISBN 9782747229883 DOI 10.3917/grhu.114.0053 © Éditions ESKA, 2019 ANTÉCÉDENTS ET CONSÉQUENCES DE L’INSÉCURITÉ PROFESSIONNELLE DANS UN CONTEXTE DE RÉFORME INSTITUTIONNELLE : LE CAS DES RESPONSABLES FORMATION François GRIMA Université Paris Est Créteil IRG Olivier BRUNEL Université Lyon 3 UJML3 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Définie comme « l’impuissance perçue à maintenir la continuité souhaitée dans une situation d’emploi menacée » (Greenhalgh et Rosenblatt, 1984 : 438), l’insécurité professionnelle constitue une réalité partagée par un nombre croissant de personnes (Schoss, 2017). Amplifiée par le développement de la mondialisation et par les évolutions technologiques, ainsi que par une plus grande connexion avec les marchés financiers (Hoyau et al., 2018), les individus font cette double expérience d’une crainte de perdre leur emploi et d’une impuissance à pouvoir le remplacer dans des conditions similaires. Un consensus émerge de la littérature pour souligner ses effets négatifs tant sur la relation à l’entreprise que sur la santé des salariés (Sverke et al., 2002 ; Cheng et Chan, 2008). Elle est synonyme d’absentéisme, d’intention de quitter l’emploi, de diminution de la satisfaction au travail et de la performance professionnelle. Malgré la richesse de ces développements, Schoss (2017) souligne que cette profusion de travaux cache plusieurs zones d’ombre auxquelles cette recherche vise à répondre. Premièrement, la validité externe des travaux empiriques, réalisés essentiellement dans des pays anglophones, reste à construire tant les législations sociales nationales jouent un NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 53 rôle important dans l’insécurité professionnelle (Sender et al., 2017). Lastad et al. (2018) soulignent qu’il convient d’étudier l’insécurité professionnelle dans des contextes culturels différents tant la perception collective de cette réalité joue sur le niveau individuel. Deuxièmement, deux grilles de lecture coexistent indépendamment dans la littérature, ce qui limite la compréhension de l’insécurité professionnelle du fait de l’absence de dialogue entre les deux traditions de recherche. Une première approche souligne que l’insécurité professionnelle provient principalement d’un environnement menaçant, comme une performance économique du pays ou bien encore de la faiblesse du secteur d’activité (De Witte, 2005). La seconde met en avant le rôle tenu par la personnalité, les croyances des individus (Spector, Zapf, Chen, & Frese, 2000). Enfin, si un consensus émerge sur les conséquences négatives de l’insécurité professionnelle pour le salarié, comme pour l’entreprise, la plupart des travaux empiriques se concentre sur les mêmes variables comme la satisfaction au travail ou le stress. Schoss (2017) invite la communauté scientifique à élargir la compréhension en introduisant de nouvelles variables pouvant traduire une capacité d’agence des individus confrontés à l’insécurité professionnelle. 53 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Ludovic TAPHANEL IGS-RH, Paris LISPE 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Le but de cette recherche est de répondre à ces trois limites identifiées par la littérature. Nous étudierons ici à la fois l’impact de variables personnelles (la personnalité proactive et l’attitude de carrière sans frontière) et d’une variable contextuelle (la perception d’alternatives d’emploi) sur l’insécurité professionnelle ainsi que l’effet de cette dernière sur deux formes d’intention de départ : l’une de l’entreprise et l’autre de la profession. La base empirique est constituée de la population des responsables de formation. Ces derniers doivent faire face à une refonte de l’organisation de la fonction formation dans l’entreprise qui conduit au partage de cette fonction entre les salariés, les managers et les prestataires extérieurs questionnant la place des professionnels de cette fonction (Thévenet et al., 2007). Pour fonder cette analyse, nous nous appuierons sur le cadre théorique de la conservation des ressources (Hotbfoll, 1989) qui constitue le socle commun de nombreux travaux étudiant l’insécurité professionnelle (Schoss, 2017). Cette théorie suggère qu’un individu dispose de ressources limitées pour faire face aux demandes de son environnement et que, conséquemment, la menace de la perte de l’une d’elles conduit le salarié à éprouver du stress. Hobfoll (1989, p. 516) précise que les individus « s’efforcent de conserver, de protéger et d’élaborer des ressources et, que ce qui est appréhendé comme une menace concerne la perte potentielle ou réelle de ces ressources précieuses ». La menace de la perte est profondément ressentie si la ressource questionnée a fait l’objet d’un investissement. Le choix des antécédents (attitude de carrière sans frontière et personnalité proactive) et de la variable modératrice de l’insécurité professionnelle mobilisés dans cet article (perception d’alternatives d’emploi) s’explique par les liens établis dans la littérature entre ces concepts et la capacité à faire face à une situation difficile. Définie comme « relatively stable tendency to take initiatives to effect changes » (Sun et van Emmerik, 2015), la personnalité proactive est positivement liée aux comportements de voice ou de succès de carrière (Thomas, Whitman, Viswesvaran, 2010). Pour l’attitude de carrière sans frontière définie par Sullivan et Arthur (2006 : 9) comme “navigates the changing work landscape by enacting a career characterized by different levels of physical and psychological movement”, Briscoe et Hall (2006) soulignent qu’elle traduit la capacité des individus à prendre des initiatives professionnelles. Elle indique la 54 GRH114.indd 54 capacité à trouver des ressources dans des environnements difficiles. Ce choix s’inscrit dans le prolongement des travaux de Babalola et Bruning (2015) comme de ceux de Kuron et al. (2016) qui montrent que l’orientation de carrière sans frontière est liée au lieu de contrôle interne, qui luimême oriente l’interprétation, et la réponse des individus confrontés à des situations menaçant leurs ressources. Tout en nous inscrivant dans le prolongement des travaux existants, l’introduction de cette variable enrichit conceptuellement la réflexion autour de l’insécurité professionnelle. Pour la perception d’alternatives d’emploi, qui traduit la représentation de la personne de l’existence de postes comparables au sien sur le marché (Steel et Lounsbury, 2009), nombreux sont les travaux dans la littérature (Shoss, 2017 ; Sverke et al., 2002) valorisant l’influence de l’environnement sur l’insécurité professionnelle à avoir montré son importance. Le choix des conséquences de l’insécurité professionnelle mobilisées dans cet article traduit, à la fois une volonté de poursuivre des travaux déjà réalisés, mais aussi d’enrichir le débat. Définie comme la volonté délibérée de quitter une organisation (Steel et Lounsbury, 2009), l’intention de quitter une organisation constitue une référence dans le champ (Debus et Unger, 2017). La tension engendrée par la menace sur les ressources valorisées par les individus engendre une volonté de faire cesser cette expérience pénible par un retrait de l’organisation source de ce déplaisir (Debus et Unger, 2017). Pour l’intention de quitter la profession, définie comme la volonté délibérée de s’éloigner d’un champ professionnel (Seston et al., 2009), cette variable n’a, à notre connaissance, jamais fait l’objet de recherches sur l’insécurité professionnelle. Cependant, plusieurs études sur cette forme d’intention de départ (Wermeling, 2009 ; Selenko et al., 2017) soulignent sa proximité avec l’intention de quitter l’entreprise d’autant plus que le changement de conjoncture affectant l’activité professionnelle est brusque (comme cela est le cas avec les Responsables de Formation en France étudiés ici). En intégrant dans un même modèle les perspectives valorisant l’environnement et l’individu dans la compréhension de l’insécurité professionnelle, et en enrichissant la littérature d’une nouvelle conséquence traduisant la capacité des individus à faire face à cette situation de menace perçue, cette recherche promeut une conception plus globale de l’insécurité professionnelle. Cette dernière n’est pas abordée, ni comme insurmontable, ni comme REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 insignifiante. Elle apparaît comme une situation difficile que la personne peut gérer. Au-delà de ce dépassement du débat théorique, cette recherche est porteuse d’enjeux managériaux comme sociétaux. Pour les entreprises, comprendre l’insécurité professionnelle est capital tant ses conséquences sur la santé des salariés comme sur leur relation au travail et à l’entreprise sont décrites comme négatives. Une meilleure compréhension pourrait être synonyme de mise en place de dispositifs de détection lors du recrutement des individus ayant des caractéristiques personnelles les exposant à percevoir davantage l’insécurité professionnelle, ou de réflexion sur l’information données aux salariés sur la santé de l’entreprise. Pour la société comme pour l’ensemble des travailleurs, l’insécurité professionnelle peut engendrer des coûts élevés en termes de santé. Comprendre sa dynamique pourrait permettre de penser des dispositifs d’accompagnement, voire de prévention, facilitant la gestion des transitions professionnelles. L’article proposé ici est classiquement structuré en trois parties. Après une revue de la littérature donnant lieu au corps d’hypothèses de cette recherche, nous exposons la méthodologie retenue. Nous poursuivons enfin par la présentation des résultats suivie d’une discussion. 1. REVUE DE LITTÉRATURE © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) 1.1. L’insécurité professionnelle et la théorie de la conservation des ressources Comme le suggèrent Hoyau et al. (2018), l’insécurité professionnelle est un construit polysémique. Schoss (2017) recense 20 définitions différentes et souligne que cette diversité nuit à la compréhension du concept. Il propose de retenir une définition de l’insécurité professionnelle fondée sur trois éléments. Premièrement, Schoss note qu’il s’agit d’une expérience personnelle subjective (De Witte, 1999). Des éléments objectifs comme la nature du contrat de travail interviennent dans la construction de l’expérience mais ne sont pas fondamentaux. Deuxièmement, ce concept traduit la perception d’une menace sur sa capacité à demeurer dans son emploi. Il y a construction d’une anticipation négative. Cette dernière est plus probable dans les contextes professionnels de changement tels qu’une réforme de l’activité centrale de l’emploi NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 55 occupé. L’incertitude de l’avenir excède l’estimation que fait l’individu de sa capacité à y faire face. L’éventualité de la perte d’emploi est involontaire. L’individu souhaiterait garder son emploi (Debus et al., 2014). Enfin, cette vision ne concerne qu’un emploi, celui tenu par le salarié au moment où l’étude est réalisée, et ce dans une organisation spécifique. Keim et al. (2014) approfondissent l’analyse en soulignant qu’il convient de distinguer, dans l’expérience personnelle subjective, une dimension cognitive et une autre émotionnelle. Cependant, De Witte et al. (2015) suggèrent que ces deux dimensions sont étroitement liées. Shoss (2017) souligne qu’il est possible de mettre à jour une forme quantitative et une forme qualitative de l’insécurité professionnelle. La première serait centrée sur le maintien dans l’emploi alors que la seconde correspondrait à une inquiétude sur le maintien de l’emploi dans sa forme présente. Greenhalgh et Rosenblatt (1984) proposent d’intégrer au cadre d’analyse les efforts faits par l’individu pour gérer son insécurité professionnelle en retenant la définition suivante : « l’impuissance perçue à maintenir la continuité souhaitée dans une situation d’emploi menacée » (Greenhalgh et Rosenblatt, 1984 : 438). C’est cette dernière que nous retiendrons car elle permet de montrer que, si l’insécurité professionnelle traduit la perception d’une menace sur l’emploi actuel de l’individu, elle intègre également une volonté de faire face à cette situation même s’il lui semble que cela sera difficile. Cette définition légitime le recours à la théorie de la conservation des ressources. Cette dernière montre comment des individus font face aux situations difficiles de leur vie en mobilisant et en protégeant leurs ressources (Hobfoll, 1989). Celles-ci sont définies comme : « des objets caractéristiques personnelles, conditions ou énergies, qui sont valorisés par l’individu ou qui servent de moyens pour l’atteinte de ces objets, caractéristiques personnelles, conditions ou énergies » (Hobfoll, 1988 : 45). Cohen et Edwards (1989) soulignent que les ressources sont liées les unes aux autres. La perte de l’une d’elles conduit à une dégradation de l’ensemble des autres. La perte ou l’anticipation de la perte ont des conséquences plus importantes que le gain. En outre, plus la ressource est chère à l’individu plus la menace est mal vécue. Or, l’insécurité professionnelle constitue une menace sur la ressource d’emploi (Konig et al., 2010), mais plus largement sur les ressources sociales, relationnelles 55 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 procurées par l’emploi (De Witte, 1999). Hobfoll et al. (2018) soulignent l’existence de spirales de pertes. Un individu confronté à une perte a moins de ressources pour faire face au stress créé. Il est fragilisé dans son réinvestissement. 1.2. La relation entre l’insécurité professionnelle et l’intention de partir © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Définie comme la volonté délibérée de quitter une organisation (Steel et Lounsbury, 2009), l’intention de quitter une organisation constitue une référence dans le champ (Debus et Unger, 2017). Cependant, Jimenez et al. (2017) invitent la communauté scientifique à poursuivre leurs investigations tant les contextes nationaux sont différents. La littérature sur le turnover (Hom et al., 2012) valide cette liaison. La théorie de la conservation des ressources souligne que la perspective de perdre une ressource importante engendre du stress. L’individu va souhaiter faire cesser cette expérience douloureuse en se retirant de la situation pour se concentrer sur le développement de ressources qu’il maîtrise (König et al., 2010). L’intention de départ de l’organisation est clairement identifiée dans la littérature comme une solution développée par les individus en situation d’insécurité professionnelle (Debus et Unger, 2017). Greenhalgh et Rosenblatt (1984) soulignent que les salariés soucieux d’avoir une continuité dans l’emploi veulent partir avant d’être contraints de le faire par leur organisation afin de s’assurer un meilleur rebond professionnel. Les personnes souhaitent se concentrer sur la recherche d’un autre emploi. Dans leur revue de littérature respective, Cheng et Chan (2007), Sverke et al. (2002), tout comme Shoss (2017) soulignent l’existence d’un lien entre l’insécurité professionnelle et l’intention de partir. Sur cette base, nous posons l’hypothèse suivante : Hypothèse 1 : L’insécurité professionnelle a un impact positif sur l’intention de quitter l’entreprise 1.3. La relation entre l’insécurité professionnelle et l’intention de quitter la profession Le lien entre l’insécurité professionnelle et l’intention de quitter la profession n’a pas bénéficié du même intérêt que celui pour l’entreprise. A notre connaissance, aucun travail empirique n’a testé cette relation. Cependant, les travaux sur 56 GRH114.indd 56 l’intention de quitter la profession dans le milieu hospitalier menés sur des populations infirmières (Krausz et al., 1995 ; Yamaguchi et al., 2016), comme celles sur les enseignants (Arnup et Bowles, 2016), soulignent d’une part, une grande proximité entre les deux construits dans leurs antécédents et, d’autre part, qu’une dégradation de la relation avec l’employeur conduit à augmenter les deux intentions de partir (Rhodes et Doering, 1993). Griffeth, Hom, & Gaertner (2000) suggèrent que l’intention de quitter la profession serait un antécédent immédiat de l’intention de quitter une organisation. A l’inverse, Krauzs et al. (1995) proposent un cheminement inverse. Arnup et Bowles (2016) soulignent que la capacité de l’organisation à maintenir une relation de confiance avec ses employés, leur assurer un confort matériel et psychologique constituent des conditions essentielles pour maintenir l’intention de quitter la profession au plus bas. Seston et al. (2009), comme Selenko et al. (2017), confirment que la dégradation de l’activité professionnelle, tant dans sa dimension physique que psychologique, engendre une intention de quitter la profession. Laine et al. (2009) confirment ce résultat sur une population d’infirmières dans dix pays européens. Les auteurs soulignent que cette relation peut être atténuée par une implication plus grande des institutions dans la reconnaissance professionnelle des infirmières. Cependant, comme le souligne Wermeling (2009), rapprocher les deux formes d’intention de quitter suppose d’intégrer dans l’analyse les coûts de sortie de la profession. Seston et al. (2009) soulignent que la sortie d’une profession structurée, ayant un coût d’entrée important, est beaucoup plus improbable que de quitter une profession marquée par la polyvalence rendant la sortie plus aisée. L’insertion des Responsables de Formation dans les directions de gestion des ressources humaines, matérialisée par la tenue de postes mixant formation et recrutement, nous conduit à conclure que, dans notre cas, le repositionnement professionnel ne supportera pas de coûts trop élevés. Sur cette base nous posons l’hypothèse suivante : Hypothèse 2 : L’insécurité professionnelle impacte positivement l’intention de quitter la profession. 1.4. La relation entre l’insécurité professionnelle et la personnalité proactive Définie comme : « a relatively stable dispositional tendency for individuals to control REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 57 1.5. La relation entre l’insécurité professionnelle et l’attitude de carrière sans frontière Sullivan et Arthur (2006 : 9) définissent l’attitude de carrière sans frontière comme “navigates the changing work landscape by enacting a career characterized by different levels of physical and psychological movement”. Briscoe et Hall (2006) soulignent qu’elle traduit la capacité des individus à prendre des initiatives professionnelles. Cette ouverture au changement, à l’incertitude est synonyme d’enthousiasme face à l’émergence de nouvelles activités en dehors de l’organisation. La carrière est conçue comme une succession de relations avec différents employeurs (Arthur et Rousseau, 1996). Briscoe et al. (2012) soulignent que l’attitude de carrière sans frontière permet une adaptation plus aisée à l’insécurité professionnelle. Elle traduit une capacité à trouver des ressources dans l’environnement et à identifier des opportunités. Elle donnerait au salarié une capacité à envisager l’avenir avec assurance (Direnzo et Greenhaus, 2011). Travaillant sur le concept d’insécurité de carrière, qui recoupe les dimensions de base de l’insécurité professionnelle, Colakoglu (2011) souligne que l’attitude de carrière sans frontière agit indirectement sur l’insécurité de carrière au travers du développement de compétences sur la connaissance de soi dans la trajectoire professionnelle. Plus encore, Abessolo, Hirschi et Rossier (2017) montrent que l’attitude de carrière sans frontière est liée négativement à des marques extérieures de réussite sociale. Les auteurs soulignent, au contraire, que cette orientation de carrière valorise l’autonomie et à la recherche de défi. La confrontation à la difficulté du repositionnement professionnel ne sera pas lue comme une menace mais, au contraire, comme un défi à relever. Dans cette perspective, l’attitude de carrière sans frontière rime avec satisfaction de carrière (Culié, Khapova, & Arthur, 2014). Cependant, un examen plus approfondi de la littérature montre que le consensus n’est qu’apparent. Rodrigues et al. (2019) soulignent que cette orientation engendre une moindre satisfaction dans l’emploi. Vansteenkiste, Verbruggen, & Sels, (2013) montrent que cette attitude constitue un handicap dans la recherche d’emploi tant le besoin de défi est important. Sans contester ces résultats, Rodrigues et al. (2019) montrent que l’attitude de carrière sans frontière est liée à l’employabilité perçue. La personne se sent capable 57 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) situational forces and actively incite change in their environments » (Thomas et al., 2010 : 276), la personnalité proactive a fait l’objet de peu de recherches en liaison avec l’insécurité professionnelle, à l’exception du travail récent de Lin et al. (2018). Huang et al. (2012) soulignent l’existence d’un lien négatif entre des comportements proactifs et l’insécurité professionnelle perçue. Stiglbauer et Batinic (2015) suggèrent que la proactivité, dans l’ajustement au stress engendré par l’insécurité professionnelle (stratégie centrée sur le problème), est plus efficace qu’une approche centrée sur l’émotion. Ces résultats retrouvent les conclusions des travaux suggérant un lien direct du lieu de contrôle interne sur l’insécurité professionnelle (Ashford et al., 1989 ; Debus et al., 2014). Les personnes ayant la perception de pouvoir agir sur leur vie, sur leur poste de travail éprouvent une moindre insécurité professionnelle. La littérature sur la personnalité proactive retrouve ces résultats sur la capacité à mieux gérer le stress et à dépasser les situations délicates (Tornau et Frese, 2013). Lin et al. (2018) viennent renforcer ce constat de l’existence d’une relation négative entre les deux variables. Premièrement, ils soulignent que les personnes dotées d’une personnalité proactive sont à la recherche d’opportunités leur permettant d’exercer cette capacité dans leur entreprise. La personnalité proactive est synonyme d’une volonté de la personne de développer son autonomie et son contrôle sur l’environnement (Bateman et Crant, 1993). L’insécurité professionnelle qui correspond à une évaluation de menace et d’impuissance professionnelle sera donc liée négativement avec la personnalité proactive tant cette dernière pense pouvoir agir sur son environnement. Deuxièmement, Lin et al. (2018) suggèrent que les individus dotés d’une personnalité proactive sont à la recherche de signes de reconnaissance de la part de leur organisation. Or l’expérience de l’insécurité professionnelle peut leur apparaître comme tout l’inverse et déclencher chez eux une volonté de réduire cette perception. Enfin, les auteurs soulignent que l’insécurité professionnelle peut être comprise comme un questionnement par l’entreprise de la capacité de l’individu à rebondir, à être acteur de sa carrière, ce qui va à l’encontre de la personnalité proactive. Sur la base de ces arguments nous avançons l’hypothèse suivante : Hypothèse 3 : La personnalité proactive impacte négativement l’insécurité professionnelle perçue. 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 1.6. La relation entre l’insécurité professionnelle et la perception d’alternatives d’emploi © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) La perception d’alternatives d’emploi constitue une variable clé dans l’étude de l’insécurité professionnelle. Quelle que soit la revue de littérature (Shoss, 2017 ; Sverke et al., 2002), elle apparaît comme ayant un impact fort à la fois sur la constitution de cette cognition que sur ses conséquences. Dès 1989, reprenant les conclusions de Greenhalgh et Rosenblatt (1984), Ashford et al. suggèrent que la perception de la menace sur l’emploi, élément constitutif de la définition de l’insécurité professionnelle, se fonde sur la perception d’alternatives d’emploi faibles. Plus récemment, s’appuyant sur la théorie des ressources et du stress, Sora et al. (2010) montrent que la dépendance à l’emploi intensifie la relation entre l’insécurité professionnelle et la satisfaction au travail comme l’engagement organisationnel. De la même manière, les travaux sur l’employabilité perçue (Silla et al., 2009) suggèrent que cette croyance des salariés de pouvoir retrouver aisément un emploi grâce à leurs compétences leur permet de réduire les effets négatifs de l’insécurité professionnelle. Dans une revue de la littérature récente sur les antécédents de l’insécurité professionnelle, Keim et al. (2014) soulignent l’importance de la perception d’alternatives d’emploi dans les relations de ce construit avec l’ensemble de ces antécédents. Schoss (2017) approfondit l’analyse en assimilant la perception d’alternatives d’emploi à une vulnérabilité économique. Plus la personne est dépendante de son emploi, c’est-à-dire ne dispose pas d’autres sources de revenus, plus elle sera soucieuse de pouvoir retrouver un emploi lorsqu’elle sera touchée par l’insécurité professionnelle. La perception de cette vulnérabilité économique apparaît comme influençant tant les relations avec les 58 GRH114.indd 58 antécédents que les conséquences de l’insécurité professionnelle. C’est pourquoi, sur la base de ces différents travaux, nous avançons les hypothèses suivantes : Hypothèse 5 : La relation entre l’insécurité professionnelle perçue et l’intention de quitter son entreprise (H5a) et entre l’insécurité professionnelle perçue et l’intention de quitter sa profession (H5b) est d’autant plus forte que les responsables de formation perçoivent des alternatives d’emploi élevées. Hypothèse 6 : La relation entre la personnalité proactive et l’insécurité professionnelle perçue (H6a) et entre l’attitude de carrière sans frontière et l’insécurité professionnelle perçue (H6b) est d’autant plus forte que les responsables de formation perçoivent des alternatives d’emploi élevées. 2. CONTEXTE ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE 2.1. Contexte et échantillon La France se caractérise par un marché du travail moins dichotomique que certains autres marchés (ex : marché américain). Si le marché américain distingue bien d’un côté les « occupations » (emplois salariés) et de l’autre les « professions » (professions libérales), le marché du travail français semble, lui, connaître d’autres dispositions. Le terme de profession en France semble s’exercer, certes, pour les professions libérales mais aussi pour des métiers tels que les routiers, les pilotes, les mineurs… (Dubar, 2003). Par ailleurs, la sociologie des professions en France s’est depuis longtemps éloignée des conceptions premières de Parsons (1951) pour s’intéresser aux groupes professionnels définis comme « un ensemble flou, segmenté, en constante évolution, regroupant des personnes exerçant une activité ayant le même nom doté d’une visibilité sociale et d’une légitimité politique suffisantes sur une période significative » (Dubar, 2003). A ce titre, les responsables de formation composent un groupe professionnel dont les structures, à la suite de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle ont été profondément modifiées. A ce titre, plusieurs éléments caractérisent la pertinence de ce groupe REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) de trouver un emploi même dans un environnement professionnel difficile. C’est pourquoi, malgré les liens établis par la littérature avec une moindre satisfaction au travail, il apparaît que cette attitude de carrière sans frontière facilite la gestion de l’insécurité professionnelle. Sur cette base, nous avançons l’hypothèse suivante : Hypothèse 4 : L’attitude de carrière sans frontière impacte négativement l’insécurité professionnelle. 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) professionnel pour la compréhension de l’insécurité professionnelle. D’abord, au niveau sociétal, la France se caractérise par une préférence de la population active pour la stabilité professionnelle (Glaymann, 2010). Les nouvelles formes d’emplois comme le portage salarial, plus flexibles, sont assimilées à des positions précaires (Evraere, 2014). Reprenant les constats de la Dares en 2015, Hoyau et al. (2018) soulignent que l’insécurité professionnelle est une réalité de plus en plus présente en France. Cette peur de perdre son emploi se développerait sous l’influence de trois facteurs : la multiplication des plans de sauvegarde de l’emploi, la perte d’un tiers de l’emploi industriel et l’accroissement de l’emploi précaire depuis le début des années 2010 (Hoyau et al., 2018). Ces résultats retrouvent les conclusions de Dany (2003) relativisant la capacité des salariés à vouloir être maître de leur carrière en France. Même si le désir de mobilité professionnelle se développe comme en atteste un travail récent de l’Ifop (2018), il demeure que, plus que d’autres salariés comme ceux des ÉtatsUnis, la volonté des salariés français est de rester dans leur organisation. Ensuite, plus spécifiquement, en ce qui concerne la formation professionnelle continue (FPC), cette dimension de la fonction ressource humaine a subi une profonde transformation. Légitimée socialement et juridiquement par la loi du 16 juillet 1971 créant une obligation légale de dépenses de formation, les professionnels de la FPC en entreprise ont longtemps pu s’appuyer sur l’existence de ce budget plancher pour asseoir une activité minimum. Cette dernière fut en croissance régulière jusqu’en 1994 tant formation et promotion étaient associées (Cadin et al., 2014). Les professionnels de la formation en entreprise comme les formateurs et les responsables de formations connurent un développement important. La capacité à conserver son poste dans cette activité était à l’époque forte. Cependant, à partir des années 80, la structure de formation voit son utilité questionnée (Galambaud, 1980 ; Layole, 1994). Grima (2000) souligne que les Responsables de Formation doivent faire face à une situation complexe. Leur incapacité à démontrer leur impact sur la création de valeur dans l’entreprise, le développement de la gestion par les compétences comme les nouvelles formes pédagogiques, comme le e learning, amènent un nombre croissant d’entreprises à questionner leur utilité. Cette interrogation a conduit à une redistribution des tâches des acteurs de la formation. Nombre d’entreprises fusionnèrent leurs activités formation, recrutement et gestion des compétences dans un pôle de développement des compétences. Les postes de responsables de formations devinrent plus rares. La réforme du 5 mars 2014 apparaît comme la fin d’un processus de restructuration de la fonction formation. L’Observatoire de l’évolution des métiers de l’assurance consacré aux futurs de la formation énonce « Un déplacement des rôles, des contenus, des outils, des contributions et des responsabilités est à l’œuvre »1. Le guide pratique de la réforme de la formation professionnelle édité par le gouvernement2 (Nov. 2014) souligne que c’est « la fin de l’obligation de dépenser ». La contribution financière obligatoire est maintenant uniquement externe. Les Responsables de Formation voient la fixation d’un budget formation minimal garanti par la loi disparaître. En promouvant, avec le Compte Personnel de Formation, l’initiative des salariés, la loi marginalise le Responsable de Formation qui doit maintenant gérer des salariés acteurs de leur devenir professionnel. Les responsables de formation doivent faire évoluer leur professionnalisme pour accompagner les salariés dans la gestion de leur parcours. Enfin, cette loi réinterroge la définition même de ce qu’est une action de formation. Elle ouvre la question de l’intégration des Nouvelles Technologies de l’Information et de Communication (NTIC) dans des dispositifs de formation. Comme le précise l’étude de l’Observatoire de l’évolution des métiers de l’assurance (2017) : « Ces nouvelles prestations renouvellent le contenu des emplois et des expertises. Dans le domaine de la formation digitale, ils génèrent le besoin de professionnels capables de développer des contenus didactiques en maîtrisant des outils numériques » et de préciser en conclusion : « Le portrait des métiers de la formation qui s’esquisse pour demain s’éloigne du descriptif qu’en dresse l’actuelle nomenclature. Le mouvement vers le digital et l’accompagnement est engagé, même si c’est à des degrés divers selon les entreprises. » 1. D’une obligation de moyens à une exigence de résultats, quelle formation demain dans l’assurance ?, Observatoire de l’évolution des métiers de l’assurance, Décembre 2017. http://www.metiers-assurance.org/wp-content/uploads/2017/12/ OEMA-Etude-FORMATION-2017.pdf 2. Formation Professionnelle : Guide Pratique de la Réforme, Novembre 2014, disponible à l’adresse suivante http:// travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/GUIDE_reforme_formation_professionnelle.pdf NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 59 59 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 2.2. Échantillon et instruments de mesure © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Le questionnaire fut administré auprès de 4 562 anciens élèves d’une formation spécialisée en ressources humaines durant le premier trimestre 2016, à savoir un an après l’application de la loi de 2014. Parmi ces salariés, nous avons identifié dès le début du questionnaire (question 1) les Responsables de Formation en demandant aux répondants s’ils sont actuellement Responsables de Formation (Oui/Non). Au total, nous avons pu réunir 276 répondants et questionnaires utilisables. 83% des répondants sont des femmes. L’âge moyen est de 39,2 ans. L’ancienneté moyenne sur le poste est de 5,2 ans tandis que leur ancienneté moyenne dans la profession avoisine les 9,1 ans. Le questionnaire rassemblait 6 échelles de mesure. Premièrement, l’insécurité professionnelle a été mesurée à l’aide de l’échelle proposée par De Witte (2000). Cette dernière apparaît comme une échelle de référence dans les dernières revues de littérature sur l’insécurité professionnelle (Schoss, 2017). La personnalité proactive a été mesurée en mobilisant l’échelle de Claes et al. (2005). Cette dernière s’appuie sur les travaux de référence de Bateman et Crant (1993) pour proposer une version plus courte de l’échelle ayant les mêmes qualités scientifiques (Pan et al., 2018). L’attitude de carrière sans frontière a été mesurée par l’échelle en 4 items comportant des items tels que : « J’aime effectuer des tâches de travail qui nécessitent de travailler en dehors de l’entreprise ». Cette sélection d’items a été effectuée sur la base des travaux de Briscoe et Hall (2006). Là encore, ce choix s’explique par la qualité de cette échelle 60 GRH114.indd 60 qui constitue une référence dans la littérature sur la carrière (Briscoe et al., 2012). L’intention de quitter l’emploi ainsi que l’intention de quitter la profession ont, toutes deux, été mesurées au travers de l’échelle en 3 items de Lichtenstein et al. (2004). S’agissant de l’intention de quitter la profession, le mot emploi a été remplacé au sein de chaque item par le mot profession comme au sein de l’étude menée par Paillé et Valeau (2013). Un exemple d’item est le suivant : « Je pense souvent à démissionner » ou bien pour l’intention de quitter la profession : « Je pense souvent à changer de profession ». Enfin, les alternatives d’emploi perçues ont été mesurées avec l’échelle de 3 items de Peters et al. (1981), avec des items comme : « Je n’ai aucun doute de pouvoir trouver un travail qui est au moins aussi bon que celui que j’ai maintenant ». Là encore, le choix de l’outil de mesure fut guidé par une volonté de robustesse et de validité. L’échelle de Peters et al. (1981) apparaît comme une référence dans plusieurs travaux récents sur la thématique des alternatives d’emploi perçues (Peltokorpi et al., 2015 ; Joung et al., 2018). Pour chacun de ces items, les répondants pouvaient répondre au travers de l’utilisation d’une échelle de Likert en 7 points. 2.3. Validation de l’instrument de mesure Avant de tester le modèle structurel, nous avons testé le modèle de mesure (Anderson et Gerbing, 1988). Des analyses factorielles confirmatoires ont été réalisées sur chacun des construits. L’analyse de la fiabilité individuelle des items (SMC <0,5) et des résidus standardisés nous ont poussé à éliminer certains items en raison de résidus importants (item 3 pour la proactivité et item 1 pour l’attitude de carrière sans frontière). Pour les facteurs retenus, leur fiabilité (rhô de Jöreskog – Annexe 1), ainsi que leurs validités convergente et discriminante (Annexe 2) ont été vérifiées (Fornell et Larcker, 1981). Concernant l’ajustement des données, les résultats sont méritoires. Le GFI et l’AGFI, sont supérieurs aux seuils de 0,9 (Bentler, 1990). Le Chi² par degré de liberté (1,89 ; norme < 3), le RMSEA (0,053 norme < 0,05, Roussel et al., 2002), le TLI (0,96), le CFI (0,97) et le SRMR (0,05; < 0,1 en conjonction avec un TLI et un CFI > 0,95, Hu et Bentler, 1999) nous permettent de conclure à un ajustement acceptable des données au modèle de mesure spécifié. REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Comme le suggère Geertz, (1973), pour qui les contextes temporels et sociaux ne doivent pas être étudiés pour ce qu’ils sont, mais pour ce qu’ils permettent de révéler, nous pensons donc que la modification du cadre réglementaire, de l’environnement technologique ainsi que le questionnement sur l’utilité de la fonction même de Responsable de Formation en entreprise, synonyme de réduction du nombre de postes, constituent autant de facteurs fondant une insécurité professionnelle parmi ces salariés. Plus largement, nous pensons que cette évolution d’un positionnement administratif à un positionnement plus managérial, voire de prestataire interne, s’inscrit dans une évolution globale de la fonction RH qui peut engendrer une insécurité professionnelle parmi ses membres. 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 3. RÉSULTATS 2.4. Techniques statistiques utilisées pour tester les hypothèses Afin de tester les hypothèses H1, H2, H3 et H4, nous avons opté pour un modèle d’équations structurelles et retenu l’analyse des structures de covariance (maximum de vraisemblance). La distribution n’étant pas multi-normale (Mardia=74,75), nous avons procédé à une procédure de Bootstrap (n=200). Pour le rôle modérateur de la perception d’alternatives d’emploi, (H5a à H6b), nous avons eu recours à des analyses multi-groupes. L’analyse s’est faite en deux temps (Roussel et al., 2002) : 1 / des analyses multi-groupes afin de vérifier l’invariance du modèle de mesure dans les deux groupes, 2 / des analyses multi-groupes destinées à examiner la variance du modèle structurel entre les deux groupes. Pour tester le statut modérateur nous avons réalisé des tests de différence de Chi² (Roussel et al., 2002), puis examiné les coefficients de régression standardisés. La perception des alternatives d’emploi étant mesurée par une variable latente, les données ont fait l’objet d’une ACP (pour vérifier la structure factorielle), puis les items ont été scorés. Afin de constituer des groupes d’individus, nous avons utilisé l’analyse typologique (nuées dynamiques). La taille de nos groupes nous a incités à retenir deux groupes pour la variable « alternatives d’emploi perçues » : 176 alternatives faibles et 100 alternatives élevées. 3.1. La validation du modèle structurel Pour tester nos hypothèses, nous avons opté pour la méthode équations structurelles. Les résultats de cette analyse sont globalement acceptables et, hormis la relation entre l’attitude de carrière sans frontière et insécurité professionnelle (P<0,1), toutes les probabilités P sont significatives à moins de 5%. Concernant les indices d’ajustement, le GFI, l’AGFI, le Chi-deux/ ddl et le RMSEA sont acceptables alors que le TLI et le CFI et le SRMR atteignent les normes strictes proposées par Hu et Bentler (1999). Les hypothèses H1, H2, H3 sont validées. S’agissant de H4, un lien apparaît entre l’attitude de carrière sans frontière et l’insécurité professionnelle, cependant, au vu de la significativité de ce lien, nous ne pouvons valider l’hypothèse H4. L’analyse des SMC (équivalents aux R² d’une régression) indique que le modèle explique 12,1% de l’insécurité professionnelle, 13,1% de l’intention de quitter son emploi et 8,2% de l’intention de quitter la profession de Responsable de Formation. Tableau 1. Les résultats du modèle structurel. © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) inspro intquitemp intquitprof Mardia <--- Proact <--- Attssfront <--- Inspro <--- 54,957 Inspro Indices -0,328 0,114 0,361 0,286 Chi-deux/ddl GFI AGFI SRMR P -3,225 0,001 1,71 0,087 5,475 4,368 <0,001 Scores <0,001 0,052 0,97 NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 0,131 0,082 0,90 CFI Les résultats indiquent une invariance du modèle de mesure, toutes les probabilités des 0,121 0,93 0,056 (LB =0,043 ; HB =0,069) 3.2. Effet modérateur de la perception d’alternatives d’emploi SMC 1,89 RMSEA TLI GRH114.indd 61 C.R. 0,96 relations entre les variables observées et les variables latentes sont inférieures à 0,001%. En ce qui concerne l’ajustement du modèle testé en analyse multi-groupes les résultats sont comparables (parfois meilleurs) à ceux obtenus pour le modèle 61 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) inspro Liens structurels 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle Structurel dans son ensemble. Le RMSEA est proche du seuil de 0,05. Le CFI et le TLI se situent au-dessus des normes recommandées (Roussel et al., 2002). Le Chi-deux par degrés de liberté est égal à 1,25 (Roussel et al., 2002 ; Bagozzi, Yi et Phillips, 1991 recommandent une valeur inférieure à 5). Seuls le GFI et l’AGFI dont Roussel et al. (2002) nous rappellent qu’ils sont sensibles à la complexité des modèles (ce qui est le cas en analyse multi-groupes) sont en-deçà des normes prescrites. L’ajustement des données est donc acceptable. Les résultats situés sur le tableau 3 ci-après, nous indiquent que les quatre hypothèses relatives au rôle modérateur de la perception d’alternatives d’emploi sont validées. Ils indiquent que lorsque les Responsables de Formation perçoivent des alternatives d’emploi élevées, ils ressentent une plus grande instabilité professionnelle, ce qui les conduit à une plus grande intention de quitter l’emploi et la profession. Tableau 2. Indices d’ajustement modèle multigroupe : perception d’alternatives d’emploi Chi-deux / degrés de liberté 1,25 AGFI 0,85 GFI 0,89 RMSEA 0,045 RMSEA (HB) 0,055 RMSEA (LB) 0,033 Tucker-Lewis index 0,95 Comparative fit index 0,96 SRMR 0,054 Tableau 3. Effet modérateur des alternatives d’emploi perçues inspro ß- © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) inspro ß- intquitprof ß- intquitemp ß- Variable indépendante Coefficients standardisés attssfront 0,055 proact Inspro 68,031 Ddl 2 0,170 P Chi-deux <0,01 Test de différence de Chi-deux attssfront/inspro Chi-deux 103,491 Ddl 2 P <0,01 Test de différence de Chi-deux inspro :int quitter empl Chi-deux 6,407 Ddl 2 P 0,046 Test de différence de Chi-deux inspro / intquitter prof Chi-deux 27,209 62 GRH114.indd 62 Ddl 2 0,327 Inspro Test de différence de Chi-deux proact/inspro Chi-deux -0,185 P <0,01 359,984 C.R. -1,749 0,576 3,772 2,021 Modèle libre ddl 174 P 0,08 0,565 <0,001 0,043 P <0,001 Modèle libre Chi-deux 395,444 ddl <0,001 Modèle libre Chi-deux 447,943 ddl <0,001 Modèle libre Chi-deux 427,141 ddl 174 C.R. P -0,646 -4,156 <0,001 0,510 4,646 0,234 0,507 1,977 4,805 0,048 <0,001 <0,001 Modèle contraint Chi-deux 454,350 ddl 176 P <0,001 Chi-deux 454,350 ddl 176 P <0,001 Modèle contraint P 174 Coefficients standardisés Modèle contraint P 174 Groupe perception d’alternatives d’emploi élevée 100 Chi-deux 454,350 ddl 176 P <0,001 Modèle contraint P <0,001 Chi-deux 454,350 ddl 176 P <0,001 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Variable dépendante Groupe perception d’alternatives d’emploi faible 176 16/01/2020 10:08 4. DISCUSSION 4.1. Apports théoriques de la recherche © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Le but de cette recherche était de promouvoir une compréhension globale de l’insécurité professionnelle articulant les grilles d’analyse centrées sur l’environnement et sur la personne. Sans nier la difficulté perçue par l’individu à faire face à la perte potentielle de son emploi, nous soulignons qu’il a la possibilité de se confronter à cette situation difficile. Pour cela, nous avons mobilisé la théorie de la conservation des ressources (Hotbfoll, 1989) qui traduit à la fois l’importance de la perception d’une menace sur des ressources valorisées, comme c’est le cas avec un emploi, mais également la capacité de l’individu à conserver et protéger ces mêmes ressources. Cette orientation de recherche nous a conduits à mobiliser des variables personnelles stables (la personnalité proactive et l’attitude de carrière sans frontière) mais aussi trois variables plus situationnelles, liées à la perception de l’environnement et aux conséquences de l’insécurité perçue (l’intention de quitter la profession et celle de quitter l’entreprise, la perception d’alternatives d’emploi). Pour renforcer la prise en compte de cette dernière perspective, nous avons retenu comme empirie le cas des Responsables de Formation devant faire face à une évolution de la législation encadrant leur activité dans leur organisation. En effet, la réduction, voire la fin de la spécificité de la législation française (fin de l’obligation légale de dépense de formation), constitue un exemple idéal type d’une rupture d’une caractéristique d’un environnement professionnel susceptible d’engendrer la perception d’une insécurité professionnelle. Plusieurs contributions se dégagent de ce travail. Le premier apport est de valider l’existence d’un lien positif entre l’insécurité professionnelle et l’intention de quitter l’emploi (Debus et Unger, 2017 ; Asford et al., 1989). Ce résultat confirme la perspective soutenue par la théorie de la conservation des ressources. L’individu confronté à une situation synonyme de menace, de perte d’une ressource valorisée, va souhaiter faire cesser cette expérience synonyme de stress (König et al., 2010 ; Shoss, 2017). Ce résultat ne doit pas être pensé selon nous comme la preuve de la faible marge de manœuvre de l’individu face à un employeur puissant. Au contraire, en NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 63 quittant son emploi, l’individu témoigne, conformément à la théorie de la conservation des ressources, qu’il souhaite continuer à s’investir mais dans une autre activité en dehors d’un environnement peu favorable (Cheng et Chan, 2007 ; Sverke et al., 2002). Sa volonté de partir traduit sa capacité d’agence (Greenhalgh et Rosenblatt, 1984). Ce résultat étend la validité externe des recherches existantes et pour lesquelles les contextes nationaux sont spécifiques en matière de marché de l’emploi (Jimenez et al., 2017). Nous montrons ici qu’un changement radical d’un marché de l’emploi, celui des Responsables de Formation, engendre une insécurité professionnelle que les individus souhaitent faire cesser. Ce résultat est intéressant, tant il convient d’intégrer dans l’analyse l’existence d’une couverture sociale en matière de chômage plus importante en France qu’aux Etats Unis. En effet, il est intéressant de noter qu’alors que le système de protection sociale, en dehors d’une hypothétique rupture conventionnelle est plus protecteur en cas de licenciement que de départ volontaire, nos résultats montrent que les Responsables de Formation préfèrent s’extraire de leur entreprise au risque de ne pas pouvoir trouver immédiatement un emploi comparable. Ce résultat montre donc qu’il convient de relativiser l’importance de facteurs contextuels comme l’existence d’une protection sociale favorisant immobilisme professionnel dans la compréhension de l’insécurité professionnelle. Le second apport est de montrer l’existence d’un lien positif entre l’insécurité professionnelle et l’intention de quitter la profession. Ce résultat étend la validité externe de travaux réalisés auprès de professionnels de santé (Krausz et al., 1995 ; Yamaguchi et al. 2016 ; Seston et al., 2009 ; Laine et al., 2009) comme de l’enseignement (Arnup et Bowles, 2016) au cas d’un autre groupe professionnel, celui des Responsables de Formation. Ceci confirme les travaux de Selenko et al. (2017) qui soulignent que l’insécurité professionnelle questionne le lien à la profession. Ce résultat vient renforcer les travaux intégrant dans l’analyse l’existence de coûts de sortie (Wermeling, 2009). Dans notre cas, les Responsables de Formation n’ont pas de coûts d’entrée professionnels comparables à ceux des professionnels du secteur médical, ils sont avant tout formés à la Gestion des Ressources Humaines. Cette possibilité de pouvoir quitter une activité comme la formation et pouvoir « se reconvertir » plus facilement pourrait expliquer l’existence du lien démontré dans cette recherche 63 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) confirmant en cela les travaux de Seston et al. (2009). Ces résultats sur les liens entre l’insécurité professionnelle et les intentions de quitter l’emploi et la profession confirment leur proximité (Rhodes et Doering, 1993 ; Griffeth, Hom and Gaertner, 2000). Intégrer la relation avec non pas la profession, mais le groupe professionnel, permet d’enrichir la littérature d’une variable rarement mobilisée (Schoss, 2017). Plus largement, ces résultats sur les conséquences de l’insécurité professionnelle témoignent de la pertinence de la grille d’analyse de l’insécurité professionnelle centrée sur l’environnement pour la compréhension de ses conséquences. Ce résultat retrouve en partie les conclusions de Hobfoll et al. (2018) sur l’existence de spirales de pertes, en ce sens que l’individu percevrait que l’insécurité professionnelle ne se limite pas à son entreprise mais concerne aussi l’ensemble de son domaine d’activités professionnelles. Le troisième apport cette recherche est de montrer l’impact négatif de la personnalité proactive sur l’insécurité professionnelle. Au-delà de confirmer les travaux sur les stratégies d’ajustement au stress (Stiglbauer et Batinic, 2015 ; Zhao et al., 2012) et ceux sur le lieu de contrôle (Ashford et al., 1989 ; Debus et al., 2014), ce résultat constitue à notre connaissance la seconde mise en relation entre ces deux variables après le récent travail de Lin et al. (2018). Les personnes dotées d’une personnalité proactive recherchent des opportunités de défis à relever (Bateman et Grant, 1993) comme une valorisation professionnelle de l’organisation qui les emploie. L’insécurité professionnelle ne correspond pas à cette situation ce qui conduit à une liaison négative. Ce résultat qui retrouve plus largement la littérature sur la personnalité proactive (Tornau et Frese, 2013) enrichit la compréhension de l’insécurité professionnelle tant il complète les écrits sur le lieu de contrôle en introduisant une dimension temporelle supplémentaire, une capacité à anticiper, à éviter les conséquences négatives d’une situation. Le quatrième apport de cette recherche est de souligner qu’il n’existe pas, pour l’ensemble de la population, de lien entre l’orientation de carrière sans frontière et l’insécurité professionnelle. Le résultat n’était pas anticipé tant la littérature souligne que l’orientation de carrière sans frontière est synonyme d’un coping actif lui-même (Arthur et Rousseau, 1996 ; Briscoe et Hall, 2006 ; Briscoe et al., 2012). Ce résultat 64 GRH114.indd 64 vient nuancer la pertinence de la grille de lecture de l’insécurité professionnelle centrée sur la personne. Plus encore, elle entre partiellement en contradiction avec la validation de l’influence de la personnalité proactive. En effet, alors que l’hypothèse précédente souligne l’impact négatif de la proactivité sur l’insécurité professionnelle, ici l’absence de relation avec l’orientation de carrière sans frontière suggère que la capacité à se projeter vers le futur dans une multitude d’organisations, lors de sa trajectoire professionnelle, n’a pas d’impact (Arthur et Rousseau, 1996). L’influence d’envisager l’avenir avec assurance (Direnzo et Greenhaus, 2011) sur l’insécurité professionnelle n’est pas validée tout comme l’existence de compétences spécifiques permettant à la personne de mieux gérer sa trajectoire professionnelle (Colakoglu, 2011 ; Abessolo, Hirschi et Rosier, 2017). De la même manière, la perspective critique du lien entre l’orientation de carrière et l’insécurité professionnelle (Rodrigues et al., 2015 ; Culié et al., 2014) est elle aussi non validée. L’insécurité professionnelle n’est pas liée positivement à l’orientation de carrière sans frontière. Nous proposons d’expliquer cette absence de lien par la nature de notre échantillon. Deux éléments pourraient avoir neutralisé l’influence de l’orientation de carrière sans frontière sur l’insécurité professionnelle. Le premier serait la fidélité des Responsables de Formation à leur organisation. Grima (2000) souligne que dans de nombreuses organisations, le Responsable de Formation est le garant de la culture de cette dernière. Il a souvent le profil d’un cadre en fin de carrière ce qui rend la perspective d’une mobilité plus difficile. Le second serait plus structurel et traduirait que, dans le contexte français de l’emploi, la mobilité professionnelle ne constitue pas encore une dimension clé dans le choix de carrière des individus. L’existence d’un droit du travail protecteur ou encore la préférence des salariés français pour la stabilité professionnelle (Dany, 2003) influencerait les orientations professionnelles. Globalement, les résultats de notre travail sur les antécédents de l’insécurité professionnelle nuancent la pertinence de la grille de lecture centrée sur la personne. Les relations sont loin d’être aussi simples que pourrait le laisser penser une rapide revue de la littérature. L’introduction dans l’analyse de la perception d’alternatives d’emplois qui traduit, au contraire, la prise en compte de la grille d’analyse centrée sur l’environnement permet de souligner à la fois la complexité des relations entre variables personnelles REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) et contextuelles comme la richesse de cette perspective plus nuancée jusqu’ici peu valorisée par la littérature. Le cinquième apport est de souligner le rôle modérateur tenu par la perception d’alternatives d’emploi. Ceci confirme les conclusions de la littérature soulignant l’impact de l’alternative d’emploi sur l’insécurité professionnelle (Schoss, 2017 ; Sverke et al., 2002 ; Keim et al., 2014). Il existe un effet à la fois sur les antécédents et les conséquences de l’insécurité professionnelle (Greenhagh et Rosenblatt, 1984 ; Ashford et al., 1989). Ce résultat est pour nous important tant il montre les liens entre les facteurs contextuels et personnels pour comprendre l’insécurité professionnelle. Pour les antécédents de l’insécurité professionnelle, l’insertion de la perception d’alternatives d’emploi rend significative et positive la relation avec l’attitude de carrière sans frontière et intensifie le lien avec la proactivité. En d’autres termes, la proactivité de l’individu semble le protéger d’autant plus d’un sentiment d’insécurité professionnelle, lorsque cette proactivité peut s’exprimer dans un environnement qu’il estime favorable en termes d’alternatives d’emplois. L’influence de la perception d’alternative d’emploi confirme et précise le lien existant et retrouve les conclusions de la littérature tant sur le coping (Zhao et al., 2012) et sur le lieu de contrôle interne (Ashford et al., 1989 ; Debus et al., 2014). Cependant, ces perceptions d’alternatives d’emploi semblent, a contrario, augmenter le sentiment d’insécurité professionnelle chez les individus qui estiment qu’ils doivent gérer leur carrière au-delà des frontières de l’entreprise. Face à un environnement global menaçant, la perspective d’autres emplois nombreux semble questionner très fortement ces individus sur la viabilité de leur emploi actuel. La conception de la carrière sans frontière repose sur la disposition de certains individus à envisager la gestion de leur propre carrière en dehors de l’entreprise, poussant ceux-ci à démultiplier les contacts, les groupes de travail ou encore l’appartenance à des associations professionnelles en dehors du cadre de leur entreprise (Briscoe et Hall, 2006 Arthur et Rousseau, 1996). Cette disposition tend à démultiplier les possibilités offertes à l’individu pour gérer sa carrière en dehors de l’entreprise lorsque l’environnement apparaît porteur d’opportunités professionnelles importantes. Pour que l’attitude de carrière sans frontière ait un impact positif sur l’insécurité professionnelle NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 65 perçue, il faut que l’individu ait le sentiment de disposer d’alternatives d’emploi élevées. S’agissant du lien entre les attitudes de carrière sans frontières et l’insécurité professionnelle, il semblerait qu’il y ait un seuil. A partir d’un certain niveau de conscience d’alternatives d’emplois existantes, les individus qui développent ce rapport à la carrière semblent prendre conscience de l’insécurité professionnelle dans laquelle ils se trouvent. Cette dernière pourrait être reflétée par les contacts qu’ils ont à l’extérieur, ainsi que par les possibles opportunités professionnelles qu’ils rencontrent, qui leur serviraient de révélateur face à leur situation actuelle (effet miroir). Dans le cas contraire, il semblerait que ces derniers soient dans une situation pouvant s’apparenter à du déni (refus de se regarder dans le miroir), dont les travaux sur le stress et le coping (Lazarus et Folkman, 1984) soulignent l’impact négatif et l’effet dévastateur, à terme, sur la santé de l’individu. Ainsi, s’il apparaît que le discours dominant actuellement soit au développement d’une carrière en dehors du cadre de l’entreprise afin de sécuriser les parcours professionnels des individus, nos résultats semblent démontrer que cette injonction est porteuse d’impacts complexes au niveau de l’individu et des groupes professionnels. Ceux-ci sont amenés à être moins stables car plus régulièrement questionnés par l’environnement social sur la pérennité de leur situation professionnelle, notamment lorsque l’environnement est favorable en termes d’opportunités professionnelles. Ce questionnement passe par une confrontation plus forte au sentiment d’insécurité professionnelle, moment complexe pour l’individu. Pour les conséquences de l’insécurité professionnelle, nos résultats retrouvent les conclusions de la littérature (Schoss, 2017 ; Sverke et al., 2002). 4.2. Les apports managériaux et sociétaux de la recherche Premièrement, notre recherche démontre l’importance de la détection de la personnalité proactive dans la sélection des individus occupant des postes pouvant être facilement soumis à des questionnements ou des changements. En effet, nos résultats montrent que cette caractéristique personnelle prémunie ces individus d’un sentiment d’insécurité professionnelle. A un niveau sociétal et éducatif, ce résultat est questionnant tant il pourrait laisser penser qu’il faudrait faire de la 65 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 5. CONCLUSION 5.1. Limites de la recherche L’étude d’un contexte unique limite la validité externe et de fait la généralisation de nos résultats. Il apparaît essentiel de se questionner 66 GRH114.indd 66 sur l’existence de ces mêmes relations au sein d’autres professions. Une autre limite demeure son caractère transversal et non longitudinal. Celui-ci questionne la place de la temporalité de la pression institutionnelle ressentie par la profession sur nos résultats. Nos résultats évolueraient en fonction de l’antériorité du changement institutionnel considéré. L’effet des relations investiguées aurait pu varier avec le temps et l’appropriation du changement en question. 5.2. Pistes de recherche Plusieurs voies de recherches complémentaires apparaissent. Tout d’abord, une étude longitudinale sur le comportement des individus soumis à un changement institutionnel permettrait de comprendre les différentes phases de ce changement et son degré d’appropriation par les individus concernés. Deuxièmement, si notre étude a permis d’identifier une ressource à même de diminuer l’insécurité professionnelle, d’autres études investiguant cette même ressource au sein d’autres contextes professionnels, tout en investiguant des ressources d’autres natures seraient souhaitables. Il serait pertinent d’investiguer le devenir de ces individus qui décident de changer de profession lorsqu’ils sont soumis à des pressions institutionnelles : quels choix de profession font-ils ? Une telle expérience vient-elle modifier le rapport individuel à la carrière ? Il semble que l’attitude de carrière sans frontière renvoie en réalité à des mobilités de différente nature. Sont considérés avoir une attitude de carrière sans frontière, des individus qui envisagent leur carrière au-dehors des frontières d’une seule et même activité professionnelle, ceux qui envisagent leur carrière au sein de différentes organisations ou encore ceux qui mêlent de concert ces deux perspectives. Il semblerait intéressant de pouvoir investiguer la nature de ces éléments sur l’intention de quitter l’emploi et la profession. Sous-jacentes à certains de nos résultats, l’intégration des conséquences émotionnelles (stress) de l’insécurité professionnelles permettraient, sans doute d’enrichir le pouvoir prédictif de ce modèle. Enfin, en démontrant de façon exploratoire sur un public donné, le lien entre l’insécurité professionnelle et le rapport à la profession des individus, nos résultats appellent des études complémentaires sur ces deux éléments en intégrant notamment certaines caractéristiques de la profession tels que le poids de la vocation ou encore la proximité entre la profession exercée et d’autres professions existantes. REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) personnalité proactive un critère de recrutement. Si nous ne souhaitons pas nous engager dans cette voie, nous pouvons toutefois considérer que l’école, l’université comme l’entreprise gagneraient à laisser se développer ce trait de personnalité à travers des méthodes pédagogiques adaptées ou des formes de travail plus souples tant il a un impact sur la perception d’un sentiment d’insécurité professionnelle. Deuxièmement, notre recherche démontre le caractère ambivalent de l’attitude de carrière sans frontière dans certains contextes professionnels. Ainsi, l’attitude de carrière sans frontière servirait de révélateur de l’insécurité professionnelle lorsque les alternatives d’emploi sont jugées élevées. En revanche, l’absence de significativité de la relation avec l’insécurité professionnelle perçue indique un processus de déni, voire de refoulement, dont les psychologues (Jung, 1996) ont souligné l’effet potentiellement dévastateur sur l’individu. Il convient alors, pour les entreprises concernées, de repérer ces individus avant qu’ils n’aient un impact négatif sur eux et sur les autres salariés. De même, et dans le prolongement, cette recherche questionne la pertinence pour une organisation d’appeler ses salariés à adopter de tels comportements. Si ces mêmes organisations ont pour ambition de maintenir et développer leurs salariés à leur poste, il semble que ceci sera plus complexe avec des salariés ayant développé des relations professionnelles et des projets avec d’autres fonctions, voire avec d’autres organisations. En fonction de ses ambitions stratégiques, il semble donc pertinent pour une organisation de se questionner sur son soutien actif, ou non, aux développements de tels comportements au sein de ses salariés. Le concept d’agilité, pourtant très à la mode, trouverait ici ses limites dans le cadre de la fidélisation du salarié. Enfin, il semblerait pertinent pour les associations professionnelles de se questionner quant à leur rôle dans le maintien et la préservation des compétences et des profils dans ladite profession. Les changements institutionnels semblent être des occasions majeures d’intervention pour de telles associations. 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Abessolo, M., Hirschi, A., Rossier, J. (2017) “Work values underlying protean and boundaryless career orientations”, Career development international, N° 22, 3, pp. 241-259. Anderson J.C., Gerbing D.W. (1988) « Structural Equation Modeling in Practice: A Review and Recommended Two-Step Approach », Psychological Bulletin, N° 103, 3, pp. 411-423. Arnup, J., Bowles, T. (2016) “Should I stay or should I go? Resilience as a protective factor for teachers’ intention to leave the teaching profession” Australian Journal of Education, N°60, 3, pp. 229-244. A r t hu r M. B., Rou ss e au D. M. (19 9 6 ) « Introduction: The boundaryless career as a new employment principle ». In Arthur MB, Rousseau DM (Eds.). The boundaryless career. A new employment principle for a new organizational era. New York: Oxford University Press. Ashford, S., Lee, C., Bobko, P. (1989) « Content, causes, and consequences of job insecurity: A theory-based measure and substantive test », Academy of Management Journal, Vol. 32, pp. 803-829. Babalola, O., Bruning, N. S. (2015) “Examining the relationship between individual perceptions of control and contemporary career orientations”, Personnel Review, N° 44, 3, pp. 346-363. Bagozzi R.P., Yi Y. Phillips L.W. (1991) « Assessi ng Const r uct Va l id it y i n Organizational Research », Administrative Science Quarterly, N° 36, pp. 421-458. Bateman, T. S., Crant, J. M. (1993) “The proactive component of organizational behavior: A measure and correlates”, Journal of organizational behavior, N°14, 2, pp. 103-118. Bentler, P.M. (1990) « Comparative Fit Indexes in Structural Models », Psychological Bulletin, N° 107, 2, pp. 238-46. Briscoe J.P., Hall D.T., Frautschy de Muth R.L. (2006) “Protean and boundaryless careers: An empirical exploration”, Journal of Vocational Behavior, N°69, pp. 30-47. Briscoe J.P., Henagan S.C., Burton J.P., Murphy W.M. (2012) « Coping with an insecure employment environment: The differing roles of protean and boundaryless career NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 67 orientations », Journal of Vocational Behavior, Vol. 80, pp. 308–316. Cadin L. et Guérin F. (2010) La gestion des ressources humaines, Collection Dunod. Cheng, G. H. L., Chan, D. K. S. (2008) “Who suffers more from job insecurity? A meta-analytic review”, Applied Psychology, 57(2), pp. 272-303. Claes R., Beheydt C., Lemmens B. (2005) « Unidimensionality of Abbreviated Proactive Personality Scales across Cultures », Applied Psychology: An International Review, N. 54, Vol. 4, pp. 476-489. Cohen, S., Edwards, J. R. (1989) “Personality characteristics as moderators of the relationship between stress and disorder” in R. W. J. Neufeld (Ed.), Wiley series on health psychology/behavioral medicine. Advances in the investigation of psychological stress (pp. 235-283). Oxford, England: John Wiley & Sons. Colakoglu S.N. (2011) « The impact of career boundarylessness on subjective career success: The role of career competencies, career autonomy, and career insecurity », Journal of Vocational Behavior, Vol. 79, pp. 47–59. Culié, J. D., Khapova, S. N., Arthur, M. B. (2014) “Careers, clusters and employment mobility: the influences of psychological mobility and organizational support”, Journal of Vocational Behavior, N°84, 2, pp. 164-176. Dany F. (2003) « ’Free actors’ and organizations: critical remarks about the new career literature, based on French insights », The International Journal of Human Resource Management, nº14, v.5, pp. 821-838. De Witte H. (1999) « Job insecurity and psychological well-being: Review of the literature and exploration of some unresolved issues », European Journal of Work and Organizational Psychology, Vol. 8, pp. 155-177. De Witte H. (2000) ‘Arbeitsethos en job onzekerheid: Meting en gevolgen voor welzijn, tevredenheid en inzet op het werk’ (Work ethic and job insecurity: Assessment and consequences for wellbeing, satisfaction and performance at work). In R. Bouwen, K. De Witte., H. De Witte, and T. Taillieu (Eds.), Van groep tot gemeenschapp (From group to community) (pp. 325-350). Leuven, Belgium: Garant. 67 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) BIBLIOGRAPHIE 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) De Witte H. (2005) “Job insecurity: Review of the international literature on definitions, prevalence, antecedents and consequences”, SA Journal of Industrial Psychology, Vol. 31, N°4, pp. 1-6. De Witte H., Vander Elst T., De Cuyper N. (2015) “Job insecurity, health and well-being”, In Sustainable working lives (pp. 109-128). Springer, Dordrecht. Debus, M. E., Unger D. (2017) “The interactive effects of dual-earner couples’ job insecurity: Linking conservation of resources theory with crossover research”, Journal of Occupational and Organizational Psychology, N° 90, Vol. 2, pp. 225-247. Debus M. E., Konig C. J., Kleinmann M. (2014) « The building blocks of job insecurity: The impact of environmental and person-related variables on job insecurity perceptions », Journal of Occupational and Organizational Psychology, Vol. 87, pp. 329-351. Debus M. E., König C. J., Kleinmann M. (2014) “The building blocks of job insecurity: The impact of environmental and person-related variables on job insecurity perceptions”, Journal of occupational and organizational psychology, Vol. 87, N° 2, pp. 329-351. Direnzo M.S., Greenhaus J.H. (2011) « Job search and voluntary turnover in a boundaryless world: A control theory perspective », Academy of Management Review, Vol. 36, No. 3, pp. 567–589. Dubar C. (2003) « Sociologie des groupes professionnels en France : un bilan prospectif » in Les professions et leurs sociologies, Coord. par PM Menger, Editions de la Maison des Sciences de l’homme, Paris. Everaere C. (2014) Les Emplois atypiques. Quelles réponses au besoin de flexicurité ?, Rueil-Malmaison, Les Éditions Liaisons, 166 p. Fornell C., Larcker D.F. (1981) “Evaluating S t r u c t u r a l E q u a t i o n m o d e l s w it h Unobservable and Measurement Error”, Journal of Marketing Research, N° 18, 1, pp. 39-50. Galambaud B. (1980) Les faces cachées de la Formation, Editions Privat, Toulouse. Geertz C. (1973) The interpretation of cultures, New York: Basic Book. Glaymann D. (2010) L’intérim. La Découverte. 68 GRH114.indd 68 Greenhalgh L., Rosenblatt Z. (1984) « Job insecurity: Toward conceptual clarity », Academy of Management Review, Vol.9, pp. 438-448. Griffeth, R. W., Hom, P. W., Gaertner, S. (2000) “A meta-analysis of antecedents and correlates of employee turnover: Update, moderator tests, and research implications for the next millennium”, Journal of management, Vol. 26, 3, pp. 463-488. Grima (2000) Ambiguïté et conflit de rôle au travail : proposition d’un modèle explicatif synthétique, Thèse de Doctorat en Sciences de Gestion, Université d’Evry-Val-d’Essonne, décembre. Hobfoll S. E. (1988) The ecology of stress, Taylor & Francis. Hobfoll S. E. (1989) « Conservation of resources: A new attempt at conceptualizing stress », American Psychologist, Vol. 44, pp. 513-524. Hobfoll S. E., Halbesleben, J., Neveu, J. P., Westman, M. (2018), “Conservation of resources in the organizational context: The reality of resources and their consequences”, Annual Review of Organizational Psychology and Organizational Behavior, Vol. 5, pp. 103-128. Hom, P. W., Mitchell, T. R., Lee, T. W., Griffeth, R. W. (2012) « Reviewing employee turnover: Focusing on proximal withdrawal states and an expanded criterion, Psychological Bulletin, Vol. 138, pp. 831–858. Hoyau E., Le Clainche C. et Lengagne P. (2018) « Les effets de l’insécurité de l’emploi perçue sur la santé physique et mentale et le recours aux soins et services de santé en France », Communication aux Journées Louis André Gérard Varet. Aix en Provence, 2018. Hu L., Bentler P.M. (1999) “Cutoff Criteria fot Fit Indixes in Covariance Structure Analysis: Conventional Criteria Versus New Alternatives”, Structural Equation Modeling, N° 6, pp. 1-55. Huang G., Niu X., Lee C., Ashford S. J. (2012) « Differentiating cognitive and affective job security: Antecedents and outcomes », Journal of Organizational Behavior, Vol. 33, pp. 752-769. Jimenez P., Milfelner B., Šarotar Žižek S., Dunkl A. (2017), « Moderating Effects between Job Insecurity and Intention to Quit in Samples of Slovene and Austrian Workers », Naše REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 gospodarstvo/Our Economy, Vol. 63, N°1, pp. 27–37. Joung H. W., Choi E. K., Taylor J. J. (2018) “Investigating differences in job-related attitudes between full-time and part-time employees in the foodservice industry”, International Journal of Contemporary Hospitality Management, Vol. 30, 2, pp. 817-835. Jung C.G (1996), Psychologie de l’inconscient, Le livre de poche, Paris. Keim A. C., Landis R. S., Pierce C. A., Earnest D. R. (2014) “Why do employees worry about their jobs? A meta-analytic review of predictors of job insecurity”, Journal of Occupational Health Psychology, Vol.19, (3), pp. 269-290. Konig C. J., Debus M. E., Hausler S., Lendenmann N., Kleinmann, M. (2010) « Examining occupational self-efficacy, work locus of control and communication as moderators of the job insecurity-job performance relationship », Economic and Industrial Democracy, Vol.31, pp. 231–247. Krausz M., Koslowsky M., Shalom N., Elyakim N. (1995) “Predictors of intentions to leave the ward, the hospital, and the nursing profession: A longitudinal study”, Journal of Organizational Behavior, Vol. 16, 3, pp. 277-288. © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Kuron L. K., Schweitzer L., Lyons S., Ng E. S. (2016) “Career profiles in the “new career”: evidence of their prevalence and correlates”, Career Development International, Vol. 21, N°4, pp. 355-377. Laine M., van der Heijden B. I., Wickström G., Hasselhorn H. M., Tackenberg P. (2009) “Job insecurity and intent to leave the nursing profession in Europe”, The International Journal of Human Resource Management, Vol. 20, N° 2, pp. 420-438. Låstad L., Näswall K., Berntson E., Seddigh A., Sverke M. (2018) “The roles of shared perceptions of individual job insecurity and job insecurity climate for work-and health-related outcomes: a multilevel approach”, Economic and Industrial Democracy, Vol. 39, N° 3, pp. 422-438. Layole G. (1994) « Va-t-on vers des révisions déchirantes ? La formation en entreprise. » Education Permanente, Vol 118, N°1. Lazarus R.S., Folkman S. (1984), Stress, Appraisal and Coping, New-York, Springer. NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 69 Le Clainche C., Hoyau E., Lengagne P. (2018) « Les effets de l’insécurité de l’emploi perçue sur la santé physique et mentale et le recours aux soins et services de santé en France », 17ème journée Louis André Gérard-Varet, Aix en Provence. Lichtenstein R., Alexander J.A., Mccarthy J.F., Wells R. (2004) “Status differences in cross-functional teams: effects on individual member participation, Job satisfaction, and intent to Quit”, Journal of Health and Social Behavior, N°3, pp. 322-335. Lin X. S., Chen Z. X., Ashford S. J., Lee C., Qian J. (2018) “A self-consistency motivation analysis of employee reactions to job insecurity: The roles of organization-based self-esteem and proactive personality”, Journal of Business Research, Vol. 92, pp. 168-178. Paillé P. et Valeau P. (2013) « La rétention des employés professionnels dans l’organisation : le rôle médiateur de la citoyenneté organisationnelle », Revue de Gestion des Ressources Humaines, Vol. 89, N° 3, pp. 40-55. Pan J., Liu S., Ma B., Qu Z. (2018) « How does proactive personality promote creativity? A multilevel examination of the interplay between formal and informal leadership”, Journal of Occupational and Organizational Psychology, Vol. 91, N°4, pp. 852-874. Parsons T. (1951) The Social System, Glencoe: Free Press. Peltokorpi V., Allen D. G., Froese F. (2015) “Organizational embeddedness, turnover intentions, and voluntary turnover: The moderating effects of employee demographic characteristics and value orientations”, Journal of Organizational Behavior, Vol. 36, N°2, pp. 292-312. Peters L., Jackofsky E., Salter J. (1981) “Predicting turnover: a comparison of part-time and fulltime employees”, Journal of Occupational Behavior, N°2, pp. 89-98. Rhodes S. R., Doering M. M. (1993) “Intention to change careers: Determinants and process”, The career development quarterly, Vol. 42, N°1, pp. 76-92. Rodrigues R., Butler C. L., Guest D. (2019), “Antecedents of protean and boundaryless career orientations: the role of core self-evaluations, perceived employability and social capital”, Journal of Vocational Behavior, Vol. 110, pp. 1-11. Roussel P., Durrieu F., Campoy. Y., El Akremy A. (2002) Méthodes d’Equations Structurelles : 69 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Recherche et Applications en Gestion, Paris, Economica, p.273. Selenko E., Mäkikangas A., Stride C. B. (2017) “Does job insecurity threaten who you are? Introducing a social identity perspective to explain well-being and performance consequences of job insecurity”, Journal of Organizational Behavior, Vol. 38, N°6, pp. 856-875. Selenko, E., Makikangas, A., Mauno, S., et Kinnunen, U. (2013) « How does job insecurity relate to self-reported job performance? Analysing curvilinear associations in a longitudinal sample », Journal of Occupational and Organizational Psychology, Vol. 86, pp. 522-542. Sender A., Arnold A., Staffelbach B. (2017) “Job security as a threatened resource: reactions to job insecurity in culturally distinct regions”, The International Journal of Human Resource Management, Vol. 28, N° 17, pp. 2403-2429. Seston E., Hassel K., Ferguson J., Hann M. (2009) « Exploring the relationship between pharmacists’ job satisfaction, intention to quit the profession, and actual quitting », Research in Social and Administrative Pharmacy, Vol. 5, pp. 121–132. Sherry E., Arthur M.B. (2006) « The Evolution of the Boundaryless Career Concept: Examining Physical and Psychological Mobility », Journal of Vocational Behavior, Vol.69, N°1, pp. 19-29. Shoss M.K. (2017) « Job Insecurity: An Integrative Review and Agenda for Future Research », Journal of Management, Vol. 43 No. 6, pp. 1911–1939. Silla I., De Cuyper N., Gracia F. J., Peiró J. M., De Witte H. (2009) “Job insecurity and well-being: Moderation by employability”, Journal of Happiness Studies, Vol. 10, N°6, 739. Sora B., Caballer A., Peiro J.M. (2010) « The consequences of job insecurity for employees: The moderator role of job dependence », International Labour Review, Vol. 149, pp. 59-72. Spector P. E., Zapf D., Chen P. Y., Frese M. (2000) “Why negative affectivity should not be controlled in job stress research: Don’t throw out the baby with the bath water”, Journal of Organizational Behavior, Vol. 21, N°1, pp. 79-95. Steel R. P., Lounsbury J. W. (2009) « Turnover process models: Review and synthesis of a conceptual literature », Human Resource Management Review, Vol. 19, pp. 271–282. 70 GRH114.indd 70 Stiglbauer B., Batinic B. (2015), « Proactive coping with job insecurity: Is it always beneficial to well-being? », Work & Stress, Vol. 29, N°3, pp. 264–285. Sullivan S.E., Arthur M.B. (2006), “The evolution of the boundaryless career concept: Examining physical and psychological mobility”, Journal of Vocational Behavior, Vol. 69, N° 1, pp. 19-29. Sun S., van Emmerik H. I. (2015) “Are proactive personalities always beneficial? Political skill as a moderator”, Journal of Applied Psychology, Vol. 100, N° 3, 966. Sverke M., Hellgren J., Naswall K. (2002), « No security: A meta-analysis and review of job insecurity and its consequences », Journal of Occupational Health Psychology, Vol.7, pp. 242-264. Thévenet M., Dejoux C., Marbot E., Bender A. F. (2007) Fonction RH politique, métier et outils des ressources humaines. Editions Person Education France. Thomas J. P., Whitman D. S., Viswesvaran C. (2010) “Employee proactivity in organizations: A comparative meta-analysis of emergent proactive constructs”, Journal of occupational and organizational psychology, Vol. 83, N°2, pp. 275-300. Tornau K., Frese M. (2013) « Construct clean-up in proactivity research: A meta-analysis on the nomological net of work-related proactivity concepts and incremental validity », Applied Psychology: An International Review, Vol.62, pp. 44–96. Vansteenkiste S., Verbruggen M., Sels L. (2013) “Being unemployed in the boundaryless career era: Does psychological mobility pay off?”, Journal of Vocational Behavior, Vol. 82, N°2, pp. 135-143. Wermeling L. (2009) « Social Work Retention Research: Three Major Concerns », Journal of Sociology, Social Work and Social Welfare, Vol.3, N°1, pp. 1-7. Yamaguchi Y., Inoue T., Harada H., Oike M. (2016) “Job control, work-family balance and nurses’ intention to leave their profession and organization: A comparative cross-sectional survey”, International journal of nursing studies, Vol. 64, pp. 52-62. Zhao X., Lim V. K. G., Teo T. S. H. (2012) « The long arm of job insecurity: Its impact on career-specific parenting behaviors and youth’s career and self-efficacy », Journal of Vocational Behavior, Vol. 80, pp. 619-628. REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle 16/01/2020 10:08 Antécédents et conséquences de l’insécurité professionnelle dans un contexte de réforme institutionnelle ANNEXE Annexe 1 : Analyse Factorielle Confirmatoire Proactivité Attitudes de carrière sans frontières Intitulé de l’item l SMC Proact 1 0,964 0,406 0,81 0,316 Attssfront 4 0,562 0,656 Inspro 2 0,802 Proact 2 0,637 Attssfront 3 0,785 Attssfront 2 Inspro 1 Insécurité professionnelle Inspro 3 0,643 0,721 0,819 Intquittemp 1 0,851 0,611 0,374 0,911 0,83 Intquittprof 1 0,883 0,797 Intquittprof 3 0,893 0,78 Intquittprof 2 (LB) = Lower Bound (HB) = Higher Bound 0,668 0,79 0,529 0,767 0,613 0,863 0,685 0,864 0,705 0,877 0,671 0,923 Intquittemp 2 Rhô joreskog 0,419 0,849 Intquittemp 3 Intention de quitter la profession 0,616 0,647 Inspro 4 Intention de quitter l’emploi 0,93 Rhô vc 0,734 0,539 Indices d’ajustement Valeur x²/ddf 2,59 AGFI 0,93 GFI 0,96 SRMR 0,05 RMSEA 0,053 (LB 0,044-HB 0,062) CFI 0,97 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) TLI 0,96 Annexe 2 : Validités convergente et discriminante des variables du modèle Variables Proactivité Proactivité 0,668 Attitudes de carrière sans frontières Insécurité professionnelle Intention de quitter l’emploi Intention de quitter la profession 0,13 0,03 0,00 0,00 Attitudes de carrière sans frontières * 0,529 0,01 0,00 0,01 Insécurité professionnelle * * 0,17 0,685 0,14 Intention de quitter la profession * * 0,613 Intention de quitter l’emploi * * * * * 0,705 0,45 Les valeurs correspondent aux corrélations au carré de chaque construit avec les autres. La validité convergente se trouve en gras, en diagonale. NUMÉRO 114 - OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2019 GRH114.indd 71 71 © ESKA | Téléchargé le 23/06/2024 sur www.cairn.info via Groupe IGS (IP: 91.162.1.215) Intitulé du facteur 16/01/2020 10:08