SOINS INFIRMIERS L’EXAMEN CLINIQUE ET L’ÉVALUATION DE LA SANTÉ 2e édition CAROLYN JARVIS ÉDITION FRANÇAISE DIRECTION SCIENTIFIQUE Claire Chapados DIRECTION PÉDAGOGIQUE Éric Lavertu SOINS INFIRMIERS L’EXAMEN CLINIQUE ET L’ÉVALUATION DE LA SANTÉ 2e édition CAROLYN JARVIS, PHD, APN, CNP Professeure agrégée adjointe de soins inrmiers School of Nursing, Illinois Wesleyan University, Bloomington, Illinois Inrmière praticienne de famille Bloomington, Illinois ÉDITION FRANÇAISE DIRECTION SCIENTIFIQUE Claire Chapados, inf., Ph. D. Professeure titulaire Faculté des sciences inrmières, Université de Montréal DIRECTION PÉDAGOGIQUE Éric Lavertu, inf., M. Éd. Professeur Département de soins inrmiers, Cégep de Sainte-Foy Sources iconographiques de la couverture L’examen clinique et l’évaluation de la santé 2e édition Traduction et adaptation de : Physical Examination & Health Assessment, 7th Edition, Carolyn Jarvis © 2015 Saunders, une marque d’Elsevier Inc. (ISBN 978-1-4377-0151-7) Copyright © 2016 by Elsevier Inc. All rights reserved. Copyright © 2012, 2008, 2004, 2000, 1996, 1993 by Saunders, an affiliate of Elsevier Inc. All rights reserved. Copyright © 2016 par Elsevier Inc. Tous droits réservés. Copyright © 2012, 2008, 2004, 2000, 1996, 1993 par Saunders, une division d’Elsevier Inc. Tous droits réservés. This edition of Physical Examination and Health Assessment 7th by Carolyn Jarvis, Ph.D., APN, CNP is published by arrangement with Elsevier Inc. © 2015 TC Média Livres Inc. © 2009 Chenelière Éducation inc. Conception éditoriale: Dominique Hovington et André Vandal Édition : Nancy Lachance et Corine Archambault Coordination : Johanne Lessard et Mélanie Nadeau Traduction partielle pour la 2 e édition : Geneviève Ross Révision linguistique: Anne-Marie Trudel Correction d’épreuves: Zérofôte Adaptation de la conception graphique originale: Christian Campana Conception de la couverture : Josée Brunelle Impression : TC Imprimeries Transcontinental Illustrations originales : Pat Thomas Photographies d’évaluation : Kevin Strandberg Rédaction des activités interactives : Isabelle Harnois, inf., Karine Lampron, inf., Karine Chantal, inf. Coordination du matériel complémentaire Web : Marie-Michèle Martel Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Jarvis, Carolyn Physical examination & Health Assessment. Extraits. Français. L’examen clinique et l’évaluation de la santé 2e édition Traduction partielle de la 7e édition américaine de : Physical Examination & Health Assessment. Comprend des références bibliographiques et un index. ISBN 978-2-7650-4844-2 1. Diagnostics cliniques – Guides, manuels, etc. 2. Diagnostics infirmiers – Guides, manuels, etc. i. Titre : Physical Examination & Health Assessment. Extraits. Français. RC76.J3714 2015 616.07’54 C2014-942734-4 TOUS DROITS RÉSERVÉS. Toute reproduction du présent ouvrage, en totalité ou en partie, par tous les moyens présentement connus ou à être découverts, est interdite sans l’autorisation préalable de TC Média Livres Inc. Toute utilisation non expressément autorisée constitue une contrefaçon pouvant donner lieu à une poursuite en justice contre l’individu ou l’établissement qui effectue la reproduction non autorisée. Dépôt légal : 2 trimestre 2015 Bibliothèque et Archives nationales du Québec Bibliothèque et Archives Canada e Imprimé au Canada 3 4 5 6 ITIB 20 Dans cet ouvrage, le féminin est utilisé comme représentant des deux sexes, sans discrimination à l’égard des hommes et des femmes, et dans le seul but d’alléger le texte. Des marques de commerce sont mentionnées ou illustrées dans cet ouvrage. L’Éditeur tient à préciser qu’il n’a reçu aucun revenu ni avantage conséquemment à la présence de ces marques. Celles-ci sont reproduites à la demande de l’auteur ou de l’adaptateur en vue d’appuyer le propos pédagogique ou scientifique de l’ouvrage. Tous les sites Internet présentés sont étroitement liés au contenu abordé. Après la parution de l’ouvrage, il pourrait cependant arriver que l’adresse ou le contenu de certains de ces sites soient modifiés par leur propriétaire, ou encore par d’autres personnes. Pour cette raison, nous vous recommandons de vous assurer de la pertinence de ces sites avant de les suggérer aux élèves. La pharmacologie évolue continuellement. La recherche et le développement produisent des traitements et des pharmacothérapies qui perfectionnent constamment la médecine et ses applications. Nous présentons au lecteur le contenu du présent ouvrage à titre informatif uniquement. Il ne saurait constituer un avis médical. Il incombe au médecin traitant et non à cet ouvrage de déterminer la posologie et le traitement appropriés de chaque patient en particulier. Nous recommandons également de lire attentivement la notice du fabricant de chaque médicament pour vérifier la posologie recommandée, la méthode et la durée d’administration, ainsi que les contre-indications. Les cas présentés dans les mises en situation de cet ouvrage sont fictifs. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant déjà existé n’est que pure coïncidence. 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ISBN 978-2-7650-4844-2 2 Tetra Images/Getty Images. 19 18 17 16 Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC. AVANT-PROPOS Toute inrmière, peu importe la formation reçue – à l’hôpital, au cégep ou à l’université –, détient déjà les notions de base nécessaires à l’examen clinique puisqu’elle a appris à faire intervenir ses sens : la vue (observer les sécrétions du client, la coloration de sa peau), le toucher (vérier la température de la peau), l’ouïe (écouter les bruits pulmonaires comme le wheezing en situation d’asthme) et l’odorat (détec­ ter l’odeur de l’alcool, d’un parfum). Toutefois, lorsque l’inrmière effectue l’examen physique, elle doit procéder à une inspection plus approfondie ; elle apprendra ainsi à observer la posture du client, sa stature, ses mouvements, la morphologie des lésions cutanées, par exemple, ainsi que la localisation des anomalies, les bruits et son état nutritionnel. En cours de formation, l’étudiante apprendra à effectuer d’autres examens tels que la palpation, la percussion et l’auscultation, qui demandent l’utilisation de matériel et d’instruments particuliers qu’elle doit manier correctement. L’efcacité de l’examen physique dépend de l’expérience de l’inrmière. Je ne crois pas qu’une formation écourtée permette à un professionnel de la santé d’effectuer un examen physique adéquat. Comme je le répète aux étudiantes, c’est par la pratique que l’on développe ses compétences. Il est évident que l’in­ rmière d’expérience ou l’inrmière praticienne spécialisée (IPS) établit ses constats d’évaluation plus rapidement que l’inrmière qui commence sa pratique. Cet ouvrage constitue une référence essentielle visant à former les étudiantes inrmières de niveau col­ légial et universitaire sur l’évaluation de la santé, mais aussi à habiliter les professionnels de la santé (p. ex., les médecins, les inrmières, les physiothérapeutes, le personnel paramédical) à développer et à rafner leurs compétences cliniques. Cette deuxième édition française est un ouvrage scientique actuel, complet. Une démarche systématique de la tête aux pieds, pratique et logique, y est décrite. Au l des éditions anglaises antérieures, Carolyn Jarvis a obtenu une réponse très positive des utilisateurs de son ouvrage comme outil d’apprentissage, et elle leur en est très reconnaissante. Elle considère ce geste comme un signe d’encouragement et demeure ouverte aux suggestions des lecteurs. Voilà pourquoi elle a permis l’adaptation de son ouvrage en langue française. Cette version concorde avec la réalité clinique et met l’accent sur l’acquisition des connaissances, le développement et le maintien des com­ pétences et des habiletés des étudiantes et des professionnels du domaine de la santé. L’importance de former les étudiantes à l’examen clinique Au Québec, le cours portant sur l’examen clinique (ou désigné autrement) et qui comprend l’histoire de santé et l’examen physique est donné depuis plusieurs années dans divers programmes d’enseignement tant au niveau collégial qu’universitaire. Même si l’inrmière effectue déjà l’examen physique, la moder­ nisation de la Loi sur les inrmières et les inrmiers (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2003) reconnaît clairement l’expertise et le rôle central de l’inrmière en matière de jugement clinique et de prise de décision pour répondre aux besoins grandissants des clientèles. L’évaluation de l’état physique et mental des personnes symptomatiques et de leur environnement social et physique devient l’assise de l’exercice. Les inrmières peuvent établir un ordre de priorité des divers problèmes pour intervenir en conséquence. Par l’utilisation des différentes méthodes d’évaluation de la santé, les inrmières contribuent de façon efcace aux soins de santé, ce qui leur permet d’exercer leur leadership. Il est connu que l’élargissement du rôle de l’inrmière génère plus de satisfaction au travail et que la collaboration entre l’inrmière et le médecin améliore le travail d’équipe et la communication interpro­ fessionnelle (Brogan, 1969). Je donne cette formation universitaire depuis maintenant 20 ans et j’ai recueilli plusieurs témoignages d’étudiantes disant qu’elles s’inscrivent à ce cours soit parce qu’il est obligatoire dans leur programme, soit parce qu’elles désirent en apprendre davantage sur le sujet. Tous les professionnels de la santé qui reçoivent une formation sur l’examen clinique doivent poursuivre l’intégration des connaissances et des compétences apprises. Pour être à l’aise avec les différentes méthodes d’évaluation de la santé, il est nécessaire de les mettre en pratique régulièrement an de développer et de maintenir ses compétences cliniques. C’est par l’expérience que s’acquièrent la compétence et le développement d’habiletés. Dans une étude de Chapados (2013), des IPS révèlent que « la pratique au quotidien améliore leurs III compétences » (p. 28). Il en est de même pour l’étudiante qui effectue, pour la première fois, un prélèvement sanguin. Il lui faudra en faire à plusieurs reprises avant de devenir expérimentée. Par exemple, si l’inrmière est en présence d’un client qui souffre d’une douleur particulière, elle doit être capable d’évaluer les types de douleur, de reconnaître les signes cliniques typiques des principales causes de cette douleur et d’établir les priorités pour ainsi assurer la sécurité du client. Elle doit évaluer et stabiliser le client ; elle procède aussi à la collecte de données sur l’histoire de santé en tentant de déterminer ce qui provoque (ou soulage) la douleur, d’établir la qualité de celle-ci et elle interroge le client sur la région, les signes et symptômes associés, la durée de la douleur et sa signication pour lui à l’aide de l’outil mnémotechnique PQRSTU décrit dans chapitre 4 et utilisé dans la plupart des chapitres de l’ouvrage. Des symptômes et des signes extrêmement discrets peuvent annoncer les événements les plus catastrophiques. Il est donc très important d’effectuer une histoire de santé et un examen physique méticuleux et détaillés. Le faciès, la position du client et son rythme respiratoire sont des facteurs importants à considérer. C’est pourquoi l’examen physique doit être réalisé méthodiquement, consciencieusement et être adapté à l’âge du client en prenant en considération son degré de confort et sa pudeur. L’inrmière doit aussi connaître ses propres limites et consulter un autre professionnel si nécessaire. En donnant ce cours, j’ai souvent observé que les étudiantes sont plus préoccupées par l’examen physique que par l’histoire de santé du client. Pourtant, il est prouvé que celle-ci est essentielle pour procéder à une évaluation efcace de la condition de la personne. Selon Epstein, Perkin, de Bono et leur collaborateur (1994), des études ont mentionné que, dans plus de 80 % des situations, les diagnostics posés dans une clinique se sont fondés sur l’histoire de santé. Recueillir une histoire de santé, c’est obtenir des données subjectives et c’est prendre en compte tous les événements signiants dans la vie du client, y compris son histoire de maladie actuelle, ses antécédents personnels et de maladie, son histoire familiale et psychosociale. Pour Braunwald et ses collaborateurs (2002), « l’entrevue est bien plus qu’un recueil de données » (p. 2). Elle permet aussi de documenter les différentes activités du client pour en comprendre la situation. La façon de conduire une histoire de santé détermine la qualité des éléments d’information utiles pour faire connaître ses conclusions (Epstein et collab., 1994). Dans le contexte d’une pratique inrmière avancée, l’IPS peut prescrire des médicaments et d’autres substances, des examens paracliniques, des traitements médicaux et des techniques effractives. Toutefois, elle doit se conformer aux règles d’utilisation des médicaments approuvés par le conseil d’administration de l’établissement, ou aux règles de soins médicaux en vigueur dans l’établissement, ou aux règles d’utilisation des ressources approuvées par le conseil d’administration (OIIQ – Collège des médecins du Québec [CMQ], 2006). En conclusion, toute inrmière qui détient les connaissances et les compétences requises peut effectuer l’évaluation de la santé d’une personne. Une évaluation adéquate de la santé repose aussi sur une bonne connaissance des notions d’anatomie, de physiologie, de pathologie et de pharmacologie. L’inrmière doit aussi démontrer des aptitudes pour établir une relation avec le client et ainsi mener une entrevue de manière efcace pour recueillir le plus de renseignements possible. Puisqu’elles ont obtenu une reconnaissance accrue de leur rôle, il est nécessaire que les inrmières demeurent à la ne pointe du savoir. Elles doivent aussi recevoir l’appui de leurs collègues et des instances administratives du milieu clinique pour soutenir leur apprentissage. L’inrmière ne doit pas se sentir mal à l’aise lorsqu’elle évalue l’état de santé d’une personne puisque cela fait partie de ses fonctions. Avec la reconnaissance de cette activité, il reste à souhaiter que l’inrmière effectue l’évaluation de la santé de façon continue. Il s’agit d’une valeur ajoutée à la pratique professionnelle. Dans une autre étude effectuée par Chapados, Larue, Pharand et leurs collaborateurs (2011), la majorité des inrmières participantes indique que l’examen clinique est une activité qui les valorise, les motive et qui s’avère propice au développement et au maintien d’une relation de conance avec le client. Dans toutes les étapes de traduction et d’adaptation de la septième édition de l’ouvrage de Jarvis, des efforts ont été déployés pour produire un document lisible, informatif, pratique, instructif et essentiel. Les commentaires et les suggestions de chaque adaptateur ont été importants pour la réalisation de cette nouvelle édition française, et ils seront toujours appréciés en vue des éditions ultérieures. Claire Chapados IV Avant-propos | Remerciements RÉFÉRENCES Braunwald, E., et collab. (2002). Principes de médecine interne. Paris : Médecine-Sciences Flammarion. Brogan, M.M. (1969). Training and retraining of nurses in routine physical examinations. Bull N York Acad Med, 45(12), 1353-1356. Chapados, C. (2013). L’évaluation de la santé par les inrmières praticiennes spécialisées : Des IPS témoignent. Perspective inrmière, 10(3), 26-30. Chapados, C., Larue, C., Pharand, D., et collab. (2011). L’inrmière et l’évaluation de la santé. Où en sommes-nous ? Perspective inrmière, 8(5), 18-22. Epstein, O., Perkin, G.D., de Bono, D.P., et collab. (1994). Examen clinique. Louvain-la-Neuve, Belgique : DeBoeck Université. Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) (2003). Guide d’application de la nouvelle Loi sur les inrmières et inrmiers et la Loi modiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives dans le domaine de la santé. Montréal : OIIQ. Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) – Collège des médecins du Québec (CMQ) (2006). Étendue des activités médicales exercées par l’inrmière praticienne spécialisée en cardiologie et en néphrologie. Montréal : OIIQ et CMQ. REMERCIEMENTS L’éditeur tient à remercier chaleureusement l’équipe d’adaptation qui a mis sa rigueur, son temps et son savoir au prot de cette nouvelle édition. Nous tenons particulièrement à souligner l’implication de Claire Chapados à la direction scientique et d’Éric Lavertu à la direction pédagogique. Leur travail rigoureux et leurs critiques avisées ont largement contribué à la production d’un ouvrage basé sur des données scientiques probantes et qui reète bien la réalité clinique d’ici. Nos remerciements vont également à Isabelle Harnois, Karine Lampron et Karine Chantal pour la rédaction des activités interactives qui accompagnent le manuel. Enn, la production d’un ouvrage de cette importance ne serait pas possible sans une équipe d’éditrices, de chargées de projet et de révision-correction déterminée et attentive aux moindres détails qui font un ouvrage de qualité. À toutes et à tous : merci ! Avant-propos | Remerciements V AU SUJET DE L’AUTEURE Carolyn Jars a obtenu un BSN avec distinction de l’Université de l’Iowa, un MSN de l’Université Loyola à Chicago et un PhD de l’Université de l’Illinois à Chicago ; ses travaux de recherche ont porté sur l’effet physiologique de l’alcool sur le système cardiovasculaire. Elle a enseigné l’évaluation physique et les soins inrmiers intensifs à l’Université Rush à Chicago, à l’Université du Missouri à Columbia et à l’Université de l’Illinois à Urbana ainsi que l’évaluation physique, la pharmacologie et la physiopathologie à l’Université Wesleyenne de l’Illinois à Bloomington. La Dre Jarvis a reçu le Superior Teaching Award de l’Université du Missouri, a enseigné l’évaluation physique à des milliers d’étudiantes au baccalauréat et d’étudiantes diplômées ainsi qu’à des professionnelles des soins inrmiers ; elle a donné 150 séminaires de formation continue et est l’auteure de nombreux articles et manuels. Elle a œuvré en pratique avancée, d’abord comme spécialiste clinique du système cardiovasculaire dans divers établissements de soins intensifs, puis comme inrmière praticienne de famille certiée en soins primaires. Elle est professeure associée à l’Université Wesleyenne de l’Illinois, inrmière praticienne à Bloomington, en Illinois, où elle détient une licence d’inrmière praticienne avancée. Au cours des huit dernières années, elle s’est consacrée avec enthousiasme à l’apprentissage de l’espagnol an de prodiguer des soins au Guatemala. Elle a aussi contribué à l’élaboration d’un programme d’enseignement pour les étudiants de l’Université Wesleyenne offert tant au campus de l’Illinois qu’à celui de Barcelone (Espagne). vi ÉQUIPE DE RÉDACTION ÉQUIPE DE L’ÉDITION FRANÇAISE Direction scientique Claire Chapados, inf., Ph. D. Claire Chapados est professeure titulaire à la Faculté des sciences inrmières de l’Université de Montréal. Elle a entrepris sa formation inrmière au Cégep de Jonquière, a poursuivi ses études et a obtenu un baccalauréat en sciences inrmières (1985) ainsi qu’une maîtrise en sciences inrmières (1990) de l’Université de Montréal, un doctorat en psychopédagogie (1997) de l’Université Laval et a terminé une formation postdoctorale de deux ans au Département de médecine sociale et préventive à la Faculté de médecine (2002) de l’Université de Montréal. Elle a acquis une expérience clinique de plus de 10 ans dans divers domaines spécialisés et ultraspécialisés ainsi qu’en administration. Ses champs d’intérêt d’enseignement et de recherche sont liés aux maladies chroniques, dont l’insufsance rénale, les malformations congénitales, l’évaluation de la santé et le raisonnement clinique. Depuis 1995, elle enseigne l’examen clinique et porte une attention particulière à l’acquisition d’habiletés chez les étudiantes leur permettant d’effectuer l’examen physique de façon adéquate. Direction pédagogique Éric Lavertu, inf., M. Éd. Éric Lavertu a amorcé sa carrière comme inrmier à l’Hôpital SaintSacrement et à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec. Depuis 2001, il enseigne les soins inrmiers au Cégep de Sainte-Foy. Professeur engagé, il s’intéresse au développement du jugement clinique des étudiantes et en a fait le thème de sa maîtrise en proposant un outil pour évaluer la pensée critique chez les étudiantes au cours des stages en milieu clinique. En plus de collaborer à l’adaptation de différents manuels en soins inrmiers, il a offert des formations sur mesure aux professeures en soins inrmiers de divers cégeps : notamment sur la planication et la préparation de cours, le plan thérapeutique inrmier, l’évaluation et la correction des travaux en stage ainsi que la conception d’activités d’évaluation. Enn, il participe actuellement à la mise en place d’un centre de simulation qui servira à la formation des étudiantes de tous les programmes de la santé au Cégep de Sainte-Foy. une maîtrise en éducation de l’Université du Québec en Outaouais ainsi qu’un diplôme d’études supérieures spécialisées en andragogie. Elle a pratiqué comme infirmière à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Elle a participé à la révision des lignes directrices des pratiques cliniques sur la dépression postpartum. De plus, elle a contribué à la rédaction du manuel d’accompagnement du lm L’évaluation physique et psychosociale en post-partum ainsi qu’à la révision du document cinématographique. Elle a mis sur pied le Centre d’innovation en enseignement et en simulation de la pratique inrmière (CIESPI) de l’Université d’Ottawa. Elle est toujours membre du comité de recherche sur les soins palliatifs à l’École des sciences inrmières de l’Université d’Ottawa. Rose Arsenault, diplômée en sciences inrmières, certicat en ophtalmologie Inrmière en ophtalmologie de 1970 à 2014, Rose Arseneault en a touché tous les aspects : unité de soins, clinique et salle d’opération au Centre hospitalier de l’Université Laval, à la Clinique d’ophtalmologie de la Cité et au Centre oculaire de Québec. Elle a développé une expertise en rétine et en basse vision. Spécialisée en ophtalmologie, elle s’est grandement impliquée dans l’enseignement tout au long de sa carrière : formation sur mesure pour les inrmières en ophtalmologie du Québec et du Nouveau-Brunswick, cours à des opticiens d’ordonnances, à des inrmières œuvrant auprès des diabétiques et en dispensaires autochtones. Elle a aussi enseigné les soins de première ligne dans les dispensaires de la Basse-Côte-Nord, de la baie d’Hudson et de La Dominique (Caraïbes). Jean-Luc Beaumont, inf., B. Sc. éd., spécialisé en soins inrmiers cardiovasculaires et respiratoires Jean-Luc Beaumont est inrmier clinicien spécialisé en soins inrmiers cardiovasculaires et respiratoires. Il est consultant et chargé de cours pour divers établissements hospitaliers et universitaires canadiens ainsi que pour des organismes de santé francophones européens. Il est également l’auteur des ouvrages Les arythmies cardiaques, un guide clinique et thérapeutique, Lecture progressive de l’ECG et L’examen clinique cardiovasculaire et respiratoire. Anne Charron, inf., Ph. D. Diane Alain, inf., M. Éd., DESS en andragogie Anne Charron est professeure titulaire et chercheuse au Secteur sciences inrmières de l’Université de Moncton, campus d’Edmundston. Elle détient une maîtrise en sciences inrmières et un doctorat en éducation de l’Université de Montréal. Diane Alain est diplômée de l’Université de Montréal en sciences inrmières et enseigne à La Cité collégiale, à Ottawa. Elle détient Ses domaines d’intérêt et d’expertise gravitent autour des problématiques de santé mentale de l’adulte, en particulier de la femme, Adaptation VII les besoins d’apprentissage de l’adulte malade et l’éducation à la santé, l’évaluation physique, psychosociale et psychiatrique, de même que les concepts de stress, de coping, de chronicité et de qualité de vie. Elle participe à plusieurs projets de recherche interdisciplinaire. de l’approche gériatrique dans les processus interdisciplinaires ; la reconnaissance de la gériatrie comme spécialité en soutien à domicile et en hébergement ; le deuil et l’accompagnement des proches aidants de personnes en perte d’autonomie. Alain Huot, inf., Ph. D. Éd. Luc Cormier, I.A., B. Sc. inf. Luc Cormier travaille à titre d’inrmier autorisé au programme Oasis du Centre de santé communautaire Côte-de-Sable à Ottawa. Il travaille principalement auprès de personnes atteintes du virus de l’immunodécience humaine ou de l’hépatite C, des personnes sans-abri ou aux prises avec un problème de santé mentale, dont les troubles liés à l’utilisation de substances. Dans le cadre de sa maîtrise en sciences inrmières à l’Université d’Ottawa, ses travaux se rapportent à la réduction des méfaits et à la prévention des surdoses d’opioïdes par l’entremise d’un programme d’éducation et de distribution de la naloxone. Tina Émond, inf., M. Sc. Tina Émond est chargée d’enseignement clinique au Secteur sciences inrmières de l’Université de Moncton, campus d’Edmundston. Elle est présentement étudiante au doctorat en sciences inrmières à l’Université Laval. Ses domaines d’expertise sont la périnatalité, l’évaluation physique, le soin de l’adulte ainsi que les bases théoriques en sciences inrmières. Alain Huot est professeur en sciences de l’éducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Il est titulaire d’un doctorat en éducation de l’Université du Québec à Montréal et détient également une maîtrise en éducation de l’Université du Québec à Rimouski. Ses domaines d’intérêt touchent principalement la santé au travail, la gestion et la supervision de personnel de même que la multidisciplinarité de la recherche en santéenseignement-gestion. Manon Lacroix, inf., M. Sc., IPSPL Manon Lacroix est inrmière praticienne de première ligne et détient un baccalauréat de l’Université du Québec en AbitibiTémiscamingue (UQAT) ainsi qu’une maîtrise en sciences inrmières, option inrmière praticienne en soins de santé primaires de l’Université d’Ottawa. Au cours des 17 dernières années, elle a exercé en santé au travail et majoritairement en CLSC. Professeure à mi-temps depuis 2003 en sciences inrmières à l’UQAT, ses domaines d’intérêt sont les soins de première ligne et la santé communautaire. Elle pratique depuis 2003 à titre d’inrmière praticienne spécialisée dans un centre de santé communautaire dans le Nord-Est ontarien. Lyne Fecteau, inf., M. Sc. Lyne Fecteau est professeure agrégée et directrice du Département des sciences de la santé de l’Université du Québec en AbitibiTémiscamingue. Elle est responsable des cours de physiopathologie, d’examen clinique I et d’examen clinique II offerts au baccalauréat en sciences inrmières. Ses intérêts de recherche portent principalement sur le développement du raisonnement clinique et l’encadrement de la formation pratique. Céline Pelletier, Ph. D., professeure retraitée en sciences inrmières Céline Pelletier détient un doctorat interdisciplinaire en sciences humaines appliquées de l’Université de Montréal. La santé communautaire, la maltraitance familiale – et particulièrement la négligence infantile –, l’évaluation et l’intervention en milieu familial et communautaire constituent ses principaux champs de recherche. Raphaèle Ferland-Verry, Dt. P. Raphaèle Ferland-Verry est diététiste-nutritionniste clinicienne diplômée de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal où elle a également terminé un microprogramme de 2 e cycle en nutrition clinique. Elle exerce principalement dans le milieu hospitalier ainsi qu’à sa clinique privée. Ses champs de pratique sont la neurologie, la lésion médullaire, la santé mentale, l’hépatologie et la santé gastro-intestinale. Bruno Pilote, inf., M. Sc. Bruno Pilote est professeur au Cégep de Sainte-Foy depuis plus de 15 ans. Il possède une vaste expérience en soins critiques et en soins de première ligne. De plus, il détient une maîtrise en médecine expérimentale et il poursuit actuellement ses études doctorales en sciences inrmières à l’Université Laval. Son domaine d’expertise concerne les interventions en matière d’éducation pour la santé liées à la problématique de l’hypertension artérielle. Danielle Gervais, inf., Bc. Sc. inf., DESS en santé communautaire, MAP Nathalie Raymond, inf., B. Sc. Chef d’unité au programme d’hébergement pour évaluation (PHPE) et des activités professionnelles de réadaptation en hébergement de longue durée, Danielle Gervais possède une vaste expérience comme chef d’unité en gériatrie active, en unité de courte durée gériatrique (UCDG) et en hébergement, ainsi qu’en tant que conseillère en soins inrmiers. Son principal domaine d’expertise est la gestion clinique et la gériatrie. Ses intérêts professionnels sont le développement du rôle autonome inrmier et Détentrice d’un baccalauréat et d’un diplôme de deuxième cycle en sciences inrmières, Nathalie Raymond termine présentement sa maîtrise dans le même domaine. Elle a travaillé dans différents milieux (urgences, milieu carcéral, Forces armées canadiennes). Elle s’est aussi consacrée à la pédagogie comme levier de changement des pratiques. Elle a enseigné à titre d’inrmière clinicienne au collégial et agit maintenant comme chargée de cours en évaluation clinique à l’université. VIII Équipe de rédaction Émilie Paul-Savoie, Ph. D. (c) Chargée de cours à l’Université de Sherbrooke et à l’Université du Québec en Outaouais, Émilie Paul-Savoie termine actuellement son doctorat à l’Université de Sherbrooke où elle s’est intéressée au rôle de l’empathie et de la santé mentale du soignant dans la prise en charge de la douleur chronique. Elle est également l’auteure de plusieurs articles scientiques. Son expertise concerne principalement la neurophysiologie et l’évaluation de la douleur, la pharmacologie et l’épidémiologie. Pauline Roy, M. A., DESS Sc. inf. Pauline Roy a fait des études de deuxième cycle à l’Université Laval en technologie de l’enseignement (sujet : l’utilisation de la programmation télévisuelle au collégial : l’examen physique du nouveau-né à terme), puis à l’Université de Sherbrooke (sujet : la formation à distance en sciences inrmières). Elle a ensuite obtenu un diplôme de deuxième cycle en sciences inrmières à l’Université Laval. Elle est actuellement chargée de cours à l’Université du Québec à Rimouski et elle a aussi enseigné au Cégep Lévis-Lauzon. La périnatalité est son principal champ d’expertise. Pierre Verret, inf., M. Sc., CSIO (c) Pierre Verret détient une maîtrise en sciences inrmières et une formation spécialisée en oncologie. Chargé d’enseignement à l’Université Laval, il est responsable de la formation sur l’examen clinique et coordonne les cours biomédicaux du programme IPSPL. Il enseigne également l’examen clinique à l’École des hautes études en santé publique (ESHEP) de France et collabore à l’intégration de l’examen clinique inrmier au Centre Universitaire de Genève (Suisse). ÉQUIPE DE CONSULTATION • Claire Blais, Université du Québec à Trois-Rivières • Alain Huot, Université du Québec à Rimouski • Tina Émond, Université de Moncton, campus d’Edmundston • Stéphan Lavoie, Université de Sherbrooke • Salomon Fotsing, Université du Québec en Outaouais • Nephtalie Maignan, Université de Montréal • Christelle Goulet D’Onofrio, Université du Québec à TroisRivières, Université du Québec en Outaouais – Pavillon de Saint-Jérôme, CSSS Drummond • Danielle Poirier, Université du Québec à Chicoutimi • Isabelle Harnois, Cégep régional de Lanaudière à Joliette • Cathy Ross, Cégep de Lévis-Lauzon • Pierre Verret, Université Laval Équipe de rédaction IX ÉQUIPE DE L’ÉDITION ORIGINALE SUSAN CAPLAN, PhD, MSN, APRN-BC Collaboratrice au chapitre 2 (Compétence culturelle : les soins selon la culture) et au contenu culturel du chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale), elle est professeure adjointe et directrice de la spécialité inrmière praticienne familiale à l’Université Rutgers. Elle détient un doctorat en sciences inrmières de l’Université Yale. Elle compte à son actif de nombreuses publications et conférences sur la compétence culturelle au sein des professions de soins de santé. MARTHA DRIESSNACK, PhD, PNP-BC Collaboratrice au contenu sur la promotion de la santé, elle est professeure adjointe à l’École des sciences inrmières de l’Oregon Health & Science University. Détentrice d’un doctorat de l’Université de la santé et des sciences de l’Oregon, elle a réalisé un stage postdoctoral en génétique clinique. Son objectif principal est d’être à l’écoute constante des besoins des enfants dans les décisions liées aux soins de santé les concernant. ANN ECKHARDT, PhD, RN Collaboratrice aux chapitres 1 (Évaluation et jugement clinique), 3 (Entrevue) et 9 (Questionnaire général, mesure des signes vitaux) ainsi qu’au contenu sur les dossiers de santé électroniques du chapitre 28 (Réévaluation de l’adulte hospitalisé), elle est professeure adjointe à l’École des sciences inrmières de l’Université Wesleyenne en Illinois. Détentrice d’un doctorat de l’Université de l’Illinois à Chicago, elle compte plus d’une décennie d’expérience clinique en soins critiques et en leadership dans la profession inrmière. Ses travaux de recherche portent sur la symptomatologie des maladies du cœur. CARLA GRAF, PhD, RN, CNS-BC Collaboratrice au chapitre 30 (Évaluation fonctionnelle de la personne âgée), elle est inrmière clinicienne spécialisée en gériatrie à l’École des sciences inrmières de l’Université de la Californie, à San Francisco. Elle est actuellement gestionnaire des innovations en matière de transition dans les soins au Centre médical de l’Université de la Californie, à San Francisco. AMANDA F. HOPKINS, PHD, RN Collaboratrice aux études de cas pédiatriques présentés dans les chapitres portant sur les différents systèmes physiologiques, elle est professeure adjointe à l’École des sciences inrmières de l’Université Wesleyenne en Illinois. Elle se spécialise en soins de santé pédiatriques et en sensibilisation transculturelle. X SARAH JARVIS, BSN, RN, DNPc Collaboratrice au chapitre 10 (Évaluation de la douleur : autre signe vital), elle est inrmière en hémato-oncologie à la University of Michigan Health System, à Ann Arbor (Michigan). Elle compte sept années d’expérience dans le domaine de la prise en charge de la douleur liée au cancer. Elle est également doctorante à l’Université de Wayne State, à Détroit (Michigan). JOYCE K. KEITHLEY, DNSc, RN, FAAN Collaboratrice au chapitre 11 (Évaluation nutritionnelle), elle est professeure au département de soins inrmiers aux adultes du Collège de Nursing de l’Université Rush et du Centre médical de l’Université Rush, à Chicago. Ayant travaillé autant en milieu clinique que pédagogique, elle est une praticienne, enseignante, chercheuse et auteure chevronnée et réputée dans le domaine de la nutrition clinique. KELSEY MERL, MSN, MPH, PNP-C Collaboratrice au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale), elle est inrmière praticienne en pédiatrie dans l’équipe de traumatologie chirurgicale de l’Hôpital pour enfants UCSF Benioff, à Oakland. Au sein de l’équipe du centre médicolégal pour la protection des enfants de l’hôpital, elle travaille auprès des enfants qui sont des victimes possibles de violence et de négligence. Elle mène des recherches sur la violence familiale pour aider à assurer la sécurité des femmes et des étudiants au collégial dans leurs relations. SHAWNA S. MUDD, DNP, PNP-BC, CPNP-AC Cette collaboratrice au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale) est inrmière praticienne en pédiatrie au service d’urgence pédiatrique de l’Hôpital Johns Hopkins à Baltimore. Elle est aussi membre auxiliaire du corps professoral de cet hôpital. DANIEL J. SHERIDAN, PhD, RN, FAAN Collaborateur au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale), il est professeur agrégé à la Goldfarb School of Nursing. Il est également professeur associé à l’École des Sciences inrmières et d’obstétrique de l’Université Flinders à Adélaïde en Afrique du Sud. Daniel J. Sheridan travaille depuis près de 30 ans avec des personnes ayant subi de la violence familiale et des agressions sexuelles. CARACTÉRISTIQUES DU MANUEL OUVERTURE DE CHAPITRE Mots clés Les mots clés résument les principales notions ou concepts de base à assimiler dans le chapitre. Objectifs d’apprentissage Les objectifs d’apprentissage mettent en évidence les principales connaissances et compétences que l’étudiante acquerra en étudiant le chapitre. FERMETURE DE CHAPITRE Que retenez-vous ? Cette section présente une série de questions d’objectivation amenant l’étudiante à formuler ce qui lui a été utile pour porter un jugement clinique. DÉVELOPPEMENT DU JUGEMENT CLINIQUE Dossier clinique Chaque chapitre d’examen clinique commence par la présentation d’un dossier proposant un cas clinique réaliste. Le questionnement suscité par cet exemple prépare l’étudiante à comprendre la réalité de la pratique inrmière et à établir des liens avec le contenu théorique présenté. Questions de suivi Des questions de suivi sont présentées en marge du chapitre et permettent de faire le lien avec le dossier clinique au fur et à mesure que l’étudiante assimile les connaissances. XI DIVISION EN CINQ PARTIES ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE Cette section présente la structure et la fonction de chacun des systèmes corporels. Les notions théoriques essentielles à la compréhension y sont expliquées. DONNÉES SUBJECTIVES Cette section présente un questionnaire d’évaluation sur l’histoire de santé en deux colonnes avec des questions et leurs justications. P Q R S T U Le questionnaire de santé est organisé selon la séquence PQRSTU pour l’évaluation d’un symptôme. Des pastilles distinctives facilitent le repérage des divers éléments de la séquence. DONNÉES OBJECTIVES La présentation en deux colonnes facilite la reconnaissance des observations anormales par rapport aux résultats normaux. ANOMALIES ET ANOMALIES POUR UNE PRATIQUE AVANCÉE Ces sections décrivent et illustrent les principales anomalies pouvant être rencontrées. ÉVALUATION ET JUGEMENT CLINIQUE Exemple de notes au dossier Une section qui comprend un exemple d’évaluation ciblée. Suite au dossier clinique Cette section est la suite du dossier présenté en début de chapitre avec des questions amenant l’étudiante à développer son jugement clinique. Extrait de plan thérapeutique inrmier Selon le cas présenté, un exemple de PTI est contextualisé. XII Caractéristiques du manuel AUTRES ÉLÉMENTS DISTINCTIFS Particularités liées au développement Ces sections mettent en évidence les particularités liées aux différents stades du développement (nourrissons, enfants, adolescents, adultes, femmes enceintes, adultes vieillissants). Particularités culturelles et génétiques Ces sections mettent en évidence les particularités liées au bagage culturel et génétique qui peuvent guider l’inrmière dans son évaluation du client. Rubriques Promotion de la santé et Promotion de saines habitudes de vie Ces encadrés présentent les pratiques exemplaires en matière de santé pour le système corporel étudié dans le chapitre. Son contenu est utile à l’inrmière pour l’enseignement au client. Termes en gras et mots dénis en marge Les termes en gras sont dénis en marge pour faciliter la compréhension immédiate du texte. Picto i+ Ce picto renvoie au contenu présenté sur la plateforme interactive de l’ouvrage. Caractéristiques du manuel XIII TABLE DES MATIÈRES PARTIE 1 Évaluation globale de la personne CHAPITRE 1 Éaluation et jugement clinique 1.1 Évaluation : point de départ d’un processus continu . . . . . . . . . . . . 4 1.1.1 Raisonnement scientique et jugement clinique. . . . . . . . . . 4 1.1.2 Démarche de soins et jugement clinique. . . . . . . . . . . . . . . . 5 1.1.3 Pensée critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 1.2 Assises de l’exercice de la profession inrmière au Québec . . . . . . 9 1.3 Évaluation fondée sur des résultats probants . . . . . . . . . . . . . . . . 10 1.4 Types de collecte de données selon l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . 12 1.4.1 Collecte de données en entrevue initiale (complète). . . . . . 12 1.4.2 Collecte de données en cours d’évolution (épisodique) ou centrée sur un problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 1.4.3 Collecte de données en situation de suivi . . . . . . . . . . . . . . 12 1.4.4 Collecte de données en situation d’urgence . . . . . . . . . . . . 12 1.5 Élargissement du concept de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 1.6 Évaluation à toutes les étapes de la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 1.7 Évaluation dans la pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 CHAPITRE 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 2.1 Prol démographique canadien. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 2.2 Immigration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 2.3 Multiculturalisme et santé au Canada et au Québec. . . . . . . . . . . 19 2.3.1 Compétences linguistiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 2.3.2 Compétence culturelle et soins adaptés à la culture . . . . . 21 2.4 Héritage culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 2.4.1 Culture. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 2.4.2 Ethnicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 2.4.3 Religion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 2.4.4 Socialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 2.4.5 Orientation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 2.5 Évaluation de l’héritage culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 2.6 Croyances et coutumes liées à la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 2.7 Causes traditionnelles de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 2.7.1 Perspective biomédicale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 2.7.2 Perspective naturaliste. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 2.7.3 Perspective magicoreligieuse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 2.7.4 Guérison et culture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 2.8 Expression transculturelle de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 2.8.1 Expression transculturelle de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . 34 xIv 2.8.2 Syndrome lié à l’attachement culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 2.8.3 Culture et traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 2.8.4 Culture et prévalence de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 2.9 Étapes vers la compétence culturelle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 2.10 Soins inrmiers culturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 CHAPITRE 3 Entreue 3.1 Processus de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 3.1.1 Inrmière : l’aidante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 3.1.2 Client : l’aidé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 3.1.3 Facteurs internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 3.1.4 Facteurs externes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 3.2 Techniques de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 3.2.1 Début de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 3.2.2 Phase de travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 3.2.3 Objectifs et pièges de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 3.2.4 Communication non verbale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 3.2.5 Fin de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 3.3 Entrevue avec une personne ayant des besoins spéciaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 3.3.1 Personne malentendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 3.3.2 Personne gravement malade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 3.3.3 Personne sous l’inuence de drogues de rue ou de l’alcool . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58 3.3.4 Personne indiscrète . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58 3.3.5 Personne agressive sexuellement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58 3.3.6 Personne en pleurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 3.3.7 Personne en colère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 3.3.8 Personne potentiellement violente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 3.3.9 Personne anxieuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 CHAPITRE 4 Regard global sur l’histoire de santé 4.1 Histoire de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 4.1.1 Informations sociodémographiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 4.1.2 Raisons de la consultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 4.1.3 Histoire du problème de santé actuel . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 4.1.4 Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 4.1.5 Antécédents familiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 4.1.6 Revue des systèmes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 4.1.7 Évaluation fonctionnelle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 4.1.8 Perception de la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 CHAPITRE 5 Éaluation de l’état mental 5.1 Dénition de l’état mental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 5.2 Composantes de l’examen de l’état mental . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 5.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 5.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 5.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 5.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 5.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 CHAPITRE 6 Éaluation de la consommation de substances 6.1 Consommation d’alcool . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 6.2 Consommation de drogues illicites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 6.3 Diagnostic des troubles liés à la consommation de substances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 6.4 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 6.4.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 6.5 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136 6.6 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 CHAPITRE 7 Éaluation de la iolence familiale 7.1 Dénition de la violence conjugale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 7.2 Dénition de la maltraitance et de la négligence envers les enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144 7.3 Dénition de la maltraitance et de la négligence envers les personnes âgées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144 7.4 Effets physiques de la violence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 7.5 Dépistage de la violence conjugale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 7.5.1 Outils de dépistage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 7.5.2 Évaluation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 7.6 Dépistage de la maltraitance et de la négligence chez les aînés et les personnes vulnérables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149 7.7 Historique de la situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 7.8 Dépistage de la maltraitance et de la négligence chez les enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 7.9 Examen physique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151 7.9.1 Examen physique de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152 7.10 Notes au dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153 7.11 Évaluation des risques d’homicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 7.12 Autres indices de violence conjugale à considérer malgré une réponse négative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 PARTIE 2 Connaissances préalables à l’examen clinique CHAPITRE 8 Techniques d’éaluation et préparation de l’enironnement clinique 8.1 Développer ses sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 8.1.1 Inspection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 8.1.2 Palpation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 8.1.3 Percussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160 8.1.4 Auscultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 8.2 Préparation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 8.2.1 Préparation et matériel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 8.2.2 Propreté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 8.3 Environnement sain et sécuritaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 8.4 Contexte clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167 8.4.1 Approche générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167 8.4.2 Déroulement de l’examen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173 CHAPITRE 9 Questionnaire général, mesure des signes itau 9.1 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175 9.1.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175 9.1.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175 9.2 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209 CHAPITRE 10 Éaluation de la douleur : autre signe ital 10.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211 10.1.1 Dénition du concept de douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211 10.1.2 De la nociception à la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212 10.1.3 Types de douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214 10.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217 10.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217 10.2.2 Outils d’évaluation de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219 Table des matières xv 10.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222 10.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222 10.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223 10.3.3 Indicateurs comportementaux de la douleur . . . . . . . . . 223 10.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228 10.4.1 Syndrome de douleur régionale complexe . . . . . . . . . . . 228 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229 CHAPITRE 11 Éaluaton nutrtonnelle 11.1 Dénition de l’état nutritionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231 11.2 Objectifs et composantes de l’évaluation nutritionnelle . . . . . . 238 11.3 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242 11.3.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242 11.4 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250 11.4.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250 11.4.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251 11.5 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259 11.6 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263 PARTIE 3 Examen clinique CHAPITRE 12 Peau, cheeu et ongles 13.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320 13.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320 13.2.2 Céphalées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320 13.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327 13.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327 13.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 328 13.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 339 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345 CHAPITRE 14 Yeu 14.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347 14.1.1 Anatomie externe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347 14.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 348 14.1.3 Voies visuelles et champs visuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . 350 14.1.4 Réexes visuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 350 14.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 353 14.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 353 14.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358 14.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358 14.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 359 14.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 380 14.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 384 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 388 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 389 CHAPITRE 15 Orelles 12.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265 12.1.1 Peau. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265 12.1.2 Annexes épidermiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266 12.1.3 Fonctions de la peau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267 12.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270 12.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270 12.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276 12.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276 12.3.2 Examen physique complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276 12.3.3 Examen physique ciblé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277 12.3.4 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277 12.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294 12.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313 15.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391 15.1.1 Oreille externe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391 15.1.2 Oreille moyenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391 15.1.3 Oreille interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 392 15.1.4 Audition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 392 15.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 395 15.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 395 15.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 15.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 15.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 15.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 410 15.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 413 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 416 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 417 CHAPITRE 13 Tête, sage et cou, englobant le dranage lymphatque CHAPITRE 16 Nez, bouche et gorge 13.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315 13.1.1 Tête . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315 13.1.2 Cou. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 316 13.1.3 Drainage lymphatique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 318 16.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419 16.1.1 Nez. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419 16.1.2 Bouche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420 16.1.3 Gorge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422 xvi Table des matières 16.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424 16.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424 16.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430 16.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430 16.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 431 16.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 442 16.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 445 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 450 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 451 CHAPITRE 17 Sens et ganglons lymphatques régonau 17.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453 17.1.1 Anatomie supercielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453 17.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453 17.1.3 Drainage lymphatique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454 17.1.4 Sein de l’homme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 457 17.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 459 17.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 459 17.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464 17.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464 17.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 465 17.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474 17.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 477 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 479 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 481 CHAPITRE 18 Thora et poumons 18.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483 18.1.1 Position et points de repère superciels . . . . . . . . . . . . 483 18.1.2 Cavité thoracique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 485 18.1.3 Mécanismes de la respiration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 487 18.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 491 18.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 491 18.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 496 18.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 496 18.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 497 18.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513 18.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 517 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 524 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525 CHAPITRE 19 Cœur et asseau du cou 19.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 527 19.1.1 Position et points de repère superciels . . . . . . . . . . . . 527 19.1.2 Parois du cœur, cavités et valves . . . . . . . . . . . . . . . . . . 528 19.1.3 Direction du ux sanguin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529 19.1.4 Cycle cardiaque. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529 19.1.5 Bruits cardiaques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 531 19.1.6 Conduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 532 19.1.7 Capacité de pompage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533 19.1.8 Vaisseaux du cou. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 534 19.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539 19.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539 19.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545 19.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545 19.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545 19.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 562 19.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 564 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 576 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 577 CHAPITRE 20 Système asculare pérphérque et système lymphatque 20.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579 20.1.1 Artères. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579 20.1.2 Veines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 580 20.1.3 Flux veineux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 580 20.1.4 Vaisseaux lymphatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 582 20.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585 20.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585 20.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588 20.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588 20.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588 20.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 599 20.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 601 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 606 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 607 CHAPITRE 21 Abdomen 21.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609 21.1.1 Points de repère superciels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609 21.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609 21.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 614 21.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 614 21.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 620 21.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 620 21.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 621 21.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 642 21.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 648 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 649 CHAPITRE 22 Système musculosquelettque 22.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 651 22.1.1 Composantes du système musculosquelettique . . . . . . 651 Table des matières xvii 22.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 660 22.2.1 Histoire de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 660 22.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667 22.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667 22.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 668 22.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 701 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 709 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 711 CHAPITRE 23 Système neurologque 23.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 713 23.1.1 Système nerveux central . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 713 23.1.2 Système nerveux périphérique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 718 23.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 722 23.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 722 23.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728 23.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728 23.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728 23.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 765 23.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 770 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 776 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 779 CHAPITRE 24 Système génto-urnare masculn 24.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 781 24.1.1 Organes génito-urinaires masculins. . . . . . . . . . . . . . . . 781 24.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 786 24.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 786 24.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 794 24.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 794 24.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 795 24.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 805 24.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 806 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 812 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 813 25.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 831 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 832 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 833 CHAPITRE 26 Système génto-urnare fémnn 26.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835 26.1.1 Organes génitaux externes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835 26.1.2 Organes génitaux internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 836 26.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 839 26.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 839 26.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847 26.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847 26.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847 26.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 865 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 872 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 873 PARTIE 4 Intégration de l’examen clinique à l’évaluation de la santé CHAPITRE 27 Éaluaton complète de la santé 27.1 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 875 27.1.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 875 27.2 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876 27.2.1 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 893 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 895 CHAPITRE 28 Rééaluaton de l’adulte hosptalsé 28.1 Évaluation clinique complète ou ciblée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 897 28.2 Séquence de l’examen. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 899 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 905 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 907 CHAPITRE 25 Anus, rectum et prostate CHAPITRE 29 Femme encente 25.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 815 25.1.1 Anus et rectum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 815 25.1.2 Prostate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 816 25.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 817 25.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 817 25.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822 25.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822 25.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822 25.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 829 29.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909 29.1.1 Grossesse et placenta endocrinien . . . . . . . . . . . . . . . . 909 29.1.2 Changements durant la grossesse normale. . . . . . . . . . 910 29.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 914 29.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 914 29.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921 29.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921 29.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921 29.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 931 xviii Table des matières Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 933 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 935 CHAPITRE 30 Évaluaton fonctonnelle de la personne âgée 30.1 Autonomie fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 938 30.1.1 Activités de la vie quotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 939 30.1.2 Activités de la vie domestique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 939 30.1.3 Système de mesure de l’autonomie fonctionnelle. . . . . 939 30.1.4 Considérations pour planier une évaluation réussie . . 940 30.2 Activités de la vie sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 941 30.2.1 Aspect social de l’autonomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 941 30.2.2 Évaluation du fardeau du proche aidant. . . . . . . . . . . . . 942 30.2.3 Évaluation de l’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 944 30.2.4 Conducteurs âgés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 945 30.3 Évaluation de l’état physique et mental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 947 30.3.1 Syndrome de fragilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 947 30.3.2 Syndrome d’immobilisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 948 30.3.3 Évaluation de la mobilité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 948 30.3.4 Évaluation de la cognition et des clients âgés présentant une atteinte cognitive . . . . . . . . . . . . . . . . . 949 30.3.5 Dépression. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 950 30.3.6 Évaluation de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 952 30.3.7 Sommeil. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 953 30.4 Contextes de soins et milieu de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 955 30.4.1 Milieu hospitalier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 955 30.4.2 Soutien à domicile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 956 30.4.3 Ressources intermédiaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 957 30.4.4 Centres d’hébergement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958 30.5 Interdisciplinarité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958 Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 959 Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 961 Références. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 962 Sources iconographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 986 Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 990 Table des matières xix Dossier : Hélène Bastien Hélène Bastien est une femme blanche âgée de 23 ans, sans emploi. Elle entreprend un programme de désintoxication volontaire à la suite de nombreuses infractions pour conduite avec facultés affaiblies. À son arrivée au centre de désintoxication, vous procédez à son évaluation initiale ; vous avez recueilli l’histoire de santé et effectué l’examen physique. Voici ce qui ressort de votre collecte de données. • Usage de contraceptifs oraux depuis trois ans, dernier examen pelvien date de un an. • Résolution d’un hématome au foramen infraorbitaire droit (sous l’œil droit) de 2 à 3 cm. • Première molaire droite inférieure manquante, déchaussement des gencives inférieures, taches foncées multiples sur toute la dentition. • Pression artérielle (PA) élevée : 142/100 mm Hg à la n de l’examen aujourd’hui. • Bruits respiratoires diminués, avec sibilants expiratoires modérés et ronchus dispersés aux deux bases. • Soufe cardiaque systolique de grade 2/6, au rebord sternal inférieur gauche. • Cicatrice bien guérie – de 28 cm × 2 cm – à la jambe droite, celle-ci est de 3 cm plus courte que la jambe gauche, séquelle d’un accident de voiture à l’âge de 12 ans. • Bonne moyenne générale au cours de ses trois premières années d’études secondaires ; ses notes ont cependant chuté à ses deux dernières années, mais elle a tout de même obtenu son diplôme. • Alimentation déciente; omet régulièrement de déjeuner, mange peu de fruits ou de légumes de façon quotidienne ; ses repas proviennent la plupart du temps de chaînes de restauration rapide. • Histoire d’agression sexuelle par son père, de l’âge de 12 à 16 ans. • Volet relationnel : s’est éloignée de ses parents, relation correcte avec sa sœur, mais plutôt chaotique avec son conjoint, depuis deux ans. Dans le cas de madame Bastien, les techniques d’évaluation ont pour fonction de recueillir un ensemble de données cliniques dans le but ultime d’exercer un jugement à leur égard. Par exemple, la mesure de la PA vise à déterminer, d’une part, si madame Bastien présente un état hypertensif et, d’autre part, si cette situation est sporadique ou 1 Elle le décrit comme étant alcoolique et violent physiquement. • A fait un usage abusif d’alcool, dès l’âge de 16 ans ; depuis les 3 dernières années, consomme de l’alcool de façon quotidienne. • À sa dernière infraction pour trouble à l’ordre public, le mois dernier, elle avait bu 18 bières. Cependant, elle est abstinente depuis ce moment. • Fume 2 paquets de cigarettes par jour depuis 2 ans, utilisation antérieure, 1 paquet de cigarettes par jour pendant 4 ans. • Histoire de sévices physiques de la part de son conjoint ; a aujourd’hui un hématome orbitaire en raison d’un coup asséné par celuici. Elle dit : « C’est correct, je l’avais mérité, j’avais juste à ne pas le provoquer. » • Aucun emploi depuis les six derniers mois, son dernier travail était celui de caissière et serveuse dans une brasserie. Vous procédez à l’analyse et à l’interprétation de toutes les données recueillies ; vous regroupez les éléments d’information, triant les données auxquelles vous devez vous référer et celles sur lesquelles vous pouvez intervenir. Enn, vous déterminez des problèmes prioritaires à partir de votre évaluation. Bien que le processus de démarche d’évaluation systématique soit discuté plus loin, il est intéressant, à ce moment, de noter que l’ensemble des données signicatives provient de ce que vous avez relevé. Il n’est pas seulement question des données physiques, mais aussi des données cognitives, psychosociales et comportementales, témoignant de l’état de santé de madame Bastien. En outre, les données obtenues sont analysées en considérant le cycle de vie, c’est-à-dire que la cliente est une jeune adulte qui, normalement, devrait en être au stade développemental de l’émancipation parentale. À ce stade, la personne devrait être en mesure de se construire une vie indépendante de celle de ses parents, se choisissant entre autres une profession et un compagnon de vie. En résumé, plusieurs facteurs s’avèrent essentiels lorsqu’il s’agit d’effectuer une évaluation complète de l’état de santé d’une personne. chronique. S’il s’agit d’une situation chronique, il serait alors préférable d’intervenir an de réduire la PA et ainsi de prévenir les événements cardiovasculaires et l’accident vasculaire cérébral. Toujours dans la situation de madame Bastien, l’auscultation pulmonaire vise à déceler des problèmes respiratoires potentiels ou actuels tels que Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 3 Q uestion de suivi Quel est le point commun entre l’évaluation initiale et l’évaluation en cours d’évolution ? Q uestion de suivi À partir des données présentées jusqu’à présent, formulez deux hypothèses de problèmes prioritaires pour madame Bastien. 1.1 Q uestion de suivi Quelles sont les quatre étapes du raisonnement scientique ? Problème prioritaire : Formulation du jugement posé par l’inrmière sur la situation de santé du client ou sur un aspect particulier de celui-ci à partir de son analyse et de son interprétation des données recueillies. Mise en garde Le fait d’avoir des idées préconçues à l’égard d’une situation peut entraîner des hypothèses de xation. Dans ce type d’hypothèse, l’inrmière cherche des éléments appuyant sa thèse tout en rejetant les éléments l’inrmant. Elle doit donc en être consciente et s’assurer de recueillir toutes les données relatives à la situation clinique an de porter un jugement neutre et basé sur des données ables et complètes. 4 l’asthme, une pathologie pouvant être exacerbée par le tabagisme. L’auscultation cardiaque, quant à elle, révèle la présence d’un soufe cardiaque chez la cliente. Ce soufe peut s’avérer anodin ou être l’un des signes précurseurs d’une anomalie de certaines structures valvulaires du cœur. Dans ce contexte, un examen plus approfondi sera nécessaire an de déterminer la portée réelle de cette observation. L’examen physique n’est donc pas une simple formalité obligatoire ; il constitue également une source importante de renseignements lorsqu’il s’agit d’exercer un jugement clinique basé sur les bonnes pratiques cliniques. Partie 1 Évaluation : point de départ d’un processus continu L’évaluation clinique comporte deux dimensions : l’évaluation initiale et l’évaluation en cours d’évolution. Chacune de ces dimensions mène à la formulation de constats d’évaluation, inscrits au plan thérapeutique inrmier (PTI). L’évaluation initiale vise plus particulièrement à établir un prol de la situation de santé de la personne, en recueillant, par divers moyens (p. ex., l’entrevue, l’examen physique, les documents clinicoadministratifs), les données pertinentes. Par la suite, une analyse ainsi qu’une interprétation des données seront réalisées. L’un des rôles de l’inrmière est d’évaluer l’état physique et mental d’un client symptomatique. Pour ce faire, elle utilise des techniques permettant de rassembler et d’analyser des données subjectives (c.-à-d. ce que le client dit au sujet de lui-même) et des données objectives (c.-à-d. ce que l’inrmière, en tant que professionnelle de la santé, observe par l’inspection, la percussion, la palpation, l’auscultation et d’autres mesures au cours de l’examen physique). Toutes les données recueillies, combinées à l’étude du dossier et aux analyses de laboratoire, permettent d’établir les bases sur lesquelles l’inrmière sera en mesure d’émettre diverses hypothèses qui conduiront à l’établissement de problèmes prioritaires. C’est notamment à partir de la collecte des données que l’inrmière fait preuve de jugement clinique. Grâce à celui-ci, elle sera en mesure d’établir les problèmes prioritaires présents chez la personne, de les inscrire au PTI et de déterminer les interventions pertinentes. Ces problèmes prioritaires peuvent relever d’une situation de santé réelle ou potentielle. Donc, le but de l’évaluation initiale est d’abord de formuler une ou des hypothèses, puis de déterminer les problèmes prioritaires sur lesquels l’infirmière doit intervenir. L’évaluation initiale doit donc être à la fois structurée et complète puisqu’elle constitue le point de Évaluation globale de la personne départ des interventions qui seront faites auprès de la personne tout au long du processus de soins. 1.1.1 Raisonnement scientique et jugement clinique La transition entre l’étape de la collecte des données et celle des interventions cliniques peut se révéler difcile. La plupart des inrmières qui commencent leur pratique sont en mesure de recueillir adéquatement les données, pourvu qu’on leur laisse le temps de s’exercer et ainsi d’acquérir cette compétence. Par manque d’expérience, elles éprouvent toutefois de la difculté à discriminer les données essentielles des données superues. Une inrmière moins expérimentée peut alors traiter tous les renseignements recueillis comme ayant une importance égale. Cela rend la prise de décision plus lente et laborieuse. Le raisonnement scientique, processus d’analyse et d’interprétation des données relatives à la santé, a pour objectif d’établir les problèmes prioritaires. Basé sur la méthode scientique, ce type de raisonnement comporte quatre étapes principales : 1) prendre en compte les manifestations cliniques, soit les signes et les symptômes présents à l’arrivée du client ; 2) formuler des hypothèses ; 3) procéder à la collecte des données relatives à ces hypothèses ; 4) évaluer chaque hypothèse avec ces nouvelles données, ce qui mène au constat d’évaluation. Un élément déclencheur est une information, un signe ou un symptôme, ou une donnée de laboratoire. Une hypothèse est une explication, découlant d’une donnée ou d’un ensemble de données contextuelles, qui peut être employée comme base pour approfondir les recherches ou aider à établir une priorité. Par exemple, madame Bastien, présentée dans la mise en contexte au début de ce chapitre, afche un certain nombre d’indices, dont l’hématome en résolution sous son œil droit. Les composantes du raisonnement scientique se transposent ici de la façon suivante : 1) il est facile de faire cette observation avant même de commencer la collecte des données. Est-ce signicatif ? 2) La jeune femme commence par prétendre qu’elle a heurté la porte en courant, mais elle marmonne et évite le contact visuel. À ce moment, l’inrmière formule une hypothèse d’agression physique. 3) Les données recueillies à partir de l’examen clinique vont conrmer ou inrmer cette hypothèse. 4) Les données rassemblées permettent à l’inrmière de conrmer son hypothèse d’agression physique et d’éliminer la cause accidentelle. Les constats d’évaluation sont les suivants : Contusion à l’orbite droite en état de résolution et personne à risque de trauma. Une fois la collecte des données terminée, une liste préliminaire de manifestations cliniques signicatives et de tous les besoins de santé du client est établie. Il faut rassembler ou regrouper les données qui semblent être causales ou associées. Par exemple, chez une personne qui présente une douleur aiguë, les données associées à celle-ci sont l’augmentation de la fréquence cardiaque et un état exacerbé d’anxiété. Regrouper les données signicatives peut être long et fastidieux en début de pratique ; cependant, les inrmières expérimentées rassemblent les données plus rapidement parce qu’elles se reportent à leurs connaissances et à leur expérience antérieure de situations similaires (Benner, Tanner et Chesla, 1996). An de s’assurer qu’elles sont précises, les données rassemblées doivent être validées. Pendant cette étape, l’inrmière cherche les lacunes qui auraient pu se glisser dans sa collecte. Trouver les données manquantes et repérer l’information absente est une compétence essentielle an d’exercer une pensée critique. La méthode utilisée an de valider les données dépend de l’expérience de l’inrmière. Par exemple, si la PA semble anormale, il faut la reprendre et éliminer toutes les variables extérieures l’inuençant telles que la position et la dimension du brassard, l’anxiété causée par l’examen ou la pratique récente d’une activité physique. Si elle éprouve de la difculté à analyser les bruits cardiaques ou respiratoires, l’inrmière peu expérimentée peut demander l’aide d’une collègue d’expérience an qu’elle conrme les bruits entendus. Même une inrmière cumulant plusieurs années de pratique clinique doit faire valider certains renseignements, notamment lorsqu’il s’agit d’éléments dépassant son champ de compétence (p. ex., une masse sur un sein). 1.1.2 Démarche de soins et jugement clinique La pratique inrmière s’appuie sur un processus critique communément appelé démarche de soins. Celle-ci comprend cinq étapes : 1) la collecte des données ; 2) l’analyse et l’interprétation des données ; 3) la planication des interventions ; 4) les interventions cliniques ; 5) l’évaluation des résultats. Il s’agit d’un processus dynamique et non linéaire, dans lequel les activités d’évaluation et les activités d’intervention s’imbriquent les unes dans les autres et peuvent faire appel à divers outils de documentation des soins inrmiers (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2006) FIGURE 1.1. Bien que la démarche de soins soit une approche de résolution de problèmes, la façon dont elle est appliquée dépend de l’expérience et des compétences de la soignante. L’inrmière qui amorce sa pratique a peu d’expérience auprès de clientèles particulières, mais elle possède tout de même les compétences minimales nécessaires. Elle s’inspire de règles établies par l’établissement de santé pour guider ses soins et ses actions (Benner et collab., 1996). Elle mettra quelques années, lorsqu’elle est placée dans des contextes cliniques semblables, pour acquérir pleinement une compétence alliant aspect théorique et volet pratique. De son côté, l’inrmière expérimentée maîtrise sa démarche de soins et l’applique dans des contextes variés ; il est alors question de compétence intégrée. Forte de son expérience, cette inrmière considère le client de façon globale, et non comme une superposition de systèmes. Elle possède également une vision à long terme, lui permettant d’anticiper les interventions inrmières qui aideront le client à atteindre les résultats escomptés. Il semble donc que les inrmières d’expérience intègrent plus aisément l’ensemble de la démarche de soins et arrivent ainsi à poser un jugement clinique plus rapidement. L’inrmière expérimentée possède une vision intégrée lui permettant de trouver la solution adéquate plus rapidement (Benner et collab., 1996). Q 1 uestion de suivi Dans le cas de madame Bastien, outre la contusion à l’œil droit, relevez un autre élément déclen­ cheur qui laisse croire à des sévices physiques de la part de son conjoint. Le raisonnement de l’inrmière expérimentée en matière de jugement clinique fait appel à ses expériences antérieures, soit à la somme de ses connaissances. L’inrmière fait preuve d’un jugement clinique intégré spécialement lorsqu’elle est en mesure de reconnaître rapidement des situations problématiques. Les professionnels de la santé exerçant ce type de jugement peuvent répondre rapidement au changement de l’état de santé d’un client sans même avoir recours à une collecte de données ou à une analyse aussi structurée que doit le faire l’inrmière peu expérimentée. Ce processus de collecte des données, de leur analyse et de l’établissement d’hypothèses s’effectue en partie de façon inconsciente. L’inrmière qui cumule moins d’expérience, quant à elle, réagit plutôt en se basant sur un ensemble déni de règles (Benner, Tanner et Chesla, 1997). Voici une situation où se comparent les actions de l’inrmière en début de pratique à celles de l’inrmière d’expérience ; ici, un jeune homme est atteint d’une pneumonie à Pneumocystis jiroveci. Il frappait les ridelles, émettait des bruits de suffocation et pointait son tube endotrachéal. Il était en diaphorèse, suffoquait et était agité. L’inrmière peu expérimentée a posé sa main sur son bras et a essayé de savoir s’il avait la gorge endolorie à cause du tube. Pendant que cette inrmière était partie chercher un analgésique, l’inrmière d’expérience, passant près du client, est allée à son chevet, a regoné le ballonnet endotrachéal, puis a vu la gratitude dans le regard du jeune homme tandis que sa respiration était plus adéquatement assistée par la ventilation mécanique. L’inrmière en début de pratique était désemparée, car elle avait mal interprété la situation. Avec elle, la soignante expérimentée a alors passé en revue les signes d’une fuite du ballonnet endotrachéal et a précisé que le fait de frapper les ridelles et l’état de panique du client l’ont aidée à différencier la détresse respiratoire aiguë de la douleur. [Traduction libre] (Hanneman, 1996, p. 333) Chapitre 1 Démarche de soins : Cycle d’analyse approfondie de la situation clinique com­ prenant plusieurs étapes et dans lequel les résultats sont évalués en fonction de la situation de départ. Évaluation et jugement clinique 5 FIGURE 1.1 Démarche de soins PSTI : plan de soins et de traitements inrmiers ; PTI : plan thérapeutique inrmier 1.1.3 Pensée critique L’intégration de la pensée critique et du jugement clinique est l’une des composantes qui déterminent le passage du statut d’inrmière peu expérimentée à celui d’inrmière d’expérience. Au début de leur pratique, les inrmières utilisent toutes la connaissance de règles dénies pour guider leurs actions. Avoir recours à la pensée critique est le moyen par lequel elles apprennent à évaluer et à modier, au besoin, leurs façons d’agir. La pensée critique est requise pour construire un raisonnement solide et pour poser un jugement clinique. Avec les années, de vastes quantités de données et de renseignements seront évaluées et triées dans le but de formuler des jugements cliniques exacts quant aux soins à offrir aux clients. Ces données seront dynamiques, imprévisibles et toujours changeantes. Il n’existe pas de protocole unique qui peut être appris par cœur et qui s’appliquera à chaque situation. 6 Partie 1 Évaluation globale de la personne La FIGURE 1.2 illustrant la capacité d’exercer une pensée critique est représentée par trois dimensions qui se chevauchent. La capacité d’exercer une pensée critique est améliorée lorsque : 1) les caractéristiques de la pensée critique sont présentes (un engagement à apprendre les caractéristiques, les attitudes et les habiletés du processus conduisant à la pensée critique) ; 2) les connaissances théoriques et empiriques sont présentes (quoi faire, quand le faire et pourquoi le faire) ; 3) les compétences intellectuelles et manuelles sont mobilisées (l’évaluation systématique et les compétences psychomotrices) (Alfaro-LeFevre, 2009). Watson et Glaser (1991) offrent une dénition semblable des trois dimensions de la pensée critique : une attitude d’enquête, une maîtrise du sujet et une utilisation de ses connaissances au cours de situations problématiques. Alfaro-LeFevre (2009) présente 17 habiletés permettant d’acquérir une pensée critique. Elles sont organisées dans une suite logique et pourraient être a beaucoup de problèmes, mais, au moment de son admission, elle n’est pas en phase critique. Ainsi, plusieurs approches peuvent être utilisées pour l’évaluation : la méthode de la tête aux pieds, la méthode par système (p. ex., le système cardiovasculaire, le système gastro-intestinal), la méthode par examen d’une région (p. ex., l’examen pelvien) ou l’utilisation d’une forme préprogrammée d’évaluation qui a été mise au point par l’établissement de santé. FIGURE 1.2 Les trois dimensions de la pensée critique employées ainsi dans la démarche de soins. Bien que chaque compétence soit décrite séparément ici, elles ne sont pas utilisées de cette manière dans les milieux cliniques. En effet, ces habiletés doivent être employées de façon intégrée. La pensée critique relève en effet d’un processus de pensée multidimensionnelle plutôt que d’un processus linéaire, étape par étape. Avec l’expérience, l’inrmière pourra utiliser rapidement ces compétences, d’une manière dynamique et interactive. Le cas de madame Bastien servira ici à illustrer ces 17 habiletés. 1. Reconnaître les hypothèses. Cela implique d’éviter de tenir de l’information pour acquise ou de l’interpréter comme un fait alors qu’aucune preuve ne le démontre. Il faut donc se demander si certains éléments d’information ont été tenus pour acquis dans la situation. Par exemple, dans le cas de madame Bastien, selon les données préliminaires recueillies et selon le prol de la cliente, l’inrmière aurait pu émettre l’hypothèse que madame Bastien est une personne consommant de l’alcool de façon abusive. Cette hypothèse constituerait alors un jugement basé sur les expériences antérieures de l’inrmière ou sur ses propres perceptions à l’égard des personnes consommant de l’alcool. Cependant, la situation de madame Bastien demeure unique et demande de la part de l’inrmière de mettre en œuvre l’ensemble de la démarche an de valider ou d’inrmer son hypothèse. L’inrmière doit donc retarder son jugement jusqu’à la n de la collecte des données an d’éviter d’être inuencée par celui-ci et recueillir toutes les données de façon neutre et impartiale. 2. Choisir la méthode organisée, complète et appropriée. Cela dépend des besoins prioritaires du client, de l’expérience de l’inrmière en évaluation et des protocoles de l’établissement. Madame Bastien 1 3. Valider ou vérier l’exactitude et la abilité des données. Dans certaines situations, il arrive que l’inrmière ait des raisons de douter de la abilité des données recueillies. Par exemple, l’inrmière qui a évalué madame Bastien a appris au cours de sa formation que les victimes de violence conjugale ont souvent tendance à minimiser les gestes de leur agresseur ou à vouloir le protéger par peur de représailles. En respectant les normes légales, il serait plus prudent dans ce cas-ci que l’inrmière communique avec un membre de la famille dans le but de vérier l’exactitude de l’information recueillie. Cette méthode devient nécessaire lorsque la personne est inconsciente ou collabore peu au processus de collecte des données. 4. Distinguer le normal de l’anormal lorsque sont établis les signes et les symptômes. C’est la première étape pour déceler des problèmes, et la facilité de reconnaître cette distinction se développera avec la connaissance, la pratique et l’expérience. La PA augmentée, les sibilances (wheezing) et le soufe cardiaque sont parmi les nombreux résultats anormaux présents chez madame Bastien. Une inrmière peu expérimentée pourrait ne pas être en mesure de reconnaître correctement les bruits adventices pendant l’auscultation pulmonaire en raison d’un manque de connaissances ou d’expérience, mais ses connaissances de base en auscultation lui permettront d’exercer son jugement et de savoir que la présence de ces bruits est anormale ; elle pourra en assurer le suivi en transmettant l’information pertinente aux autres professionnels de la santé. 5. Faire les constats de l’évaluation. Il s’agit de la formulation des résultats du jugement clinique de l’inrmière sur la situation de santé du client ou sur un aspect particulier de celle-ci. C’est précisément à partir de l’analyse et de l’interprétation de toutes les données pertinentes recueillies et de sources différentes que peuvent être formulés les constats d’évaluation. Ils constituent la conclusion de l’évaluation initiale et de l’évaluation en cours d’évolution (OIIQ, 2009). Cela présente un dé, notamment pour l’inrmière peu expérimentée, puisqu’elle a besoin d’un certain bagage de connaissances scientiques et d’expériences. Ainsi, la PA de madame Bastien est-elle augmentée en raison du stress lié à la consultation ou est-ce une situation présente antérieurement ? Le soufe cardiaque, causé par un problème de valve cardiaque, entrave-t-il l’hémodynamie de la cliente ? 6. Regrouper les indices associés. Cette habileté permet à l’inrmière de relier les données. Par Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 7 exemple, l’abus d’alcool, les conséquences sociales de cet abus et l’impact sur les plans scolaire et professionnel sont un groupe d’indices qui suggèrent une consommation abusive d’alcool dans le cas de madame Bastien. 7. Déterminer les données pertinentes. Une histoire de santé et un examen physique complet fournissent une vaste quantité de données. Celles-ci seront par la suite regroupées ; les données jugées pertinentes pour aider à reconnaître un problème ou celles nécessitant un besoin d’information supplémentaire seront retenues. Cette compétence représente également un dé pour les inrmières qui amorcent leur pratique ; à cette étape, avoir un mentor clinique peut constituer une valeur inestimable. 8. Reconnaître les contradictions. Quand elle explique qu’elle s’est cognée contre une porte (données subjectives), madame Bastien soulève une contradiction ; en effet, les événements qui ont mené à sa blessure ne coïncident pas avec l’endroit où se situe l’hématome, qui est infraorbitaire (données objectives). Avec ce genre d’information, l’infirmière est en mesure de reconnaître une contradiction. Elle doit donc poursuivre son investigation an de clarier la situation. 9. Connaître les normalités. Cette habileté permet d’obtenir une vision globale (holistique) de la personne et de découvrir l’information manquante. Les connaissances de la fonction normale du cœur et des conséquences physiologiques d’un soufe cardiaque faciliteront le travail de l’inrmière au moment d’effectuer l’évaluation des problèmes qu’éprouve madame Bastien. 10. Déceler l’information manquante. Cette habileté consiste à déceler les lacunes dans les données ou de percevoir les besoins nécessitant plus d’information pour pouvoir émettre un constat d’évaluation juste et précis. Il faudra faire passer une entrevue plus approfondie à madame Bastien an d’obtenir des données témoignant d’une dépendance à l’alcool telles que des signes et des symptômes de sevrage, des résultats d’analyses de laboratoire anormaux (p. ex., un taux anormalement élevé d’enzymes hépatiques, une anémie objectivée par une formule sanguine complète). Cette habileté à déceler l’information manquante permettra à l’inrmière de mettre au jour un problème qu’il faut régler en priorité dans la situation de madame Bastien. 11. Promouvoir la santé en ciblant les facteurs de risque. Cela s’applique aux personnes généralement en bonne santé et concerne la prévention de la maladie et la promotion de la santé. Pour acquérir cette compétence, il est essentiel que l’inrmière soit en mesure de déceler les facteurs de risque pour un groupe d’âge donné ainsi que l’impact du statut culturel de la personne. L’inrmière aide le client à reconnaître les facteurs de risque et à mettre en œuvre des interventions visant leur modication. Ces choix d’intervention doivent idéalement être 8 Partie 1 Évaluation globale de la personne faits en respectant les volontés et les capacités du client, celles-ci pouvant varier dans le temps (OIIQ, 2010). Par exemple, la consommation d’alcool est l’un des facteurs de risque présent chez madame Bastien. Cette consommation entraîne des répercussions dans diverses sphères de sa vie, entre autres en ce qui concerne la conduite automobile. Son comportement de conduite en état d’ébriété implique des risques pour la santé de la cliente, mais également pour celle des autres personnes. Il est donc de la responsabilité de l’inrmière d’en discuter et de déterminer avec madame Bastien des objectifs de modication comme celui de ne pas conduire lorsqu’elle a consommé de l’alcool. 12. Cerner les problèmes réels et potentiels (risque) à partir des constats d’évaluation. 13. Établir les problèmes prioritaires et planier les soins. Dans les unités de soins intensifs, les problèmes prioritaires sont habituellement liés à la raison de l’admission. Cependant, lorsque plusieurs problèmes prioritaires ont été déterminés, l’inrmière doit établir l’ordre de priorité des actions en se basant sur la gravité du problème ENCADRÉ 1.1. Par exemple, les problèmes urgents sont traités prioritairement, car ils représentent un danger pour la vie du client et ils demandent une intervention immédiate. Il peut s’agir, par exemple, d’une obstruction des voies respiratoires, donc d’un problème d’oxygénation. Les problèmes semi-urgents représentent ceux qui sont à risque de devenir urgents. En d’autres termes, ces problèmes ont un caractère instable ou sont potentiellement létaux pour le client en cas de décompensation. Ils exigent donc une intervention prompte de la part de l’inrmière an de prévenir une détérioration ; un changement important de l’état mental, une exacerbation subite et intense d’une douleur, un problème aigu d’élimination urinaire – tel qu’une anurie –, des problèmes médicaux non traités ayant un potentiel létal – telle une urgence hypertensive –, des valeurs anormales d’analyses de laboratoire, des risques d’infection ou un danger pour la sécurité en sont des exemples. Madame Bastien présente des signes physiques anormaux qui entrent dans la catégorie des problèmes médicaux non traités. Ainsi, les bruits surajoutés au murmure vésiculaire de la cliente constituent l’un des indices permettant à l’inrmière de croire que sa fonction respiratoire pourrait décompenser. Sa PA modérément élevée représente également un indice nécessitant une surveillance particulière. Finalement, les problèmes non urgents ou électifs sont certes importants pour la santé du client, mais ils revêtent une importance moindre que ceux de type urgent ou semi-urgent. Ces problèmes seront donc abordés après la résolution de ceux que l’inrmière jugera plus urgents. Dans le cas de madame Bastien, les données génèrent les constats d’évaluation suivants : connaissances insufsantes, ENCADRÉ 1.1 1 Approche courante pour l’établissement des priorités Le traitement pour les priorités urgentes et semi­urgentes est habituellement amorcé de façon rapide, et même simultanée. Parfois, l’ordre de priorité peut changer, selon la gravité des problèmes et la relation entre eux. Par exemple, si un problème prioritaire représente un danger pour la vie, comme dans le cas d’un client éprouvant des difcultés à respirer en raison d’une douleur aiguë, le traitement de la douleur pourrait devenir la priorité pour l’infirmière. Il est important de considérer le lien entre les problèmes : en effet, si le problème Y entraîne le problème Z, le traitement du problème Y devrait être prioritaire. 1. Priorité élevée ou urgente (priorité immédiate, ne pas oublier l’ABC, soit la res­ piration (airway), le bouche­à­bouche (breathing ) et la circulation (circulation). • Problème de voies respiratoires 2. Priorité semi­urgente • Changement dans l’état mental • Douleur aiguë incontrôlable • Problème d’élimination urinaire • Problèmes médicaux non traités exigeant une attention immédiate (p. ex., un diabétique qui n’a pas reçu son insuline) • Valeurs d’analyses de laboratoire anormales • Risques d’infection (pour le client ou pour d’autres personnes) 3. Problème non urgent ou électif (priorités ultérieures) • Problèmes de santé qui n’entrent pas dans les catégories ci­dessus (p. ex., un manque de connaissances, d’activité, de repos, l’adaptation à une situation – coping – familiale) • Problème d’oxygénation • Problème cardiaque ou hémodynamique • Perturbation importante des signes vitaux mettant la vie du client en danger Source : Adapté d’Alfaro­LeFevre (2009) dynamique familiale perturbée et diminution de l’estime de soi. Les interventions pour traiter ces problèmes prioritaires se situent plus à long terme, et il faut s’attendre à ce que la réponse au traitement prenne plus de temps. Les problèmes en collaboration sont ceux pour lesquels l’approche de traitement implique d’autres disciplines. Il s’agit de certaines complications physiologiques ou psychologiques qui exigent, de la part de l’inrmière, l’évaluation de la condition physique et mentale des clients et la surveillance des changements de celle-ci (Carpenito-Moyet, 2004). Par exemple, les données concernant l’abus de consommation d’alcool noté chez madame Bastien représentent un problème traité en collaboration. En effet, dans ce cas, le retrait soudain de l’alcool a des impacts sur le système nerveux central et sur le système cardiovasculaire. L’inrmière doit donc demeurer attentive, pendant la désintoxication, aux réponses physiologiques et psychologiques de madame Bastien afin de pouvoir demander la collaboration d’autres professionnels pour corriger une situation liée à cet état. 14. Déterminer les attentes du client. Cette habileté fait référence à la relation établie entre le client et l’inrmière. Dans une situation idéale, l’inrmière devrait déterminer les objectifs avec le client, mais également explorer les attentes de celui-ci à l’égard des interventions proposées. 15. Déterminer les interventions particulières qui permettront l’atteinte des objectifs. Cela vise à prévenir, à surveiller ou à résoudre les problèmes de santé. La personne qui détermine les interventions particulières à effectuer devrait préciser, dans les directives inscrites au PTI, le moment, la fréquence et la méthode utilisée pour ces interventions et, le cas échéant, qui devrait les exécuter. 16. Procéder à l’évaluation en cours d’évolution. Cette habileté inclut les activités d’examen clinique et d’évaluation des résultats obtenus chez la personne. Cette étape consiste à établir des liens entre les données de l’évaluation initiale et les données en cours d’évolution an d’ajuster le PTI, s’il y a lieu, et à adapter ou à compléter les interventions en fonction des besoins évolutifs du client (OIIQ, 2009). Q uestion de suivi Expliquez ce qu’est un pro­ blème en collaboration et donnez­en un exemple dans le cas de madame Bastien. 17. Réaliser ou évaluer le PSTI et ajuster le PTI. Ce dernier est un document juridique qui regroupe les décisions de l’inrmière liées au suivi clinique du client. Il permet d’établir le prol clinique évolutif de la personne et de faire état du suivi clinique effectué (OIIQ, 2006). Il s’agit donc d’une responsabilité importante de l’inrmière. L’information qui s’y trouve doit être précise an de pouvoir effectuer l’évaluation et le suivi clinique du client. Le PSTI est un outil permettant la communication d’information à l’intérieur de l’équipe de soins ; il doit être aussi précis que possible, car il permet un suivi efcace du client pour l’équipe soignante. 1.2 Assises de l’exercice de la profession inrmière au Québec L’OIIQ, dans son document Perspectives de l’exercice de la profession d’inrmière, énonce quatre concepts clés qui doivent guider la profession au Québec. Ces concepts donnent une orientation de base à partir de laquelle l’évolution de la connaissance des soins inrmiers doit se faire (OIIQ, 2010). Q uestion de suivi Indiquez trois caractéristi­ ques essentielles qu’il faut préciser dans les directives (ou interventions) inrmières inscrites au PTI. 1. La personne est vue comme un tout indivisible, unique et en devenir, agissant en conformité avec ses choix, ses valeurs et ses croyances ainsi Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 9 que selon ses capacités. Elle est en relation avec les autres (personnes, famille, groupe ou collectivité) et en interaction avec son environnement. 2. La santé est un processus dynamique et continu dans lequel une personne aspire à un état d’équilibre favorisant son bien-être et sa qualité de vie. Ce processus implique l’adaptation à de multiples facteurs environnementaux, un apprentissage ainsi qu’un engagement de la personne et de la société. 3. L’environnement est un ensemble d’éléments constitutifs d’un milieu qui entrent en interaction avec la personne. Il comprend les dimensions suivantes : physique, politique et économique, spirituelle, culturelle et organisationnelle. Q uestion de suivi Dans le cas de madame Bastien, indiquez trois éléments que pourrait comprendre le concept « soins ». 4. Le soin est un processus dynamique visant le maintien, le rétablissement ou l’amélioration de la santé, du bien-être et de la qualité de vie d’une personne. Ce processus englobe l’évaluation et la surveillance de l’état de santé physique et mentale, la détermination du PTI et du PSTI, les activités liées aux soins et aux traitements inrmiers et médicaux ainsi que l’information, le conseil professionnel, l’enseignement, l’orientation et le soutien au client. Ces activités sont effectuées dans une relation de partenariat avec le client et dans le respect de ses capacités. Le partenariat sous-entend que tout client est responsable de sa santé. Lorsqu’il exprime un besoin ou une attente, l’inrmière l’invite, en tenant compte de ses capacités, à mobiliser des ressources personnelles et celles de son environnement. L’alliance inrmière-client doit s’établir dans une relation de respect mutuel et dans le partage d’un but commun. 1.3 Évaluation fondée sur des résultats probants Le miel hâte-t-il la guérison des brûlures ? Le millepertuis s’avère-t-il efcace dans le soulagement des symptômes d’une dépression majeure ? La circoncision réduit-elle les risques de transmission du virus de l’immunodécience humaine chez les hommes hétérosexuels ? Le sulfate de magnésium contribuet-il à la diminution du risque de paralysie cérébrale chez les enfants prématurés ? Une injection intracardiaque de cellules souches favorise-t-elle la guérison des tissus endommagés à la suite d’un infarctus ? Les soins de santé constituent un domaine où l’évolution des connaissances est rapide. La quantité de données probantes et d’études actuellement disponibles, tant dans le domaine médical que dans celui des sciences inrmières, est volumineuse. Ces connaissances ont permis d’afner les soins prodigués aux personnes. De meilleurs soins couplés à une volonté de diminuer les coûts liés à l’hospitalisation ont entraîné une réduction de la durée de celle-ci comparativement à autrefois. De plus, les recherches 10 Partie 1 Évaluation globale de la personne cliniques ne cessent de faire progresser le domaine des sciences inrmières. Or, il est extrêmement ardu d’arriver à suivre cette évolution et de faire le pont entre les recherches et la pratique. Par ailleurs, les diminutions de budget, la pénurie de personnel et l’augmentation constante de la charge de travail ainsi que l’acuité accrue des clients font en sorte que l’infirmière peine parfois à suivre l’évolution des sciences inrmières et biomédicales. Cependant, tous les clients doivent bénécier des meilleures pratiques cliniques actuelles. C’est d’ailleurs dans cet esprit qu’est née la pratique fondée sur des résultats probants. En 1972, Archie Cochrane, un épidémiologiste britannique et l’un des premiers défenseurs de la pratique fondée sur des résultats probants, a reconnu le besoin pressant de procéder à l’examen systématique des essais cliniques randomisés contrôlés. Dans un cas devenu célèbre, le docteur Cochrane a remarqué que de multiples essais cliniques publiés entre 1972 et 1981 ont démontré que l’administration de corticostéroïdes à la femme enceinte visant à éviter l’accouchement prématuré réduisait également les risques de mortalité du nourrisson. En effet, un court traitement à base de corticostéroïdes stimule le développement des poumons du fœtus, prévenant du même coup le syndrome de détresse respiratoire du nouveau-né, une complication grave et courante d’un accouchement prématuré. Pourtant, ces données importantes n’avaient pas été mises en évidence précédemment, et des milliers de nouveau-nés prématurés continuaient de mourir inutilement. À la suite d’un examen systématique des données cliniques effectué en 1989, les obstétriciens ont nalement pris conscience de la grande efcacité du traitement par corticostéroïdes. Depuis, il a été démontré que ce traitement réduit le risque de mortalité du nouveau-né prématuré de 30 à 50 % (Cochrane Collaboration, 2009). La pratique fondée sur des résultats probants va bien au-delà de la mise en application des meilleures pratiques dans le traitement des clients. Il s’agit d’une façon de concevoir les soins prodigués aux personnes ; cette pratique correspond à une approche systématique qui met l’accent sur la combinaison des meilleures données disponibles issues de l’expérience clinique. Elle prend également en compte les préférences et les valeurs du client en vue de prendre certaines décisions concernant sa santé (Leufer, 2009) FIGURE 1.3. Cette dénition est exhaustive et holistique. La prise de décision clinique dépend des quatre facteurs suivants : 1) les résultats probants provenant de l’examen attentif et critique de la documentation de recherche ; 2) les préférences du client ; 3) l’expertise et l’expérience du clinicien ; 4) l’examen physique et l’évaluation du client. Les habiletés et compétences en évaluation doivent donc être mises en pratique, puis perfectionnées. Bien que les compétences en jugement clinique constituent le fondement de la pratique fondée sur des résultats probants, il s’avère toutefois important de remettre en question la tradition, voire l’intuition lorsqu’il n’existe aucune preuve irréfutable pour soutenir l’action à entreprendre. D’ailleurs, certaines approches traditionnelles ont été éliminées parce que des données issues de recherche clinique n’ont pas démontré qu’elles présentaient une réelle utilité. Par exemple, l’auscultation des bruits intestinaux ne serait pas le meilleur indicateur de la reprise de la motilité gastro-intestinale chez les clients relevant d’une chirurgie abdominale (Madsen, Sebolt, Cullen et collab., 2005). L’équipe de recherche qui a soulevé cette hypothèse a tout d’abord recensé l’ensemble des études traitant du sujet. Elle a ainsi pu démontrer que le retour hâtif des bruits intestinaux n’indiquait probablement pas une reprise de la motilité normale. Les recherches portant sur le sujet ont toutefois révélé que les principaux marqueurs d’un retour à la normale de la motilité gastro-intestinale sont la présence de flatuosités ainsi que de la première défécation à la suite de la chirurgie. L’équipe de soins a ainsi instauré un nouveau protocole et a continué de surveiller les résultats des clients an de vérier si l’arrêt de l’auscultation des bruits intestinaux pouvait leur nuire. Aucun résultat préjudiciable n’a été relevé auprès des clients. Ces nouvelles lignes directrices se sont avérées sécuritaires quant au rétablissement du client et bénéques pour le personnel qui a ainsi gagné du temps. Malgré les avantages que présente la pratique fondée sur des résultats probants pour les clients, il n’est pas rare que les résultats de recherche nécessitent jusqu’à 17 ans pour être appliqués (Balas et Boren, 2000). Ce décalage a poussé les chercheurs à se pencher sur les obstacles à la pratique fondée sur des résultats probants, tant pour les praticiens que pour les organisations. Sur le plan individuel, les inrmières ont des lacunes en compétences de recherche en vue d’évaluer la qualité des études, elles sont également isolées des collègues qui en connaissent beaucoup sur le sujet et n’ont pas sufsamment conance en elles pour les inclure dans le processus permettant l’acquisition des connaissances (DiCenso, Guyatt et Ciliska, 2005). Toutefois, les obstacles les plus importants proviennent des éléments organisationnels des milieux de soins. En effet, les inrmières peuvent manquer de temps pour faire de la recherche. Elles peuvent ne pas recevoir le soutien adéquat de l’établissement lorsqu’elles souhaitent apporter des changements dans les soins prodigués aux clients. Favoriser une culture axée sur la pratique fondée sur des résultats probants dans les études de premier, de deuxième et de troisième cycles est l’une des façons par lesquelles des mentors pourront faire de cette pratique un standard de référence. D’ailleurs, les étudiants 1 FIGURE 1.3 Pratique fondée sur des résultats probants en sciences inrmières ont maintenant facilement accès aux différents moteurs de recherche scientique et peuvent faire l’examen critique des résultats de recherche. De plus, ils apprennent à reconnaître les interventions les plus bénéques pour leurs clients. Sur le plan organisationnel, faciliter le soutien à la pratique fondée sur des résultats probants signie de prévoir du temps pour la consultation d’études à la bibliothèque ; d’enseigner la façon de mener une recension des écrits ; de planier des réunions d’un club de lecture, le cas échéant ; de former un comité de recherche inrmière ; de faire le pont entre le personnel et les chercheurs universitaires ; et de s’assurer que la bibliothèque comprend une quantité adéquate de revues scientiques et de ressources dont le contenu a été prétraité (DiCenso et collab., 2005). Si les soignants ne sont pas en mesure de mettre de l’avant des pratiques fondées sur des résultats probants incluant un contexte de soins empreint de compassion, d’ouverture culturelle et de respect à l’égard des clients et de leur famille, les soins inrmiers faillissent gravement à leur principale mission, soit celle d’offrir des soins sécuritaires, efcaces, holistiques et spirituels qui répondent aux besoins biologiques, psychologiques et sociaux de ceux qui en ont besoin (Melnyk et Fineout-Overholt, 2005). Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 11 1.4 Q uestion de suivi Dans le cas de madame Bastien, quel type de collecte de données avez-vous effectuée ? Au moment de mettre sous presse, la loi 10, Loi modiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales (Québec), remplaçait les Centres de santé et de services sociaux (CSSS) par les Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS). Types de collecte de données selon l’entrevue Selon la situation clinique, l’inrmière peut recueillir les données selon quatre types d’entrevue : 1) l’entrevue initiale (complète); 2) l’entrevue en cours d’évolution (épisodique) ou centrée sur un problème ; 3) l’entrevue en situation de suivi ; 4) l’entrevue en situation d’urgence. médecin ou l’inrmière. L’information additionnelle sur la perception que le client a de sa maladie, sur sa capacité ou ses modes de fonctionnement, ses activités de la vie quotidienne, ses habiletés d’adaptation (coping), sa réaction à ses problèmes de santé, ses modes de communication et ses objectifs pour sa santé est recueillie spéciquement par l’inrmière. Cette démarche complète la collecte de données à partir de laquelle les problèmes prioritaires seront déterminés. 1.4.1 1.4.2 Collecte de données en entrevue initiale (complète) Cette collecte de données inclut une histoire complète de santé et un examen physique. L’état de santé actuel et antérieur du client y est décrit, et ces données constituent la base à partir de laquelle tous les futurs changements pourront être mesurés. Cela conduit l’inrmière à déterminer les premiers constats de l’évaluation. Dans les soins de première ligne, la collecte de données initiale doit être complète ; elle s’effectue dans une unité de soins de santé primaire telle qu’une clinique pédiatrique ou de médecine familiale, par les inrmières à domicile ou dans les CSSS. Les professionnels de la santé qui travaillent dans ces établissements sont les premières personnes que le client consulte, et ils ont la responsabilité d’assurer le suivi de son état de santé. Chez une personne qui n’est pas malade, cette collecte de données doit décrire son état de santé, sa perception de la santé, ses forces ou ses capacités (p. ex., ses comportements à l’égard de sa santé), ses habiletés d’adaptation, son système de soutien, ses tâches liées au développement et tous les facteurs de risque ou les changements dans ses habitudes de vie. Chez la personne malade, la collecte de données inclut également une description de ses problèmes de santé, de son adaptation à ceux-ci et de sa perception de la maladie. Tant chez les personnes en santé que chez les personnes malades, la collecte de données complète est réalisée pour dépister les pathologies, tout comme la façon dont les clients réagissent à celles-ci ou à un problème de santé. Cette étape de dépistage s’avère essentielle, car les professionnels des soins primaires sont généralement les premiers, sinon les seuls, à voir le client. Ils peuvent ensuite, au besoin, le diriger vers un autre professionnel de la santé ou l’aider à prendre des décisions et à se traiter de façon appropriée. Cette collecte de données consigne également les réactions de la personne à ses problèmes de santé. Cet élément important fournit de l’information additionnelle au sujet de la personne et peut mener au dépistage de problèmes potentiels. Dans les centres hospitaliers de soins aigus, la collecte de données complète se fait après l’admission du client. Dans ces centres, les données propres à la pathologie sont recueillies par le 12 Partie 1 Évaluation globale de la personne Collecte de données en cours d’évolution (épisodique) ou centrée sur un problème Cette approche est utilisée dans le cas d’un problème particulier ou présent pendant une courte période. Ici, l’inrmière effectue une collecte de données plus succincte, mais plus précise que la collecte de données initiale. Elle s’intéresse principalement à un seul problème, à un indice complexe ou à une partie du corps. Cette collecte de données est réalisée dans tous les établissements de soins, qu’ils soient de première ligne ou de longue durée. Par exemple, pendant les deux jours suivant sa chirurgie, une personne hospitalisée a soudainement une toux grasse, de la dyspnée et de la fatigue. L’examen clinique, incluant l’histoire de santé et l’examen physique, se concentrera principalement sur les systèmes respiratoire et cardiovasculaire. Il peut aussi s’agir d’une personne qui se présente dans une clinique ambulatoire avec une éruption cutanée. L’examen clinique sera ciblé sur ce problème d’éruption cutanée, pour déterminer si elle est chronique ou aiguë, associée à de la èvre, localisée ou généralisée. Les données de l’examen clinique devront donc inclure une description complète de l’éruption. 1.4.3 Collecte de données en situation de suivi L’état d’une personne relatif à ses problèmes de santé devrait être réévalué à intervalles réguliers et appropriés. Des changements se sont-ils produits ? Le problème s’est-il amoindri ou accentué ? Quelles stratégies d’adaptation la personne emploie-t-elle ? Tous les établissements utilisent ce type de collecte de données, que ce soit pour un suivi à court terme ou à long terme. 1.4.4 Collecte de données en situation d’urgence En situation d’urgence, la collecte des données est accélérée, souvent effectuée en même temps que les mesures de réanimation. Le diagnostic doit être rapide et sûr. Par exemple, à l’urgence d’un centre hospitalier, une consommation abusive de drogues est suspectée chez une personne. Les premières questions à lui poser seront les suivantes : « Qu’avez-vous pris ? » « Combien en avez-vous pris ? » « Quand en avez-vous pris ? » Pendant que la personne est interrogée, ses voies aériennes, sa respiration, sa circulation, son état de conscience et ses incapacités sont simultanément évalués. Bref, la collecte de données en situation d’urgence exige une rapidité qui n’est pas nécessaire pendant une collecte en cours d’évolution (épisodique) 4 . 1.5 Élargissement du concept de santé L’évaluation initiale vise à déterminer le prol actuel de la situation de santé de la personne, en recueillant par divers moyens (p. ex., l’état de santé actuel, les antécédents personnels et familiaux – génogramme et écocarte –, l’histoire psychosociale, la revue des systèmes, l’examen physique, les outils d’évaluation standardisés, des examens paracliniques) les données de base pertinentes. Par la suite, il est important d’en faire l’analyse et l’interprétation. Il importe également d’avoir une conception claire de la santé, car celle-ci aide à choisir les données d’évaluation qui devraient être regroupées. Généralement, l’ampleur de la liste des données recueillies est proportionnelle au concept de santé qu’entretient l’inrmière. Le modèle biomédical domine en Occident, où la santé est perçue comme une absence de maladie. La santé se situe à l’opposé de la maladie, ces deux concepts se trouvant aux extrémités d’un continuum linéaire. Dans cette idéologie, les maladies sont provoquées par des agents pathogènes. Le modèle biomédical repose sur la détermination des causes de la pathologie, le traitement des agents pathogènes et la guérison de la personne. Les facteurs d’évaluation sont donc dirigés vers une liste de signes et de symptômes associés à chaque pathologie. La personne est déclarée en bonne santé quand ces signes et symptômes sont éliminés. Quand une maladie se manifeste, le diagnostic médical sert à la reconnaître et à en expliquer la cause. L’ENCADRÉ 1.2 explique la distinction entre le diagnostic médical et le constat d’évaluation. Le diagnostic et le traitement de la maladie occupent une place importante dans le système de santé québécois. Mais le modèle biomédical a des limites. Il s’agit d’un concept développé dans les années 1950. Aujourd’hui, la santé est envisagée dans un contexte plus vaste qui ne fait plus gure de continuum linéaire. En d’autres termes, une personne pourrait se considérer comme en santé tout en étant atteinte d’une maladie. C’est à la suite de ce changement de paradigme que les habitudes de vie personnelle et sociale, l’exercice physique, la nutrition et l’environnement ont suscité un intérêt grandissant. La notion de bien-être a remplacé celle de santé. Le bien-être est un processus dynamique et continu, une sorte de mouvement vers un degré de fonctionnement optimal. Le but de la pratique inrmière au Québec est justement de rendre la personne apte à prendre en charge sa santé selon ses capacités et les ressources que lui offre son environnement, à toutes les étapes de sa vie et quel que soit le stade de sa maladie, le cas échéant, an d’atteindre un état de bien-être. En effet, elle vise à rendre la personne capable d’assurer son bien-être et de maintenir une bonne qualité de vie. 1 4 Le questionnaire AMPLE est présenté de façon détaillée dans le chapitre 4, Regard global sur l’histoire de santé. Le bien-être est une expérience subjective et multidimensionnelle résultant d’une harmonie entre les aspirations de la personne, les gestes qu’elle fait pour favoriser sa santé et son environnement. La qualité de vie est un principe important, et l’inrmière doit mettre à prot les ressources personnelles du client et celles de son environnement pour l’accroître. Elle amène le client à exprimer ses besoins à cet égard et à donner un sens à sa situation de santé. Les professionnels de la santé contribuent donc à maximiser le potentiel du client et à l’assister pour qu’il atteigne un état de bien-être optimal. La considération de la personne comme un être à part entière constitue l’essence même de la santé holistique. Celle-ci englobe l’âme, le corps et l’esprit, qui sont interdépendants et qui évoluent dans un ensemble appelé environnement. La santé dépend de toutes ces entités réunies. La maladie tire sa source de plusieurs origines, soit de la personne ou de l’environnement externe. Le traitement de la maladie exige donc l’intervention de nombreux professionnels de la santé. Les lignes directrices mettent l’accent sur le lien entre le comportement de la personne et sa santé. Un rapport de Statistique Canada (Statistique Canada, 2012) afrme que la majorité des décès survenant avant l’âge de 65 ans est évitable. La prévention revêt donc une importance particulière. Elle se fait avec l’aide des services de première ligne ENCADRÉ 1.2 Distinction entre diagnostic médical et constat d’évaluation Le diagnostic médical est employé pour évaluer l’étiologie (cause) de la maladie d’une personne et prescrire un traitement approprié. Le constat d’évaluation est utilisé pour associer le problème de santé à une cause et pour évaluer la réponse de la personne à ses problèmes de santé réels ou potentiels. Le constat d’évaluation est également au cœur du suivi clinique et permet de documenter les réactions du client au traitement dans le PTI. Par exemple, autant l’inrmière qui a évalué madame Bastien que le médecin qui l’a vue plus tard ont entendu les murmures vésiculaires diminués et les bruits surajoutés pendant l’auscultation pulmonaire. Il s’agit d’un problème médical, mais aussi d’un problème relevant du domaine infirmier. Le médecin ausculte la personne pour diagnostiquer la cause des bruits anormaux (dans ce cas-ci, l’asthme) et pour prescrire le traitement médical approprié. L’infirmière ausculte la cliente pour détecter les bruits anormaux, surveiller sa réponse au traitement et entreprendre des mesures de soutien et d’enseignement. Par exemple, elle peut enseigner à madame Bastien les mesures comportementales qui peuvent l’aider à cesser de fumer et lui recommander d’entreprendre un programme d’exercice physique pour améliorer sa capacité pulmonaire. Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 13 qui axent leurs interventions sur le changement des habitudes de vie de la population, le tabagisme, l’alcoolisme et l’usage de drogues, le manque d’exercice, l’alimentation déciente et les infections transmissibles sexuellement et par le sang. La prévention est donc un concept plus large et plus dynamique de la santé. La promotion de la santé passe par un ensemble d’actes positifs que chacun peut faire. Dans cette optique, l’objectif des professionnels de la santé est d’aider la personne à appliquer les choix qu’elle a faits en respectant ses capacités, celles-ci pouvant varier dans le temps. Les soins inrmiers font appel à plusieurs aspects du modèle holistique – l’interaction de l’esprit et du corps, l’unicité et l’harmonie du client. La personne, la santé, l’environnement et les soins sont des systèmes ouverts, dynamiques et en état d’adaptation continuelle, tous liés les uns aux autres. Chaque personne est responsable de son état de santé et devient une participante active à ses soins. La promotion de la santé et la prévention de la maladie se situent donc au cœur même des soins inrmiers. Dans le modèle holistique, les facteurs utilisés pour l’évaluation sont élargis pour inclure des éléments tels que la culture et les valeurs, la famille et les rôles sociaux, les comportements de la personne à l’égard de ses soins, le stress lié au travail, les tâches développementales, les frustrations et les échecs de vie. Tous ont une inuence importante sur la santé. 1.6 Évaluation à toutes les étapes de la vie L’évaluation de l’état de santé est importante à toutes les étapes de la vie. D’abord, connaître les tâches développementales prévues pour chaque groupe d’âge permet à l’inrmière de cibler quels sont les comportements physique, psychosocial et cognitif auxquels elle peut s’attendre de chaque personne. Ensuite, une fois qu’elles sont apprises, les compétences pour effectuer l’évaluation deviennent plus signicatives si elles sont considérées dans une perspective développementale. La maîtrise des habiletés de communication permet de recueillir des renseignements pertinents pour compléter l’histoire de santé, et ce, en tenant compte du développement de la personne à toutes les étapes de sa vie. 9 Dans le chapitre 9, Questionnaire général, mesure des signes vitaux, la gure 9.18 présente un graphique illustrant la PA moyenne chez des personnes apparemment en bonne santé de la naissance à l’âge avancé. 14 Partie 1 L’examen physique est également plus révélateur quand les données propres à l’âge sur les plans de l’anatomie, des résultats normaux et anormaux sont prises en compte. Par exemple, une PA systolique normale moyenne pour une femme de l’âge de madame Bastien est de 115 à 125 mm Hg 9 . Pour chaque groupe d’âge, une approche holistique d’évaluation de la santé mène à une Évaluation globale de la personne orientation vers la promotion de la santé et du bienêtre. Il faut apprendre à travailler avec les forces de la personne. Que fait-elle déjà qui favorise sa santé ? Quel enseignement l’inrmière peut-elle lui donner an qu’elle puisse augmenter son bien-être ? Particularités culturelles et génétiques Dans un modèle de santé holistique, les facteurs d’évaluation doivent inclure la culture. Selon les estimations de Statistique Canada (2013a), la population canadienne dépasse les 35 millions de personnes ; celle du Québec dépasse les 8 millions. L’enquête nationale auprès des ménages de 2011 (Statistique Canada, 2013b) révèle que la population compte plus de 200 origines ethniques, incluant les groupes culturels associés aux peuples autochtones du Canada. Les origines les plus souvent déclarées comptent les Anglais, les Français, les Écossais, les Irlandais, les Allemands, les Chinois, les Italiens, les Amérindiens, les Ukrainiens et les Hollandais. Au Canada, 1 personne sur 5 appartient à une minorité visible, soit 19,1 % de la population. Selon cette enquête, en 2011, près de 6 264 800 personnes faisaient partie des minorités visibles. À titre de comparaison, le recensement de 2006 avait dénombré 5 068 100 personnes appartenant à ce groupe, soit 16,2 % de la population totale de l’époque (Gouvernement du Canada, 2013). L’augmentation de la population issue des minorités visibles est attribuable en grande partie au nombre d’immigrants qui sont arrivés au Canada en provenance de pays non européens au cours des dernières décennies. Depuis 2006, les Sud-Asiatiques ont devancé les Chinois pour devenir le groupe de minorités visibles le plus important au pays. Pendant sa carrière, l’inrmière peut avoir à évaluer des personnes issues de plusieurs groupes ethniques différents, soit des visiteurs et des étudiants étrangers, des membres de la famille de diplomates, des immigrés, des réfugiés. Un problème sérieux se pose toutefois, car on s’attend à ce que les professionnels de la santé connaissent et comprennent les besoins en matière de santé des personnes de milieux culturellement diversiés, sans avoir reçu de formation pertinente en cette matière. L’inrmière se doit d’agir de concert avec le client an de respecter celui-ci dans ses croyances et ses valeurs et d’obtenir sa collaboration dans la dispensation des soins. L’ensemble de ces mesures a principalement pour but de satisfaire les besoins du client. L’inclusion de l’héritage culturel dans l’évaluation de santé est d’une importance primordiale pour recueillir des données précises et signicatives et ainsi intervenir avec une attitude appropriée selon la culture. Les membres de certains groupes culturels exigent que leur culture et leurs croyances soient respectées et que les soins offerts en tiennent compte. Étant donné la composition multiculturelle du Canada et l’augmentation projetée du nombre de personnes issues de milieux culturels divers, la connaissance des croyances interculturelles et des coutumes de ces personnes devient de plus en plus importante dans le domaine inrmier. 1.7 Évaluation dans la pratique avancée Cette attention portée aux étapes de la vie, à l’holisme et à la diversité culturelle n’enlève rien à l’importance des habiletés d’évaluation. Celles-ci doivent être mises en pratique et rafnées jusqu’à l’atteinte d’un haut niveau de compétence (inrmière d’expérience). Dans beaucoup de communautés, l’inrmière est la première professionnelle de la santé – et souvent la seule – qui rencontre un client. Au centre ENCADRÉ 1.3 hospitalier, l’inrmière est aussi la seule professionnelle qui côtoie continuellement la personne. Les efforts continuels pour diminuer les coûts du système de santé entraînent, chez la population hospitalisée, des besoins en matière de soins de santé grandissants, des hospitalisations raccourcies et des congés plus précoces que dans le passé. Cette situation demande une évaluation plus rapide et efcace par l’inrmière. Des procédures qui exigeaient un séjour de plusieurs jours en centre hospitalier (p. ex., une chirurgie pour hernie inguinale, l’insertion d’un cathéter veineux central pour l’alimentation parentérale totale) sont maintenant effectuées en chirurgie d’un jour. En conséquence, des inrmières visitent des personnes à domicile pour l’évaluation en cours d’évolution et effectuent ainsi le suivi. Ces situations exigent, de la part de l’inrmière, des compétences en évaluation auxquelles sont intégrées une approche holistique et une connaissance des problèmes propres à l’âge des clients. L’ENCADRÉ 1.3 explique le rôle de l’inrmière praticienne spécialisée (IPS) au Québec. 1 Holisme : Système de pensée pour lequel les caractéristiques d’un être ou d’un ensemble ne peuvent être connues que lors­ qu’on le considère et l’appré­ hende dans son ensemble, dans sa totalité, et non pas quand on en étudie chaque partie séparément. Rôle de l’inrmière praticienne spécialisée Au Canada, depuis les années 1990, et au Québec, depuis 2003, le rôle de l’inr­ mière praticienne spécialisée (IPS) s’est accru. Cette modernisation du système professionnel vise à utiliser de façon optimale les compétences de chacun et constitue une occasion pour réorganiser les soins et les services dans un objec­ tif de qualité et d’accessibilité. L’IPS est une inrmière qui, par son savoir appro­ fondi, ses compétences spécialisées et son rôle élargi d’experte clinique, assure aux clientèles dont elle assume la charge les interventions de soins, d’enseigne­ ment et de soutien requis par leurs besoins particuliers, et ce, en faisant preuve d’un jugement clinique et d’une pensée critique. Elle effectue un travail de colla­ boration avec le médecin traitant et les autres professionnels de la santé (Durand et Maillé, 2013 ; OIIQ et Collège des médecins du Québec [CMQ], 2006). Elle intervient principalement de façon directe auprès des clients et de leur famille dans une proportion de 60 à 75 % de son temps et de façon indirecte auprès des inrmières à titre d’experte clinique et de consultante, tout en ayant aussi des fonctions d’éducation et ultimement de recherche. En plus de son rôle d’infirmière, elle exerce aussi des activités relevant du domaine médical : la prescription de médicaments ou d’autres substances, d’exa­ mens paracliniques et de traitements médicaux ainsi que l’utilisation de tech­ niques diagnostiques ou thérapeutiques, ou de traitements médicaux effractifs ou comportant des risques de préjudice. L’IPS est une inrmière qui dispense, selon une approche globale et syner­ gique, des soins inrmiers et des soins médicaux qui répondent aux besoins complexes des patients et de leur famille dans un domaine de spécialité, en tenant compte de leur expérience en matière de santé. Pour ce faire, elle doit posséder l’expertise dans un domaine clinique spécialisé qui repose à la fois sur une solide expérience dans le domaine et sur une formation de deuxième cycle en sciences inrmières et en sciences médicales. (OIIQ et CMQ, 2006, p. 9) Les IPS contribuent, par la même occasion, au développement et à l’épanouis­ sement de la profession inrmière. Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Indiquez, pour chaque énoncé, le type de collecte le plus approprié à la situation. a) Un homme est amené par les ambulanciers pour une intoxication à la cocaïne. b) Une cliente hospitalisée depuis cinq jours pour pneumonie se plaint de dyspnée. c) Vous recevez une mère et sa lle pour un bilan de santé. 3. Quels éléments faut­il ajouter à ceux­ci si la per­ sonne est aux prises avec un problème de santé ? d) Un homme que vous suivez depuis deux ans de façon régulière pour la gestion de son diabète se présente à son rendez­vous de contrôle. 4. Quels sont les quatre concepts clés qui doivent guider la profession inrmière au Québec ? 2. Quels éléments devez­vous évaluer au cours d’une collecte de données en entrevue initiale (complète) chez une personne en santé ? 5. De quelle façon devez­vous effectuer les activités professionnelles qui découlent de ces quatre concepts an d’en maximiser la portée ? Chapitre 1 Évaluation et jugement clinique 15 Dossier : Noélie Faustin Noélie Faustin, âgée de 50 ans, est hospitalisée pour une douleur abdominale qui perdure depuis environ une semaine. Elle vient d’un petit village rural au nord d’Haïti d’où sont originaires ses ancêtres. Ses parents étaient la troisième génération d’agriculteurs, et elle est la cadette d’une famille de six enfants. Elle demeure au Canada depuis environ cinq ans. Elle s’est présentée à l’urgence ce matin sur l’insistance de sa fille qui était très inquiète au sujet de l’état de sa mère. 2 Elle ne parle que quelques mots de français, sa langue maternelle étant le créole. Au cours de l’entrevue, vous avez appris que la douleur est très vive et qu’elle se situe au QID ainsi qu’au QIG. Elle a la diarrhée depuis 5 jours et a perdu environ 4,5 kg au cours du dernier mois. Vous observez également une rougeur oculaire. Madame Faustin est inquiète, et elle prie à plusieurs reprises durant la journée avec son chapelet. Vous observez aussi dans sa chambre une photo d’un saint catholique et divers artéfacts issus de la religion vaudou. Le Canada, comme les États-Unis et de nombreux autres pays occidentaux, devient de plus en plus diversié, non seulement à cause de la mondialisation et de l’immigration, mais aussi parce que se côtoient une variété de sous-cultures et qu’une multitude de styles de vie s’acceptent mutuellement. Lorsqu’elle rencontre une personne pour la première fois, l’inrmière doit donc se poser plusieurs questions. D’où vient cette personne ? De quelle origine ethnique est-elle ? Quel est son héritage culturel ? De quelle religion est-elle ? Quel genre de vie mène-t-elle ? Cette personne comprend-elle, parle-t-elle et lit-elle le français ? Sinon, quelle langue utilise-t-elle ? Quelles sont les croyances et les coutumes de cette personne en matière de santé et de maladie ? L’inrmière doit aussi s’interroger elle-même an de bien se connaître, tant sur les plans de ses origines, de son héritage ethnique, culturel et religieux et de ses compétences linguistiques que sur celui de ses propres croyances en matière de santé et de maladie. Au cours de sa formation professionnelle, l’inrmière étudie les tâches développementales et les principes de la promotion de la santé à tous les âges de la vie ; elle apprend également à réaliser de nombreuses évaluations : une histoire complète de santé, une évaluation de la santé mentale, de la violence familiale, de l’alimentation et de la douleur ainsi qu’un examen physique complet d’une personne. Toutefois, selon l’héritage – au sens large – de cette personne, il peut y avoir un écart important entre l’information recueillie au cours de l’évaluation et les données obtenues pendant l’examen physique. Il est donc important que l’inrmière possède une compétence culturelle, c’est-à-dire qu’elle ait une connaissance de l’héritage culturel, de la langue à utiliser ainsi que des croyances et des coutumes en matière de santé et de maladie de la population à qui elle devra prodiguer des soins de santé FIGURE 2.1. FIGURE 2.1 L’inrmière développe une compétence culturelle au cours de son expérience professionnelle. 2.1 Prol démographique canadien L’estimation de la population par Statistique Canada en janvier 2014 est d’un peu plus de 35 millions de personnes (Statistique Canada, 2014a). Environ une personne sur cinq est immigrante, et parmi les immigrants, une personne sur six est allophone. En effet, depuis le recensement de 2001 – et comme le conrment les recensements de 2006 et 2011 –, le Canada est une société de plus en plus multilingue, mais le portrait linguistique diffère d’un océan à l’autre. Or, si le Canada accueille depuis longtemps des groupes en provenance de l’Allemagne, de l’Italie, de la Pologne, de l’Ukraine et des pays néerlandais, depuis 1996, ce sont les personnes originaires des Chapitre 2 Santé : État de complet bienêtre physique, mental et social qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou de handicap. Maladie : Altération objective de l’état de santé se dénissant par une cause, des symptômes, des signes cliniques et paracliniques, une évolution, un pronostic et un traitement. Allophone : Au Canada, se dit d’une personne dont la langue maternelle n’est ni le français ni l’anglais. Compétence culturelle : les soins selon la culture 17 pays de l’Asie et du Moyen-Orient qui ont enregistré les gains les plus importants sur le plan de l’immigration au Canada. Le taux de croissance démographique canadien est le plus élevé de tous les pays du G8, surpassé seulement par celui des États-Unis, surtout à cause de l’accroissement migratoire. L’âge moyen de la population totale en 2005 se situait autour de 36 ans, mais celle-ci vieillit. En effet, le recensement de 2011 note une augmentation de plus de 14 % de la population âgée de 65 ans et plus, ce qui la porte à plus de 5 millions de personnes. La population canadienne connaît donc un vieillissement important en nombre et en rapidité (Statistique Canada, 2012a). Par ailleurs, parmi les Canadiens d’origine italienne ou grecque, 1 personne sur 5 est âgée de 65 ans et plus. Le prol linguistique du Canada s’est beaucoup diversié au gré des dynamiques régionales d’immigration. Selon les données du recensement de 2011, les trois langues (non ofcielles) les plus utilisées à la maison sont l’arabe, suivi de l’espagnol et de l’italien. Dans la région d’Ottawa et de Gatineau, on retrouve un prol similaire à celui de Montréal, à la seule différence que le chinois remplace l’italien comme troisième langue non ofcielle la plus parlée à la maison. À Toronto, le cantonais (chinois parlé dans le sud de la Chine), le pendjabi (Inde) et le mandarin étaient les langues non ofcielles les plus utilisées par les populations migrantes de la région. Dans l’ouest du pays, les langues orientales gurent généralement parmi les langues les plus parlées. À Vancouver, le pendjabi arrive au premier rang suivi du cantonais et du mandarin. À Calgary, le recensement de 2011 place le pendjabi au premier rang des langues non ofcielles utilisées à la maison suivi du tagalog (Philippines) et du mandarin. Enn, pour ce qui est de la ville d’Edmonton, le tagalog arrive au premier rang, suivi du pendjabi et du mandarin (Statistique Canada, 2012b). Selon Statistique Canada (2012b), 1 Canadien sur 5 appartient à une minorité visible, soit 6,2 millions de personnes. Ce terme pourrait perdre son sens si la tendance se maintient, car dans certains villes canadiennes, par exemple à Toronto, la majorité blanche est en voie de devenir minoritaire. La fertilité des allophones demeure la principale source de croissance démographique dans les provinces les plus populeuses (Québec, Ontario, Colombie-Britannique et Alberta). Parmi les personnes âgées de moins de 15 ans, 15 % sont issues de parents chinois, 24 % de parents pendjabi et 3 % de parents italiens. Néanmoins, sur le plan de la langue, 9 personnes sur 10 déclarent parler le français ou l’anglais à la maison ; au Québec, près du tiers des anglophones ont un conjoint francophone. 18 Partie 1 Évaluation globale de la personne 2.2 Immigration Les immigrants sont des personnes qui habitent au Canada, mais qui n’y sont pas nées. À ce titre, en 2011, le Canada comptait plus de 6,5 millions de résidents nés à l’étranger. « Le xxe siècle a connu le plus de mouvements d’immigration de son histoire. » (Fix et Passel, 2001, p. 1) Au Canada, six personnes sur dix ont été admises à titre d’immigrants économiques en 2009 (Statistique Canada, 2012a). Toutefois, avec les nouvelles orientations canadiennes en cette matière (Citoyenneté et Immigration Canada, 2014), ce programme particulier d’immigration économique est appelé à disparaître. Or, si le mouvement migratoire ne semble pas près de s’arrêter, la question du nombre de personnes à accueillir se pose autant au Canada qu’aux États-Unis. Les besoins de main-d’œuvre et le souci de croissance sont au cœur du débat au Canada, car le taux de natalité ne permet pas à la population de se maintenir et de se renouveler en dépit de la légère augmentation des naissances constatée au cours des dernières années au Québec. Selon le bilan démographique de l’Institut de la statistique du Québec (2013), on dénombre un ux migratoire d’environ 55 000 nouveaux arrivants dans la province pour la seule année 2012, avec un taux de rétention d’environ 80 %. Au Québec, les dernières vagues d’immigration proviennent notamment de la Chine, de la France et d’Haïti. Dans un contexte de services de santé, des questions d’intérêt s’entrecroisent : quel sera l’effet de l’immigration sur la prestation des services de santé et sur la pratique des soins inrmiers ? Comment le système de santé et les soins inrmiers se rejoignentils pour répondre aux besoins de populations d’origines culturelles et ethniques variées ? Les questions sociopolitiques sont très souvent soulevées dans ce segment de la population quant aux droits aux services de santé et à l’éducation. Bien qu’au Canada ces services soient en partie publics, leur accès dans une langue que les immigrants comprennent sans avoir recours à une tierce personne (famille ou interprète) n’est pas toujours possible. Si la scolarité est gratuite pour les enfants, l’éducation des adultes leur permettant d’accéder à un travail décent dans leur domaine de compétence ne répond pas toujours à leurs besoins dans toutes les régions du Québec et du Canada. Les professionnels de la santé côtoient plusieurs catégories d’immigrants : • les résidents permanents légaux ; • les citoyens naturalisés ; • les « sans-papiers » ; • les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes remises en liberté venant d’autres pays ; • les résidents permanents (non immigrants). De nombreux nouveaux immigrants ont une compréhension limitée des systèmes de soins de santé canadien et québécois, des services médicaux ainsi que de la pratique et des interventions en soins inrmiers modernes ; en outre, ils ne maîtrisent pas toujours les deux langues ofcielles, ce qui complique la transmission et la compréhension de l’information. Pourtant, la communication est essentielle pour pouvoir offrir des soins individualisés et répondre aux besoins de ces personnes. De plus en plus, pour les immigrants venant de pays très différents culturellement et socialement, le processus d’acculturation, que ce soit à l’école ou dans la société, s’avère difcile et douloureux. Les pertes et les changements découlant de l’ajustement à un nouveau système de valeurs, de croyances ou de rôles sociaux représentent une source de stress qui peut avoir de lourdes conséquences sur la santé. L’inrmière doit donc en être consciente. Le TABLEAU 2.1 propose une liste de facteurs de stress qui peuvent être présents durant le processus d’acculturation. 2.3 Multiculturalisme et santé au Canada et au Québec La Loi sur le multiculturalisme canadien (L.R.C. [1985], c. 24 [4 e suppl.]) a été promulguée en 1990, en réponse aux changements démographiques générés par l’immigration. Aujourd’hui, le Canada est considéré comme une terre d’accueil par excellence dans le monde, et le nombre d’immigrants n’est pas près d’y diminuer ; au contraire, il s’accentuera à l’avenir. À l’instar du Canada, les États-Unis ont publié le National Standards for Culturally and Linguistically Appropriate Services in Health Care (Ofce of Minority Health, Department of Health and Human Services, 2001, p. 7), qui énonce ces normes : « Les organisations de soins de santé devraient s’assurer que les clients reçoivent, de la part du personnel, des soins à la fois efcaces, compréhensibles et dans le respect, qui sont compatibles avec les croyances et les coutumes et offerts dans la langue de leur choix. » Entre autres à cause de ses lois, le Canada entretient la vision d’une société libre qui permet de rassembler des personnes de toutes origines – ethniques et religieuses – où les racines de chacun sont source de fierté et d’inspiration ENCADRÉ 2.1. Cet appel à la mobilisation est destiné à tous les groupes et à toutes les personnes qui ont choisi de vivre dans ce pays. En 2005, le gouvernement canadien a lancé une invitation à tous les acteurs de la société – gouvernements, organisateurs, personnes ainsi que communautés TABLEAU 2.1 Facteurs de stress durant le processus d’acculturation 2 INSTRUMENTAL / ENVIRONNEMENTAL SOCIAL / INTERPERSONNEL SOCIÉTAL • Manque de ressources nancières • Barrière linguistique • Manque d’accès aux soins de santé • Non-emploi • Manque d’éducation • • • • • • • Discrimination / Préjugés • Niveau d’acculturation • Environnement politique et historique • Statut légal Perte du réseau social Perte du statut social Conit familial Séparation Conit intergénérationnel Changement dans les rôles sexuels ethniques et ethnoculturelles – à s’engager activement dans la lutte contre le racisme en partageant à la fois les responsabilités qui s’y rattachent et les avantages qui en découlent. Il s’agit du Plan d’action canadien contre le racisme. Ces initiatives visent entre autres les objectifs suivants : • offrir des soins efcaces qui mènent à des résultats positifs et à la satisfaction de la personne ; • prodiguer des soins dans le respect de la personne et qui tiennent compte de ses valeurs, de ses préférences et de ses besoins ; • favoriser une compétence culturelle et linguistique qui résulte d’un ensemble de comportements congruents, d’attitudes et de politiques formant un système qui rassemble les professionnels de la santé et qui permet le travail dans des situations transculturelles FIGURE 2.2. 2.3.1 i Le Plan d’action canadien contre le racisme peut être consulté au http://publications. gc.ca/collections/Collection/ CH34-7-2005F.pdf. Q uestion de suivi Dans la situation de madame Faustin, nommez deux éléments dont vous devrez tenir compte an de lui offrir un traitement qui respectera ses croyances. Compétences linguistiques Selon Statistique Canada (2012a), il se parle plus de 200 langues différentes au pays. Parmi les plus récentes gurent le pendjabi, l’arabe, l’ourdou, le tagalog et le tamoul. En nombre, selon le recensement de 2011, c’est un peu plus de 6,6 millions de personnes qui s’expriment dans une « langue non ofcielle », pour reprendre la nouvelle appellation d’allophone de Statistique Canada (Statistique Canada, 2014b). Chez les peuples autochtones, la langue crie est la plus utilisée (par environ 83 475 personnes), suivie de l’inuktitut (34 110 personnes) et de l’ojibwé (19 275 personnes). Le Canada compte aussi d’importantes différences régionales quant aux langues parlées à la maison. Les réalités de la diversité culturelle et linguistique sont donc très différentes d’un océan à l’autre. Ainsi, tandis qu’à Vancouver, c’est le pendjabi, le cantonais et le mandarin qui sont les langues non ofcielles les plus courantes, à Montréal, l’arabe et l’espagnol dominent à titre de langues non ofcielles les plus parlées (Stastistique Canada, 2012a). Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 19 ENCADRÉ 2.1 Multiculturalisme et santé au Canada et au Québec : cadre juridique AU CANADA Au cours des 40 dernières années, le gouvernement du Canada s’est doté d’un cadre juridique solide composé de lois et de politiques. En regard des droits à l’égalité, la Charte canadienne des droits et libertés est sans équivoque. L’article 15. (1) de la Charte est clair : « La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques. » L’article 25 reconnaît et afrme expressément les droits existants – et ceux issus des traités – des peuples autochtones du Canada. D’autres lois ou textes complètent les positions de la Charte : • la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. [1985], ch. H-6) ; • la Déclaration canadienne des droits (S.C. 1960, ch. 44) ; • la Loi sur l’équité en matière d’emploi (L.C. 1995, ch. 44) ; • la Loi sur les langues officielles (L.R.C. [1985], ch. 31 [4e suppl.]) ; • la Loi sur le multiculturalisme canadien ; • la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (L.C. 2001, ch. 27) ; • la Loi sur la citoyenneté (L.R.C. [1985], ch. C-29). AU QUÉBEC Dans le document Rapport et recommandations sur le Plan d’action montréalais en santé publique 2003-2006 (Forum des partenaires en santé publique mis sur pied sous l’égide du Conseil régional de développement de l’île de Montréal, 2003, p. 6) découlant de l’amendement de la Loi sur la santé publique en décembre 2002, un des principes directeurs concerne l’adaptation des interventions au caractère multiculturel de Montréal et se lit ainsi : « Le caractère multiculturel de la population montréalaise doit être pris en compte dans l’élaboration et la mise en œuvre du plan d’action en santé publique. Ainsi, les programmes doivent être mieux adaptés an de répondre aux besoins des communautés ethnoculturelles. Une attention particulière doit être portée aux problèmes de discrimination et d’exclusion dont sont victimes les personnes issues de minorités visibles. » Ces principes ont été réitérés dans les formulations récentes des plans de l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal (2010). RÉFÉRENCES Agence de la santé et des services sociaux de Montréal (2010). Planification stratégique : Des priorités urbaines pour des Montréalais en santé 2010-2015. Repéré à http://publications. santemontreal.qc.ca/uploads/tx_asssmpublications/isbn9782-89510-778-1_01.pdf Forum des partenaires en santé publique mis sur pied sous l’égide du Conseil régional de développement de l’île de Montréal (2003). Rapport et recommandations sur le Plan d’action montréalais en santé publique 2003-2006. Repéré à www.santecom.qc.ca/bibliothequevirtuelle/hyperion/a37013.pdf Gouvernement du Canada (2008). Patrimoine canadien. Repéré à www.pch.gc.ca Gouvernement du Québec (2014). Loi sur la santé publique (2014). Repéré à www2.publicationsduquebec.gouv.qc. ca/dynamicSearch/telecharge.php ?type=2&file=/S_2_2/ S2_2.html (Statistique Canada, 2014c). Aux États-Unis, près de 1 personne sur 5 âgée de plus de 5 ans parle une autre langue que l’anglais à la maison. Les langues les plus courantes sont l’espagnol (62 %), le chinois (4,8 %), le français (2,1 %) et le français créole (3,5 %), l’allemand (1,8 %) et le tagalog (2,6 %). Comme au Canada, parmi les autres langues en usage figurent le vietnamien (2,3 %), l’italien (1,2 %), le coréen (1,9 %), le russe (1,5 %) et le polonais (1 %) (Statistique Canada, 2012b ; U.S. Census Bureau, 2013). FIGURE 2.2 L’inrmière développe une compétence culturelle et linguistique lui permettant de prodiguer des soins adaptés à la culture du client. En 2011, au Canada, 9,8 % de la population parlait le plus souvent l’anglais seulement à la maison, 80,0 % parlait le français seulement et 7,1 % parlait une langue non ofcielle seulement 20 Partie 1 Évaluation globale de la personne La discrimination fondée sur l’ethnie, la couleur et la nationalité d’origine revêt diverses formes et limite souvent l’accessibilité à des services de soins de santé. Selon Flores (2006), les barrières linguistiques ont des effets délétères sur la santé ; les personnes possédant une faible maîtrise de la langue disposent de ressources limitées quant aux soins de santé et présentent un risque élevé de nonadhésion au régime médical et thérapeutique. L’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (EIAC) (Statistique Canada, 2003) avait pour but de déterminer dans quelle mesure les adultes utilisent bien l’information imprimée pour fonctionner dans la société. Elle mesurait les compétences des répondants dans quatre domaines : 1) la compréhension de textes suivis ; 2) la compréhension de textes schématiques ; 3) la numératie (soit l’ensemble des connaissances en mathématiques permettant à une personne d’être fonctionnelle en société) ; 4) la résolution de problèmes. Les résultats démontrent que près de 9 millions de Canadiens (42 %) âgés de 16 à 65 ans obtiennent un score audessous du 3e niveau sur une possibilité de 10 sur le plan de la compréhension de textes suivis ou schématiques et de 4 sur 10 sur celui de la numératie. Ces compétences sont encore plus faibles chez les peuples autochtones et les immigrants qui parlent une langue autre que le français ou l’anglais. Ces résultats signifient qu’une grande proportion des immigrants vivant au pays peuvent difcilement comprendre et suivre les directives écrites de la posologie d’une ordonnance ou de celle indiquée sur le contenant d’un médicament offert en vente libre. Les personnes dont les habiletés sont limitées pour comprendre, parler, écrire et lire la langue française affrontent une multitude d’obstacles qui peuvent se solder par un accès réduit aux services médicaux et sociaux auxquels elles ont droit. De nombreux programmes de santé et de services sociaux fournissent de l’information uniquement dans la langue de la majorité. Lorsqu’elles se présentent dans les centres hospitaliers ou dans les cliniques pour obtenir des soins de santé, des personnes ayant une faible compétence en littératie se trouvent souvent en présence de réceptionnistes, d’inrmières et de médecins qui ne parlent que le français ou l’anglais. Les barrières linguistiques limitent donc sérieusement la possibilité d’accès à ces services et à ces programmes. En outre, les obstacles liés à la langue entraînent parfois des délais quant à l’offre de services, voire un refus ou une inaccessibilité ; une information inexacte ou incomplète peut aussi mener à des services inadéquats. Dans de telles circonstances, les conséquences sur la santé des personnes qui maîtrisent mal la langue de la population dominante peuvent être importantes. Certains États américains (p. ex., la Californie, le Massachusetts, l’État de New York) ont reconnu la gravité du problème et exigent des fournisseurs de services qu’ils procurent une assistance linguistique aux clients qui se présentent dans les milieux de soins de santé. En Ontario, les services de télésanté font de même. Au Canada, le Consortium national de formation en santé assure une formation postsecondaire en français dans tous les domaines de la santé, dans différentes régions, an de pouvoir desservir la population francophone résidant hors Québec. L’inrmière doit connaître les diverses façons de communiquer avec les personnes qui ne comprennent pas le français et d’interagir avec un interprète ; la présence de celui-ci est importante non seulement pour la traduction verbale des mots, mais aussi pour donner de l’information sur les aspects culturels propres à la personne 3 . 2.3.2 3 Le chapitre 3, Entrevue, présente les façons de communiquer avec des personnes dont la langue maternelle n’est pas le français, ainsi que la manière d’interagir avec un interprète. Compétence culturelle et soins adaptés à la culture Ce chapitre met l’accent sur le développement de la compétence culturelle et sur l’habileté à prodiguer des soins adaptés à la culture du client. De telles interventions ont de nombreuses facettes, présentées tout au long de ce chapitre. An de s’acquitter des mandats énoncés par les lois régissant les services de la santé, les professionnels du domaine, dont les inrmières et les médecins, se doivent d’être culturellement compétents an de prodiguer des soins adaptés à la culture de chaque personne. La culture relève du domaine de l’inconscient ; elle inuence les perceptions quant à la santé et à la maladie, et ce, autant pour le client que pour le professionnel de la santé. Comment dénir alors la compétence culturelle et de quelle façon est-il possible de l’atteindre ? La compétence culturelle implique de devenir conscient de sa propre existence, de ses sensations, de ses pensées et de son environnement pour s’ouvrir à une connaissance et à une compréhension de la culture du client, pour accepter et respecter les différences et pour adapter les soins de façon congruente à la culture de la personne (Purnell et Paulanka, 2008). Q uestion de suivi Si vous avez de l’enseignement à donner à madame Faustin en lien avec le traitement et la prévention de sa maladie, quelles mesures devrez-vous prendre quant à l’aspect linguistique ? Selon Purnell et Paulanka (2008), la compétence culturelle est un processus conscient et non linéaire, et l’évolution progressive menant à l’acquisition d’une telle compétence se divise en quatre stades. Au premier stade, l’incompétence est inconsciente, c’est-à-dire qu’il y a absence de conscientisation du manque de connaissances à l’égard de l’autre culture. Au deuxième stade, l’incompétence devient consciente et renvoie à une sensibilisation suffisante pour reconnaître le manque de connaissances relativement à la culture du client. Au troisième stade, la compétence consciente évolue progressivement vers la capacité d’apprendre et de prendre en compte des éléments de la culture d’autrui susceptibles d’être utiles aux professionnels de la santé pour concevoir des interventions culturellement adaptées. Le quatrième stade, soit la compétence inconsciente, se caractérise par l’acquisition d’automatismes culturellement adaptés à des clients de différentes cultures. Ce dernier stade est difcile à atteindre, Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 21 2 et la majorité des professionnels de la santé ne parviendront qu’à la compétence consciente. En l’absence de soins culturellement adaptés, la participation des clients à la continuité des soins est loin d’être acquise et met en péril l’efcacité des services de soins de santé. Les soins adaptés à la culture doivent être offerts avec sensibilité et compétence, de façon appropriée. Il est utile de consulter les écrits scientiques à ce propos ; les principaux éléments sont présentés brièvement dans ce chapitre. Socialisation : Processus qui permet à la personne de développer sa capacité de fonctionner de manière acceptable selon les valeurs de la société où elle évolue. • Être sensible à la culture sous-entend que les soignants possèdent une certaine connaissance de base et adoptent des attitudes constructives envers la diversité culturelle des populations rencontrées dans leur milieu de pratique. • Être sensible à la culture implique que les soignants utilisent les connaissances nécessaires acquises antérieurement an d’offrir les meilleurs soins de santé possible à une personne. • La compétence culturelle signie que les soignants comprennent la situation globale d’une personne – incluant la sensibilisation au statut d’immigrant, aux facteurs de stress, aux autres facteurs sociaux et aux similarités et différences culturelles (Spector, 2009) – et y répondent adéquatement. De plus en plus, les établissements de santé doivent avoir du personnel culturellement compétent. Cependant, cette approche ne s’acquiert pas en quelques mois ; elle se construit peu à peu au l des apprentissages et des expériences de la vie. Étant donné les changements dans le prol démographique au Canada et l’énorme impact de l’immigration sur la situation des services de santé, il devient impératif d’acquérir un ensemble de connaissances fondées sur des savoirs solides pour relever ce dé dans la pratique. Ces connaissances relèvent de plusieurs domaines : • l’héritage personnel de l’inrmière ; • l’héritage de la profession inrmière ; • l’héritage du système des services de santé ; • l’héritage personnel du client. 2.4 Héritage culturel Le patrimoine culturel d’une personne est fondé sur le concept de la cohérence de l’héritage. Estes et Zitzow (1980), en faisant référence à la culture tribale des Amérindiens, décrivent la cohérence de l’héritage comme étant le degré du reet de la culture d’une personne dans ses habitudes de vie. La théorie a été élargie pour tenter d’étudier à quel point la personne exprime son héritage traditionnel, qu’elle soit d’origine amérindienne, 22 Partie 1 Évaluation globale de la personne européenne, latino-américaine, asiatique ou africaine. Les valeurs dénotant un héritage cohérent se trouvent sur un continuum, et une personne peut posséder à la fois les valeurs caractéristiques d’un héritage cohérent (valeurs traditionnelles – c’est-à-dire selon les normes de la culture traditionnelle) et celles d’un héritage incohérent (valeurs modernes – c’est-à-dire qu’il y a acculturation aux normes de la culture dominante). Le concept d’héritage cohérent inclut la détermination des antécédents de la culture d’une personne, de son ethnie, de sa religion et de ses expériences de socialisation (Spector, 2009). 2.4.1 Culture Si tous s’entendent sur l’importance de la culture, il en va tout autrement en matière de dénition. La majorité des dénitions tendent à omettre des aspects importants de la culture ou, trop souvent, à la rendre tellement générale que le sens original s’est perdu. Par exemple, une dénition peut avancer que c’est l’amalgame des pensées, des communications, des actions, des croyances et des valeurs des groupes sociaux organisés selon l’ethnie et la religion. La culture est un tout complexe, dont toutes les composantes sont liées ; elle n’est pas innée, mais apprise. Toutefois, bien que la capacité d’apprendre la culture soit génétique, l’objet ou le domaine d’apprentissage en lui-même ne l’est pas, et il doit être appris dans la famille et par la socialisation dans la communauté. La culture dépend aussi du modèle social sous-jacent formé des connaissances, des croyances, des arts, des lois, de la morale et des coutumes. Bien que la culture se tisse au moyen d’un réseau de communications, une grande partie de celle-ci est transmise de façon non verbale (Spector, 2009). Enn, la culture comporte quatre caractéristiques : 1) elle est apprise à partir de la naissance et au l des processus d’acquisition langagiers et de socialisation ; 2) elle est partagée par tous les membres d’un même groupe culturel ; 3) elle est adaptée à des conditions liées à l’environnement, à des facteurs techniques et à la disponibilité des ressources naturelles ; 4) elle est dynamique et en changement constant. La culture est un phénomène universel sans lequel personne n’existe. Pourtant, celle qui se construit dans toute société est toujours spécique et distincte, englobant toutes les connaissances, croyances, coutumes et habiletés acquises par les membres de cette société. Néanmoins, dans une même culture, certains groupes de personnes partagent des croyances, des valeurs et des attitudes différentes de celles des autres. Ces différences découlent de l’ethnicité, de la religion, de l’éducation, de l’emploi, de l’âge et du sexe. Il s’agit alors de sous-groupes culturels. 2.4.2 Ethnicité Les antécédents culturels sont une partie fondamentale de l’origine ethnique, alors que l’ethnicité est associée à un groupe constitué à l’intérieur d’un système social qui dit posséder des traits communs, dont l’origine géographique, le statut migratoire, la religion, la couleur de la peau, la langue, les valeurs, les traditions ou les symboles et les préférences alimentaires. Le terme ethnique est souvent associé à de forts sentiments négatifs, voire à du rejet dans la population en général. Dans des pays aussi vastes que le Canada et les États-Unis, pourtant composés de nombreuses ethnies – et où les Amérindiens sont les seuls vrais natifs –, les différences ethniques et d’ethnicité demeurent parfois un sujet tabou. Les inrmières doivent être sensibles à la très grande diversité ethnique et culturelle de leur milieu. Cette connaissance sociale du milieu et cette sensibilité à la différence sont des facteurs essentiels pour la qualité de l’intervention dans le milieu, et ce, notamment pour établir des liens de conance avec les clients an qu’ils soient réceptifs aux services de santé. Il n’est pas inhabituel que les groupes minoritaires abordent les institutions publiques (associées au groupe culturel majoritaire) avec un peu de méance. On sous-estime parfois l’ampleur de la diversité. En effet, au moins 106 groupes ethniques vivent aux États-Unis, et plus de 120 sont représentés au Canada ; quant aux nations amérindiennes, il en existe plus de 500 aux États-Unis. La plupart de ces nations sont représentées au Canada ou aux États-Unis, un phénomène peu courant sur la planète (Spector, 2009 ; Statistique Canada, 2013b) FIGURE 2.3. 2.4.3 Religion Le troisième élément principal de l’héritage d’une personne est la religion. Celle-ci renvoie à la croyance en une puissance divine ou suprahumaine ou en des pouvoirs auxquels il faut se plier ou qu’il faut vénérer à titre de créateur(s) et de souverain(s) de l’Univers. Un système de croyances, de coutumes et de valeurs éthiques demeure la principale raison du développement de l’ethnicité (Abramson, 1980). La religion peut être vue soit comme une expérience de spiritualité partagée, soit comme des valeurs, des croyances et des coutumes en vertu desquelles les personnes sont élevées ou qu’elles ont adoptées pour répondre à leurs besoins personnels de spiritualité au moyen d’actions communales, dont l’afliation religieuse, l’assistance et la participation aux activités de l’institution religieuse, la prière ou la méditation et les pratiques religieuses comme telles. 2 Par ailleurs, la spiritualité peut mettre davantage l’accent sur le « soi » et inclure un système de croyances autre que la religion (Skalla et McCoy, 2006). La pratique religieuse s’exprime de différentes et de nombreuses façons : cultes, sectes, confessions et Églises. La relation entre l’ethnicité et la religion est évidente et constitue souvent le déterminant d’un groupe ethnique. La religion fournit un cadre de référence et une perspective qui guident les personnes qui y adhèrent. L’enseignement religieux à l’égard de la santé peut proposer une philosophie et un système de coutumes dictés par une forme de contrôle social dont les valeurs et les normes éthiques sont précises et spéciques. Ce contrôle est associé à la santé dans le sens où l’observance du code religieux contribue à l’harmonie spirituelle et à la santé du corps. Ainsi, la maladie est parfois perçue comme une punition découlant de la violation du code religieux et moral. La religion joue un rôle majeur dans la manière dont les personnes considèrent et effectuent leurs soins de santé. Trop souvent, cet aspect est ignoré ; dans plusieurs milieux de soins, le personnel ne pose même pas la question de l’appartenance religieuse. Pourtant, la religion fait partie de la vie, au-delà du corps et de la pensée (Levin, 2001). Les faits suivants démontrent l’inuence de la religion sur les pratiques de santé : • l’afliation et l’appartenance religieuses favorisent la santé par la promotion de comportements appropriés et de saines habitudes de vie ; • la pratique régulière dans un groupe religieux favorise la santé, car elle offre un soutien qui atténue le stress et brise l’isolement ; • la foi favorise la santé en guidant la personne vers des sentiments d’espoir, d’optimisme et d’attentes positives. FIGURE 2.3 Une multitude de groupes ethniques est représentée au Canada. Les religions encouragent la promotion de nombreux comportements favorables à la santé. Même s’ils ne sont pas représentatifs de toutes les religions, les exemples suivants en fournissent une illustration : méditer, faire de l’exercice et maintenir Chapitre 2 Q uestion de suivi Tous les soirs, madame Faustin boit un thé mé­ dicinal préparé avec des plantes de son pays d’ori­ gine que sa lle lui apporte de la maison. Comment devriez­vous réagir ? Compétence culturelle : les soins selon la culture 23 une bonne forme physique, dormir sufsamment, être vacciné, accepter de faire examiner son corps, entreprendre un pèlerinage pour des raisons de santé, dire la vérité sur son état de santé physique et mental, maintenir la viabilité de la famille, espérer la guérison, s’adapter au stress, se soumettre au dépistage génétique et au counseling, être capable de vivre avec un handicap, prendre soin des enfants (Levin, 2001). À titre de composante intégrale de la culture d’une personne, les croyances religieuses inuencent celle-ci dans l’explication des causes de sa maladie, dans sa perception, sa gravité, son choix de guérisseurs. En période de crise, telle une maladie grave mettant la vie en danger, la religion peut devenir une source de consolation pour la personne et sa famille. Les dogmes et les chefs spirituels exercent parfois une inuence considérable sur la prise de décision quant à l’acceptation du traitement médical ou chirurgical, au choix des guérisseurs et à d’autres aspects de la maladie. Religion et spiritualité La religion veut apporter des réponses aux mystères de la vie et de la mort, de la souffrance, du bien et du mal. Dans les milieux de soins, il est fréquent de rencontrer des gens qui cherchent une signication spirituelle à leurs maladies ou à leurs incapacités. Certains professionnels de la santé trouvent difcile d’aborder cet aspect pendant leur évaluation en raison du niveau d’abstraction et de la nature personnelle du sujet, alors que d’autres discutent de contenu spirituel sans aucune gêne. Il est essentiel que l’inrmière se sente à l’aise avec ses propres croyances spirituelles pour procéder à une évaluation efcace des besoins spirituels d’autrui (Andrews et Boyle, 2003). Q uestion de suivi Formulez une question que vous pourriez poser à madame Faustin pour vérier si elle accorde une signication spirituelle à sa maladie. Spiritualité : Caractéristique inhérente à l’être humain. Elle comprend communément les dimensions de sens, de transcendance, de foi et de croyance, les attitudes à l’égard de la vie et de la mort, les valeurs, les relations et l’élargissement de la conscience. 24 Partie 1 Si la religion et la spiritualité sont des facteurs qui peuvent améliorer le moral, la résilience et la volonté de guérir chez le client, elles peuvent par contre constituer un facteur de contrainte pour le personnel soignant. Les religions et la spiritualité sous-tendent des valeurs et des structures normatives qui font en sorte que les clients font face à de véritables dilemmes moraux quant à l’acceptation ou au refus de certains traitements ou de certains soins. Dans cette situation, le personnel soignant se voit également confronté à des enjeux éthiques et bioéthiques. Parmi les exemples les plus courants gurent le refus des transfusions sanguines chez les Témoins de Jéhovah et l’attitude de certains croyants à l’égard du sexe du personnel traitant. Pour les soignants, ces contraintes renvoient à des débats d’actualité en bioéthique. Il est important de distinguer spiritualité et religion. La spiritualité découle de l’expérience de vie unique de chacun et de l’effort personnel à trouver un but et une raison de vivre. Bien que toutes les religions du monde offrent des interprétations Évaluation globale de la personne variées à plusieurs des mystères de la vie, la majorité des gens en cherchent une compréhension et une interprétation personnelles à un moment ou à un autre de leur vie. Ultimement, cette quête pour découvrir un être suprême (que ce soit Allah, Dieu, Jéhovah ou Yahvé) ou une vérité unicatrice transcende vers la signication, le but et l’intégrité de l’existence. La religion est construite à partir d’un système organisé de croyances relativement à la cause, à la nature et au but de l’Univers, particulièrement la croyance en un dieu ou en plusieurs dieux. Au Canada, près de 7 personnes sur 10 s’identient comme étant catholiques romaines ou protestantes, selon les données de l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011 (Statistique Canada, 2013a). Au même moment, le nombre de Canadiens déclarant des religions telles que l’islam, l’hindouisme, le sikhisme et le bouddhisme a crû de façon importante. L’identication religieuse dans les différents groupes ethniques prend toute son importance en raison de l’interrelation entre la religion et la culture. Selon une enquête du Washington Post, la préoccupation religieuse chez les immigrants récents se traduit, pour 64 % des Noirs et pour la même proportion de Latinos-Américains, par la perception que leur Église est un moyen de préserver leur culture, comparativement à moins du tiers des Blancs (Broadway, 2001). Depuis les deux dernières décennies, un grand nombre d’immigrants proviennent de l’Asie et de l’Amérique latine. Les changements les plus marquants sur le plan religieux se situent au sein de la population asiatique, où l’on est passé de 63 % de chrétiens en 1990 à 43 % en 2001, alors que les religions asiatiques (p. ex., le bouddhisme, l’hindouisme, l’islam) ont augmenté leur présence. En effet, en quelques décennies seulement, les religions asiatiques se sont développées pour constituer près du tiers des religions pratiquées aux États-Unis, en passant de 15 à 28 % du total de croyants sur la population américaine. Pendant cette même période, le nombre d’adhérents à la religion catholique est demeuré stable (de 26 % en 1990 à 25 % en 2002) (American Religious Identication Survey 2001, 2001 ; Pew Forum on religion and Public Life, 2007). Pour plusieurs personnes, les liens entre santé, spiritualité et religion sont manifestes. À titre d’exemple, certains autels religieux, certains sites, voire certains objets personnels (statuettes, icônes religieuses) favorisent ce rapprochement entre spiritualité, santé et religion. Ces pratiques spirituelles rapprochant santé et religion se retrouvent dans presque toutes les traditions et tous les cultes religieux, que ce soit le bouddhisme, l’hindouisme, l’islam ou le christianisme. Au Québec notamment, la culture du « frère André » a laissé une marque profonde dans l’imaginaire et les pratiques religieuses des Québécois. Une visite à l’oratoire Saint-Joseph à Montréal et la vue des différents objets de cultes et témoignages de guérison peuvent sufre pour témoigner de l’importance de ce lieu chez certaines personnes. Si la tendance de l’immigration inue sur les nouveaux citoyens, aujourd’hui, l’intérêt se tourne vers les groupes amérindiens. Le profil religieux de ceux-ci ressemble à celui des Blancs non latino-américains : 20 % sont baptistes, 17 % sont catholiques, et 17 % n’afchent aucune préférence religieuse. Seulement 3 % des Amérindiens s’identient à une religion tribale, ce qui peut être le reet du nombre grandissant de ces personnes vivant dans des centres urbains hors des réserves (American Religious Identication Survey 2001, 2001). 2.4.4 Socialisation La socialisation se dénit comme le processus d’évolution au sein d’une culture et d’acquisition des caractéristiques de ce groupe en particulier. Le milieu éducationnel – primaire, secondaire, collégial, universitaire ou professionnel – fournit une forme de socialisation. Pour plusieurs personnes qui ont été socialisées à l’intérieur des frontières d’une « culture traditionnelle », la culture nord-américaine ou celle du pays d’accueil devient une seconde identité culturelle. Toutefois, pour les immigrants en provenance d’un pays de l’Est ou d’un pays en voie de développement, la socialisation à la nouvelle culture est perçue comme un processus douloureux et extrêmement difcile, que ce soit à l’école ou dans la société. Avec le temps, plusieurs adoptent le biculturalisme, qui se traduit par une double identité et souvent par une « loyauté » divisée entre la culture d’origine et la nouvelle (LaFrombose, Coleman et Gerton, 1993). En outre, plusieurs personnes qui ont été socialisées dans des milieux où les ressources traditionnelles de santé diffèrent de celles du pays d’accueil préfèrent parfois utiliser ce type de soins, même si elles ont accès à des services modernes. La perception du monde qu’a une personne dépend de sa culture, de sa religion, de son ethnie et de sa socialisation ; aucun de ces aspects ne peut être considéré de façon isolée, car ceux-ci forment un tout : la personne elle-même. D’autres termes sont liés à la socialisation et à l’héritage culturel : • l’acculturation : c’est le processus d’adaptation et d’acquisition d’une autre culture avec laquelle une personne est en contact ; • l’assimilation : il s’agit du processus par lequel une personne acquiert une autre identité culturelle et devient en ce sens semblable aux membres de la culture dominante ; • le biculturalisme : c’est une situation où il y a coexistence de deux cultures dans un même pays impliquant le contact de deux langues. Non seulement est-il primordial pour l’inrmière d’acquérir des habiletés à réaliser des évaluations de l’héritage d’une personne, mais il est également important d’apprendre ces concepts et de comprendre que ce sont les premiers pas vers l’acquisition d’une compétence culturelle. Il importe d’examiner les facteurs liés à l’héritage cohérent et de répondre aux questions concernant l’évaluation de l’héritage culturel pour la personne et sa famille. 2.4.5 Q uestion de suivi Nommez des objets personnels qui peuvent laisser croire à un rapprochement entre spiritualité, santé et religion dans la situation de madame Faustin. Orientation temporelle L’approche des gens quant à l’orientation temporelle est inhérente à la socialisation. Cet aspect demeure l’une des sources de conit le plus souvent invoquées entre les inrmières et les personnes d’antécédents culturels différents, surtout si leurs perceptions temporelles ne sont pas identiques. Selon Kluckhohn (1990), il existe trois façons différentes de percevoir le temps. 1. L’accent est mis sur le passé ; dans ce cas, les traditions et les ancêtres jouent un rôle important dans la vie de la personne. Par exemple, plusieurs Asiatiques, Amérindiens, Antillais et Africains ont une grande considération pour leurs ancêtres et valorisent les traditions ancestrales. Dans les moments de crise, dont la maladie, une personne orientée vers le passé voudra consulter ses ancêtres pour leur demander de l’aide ou pour qu’ils la guident durant la maladie. 2. L’accent est mis sur le présent ; dans ce cas, la personne n’accorde que peu d’attention au passé ou à l’avenir. Elle n’est concernée que par le « ici et maintenant », et l’avenir est perçu comme étant vague ou imprédictible. Il sera difcile d’encourager ce type de personne à planier (p. ex., le congé de l’hôpital) ou à reconnaître les futurs effets secondaires ou les réactions néfastes des médicaments. En outre, ces personnes ne voient pas la nécessité de la vaccination infantile ou du vaccin contre la grippe, l’hépatite ou d’autres affections auxquelles les adultes sont exposés. 3. L’accent est mis sur l’avenir ; le progrès et le changement prennent alors une place prépondérante dans la vie de la personne. Celle-ci peut exprimer du mécontentement quant au présent ou au passé. En matière de santé, elle veut être au courant des traitements et des équipements de pointe pour régler un problème particulier. Elle exprimera volontiers ses préoccupations à l’égard des médecins et des inrmières, qu’elle percevra peut-être comme étant dépassés. Chapitre 2 Q uestion de suivi Dans le cas de madame Faustin, de quelle façon qualieriez-vous son niveau de socialisation en lien avec l’héritage culturel ? Compétence culturelle : les soins selon la culture 25 2 2.5 Évaluation de l’héritage culturel Les facteurs suivants indiquent un héritage cohérent ; les exemples qui les accompagnent peuvent servir de guide pour déterminer l’écart entre l’héritage traditionnel et l’identité reconnue par l’inrmière et la personne, c’est-à-dire les croyances et les coutumes culturelles de la famille nucléaire, de la famille élargie et de la communauté ethnoreligieuse. 1. Le développement culturel durant l’enfance s’est déroulé dans le pays d’origine ou dans un voisinage d’immigrants du même groupe ethnique et religieux au Canada. Où la personne est-elle née ? Où a-t-elle grandi ? L’inrmière et la personne ont chacune grandi dans un environnement ethnique particulier composé, par exemple, d’Italiens, de Noirs, de Latino-Américains ou de Juifs, dans une ville ou un quartier exposé à la culture, à la langue, aux aliments et aux coutumes de ce groupe particulier. 2. Les membres de la famille élargie encourageaient la participation aux activités religieuses et culturelles traditionnelles. Les parents de la personne l’ont-ils encouragée à participer aux activités religieuses ou ethniques de son groupe ? Devait-elle se rendre, après les heures régulières d’école, à d’autres cours ou activités religieuses ? Les parents et les membres de la famille élargie et de la communauté ethnoreligieuse encourageaient la personne à connaître son héritage ethnoculturel, ils lui faisaient fréquenter une école religieuse (paroissiale), et la plupart des activités sociales étaient associées à l’Église. 3. La personne visite fréquemment son pays d’origine ou retourne dans son « ancien voisinage » au Canada. La personne a-t-elle visité le pays ou le voisinage d’origine de sa famille ? Le désir de revoir le pays d’origine ou l’ancien voisinage est exprimé par de nombreuses personnes ; cependant, plusieurs ne peuvent ou ne veulent pas y retourner pour diverses raisons. Par exemple, les gens qui sont venus ici pour échapper à la persécution religieuse ou ceux dont les familles ont été tuées durant la Seconde Guerre mondiale, pendant l’Holocauste, dans l’hécatombe du Cambodge ou au cours d’autres massacres plus récents survenus en Afrique ne souhaitent pas retourner dans leur pays d’origine. D’autres raisons peuvent expliquer ce choix : les conditions politiques dans le pays où sont nées ces personnes, l’absence d’amis ou de famille demeurée dans ce pays. 26 Partie 1 Évaluation globale de la personne 4. La maison familiale de la personne est située à l’intérieur de la communauté ethnique dont elle est membre. Qui sont les personnes vivant dans le voisinage de la demeure actuelle ? Comme adulte, la personne a élu domicile avec sa famille dans le voisinage ou la communauté où les gens partagent un héritage similaire. 5. La personne participe aux événements ethniques culturels, aux chants et aux danses typiques en arborant parfois les costumes traditionnels durant les festivals ou les fêtes nationales. La personne participe-t-elle aux célébrations de son héritage culturel ? La personne est active au sein de groupes sociaux et culturels et participe aux festivités de sa famille. Par exemple, on fête la SaintJean-Baptiste dans l’Ouest canadien, et la fête des Acadiens est célébrée en Louisiane. 6. La personne a grandi au sein de la famille élargie. Qui demeurait dans la maison avec la famille ? Était-ce de la parenté ? Lorsque la personne a grandi, les grandsparents, les oncles et les tantes demeuraient dans la même maison ou étaient très rapprochés. Le cadre de référence social de la personne était la famille immédiate et la famille élargie. 7. La personne maintient des contacts réguliers avec la famille élargie. La personne garde-t-elle des liens avec sa famille ? La personne conserve des liens étroits par des visites ou par d’autres formes de communication avec les membres de la famille de la même génération, ceux de la génération plus âgée et les membres de la génération plus jeune. Cela inclut les oncles, les tantes et les cousins. 8. Le nom de la personne n’a pas été changé pour une orthographe canadienne-française. Le nom de famille de la personne a-t-il été transformé à son arrivée au Canada ? Le nom a-t-il été changé pour faciliter l’assimilation ? Plusieurs personnes ont vu leur nom modié par un employé de l’immigration à l’entrée au pays ou l’ont fait par choix personnel pour le rendre plus « canadien » an de s’intégrer plus facilement à la culture dominante. 9. La personne a fréquenté une école confessionnelle (non publique) dans laquelle la philosophie ethnique et religieuse était semblable à celle de la culture familiale. Quelle école la personne a-t-elle fréquentée ? L’école était-elle publique ou privée ? L’éducation de la personne joue un rôle majeur dans la socialisation, et son but principal est de socialiser celle-ci selon la culture dominante. À l’école publique ou privée, les enfants apprennent entre autres le français, les coutumes et les normes de vie au Canada. Dans certaines écoles privées ou de confession religieuse, les enfants apprennent aussi le français, mais ils sont socialisés à la culture et aux normes religieuses et ethniques particulières du groupe qui subventionne l’école. 10. La personne s’engage principalement dans des activités sociales avec d’autres individus ayant les mêmes antécédents culturels et ethniques. Qui sont les amis de la personne et à quelle fréquence les voit-elle ? Par exemple, la majeure partie du temps libre d’une personne est passé dans la famille ou avec des amis de sa communauté religieuse ou ethnoculturelle. Par exemple, la personne qui s’identie comme ethnocanadienne a tendance à soutenir davantage les activités ethniques (Spector, 2009). Quatre autres questions simples peuvent fournir de l’information sur les antécédents de la personne : 11. La personne connaît la culture et la langue de son pays d’origine. 1. Participez-vous surtout à des activités sociales avec les membres de votre famille ? La personne parle-t-elle ou lit-elle la langue de ses parents ou de ses grands-parents ? 2. La majorité de vos amis a-t-elle des antécédents ethnoculturels similaires aux vôtres ? Par exemple, la personne a été socialisée à la manière traditionnelle de la famille et exprime cela comme un thème central de sa vie. 3. Mangez-vous surtout des aliments de tradition familiale ? 12. La personne exprime de la erté à l’égard de son héritage ethnoculturel. La personne s’identie-t-elle comme Canadienne ou comme Canadienne immigrée (ethnocanadienne) ? ENCADRÉ 2.2 2 L’outil Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ENCADRÉ 2.2 présente une série de questions qui peuvent être posées pour effectuer une évaluation de l’héritage. Il est important de poser les questions graduellement. Si la personne devient anxieuse, il vaut mieux s’interrompre et intégrer les questions à une partie de l’histoire de santé. Les réponses à ce questionnaire peuvent fournir une cote servant à mesurer si la personne s’identie à l’héritage traditionnel ou si elle est acculturée ou assimilée à la culture canadienne moderne dominante. Q 4. Participez-vous surtout aux traditions religieuses de votre famille ? Si la personne répond positivement à deux questions ou plus parmi celles-ci, il y a une forte probabilité qu’elle ait recours à des pratiques de santé associées à l’héritage traditionnel. uestion de suivi Comparez les données du portrait clinique de madame Faustin et les questions de l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel. Comment qualieriez-vous son héritage culturel ? Échelle d’évaluation de l’héritage culturel Les questions suivantes peuvent servir aux proches aidants pour commencer à déterminer l’héritage ethnique, culturel et religieux d’une personne et la relation personnelle à l’égard des soins traditionnels de santé. Plus l’association s’avère forte entre ces éléments et l’identication personnelle, plus l’héritage est traditionnel. 1. Où êtes-vous né ? 2. Où sont nés vos parents et vos grands-parents ? a. Mère : b. Père : c. Grand-mère maternelle : d. Grand-mère paternelle : e. Grand-père maternel : f. Grand-père paternel : 3. Combien de frères et de sœurs avez-vous ? 4. Dans quel type de milieu avez-vous grandi ? Urbain / Rural / Banlieue. Où ? 5. Dans quel pays vos parents et vos grands-parents ont-ils grandi ? a. Mère : b. Père : c. Grand-mère maternelle : d. Grand-mère paternelle : e. Grand-père maternel : f. Grand-père paternel : 6. Quel âge aviez-vous à votre arrivée au Canada ? 7. Quel âge avaient vos parents et vos grands-parents à leur arrivée au Canada ? a. Mère : b. Père : c. Grand-mère maternelle : d. Grand-mère paternelle : e. Grand-père maternel : f. Grand-père paternel : 8. Qui demeurait avec vous lorsque vous étiez enfant ? 9. Avez-vous gardé contact avec : a. Vos tantes, vos oncles, vos cousins ? Oui / Non b. Vos frères et sœurs ? Oui / Non c. Vos parents ? Oui / Non d. Vos propres enfants ? Oui / Non Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 27 ENCADRÉ 2.2 Échelle d’évaluation de l’héritage culturel (suite) 10. Votre famille demeure-t-elle à proximité de votre domicile ? Préciser : 11. À quelle fréquence environ visitez-vous les membres de votre famille qui demeurent à l’extérieur de votre maison ? Tous les jours / Toutes les semaines / Tous les mois / Moins d’une fois l’an / Jamais 12. Le nom original de votre famille a-t-il été modié ? Oui / Non 13. Quelle est votre appartenance religieuse ? Catholique / Juive / Confession protestante / Autre / Aucune 14. Votre conjoint(e) est-il (elle) de la même religion que vous ? Oui / Non 20. À quelle fréquence fréquentez-vous votre institution ou communauté religieuse ? Plus de une fois par semaine / Une fois par semaine / Une fois par mois / Aux fêtes spéciales seulement / Jamais 21. Pratiquez-vous votre religion ou d’autres activités spirituelles dans votre maison ? Oui / Non Préciser : Prière / Lecture de la Bible, du Coran, de la Torah, etc. / Régime alimentaire / Célébration de fêtes religieuses / Méditation / Autre Décrire : 22. Préparez-vous la nourriture selon vos antécédents ethniques ? Oui / Non Préciser : 15. Votre conjoint(e) a-t-il (elle) les mêmes antécédents ethniques que vous ? Oui / Non Préciser : Préciser : 23. Participez-vous aux activités ethniques de votre communauté ? Oui / Non Préciser : 16. Quel type d’école avez-vous fréquenté ? Publique / Privée / Confessionnelle Chant / Célébrations des fêtes / Danse / Costumes / Festivals / Autre 17. Vivez-vous dans un voisinage, un quartier ou une communauté où les gens ont les mêmes origines ethniques et religieuses que vous ? Oui / Non Décrire : 18. Êtes-vous membre d’une institution ou d’une communauté religieuse ? Oui / Non Préciser : 19. Vous décrivez-vous comme un membre actif de votre communauté ? Oui / Non 24. Avez-vous des amis ayant les mêmes antécédents religieux que vous ? Oui / Non 25. Vos amis ont-ils les mêmes antécédents ethniques que vous ? Oui / Non 26. Quelle est votre langue maternelle ? Parlez-vous cette langue ? De préférence / À l’occasion / Rarement 27. Lisez-vous votre langue maternelle ? De préférence / À l’occasion / Rarement Source : Spector, Rachel E., Culture Care Guide, 6e éd., © 2004, pp. 321-323. Traduit avec la permission de Pearson Education, Inc., Upper Saddle River, NJ. 2.6 Croyances et coutumes liées à la santé Au début du chapitre, la santé a été dénie comme un état de bien-être complet – à la fois physique, mental et social – qui n’équivaut donc pas seulement en une absence de maladie ou de handicap. Avant de déterminer si les pratiques culturelles sont bénéques, nuisibles ou neutres, il faut saisir la logique des systèmes de croyances et de coutumes qui découlent de l’héritage d’une personne ; puis, l’inrmière s’assure de bien comprendre la nature et la signication des pratiques de santé selon la perspective culturelle de la personne. Il existe une grande variation culturelle dans la façon dont les symptômes et les conditions de maladies sont perçus, diagnostiqués, étiquetés et traités. L’inrmière ne doit pas présumer que les symptômes perçus et exprimés par les clients correspondent aux termes reconnus et familiers pour ces maladies ou ces syndromes dans les milieux de soins de santé (Wenger, 1993). La même maladie peut être source d’ostracisme dans une culture ou, à l’inverse, représenter une amélioration du statut dans une autre. À titre d’exemple, l’épilepsie est vue comme contagieuse et non traitable chez les Ougandais, une honte pour les familles grecques, le reet d’un 28 Partie 1 Évaluation globale de la personne déséquilibre physique chez les Mexicains et, dans d’autres cultures, le signe d’une faveur envoyée par Dieu sous forme d’une épreuve à traverser. Les symptômes physiques sont aussi perçus et rapportés d’une foule de façons. Par exemple, les gens d’origine méditerranéenne ont tendance à exprimer plus de symptômes physiques communs – et plus souvent – que les personnes d’Europe du Nord ou d’héritage asiatique. Dans la langue chinoise, il n’y a pas d’équivalent au terme tristesse ; pourtant, les Chinois éprouvent ce sentiment à un moment ou à un autre de leur vie. Pour exprimer l’émotion dans la culture chinoise, les clients somatiseront leurs symptômes ou exprimeront leurs expériences mentales en symptômes physiques (p. ex., des plaintes de symptômes cardiaques, car le centre de l’émotion est le cœur). L’inrmière peut faire une évaluation exhaustive des fonctions cardiovasculaires pour ne trouver que des résultats négatifs aux examens paracliniques. En poursuivant l’évaluation, elle apprend que la personne vit une perte et éprouve du chagrin (p. ex., la mort d’un ami intime ou d’un parent, un divorce ou une séparation). Bien que certains cliniciens biomédicaux ou scientiques considèrent cela comme une maladie psychosomatique, d’autres reconnaissent que ces symptômes sont culturellement acceptables et se présentent comme l’expression somatique d’une inharmonie émotionnelle (Wenger, 1993). Pour les clients, l’étiquetage du symptôme et le diagnostic dépendent de l’ampleur de la différence entre les comportements de la personne et ceux acceptés comme étant normaux par le groupe, des croyances à l’égard de la cause de la maladie, du degré de stigmatisation rattaché à un ensemble particulier de symptômes, de la prévalence de la condition pathologique et de la signication de la maladie pour la personne et sa famille. À travers l’histoire, les humains ont tenté de comprendre les causes de la maladie. Des théories causales ont été formulées sur les bases de l’identité ethnique et religieuse, de croyances, de la classe sociale, de perspectives philosophiques et du niveau de connaissances. L’inrmière détermine ce que la personne croit être la cause de sa maladie. Plusieurs personnes qui entretiennent des croyances traditionnelles dénissent la santé comme étant un état d’équilibre et la maladie comme une perte de cet équilibre. Particularités liées au développement La maladie durant l’enfance est une situation particulièrement difcile. Les adultes et les enfants ont des besoins spirituels qui varient selon leur stade de développement et le climat religieux dans la famille. Les perceptions des parents à l’égard de la maladie de leur enfant sont partiellement inuencées par les croyances religieuses. Par exemple, certains parents croient que la transgression des préceptes religieux est responsable de l’anomalie congénitale de leur enfant. D’autres attendent trop longtemps avant de consulter les services médicaux, car ils croient que la prière devrait être essayée en premier. Certains types de traitement (p. ex., une transfusion sanguine, des médicaments contenant de la caféine, une alimentation ou des produits défendus par la religion) et certaines procédures sont perçus comme des tabous culturels, c’est-à-dire des pratiques à éviter (à la fois chez les enfants et les adultes). Les valeurs entretenues par les cultures dominantes, tant canadienne qu’américaine, telles que l’indépendance, les soins personnels et la productivité, ont une inuence sur les adultes vieillissants de ces sociétés. Les Nord-Américains qualient une personne d’âgée lorsqu’elle atteint l’âge chronologique de 65 ans et lui retirent en tout ou en partie sa charge de travail ; en comparaison, d’autres cultures reconnaissent d’abord la personne comme incapable de travailler, pour ensuite la qualier de personne âgée. En adoptant l’approche culturelle pour travailler auprès de personnes vieillissantes issues de différentes cultures, il faut prendre en compte que ces personnes veulent atteindre une forme d’intégrité en acceptant la responsabilité de ce qu’elles ont fait de leur vie et en acquérant un sens d’accomplissement personnel. Les personnes qui atteignent ce sentiment d’intégrité perçoivent le vieillissement comme une expérience positive, s’adaptent à leur espace personnel et aux relations sociales, gardent le sentiment d’être utiles, commencent à faire le bilan de leur existence et préparent leur n de vie. 2 Les personnes âgées mettent parfois au point leurs propres façons de composer avec la maladie par des soins personnels, avec l’aide des membres de la famille et le soutien de groupes sociaux. Certaines cultures ont développé des attitudes et des comportements particuliers à l’égard des personnes âgées qui incluent des soins humanistes et la désignation de certains membres de la famille pour prodiguer les soins. Les adultes âgés peuvent avoir des responsabilités familiales spéciales – par exemple, dans la culture amish, celle d’offrir l’hospitalité aux visiteurs et, dans les groupes originaires des Philippines, de communiquer des habiletés et de transmettre la sagesse aux plus jeunes. Les immigrants âgés qui ont déjà eu à adapter leurs habitudes de vie en quittant leur pays d’origine pour s’établir au Canada ou ceux qui déménagent de la campagne à la ville (ou le contraire) ne connaissent pas toujours les soins de santé offerts, les programmes de prévention, les bienfaits des soins de santé et des programmes de dépistage auxquels ils sont admissibles. Parfois, ces personnes en sont à différents stades du choc culturel, c’est-à-dire le stade de désorientation ou d’incapacité à répondre au comportement d’un groupe culturel nouveau en raison de l’étrangeté, de la mauvaise connaissance ou de l’incompatibilité de leurs perceptions et de leurs attentes. 2.7 Causes traditionnelles de la maladie La causalité de la maladie peut être perçue selon trois perspectives principales : 1) biomédicale (ou scientifique) ; 2) naturaliste (ou holistique) ; 3) magicoreligieuse. 2.7.1 Perspective biomédicale La théorie de la causalité biomédicale ou scientique est fondée sur le postulat que les événements de la vie ont une relation de cause à effet, que le corps humain fonctionne plus ou moins mécaniquement (p. ex., de façon analogue à une automobile), que tout dans la vie peut être réduit ou divisé en parties (p. ex., réduire l’être humain à l’aspect physique, mental ou spirituel) et que la Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 29 réalité peut être observée et mesurée (p. ex., par des tests d’intelligence, des mesures psychométriques du comportement). Parmi les explications biomédicales, la théorie des germes impute la responsabilité de conditions de maladies particulières à des organismes microscopiques tels que les bactéries et les virus. La majorité des programmes de formation des médecins, des inrmières et des autres professionnels de la santé adhèrent aux théories biomédicales ou scientiques pour expliquer les causes physiques et psychologiques des maladies. 2.7.2 Perspective naturaliste La deuxième façon d’expliquer la cause d’une maladie est la théorie naturaliste ou holistique, plus fréquemment adoptée par les Amérindiens, les Asiatiques et d’autres cultures, qui croient que la vie des humains n’est qu’un aspect de l’ordre général du cosmos. Ces personnes peuvent être d’avis que les forces de la nature doivent être conservées dans un état d’équilibre et d’harmonie. Certains Asiatiques croient à la théorie du yin et du yang, selon laquelle la santé existe quand tous les aspects de la personne sont en équilibre parfait. Enracinée dans l’ancienne philosophie chinoise du Tao, la théorie du yin et du yang énonce que tous les organismes et objets de l’Univers sont faits des forces énergétiques du yin et du yang. Le siège des forces énergétiques se situe dans le système nerveux autonome, où le maintien de la santé correspond à l’équilibre entre les forces opposées. L’énergie yin représente le féminin et les forces négatives, dont le vide, la noirceur et le froid, alors que les forces yang sont mâles et positives, émettant la chaleur et la plénitude. Selon cette théorie, les aliments sont répertoriés en chaud et en froid et sont transformés en énergie yin et yang lorsque le corps les métabolise. Les aliments yin sont froids, et les aliments yang sont chauds. On consomme des aliments froids dans le cas d’une maladie chaude et des aliments chauds pendant une maladie froide. La théorie du yin et du yang est le fondement de la médecine orientale (ou chinoise) adoptée par de nombreux Canadiens et Américains d’origine asiatique. La perspective naturaliste énonce que les lois de la nature créent le déséquilibre, le chaos et la maladie. Les adeptes de cette vision utilisent des métaphores telles que le pouvoir de guérison de la nature et parlent de la terre comme d’une mère. À titre d’exemple, dans la perspective chinoise, la maladie n’est pas perçue comme une intrusion, mais plutôt comme un événement du cours de la vie et un signe externe du manque d’harmonie interne. Plusieurs groupes, notamment latino-américains, arabes, noirs et asiatiques, adoptent la théorie de la maladie du chaud/froid comme modèle explicatif dont les origines remontent à la théorie des humeurs 30 Partie 1 Évaluation globale de la personne de l’ancienne Grèce. Les quatre humeurs du corps – le sang, le phlegme, la bile noire et la bile jaune – régularisent les fonctions corporelles de base et sont décrites en termes de température, de sécheresse et d’humidité. Le traitement de la maladie consiste alors à soustraire ou à ajouter du froid, du chaud, de la sécheresse ou de l’humidité pour restaurer l’équilibre des humeurs. Les liquides, les aliments, les herbes, les médicaments et les maladies sont désignés comme étant chauds ou froids selon les effets perçus par le corps et non en fonction de leurs caractéristiques physiques. L’otite, les douleurs, les crampes thoraciques, la paralysie, les troubles gastro-intestinaux, le rhumatisme et la tuberculose sont des exemples de maladies causées par le froid qui entre dans le corps. Parmi les maladies causées par une surchauffe du corps gurent les abcès dentaires, les maux de gorge, les éruptions cutanées et les maladies rénales. Selon la théorie de la maladie du chaud/froid, la personne est touchée de façon globale et non seulement par un malaise particulier. Les adeptes de cette théorie maintiennent que la santé consiste en un état positif de bien-être total, incluant les aspects physique, psychologique, spirituel et social. Paradoxalement, le langage utilisé pour décrire cette dissection articielle du corps en différentes parties est lui-même un reet de la perspective biomédicale ou scientique et non de l’approche naturaliste ou holistique. 2.7.3 Perspective magicoreligieuse La troisième théorie par laquelle les gens expliquent la cause de la maladie est magicoreligieuse. La prémisse stipule que le monde est vu comme une arène où dominent des forces supranaturelles. Le sort du monde et les êtres vivants dépendent de forces supranaturelles bonnes ou malveillantes. Des exemples de causes magiques de la maladie incluent la croyance au vaudou ou à la sorcellerie observée chez certaines personnes originaires de quelques pays des Caraïbes. Les « guérisons par la foi » sont fondées sur les croyances religieuses et prévalent surtout parmi les membres de certaines religions chrétiennes y compris les scientistes chrétiens, alors qu’une variété de rituels de guérison se retrouve dans d’autres religions, dont le catholicisme romain et la religion mormone. Il est évidemment possible de combiner différentes visions du monde, et de nombreuses personnes ont tendance à avancer plus de une explication quant à la cause de leur maladie. La vaste majorité des inrmières adoptent la vision biomédicale ou scientique, en raison de leur profession, mais d’autres aspects gagnent en popularité, dont certaines techniques de gestion de la douleur par l’acupuncture, les thérapies par les plantes, l’hypnose, la thérapie du toucher et le biofeedback. Les amulettes sont des objets ou des fétiches portés sur une corde ou une chaîne autour du cou, du poignet ou de la taille en guise de protection contre l’« œil maléque » ou les « mauvais esprits » qui pourraient être transmis d’une personne à une autre ou provenir d’origines supranaturelles. Ces amulettes peuvent aussi être accrochées dans la maison, dans l’automobile ou au travail. La médecine traditionnelle utilise l’environnement naturel – les herbes, les plantes, les minéraux et les substances animales – pour traiter les maladies. Ces remèdes arrivent au Canada en provenance des quatre coins du monde. Ils sont offerts en pharmacie, dans les supermarchés et dans les magasins d’aliments naturels. D’autres objets ou substances sont réservés à un usage externe. La FIGURE 2.4 illustre différentes amulettes. La FIGURE 2.5 présente des exemples de remèdes traditionnels. 2.7.4 Guérison et culture Dans le cas d’un échec de son autotraitement, la personne peut se tourner vers les guérisseurs traditionnels, spirituels ou religieux ou vers la médecine scientique. Toutes les cultures ont leurs préférences en matière de guérisseurs ; elles reconnaissent les symptômes d’une mauvaise santé, les comportements acceptables du malade et les traitements. En plus de solliciter l’aide médicale et scientique de l’inrmière, les clients demanderont parfois celle de guérisseurs traditionnels ou religieux. Bien que la subdivision de la personne en différentes parties soit un concept occidental, certaines personnes d’origine latinoaméricaine ou amérindienne ne peuvent croire en une guérison complète, à moins que le rétablissement corporel, mental et spirituel ne soit accompli en entier. Par exemple, un client d’origine latino-américaine atteint d’une infection respiratoire peut prendre à la fois les antibiotiques prescrits par un médecin ou une inrmière praticienne spécialisée, les tisanes recommandées par le curandero et réciter aussi les prières suggérées par le prêtre catholique. Plusieurs personnes de différentes croyances ont recours à la prière et visitent des endroits de culte pour demander la guérison. Il existe un grand nombre de lieux de pèlerinage au Canada, aux États-Unis et dans le monde : l’oratoire Saint-Joseph à Montréal, la basilique SainteAnne-de-Beaupré près de Québec, le sanctuaire Notre-Dame-du-Cap dans la région de Trois-Rivières, l’ermitage Saint-Antoine de Lac-Bouchette, Lourdes en France, Fatima au Portugal et Chimayo au Nouveau-Mexique en sont quelques-uns. 2 Q uestion de suivi À partir de ce que vous venez de lire et des données contenues dans la mise en situation, à quelle perspective de la maladie associez-vous madame Faustin ? La diversité des croyances et des coutumes utilisées dans le processus de guérison par les FIGURE 2.4 L’œil bleu en vitre de Turquie, montré ici, est un exemple d’amulette qui peut être accrochée dans la maison. B Une graine de semence et une corde rouge peuvent être placées dans le berceau du bébé, selon l’héritage culturel mexicain. C Ces bracelets peuvent être portés pour protéger une personne, selon l’héritage culturel des communautés des Caraïbes. D Ce petit paquet est placé dans le berceau ou la chambre du bébé, selon l’héritage culturel japonais. A FIGURE 2.5 Ce « tonique », vendu dans des boutiques d’herboristerie, est utilisé par certains pour traiter l’asthme. B Le sac de médecine traditionnelle d’un shaman amérindien est utilisé pour transporter des médicaments. C Les feuilles contenues dans ce paquet peuvent être utilisées pour traiter l’indigestion, selon l’héritage culturel chinois. D Cette chandelle peut être allumée par une personne d’héritage culturel mexicain pour se « purier ». A Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 31 populations ethnoculturelles résidant au pays dépasse les limites de ce chapitre. Il importe d’être sensibilisé aux pratiques traditionnelles et de reconnaître l’existence d’autres types de méthodes complémentaires à la guérison. Bien qu’il soit impossible d’afrmer que toutes les approches ethnoculturelles rattachées à la guérison sont inoffensives, la majorité d’entre elles ne présente pas de danger, indépendamment de leur efficacité. L’ENCADRÉ 2.3 présente une série de questions et d’exemples de réponses relatifs à ce type d’évaluation. ENCADRÉ 2.3 En réponse à cette question, les gens qui démontrent une forte association à l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ont tendance à voir la santé comme étant axée sur l’holisme (considérer l’être humain dans son ensemble) et l’équilibre, alors que les personnes qui ont été socialisées aux moyens modernes de la culture dominante tendent à voir la santé comme une interrelation entre la pensée et le corps, mettant l’accent sur la capacité de se déplacer et de vaquer à leurs occupations quotidiennes. 2. Comment évaluez-vous votre santé ? Ici, les inrmières ont tendance à évaluer la santé comme étant excellente ou bonne, alors que les personnes profanes ou non professionnelles tendent à mettre l’accent sur le déséquilibre et à adopter une façon holistique de dénir la maladie. 3. Comment décrivez-vous votre maladie ? En réponse à cette question, les gens qui démontrent une forte associa tion à l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ont tendance à mettre l’accent sur le déséquilibre et à adopter une façon holistique de dénir la maladie. À l’opposé, on retrouve des personnes pour qui les explications et le sens de la maladie sont moins (sinon aucunement) ancrés dans des croyances traditionnelles. Ces dernières semblent plus réceptives aux explications des sciences médicales telles qu’elles sont pratiquées dans les institutions occidentales. Par conséquent, ces personnes dissocient la maladie du corps des forces ou fondements spirituels et acceptent généralement plus facilement les explications de nature médicale. 4. Que croyez-vous être la cause de votre maladie ? a. Le changement environnemental – la croyance selon laquelle la personne passe d’un endroit où il fait chaud à un endroit où il fait froid (ou vice versa). b. L’œil malveillant – il s’agit d’une ancienne croyance qui persiste encore aujourd’hui. Les gens croient que la maladie est causée par une personne ou un esprit les regardant de façon malicieuse. Cette maladie peut être prévenue par le port d’amulettes et guérie par divers remèdes et pratiques. c. L’exposition aux courants d’air – cette croyance d’origine européenne maintient que l’air froid soufflant sur le corps peut rendre malade. La prévention est de porter un châle sur les épaules. d. La punition de Dieu – cette approche est commune à plusieurs personnes de croyances traditionnelles. e. La perte et le deuil – c’est une cause de la maladie à la fois moderne et traditionnelle. Partie 1 Malgré la présence de nombreux soignants traditionnels, l’inrmière verra des personnes d’origine latino-américaine se tourner vers un curandero, un espiritualista (spiritualiste), un yerbo (herboriste) ou un sabedor (guérisseur qui manipule les os et les muscles par massage). Des Noirs mentionneront avoir reçu l’assistance d’un hougan (prêtre ou prêtresse vaudou), d’un spiritualiste ou d’une old lady (vieille femme qui a élevé sa famille avec succès et qui se spécialise Évaluation des croyances et des pratiques en matière de santé 1. Comment dénissez-vous la santé ? 32 Guérisseurs traditionnels Évaluation globale de la personne f. Le sort et les sortilèges – les personnes capables de jeter un sort ou un sortilège à une autre personne sont souvent les seules à connaître le moyen de le retirer. g. Les mauvaises combinaisons d’aliments – chez les Asiatiques et les Latino-Américains d’origine traditionnelle, le mélange d’aliments particuliers est tabou ; par exemple, les aliments classés dans le yin ou le yang, ou chauds ou froids, et non selon la température de l’aliment lui-même. La combinaison des produits laitiers et de la viande est interdite par les lois alimentaires juives. h. L’envie et la jalousie – les personnes croient que d’autres peuvent leur envoyer une maladie si elles sont trop chanceuses ou riches. i. Le manque de travail – l’oisiveté et l’apathie peuvent toutes deux causer la maladie. j. L’excès de travail – plusieurs personnes pensent que l’excès de travail peut rendre malade. k. Les mauvaises habitudes alimentaires – chez de nombreuses personnes aux origines traditionnelles, les excès de nourriture et le déséquilibre alimentaire ont tendance à être des facteurs qui contribuent à la maladie. On considère également qu’il s’agit d’un agent causal dans le système de soins de santé moderne. l. Les virus et les bactéries – cette croyance est fréquemment rejetée par les personnes de croyances traditionnelles. m. La sorcellerie – cette ancienne cause de maladie persiste encore là où les gens croient qu’il y a des sorcières pratiquantes pouvant leur nuire. 5. Que faisaient vos parents pour prévenir la maladie et quels remèdes « maison » utilisaient-ils pour vous ramener à la santé ? Les étudiantes inrmières contemporaines trouveront probablement que leur parents avaient recours à des méthodes modernes de soins de santé ; toutefois, les immigrants et les gens de cultures traditionnelles peuvent avoir des réponses très différentes à cette question, selon leurs croyances et leurs coutumes. 6. Que faites-vous pour éviter d’être malade, quels remèdes « maison » utilisez-vous ? Il est probable que l’infirmière réponde qu’elle utilise des remèdes modernes ; les clients ayant un héritage culturel nommeront peut-être les remèdes traditionnels qu’ils utilisent. Un problème peut découler de l’utilisation de remèdes traditionnels autant que des médicaments modernes. Il importe, en recueillant cette information, de chercher les interactions possibles entre les remèdes traditionnels et modernes. dans le soin des enfants et les remèdes traditionnels). Les Amérindiens peuvent demander l’aide d’un shaman ou de la médecine traditionnelle. Les gens d’origine asiatique mentionneront plutôt qu’ils ont visité l’herboriste, l’acupuncteur ou le « rebouteur » (« ramancheur ») (bone setter). Parmi les Amish, le braucher fait allusion aux guérisseurs traditionnels qui font usage d’herbes et de toniques à la maison ou dans la communauté. Le brauche est un art traditionnel de guérir et renvoie à la guérison « de sympathie », parfois appelée powwowing en anglais. Les traitements utilisés par le braucher sont accompagnés de massage, de pédicure, d’acupression, de réexologie ou, moins fréquemment, d’iridologie (Andrews et Boyle, 2003 ; Wenger, 1995). Chaque culture possède ses propres guérisseurs ; la plupart parlent la langue maternelle de la personne, se rendent à domicile, et leurs traitements coûtent beaucoup moins cher que ceux des soignants de la pratique biomédicale ou scientique du système de soins de certains pays, ce qui n’est pas le cas au Canada. En plus des guérisseurs traditionnels, plusieurs cultures ont des sages-femmes dans la communauté (p. ex., des parteras pour les femmes latino-américaines) ou d’autres personnes qui offrent des soins aux femmes enceintes. 2 Dans certaines religions, les guérisseurs spirituels se trouvent dans les rangs hiérarchiques d’ofciels religieux ordonnés et connus appelés prêtre, évêque, sage, diacre, rabbin, frère ou sœur. Dans d’autres religions, les guérisseurs font partie d’une catégorie séparée – c’est le cas des « inrmières » (elles n’ont pas de permis de pratique reconnu par l’État), des praticiens et des scientistes chrétiens. La spiritualité est incluse dans les perceptions, les croyances et les coutumes quant à la santé et à la maladie. Le TABLEAU 2.2 présente une liste d’exemples de croyances et de coutumes en matière de santé et de maladie selon l’héritage culturel, de causes de maladie et de guérisseurs traditionnels. TABLEAU 2.2 Exemples de croyances et de coutumes en matière de santé et de maladie selon l’héritage culturel CROYANCES EN MATIÈRE DE SANTÉ CROYANCES EN MATIÈRE DE MALADIE CAUSES DE MALADIE MAINTIEN DE LA SANTÉ PROTECTION DE LA SANTÉ RÉTABLISSEMENT DE LA SANTÉ GUÉRISSEURS TRADITIONNELS • Remèdes traditionnels, dont des racines de gingembre • Acupuncture • Moxibustion – petits cônes d’armoise enammés et qui se consument lentement, posés sur le corps sur des points d’acupuncture • Application de ventouses (cupping) • Médecins chinois • Herboristes Héritages asiatiques : Chine, Inde, Japon, Corée, Philippines, Asie du Sud-Est (Laos, Cambodge et Vietnam) • Équilibre du yin et du yang • Déséquilibre du yin et du yang • Perturbation de l’équilibre du yin et du yang • Surmenage • Position assise prolongée • Coucher au lit prolongé • Prévention des déséquilibres du yin et du yang et des changements de climat • Port d’amulettes, dont le jade • Consommation d’aliments adéquats et compatibles Héritages africains : Côtes de l’Afrique de l’Ouest (Ghana, Nigeria, etc.), Haïti, Jamaïque, îles des Antilles occidentales • Harmonie avec la nature • Inharmonie avec la nature • Démons • Esprits malveillants • Vaudou • Sorts • Prévention de l’inharmonie ; respect de la propreté • Religion • Absence de proximité avec les personnes malades • Port de bracelets • Foi Chapitre 2 • Asafoetida (plante), herbes et racines • Sorciers (travail à partir de racines) • Spiritualistes • « Vieille femme » (old lady ) ou grand-mère Compétence culturelle : les soins selon la culture 33 TABLEAU 2.2 Exemples de croyances et de coutumes en matière de santé et de maladie selon l’héritage culturel (suite) CROYANCES EN MATIÈRE DE SANTÉ CROYANCES EN MATIÈRE DE MALADIE CAUSES DE MALADIE MAINTIEN DE LA SANTÉ PROTECTION DE LA SANTÉ RÉTABLISSEMENT DE LA SANTÉ GUÉRISSEURS TRADITIONNELS • Port d’amulettes • Port de châles • Remèdes « maison », dont racines de marais et olbas • Médecins homéopathiques • Brauchers Héritages européens : Angleterre, France, Allemagne, Pologne, Russie et autres • Bien-être physique et émotionnel • Absence de bien-être • Œil malveillant • Esprits malveillants • Sorts • Nutrition adéquate, exercice, propreté, foi en Dieu Héritages des Amérindiens et des peuples autochtones de l’Alaska : Amérindiens de l’Amérique du Nord et de l’Alaska Plus de 550 nations reconnues par le gouvernement fédéral américain ou par un État, et plus de 600 nations reconnues au Canada a • Harmonie avec la nature • Équilibre de la pensée, des émotions, du corps et de l’esprit • Inharmonie avec la nature • Esprits malveillants • Fantômes • Comportement qui déplaît aux saints ou aux ancêtres • Respect de la nature ; absence de contacts avec les mauvais esprits • Masques • Utilisation des amulettes, du tabac et de l’herbe tendre • Peinture avec du sable • Herbes • Médecins traditionnels (shaman) Héritages de la péninsule ibérique, de l’Amérique centrale et du Sud : Espagne et Portugal, Brésil, Cuba, Mexique, Porto Rico, Colombie • Récompense pour de bons comportements • Équilibre des humeurs « chaudes » et « froides » a • Punition pour une mauvaise conduite • Déséquilibre du « chaud » et du « froid » • Œil malveillant • Envie des autres personnes • Jalousie • Régime adéquat pour maintenir l’équilibre du « chaud » et du « froid » • Foi • Amulettes, dont les savons mano negro, chandelles • Prières • Promesses à des saints • Herbes, anis et manzanilla • Guérisseurs traditionnels, dont santroa, partera ou curandero Statistique Canada, 2013b. 2.8 Expression transculturelle de la maladie 2.8.1 Expression transculturelle de la douleur La douleur est le symptôme le plus souvent utilisé pour étudier l’expression de la maladie selon les antécédents culturels d’une personne. Le phénomène de la douleur est universellement reconnu et demeure un aspect important de l’évaluation des clients, quel que soit leur âge. La douleur est une expérience personnelle et subjective grandement influencée par l’héritage culturel. Les attentes pour la traiter, les manifestations et la gestion de la douleur sont imbriquées dans le contexte culturel. À l’instar de la santé et de la maladie, la dénition de la douleur est largement déterminée par la culture. Le terme douleur est dérivé d’un mot grec signiant punition, ce qui aide à comprendre l’association 34 Partie 1 Évaluation globale de la personne longtemps perçue entre la douleur et la punition dans la pensée judéo-chrétienne. La signication accordée aux stimulus douloureux, la manière dont les personnes définissent leur situation et l’expérience personnelle déterminent la façon de vivre la douleur. Plusieurs recherches interculturelles ont été réalisées sur la douleur. Les résultats ont démontré que l’expérience très personnelle de la douleur est liée à l’apprentissage culturel, à la signication accordée à la situation et à d’autres facteurs personnels. Les chercheurs ont établi que la souffrance silencieuse est la réponse à la douleur la plus valorisée par les professionnels de la santé. La majorité des inrmières ont été habituées à penser que, dans presque toutes les situations, l’autocontrôle est préférable aux fortes démonstrations de sensations ou de sentiments. Les résultats de recherches portant sur les attitudes des inrmières envers la douleur ont révélé que les antécédents ethniques des clients jouent un rôle dans l’évaluation de la douleur physique et psychologique réalisée par les inrmières. Par exemple, elles entretenaient l’idée préconçue que les clients d’origine juive ou latinoaméricaine souffrent plus que ceux d’origine anglo-saxonne et allemande, alors que ce sont les clients asiatiques qui souffrent le moins. De plus, les infirmières s’attendaient à observer une plus grande douleur chez les clients si ellesmêmes avaient tendance à rapporter leurs propres expériences comme étant plus douloureuses. En général, les inrmières ayant des antécédents de pays d’Europe de l’Est ou du Sud ou d’un pays africain s’attendaient généralement à une souffrance plus prononcée chez les clients que les soignantes originaires de pays de l’Europe du Nord. Par ailleurs, le nombre d’années d’expérience, le statut et le domaine clinique de pratique des inrmières n’avaient pas de lien avec l’interprétation qu’elles faisaient du degré de douleur des clients (Ludwig-Beymer, 2002). En plus des variations attendues dans la perception de la douleur et de la tolérance à celle-ci, l’inrmière prévoit différentes façons d’exprimer la douleur de la part des clients. Il est bien connu que les gens se tournent vers leur environnement social pour la validation et la comparaison de divers phénomènes. Un premier groupe de comparaison important est la famille, qui transmet les normes culturelles aux enfants. 2.8.2 Syndrome lié à l’attachement culturel Certaines personnes peuvent être atteintes d’une condition dénie comme un syndrome lié à l’attachement culturel. Ces conditions n’ont parfois aucune équivalence biomédicale ou scientique, alors que d’autres, dont l’anorexie nerveuse et la boulimie, sont des exemples de maladies culturelles nord-américaines. Le TABLEAU 2.3 présente un sommaire de la compilation de plus de 150 syndromes liés à l’attachement culturel documentés par des anthropologues médicaux, des travailleurs en santé mentale ainsi que des travailleurs communautaires. 2.8.3 Culture et traitement Après l’apparition d’un symptôme, les premiers pas vers le traitement sont les soins personnels. Aux États-Unis, il est estimé que de 70 à 90 % des épisodes de maladie sont traités au préalable ou exclusivement, souvent avec succès, par les soins personnels (Lipson et Steiger, 1996). La disponibilité des médicaments offerts en vente libre, le niveau relativement élevé de littératie aux États-Unis, la croissance marquée de l’offre en médecines dites douces à base d’herbes et l’inuence des médias liée à l’information sur la santé ont contribué au pourcentage élevé de l’autotraitement. Santé Canada (2011) a commandé une enquête auprès de la maison de sondage Ipsos-Reid an d’avoir un portrait de l’usage des produits de médecine naturelle. Cette enquête a révélé que près de 73 % des Canadiens utilisent des produits de santé naturels et des produits homéopathiques dans leurs pratiques d’autotraitement. Toujours selon cette enquête, 32 % des Canadiens utilisent certains produits homéopathiques sur une base quotidienne à des ns de traitement ou de prévention de la maladie. 2 Les traitements maison sont attirants en raison de leur accessibilité, comparativement aux inconvénients associés à la recherche d’un médecin, d’une inrmière ou d’un pharmacien, particulièrement en milieu rural ou en région éloignée. Qui plus est, les remèdes ou les traitements maison mobilisent le réseau de soutien social, qui fournit à la personne malade un environnement de soins dans lequel elle peut vivre sa convalescence. Toutefois, l’inrmière doit être sensibilisée au fait que tous les remèdes maison ne sont pas sans coûts. Par exemple, les populations noires urbaines du Sud-Ouest américain utilisent parfois des potions traditionnelles dont le coût est plus élevé que celui d’un traitement équivalent pour une intervention biomédicale. Au Canada, l’autotraitement constitue également une importante composante des pratiques de soins de la population. À la n des années 1990, Santé Canada et Statistique Canada (2001) se sont interrogées sur la question et ont produit une enquête an d’avoir un portrait de la situation. Parmi les faits saillants de cette étude, on a constaté que 65 % des Canadiens avaient utilisé au cours de l’année des médicaments analgésiques pour soulager une migraine ou des antiinammatoires en vente libre. Près de 20 % des Canadiens avaient utilisé des médicaments contre le rhume ou la toux. Une plus grande variété de solutions ou de thérapies complémentaires est de plus en plus reconnue par les professionnels de la santé. L’acupuncture, l’acupression, le toucher thérapeutique, le massage, la musicothérapie, le biofeedback, les techniques de relaxation, la méditation, l’hypnose, la distraction, l’imagerie, l’iridologie, la réexologie et les remèdes à base d’herbes sont des exemples de traitements utilisés par les gens, soit seuls, soit en combinaison avec d’autres traitements. Au Canada, l’étude sur l’autotraitement révèle que ces traitements sont utilisés par la population et le plus souvent en lien ou en ajout à un traitement médical conventionnel (Statistique Canada, 2001). Les femmes ont une plus grande propension à Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 35 Exemples de syndromes liés à l’attachement culturel TABLEAU 2.3 SYNDROMES LIÉS À L’ATTACHEMENT CULTUREL SYMPTÔMES PRÉSENTÉS Héritages asiatiques : Chine, Inde, Japon, Corée, Philippines, Asie du Sud-Est (Laos, Cambodge, Vietnam) Shenkui (Chine) Symptômes marqués d’anxiété ou de panique avec étourdissements, douleur au dos, faiblesse généralisée, insomnie, rêves fréquents et plaintes de troubles sexuels (éjaculation prématurée et impotence). Croyance qu’une perte excessive de sperme en est la cause ; syndrome redouté en raison de la signication associée à la perte d’essence vitale et à la croyance perçue de mettre la vie en danger. Dhat (Inde) Syndrome de perte de sperme. Caractérisé par des préoccupations d’anxiété et d’hypocondrie relativement à l’éjaculation de sperme. Décoloration blanchâtre de l’urine et sentiment de faiblesse. Héritages africains : Côtes de l’Afrique de l’Ouest (Ghana, Nigeria, etc.), Haïti, Jamaïque, îles des Antilles occidentales Sang pauvre Manque de sang ou pauvreté du sang, souvent traité par l’alimentation. Sang riche Quantité excessive de certains nutriments dans le sang, résultant de l’ingestion de trop de viande rouge et d’aliments riches en calories. Sang clair Manifestations chez les femmes, les enfants et les personnes âgées susceptibles d’être malades en général. Héritages européens : Angleterre, France, Allemagne, Pologne, Russie et autres Hystérie (Grèce) Plaintes et comportements bizarres, car l’utérus quitte le petit bassin vers une autre partie du corps. Paraphrénie d’involution (Allemagne) Troubles paranoïdes au mitan de la vie. Rodina (Russie) Malaise, dépression. Héritages des Amérindiens et des peuples autochtones de l’Alaska : Amérindiens de l’Amérique du Nord et de l’Alaska Plus de 550 nations reconnues par le gouvernement fédéral américain ou par un État, et plus de 600 nations reconnues au Canada a Fantôme Tremblements, hallucinations, sentiment d’être en danger. Hi-Wa itck Insomnie, dépression, perte de l’appétit. Associé à la séparation non désirée d’une personne aimée. Héritages de la péninsule ibérique, de l’Amérique centrale et du Sud : Espagne et Portugal, Brésil, Cuba, Mexique, Porto Rico, Colombie a Empacho Crampes et douleur causées par la nourriture qui fait une boule et qui s’accroche à l’estomac ou à l’intestin. Mal ojo (œil malveillant) Sommeil agité, pleurs, diarrhée chez l’enfant causés par l’attention d’un étranger ; début soudain. Susto Anxiété, tremblements, phobie par peur soudaine. Statistique Canada, 2013b. 36 Partie 1 Évaluation globale de la personne recourir à ces traitements alternatifs. Seule la chiropractie est utilisée à proportion égale, chez les hommes et les femmes. Plusieurs pharmacies et magasins offrent des produits de traitement pour une variété de malaises communs. L’efcacité des thérapies complémentaires servant à traiter des problèmes de santé a été étudiée de façon exhaustive aux ÉtatsUnis par le National Center for Complementary and Alternative Medicine et font actuellement l’objet d’études dans différents milieux de soins et d’enseignement américains. La fréquence d’utilisation des remèdes traditionnels tels que les herbes achetées en herboristerie et les herbes chinoises médicinales est inconnue FIGURE 2.6. Néanmoins, les observations dans ces milieux indiquent une grande popularité parmi les membres de la communauté ethnoculturelle traditionnelle. 2.8.4 Culture et prévalence de la maladie Au Canada et aux États-Unis, l’état de santé de la population s’est amélioré depuis les dernières générations. Néanmoins, une grande disparité subsiste encore aujourd’hui au sein des diverses populations ethniques en regard des décès et des affections. Des variations bioculturelles anormales peuvent avoir des sources génétiques ou acquises (CoutuWakulczyk, 2003 ; Purnell et Paulanka, 2008). L’information relative à la prévalence de la maladie chez des groupes ethniques est utile en raison de la possibilité de mettre l’accent, pendant l’évaluation, sur la probabilité de la prévalence d’une condition particulière. Par exemple, si l’inrmière examine un enfant noir présentant des symptômes FIGURE 2.6 Différents produits offerts chez un herboriste gastro-intestinaux, elle pensera à la possibilité d’une intolérance au lactose ou à l’anémie à hématies falciformes, alors que chez l’enfant blanc, elle envisagera la brose kystique comme source du problème. La pauvreté joue aussi un rôle dans la disparité des maladies. Pendant l’évaluation, l’inrmière veut s’assurer d’avoir recueilli les données adéquates nécessaires pour soutenir ou réfuter ses hypothèses. L’information sur les nombreuses disparités dans l’état de santé selon l’origine ethnique se trouve dans la section Particularités culturelles et génétiques des différents chapitres. 2.9 2 Étapes vers la compétence culturelle Il y a plusieurs étapes à franchir avant d’atteindre la compétence culturelle. L’intégration des connaissances dans la pratique quotidienne demande du temps, entre autres à cause de l’hésitation de la part des professionnels de la santé à adhérer à de nouvelles idées. L’acquisition de la compétence culturelle n’est pas instantanée, et elle ne s’obtient sûrement pas à la seule lecture de un ou de plusieurs chapitres ou ouvrages dans ce domaine spécialisé. Cet apprentissage est complexe et associé à de multiples aspects, dont plusieurs évoluent avec le temps et l’expérience, dans les domaines de connaissances en anthropologie culturelle, en démographie, en folklore, en histoire de l’immigration, en politique de la pauvreté et en sociologie. La compétence culturelle englobe aussi une introspection à l’égard de l’héritage culturel personnel et de la santé. Les premiers pas vers la compréhension des besoins en soins de santé d’autres personnes commencent par celle de son propre héritage culturel, à la lumière des valeurs, des croyances, des attitudes et des coutumes personnelles liées à la santé et à la maladie. Parfois, cette étape demande un investissement personnel considérable et nécessite l’exploration de l’héritage culturel de sa famille, de ses croyances et de ses coutumes. Les parents et les grands-parents sont des ressources familiales que l’inrmière pourra consulter, les mères étant traditionnellement les gardiennes de la famille et celles qui s’occupaient des malades. Q uestion de suivi Comment concevez-vous la maladie ? Comment vous et votre famille réagissez-vous auprès d’un proche malade ? Pendant sa formation, l’inrmière apprend les signications modernes et scientiques de la santé et de la maladie ; parallèlement, elle doit construire un cadre de référence pertinent à ces concepts quant aux croyances et aux coutumes d’autres cultures. En outre, plusieurs clients proviendront de groupes ayant des antécédents religieux et socio-économiques différents des siens ; elle sera alors aux prises avec ses propres idées Chapitre 2 Compétence culturelle : les soins selon la culture 37 préconçues et préjugés ethniques, religieux, sexuels ou socio-économiques à l’égard de ces groupes. Q uestion de suivi Comment les croyances et les valeurs culturelles de madame Faustin peuventelles inuencer sa conception de la santé ? Q uestion de suivi Dans le cas de madame Faustin, quelles questions pourriez-vous lui poser an de connaître sa compréhension du système de santé québécois ? La seconde étape demande d’établir la signication de la santé pour l’autre personne, en gardant en mémoire que ce concept découle de la façon dont les membres d’un groupe culturel dénissent la santé. Un grand nombre de recherches ont porté sur les différentes dénitions de la santé chez une variété de groupes. Par exemple, selon une croyance de la tradition amérindienne, la santé reète la vie en totale harmonie avec la nature, alors que la maladie est le résultat d’un manque de prévention. Certaines personnes originaires de la Jamaïque associent la santé à un bon appétit, à un sentiment d’être fort et énergique, en s’acquittant des activités de la vie quotidienne sans difculté, en étant actives sexuellement et fertiles. Pour certaines femmes d’origine italienne, la santé signie la capacité d’interagir socialement et d’effectuer les tâches quotidiennes telles que préparer les repas, nettoyer la maison et prendre soin d’ellesmêmes et des autres. Par ailleurs, d’autres groupes, dont des personnes ayant un héritage culturel mexicain, croient que de tousser, de transpirer et d’avoir la diarrhée sont des manifestations de la vie normale et non des symptômes de santé chancelante – peut-être en raison de la prévalence élevée de ces conditions dans leur pays d’origine. Ainsi, ces personnes se diront en santé ou les autres membres du groupe la considéreront comme étant en santé, alors que l’inrmière décèlera des symptômes de maladie. La troisième étape est associée à la compréhension du système de prestation des soins de santé, c’est-à-dire de la façon dont il fonctionne, de l’effet des soins de santé, de la signication d’une variété d’interventions et des coûts et conséquences des soins pour les clients et pour l’inrmière. La quatrième étape porte sur les connaissances des ENCADRÉ 2.4 • Découvrir et comprendre son propre héritage, ses valeurs culturelles, ses préjugés, ses croyances et ses coutumes. • Acquérir les connaissances de base des valeurs culturelles et de la santé ainsi que celles des croyances et coutumes des diverses clientèles à traiter. R.E.S.P.E.C.T. • Réaliser qu’il faut connaître et comprendre son propre héritage et celui du client. • Examiner le client dans le contexte de ses pratiques culturelles en matière de santé et de maladie. Partie 1 Évaluation globale de la personne La liste de références qui gure à la n de ce manuel compte plusieurs ouvrages qui fournissent des outils liés au contenu de ce chapitre. Il importe de se rappeler que la compétence culturelle est associée à un ensemble d’éléments : l’héritage, la culture, l’ethnicité, la religion, la socialisation, la diversité de la population, l’immigration, le changement démographique, la mondialisation, la santé et la maladie, les croyances et les coutumes modernes et traditionnelles, les enjeux sociopolitiques, les installations sanitaires, les logements et les infrastructures. 2.10 Soins inrmiers culturels Prodiguer des soins inrmiers dans un contexte de compétence culturelle est un but en soi. Comme mentionné au début du chapitre, le parcours pour y arriver est long. L’ENCADRÉ 2.4 fournit des lignes directrices à suivre tout au long de ce cheminement. 1. À partir des nouvelles données recueillies à la suite de la rencontre avec la lle de la cliente, complétez l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel que vous aviez entrepris de remplir plus tôt. 2. À la lumière de ces nouvelles données et de celles contenues au début du chapitre, inscrivez un problème inrmier et deux directives dans le plan thérapeutique inrmier de madame Faustin. Lignes directrices pour offrir des soins culturels PRÉPARATION 38 antécédents sociaux des clients – les signications rattachées à l’immigration, le racisme, le statut socio-économique, la réforme des services sociaux, le vieillissement, etc. Finalement, à la cinquième étape, l’inrmière doit se familiariser avec la langue parlée par la personne, savoir s’il y a des interprètes disponibles et connaître les ressources dans la communauté. • Sélectionner des questions simples et ne pas les poser trop rapidement. • Poser les questions tout au long de l’examen physique. • Encourager le client à discuter des signications accordées à la santé et à la maladie. • Conrmer avec le client qu’il a bien compris les recommandations et qu’il les accepte, et tenir compte de ses pratiques et de ses coutumes culturelles en matière de santé. • Toucher le client dans les limites de son héritage culturel – les façons de faire et les comportements sont des composantes essentielles dans la relation inrmière-client. Évaluation et jugement clinique 2 Dossier : Noélie Faustin (suite) Un peu plus tard, vous avez rencontré la lle de madame Faustin. Celle-ci comprend et parle couramment le français. Elle vous explique que sa mère a fréquenté l’école jusqu’en quatrième année du primaire et qu’elle a ensuite dû la quitter pour aller aider ses parents sur la ferme familiale. Elle a immigré au Canada pour rejoindre deux de ses sœurs. Elle vit à quelques rues de celles-ci et les voit presque tous les jours. Elle va à la messe tous les dimanches et elle prie régulièrement. Lorsque vous la questionnez à propos du thé médicinal que boit sa mère, elle vous mentionne que celle-ci a vu un hougan quelques jours avant de se présenter au centre hospitalier, et c’est ce dernier qui lui aurait recommandé d’en boire au moins une tasse par jour. La lle vous mentionne que sa mère était réticente à venir consulter, car elle craignait que les médecins ne trouvent pas l’origine de sa douleur et qu’elle ne pourrait pas manger les aliments recommandés par le hougan qui seraient nécessaires à sa guérison selon lui. Elle vous mentionne aussi que sa mère ne comprend pas très bien le diagnostic de maladie de Crohn que le médecin a posé et qu’elle aimerait qu’on le lui explique davantage. 1. À partir des nouvelles données recueillies à la suite de la rencontre avec la lle de la cliente, complétez l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel que vous aviez entrepris de remplir plus tôt. 2. À la lumière de ces nouvelles données et de celles contenues au début du chapitre, inscrivez un problème inrmier et deux directives dans le plan thérapeutique inrmier de madame Faustin. Extrait CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date Heure 2015-04-24 09:45 N° 1 Problème ou besoin prioritaire Initiales Maladie de Crohn RÉSOLU / SATISFAIT Professionnels / Date Heure Initiales Services concernés M.J.O. SUIVI CLINIQUE Date Heure N° Signature de l’inrmière Marie-Josée Ouellet, inf. Directive inrmière Initiales M.J.O. Programme / Service Initiales Signature de l’inrmière CESSÉE / RÉALISÉE Date Heure Initiales Initiales Programme / Service Chirurgie Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Nommez la difculté principale que vous avez éprouvée au cours de l’évaluation de madame Faustin. 2. Pourquoi devez-vous être consciente de votre propre héritage culturel ? 3. Quelles auraient pu être les conséquences de ne pas tenir compte de l’héritage culturel de madame Faustin ? Chapitre 2 4. Pourquoi est-il important d’évaluer si la personne est au stade d’acculturation, d’assimilation ou du biculturalisme dans le cas de madame Faustin ? 5. An d’évaluer les croyances et les pratiques en matière de santé de madame Faustin, quel outil auriez-vous pu utiliser ? Compétence culturelle : les soins selon la culture 39 Dossier : Anne-Sophie Chamberland Anne-Sophie, âgée de 15 ans, se présente à la clinique sans rendez-vous avec sa mère ; vous devez procéder à son évaluation avant qu’elle rencontre le médecin. C’est la première fois que vous rencontrez cette cliente ; elle est suivie par l’un des médecins de la clinique, mais celui-ci est absent aujourd’hui. Avant de l’appeler par l’interphone, vous consultez rapidement son dossier. Vous remarquez qu’elle a eu ses 15 ans la semaine dernière et qu’elle n’a pas de problèmes de santé connus outre une allergie à la céfazoline. Anne-Sophie entre dans le bureau et s’assoit sans croiser votre regard. Vous la saluez en l’appelant par son prénom, et elle vous répond en regardant le sol. Vous fermez la porte et vous asseyez au bureau devant elle. Elle est assise, les jambes et les bras croisés. Vous amorcez l’entrevue en lui posant la question suivante : « Qu’estce qui vous amène à venir nous consulter ce matin ? » Anne-Sophie se replace un peu sur la chaise et remue sa jambe croisée pendant quelques secondes avant de soupirer. Elle regarde sa mère assise à côté d’elle, puis elle répond d’une voix faible : « J’ai un problème d’acné, et ça me décourage. J’en ai plein les épaules et le dos, c’est dégueulasse ! » Vous remarquez la présence d’acné sur la joue droite d’Anne-Sophie. Vous lui posez ensuite quelques questions. Vous : « Depuis combien de temps est-ce que cela a commencé ? » Anne-Sophie hésite avant de ré-pondre : « Ça fait environ une année que j’ai de l’acné, mais c’est moins pire dans le visage depuis… que je prends la pilule contraceptive. » Vous remarquez que sa mère semble surprise. L’entrevue est une rencontre entre l’inrmière et une personne qui présente un problème de santé. Le principal objectif de l’entrevue est de constituer l’histoire de santé de cette personne. Elle doit entre autres inclure un portrait de ses forces (capacités) et de ses faiblesses (problèmes). L’histoire de santé fera ainsi le lien vers les prochaines étapes, soit la collecte de données et l’examen physique. Pour constituer l’histoire de santé d’une personne, l’entrevue est considérée comme l’étape la plus importante de la collecte des données. Elle permet de recueillir des données subjectives, soit ce que la personne dit d’elle-même, par exemple sa tristesse exprimée à la suite d’un diagnostic de cancer. L’entrevue est souvent la première et la meilleure occasion pour la personne d’exprimer sa perception de son état de santé. Vous : « Depuis combien de temps avez-vous commencé à prendre la pilule contraceptive ? » 3 Anne-Sophie : « Il y a trois mois. » Vous : « Lorsque vous dites que c’est moins pire dans le visage, qu’est-ce que vous voulez dire exactement ? » Anne-Sophie : « J’en ai moins dans la face, mais j’ai le dos comme un champ de fraises. C’est rendu que j’ai honte de me mettre en maillot de bain. » Vous vous penchez vers l’avant et faites un signe d’acquiescement. Elle ajoute : « Je ne mets plus de camisoles ni de robes spaghetti, je ne veux pas qu’on me trouve dégoûtante. » Vous : « Je comprends que c’est difcile pour vous, ça vous empêche de porter les vêtements que vous aimez. » Anne-Sophie : « C’est clair ! Tu peux me tutoyer en passant, ça me rend mal à l’aise que tu me vouvoies. » Silence. Vous : « Pour être certaine de bien évaluer le problème et ne rien oublier, je vais devoir te poser encore quelques questions. Certaines pourraient te donner l’impression qu’il n’y a pas de rapport avec ton problème, mais elles vont me permettre de mieux le cerner et de t’aider plus efficacement. Il est important de répondre de façon honnête, sans restrictions. D’accord ? » Anne-Sophie vous regarde, puis regarde sa mère et dit : « OK ». Elles se retournent ensuite vers la porte puisque quelqu’un cogne. Il s’agit de votre collègue qui veut vous emprunter le glucomètre, car celui qui se trouve dans son bureau est défectueux. Le système de soins de santé peut donner l’impression aux clients de perdre une certaine liberté d’action, mais également d’expression. L’entrevue permet donc à la personne de s’exprimer librement, car c’est elle-même qui détient l’information la concernant et qui est susceptible d’inuer sur son état de santé. L’habileté de l’inrmière à réaliser une entrevue efcace facilitera l’établissement d’une relation de conance et permettra de rassembler les données nécessaires. Pour que l’entrevue soit réussie, l’inrmière doit respecter une démarche. 1. Recueillir des données complètes et exactes sur l’état de santé de la personne, y compris la description et la chronologie des symptômes de la maladie. 2. Établir un climat de conance permettant à la personne de se sentir comprise par rapport à son Q uestion de suivi Relevez une donnée subjective recueillie au cours de l’entrevue. Q uestion de suivi Nommez deux données objectives que vous avez recueillies dans la situation d’Anne-Sophie. Chapitre 3 Entrevue 41 état de santé. Elle aura alors la volonté de partager ses problèmes avec l’inrmière. 3. Introduire des éléments d’enseignement qui permettront à la personne de participer à la reconnaissance de ses problèmes de santé. 4. Créer une relation thérapeutique qui facilitera le soutien moral au moment de l’annonce du diagnostic et de la planication du traitement et des soins. 5. Intégrer, si possible, les outils de promotion de la santé et de prévention de la maladie. Il importe de considérer l’entrevue comme étant une sorte de contrat ou d’entente implicite entre l’inrmière et la personne. Un contrat est constitué de règles écrites et non écrites. Dans le cas de l’entrevue, l’entente est basée sur les notions de besoins et d’attentes exprimés par la personne en matière de soins de santé et sur les soins prodigués par l’inrmière. L’objectif commun est de maintenir une santé optimale pour la personne ou de tendre vers celle-ci. An de réaliser une entrevue optimale, l’inrmière prend en compte plusieurs éléments, et ce, avant et pendant l’entrevue : • déterminer le moment et le lieu de l’entrevue ; • se présenter et préciser son rôle ; • décrire le déroulement de l’entrevue ; • expliquer en détail en quoi consiste une histoire de santé ; • établir la durée de l’entrevue ; • permettre au client de prendre la décision de se prêter à l’entrevue ; • déterminer le degré de participation de chaque personne à l’entrevue ; • s’assurer que chacun participera activement à l’entrevue ; • faire intervenir les personnes accompagnatrices ou importantes pour le client ; • expliquer la notion de condentialité des données et dans quelle mesure elle peut être limitée ; • préciser à quoi serviront les données recueillies. Même si la personne a déjà été informée en partie de ces éléments (p. ex., par une réceptionniste), certains points importants doivent être clariés dès le départ par l’infirmière. Il faut éviter toute mésentente concernant l’entrevue qui pourrait entraîner du ressentiment ou de la colère. L’inrmière doit faire preuve d’ouverture et de conance, ce qui facilitera la rencontre. 3.1 Processus de communication Le processus de communication est à la base de l’entrevue, car il conduit l’inrmière à échanger de l’information avec la personne sur des sujets 42 Partie 1 Évaluation globale de la personne parfois délicats. La communication est donc un média permettant une compréhension mutuelle entre l’inrmière et le client. Advenant une situation où l’inrmière ne serait pas en mesure de comprendre adéquatement un message transmis par le client, ou l’inverse, la communication pourrait alors se révéler difcile, voire impossible. La communication peut paraître simple en apparence, mais il en est tout autrement dans la réalité. C’est notamment à l’égard de la complexité de la communication que l’enseignement de l’inrmière revêt une importance particulière. En effet, la communication est plus que la simple action de savoir parler ou celle de savoir écouter. Il s’agit plutôt d’une compétence constituée de plusieurs autres éléments incluant des actions conscientes, mais aussi inconscientes. 3.1.1 Inrmière : l’aidante L’inrmière doit être consciente de sa communication verbale ou, en d’autres termes, des mots qu’elle utilise et du ton de sa voix. Au-delà de la communication verbale, la communication non verbale représente également un élément majeur. Il est alors question de langage corporel, c’est-à-dire la posture, la gestuelle, l’expression du visage, le contact visuel, la position des pieds, le toucher et même la façon de placer sa chaise. Les messages transmis de façon non verbale dépendent plus de l’inconscient que les messages verbaux ; par conséquent, ils reètent probablement mieux les vrais sentiments de l’inrmière. 3.1.2 Client : l’aidé L’inrmière sait que les messages qu’elle envoie ne sont qu’une partie du processus de la communication. De fait, les paroles et les gestes doivent être interprétés dans un contexte précis. Si l’inrmière a sa propre idée en tête lorsqu’elle parle, l’aidé, quant à lui, interprète le message à sa manière. Il lui donne un sens déterminé en fonction de ses expériences antérieures, de sa culture, de sa conception de lui-même, de son état de santé physique, mais aussi émotionnel. Parfois, ces contextes ne coïncident pas. Par exemple, il est frustrant pour l’aidé de s’apercevoir qu’au moment où il tente de communiquer une émotion à l’inrmière, celle-ci la comprend différemment. Ainsi, le message peut être mal interprété. De là l’importance de s’assurer d’une compréhension mutuelle entre l’inrmière et l’aidé an d’obtenir une communication réussie. L’inrmière n’est donc pas à l’abri des malentendus lorsqu’elle prodigue des soins, en particulier si la personne éprouve des problèmes de santé. En effet, dans le cadre d’une hospitalisation, ou d’un problème de santé, le système de référence de l’aidé peut être modifié puisque ce dernier est plus concentré sur sa maladie. Il cherchera alors à intensier la communication avec l’inrmière an de trouver un certain réconfort. Cette situation peut conduire l’aidé à confondre une relation professionnelle avec une relation de proximité et ainsi à établir une relation de dépendance envers l’inrmière. La communication est l’une des compétences de base qui peuvent découler des expériences vécues. Quelle que soit son expérience, l’inrmière doit toujours chercher à peauner cette compétence auprès de tous les clients. Il s’agit d’un outil de travail fondamental pour assurer la qualité des soins de santé. Il revêt donc une importance aussi grande que l’inspection ou la palpation. Pour optimiser la compétence de communiquer, l’inrmière doit prendre conscience de certains facteurs internes et externes et de leurs inuences sur la communication. 3.1.3 Facteurs internes Les facteurs internes se résument à ce que l’inrmière apporte comme élément pendant l’entrevue. Il est primordial que l’inrmière développe trois comportements associés à ces facteurs internes, c’est-à-dire aimer l’autre, être empathique et posséder une bonne capacité d’écoute. Amour de l’autre Il ne s’agit pas ici du sentiment d’attachement intense qui lie deux êtres, basé à la fois sur la tendresse et l’attirance physique. Il est plutôt question de l’amour de son prochain, du sentiment issu du dévouement pour une personne. Ce facteur s’avère essentiel pour une infirmière dans un contexte professionnel. Elle doit acquérir une habileté dans ses relations interpersonnelles. Cela signie qu’il lui faut avoir une bonne idée des forces de la personne et être tolérante envers ses faiblesses. Il est essentiel de réaliser une entrevue dans une atmosphère de cordialité. Un tel climat permet à la personne de se sentir en conance et de parler de son état de santé à l’inrmière sans craindre son jugement. Il faut bien comprendre que le respect de l’autre dépasse la considération médicale du client. Le but n’est pas d’en faire une personne dépendante, mais bien de l’aider à devenir de plus en plus responsable et autonome à l’égard de son état de santé et de lui permettre de grandir dans cette expérience. L’inrmière peut alors faire appel à d’autres professionnels de la santé qui sont en mesure d’accompagner la personne dans ce cheminement. Les clients doivent donc décider dans quelle mesure ils utiliseront ces ressources en fonction de leur propre parcours. Empathie L’empathie est cette capacité de regarder le monde à travers les yeux d’une autre personne, à l’intérieur de son cadre de référence, tout en restant soi-même. L’empathie, c’est reconnaître et accepter l’autre avec ses sentiments et ses émotions, sans le juger. Cela ne veut pas dire pour l’inrmière de vivre la vie, les émotions et les sentiments du client, mais bien de les comprendre. Dans le cas où l’inrmière déciderait de prendre soin du client en se mettant dans la peau de la personne et en partageant sa douleur, cette relation serait alors qualiée de sympathique plutôt que d’empathique. Lorsque l’inrmière cesse d’être empathique pour devenir sympathique envers la personne, elle cesse d’être aidante. Il s’agit plutôt ici de comprendre la situation du client et la façon dont il la vit. 3 Capacité d’écoute Dans le processus de la communication, l’écoute ne tient pas un rôle passif ; au contraire, celui-ci est actif et exigeant, ce qui nécessite une attention complète. L’inrmière ne peut être centrée sur ses problèmes personnels ou sur ceux d’autres clients pendant qu’elle procède à l’écoute du client, car elle pourrait négliger de retenir des faits importants le concernant. À partir du moment où l’inrmière commence une entrevue avec une personne, rien n’est plus important : celle-ci devient sa seule préoccupation. L’écoute active ouvre la porte à la compréhension. Il faut donc que l’inrmière écoute ce que la personne a à lui dire. En effet, pendant que celle-ci parle, l’inrmière ne doit pas penser à ce qu’elle va lui répondre ou à la question qu’elle lui posera. De plus, elle doit s’adapter au rythme du client puisqu’il arrive rarement qu’une personne raconte son histoire de santé ou relate un événement de façon chronologique. Tout en restant attentive, l’inrmière note la façon dont la personne raconte son histoire, reconnaît les difcultés de langage et les troubles de la mémoire, porte une attention au ton de la voix et même à ce que la personne oublie de mentionner. L’ENCADRE 3.1 en présente un exemple. ENCADRÉ 3.1 Q uestion de suivi Anne-Sophie vous semblet-elle à l’aise de communiquer avec vous ? Justiez votre réponse à partir des éléments de communication non verbale évoqués dans la situation. Cas clinique Sandra Bérubé, âgée de 32 ans, consulte une inrmière pour un problème de maux de tête dont elle souffre depuis les trois derniers mois. L’acide acétylsalicylique ne la soulage pas, et cette situation nuit à son rendement au travail. L’inrmière l’a rencontrée pendant 30 minutes. Elle remarque que madame Bérubé ne maintient pas de contact visuel durant l’entrevue et regarde au sol la plupart du temps. Son ton de voix est triste, et elle parle lentement. Durant l’entrevue, la cliente n’a jamais fait mention de son conjoint, bien qu’ils soient mariés depuis cinq mois seulement. Enn, l’inrmière lui dit : « Je ne vous ai pas entendu parler de votre mari. Parlez-moi de lui. » Madame Bérubé mentionne que celui-ci a perdu son emploi quelques mois après leur mariage, et ce, en raison d’un problème de consommation d’alcool. Lorsque la cliente évoque son mari, son ton de voix est plus tendu, elle semble plus nerveuse, car elle se triture les doigts et bouge constamment sur sa chaise. Bien que madame Bérubé subisse actuellement un stress personnel important et de la panique, elle n’a jamais pensé que ses maux de tête pourraient être liés à cette situation. Chapitre 3 Entrevue 43 Conscience de soi Pour pouvoir communiquer efcacement avec les autres, l’infirmière doit bien se connaître. Comprendre les partis pris, les préjugés et les stéréotypes qu’elle entretient fait partie intégrante du perfectionnement de ses compétences à titre d’intervieweuse. Ainsi, en connaissant ses comportements et ses réactions, elle prend conscience des répercussions négatives qu’ont certains de ses actes involontaires sur la communication. Son opinion est peut-être tranchée en ce qui concerne la grossesse précoce, l’orientation sexuelle ou la consommation de drogues illicites. Or, en reconnaissant ses partis pris et ses valeurs, l’inrmière est en mesure d’en faire abstraction lorsqu’elle sera appelée à côtoyer des personnes dont les valeurs pourraient être complètement différentes des siennes. Une partie du travail d’intervieweuse consiste à cerner, puis à laisser de côté ses préjugés an de prodiguer des soins de façon efcace à divers types de clients. Cependant, si elle se sent incapable de faire abstraction de certaines de ses valeurs, l’inrmière pourrait se voir obligée de demander à un collègue de la remplacer dans des situations données. Par exemple, une inrmière fervente catholique pourrait être fortement opposée à l’avortement. Elle doit préparer un entretien avec une adolescente de 15 ans enceinte de 8 semaines. Cette inrmière sait pertinemment que la jeune fille a pris rendez-vous pour discuter des choix qui s’offrent à elle. Si l’infirmière n’est pas en mesure de faire abstraction de sa conviction profonde selon laquelle l’avortement est mal et qu’elle se juge incapable de bien conseiller cette adolescente, il serait préférable qu’elle demande à un collègue de diriger l’entretien à sa place an que la cliente puisse être bien informée. 3.1.4 Facteurs externes L’inrmière doit accorder de l’importance à l’aménagement des lieux. Il peut s’agir de la chambre d’un centre hospitalier, d’une salle d’examen, d’un bureau, d’une clinique ou du domicile de la personne, où elle a alors moins de marge de manœuvre. Peu importe le lieu, des conditions optimales sont nécessaires pour réaliser un bon entretien. Respect de la vie privée Q uestion de suivi Relevez les facteurs nuisibles à la communication dans la situation d’Anne-Sophie. 44 Partie 1 Il est important de disposer d’un espace assurant le respect de la vie privée et de l’intimité, comme une chambre individuelle au centre hospitalier, un bureau dans une clinique ou le domicile du client. L’inrmière devra peut-être demander aux personnes présentes de se retirer un moment ou trouver une pièce inoccupée afin de procéder à l’entrevue. Si aucun de ces endroits n’est libre, il faut assurer l’intimité psychologique du client ; à cet effet, le rideau de partition en milieu hospitalier peut sufre, pourvu que l’inrmière soit certaine Évaluation globale de la personne que l’entrevue se déroulera en privé et que personne ne viendra l’interrompre. Dérangement minimum Aucune interruption ne doit être tolérée, sauf en cas d’urgence, car elle perturbe le déroulement de l’entrevue. Il faut donc informer le personnel soignant qu’une entrevue est en cours et demander à ne pas être dérangé pendant ce temps. Il est important de se concentrer sur l’établissement d’un climat propice avec la personne et toujours avoir en tête qu’une interruption peut détruire, en quelques secondes, le climat et la relation qui ont été établis. Environnement physique • La température ambiante doit être réglée à un degré confortable. • La salle doit être sufsamment éclairée pour que l’inrmière et la personne puissent se voir, tout en évitant d’accentuer l’éclairage sur celle-ci. • L’utilisation de la télévision, de la radio et de l’ordinateur ne doit pas être permise an d’éviter les perturbateurs pendant l’entrevue. • Les instruments tels que l’otoscope, l’ophtalmoscope et le sphygmomanomètre, nécessaires à l’inrmière, doivent être placés dans un endroit de façon à éviter de distraire la personne. Il en est de même pour les dossiers des autres clients ou pour les effets personnels de l’inrmière. La salle doit être libre de tout équipement superu. • L’inrmière se place à environ un mètre ou un mètre et demi du client, pour ne pas envahir son espace personnel, et ainsi favoriser un climat de conance. Par contre, si l’inrmière se trouve trop éloignée, elle pourrait donner l’impression de se montrer distante par rapport aux problèmes de la personne. • L’inrmière devrait adopter une position confortable et s’assurer qu’elle et la personne sont assises face à face et que leurs yeux se trouvent à la même hauteur FIGURE 3.1. L’inrmière devrait également éviter de se tenir derrière un bureau ou une table : ces obstacles pourraient être perçus comme une nuisance à la communication. De plus, elle ne devrait pas rester debout, car cela peut générer deux perceptions : elle communique sa hâte de terminer l’entrevue ou elle afche une attitude de supériorité. En d’autres termes, cette position entraîne une relation d’autorité. Au contraire, lorsque l’inrmière est assise, la personne ressent une certaine maîtrise de l’environnement. • Lorsque la personne interviewée se trouve alitée, la position face à face est recommandée. La personne ne devrait pas xer le plafond durant l’entretien, car, dans cette situation, elle perdra le contact visuel avec l’inrmière. Cela peut perturber la communication. • Elle peut être menaçante pour la personne, particulièrement si l’inrmière aborde des questions délicates (p. ex., la quantité d’alcool et de drogues consommés, le nombre de partenaires sexuels, un comportement violent). Par contre, si la personne se sent en conance, la plupart du temps, elle se livrera sans aucune réserve. FIGURE 3.1 Position face à face Habillement • La personne doit rester habillée normalement, sauf en cas d’urgence. • L’inrmière adopte une tenue vestimentaire appropriée et respecte les normes professionnelles en vigueur dans l’établissement : des vêtements classiques, un uniforme ou un sarrau pourraient être recommandés (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2006). Prise de notes La prise de notes est inévitable, mais elle peut s’avérer dérangeante pour la personne interviewée. Par ailleurs, une fois l’entrevue terminée, l’inrmière ne peut pas se er entièrement à sa mémoire an de documenter les hospitalisations antérieures ou l’examen des systèmes. Mais elle doit savoir choisir le bon moment pour écrire les notes pendant l’entrevue. Lorsque l’inrmière a recours à la prise de notes, elle doit tenir compte du fait que cette méthode de collecte de données peut engendrer des inconvénients : • Elle modie le contact visuel avec le client . • Elle dérange l’attention de l’inrmière. Dans cette situation, la personne pourrait avoir l’impression que l’inrmière lui accorde moins d’importance . • Elle peut interrompre la narration du client. Ainsi, l’inrmière pourrait lui demander de ralentir son débit verbal : « Veuillez parler moins vite, car je suis incapable de suivre vos paroles. » Le client peut alors éprouver de la frustration ou, pour faire plaisir à l’inrmière, adapter son rythme à la vitesse d’écriture de celle-ci. Dans tous les cas, le client perd son mode d’expression naturel. La prise de notes ne doit donc pas consister à écrire mot à mot le verbatim du client, mais à en dégager les grandes lignes an de pouvoir les synthétiser dans un résumé . • Elle peut empêcher l’inrmière de relever des signes non verbaux . Étant donné les inconvénients associés à la prise de notes au cours de l’entrevue, l’inrmière doit plutôt concentrer son attention sur la personne en limitant le plus possible l’écriture de renseignements. Toute prise de notes devrait être utilisée avec parcimonie an d’éviter de freiner l’expression spontanée de la personne. Avec l’expérience, l’inrmière maximisera sa prise de notes, en allant à l’essentiel. Q uestion de suivi Indiquez deux moyens que vous pourriez prendre pour contrer les facteurs nuisibles à la communication dans la situation d’Anne-Sophie. 3 Parfois, l’inrmière peut demander à un parent ou à un proche aidant de fournir les renseignements nécessaires an de compléter l’entrevue, notamment dans le cas d’un enfant ou d’une personne atteinte d’une perte cognitive. L’inrmière peut également consulter le dossier médical antérieur du client. 3.2 Techniques de communication 3.2.1 Début de l’entrevue Lorsque la personne se présente, l’inrmière doit être prête pour l’entrevue. Si elle est nouvellement diplômée, elle peut se sentir nerveuse quant à la façon d’aborder la personne. Elle doit alors se rappeler qu’il est préférable de commencer l’entrevue par une question courte ou une question de convenance. Il faut également souligner que le client ressent probablement de la nervosité lui aussi, et il peut être impatient de commencer. Pendant l’entrevue, l’inrmière s’adresse à lui en l’appelant par son nom de famille (p. ex., monsieur Jodoin ou madame Simard) et non par son prénom, en lui serrant la main et en lui demandant s’il est installé confortablement. Elle se présente et précise son rôle (si elle est une étudiante infirmière, elle doit communiquer cette information). Elle doit, par ailleurs, indiquer la raison de cette entrevue. « Madame Gauthier, je voudrais vous parler de votre maladie, celle qui vous a conduite au centre hospitalier. » « Madame Tremblay, je tiens à vous poser quelques questions sur votre santé, an que nous puissions relever les éléments positifs et les problèmes liés à votre état de santé actuel. » « Monsieur Marinelli, je tiens à vous poser quelques questions sur votre santé et sur vos activités quotidiennes habituelles, an que nous puissions planier convenablement votre prestation de soins. » Chapitre 3 Entrevue 45 Si la personne se trouve au centre hospitalier, chacun des membres de l’équipe interdisciplinaire aura à effectuer une histoire de santé. La personne pourra se sentir exaspérée parce qu’elle est dans l’obligation de répéter continuellement la même chose. Voilà l’un des éléments qui justient de donner une raison à l’entrevue, en signiant précisément que chaque professionnel effectue l’histoire de santé propre à sa discipline. Après cette brève introduction, l’inrmière pose une question ouverte pour laisser la personne s’exprimer librement. Cependant, il n’est pas opportun de parler du temps qu’il fait. L’entrevue n’est pas une visite sociale : la personne a certaines préoccupations concernant sa santé, et elle désire que l’on s’y attarde. L’inrmière doit donc établir un climat favorisant l’expression de ses préoccupations le plus tôt possible. 3.2.2 Phase de travail Dans une entrevue, la phase de travail représente la collecte des données. Les échanges pendant cette phase comprennent l’étape des questions et des réponses. Deux types de questions peuvent être posées : les questions ouvertes et les questions fermées. Le choix du type de questions varie en fonction de l’information à recueillir. Q Question ouverte uestion de suivi Relevez les deux types de questions que vous avez posées à Anne-Sophie jusqu’à présent au cours de l’entrevue et donnez un exemple de chacune. La question ouverte permet de recueillir des renseignements descriptifs. Elle indique le sujet de discussion, mais uniquement de manière générale. L’inrmière devrait l’utiliser pour commencer l’entrevue et introduire une nouvelle catégorie de questions ou lorsque la personne aborde un nouveau sujet. « Dites-moi comment je peux vous aider. » « Qu’est-ce qui vous amène au centre hospitalier ? » « Dites-moi pourquoi vous êtes venu ici aujourd’hui. » « Vous avez parlé d’essoufement. J’aimerais en savoir plus à ce sujet. » « Quels ont été vos sentiments au cours de votre dernier rendez-vous ? » La question ouverte doit être impartiale, car elle laisse la personne libre de répondre de n’importe quelle façon. Ce type de questions amène la personne à répondre comme elle le désire, au moment qu’elle trouve opportun. Cela lui permet également de s’exprimer pleinement. Que se passe-t-il, généralement, quand l’inrmière pose une question ouverte ? La personne écoute la question, elle y pense, y répond par une courte expression ou une phrase, fait une pause, puis regarde l’inrmière et attend les directives sur la manière dont l’entrevue devrait se conduire. La façon dont l’inrmière agit par la suite est la clé de l’entrevue. Il est 46 Partie 1 Évaluation globale de la personne important qu’elle ne pose aucune nouvelle question ou n’aborde aucun nouveau sujet. En effet, si elle passe à autre chose, l’inrmière pourrait négliger des éléments importants concernant la première question. Au contraire, elle devrait faire preuve de curiosité intellectuelle, en utilisant une phrase ou une question de clarication, par exemple : « Racontez-moi. » « Y a-t-il autre chose que vous voudriez me dire à ce sujet ? » Elle peut tout simplement se montrer intéressée en regardant attentivement la personne, qui sera encouragée à poursuivre sa réponse. Question fermée ou directe La question fermée (ou directe) vise à recueillir des données précises. Elle suscite une courte réponse composée de un ou deux mots, d’un oui ou d’un non, ou elle propose un choix de réponses. Alors que la question ouverte permet au client de laisser libre cours à ses pensées et à ses sentiments, la question fermée, quant à elle, limite la réponse du client TABLEAU 3.1. L’inrmière devrait privilégier l’utilisation des questions fermées après avoir posé les questions ouvertes ou si la personne demeure dans une zone grise qu’elle désire explorer particulièrement. L’inrmière utilisera également des questions fermées lorsqu’elle aura besoin d’obtenir des faits précis, par exemple sur des problèmes de santé actuels ou antérieurs. De plus, elle aura recours à ce type de questions lorsqu’elle ne dispose que de quelques minutes pour réaliser l’entrevue. En effet, un entretien où l’inrmière pose uniquement des questions ouvertes peut prendre plusieurs heures. Il faut cependant faire attention de ne pas utiliser abusivement des questions fermées. Voici des directives que l’inrmière devrait suivre. • Elle pose une seule question directe à la fois. Elle évite le bombardement de questions à la manière d’une liste d’épicerie : « Avez-vous déjà eu de la douleur ? Une vision double ? Des rougeurs dans les yeux ? » Elle évite aussi les questions qui pourraient entraîner une double réponse : « Avezvous fait de l’exercice ou suivi un régime an de maintenir votre poids ? » La personne ne saura pas quoi répondre dans cette situation ; si elle répond « oui », l’inrmière ne pourra savoir de quelle question il s’agit. • Elle utilise un langage compréhensible pour la personne. Elle aura peut-être besoin d’employer des expressions régionales ; par exemple, le mot « fondement », qui signie « base » en français normatif, peut également faire référence aux organes génitaux pour certaines personnes. Techniques d’entrevue permettant de préciser l’histoire de santé L’inrmière doit encourager la personne à formuler et à clarier ses idées. Elle commence par une question ouverte grâce à laquelle le client pourra s’exprimer. Son rôle est de guider celui-ci an qu’il ne s’égare pas dans un sujet hors propos. Elle doit donc lui poser des questions qui l’aideront à clarier son histoire de santé. Certaines personnes visitent des établissements de santé pour une courte période ; leur histoire de santé est alors relativement simple. Pour ces personnes, deux types de techniques (la facilitation et le silence) sufront an d’obtenir un portrait global de leur situation de santé. Par contre, certaines personnes ont une histoire de santé beaucoup plus complexe, elles présentent un long épisode de maladie chronique ou un état émotionnel grave. Dans ces conditions, diverses questions permettront à l’inrmière de recueillir des renseignements supplémentaires sans diminuer la qualité des données primordiales ou sans les mettre de côté. Il existe neuf types de techniques d’entrevue. Les cinq premières techniques – la facilitation, le silence, la réexion, l’empathie et la clarication – sont souvent utilisées pour guider les réactions ou les sen timents exprimés par la personne au cours de l’entrevue. L’inrmière adaptera ses techniques d’entrevue en fonction de chaque client. Dans les quatre dernières techniques – la confrontation, l’interprétation, l’explication et le résumé –, l’inrmière commence à exprimer ses propres pensées ou sentiments. Le cadre de référence passe du client à l’inrmière. En effet, dans les cinq premiers types de techniques, le client dirige la conversation ; dans les quatre autres types, c’est l’inrmière qui joue ce rôle. Facilitation Cette technique encourage la personne à en dire plus à propos d’un sujet particulier, à poursuivre son histoire (« mmm mmm, oui, continuez »). L’inrmi ère démontre, grâce à cette technique, qu’elle s’intéresse à la situation du client et qu’elle désire en apprendre davantage sur lui. Il suft pour cela qu’elle maintienne un contact visuel et qu’elle se penche légèrement vers l’avant en prêtant attention au client, en faisant des signes, comme « oui » de la tête, ou encore en faisant un geste de la main signiant « oui, allez-y », pour encourager la personne à continuer de parler. Silence Même en entrevue, le silence est d’or. Après les réponses aux questions ouvertes, l’attention silencieuse montre au client qu’il a le temps de penser à ce qu’il veut dire et de l’organiser sans être interrompu. Les inrmières ont souvent tendance à briser ces périodes de silence. Or, si la personne est continuellement interrompue dans ses moments de silence, parce que ceux-ci génèrent un malaise chez l’inrmière, cela peut briser le l de ses pensées et ainsi nuire au bon déroulement de l’entrevue. L’inrmière peut en effet interrompre ces moments de silence parce qu’elle se sent responsable TABLEAU 3.1 Comparaison entre question ouverte et question fermée QUESTION OUVERTE QUESTION FERMÉE (OU DIRECTE) Permet d’obtenir une information narrative. Permet d’obtenir une information précise. Entraîne une réponse longue. Entraîne une réponse courte en un ou deux mots. Suscite des sentiments, des opinions, des idées. Suscite l’expression des faits. Construit et améliore le climat de conance. Limite les rapports et génère des interactions neutres. Exemple : « Parlez-moi de vos maux de tête. » Exemple : « Avez-vous mal à la tête d’un seul ou des deux côtés ? » d’entretenir un dialogue ou qu’elle éprouve un sentiment de culpabilité lorsque la discussion s’arrête. Elle doit toutefois comprendre que ces périodes sans paroles ont des avantages, comme celui de laisser la personne restructurer sa pensée. De plus, le silence permet à l’inrmière d’observer discrètement la personne, de noter des indices non verbaux et de planier sa prochaine intervention. 3 Q uestion de suivi Quelles techniques d’entrevues avez-vous utilisées dans la situation d’Anne-Sophie ? Réexion Avec cette technique, l’inrmière fait écho aux paroles du client, en répétant ce qu’il vient de dire. Dans cet exemple, l’inrmière concentre son attention sur une expression précise et aide la personne à continuer l’explication à sa façon : Client : « Je suis ici parce que j’ai toujours mal à la tête. » Inrmière : « Vous avez des maux de tête ? » Client : « Oui, ils commencent le matin, puis augmentent en intensité pendant la journée. Je pense qu’ils sont liés au stress que je vis au travail. » La technique de la réexion peut aussi aider la personne à approfondir sa pensée, déjà exprimée antérieurement. L’inrmière l’encourage simplement à poursuivre son propos. Cliente : « Il est tellement difcile d’avoir à rester couchée sur le dos à l’hôpital avec cette grossesse. J’ai deux enfants à la maison. Je crains qu’ils ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin. » Inrmière : « Vous êtes anxieuse et inquiète au sujet de vos enfants ? » L’inrmière agit comme un miroir qui reformule dans des mots différents les sentiments que la personne exprime, ce qui permet à celle-ci de préciser son problème. Empathie Un symptôme physique, un état psychologique ou une maladie sont souvent accompagnés d’émotions. Plusieurs personnes ont de la difculté à les exprimer, Chapitre 3 Entrevue 47 peut-être parce qu’elles ne trouvent pas les bons mots ou qu’elles ressentent de l’embarras. L’inrmière qui émet une réponse empathique reconnaît un sentiment et, par conséquent, permet à la personne de l’exprimer. Quand la technique d’empathie est utilisée, la personne se sent acceptéeet peut parler ouvertement de ses sentiments. L’exemple suivant illustre une réponse empathique. Client (sarcastique) : « Je possède ma propre entreprise, je dirige 20 employés tous les jours et maintenant, je suis ici, devant vous, à solliciter de l’aide pour régler mon problème. » Inrmière : « Il doit être difcile d’éprouver un sentiment de dépendance lorsqu’on est habitué à tout diriger. » La réponse de l’inrmière n’entrave pas la relation de conance. Il faut éviter les déclarations faussement rassurantes du type : « Oh ! Vous pourrez vous remettre au travail en un rien de temps. » Il importe de renforcer la relation de conance, car la personne se sent alors comprise. Cette technique est en soi thérapeutique parce qu’elle ne conne pas la personne à sa maladie et à ses sentiments. Voici d’autres réponses empathiques : « Cela doit être très dur pour vous. » « Je comprends. » Un geste peut également être utilisé pour exprimer de l’empathie. Par exemple, l’inrmière peut simplement placer sa main sur le bras ou l’épaule de la personne FIGURE 3.2. Inrmière : « Maintenant, ce que je comprends, c’est que cette lourdeur que vous ressentez dans la poitrine quand vous enlevez de la neige ou montez un escalier disparaît lorsque vous arrêtez ces activités. Est-ce exact ? » Client : « Oui, vous avez bien compris. » Dans les quatre prochaines techniques énumérées (confrontation, interprétation, explication, résumé), le cadre de référence se déplace du point de vue du client à celui de l’inrmière. Ces techniques incluent maintenant les pensées, les sentiments et les impressions de l’inrmière, qui ne doit les utiliser que lorsque la situation l’exige. Si l’inrmière y a trop souvent recours, il se peut qu’elle prenne en charge la problématique du client. Confrontation Dans le cas de la confrontation, l’inrmière constate que, dans une certaine mesure, des sentiments ou des émotions manifestés par le client lui semblent contradictoires. Elle formule des commentaires honnêtes sur ce qu’elle voit ou ressent. Cela peut être utile dans le cas d’une contradiction : « Vous dites que vous n’avez pas de douleur, mais lorsque je vous touche ici, vous grimacez. » L’inrmière peut vérier les afrmations de la personne lorsqu’elle observe que certaines réponses ne correspondent pas à celles données précédemment : « Plus tôt, vous avez dit que vous ne consommiez jamais d’alcool et maintenant vous dites que vous aviez pris quelques verres après le travail. » Interprétation Cette technique n’est pas fondée sur une observation directe comme dans le cas de la confrontation, mais elle se base plutôt sur la compréhension. Elle relie différents événements, fait des associations de cause à effet entre des éléments distincts : « Il semble que chaque fois que vous ressentez de la douleur à l’estomac, vous avez eu une certaine forme de stress dans votre vie. » L’interprétation peut s’appliquer également aux sentiments et aider la personne à mieux les comprendre. FIGURE 3.2 Un geste empathique de l’inrmière permet à la personne de se sentir comprise. Client : « J’ai décidé de cesser ce traitement. Mais je n’arrive pas à le dire à mon médecin. Chaque fois que je la rencontre, je me referme sur moi-même et je n’ose rien dire. » Inrmière : « Avez-vous peur de sa réaction ? » Clarication L’inrmière a recours à cette technique lorsque les mots qu’emploie la personne ne sont pas clairs (p. ex. : « Dites-moi ce que vous entendez par “du sang pas bon” »). La clarication est également utilisée pour résumer les paroles de la personne ou les simplier pour les rendre plus claires. Cette technique aide l’inrmière à vérier si elle est dans la bonne voie. Par la suite, elle demandera à la personne si celle-ci est en accord avec son interprétation, comme ici : 48 Partie 1 Évaluation globale de la personne Dans ce genre de situation, l’inrmière peut mal interpréter ce que la personne exprime. Si tel est le cas, la personne va peut-être recadrer l’inrmière dans son interprétation de la situation. Dans ce cas, elle permettra à l’inrmière d’entamer rapidement une discussion plus approfondie sur le sujet. Explication Avec cette technique, l’infirmière partage une information – subjective ou objective – avec le client. Cela peut aussi bien concerner l’horaire (p. ex. : « La séance de physiothérapie aura lieu à 10 h. ») que l’origine d’une intervention : « La raison pour laquelle vous ne pouvez pas manger ni boire avant votre analyse de sang, c’est que la nourriture va modier les résultats du test. » des réponses incomplètes ou inappropriées TABLEAU 3.2. Résumé L’inrmière doit apprendre à écouter avec ses yeux aussi bien qu’avec ses oreilles. Les modes de communication non verbale incluent l’apparence physique, la posture, les gestes, l’expression du visage, l’attitude, le contact visuel, la voix, le toucher, les odeurs, les bruits et les mouvements. Ces messages non verbaux sont très importants dans une entrevue et précisément dans la transmission de l’information, en particulier sur le plan des émotions. Quand les messages verbaux et non verbaux d’une personne sont en adéquation, la communication verbale prend le dessus. Par contre, quand les messages verbaux contredisent les messages non verbaux, ces derniers tendent à reéter davantage la réalité, car ils sont moins conscients. La discipline qui a pour objet l’étude de la communication non verbale se nomme synergologie. Il s’agit d’un compte rendu nal de ce que l’inrmière a compris du problème de santé de la personne. L’inrmière condense les faits et dresse un portrait de sa perception de la situation. Il s’agit d’un type de validation, dans la mesure où la personne peut conrmer ou inrmer les propos rapportés. Lorsque vient le temps du résumé, à la n de l’entrevue, cela indique que celle-ci achève. 3.2.3 Objectifs et pièges de l’entrevue Les compétences verbales mentionnées plus haut sont susceptibles d’améliorer le déroulement de l’entrevue. Toutefois, certains éléments, ou pièges, peuvent nuire à celui-ci. Comme l’inrmière est soucieuse d’aider la personne, elle peut facilement tomber dans ces pièges, qui risquent d’engendrer TABLEAU 3.2 3.2.4 Communication non verbale 3 Objectifs de l’entrevue et pièges à éviter OBJECTIF MOYENS RÉSULTATS PIÈGES À ÉVITER Recueillir des données complètes et exactes sur l’état de santé de la personne. • L’inrmière a recours à des questions ouvertes et à des questions fermées. • Mène à l’établissement d’un portrait de santé global du client. • Poser des questions directives ou tendancieuses. • Utiliser le « pourquoi ? ». Établir un climat de conance permettant à la personne de se sentir comprise. • L’inrmière agit de façon authentique et respectueuse. • Favorise le partage de problèmes avec l’inrmière. • Recourir à l’autorité. Favoriser l’enseignement. • L’inrmière cherche à connaître les préoccupations réelles du client. • L’inrmière sera en mesure d’aider le client dans son processus décisionnel. Ultimement, l’inrmière devrait favoriser l’autoprise en charge chez le client. • Permet au client de participer à la reconnaissance de ses problèmes de santé. • Encourage la participation active du client dans le processus de résolution de problèmes. • Donner des conseils non désirés. • Employer un langage détourné. Établir une relation thérapeutique. • L’inrmière pose des questions ouvertes favorisant les discussions franches et honnêtes tout en réalisant une écoute active. • L’inrmière emploie des termes précis. • Facilite le soutien moral dans les moments difciles. • Favorise une meilleure planication des soins. • Désamorce la crise et réduit l’anxiété. • Adopter une attitude faussement rassurante. • Utiliser un langage détourné. • Employer un jargon professionnel. • Parler abondamment et de façon distante. • Utiliser une terminologie impersonnelle. • Interrompre la conversation. Promouvoir la santé et prévenir la maladie. • L’inrmière intègre les outils de promotion de la santé et de prévention. • Permet au client de prendre en charge les problèmes de santé actuels ou potentiels. • Encourage le client à en apprendre plus sur lui-même et à mieux adapter ses comportements. • Recourir à l’autorité. • Poser des questions directives ou tendancieuses. Chapitre 3 Entrevue 49 Apparence physique Dans son ouvrage bien connu Le stress de la vie, Hans Selye (1956) rapporte qu’il a commencé, lorsqu’il était étudiant, à observer les rapports qui existent entre le corps et le stress. Il a noté que certaines personnes n’avaient pas l’air « bien », mais ne présentaient pas les caractéristiques ou les signes pouvant mener à un diagnostic médical précis. Ces personnes se sentaient et avaient l’air tout simplement malades. Le même point de vue peut s’appliquer à l’inrmière dans son travail auprès des clients. Une personne qui néglige son apparence et son hygiène peut laisser suggérer qu’elle est trop malade pour prendre soin d’elle-même ou qu’elle souffre d’une dysfonction émotionnelle comme la dépression. Le choix de vêtements envoie également un message : il projette l’image d’un rôle (étudiant, travailleur manuel ou travailleur de bureau), d’un statut professionnel (inrmière, médecin) ou d’une attitude (familière, charmeuse, rebelle). Il est donc important que l’inrmière prenne en compte cet élément dans son évaluation d’une personne tout en validant ces hypothèses par ailleurs. L’apparence de l’inrmière envoie également un message au client. Sa tenue vestimentaire peut varier selon les règlements en vigueur dans l’établissement. L’utilisation d’un uniforme peut créer un stéréotype positif (confort, expertise et identication professionnelle) ou un stéréotype négatif (distanciation, autorité). Quel que soit le choix de l’inrmière concernant le maquillage ou les vêtements, son objectif devrait être de reéter une image irréprochable de compétence, de professionnalisme et d’expertise. Posture L’inrmière observe la posture du client. Une position ouverte, représentée par des bras et des jambes détendus, reète une volonté de partager des renseignements. Une position fermée se remarque par des jambes et des bras croisés : la personne semble être sur la défensive et anxieuse. L’inrmière doit noter tout changement de posture. Une personne qui change de position tout le temps suggère qu’elle est inconfortable physiquement ou mal à l’aise avec le sujet abordé. Gestes 2 Les connaissances et les attitudes de l’inrmière adaptées à la culture du client sont abordées dans le chapitre 2, Compétence culturelle : les soins selon la culture. 50 Partie 1 Les gestes exprimés par la personne sont très révélateurs. Par exemple, des mains inclinées et détendues montrent de l’acceptation, de l’attention ou de l’accord. Par contre, des mains qui se tordent dénotent souvent de l’anxiété, tandis qu’un doigt qui pointe avec véhémence traduit de la colère. Aussi, les gestes de la main d’une personne peuvent préciser la description d’une Évaluation globale de la personne douleur. Quand une personne ressent une douleur à la poitrine, elle montre généralement celle-ci avec une main ou un poing fermé devant son sternum ; une douleur vive et fortement localisée peut être montrée en pointant un doigt à l’endroit exact : « Ça fait mal ici. » Attitude L’inrmière doit adopter une posture détendue pour créer un climat chaleureux et reéter une image de conance. Cette attitude exprime ainsi un intérêt réel envers la personne. Par contre, si l’inrmière remplit à la hâte un formulaire concernant l’histoire de santé, qu’elle regarde fréquemment sa montre, qu’elle est occupée à réaliser d’autres activités qu’elle considère comme plus importantes que d’interroger la personne, elle n’est ni aidante ni à l’écoute du client. Même si le temps de l’inrmière est limité, celle-ci doit tout de même donner l’impression d’être calme et à l’écoute de la personne : elle prendra le temps de s’asseoir et de regarder la personne en face, comme si rien d’autre ne comptait à ses yeux. Il est peutêtre préférable d’aviser la personne de la durée de l’entrevue. Ainsi, l’inrmière pourra se consacrer pleinement à cette entrevue, et elle pourra y mettre n le temps venu. Expression du visage Le visage reète une grande variété d’émotions et de conditions. Il peut paraître crispé, détendu, anxieux, suspicieux ou en colère. Une condition physique telle que la douleur ou l’essoufement se voit également dans l’expression faciale. De son côté, l’expression du visage de l’inrmière devrait reéter une attitude professionnelle : attentive, sincère et intéressée par la personne. Toute expression faciale qui dénote de l’ennui, de la distraction, du dégoût, de la critique ou de l’incrédulité est détectée par l’autre personne, et cela peut nuire à l’établissement d’une relation de conance. Contact visuel Le manque de contact avec les yeux indique que la personne est timide, réservée, embarrassée, ennuyée, intimidée, apathique ou déprimée. Cette attitude prévaut également pour l’inrmière. Il importe que celle-ci maintienne un contact visuel. Elle ne doit pas pour autant fixer la personne puisque ce type d’attitude est susceptible de rendre celle-ci mal à l’aise ; elle pourrait se sentir gênée. L’inrmière regarde la personne dans les yeux, mais en jetant des regards ailleurs de temps en temps. Elle peut devoir faire exception à cette règle lorsqu’elle interroge une personne issue d’une culture où les contacts visuels directs sont évités 2 . Voix Le ton de la voix, l’intensité et le rythme de la parole, la hauteur du son et les pauses sont tout aussi importants que les mots exprimés. Par exemple, le ton de la voix peut montrer du sarcasme, de l’incrédulité, de la sympathie ou de l’hostilité. Ainsi, une personne anxieuse parle souvent d’une voix haute et rapide. Une voix douce peut traduire de la timidité ou de la peur, alors qu’une personne malentendante peut utiliser une voix forte. Même l’utilisation de pauses transmet un message. Quand une question est simple et directe, une personne qui prend une longue pause inattendue indique qu’elle est en train de penser à une réponse, ce qui pourrait soulever des doutes quant à son honnêteté. Des pauses inhabituelles, longues et fréquentes, associées à un débit de parole lent, monotone et à une voix faible, peuvent faire soupçonner une dépression. Toucher Le sens du toucher est inuencé par l’âge de la personne, le sexe, l’origine culturelle ou l’expérience ; il peut facilement être mal interprété. Dans la plupart des cultures occidentales, l’intervention tactile est réservée aux expressions d’amour et d’affection ou aux salutations. L’inrmière ne devrait pas utiliser le toucher au cours de l’entrevue, sauf si elle connaît bien la personne et qu’elle est sûre que son geste sera bien interprété. Il faut cependant signaler qu’il s’agit d’un moyen de communication efcace, par exemple un toucher de la main ou du bras pour montrer de l’empathie. En somme, les messages non verbaux de l’inrmière qui aident et renforcent la relation de conance sont ceux qui démontrent une attention envers la personne et son acceptation inconditionnelle. Les comportements non verbaux non aidants sont ceux associés à l’inattention, à l’autorité et à la supériorité ENCADRÉ 3.2. 3.2.5 Fin de l’entrevue L’inrmière évite de terminer l’entrevue trop rapidement. Une fin brusque ou maladroite peut détruire le rapport de conance et laisser à la personne une impression négative de l’entrevue. Pour se sentir à l’aise lorsqu’elle met n à l’entrevue, l’inrmière peut poser les questions suivantes à la personne : « Y a-t-il autre chose dont vous aimeriez parler ? » que la n de l’entrevue approche. Il est aussi possible de dire quelque chose comme ceci : « Notre entrevue est presque terminée. » Aucun nouveau sujet ne devrait alors être abordé. Il s’agit d’un bon moment pour récapituler ce que l’infirmière a appris au cours de l’entrevue. Ce résumé inclut les aspects positifs de la santé, les problèmes relevés ainsi que tous les plans d’action ou l’explication de ce qui va suivre. C’est une sorte de bilan nal de l’entrevue avec la personne. Enn, l’inrmière doit remercier celle-ci pour le temps passé en sa compagnie et pour sa coopération. 3 Particularités liées au développement Entrevue avec les parents Lorsque le client est un enfant ou un mineur au sens de la loi, l’inrmière doit créer un climat de conance avec l’enfant et le ou les parents qui l’accompagnent. Elle doit s’adresser à l’enfant en premier ; toutefois, si ce dernier est âgé de un à six ans, elle se concentrera davantage sur les parents. En ignorant l’enfant temporairement, l’inrmière lui permet de la jauger en gardant une certaine distance de « sécurité ». L’enfant peut aussi observer l’interaction avec ses parents ; s’il voit que ceux-ci acceptent et apprécient l’inrmière, il sera plus détendu et participera ainsi plus facilement à la rencontre. FIGURE 3.3. ENCADRÉ 3.2 Comportements non verbaux de l’inrmière POSITIFS NÉGATIFS • Apparence professionnelle appropriée • Apparence professionnelle inacceptable pour la personne (tatouage à la figure, multiples piercings) • Égalité de la hauteur des sièges • Proximité physique de la personne • Posture ouverte et détendue • Position légèrement penchée vers la personne • Gestes facilitant l’entrevue (p. ex., se placer à la même hauteur que le client, mettre une main sur l’épaule, effectuer des gestes témoignant d’une écoute tels que les hochements de tête) • Expression du visage qui dénote de l’intérêt • Sourire dans des conditions appropriées • Position debout • Assise derrière un bureau, loin de la personne • Posture tendue • Position derrière la personne, position de retrait • Gestes perturbant l’entrevue (p. ex., pointer du doigt, se tenir les poings serrés, taper des doigts, balancer les pieds, avoir un regard distrait) • Visage sans expression, bâillements, bouche serrée • Sourcils froncés, se mordre la lèvre « Y a-t-il des questions que vous aimeriez me poser ? » • Contact visuel approprié • Regard fuyant, qui évite tout contact avec les yeux, qui se concentre sur les notes « Y a-t-il d’autres domaines que j’aurais dû explorer ? » • Ton de voix modéré • Voix stridente, son de haute fréquence • Débit verbal modéré • Débit verbal trop lent ou trop rapide • Toucher approprié • Toucher trop fréquent ou inapproprié Ces questions fournissent une dernière occasion à la personne de s’exprimer avant d’indiquer Chapitre 3 Entrevue 51 que les parents se remémorent les faits ou les étapes de l’histoire. Celle-ci peut comporter des lacunes, particulièrement si l’enfant est plutôt accompagné par un ami de la famille ou un tuteur. Durant la collecte des données, l’inrmière évite de porter un jugement quant à l’âge de réalisation de certaines étapes du développement. Les parents sont évidemment ers des réalisations de leur enfant et deviennent également très sensibles quand vient le temps d’évaluer les étapes de son développement. FIGURE 3.3 Lorsque le client est un enfant, l’inrmière doit créer un climat de conance. L’inrmière commence par interroger à la fois les parents et l’enfant. Si un des sujets se révèle délicat (p. ex., des difcultés relationnelles avec les parents, des problèmes de l’enfant à l’école ou avec les pairs), il faut mettre le sujet de côté et attendre plus tard ; l’inrmière l’explorera lorsqu’elle sera seule avec les parents. Elle devrait d’ailleurs fournir des jouets pour occuper l’enfant an de pouvoir parler aux parents, ce qui leur permet de se concentrer sur leur histoire. Les jouets peuvent aussi servir à indiquer le niveau d’attention ou d’indépendance de l’enfant. Grâce à l’entrevue, l’infirmière peut apprendre certains éléments de la dynamique familiale et évaluer l’interaction entre les parents et l’enfant. En ce qui concerne les jeunes enfants, les parents seront en mesure de fournir la totalité ou la majorité des éléments de l’histoire de santé. Ainsi, l’inrmière obtient un prol de santé de l’enfant à partir de données provenant des parents, dont le point de vue est habituellement able puisque le bien-être de l’enfant constitue généralement une priorité pour eux et qu’ils désirent l’améliorer avec l’aide de l’inrmière. Cependant, il se peut que les parents se montrent partiaux, surtout lorsqu’ils sont invités à décrire les réalisations de l’enfant ou lorsque leurs propres capacités parentales semblent remises en question. Par exemple, dans la question « Sa èvre est de 39 °C, et vous n’avez pas pris la peine de l’amener plus tôt ? », l’inrmière dit implicitement que les parents manquent de compétences, ce qui les place dans une position défensive et augmente leur anxiété. L’inrmière devrait plutôt utiliser des questions ouvertes qui permettent de bonier la description du problème et de désamorcer la menace, par exemple : « Que s’est-il passé lorsque la èvre a augmenté ? » Des parents qui ont plusieurs enfants doivent retenir un grand nombre de renseignements. L’inrmière doit donc se montrer patiente pendant 52 Partie 1 Évaluation globale de la personne L’inrmière doit parler à l’enfant en utilisant son prénom et non pas le nommer « bébé ». Elle s’adresse au parent en l’appelant par son nom, et non par « maman » ou « papa ». Aussi, elle doit bien tracer les liens de parenté. La mère de l’enfant peut avoir une relation avec un autre homme qui n’est pas nécessairement le père biologique de l’enfant. Au lieu de demander comment est la santé de « votre mari », il est préférable de poser la question de la manière suivante : « Le père de Mélanie est-il en bonne santé ? » Bien que la conversation se déroule la plupart du temps avec les parents, l’inrmière ne doit pas ignorer complètement l’enfant ; elle doit garder un contact avec lui puisqu’elle aura à effectuer plus tard son examen physique. L’inrmière peut commencer par lui poser des questions à propos des jouets avec lesquels il s’amuse ou qu’il a apportés : « Ta poupée a-t-elle un nom ? » « Quelle sorte de camion as-tu ? » L’inrmière se penche et va à la rencontre de l’enfant, elle se place de façon que ses yeux soient à la même hauteur que les siens. La grande taille d’un adulte peut représenter un obstacle insurmontable pour un jeune enfant : cette situation souligne alors son infériorité. La communication non verbale est encore plus importante chez les enfants que chez les adultes. Les enfants sont prompts à déceler des sentiments d’anxiété, de malaise ou des indices non verbaux. L’inrmière doit alors avoir une apparence physique soignée et éviter que son uniforme rende l’enfant distant. Ses gestes doivent être lents, posés et étudiés, près de son corps. Les enfants sont effrayés par des gestes rapides ou démesurés. L’inrmière n’essaie pas de maintenir un contact visuel constant, car l’enfant pourrait se sentir en danger (surtout chez les enfants en bas âge). Elle utilise une voix calme, mesurée et a recours à un vocabulaire simple et clair. Connaître le niveau de développement du langage de l’enfant est également une donnée précieuse pour la planification de la communication. Stades du développement cognitif Le processus cognitif, la perception du monde et la réponse émotionnelle à une situation donnée sont bien différents chez l’enfant et chez l’adulte. Pendant l’entrevue, il s’avère donc important que l’inrmière tienne compte du stade de développement de l’enfant lorsqu’elle souhaite discuter avec lui. La théorie cognitive-développementale de Piaget peut aider à mieux comprendre le stade auquel se trouve un enfant en vue d’orienter l’approche conformément à celui-ci TABLEAU 3.3. Piaget a examiné l’évolution d’enfants au cours des étapes successives de leur développement. Bien qu’il s’agisse d’un guide, il ne faut pas oublier que les âges apparaissant dans le tableau constituent des estimations et qu’ils varient légèrement selon le degré de maturité de l’enfant. Également, l’inrmière gardera à l’esprit que l’enfant avec qui elle tente de communiquer peut être en crise en raison d’une maladie. Or, la régression constitue une réaction courante durant des périodes de stress intense. Ainsi, il se peut que l’enfant régresse en ce qui a trait à sa capacité à communiquer pendant une telle période. Nourrissons La communication non verbale est la principale façon de s’exprimer des nourrissons. La plupart d’entre eux paraissent calmes et détendus quand tous leurs besoins sont satisfaits, mais ils pleurent quand ils sont apeurés, affamés, fatigués ou inconfortables. Ils réagissent bien à un toucher léger, à une manipulation douce et à une voix calme. Celleci constitue un réconfort pour les nourrissons, TABLEAU 3.3 même s’ils ne comprennent pas les paroles. Les plus âgés développent toutefois une anxiété envers les étrangers, mais ils sont plus coopératifs lorsque les parents demeurent à portée de leur vue. Enfants d’âge préscolaire 3 Entre l’âge de deux et six ans, les enfants sont égocentriques. La plupart d’entre eux considèrent leur environnement selon leur propre point de vue, et ils se voient comme le centre de leur univers. Un enfant d’âge préscolaire peut donc pleurer s’il est décidé à ne pas coopérer, même si l’inrmière cite l’exemple d’un autre enfant plus collaborateur, car cette comparaison n’a pas de signication pour lui. Seule sa propre vision des choses compte pour lui. Il faut donc privilégier la communication directe et concrète. L’inrmière doit toujours parler au présent et éviter les expressions telles que « les murs ont des oreilles » parce que les jeunes enfants peuvent les interpréter faussement. L’inrmière utilise des phrases simples associées à des explications concrètes : elle prend le temps de donner une courte explication aux enfants qui connaissent moins le matériel utilisé pour l’examen. Les enfants d’âge préscolaire ont parfois des pensées animistes, dotant les objets d’une âme ; ils peuvent imaginer que des objets familiers et inanimés peuvent prendre vie et présenter des caractéristiques humaines (p. ex., le brassard pour mesurer la pression artérielle peut se réveiller et les mordre). Stades du développement cognitif ÂGE STADE DE DÉVELOPPEMENT SELON PIAGET CARACTÉRISTIQUES DÉVELOPPEMENT DU LANGAGE De la naissance à 2 ans Sensorimoteur • Apprentissage de la manipulation d’objets par le nourrisson • Communication réexive à la naissance, puis évolution en six étapes jusqu’à la réexion • Présymbolique • Communication principalement non verbale • Vocabulaire qui dépasse les 4 mots à 12 mois, puis qui est composé de plus de 200 mots et de courtes phrases avant le 2e anniversaire De 2 à 6 ans Préopératoire • Début de la pensée symbolique • Jeux imaginatifs • Maîtrise de la notion de réversibilité • Symbolique • Communication à l’aide d’une grammaire et d’un vocabulaire structurés • Utilisation des pronoms • Vocabulaire moyen qui dépasse les 10 000 mots vers l’âge de 6 ans De 7 à 11 ans Opératoire concret • Pensée logique • Maîtrise de l’utilisation des nombres et des concepts concrets, tels le classement et la conservation • Maîtrise de la forme passive vers l’âge de 7 ans et des formes grammaticales complexes vers l’âge de 10 ans 12 ans et plus Opératoire formel • Pensée abstraite • Maîtrise de la notion de futur ; perspective plus large, plus théorique • Aptitudes presque identiques à celles de l’adulte Source : Adapté de Piaget J. (1972) Chapitre 3 Entrevue 53 La progression du langage est notable à cet âge ; en effet, passant d’environ 2 mots à l’âge de 1 an, le vocabulaire dépasse les 200 mots à l’âge de 2 ans. Les enfants de deux ans sont en mesure de construire des phrases simples à partir de deux mots (p. ex., bébé pleure, moi monter, veut lait). Il s’agit d’un style télégraphique caractérisé par la combinaison d’un nom et d’un verbe dont l’association donne un sens concret aux mots. L’intérêt pour la communication orale est prépondérant à cet âge, et les enfants de deux ans semblent être en mesure de comprendre l’ensemble des conversations entre leurs parents. À trois ans, les enfants sont en mesure de construire des phrases plus complexes et comprenant plusieurs éléments issus du langage. Entre l’âge de trois et quatre ans, ils utilisent trois ou quatre mots télégraphiques an de construire une phrase ne contenant que les éléments essentiels. Vers l’âge de cinq ou six ans, les phrases comportent de six à huit mots, et les notions grammaticales sont de mieux en mieux intégrées. Enfants d’âge scolaire Un enfant âgé de 7 à 12 ans peut tolérer et comprendre d’autres points de vue que le sien. À cet âge, les enfants sont plus objectifs et réalistes. Ils désirent connaître les aspects fonctionnels des objets et comprendre pourquoi les choses sont faites ainsi. Les enfants d’âge scolaire savent généralement lire, ce qui facilite l’obtention d’information. Si ce n’est pas le cas, les symboles ou les images peuvent être utiles an d’obtenir des données. À cet âge, la pensée est plus cohérente et logique. Les enfants d’âge scolaire peuvent se décentrer pour considérer d’autres éléments d’une situation leur permettant de dégager d’autres conclusions. Ils sont pourvus d’une capacité de raisonnement, bien que celle-ci soit limitée lorsqu’il s’agit de prendre en compte des notions abstraites. Les enfants de ce groupe d’âge ont la capacité d’apporter des commentaires importants sur leur histoire de santé. L’inrmière peut réaliser l’entrevue simultanément avec les parents et l’enfant. Par contre, si certains symptômes ou signes inquiètent l’inrmière, elle doit questionner l’enfant en premier et recueillir ensuite l’information provenant des parents. Pour obtenir le plus de données possible, l’inrmière devrait poser des questions sur les sujets concernant l’école, les amis ou les activités directement à l’enfant. Si elle se trouve seule avec lui, elle peut découvrir d’autres faits intéressants. Adolescents L’adolescence marque le début de la puberté, caractérisée par des changements notables sur le plan physiologique : un accroissement généralisé de la taille, du poids, de la masse musculaire, le développement des caractéristiques sexuelles primaire 54 Partie 1 Évaluation globale de la personne et secondaire ainsi que la maturation des organes propres à la reproduction. L’ensemble de ces modifications physiologiques peut entraîner une modication de l’estime de soi. Par ailleurs, les adolescents sont aussi aux prises avec des ajustements d’ordre psychologique. Ils veulent être considérés comme des adultes, mais ils n’ont pas encore atteint la capacité cognitive de ce stade de développement. Ils se situent entre deux étapes. Parfois, ils sont capables d’actions rééchies, parfois, ils retournent dans leur modèle de réponse d’enfants, surtout en période de stress. L’inrmière ne peut pas traiter les adolescents comme des enfants, mais elle ne peut pas non plus considérer leur façon de communiquer, leur capacité d’apprentissage, leur faculté d’adaptation de même que leur motivation comme étant toujours celles qui caractérisent l’âge adulte. Il faut souligner qu’aucune durée précise n’est associée à l’adolescence : il s’agit d’une période de transition vers l’âge adulte que certaines personnes mettent plusieurs années à traverser. Les adolescents valorisent parfois la relation avec les pairs. Ils désirent être acceptés par les pairs et ils s’identient à eux. Ils croient aussi que personne ne peut les comprendre. De ce fait, ils manifestent parfois une attitude de mépris à l’égard des adultes. Ils répondent souvent aux questions par des monosyllabes. D’autres adolescents visent plutôt à établir un contact visuel et répondent ce que l’inrmière désire entendre et non ce qu’ils pensent réellement. Leur regard signie : « Vous ne saurez rien de plus à mon sujet. » Ces caractéristiques des adolescents et leur façon d’agir pourraient paralyser l’inrmière pendant l’entrevue. Toutefois, une communication réussie demeure possible et se révèle enrichissante. Les stratégies sont simples. La première chose à considérer est une attitude respectueuse. Le respect représente l’élément le plus important à communiquer à l’adolescent. Celui-ci a besoin de valider qu’il est accepté dans sa dignité d’être humain et qu’il a de la valeur. Deuxièmement, la communication doit être totalement honnête. L’intuition de l’adolescent est aiguisée à tel point qu’il peut détecter si l’inrmière cherche à lui cacher des renseignements ou si elle camoufle quelque chose en ayant recours aux euphémismes. L’inrmière doit toujours lui dire la vérité et jouer franc-jeu ; sinon, l’entrevue est vouée à l’échec. L’adolescent sera coopératif s’il comprend la façon de procéder de l’inrmière. En outre, an de faciliter la communication, l’inrmière doit rester elle-même : elle n’a pas avantage à utiliser un langage qui ne correspond pas à son âge ou à son rôle professionnel. Il est utile de comprendre certaines expressions propres aux adolescents, mais l’inrmière ne doit pas les utiliser pour se rapprocher d’eux. Ces termes l’aident simplement à mieux comprendre ce que les adolescents veulent exprimer. Elle ne doit pas essayer d’être leur amie. Comment briser la glace avec un adolescent ? L’inrmière devrait d’abord se concentrer sur lui et non sur son problème. Contrairement à l’adulte, qui veut immédiatement aborder sa préoccupation au sujet de sa santé, l’adolescent a plutôt tendance à répondre de manière optimale lorsque l’accent est d’abord mis sur lui FIGURE 3.4. L’inrmière devrait poser ouvertement et amicalement des questions au sujet de l’école, des activités, des loisirs, des amis : « Comment vont les choses à l’école ? » « Pratiques-tu des sports ? » « Quel type d’activité préfères-tu ? » Il est préférable de s’abstenir de le questionner, dans un premier temps, sur ses parents et sa famille, car ces sujets peuvent être chargés d’émotions à l’adolescence. L’inrmière prend également soin de questionner les adolescents sous l’angle des risques encourus par leurs comportements, ceux-ci pouvant avoir des conséquences sérieuses sur leur santé. Fait notable, plusieurs de ces comportements perdurent à l’âge adulte. Il est donc primordial de discuter des comportements à risque avec l’adolescent. Pour ce faire, l’inrmière aborde le sujet directement ; donner seulement de l’information n’est pas sufsant. Savoir écouter dans un climat de respect et d’ouverture s’avère essentiel. Le fait de suggérer de petits objectifs réalistes et réalisables encourage l’adolescent à revenir et lui montre qu’un changement de comportement est possible. L’inrmière ne présumera pas que l’adolescent connaît tout d’une histoire de santé ou d’un examen physique. Elle doit en expliquer et en justier chacune des étapes. Elle l’informe également que tous les renseignements recueillis demeurent confidentiels. L’adolescent coopère mieux s’il connaît le but des questions ou des actions. L’inrmière doit d’ailleurs l’encourager à lui poser des questions, car il craint souvent la réaction des autres ; il peut se sentir stupide s’il pose une question dont tout le monde, pense-t-il, connaît la réponse. 3 L’inrmière privilégie des questions courtes et simples, par exemple : « Pourquoi êtes-vous ici ? » Cette question peut sembler évidente pour l’inrmière, mais pas pour l’adolescent. Certains viennent en consultation sous les recommandations de leurs parents. Il faut également reconsidérer les techniques d’entrevue avec un adolescent. Les périodes de silence sont généralement à éviter. L’inrmière doit lui accorder un temps de réexion acceptable, mais un silence attribuable à d’autres raisons peut se révéler menaçant. Ainsi, l’inrmière aurait avantage à éviter la réexion comme technique de communication. Si elle l’utilise, l’adolescent répondra probablement : « Quoi ? » Il n’a pas les compétences cognitives pour répondre à ce mode indirect d’interrogation. Aussi, l’adolescent perçoit davantage la communication non verbale que les adultes. L’inrmière doit rester consciente de ses expressions et de ses gestes. L’adolescent est également plus sensible à tout commentaire qui pourrait être interprété comme une critique de la part de l’inrmière. Si cela se présente, il cessera de collaborer. Plus tard au cours de l’entrevue, après avoir établi un rapport de conance avec l’adolescent, l’inrmière pourra traiter de sujets chargés d’émotions, y compris l’usage du tabac, d’alcool et de drogues, les comportements sexuels, les pensées suicidaires et la dépression. De nombreux adolescents tendent à adopter des comportements à risque pouvant avoir des conséquences fâcheuses. Les adolescents supposent que les professionnels de la santé ont les mêmes valeurs et adoptent les mêmes normes de comportement que la plupart des autres représentants de l’autorité dans leur vie, et ils peuvent être réticents à partager ce genre d’information. L’inrmière peut leur donner l’assurance que ses questions n’ont pas pour but de satisfaire sa curiosité, mais bien d’explorer des sujets importants pour la plupart des adolescents et sur lesquels elle doit recueillir des données importantes relatives à leur santé. FIGURE 3.4 L’inrmière démontre de l’intérêt envers l’adolescente en la questionnant sur elle et non uniquement sur son problème de santé et en évitant avant tout les jugements de valeur à son sujet. Si l’inrmière découvre des données « délicates » au cours de l’entrevue, elle devrait aviser l’adolescent que certains renseignements peuvent demeurer condentiels et que quelques-uns devront être partagés avec d’autres professionnels de la santé. L’inrmière spécie que ces interventions ont pour seul but de le protéger et que les lois l’y obligent. L’âge légal de la condentialité et du consentement est de 14 ans au Québec et au Canada. Ainsi, si une adolescente âgée de 14 ans ou plus consulte un Chapitre 3 Entrevue 55 professionnel de la santé au sujet de la contraception ou pour obtenir une ordonnance dans le but de traiter une infection transmissible sexuellement et par le sang, ses parents n’en seront pas informés sans son consentement. Si l’inrmière doit communiquer avec d’autres professionnels de la santé ou d’autres personnes, comme un policier, un avocat ou le Directeur de la protection de la jeunesse, il lui faut demander l’autorisation à l’adolescent : « Avez-vous un problème avec cela ? » L’inrmière doit également préciser à l’adolescent : « Vous devez me faire conance ; je vais traiter cette information avec professionnalisme et dans votre intérêt. » Enn, il faut saisir toutes les occasions pour faire du renforcement positif. L’inrmière souligne chaque action de l’adolescent associée à un mode de vie sain : « C’est génial que vous ne fumiez pas. Il s’agit d’une bonne décision pour vous aider à rester en santé. » Pour ceux dont les habitudes de vie comportent des risques pour la santé, il est impératif de discuter de celles-ci dès que possible. L’inrmière peut poser des questions ou s’exprimer à ce sujet : « Avezvous un jour tenté de cesser de fumer ? » « J’aimerais savoir quelle est votre activité physique préférée puisque je suis préoccupée par votre surplus de poids, et spécialement chez une personne aussi jeune que vous. » « Qu’est-ce que vous aimez boire lorsque vous participez à une soirée avec des amis ? » « Lorsque vous avez des relations sexuelles avec une personne dont vous ignorez le passé sexuel, utilisez-vous un condom ? » Lorsque l’inrmière pose ce type de questions, elle doit éviter de transmettre une information dénuée de sens pour l’adolescent. An de donner un sens aux renseignements transmis, l’inrmière doit tout d’abord écouter l’histoire de l’adolescent, tout en évitant de porter un jugement sur les actions posées. Par la suite, elle pourra fournir une information propre à la situation de l’adolescent et ainsi individualiser son intervention auprès de lui. À la n de la rencontre, l’inrmière lui propose un objectif réaliste à atteindre et planifie une nouvelle rencontre quelques semaines plus tard an d’effectuer un suivi sur le comportement en cause. de personnes plus jeunes. Il est préférable d’éviter les propos traduisant de l’âgisme : employer des diminutifs (p. ex., cher, madame chose, mon petit monsieur) ; faire un usage inapproprié des pronoms au pluriel : « Sommes-nous prêts pour votre entrevue ? » ; poser des questions sans possibilité de refus : « Vous ne voulez pas plutôt vous asseoir ici, il s’agit d’un fauteuil plus confortable. » ; et avoir recours à des phrases tronquées, à un langage infantilisant ou adopter un débit vocal outrageusement lent. La durée de l’entrevue est allongée chez les personnes âgées parce qu’elles ont une plus longue histoire de santé à raconter. Pour ce faire, l’inrmière pourrait avoir besoin de morceler l’entrevue en plusieurs rencontres, la plus importante étant celle de la collecte des données. Certaines d’entre elles, telles que les antécédents de santé, l’histoire familiale et les problèmes de santé actuels, pourraient être recueillies au moyen d’un formulaire rempli à la maison, si l’écriture et la vision de la personne le lui permettent. Ensuite, au cours d’une prochaine entrevue, l’inrmière pourrait prendre le temps d’examiner le document avec la personne an de valider l’information contenue dans celui-ci. Il est important d’adapter le rythme de l’entrevue à celui de la personne vieillissante, puisque celle-ci a une grande quantité de données à trier, ce qui peut être plus long. Certaines personnes âgées ont également besoin de plus de temps an de bien comprendre les questions et d’y répondre adéquatement. L’inrmière devrait donc éviter de se presser : une approche brusque pourrait faire croire à la personne âgée que les professionnels de la santé sont en général des personnes qui sont simplement intéressées par le nombre de clients rencontrés et de formulaires à remplir dans une journée. Si l’inrmière désire réaliser l’entrevue trop rapidement, l’aîné ne coopérera plus, et ses besoins ne seront pas satisfaits. Il manquera alors des données précieuses à l’inrmière FIGURE 3.5. Personnes âgées L’adulte vieillissant a généralement trouvé un sens à sa vie et à son existence, tout en commençant à accepter la nalité de la mort. L’inrmière doit être attentive aux personnes âgées qui sont parfois désespérées quant à leur vie actuelle et future, en particulier dans le contexte où la maladie est synonyme de limitation physique ou de menace de dépendance. L’inrmière doit toujours faire face à la personne et l’appeler par son nom de famille (p. ex., « Bonjour, monsieur Tremblay » « Bonjour, madame Pelletier »). Plusieurs personnes âgées détestent se faire appeler par leur prénom et spécialement lorsqu’il s’agit 56 Partie 1 Évaluation globale de la personne FIGURE 3.5 L’inrmière procède à l’entrevue en s’adaptant au rythme de la personne âgée. Il faut aussi considérer les limitations physiques au moment de la planication de l’entrevue. En effet, une personne âgée se fatigue plus rapidement et peut demander que les rencontres se déroulent en plusieurs périodes de courte durée. Pour la personne atteinte d’un décit auditif, la bouche et le visage de l’inrmière doivent être entièrement visibles. L’inrmière évite de crier : ce comportement ne contribue pas à une meilleure compréhension et peut même déformer le discours. Parfois, le toucher est une démonstration non verbale très importante pour les personnes âgées et notamment si leurs autres sens sont diminués ; le toucher reste donc essentiel pour elles. L’inrmière ne devrait pas hésiter à l’utiliser. En effet, une main posée sur le bras ou l’épaule transmet un message d’empathie qui permet à l’inrmière de renforcer la communication avec la personne, lui signiant qu’elle désire comprendre son problème 2 . 3.3 Entrevue avec une personne ayant des besoins spéciaux 3.3.1 Personne malentendante Comme la population est vieillissante, la surdité constitue une problématique de plus en plus présente, et ce, à différents égards. Les personnes sourdes se considèrent elles-mêmes comme une minorité linguistique, et non comme des personnes atteintes d’un handicap (Iezzoni, O’Day, Killeen et collab., 2004). Elles peuvent parfois avoir le sentiment d’être ostracisées par les professionnels de la santé, et elles sentent aussi que leur intelligence est parfois remise en question. Comment prodiguer des soins de qualité auprès de ces personnes dans ce contexte ? Bien que plusieurs clients mentionnent d’entrée de jeu qu’ils sont atteints d’un décit de l’audition, d’autres ne le diront pas ; l’inrmière devra donc être en mesure de reconnaître les indices de ce décit : regarder la bouche et le visage de l’interlocuteur, ne pas respecter les consignes à moins que l’inrmière regarde directement la personne ou qu’elle parle d’une voix forte ou accompagnée de gestes. Même si la personne sourde peut être familière avec certains équipements du centre hospitalier ou du bureau ou qu’elle a déjà eu une expérience précédente dans un établissement de santé, sans une bonne communication, elle se sentira isolée et anxieuse. Si elle est atteinte de surdité, l’inrmière doit lui demander quelle est sa façon préférée de communiquer : par les mains (langage des signes), par la lecture labiale ou par écrit. Pour effectuer une histoire de santé complète, l’inrmière peut avoir recours à un interprète en langage des signes. Elle peut essayer d’en trouver un par l’intermédiaire d’un organisme de services sociaux ou à l’aide de la personne elle-même et de son réseau social. Il peut aussi s’agir de membres de la famille, mais l’inrmière doit toutefois être consciente qu’ils sont parfois intimement liés avec la personne ; il se peut alors qu’ils modient ou même censurent ses propos. L’inrmière utilise les mêmes consignes que celles concernant l’interprète bilingue. Si la personne préfère la lecture sur les lèvres, l’inrmière doit s’assurer de lui faire face et que son visage est bien éclairé. L’inrmier qui porte une barbe ou une moustache ou les professionnels de la santé ayant un accent étranger sont moins bien compris de la personne sourde. L’infirmière ne devrait pas exagérer ses mouvements de lèvres parce que cela entraîne un mauvais décodage de ses paroles, de la même façon que si elle crie lorsque la personne porte un appareil auditif. L’inrmière doit parler simplement et lentement et compléter ce qu’elle dit avec des gestes de la main. Les indices non verbaux sont importants parce qu’ils complètent la lecture sur les lèvres et augmentent la compréhension de 50 %. L’inrmière doit s’assurer que le client comprend ses questions puisque de nombreuses personnes malentendantes ne font que des signes d’acquiescement avec la tête juste pour être amicales et coopératives, mais en réalité elles n’ont rien compris. 3 2 Le chapitre 2, Compétence culturelle : les soins selon la culture, présente les cas d’exception où le toucher n’est pas approprié. La communication écrite peut être efcace pour connaître les antécédents de santé, l’histoire familiale ou pour faire la revue des systèmes. En ce qui concerne l’histoire de la maladie actuelle, l’écriture prendrait beaucoup trop de temps et serait laborieuse pour la personne. Dans cette situation, elle va probablement pouvoir lire normalement sur les lèvres, notamment si la surdité est apparue après l’acquisition de la parole. Par contre, si la surdité s’est produite avant celle-ci, la personne utilisera probablement le langage des signes. La langue des signes québécoise (LSQ), différente de celle utilisée dans le reste du Canada, est le langage des signes le plus commun au Québec. 3.3.2 Personne gravement malade Une situation d’urgence exige des actions rapides de la part de l’inrmière. Elle se doit de combiner l’entrevue avec l’examen physique an de déterminer les actions à entreprendre. Même si les mesures de soutien immédiates sont primordiales, l’inrmière doit essayer, autant que possible, d’interroger la personne. Recueillir les données subjectives est essentiel pour déterminer les causes et l’évolution de la situation d’urgence. Les questions doivent être brèves et concises. Il importe de trouver à quel endroit se situe la douleur et quelle est l’intensité Chapitre 3 Entrevue 57 de celle-ci. L’infirmière ne doit pas oublier la famille ou les amis du client, qui peuvent fournir des données importantes. Une personne hospitalisée pour une maladie grave ou critique est généralement trop faible, trop essoufée ou elle éprouve trop de douleur pour répondre à des questions. L’inrmière s’assure d’abord que la personne est confortablement installée. Ensuite, elle établit ses priorités, c’est-à-dire ce qu’elle doit savoir immédiatement ainsi que les éléments les plus pertinents de l’histoire de santé. Elle cherche la préoccupation principale de la personne concernant son état de santé. Elle commence par poser des questions fermées et directes an de s’assurer que les afrmations de la personne représentent vraiment ce qu’elle veut dire. Un client gravement malade peut mal interpréter une phrase pourtant simple : il pourra réagir à partir d’idées préconçues de ce qu’est une maladie grave ; par conséquent, tout ce que lui dit l’inrmière doit être direct, précis et sans ambiguïté. 3.3.3 6 La relation thérapeutique entre l’inrmière et le client consommant de l’alcool ou des drogues est abordée dans le chapitre 6, Évalua­ tion de la consommation de substances. Personne sous l’inuence de drogues de rue ou de l’alcool Il est fréquent que les personnes se trouvant sous l’effet de l’alcool ou d’autres drogues qui altèrent le comportement doivent être admises en centre hospitalier. Certaines drogues inuent sur le système nerveux central (SNC), ce qui accroît le risque de surdose, d’accidents et de blessures, tant pour la personne que pour les soignants. De plus, il est à noter que l’utilisation chronique de ces substances peut engendrer des problèmes médicaux complexes qui exigent des soins plus attentifs. De nombreux consommateurs de substances illicites sont polytoxicomanes ; l’inrmière peut donc se trouver en présence d’un large éventail de comportements causés par diverses substances dont les effets varient. L’alcool, les benzodiazépines et les opiacés (héroïne, mépéridine, oxycodone, VicodinMD, acide gamma-hydroxybutyrate [GHB], morphine, kétamine) sont des dépresseurs du SNC, alors que les stimulants de ce système (ecstasy [MDMA], cocaïne, amphétamines, méthamphétamines, crack,) peuvent provoquer un état de stress, d’agitation et des comportements paranoïdes. D’autres substances psychotropes (LSD, PCP, champignons magiques) peuvent causer des hallucinations, des comportements bizarres et inappropriés, parfois même violents. Ces substances peuvent également entraîner une augmentation démesurée de la force physique et une insensibilité à la douleur. Pendant l’entrevue avec une personne qui se trouve sous l’inuence de l’alcool ou de drogues, l’inrmière pose toujours des questions directes, simples et non menaçantes an d’éviter la confrontation. Elle s’abstient également de toute 58 Partie 1 Évaluation globale de la personne manifestation de jugement ou de dégoût, puisque la personne peut devenir belliqueuse. L’une des priorités est de trouver le moment où la dernière substance a été consommée, la quantité et le nom de celle-ci. Ces renseignements permettront de reconnaître de potentiels signes de sevrage et de réagir promptement. Pour sa propre protection, l’inrmière doit savoir à qui elle peut faire appel pour obtenir de l’aide : d’autres membres du personnel, des agents de sécurité, des policiers. Elle garde toujours une distance sécuritaire par rapport à la personne intoxiquée. Elle doit aviser ses collègues qu’elle est en entrevue avec une personne susceptible d’être agressive, demeurer toujours près de la porte, la garder entrouverte au besoin et ne jamais se placer dans une situation où elle serait vulnérable. An de minimiser les risques d’agression, l’inrmière demande à la personne de rester assise durant l’entrevue. Toutes ces mesures visent essentiellement à assurer sa sécurité. Une fois les effets des substances dissipés, le toxicomane hospitalisé devrait être évalué an de déterminer, d’une part, l’étendue du problème et, d’autre part, la signication de cette consommation pour lui-même et sa famille. Au début, l’inrmière affrontera probablement du déni ou une attitude défensive ; dans certaines situations, une recommandation vers une aide extérieure au centre hospitalier est nécessaire et souhaitable 6 . 3.3.4 Personne indiscrète Occasionnellement, les clients poseront des questions sur la vie personnelle de l’inrmière ou ils lui demanderont son opinion, par exemple : « Êtes-vous mariée ? » « Avez-vous des enfants ? » « Fumez-vous ? » L’inrmière n’a pas à répondre à ces questions. Si elle le désire, elle peut fournir une information succincte quand elle sent que c’est approprié, mais elle doit garder à l’esprit la possibilité qu’il puisse y avoir un motif derrière ces questions d’ordre personnel. Elle doit essayer de rediriger sa réponse vers la personne et sa situation. Elle peut dire quelque chose comme : « Je me demande si votre question est liée à la façon dont je peux vous aider à prendre soin de Laurence. » 3.3.5 Personne agressive sexuellement Dans certains cas, des personnes adresseront des compliments à l’inrmière, adopteront une attitude charmeuse, séductrice, allant même jusqu’à faire des insinuations ou des avances d’ordre sexuel. Ce comportement est particulièrement présent chez les personnes atteintes de graves maladies qui menacent leur estime de soi et notamment leur capacité sexuelle. Cela crée chez elles une anxiété qui peut les rendre agressives dans la façon de vivre leur rapport à la sexualité. La réponse de l’inrmière à une telle personne doit être sans équivoque et lui faire comprendre qu’elle est une professionnelle de la santé et que la meilleure façon d’obtenir des soins est de maintenir une relation professionnelle. Par la même occasion, elle doit lui dire qu’elle l’accepte comme personne et qu’elle comprend sa situation actuelle, mais qu’elle ne peut pas tolérer ses avances sexuelles. Cela peut s’avérer difcile, compte tenu du fait que la personne a pu dire des paroles ou fait des gestes qui l’ont choquée, gênée ou mise en colère. Ces sentiments sont normaux. L’inrmière doit établir ses limites en disant : « Je suis mal à l’aise quand vous me parlez de cette façon ; je vais vous demander de cesser immédiatement. » Une autre réponse qui pourrait amorcer la communication est la suivante : « Je me demande si votre comportement est attribuable à votre maladie ou au fait d’être dans un centre hospitalier. » 3.3.6 Personne en pleurs L’infirmière se sent généralement mal à l’aise lorsque la personne commence à pleurer. Or, pleurer peut être d’un grand secours pour celle-ci. Les problèmes de santé engendrent une multitude d’émotions intenses, comme des inquiétudes relatives à la maladie, au décès ou à la perte d’un être cher. Si l’inrmière dit quelque chose qui « fait pleurer la personne », elle ne devrait pas penser qu’elle est la cause directe de cette réaction ; elle devra plutôt comprendre qu’elle a efeuré un sujet important pour la personne. Dans cette situation, il ne faut pas changer de sujet : il est préférable, au contraire, de laisser la personne pleurer et exprimer ENCADRÉ 3.3 pleinement ses sentiments. L’inrmière peut offrir un mouchoir de papier et attendre que les pleurs diminuent avant de recommencer à parler, au moment où la personne aura repris la maîtrise de ses émotions. 3 Il arrive que la personne regarde l’inrmière, au bord des larmes, s’efforçant de les réprimer. Là encore, au lieu de dévier la conversation, il faut explorer davantage le sujet en disant : « Vous avez l’air triste. Ne vous inquiétez pas, pleurer est tout à fait normal. » La personne se sentira comprise et, si elle pleure, elle sera soulagée ; l’inrmière aura ainsi une idée du sujet qui la préoccupe, comme le montre l’encadré suivant ENCADRÉ 3.3. 3.3.7 Personne en colère Occasionnellement, l’infirmière aura à mener une entrevue avec une personne qui éprouve de la colère. Elle ne doit pas s’attribuer la cause de cette colère, car elle n’en est habituellement pas responsable. La personne fait preuve d’agressivité pour se défendre par rapport à ses propres sentiments d’angoisse ou d’impuissance. Il faut alors lui demander la raison de sa colère, qui doit être dissipée avant de continuer l’entretien. Une personne en colère ne peut pas coopérer adéquatement à une entrevue concernant sa santé. L’infirmière peut également ressentir de la colère, peut-être provoquée par un incident extérieur. Il est aussi possible qu’elle se soit développée durant l’entrevue. L’inrmière doit expliquer la cause de sa colère au client et envers qui cette colère est dirigée. Sinon, les personnes particulièrement vulnérables et dépendantes de l’inrmière auront l’impression qu’elle éprouve de la colère contre elles. Cas clinique Alice Vigneault, âgée de 49 ans, est une femme blanche, divorcée, qui a un problème d’alcoolisme chronique. Elle présente des signes d’ictère tégumentaire ; elle se trouve actuellement en cure de désintoxication en vue de régler son problème de toxicomanie. Aujourd’hui, elle doit subir un examen vaginal et un test de Papanicolaou. Madame Vigneault : « Je n’ai pas subi d’examen gynécologique depuis cinq ans. J’ai eu une hystérectomie il y a 18 ans. Ils ont dit que j’avais des cellules cancéreuses en développement. » (À la n de l’entrevue, madame Vigneault a les lèvres pincées, les yeux fermés, elle a posé une main sur sa bouche, et sa respiration est bruyante et saccadée.) Inrmière (se penche vers l’avant et regarde la cliente. Silence.) : « Je vois que cela vous attriste. » (L’inrmière pose sa main sur la partie supérieure du bras de madame Vigneault.) Madame Vigneault (elle pleure librement maintenant) : « Qu’est-ce que je vais faire si vous trouvez des cellules cancéreuses encore une fois ? Les médica- ments ne font pas effet sur moi avec ma maladie du foie. Je ne survivrai jamais à l’anesthésie. Et mon père est décédé d’un cancer. Il avait une cirrhose aussi, ils l’ont opéré, et il était plein de cellules cancéreuses. Il ne s’est jamais réveillé après la chirurgie et il est mort deux semaines plus tard. » Inrmière : « Je comprends à quel point vous êtes inquiète. Je pense que vous avez fait la bonne chose en venant en traitement. Vous êtes courageuse, et nous allons franchir les étapes une à la fois. Aujourd’hui, nous devons faire l’examen pelvien et le frottis vaginal. Pour l’instant, il n’y a aucune raison de supposer que vous avez besoin d’une opération. Je ferai votre examen aujourd’hui, et je serai ici toute la semaine. Nous allons travailler ensemble pour vous aider à passer à travers cette étape. » Madame Vigneault (elle respire profondément, elle est assise bien droite, les bras ouverts, tendus vers le bas, et elle rend tous les contacts visuels) : « Ça m’inquiète beaucoup, vous me comprenez bien. Ça me soulage d’en parler à quelqu’un, ça fait trop longtemps que je refoule ça à l’intérieur. Je me sens mieux maintenant. » Chapitre 3 Entrevue 59 3.3.8 Personne potentiellement violente Le milieu des soins de santé n’est pas à l’abri de comportements violents. Une personne peut manifester de la violence en entrevue, et l’inrmière doit assurer sa sécurité personnelle. Il lui faut reconnaître les signes annonciateurs de ce type de comportements chez une personne, comme serrer les poings, bouger sans arrêt, manifester des signes de désorientation, afrmer des choses qui n’ont pas de sens, raconter une histoire récente d’usage de drogues (p. ex., de l’alcool, des substances hallucinogènes, des méthamphétamines, de la cocaïne) ou une histoire récente de deuil pénible (p. ex., le décès du conjoint, une perte d’emploi). Dans une telle situation, l’inrmière doit se er aux indices qu’elle décèle : si elle pressent un comportement suspect ou menaçant, elle doit agir immédiatement an de désamorcer la situation. Si elle suspecte que la personne qu’elle s’apprête à rencontrer pourrait être violente, l’inrmière doit toujours aviser une collègue avant d’entrer dans la pièce où se trouve la personne. Elle laissera alors la porte de la salle d’examen ouverte et s’assurera d’être placée entre la personne et la porte. De nombreux établissements disposent également d’un signal particulier pour qu’une collègue de travail puisse appeler une unité d’intervention auprès de personnes violentes (parfois nommée code blanc) ou le service de sécurité. Si l’inrmière se sent en danger, elle ne devrait pas élever la voix ou essayer de discuter avec la personne. Elle doit conserver son calme, parler à la personne d’une voix douce tout en manifestant de l’intérêt pour les propos de celle-ci. L’objectif premier de l’inrmière étant sa sécurité, elle évite à tout prix de prendre des risques. 3.3.9 communications verbale et non verbale sont inuencées par le contexte culturel, tant chez les inrmières que chez les clients. La communication interculturelle, quant à elle, fait référence au processus de communication qui se déroule entre une inrmière et une personne, chacune venant d’un milieu culturel différent, dans lequel les deux tentent de comprendre le point de vue de l’autre à partir de sa propre perspective culturelle FIGURE 3.6. Les personnes qui ne comprennent pas bien une langue étrangère doivent souvent recourir à un interprète autre qu’un membre de la famille ou un ami. L’inrmière doit s’assurer que la personne et sa famille comprennent bien la situation, le diagnostic et ses implications, les procédures diagnostiques et thérapeutiques (comment, pourquoi et à quel moment) et ce qu’elles signient, les médicaments à prendre (quand et comment). Cela est important pour évaluer le pronostic en fonction du problème. Considérations culturelles liées au sexe Ne pas tenir compte des normes culturelles relatives aux relations hommes-femmes risque de nuire à la relation professionnelle de l’inrmière avec de nombreuses personnes. Parmi les clients d’origine arabe, l’infirmière peut rencontrer des hommes adultes qui ne se sont jamais trouvés seuls en présence d’une femme (à l’exception de leur épouse), car ils sont généralement accompagnés de un ou de plusieurs autres hommes qui Personne anxieuse Enn, il est normal que presque toutes les personnes ayant un problème de santé éprouvent une certaine anxiété. Cependant, cela rend certaines personnes agressives, alors que d’autres deviennent dépendantes. L’inrmière doit donc garder à l’esprit que la personne n’est pas dans son état normal. Particularités culturelles et génétiques Communication interculturelle Cette section porte sur les comportements à adopter avec des personnes de différentes cultures. Il faut toutefois noter qu’il s’agit de généralités et qu’il est préférable de personnaliser les soins. La probabilité d’une mauvaise communication augmente lorsque les personnes sont issues de milieux culturels différents. Il est également reconnu que les 60 Partie 1 Évaluation globale de la personne FIGURE 3.6 La communication peut être plus difcile lorsque les personnes sont issues de milieux culturels différents. interagissent avec elle. Ce comportement est culturellement très important ; transgresser ces règles du code culturel (soit l’ensemble des règles ou certaines des normes utilisées par un groupe culturel) est considéré comme une faute grave. Souvent, celui qui enfreint les règles peut être accusé d’inconduite sexuelle. La meilleure façon de veiller à ce que les variables culturelles soient prises en considération est de demander à la personne de préciser son code culturel concernant les relations hommes-femmes. L’inrmière devra de préférence poser cette question au début de l’entrevue, avant qu’elle ait eu l’occasion de transgresser un code culturel. Si l’inrmière perçoit que la différence de sexe est une notion importante pour la personne, elle pourrait avoir recours à certaines stratégies, comme celle d’offrir la possibilité de la présence d’une troisième personne pendant l’entrevue. Si un membre de la famille ou un ami accompagne le client, l’inrmière pourrait lui demander s’il désire et accepte que cette personne soit présente au cours de l’histoire de santé ou pendant l’examen physique. Il n’est pas inhabituel pour une femme de refuser de se faire examiner par un homme et vice-versa. Il faut aussi s’assurer de préserver l’intimité physique de la personne en veillant à ce qu’elle demeure couverte à tout moment, que les rideaux soient fermés et, si possible, que la porte reste fermée. La salle doit être intime, et il faut s’assurer que quiconque y entrera frappera d’abord à la porte ou s’annoncera. Les questions liées au sexe se compliquent par certaines croyances culturelles associées à l’autorité et aux disciplines du domaine des soins de santé. Par exemple, dans de nombreux pays en développement, les soins inrmiers sont une avenue de travail peu gratiante. Dans certains pays producteurs de pétrole (p. ex., l’Arabie saoudite, le Koweït), la prise en charge des malades est assurée par des fournisseurs de soins de santé privés recrutés à l’étranger, car soigner les malades est vu comme une activité indigne. Considérations culturelles relatives à l’orientation sexuelle Au cours de ses rencontres avec des lesbiennes, des bisexuels ou des homosexuels, l’inrmière doit être consciente des préjugés sociaux envers ces personnes et des effets de ceux-ci sur l’entrevue et sur l’examen physique. Même certains formulaires laissent transpirer ces préjugés, en laissant supposer que l’hétérosexualité est le seul choix naturel et qu’elle constitue la norme. Par exemple, la plupart des histoires de santé incluent une question concernant l’état matrimonial. Bien que de nombreux couples de même sexe soient engagés dans une relation monogame à long terme, on trouve rarement, dans un formulaire standard, la mention d’une catégorie qui reconnaît d’autres types d’orientation sexuelle que celle de l’hétérosexualité, même si ces autres statuts sont techniquement et juridiquement acceptés. Ces préjugés sociaux peuvent aussi avoir des implications en matière de santé. Des homosexuels ont déjà été soumis à des procédures diagnostiques inutiles, alors que les hétérosexuels n’ont subi aucune de ces investigations, comme dans le cas du syndrome d’immunodécience acquise. Dans certaines situations empreintes de préjugés tenaces, des lesbiennes ont été soumises à des procédures diagnostiques non nécessaires telles que des test de dépistage d’ITSS ou l’utilisation de deux paires de gants lorsqu’elles ont fait mention de leur homosexualité. 3 Perspectives culturelles quant aux interactions professionnelles L’interaction professionnelle de l’inrmière avec des personnes de cultures différentes dépend, dans une large mesure, de la perception culturelle de ces personnes quant à la prestation de soins de santé ainsi que du degré d’accommodement jugé approprié. Par exemple, des personnes provenant de l’Asie du Sud-Est s’attendent à ce que ceux qui détiennent l’autorité, tels que les inrmières, se montrent autoritaires, directifs et détachés des personnes qu’elles soignent. De plus, pendant l’entrevue, certains clients peuvent s’attendre à ce que l’infirmière sache intuitivement ce qui ne va pas chez eux, et ce, quelle que soit leur origine. Dans cette situation, l’inrmière peut perdre de la crédibilité si elle pose une question assez générale telle que : « Qu’est-ce qui vous amène ici ? » La personne de culture asiatique peut interpréter cette question de la manière suivante : « Vous ne savez pas pourquoi je suis ici ? Vous êtes censée être la personne qui connaît toutes les réponses. » Il faut également noter que ces considérations culturelles peuvent varier en fonction de l’âge de la personne et de l’expérience de celle-ci. Par exemple, si un client d’origine asiatique demeure au Québec depuis plus de 20 ans, il est peu probable que les caractéristiques décrites ci-dessus s’appliqueront. En d’autres termes, l’accent doit être mis sur l’harmonie sociale entre les personnes de cultures différentes pour que chacune puisse exprimer pleinement ses sentiments ou ses préoccupations au cours de l’entrevue. Un comportement réservé de la part de la personne pourrait laisser croire à l’inrmière qu’elle accepte et comprend les explications. Mais cette attitude peut reéter le souci d’entretenir une harmonie interpersonnelle, sans pour autant que la personne soit en accord avec l’inrmière. Ce comportement approbateur peut également être une attitude pour « sauver la face », lorsque la personne est censée saisir quelque chose, mais qu’en réalité elle ne comprend pas la question posée. L’inrmière doit donc s’assurer que Chapitre 3 Entrevue 61 le client fait la différence entre une réponse socialement acceptable, une réponse respectant ses convictions et une réponse franche ; elle invitera donc la personne à répondre honnêtement et franchement à toutes les questions, par exemple en lui donnant la « permission » d’être en désaccord avec elle. Étiquette L’étiquette fait référence à l’ensemble des bonnes manières et du savoir-être qui régit les comportements. Il faut connaître et comprendre les perceptions des personnes d’autres cultures qui, en certaines occasions, peuvent demander à l’inrmière de participer à une conversation de nature personnelle ou sociale avant qu’elles se sentent à l’aise d’entreprendre un échange plus personnel et intime portant sur certains aspects physiques. Ces personnes accordent une grande valeur à l’établissement de relations interpersonnelles avant de permettre à l’inrmière d’intervenir sur le plan des soins. Il faut toutefois être conscient que des contraintes de temps limitent souvent la durée des rencontres ; l’inrmière devrait donc s’efforcer d’intégrer les besoins culturels et sociaux de la personne à l’histoire de santé. Par exemple, en utilisant une voix de type « conversation », l’inrmière peut commencer l’entrevue en s’informant des membres de la famille de la personne et de leur état de santé. L’inrmière peut, en certaines occasions, rencontrer des personnes de diverses cultures qui veulent l’interroger : ils peuvent poser des questions sur sa famille, son état matrimonial, son adresse personnelle, son numéro de téléphone, son salaire, etc. L’inrmière devrait déterminer, en fonction de ses valeurs, jusqu’à quel point elle est à l’aise de répondre aux questions du client ; il est tout de même respectueux de répondre à certaines d’entre elles. Mais l’inrmière ne devrait pas oublier qu’elle n’est pas obligée de répondre aux questions qu’elle juge trop personnelles et qu’elle a toujours le droit de protéger sa vie privée ; il en va, en certaines occasions, de sa sécurité. Par exemple, l’inrmière ne doit jamais révéler l’adresse de son domicile, son adresse électronique ou son numéro de téléphone personnel, accepter des amitiés sur des réseaux sociaux tels que Facebook ou Twitter lorsqu’une personne a été ou se trouve sous sa responsabilité. Elle devrait plutôt fournir au client le numéro de téléphone de son employeur – centre hospitalier, clinique, etc. Si elle désire que le client soit en mesure de la contacter lorsqu’elle est à la maison, elle devrait demander à une personne de l’établissement de soins de santé de lui téléphoner si ce client désire la joindre. L’inrmière devrait décider à l’avance des questions sur lesquelles elle accepte de discuter et celles qu’elle évitera poliment. Si elle refuse de répondre à certaines questions personnelles, elle doit se rappeler que le client peut percevoir ce comportement comme 62 Partie 1 Évaluation globale de la personne distant et insensible. Ainsi, la façon dont elle répond aux demandes de renseignements personnels doit tenir compte à la fois de la culture du client et de ses propres valeurs. Lorsque l’inrmière rencontre une personne pour la première fois, il est préférable qu’elle le fasse avec rigueur, respect et politesse. À moins qu’elle soit atteinte d’un handicap physique, l’inrmière devrait demeurer debout lorsqu’elle salue la personne et ceux qui l’accompagnent. Un autre aspect de l’étiquette concerne l’utilisation du nom et du titre. An de veiller à ce qu’une relation de respect mutuel soit établie, l’inrmière se présente en indiquant à la personne la façon dont elle préfère être appelée (nom de famille, titre ou autre). Elle devrait obtenir les mêmes renseignements sur la personne, car cela lui permet de la traiter d’une manière culturellement appropriée. Cette formalité pourrait lui épargner un embarras considérable. Tout le monde aime être appelé par son nom exact. L’inrmière doit être certaine du nom du client, de sa prononciation et de la façon de s’adresser à lui selon son titre ou son statut. Elle évite de se montrer trop familière, c’està-dire qu’elle s’abstient d’utiliser systématiquement le prénom de la personne avant d’avoir été invitée à le faire. Les mêmes directives doivent être suivies avec les membres de la famille ou d’autres visiteurs. L’inrmière devrait accueillir la personne en la saluant et en se présentant par son nom de famille : « Bonjour, madame X ou monsieur Y. Je m’appelle… » L’utilisation de diminutifs ou d’appellations familières peut insulter les clients et les membres de leur famille. Chez les Chinois, les Vietnamiens et les Asiatiques, le nom de famille est écrit en premier, suivi du prénom, ce qui est exactement à l’opposé de la façon nord-américaine. Puisque les Asiatiques accordent une très grande importance à la courtoisie et aux formalités de politesse, l’infirmière devrait s’adresser à la personne en employant son titre de civilité exact (p. ex., monsieur, madame, docteur) suivi du nom de famille. Il faut noter que certains Asiatiques, en particulier ceux qui sont de religion chrétienne, peuvent avoir des noms à consonance anglaise. Par ailleurs, la plupart des femmes asiatiques n’emploient pas le nom de famille du mari après leur mariage. L’inrmière doit être particulièrement consciente de cela si elle reçoit les enfants en entrevue en présence des deux parents. Il est probable qu’elle devra s’adresser au mari et à l’épouse au moyen de noms de famille différents (p. ex., « Monsieur Eao », « Madame Li »). Dans la plupart des cultures asiatiques, l’enfant reçoit le nom de famille du père. Selon le degré d’acculturation, quelques Asiatiques canadiens inversent l’ordre de leur nom et prénom an de se conformer à la coutume canadienne. Si l’inrmière entretient un doute, elle doit vérier le nom avec le client ou avec une autre personne de son entourage si celui-ci ne peut s’exprimer en raison de son état. Dans les cultures traditionnelles chinoise, japonaise et asiatique, quand les gens sont présentés, ils se manifestent une certaine forme de respect en se saluant. Plus l’inclinaison de la tête est profonde, plus le respect est grand. Par exemple, il est approprié d’accentuer l’inclinaison de la tête devant un adulte plus âgé, dont la sagesse est fortement considérée, et de la réduire en présence d’un jeune adulte ou d’un adolescent. Avec l’occidentalisation, les poignées de main sont maintenant usuelles dans presque toutes les parties de l’Asie et chez les Asiatiques canadiens ; mais serrer la main trop fermement ou vigoureusement est vu comme un comportement grossier ou intrusif. La plupart des personnes de descendance asiatique s’attendent à ce que l’inrmière adopte un comportement conforme à sa propre culture. En d’autres termes, il n’est pas nécessaire que l’inrmière utilise l’inclinaison de la tête pour saluer les Asiatiques ; elle peut les accueillir comme elle le fait pour les autres personnes. En raison de l’importance de la famille pour les personnes d’Amérique du Sud ou d’Amérique centrale, les deux noms de famille sont employés, représentant le nom du père et celui de la mère. Le nom paternel vient en premier, suivi du nom maternel. Par exemple, si le nom du client est Juan Diaz Hernandez, le nom de famille du père est Diaz, et celui de la mère est Hernandez. En immigrant au Canada, certaines personnes latino-américaines décident de laisser tomber le nom de leur mère an d’abréger le leur. Comme l’espace disponible pour écrire le nom d’une personne sur un formulaire typique est limité, il devient évident que la personne doit raccourcir son nom. Malheureusement, ces personnes perdent ainsi une partie de leur nom, une expression importante de leur identité culturelle. Par ailleurs, plusieurs personnes originaires d’Amérique centrale ou du Sud acceptent la poignée de main, et, si elles se connaissent très bien, elles peuvent même s’étreindre. Bien qu’il existe des douzaines de cultures arabes et plusieurs sous-cultures, les coutumes concernant les noms sont semblables. Les garçons et les lles reçoivent un prénom en bas âge. Le prénom du père est employé comme deuxième prénom, et le dernier nom est le nom de famille. Certains parents préfèrent être appelés « père » (abu) ou « mère » (um) de la part de leur fils aîné (par exemple, abu Walid ou père de Walid). Puisque cette formalité est présente dans la plupart des cultures arabes, l’infirmière devrait appeler les clients « Monsieur », « Madame » ou par le titre de la personne, suivi de son dernier nom, à moins qu’on l’invite à employer le prénom ou la forme abu/um du nom. Dans la plupart des cultures arabes, l’étiquette exige de donner un baiser sur les joues ou une poignée de main pour les personnes du même sexe, et ce, au moment de l’arrivée et du départ. Quand un homme arabe est présenté à une femme, il préférera n’avoir aucun contact physique avec elle ; ainsi, la poignée de main n’est pas utilisée. Cette attitude est conforme à la croyance traditionnelle au sujet de la modestie dans les rapports hommes-femmes. Les femmes peuvent s’éloigner des hommes étrangers et refuser d’avoir des contacts physiques avec eux. La femme musulmane fera habituellement face à l’homme tout en inclinant légèrement la tête et en croisant ses bras sur sa poitrine. Ce geste, largement admis et culturellement approprié, remplace la poignée de main quand des hommes et des femmes sont présentés dans certaines cultures arabes. 3 Espace et distance L’inrmière et le client doivent tous deux respecter une distance dite de confort (leur « bulle »). Ces repères sont importants tout au long de l’entrevue et de l’examen clinique : en respectant des zones culturellement appropriées, la relation s’établira plus harmonieusement. Par exemple, l’inrmière pourrait se retrouver avec une personne d’origine indienne ou latino-américaine qui envahit son espace personnel en se rapprochant d’elle ; mais le but de cette personne est de créer une zone de confort dans laquelle ellemême se sent bien. Si l’inrmière n’est pas à l’aise avec cette proximité physique, la personne pourrait s’étonner de sa réaction et la percevoir comme étant distante, voire désagréable. Le TABLEAU 3.4 résume quatre zones de confort qui « entourent » une personne de même que la distance fonctionnelle à respecter pour chacune, selon la situation. Obstacles à la communication Les inrmières ont tendance à avoir des attentes stéréotypées quant au comportement des personnes durant l’entrevue et l’examen physique. En général, l’inrmière anticipe de la part d’une personne que celle-ci soit peu exigeante, qu’elle ait un comportement respectueux et qu’elle puisse coopérer tout au long de l’examen. Bien que les clients soient susceptibles de poser quelques questions à des ns de clarication, une légère retenue devant l’autorité médicale est reconnue et attendue. Les personnes issues de divers milieux culturels, cependant, peuvent avoir des perceptions très différentes quant à leur rôle et à celui de leur famille au cours de l’entrevue. Si l’inrmière est irritée parce qu’une personne pose trop de questions, qu’elle adopte une position défensive en raison d’un sentiment de malaise, il serait préférable qu’elle s’accorde une pause pour examiner le problème dans une perspective interculturelle. Les comportements culturellement acceptables lorsque la personne est malade peuvent varier, Chapitre 3 Entrevue 63 TABLEAU 3.4 Utilisation fonctionnelle de l’espace ZONE REMARQUES Zone d’intimité (de 0 à 0,5 m) • Une distorsion visuelle se produit. • C’est la meilleure position pour évaluer les bruits et les odeurs du corps. Distance personnelle (de 0,5 à 1 m) • • • • • Distance sociale (de 1 à 4 m) • Elle est utilisée pour les échanges impersonnels (commerce, affaires). • La perception de l’information est beaucoup moins détaillée. • Une grande partie de l’entrevue se déroule à cette distance. Distance publique (4 m et plus) • Elle est utilisée pour les interactions impersonnelles avec d’autres personnes. • La voix de l’interlocuteur doit être forte et projetée. • L’expression faciale subtile est imperceptible. Elle est perçue comme un prolongement de soi, elle ressemble à une « bulle ». Le timbre de voix est modéré. Les odeurs du corps sont imperceptibles. Il n’y a aucune distorsion visuelle. Une grande partie de l’examen physique s’effectue à cette distance. Source : Hall (1963) allant de l’agressivité à la passivité silencieuse. Se plaindre ou être exigeant est un comportement récompensé par une augmentation de l’attention, comme chez les Juifs et les Italiens, alors que les Asiatiques et les peuples des Premières Nations demeurent plutôt silencieux pendant les soins. Durant l’entrevue, les Asiatiques peuvent offrir des réponses qui correspondent, selon eux, à ce que l’inrmière veut entendre, car il s’agit d’un comportement compatible avec leurs valeurs culturelles dominantes dans le déroulement d’une relation harmonieuse avec les autres. Ainsi, l’inrmière devrait tenter de poser des questions qui sollicitent le point de vue de la personne ou qui évitent une réponse attendue. Certaines personnes peuvent rejeter une inrmière qu’ils perçoivent comme étant trop indiscrète ou curieuse en regard d’une éthique culturelle qui exige d’éviter un comportement argumentatif. Travail avec ou sans interprète Près de 52 millions de personnes aux États-Unis parlent une autre langue que l’anglais à la maison (U.S. Bureau of the Census, 2005). En 2011 au Canada, 20,6 % des Canadiens ont déclaré une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, ce qui représente près de 7 millions de personnes. Par ailleurs, plus de 1 million de Québécois parlent une autre langue que le français ou l’anglais à la maison, et l’anglais est la langue maternelle de 650 000 Québécois (Statistique Canada, Recensement des populations, 2012). La communication représente donc un grand dé au Québec, entre autres lorsque l’inrmière et la personne parlent des langues différentes FIGURE 3.7. Après avoir évalué les compétences linguistiques des 64 Partie 1 Évaluation globale de la personne FIGURE 3.7 Dans certains cas, l’inrmière peut avoir besoin d’un interprète pour obtenir une communication efcace avec des non-francophones. non-francophones, l’inrmière pourrait se trouver dans l’une des deux situations suivantes : tenter de communiquer efcacement par l’intermédiaire d’un interprète ou essayer d’y arriver sans interprète. Dans certaines situations, l’inrmière aura vraiment besoin d’un interprète pour obtenir une communication efficace avec des non-francophones ENCADRÉ 3.4. Même si la personne d’une autre culture ou d’un autre pays dispose d’une base en français (celles pour qui le français est une langue seconde), l’interprète sera utile si elle éprouve de l’angoisse à l’égard de la situation, en particulier lorsqu’elle doit décrire un symptôme inhabituel ou discuter de sujets délicats tels que ceux liés à la reproduction ou à la fonction urinaire ou gynécologique. Il est tentant de demander à un parent, à un ami ou même à un autre client de traduire ce que dit la personne, en particulier quand cette tierce personne est à proximité. Cette situation n’est pas recommandée parce qu’elle porte atteinte à la condentialité ; la personne peut en effet ne pas vouloir partager des renseignements personnels avec la famille, un ami ou un autre client. De plus, travailler avec un interprète issu de la famille peut avoir certaines conséquences, notamment l’augmentation du stress dans une situation déjà éprouvante. Cette situation peut même déstabiliser la relation familiale. En effet, dans plusieurs cultures, discuter ou même évoquer la mort ou le cancer est ENCADRÉ 3.4 tabou, et un interprète peut alors sciemment décider de ne pas traduire cette situation à la famille. Il ne faut donc pas avoir recours à des interprètes sollicités à la dernière minute tels que les membres de la famille, des amis, des enfants ou des personnes non qualiées. Celles-ci ne comprennent pas assez bien les termes médicaux pour les traduire, ce qui peut en outre entraîner des erreurs potentiellement fatales. 3 Dans une situation idéale, il est préférable de mettre à contribution un membre de l’équipe de soins qui possède des compétences en langues étrangères ou un interprète compétent dans l’utilisation des termes médicaux. Cette personne Recours à un interprète CHOIX D’UN INTERPRÈTE • Avant de faire appel à un interprète, l’inrmière devrait se renseigner sur la langue que le client parle à la maison. Celle-ci peut différer de la langue parlée en public. • Chaque fois que la situation le permet, l’inrmière devrait avoir recours aux services d’un interprète de formation, de préférence celui qui connaît la terminologie médicale et qui est membre d’un ordre professionnel tel que l’Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec (OTTIAQ). • L’inrmière doit éviter d’avoir recours aux services d’interprètes avec lesquels il y aurait un risque de rivalité par rapport au pays d’origine, à une région limitrophe ou à une nation rivale (p. ex., un Palestinien hébreu n’est peut-être pas le meilleur interprète pour une personne juive). • L’inrmière doit tenir compte des différences de sexe entre l’interprète et son client. En général, il est préférable qu’ils soient de même sexe. • L’inrmière doit être consciente de la différence d’âge entre l’interprète et son client. En général, un interprète plus âgé et plus mature est préférable à un interprète plus jeune et moins expérimenté. • L’inrmière doit prendre en considération les différences socioéconomiques qui existent entre l’interprète et son client. STRATÉGIES POUR L’UTILISATION EFFICACE D’UN INTERPRÈTE • L’inrmière doit planier ce qu’elle veut dire. Elle rencontre l’interprète en privé avant l’entrevue. Elle évitera d’utiliser certains termes qui pourraient semer la confusion. • L’inrmière demande à l’interprète de fournir une interprétation ligne par ligne du compte rendu de la conversation. Par contre, si plusieurs échanges ont eu lieu entre l’interprète et son client, l’inrmière demandera un résumé. • L’inrmière doit être patiente. L’entrevue peut souvent prendre deux ou trois fois plus de temps avec un interprète. • Certains échanges seront plus longs que prévu, dans le cas d’explications concernant le sens de mots tels que « stress », « dépression », « allergies », « prévention », « thérapie physique ». Il n’y a peut-être pas de termes comparables dans la langue du client. • Si l’inrmière mentionne des tests et des examens paracliniques tels que la mammographie, l’imagerie par résonance magnétique, la tomographie axiale contrôlée par ordinateur ou ceux qui nécessitent de prélever du sang, de l’urine, des selles, du liquide cérébrospinal, de la salive ou tout autre uide corporel, elle n’oubliera pas de préciser la nature du test à l’interprète. Elle précisera également le but de l’examen, en expliquant exactement ce qui va se passer pour la personne, combien de temps prendra le test, si la procédure est effractive ou non et quelle partie du corps est testée. Il s’agit, en fait, de la même démarche devant être réalisée pour toute personne subissant un examen. • L’infirmière doit être consciente du fait que l’interprète peut modifier ou adapter certains aspects de la conversation, surtout s’il pense que la personne pourrait ne pas comprendre, voire se méprendre sur le sens de ses paroles en fonction du contexte culturel ou de la réponse du client (p. ex., des croyances et des pratiques liées à la guérison et inspirées des traditions ou du folklore). • L’inrmière évite les questions et les phrases ambiguës. Elle s’abstient d’utiliser le conditionnel dans les phrases, comme « si », « devrait » et « pourrait », en particulier pour certaines langues cibles telles que le khmer (Cambodge) : cette langue manque de nuances temporelles ; elle ne fait pas de distinctions entre le futur, le passé et le présent. Dans certaines langues, le conditionnel peut être confondu avec la réalité du présent, ce qui pourrait modier le plan d’action. • L’inrmière évite les expressions abstraites, les idiomes, les comparaisons, les métaphores et le jargon médical. • An d’assurer la condentialité et la vie privée, l’inrmière n’a pas recours à des enfants comme interprètes ou à des étrangers venus visiter d’autres clients. • L’inrmière doit être consciente du fait que l’interprète peut demander un salaire pour les services rendus. Elle s’assure d’obtenir les garanties nancières nécessaires auprès de l’établissement de santé ou de son supérieur immédiat. Dans le cas d’une pratique privée, elle négocie les conditions à l’avance. RECOMMANDATIONS POUR LES ÉTABLISSEMENTS • Maintenir à jour la liste des interprètes qui peuvent être contactés en fonction des besoins. • Établir un réseau de contacts par domaines de spécialités entre les différents centres hospitaliers, les collèges, les universités et les autres organismes qui peuvent servir de ressources. • Rendre accessibles certains services d’aide téléphonique, par exemple le service d’interprétation téléphonique (Language Line Services) de l’anglais vers 140 autres langues. Les services sont offerts jour et nuit, tous les jours de l’année. Chapitre 3 Entrevue 65 connaît les techniques d’entrevue, a une vision des soins de santé et comprend les droits des personnes. De plus, elle s’est familiarisée avec les diverses croyances culturelles et les pratiques de santé selon l’origine ethnique. Cette personne peut ainsi aider l’inrmière à réduire le fossé culturel et donner des conseils concernant l’adaptation culturelle des gestes et des recommandations en matière de santé en fonction du client. La majorité des établissements de santé au Canada et au Québec possèdent une liste de personnes capables d’intervenir comme interprètes dans une situation de santé. Il est bien connu que peu d’inrmières reçoivent une préparation nécessaire à la pratique avec des interprètes ; 23 % seulement des hôpitaux universitaires aux États-Unis offrent cette formation (Flores, 2006), et aucun établissement ne le fait au Québec. Bien que les interprètes aient une formation qui les habitue à la neutralité, ils peuvent inuencer à la fois le contenu des données échangées et la nature des interactions. Beaucoup d’interprètes professionnels sont membres de l’OTTIAQ. Bien que cela soit positif, le recours à des interprètes a des limites. Par exemple, les interprètes ne connaissent pas les personnes et les détails de leur situation avant que l’entrevue ne commence. De plus, bien que leur code de déontologie régisse la condentialité de l’information et les conits d’intérêts, une situation conictuelle entre l’interprète et le client demeure toujours possible. Il convient de noter que le fait d’être bilingue n’est pas toujours synonyme d’une interprétation culturelle juste et exacte de la part de l’interprète. Par exemple, la culture hispanique est tellement vaste que deux personnes qui parlent l’espagnol peuvent être issues de milieux fort différents. L’interprète peut alors éprouver de la difculté à bien saisir les nuances culturelles, malgré leur langue commune. L’inrmière devrait toujours demander à l’interprète de rencontrer la personne avant de commencer l’entrevue an qu’il puisse évaluer l’inuence de l’âge du client, de sa profession, de son niveau d’éducation et ses attitudes envers les soins de santé. Cela lui permettra de mieux communiquer avec la personne. Dans ce contexte, l’inrmière doit prévoir plus de temps pour réaliser l’entrevue. En effet, les interventions d’une troisième personne allongent le temps requis pour recueillir les données. En conséquence, l’inrmière devra toujours tenir compte des éléments sur lesquels mettre l’accent en fonction des données relatives à la priorité de soins. Il existe deux types de travail d’interprétation : le « ligne par ligne » et le résumé. Traduire ligne par ligne prend plus de temps, mais cela assure l’exactitude des données. L’inrmière devrait 66 Partie 1 Évaluation globale de la personne privilégier cette procédure pour une entrevue où elle et la personne échangent seulement une phrase ou deux à la fois, an de permettre à l’interprète de les traduire. L’inrmière utilise un langage simple, sans terme médical complexe. Le résumé permet de progresser plus rapidement et est utile pour enseigner des techniques et des changements de comportement. Le langage demeure relativement simple, et les principes sont déjà connus de l’interprète. L’inrmière doit alors être à l’affût des indices non verbaux que la personne pourrait fournir, qui peuvent préciser sa compréhension des données. Un bon interprète note aussi les messages non verbaux et les transmet par la suite à l’inrmière. L’inrmière peut assez souvent se trouver dans une situation où la langue de la personne n’est pas le français. Bien que l’utilisation d’un interprète soit l’idéal, il est possible qu’aucun ne soit disponible. L’ENCADRÉ 3.5 présente certaines suggestions pour surmonter les barrières linguistiques dans ce cas. L’inrmière qui désire communiquer avec des clients de langue étrangère doit s’attendre à ce que l’exercice combine la communication verbale et non verbale. Communication non verbale et interculturalité Il existe cinq types de comportements non verbaux qui transmettent de l’information sur la personne : 1) les repères vocaux tels que le débit, la tonalité et la qualité de la voix, y compris les gémissements, les pleurs et les lamentations ; 2) les indices d’action tels que la posture, l’expression du visage et les mimiques ; 3) les indices d’objets tels que les vêtements, les bijoux, la coupe de cheveux ; 4) l’utilisation fonctionnelle de l’espace et des relations interpersonnelles dans les activités de la vie quotidienne et dans les activités de soins ; 5) le toucher, ce qui inclut l’utilisation de l’espace personnel et les indices d’action (Lapierre et Padgett, 1991 ; Tate, 2003). Si l’inrmière ne s’exerce pas à reconnaître et à comprendre les comportements non verbaux des clients, il lui manquera de l’information importante comme celle véhiculée par les expressions du visage, les silences, le contact visuel, le toucher et d’autres expressions corporelles. Les modes de communication sont très variables pour un même comportement en fonction des cultures. Par exemple, plusieurs personnes d’origine hispanique considèrent un large sourire comme faisant partie intégrante d’une interaction sincère ; il revêt une importance capitale pour l’établissement d’une relation de conance. À l’opposé, le même sourire pourrait être interprété comme un comportement insolent et frivole par un Russe. Par ailleurs, les moments de silence peuvent être interprétés de multiples façons. Certaines personnes trouvent le silence extrêmement inconfortable et ne ENCADRÉ 3.5 Barrières linguistiques : lorsqu’aucun interprète n’est disponible 1. L’inrmière demeure polie et rigoureuse. 8. L’inrmière donne les instructions dans le bon ordre. 2. L’inrmière prononce le nom du client correctement et utilise les titres de civilité tels que « Monsieur », « Madame », « Docteur ». Elle accueille la personne en employant le nom de famille ou le nom et le prénom. • Elle se présente et fait des gestes mesurés. • Elle sourit. Elle dit plutôt : « D’abord, brossez-vous les dents. Ensuite, lavez-vous. » Exemple : 3. L’infirmière procède à l’entrevue sans trop de hâte. Elle prête attention à toute tentative du client ou de membres de la famille de communiquer. 4. L’inrmière prend la parole avec une voix de faible à modérée. Elle évite de parler fort et doit garder à l’esprit que l’on a tendance à augmenter le volume et la hauteur de la voix lorsque l’auditeur ne semble pas comprendre. Le client peut percevoir que l’inrmière crie ou qu’elle est en colère. 5. L’inrmière tentera d’utiliser un ou des mots qu’elle connaît dans la langue de la personne. Cela indique qu’elle est au courant de la barrière de la langue et qu’elle respecte la culture de la personne. 6. L’inrmière utilise des mots simples, comme « douleur » au lieu de « gêne ». Elle n’a pas recours au jargon médical, aux idiomes et à l’argot. Elle évite d’utiliser des expressions contractées. Elle reprend les noms au lieu d’employer des pronoms personnels. Exemple : Elle ne dit pas : « Il a pris son médicament, n’est-ce pas ? » Elle dit plutôt : « Juan a pris son médicament ? » 7. L’infirmière peut mimer des mots et faire des gestes simples pendant qu’elle parle. Le contact visuel est peut-être le comportement non verbal le plus variable culturellement. Même si l’inrmière a probablement eu l’occasion d’apprendre à maintenir un contact visuel en parlant avec d’autres personnes, les clients issus de divers milieux culturels peuvent attribuer plusieurs 3 Elle ne dit pas : « Avant de vous laver, brossez-vous les dents. » 9. L’inrmière traite d’un sujet à la fois. Elle évite d’utiliser des conjonctions de coordination. • Elle offre une poignée de main ou fait un signe de tête. ménageront aucun effort pour combler les absences de conversation. Inversement, de nombreux Canadiens considèrent le silence comme indispensable à la compréhension et au respect de l’autre personne. Une pause qui suit une question signie que ce qui a été demandé est sufsamment important pour que la personne y rééchisse. Dans les cultures traditionnelles chinoise ou japonaise, un silence peut signier que l’orateur tient à ce que l’auditeur examine le contenu de ce qu’il a dit avant de poursuivre. Les Anglais et les Arabes peuvent utiliser le silence par respect pour la vie privée, alors que les Français, les Espagnols et les Russes peuvent interpréter cela comme un signe d’accord. Les cultures asiatiques utilisent souvent le silence pour démontrer du respect envers les aînés. Parmi certaines communautés noires, le silence est utilisé en réponse à ce qui est perçu comme une question ridicule. Exemple : Elle ne dit pas : « Avez-vous froid ou avez-vous de la douleur ? » Elle dit plutôt : « Avez-vous froid (avec un mime) ? Avez-vous de la douleur ? » 10. L’inrmière valide avec la personne si celle-ci a bien compris en lui demandant de répéter les instructions, la procédure ou le but de l’examen. 11. L’inrmière peut écrire plusieurs phrases courtes en français et déterminer la capacité de la personne à lire. 12. L’infirmière peut utiliser une autre langue, car beaucoup de personnes parlent l’anglais ou l’espagnol. Les Européens connaissent souvent deux ou plusieurs langues. L’inrmière peut alors essayer d’utiliser des expressions ou des mots latins. 13. En situation d’urgence, l’inrmière pourrait demander à la personne qui, dans la famille et les amis, pourrait servir d’interprète en gardant à l’esprit toutes les limitations et les inconvénients liés au recours à un interprète provenant de la famille immédiate. 14. L’inrmière communique avec la chef d’unité ou la coordonnatrice, le cas échéant, an d’obtenir une liste ofcielle d’interprètes et les autorisations nancières. significations différentes à ce comportement. L’Asiatique, l’Américain, l’Indochinois, l’Arabe et les peuples des Premières Nations interprètent le contact visuel chacun à leur façon, et ils peuvent l’éviter s’ils l’associent à de l’impolitesse ou à une agression. L’Américain regarde souvent au sol pendant la conversation : c’est un comportement culturellement approprié qui indique que l’auditeur est attentif à son interlocuteur. Certains Noirs peuvent utiliser le roulement des yeux en réponse à ce qu’ils jugent comme une question ridicule. Chez les Hispaniques, il est essentiel de baisser les yeux lorsqu’on s’adresse à l’inrmière. Cette caractéristique s’exprime en fonction de certains éléments, dont l’âge, le sexe, le statut social, la situation économique et la position d’autorité de la personne qui parle. Par exemple, les aînés de ces communautés s’attendent à une certaine forme de respect de la part des personnes plus jeunes, des hommes à l’égard des femmes, des élèves envers les enseignants, des employés envers les employeurs. En tant que professionnelle de la santé, l’inrmière a un statut d’autorité pour les Hispaniques ; le contact visuel ne sera pas nécessairement réciproque entre elle et la personne. Chapitre 3 Entrevue 67 Chez les peuples des Premières Nations, avoir un contact visuel avec une personne démontre un manque de respect, surtout avec une personne en position d’autorité. Il faut donc éviter d’insister pour obtenir un contact visuel et se er davantage aux messages non verbaux an de mieux comprendre les clients. Il faut également respecter les silences, les écouter. S’ils traduisent de l’incompréhension, l’inrmière s’assure que tous les membres de la famille ont bien compris. Les formules de courtoisie (merci et s’il vous plaît) ou le vouvoiement ne sont pas usuels. Le tutoiement est courant et ne traduit pas nécessairement un manque de respect. La poignée de main est également plutôt inhabituelle chez les peuples des Premières Nations. Dans certaines cultures, y compris chez les Arabes, les Latino-Américains et les Noirs, la modestie entre les hommes et les femmes est étroitement liée aux contacts visuels. Pour les femmes musulmanes arabes, la modestie est exprimée en partie en évitant le contact visuel avec les hommes (à l’exception du mari dans un cadre privé) et en gardant un regard triste lorsque, en public, des membres du sexe opposé les observent. Dans de nombreuses cultures, une femme seule qui sourit et établit un contact visuel avec des hommes peut être accusée de mœurs légères. Les Juifs hassidiques ont également des normes concernant le contact visuel avec les femmes qui sont basées sur leur culture. Les hommes évitent le contact visuel direct et tournent la tête en direction opposée lorsqu’ils croisent une femme ou parlent avec elle. Les exemples qui précèdent sont donnés à titre illustratif ; ils sont non exhaustifs et reètent une petite partie de ce que représente l’approche de communication interculturelle. Toucher Sans aucun doute, le fait de toucher une personne est un élément indispensable d’une évaluation globale. Dans une perspective culturelle, cependant, l’inrmière doit être très attentive aux questions relatives au toucher. Tout en reconnaissant qu’il existe des bénéces aux rapports tactiles avec les personnes, le contact physique transmet diverses signications selon les cultures. Dans certaines d’entre elles, par exemple dans les sociétés arabe et latino-américaine, il peut être interdit aux professionnels de la santé masculins de toucher ou d’examiner certaines parties du corps féminin ou celui-ci en entier. Dans de nombreuses cultures, les femmes peuvent préférer une professionnelle de la santé, et certaines peuvent même refuser de se faire examiner par un homme. L’inrmière doit savoir que la personne peut subir des pressions de la part 68 Partie 1 Évaluation globale de la personne d’autres personnes afin de faire respecter ces normes culturelles dans le cadre des soins de santé. Toucher des enfants peut également avoir une signication culturelle. Par exemple, une grande partie de la population mondiale croit au mal ojo, qui a été littéralement traduit par « œil du diable » (ou « œil malveillant »). Cette pseudoaffection infantile serait causée par un regard envieux projeté sur l’enfant. La croyance veut que le traitement immédiat soit qu’une personne soignante touche l’enfant ayant été ainsi observé. Le mal ojo est particulièrement répandu dans les pays de culture latinoaméricaine. Beaucoup d’Asiatiques pensent que la force réside dans la tête et que toucher celle d’une personne équivaut à lui manquer de respect. Pour l’inrmière, cela signie que le fait d’effectuer un examen systématique de la tête ou de la fontanelle d’un nourrisson est problématique pour des personnes originaires d’Asie, à moins d’obtenir la permission des parents. En fait, elle devrait toujours prendre en compte la culture dans le déroulement d’un examen clinique. Chaque fois que c’est possible, l’inrmière explore d’autres façons d’exprimer son affection ou d’obtenir les renseignements nécessaires pour l’évaluation de l’état du client (p. ex., maintenir l’enfant asiatique sur ses genoux, an d’observer des manifestations cliniques de l’augmentation de la pression intracrânienne ou des signes de fermeture prématurée des fontanelles, placer sa main sur celle de la mère tout en demandant une description de ce que celle-ci ressent). En conclusion de cette section, un bref commentaire à propos des relations entre des personnes de même sexe est justié. Dans certaines cultures, il est publiquement et culturellement accepté qu’ils expriment leur amitié et leur affection, en se tenant par la main ou en s’embrassant, sans qu’une connotation sexuelle y soit associée. Par exemple, l’inrmière remarquera peut-être que, même si une Nigérienne immigrée ne peut montrer ouvertement ses sentiments envers son mari ou d’autres membres masculins de la famille, elle va sans problème donner la main à d’autres femmes, parents et amis tout en marchant ou en discutant avec eux. Dans le même ordre d’idée, chez les hommes du Bénin, il est acceptable d’embrasser un homme en guise de salutation. Lorsque l’inrmière rencontre des personnes au comportement similaire, elle devrait se sentir libre de discuter des différences et des similitudes culturelles avec celles-ci. La discussion devrait inclure les points de vue de chaque personne concernant la pratique culturelle et explorer les avenues qui sont mutuellement acceptables par rapport à celles qui le sont moins. Évaluation et jugement clinique Dossier : Anne-Sophie Chamberland (suite ) 3 Vous avez terminé l’entrevue et vous vous apprêtez à procéder à l’examen physique d’AnneSophie. Vous lui dites : « Je vais maintenant regarder ton dos et tes épaules. Tu peux aller t’asseoir sur la table d’examen, j’arrive dans un instant. » Vous tirez le rideau et vous dites à sa mère : « Vous pouvez retourner à la salle d’attente, nous avons presque terminé, et Anne-Sophie ira vous rejoindre dès que j’aurai ni. » Sa mère sort du bureau, et vous allez rejoindre Anne-Sophie. Anne-Sophie, un peu embarrassée, regarde au sol : « Oui, mais une fois je ne sais pas ce qui s’est passé, mais il s’est brisé, et mon chum et moi on ne s’en est pas rendu compte avant la n. Une chance que je n’ai pas oublié de prendre une pilule pendant cette semaine-là. » Vous vous approchez et vous asseyez sur une chaise devant elle. « Avant de regarder ton dos, il me reste quelques questions que j’aimerais te poser maintenant que ta mère est sortie, est-ce que ça te va ? » Anne-Sophie acquiesce. Vous : « Je t’ai posé la question, car la pilule fait en sorte que tu ne seras pas enceinte, mais elle ne te protège pas contre les infections transmissibles sexuellement, je voulais juste m’assurer que tu le savais. » Vous : « Tu as mentionné tout à l’heure que tu as commencé à prendre la pilule contraceptive depuis peu de temps ; as-tu des questions à ce sujet ? » Anne-Sophie : « Pas vraiment, le pharmacien m’a expliqué ce que je devais faire si j’en oubliais une et tout le reste, ça va bien pour le moment. » Vous : « As-tu un chum en ce moment ? » Anne-Sophie sourit : « Oui ça fait trois mois. » Vous : « Êtes-vous actifs sexuellement ? » Anne-Sophie : « Oui. » Vous : « Utilisez-vous le condom ? » Vous : « Ça arrive à l’occasion qu’un condom se brise. Je te félicite de prendre la sexualité au sérieux et de te protéger, ce n’est pas tous les jeunes de ton âge qui font attention. » Anne-Sophie regarde le sol en silence, l’air un peu inquiet. Anne-Sophie : « Oui bien je me demandais si je devrais faire un test pour ça. Moi, c’est mon premier partenaire, mais mon chum a déjà eu d’autres partenaires avec qui il ne se protégeait pas. » Vous : « Dans ce cas, il serait préférable de faire un test pour en être certaine. » Anne-Sophie : « Je veux bien, mais il ne faut pas que ma mère le sache. Est-ce que vous allez lui dire ? » 1. Relevez deux facteurs facilitant la communication dans cette partie de l’entrevue. 2. Quel type de question utilisez-vous dans cette portion de l’entrevue ? 3. Quel est le piège à éviter lorsque ce genre de question est posé ? 4. À la n de la situation, Anne-Sophie vous pose une question ; quelle sera votre réponse ? Que retenez-vous ? 4. Quelles techniques d’entrevue est-il préférable d’éviter avec les adolescents ? Pourquoi ? 7. Au cours de l’entrevue, que faut-il faire si la personne éclate en sanglots ? 2. Quelles sont les techniques d’entrevues durant lesquelles vous prenez principalement la parole ? 5. Dans le cas d’une entrevue avec un enfant accompagné de ses parents, à partir de quel âge recommande-t-on de commencer par interroger l’enfant pour ensuite compléter la collecte des données avec le parent ? 8. Si vous avez des raisons de croire qu’une personne pourrait être violente pendant l’entrevue, indiquez trois moyens à utiliser pour assurer votre sécurité. 3. Nommez les éléments de la communication non verbale d’un client que vous devez observer durant l’entrevue. 6. Comment devez-vous questionner la personne pendant l’entrevue si celle-ci est sous l’inuence de l’alcool, de drogues ou d’une autre substance ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Est-il acceptable de prendre des notes pendant l’entrevue ? Chapitre 3 Entrevue 69 Dossier : Christine Moisan Christine Moisan, âgée de 42 ans, demeure à la campagne avec son mari de 45 ans et ses 5 enfants dont le plus vieux a 10 ans. Elle est amenée à l’hôpital par son conjoint à la suite d’une chute qu’elle a faite dans l’étable de la ferme familiale. Elle est copropriétaire de la ferme laitière avec son conjoint, elle travaille dans les champs et à l’étable tous les jours. Alors qu’elle s’affairait à terminer la traite matinale, elle a perdu pied en descendant d’une échelle et est tombée sur son côté gauche. « C’est bête, j’ai manqué l’avant-dernier barreau avant d’arriver en bas. J’ai voulu me protéger avec mon bras, mais quand il a touché le sol, j’ai entendu un craquement et j’ai senti une atroce douleur », vous raconte-t-elle. Vous regardez son avant- 4.1 Histoire de santé L’objectif de l’histoire de santé est de recueillir des données subjectives, c’est-à-dire ce que la personne dit à son sujet. Cette histoire s’ajoute aux données objectives provenant de l’examen physique et des examens paracliniques. L’inrmière fait une analyse des caractéristiques essentielles de la situation, organise et formule ses conclusions FIGURE 4.1. Elle établit le portrait global de la situation pour l’élaboration d’un plan thérapeutique infirmier (PTI) (Chapados, 2007). L’histoire de santé proposée ici fournit un tableau complet de la santé antérieure et actuelle de la personne. Elle décrit celle-ci comme un tout et montre comment elle interagit avec l’environnement. L’histoire de santé relève les forces et bras, qui est courbé en forme de « s ». Vous observez une lacération linéaire de 3 cm près du coude et des traces de terre humide sur sa peau près de la plaie. Madame Moisan ajoute : « Ça me fait tellement mal quand j’essaie de bouger ma main que je la garde immobile. » 4 Vous l’installez sur une civière et vous amorcez l’évaluation. Elle est pâle, respire rapidement, et sa peau est moite. Le médecin a ordonné une radiographie de l’avant-bras et une consultation en orthopédie. Vous vous apprêtez à commencer l’entrevue lorsqu’elle est demandée en radiologie. Vous nettoyez sommairement sa plaie et la couvrez d’une compresse de gaze stérile avant que le brancardier parte avec elle. Vous amorcez donc l’entrevue avec son conjoint en attendant son retour. les mécanismes d’adaptation que la personne utilise pour se garder en santé, tout en mettant de l’avant ce qu’elle « fait bien », c’est-à-dire les moyens qu’elle prend pour être en santé. Chez la personne en bonne santé, l’histoire sert à évaluer son style de vie en incluant certains facteurs tels que l’exercice, l’alimentation, la réduction des risques et les comportements de promotion de la santé. Chez la personne malade, l’histoire de santé comprend une description détaillée de son problème de santé. Elle constitue un outil de dépistage des symptômes anormaux, des préoccupations et des problèmes de santé tout en précisant les façons dont la personne y réagit. Données subjectives : Perception que le client a de ses problèmes de santé et de ses sensations internes. Seul le client peut fournir ce type d’information. Données objectives : Données observées ou mesu­ rées par la personne qui effec­ tue la collecte d’information et l’examen physique. Dans plusieurs milieux de soins, le client remplit un questionnaire de santé par écrit. Cette façon de procéder lui permet de prendre le temps de rééchir aux questions posées et de se rappeler certains aspects importants liés à sa santé et à ses antécédents familiaux. L’entrevue avec l’inrmière permet ensuite de valider les données déjà inscrites et de recueillir plus de données sur son style de vie et sur ses problèmes actuels de santé. Bien que les questionnaires diffèrent d’un milieu à l’autre, la plupart des histoires de santé contiennent des renseignements classés en catégories semblables et présentés selon la séquence qui suit. 1. Informations sociodémographiques 2. Raisons de la consultation 3. Histoire du problème de santé actuel 4. Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux FIGURE 4.1 L’inrmière rédige l’histoire de santé du client. 5. Antécédents familiaux 6. Revue des systèmes Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 71 L’histoire de santé présentée dans les sections suivantes est conçue selon ce modèle et présente une base de données générique pour tous les professionnels de la santé. Ceux qui pratiquent en soins de santé primaires peuvent l’utiliser au complet ; les professionnels en milieu hospitalier pourront surtout mettre l’accent sur l’histoire du problème de santé actuel ainsi que sur le bilan fonctionnel ou le mode de vie de la personne et de sa famille. 4.1.1 Note à l’inrmière Avant de procéder à l’histoire de santé, l’inrmière s’assure d’écrire la date et l’heure de l’entrevue. Les points à considérer au moment de la rédaction des notes d’évolution de l’inrmière sont détaillés dans le tableau 10.2 de l’ouvrage de Potter, P.A., et Perry, A.G. (2010). Soins inr­ miers – Fondements généraux (3e éd.). Montréal : Chenelière Éducation. Q uestion de suivi Dans le cas de madame Moisan, comment allezvous commencer la rédaction de la note au dossier à partir des données dont vous disposez actuellement ? Informations sociodémographiques Les données sociodémographiques comprennent le nom, l’adresse et le numéro de téléphone ; l’âge et la date de naissance ; le lieu de naissance, le sexe, l’état matrimonial et l’origine ethnique ; l’emploi habituel et présent (une maladie ou un handicap peut avoir provoqué un changement d’emploi ou de métier) ; les langages utilisés et les besoins liés à la communication de même que le nom de la personne mandatée pour traduire les propos, au besoin. 1. Inscrire le nom de la personne qui fournit l’information (habituellement, il s’agit de la personne elle-même, quoique la source d’information puisse aussi être un parent ou un ami). 2. Estimer le degré de abilité de la personne qui fournit l’information et sa motivation à la communiquer. Une personne « able » est celle qui s’en tient à une seule version et qui donne les mêmes réponses quand l’interlocuteur paraphrase les questions ou les répète plus tard durant l’entrevue. 3. Noter les éléments qui sortent de l’ordinaire, comme l’utilisation d’un interprète. Par exemple : Entrevue effectuée avec la cliente en présence de son conjoint, tient des propos cohérents. 4.1.2 Raisons de la consultation Cette partie de l’histoire de santé est constituée d’un bref énoncé qui reprend les mots utilisés par la personne pour décrire la raison de la visite. L’inrmière inscrit alors ce que la personne lui dit pour indiquer la raison qui sous-tend la demande de soins, et cette raison peut apparaître entre guillemets, sous forme de synthèse, pour résumer les propos de la personne à son sujet. • « Douleurs à la poitrine depuis trois heures.» • « Examen physique annuel pour le travail.» • « Évaluation de santé avant le début d’un programme d’entraînement.» La raison donnée pour la demande de consultation ne donne pas lieu à un constat d’évaluation. Il est donc important d’éviter de la traduire en termes médicaux. Par exemple, un client se 72 Partie 1 Évaluation globale de la personne présente avec de la dyspnée, et l’inrmière se demande si elle doit écrire « emphysème ». Même si elle est au courant que ce client fait de l’emphysème parce qu’elle l’a déjà vu, l’inrmière sait aussi qu’il ne vient pas en consultation à cause de cette affection, mais bien parce qu’il y a « exacerbation de son état respiratoire lié à l’emphysème » depuis quelques heures. Certaines personnes ont tendance à s’autodiagnostiquer à l’aide d’Internet ou en se basant sur les signes et les symptômes rapportés par leurs parents ou amis. Plutôt que d’écrire les mots d’une cliente qui afrme avoir une « angine à streptocoque », il est préférable de lui demander quels sont les symptômes qui lui font penser à cette maladie et de les inscrire. Il peut aussi arriver qu’une personne évoque plusieurs raisons pour la consultation. Le motif le plus important n’est pas nécessairement celui qu’elle a nommé en premier. L’inrmière tente alors de se centrer sur le problème qui a amené la personne à consulter à ce moment précis. 4.1.3 Histoire du problème de santé actuel Pour une personne en bonne santé, il suft d’écrire un énoncé bref sur l’état de sa santé en général. Pour une personne atteinte d’une maladie, il convient d’écrire, dans l’ordre chronologique, la raison de demande d’une consultation depuis l’apparition du premier symptôme jusqu’au moment de la visite. L’inrmière procède donc à une évaluation ciblée des signes et symptômes. Il est préférable de traiter séparément chaque motif de soin décrit par la personne et de demander, par exemple : Pourriez-vous s’il vous plaît me décrire votre mal de tête depuis le moment où il a commencé jusqu’à ce que vous veniez au centre hospitalier ? Si ce problème dure depuis quelques mois ou quelques années, il est préférable d’inscrire ce qui s’est passé durant cette période et de préciser ce qui a conduit la personne à consulter maintenant. Il est important d’éviter de sauter aux conclusions lorsque la personne parle ou encore de déformer son histoire en donnant une opinion. Il faut d’abord recueillir toutes les données FIGURE 4.2. L’idéal est que la personne puisse raconter son histoire, sans se faire interrompre par l’inrmière. Cette dernière résumera les symptômes énumérés par la personne en incluant nécessairement les six caractéristiques suivantes. P Provoquer/pallier/aggraver Qu’est-ce qui provoque ou fait augmenter la douleur ? Est-elle aggravée par le climat, l’activité, la nourriture, les médicaments, la position debout et penchée, la fatigue, le moment de la journée, la saison ou autres ? Qu’est-ce qui atténue la douleur R Région/irradiation La précision est importante. L’infirmière peut demander à la personne de montrer où se situe le problème avec son doigt. S’il y a de la douleur, elle note la région précise. « Douleur à la tête » est une formulation vague, tandis que des descriptions telles que « douleur derrière les yeux (rétrooculaire) », « douleur à la mâchoire » et « douleur à la région occipitale » sont plus précises et plus signicatives pour un constat d’évaluation. L’inrmière demande au client : À quel endroit est-ce douloureux ? La douleur est-elle limitée à ce site ou irradiet-elle ? Est-elle supercielle ou profonde ? S FIGURE 4.2 L’inrmière résume les symptômes énumérés par la personne. (p. ex., le repos, les médicaments ou l’application d’un sac de glace) ? Comment les traitements agissent-ils ? L’inrmière peut demander à la personne : Qu’avez-vous essayé jusqu’à présent pour vous soulager ? Qu’est-ce qui semble vous aider le plus ? Q Qualité À quoi ce symptôme ressemble-t-il ? Que ressentez-vous ? Une description précise en utilisant des termes tels que « sensation de brûlure », « aiguë », « amortie », « tenaillante », « qui élance », « lancinante », « comme un étau » est nécessaire. L’inrmière utilise des comparaisons, par exemple : le sang dans les selles ressemble-t-il à du goudron collant ? Le sang dans les vomissements ressemblet-il à des grains de café ? Quantité L’inrmière vise à quantier un signe ou un symptôme, par exemple, « ot menstruel abondant souillant cinq serviettes en une heure ». Le symptôme de la douleur est difcile à quantier en raison de l’interprétation individuelle de cette douleur. Ce qu’une personne peut évoquer comme une « douleur terrible » sera décrite par une autre comme étant « pas trop mal ». Quand il s’agit de douleur, il est préférable d’éviter les adjectifs et de demander plutôt comment la douleur nuit aux activités de la vie quotidienne (AVQ). La personne peut alors répondre « j’étais tellement malade, j’étais pliée en deux et je ne pouvais pas bouger » ou encore « j’ai été capable d’aller au travail, mais je suis revenue à la maison et je me suis couchée ». L’inrmière peut demander à la personne : Comment décririez-vous l’intensité de ce symptôme sur une échelle de 0 à 10 ? Symptômes et signes associés/sévérité Le symptôme primaire est-il associé à d’autres symptômes, par exemple à la fréquence urinaire ou à une sensation de brûlure associée à de la èvre et à des frissons ? L’inrmière examine surle-champ le système corporel lié à ce symptôme au lieu d’attendre de faire la revue complète des systèmes. T Q uestion de suivi Dans le cas de madame Moisan, comment qualiet-elle sa douleur ? Quel est son impact sur ses AVQ ? 4 Une méthode mnémotechnique peut s’avérer utile pour se rappeler la séquence des questions et tous les points à explorer au moment où l’inrmière évalue le symptôme que présente son client. Elle se base sur les lettres suivantes : P Q R S T U. Temps/durée Quand le symptôme est-il apparu pour la première fois ? L’inrmière note la date et le moment précis de l’apparition du symptôme ou indique depuis combien de temps dure la manifestation de ce symptôme. « La douleur a commencé hier » peut ne pas être aussi pertinent lorsque l’inrmière relira le dossier ultérieurement. Le rapport doit inclure des questions telles que : Pendant combien de temps avez-vous ressenti ce symptôme (durée) ? ; Était-ce une douleur constante ou une douleur qui venait et qui disparaissait (intermittente) ? U (Understanding) Compréhension et signication pour le client L’inrmière cherche à découvrir la signication que la personne attribue à un symptôme en lui demandant comment ce dernier inue sur ses activités quotidiennes. Elle peut demander directement : Que pensez-vous que ce symptôme signie ? Cela est essentiel parce que la réponse à cette question lui indiquera si la personne perçoit ce symptôme comme catastrophique et si elle devient ou pourrait devenir anxieuse. 4.1.4 Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux Les situations de santé vécues dans le passé peuvent avoir des effets résiduels sur l’état de santé actuel. De la même façon, les expériences antérieures de maladie peuvent fournir de bons indices quant à la façon dont la personne réagit à la maladie et à la signication qu’elle accorde à cette dernière. Il faut noter tous ces éléments. Ce sont des indices qui Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 73 permettent d’envisager la façon dont le client réagit à la maladie et d’orienter l’inrmière quant à l’état de santé de celui-ci. Ces renseignements fournissent à l’inrmière une évaluation détaillée lui permettant également de déterminer le degré de priorité du patient en situation d’urgence. Ils peuvent être recueillis à l’aide de l’outil mnémotechnique AMPLE (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2007) TABLEAU 4.1. Maladies de l’enfance Les maladies de l’enfance comprennent la rougeole, les oreillons, la varicelle, la coqueluche ainsi que l’angine à streptocoque. L’inrmière évite de noter « maladies communes de l’enfance » puisque l’une ou l’autre de ces maladies, pourtant commune durant l’enfance de cette personne (p. ex., la rougeole), peut fort bien être inhabituelle aujourd’hui. Elle s’informe plutôt des maladies sérieuses qui auraient pu laisser des séquelles chez la personne devenue adulte (p. ex., la èvre rhumatismale, la scarlatine, la poliomyélite). Accidents ou blessures Les accidents d’automobile, les fractures, les plaies ouvertes, les blessures à la tête (surtout si elles ont été associées à une perte de conscience) ainsi que les brûlures. Questionnaire AMPLE TABLEAU 4.1 SÉQUENCE AMPLE QUESTIONS À POSER A Allergies/réactions Allergies connues du client (médicamenteuses, alimentaires et environnementales) et réactions occasionnées. • Avez-vous des allergies connues ? • Quelle est votre réaction à l’allergène ? M Médicaments • Prenez-vous des médicaments sur ordonnance ? Quel est leur nom ? Quelle est leur dose ? À quelle fréquence les prenez-vous ? Pour quelle raison les prenez-vous ? Quand avez-vous pris la dernière dose ? • Consommez-vous de l’alcool ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis quand en consommez-vous ? • Fumez-vous ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis quand fumez-vous ? • Consommez-vous de la caféine (café, thé, boissons énergisantes) ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? • Consommez-vous de la drogue ? Si oui, laquelle ou lesquelles ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis quand en consommez-vous ? • Avez-vous reçu des vaccins ? Quels vaccins avez-vous reçus (p. ex., contre le tétanos, l’hépatite, la grippe) ? À quelle date les avez-vous reçus ? Médicaments déjà pris ou pris actuellement. Il s’agit des médicaments sur ordonnance ou offerts en vente libre, des vitamines et des suppléments alimentaires (dont les interactions avec les médicaments doivent être connues du client). L’inrmière s’informe également des vaccins reçus et de la consommation de tabac, d’alcool, de caféine ou de drogues. P Passé Principales maladies, blessures, hospitalisations, chirurgies et transfusions sanguines subies au cours de l’enfance et de la vie adulte. État de santé ou cause du décès des membres de la famille. Antécédents familiaux. L (Last meal) Dernier repas Quantité et qualité des aliments et des liquides ingérés au cours des dernières 24 heures. Évaluation de l’ingestion, de la digestion, de l’absorption et du métabolisme du client. Évaluation des symptômes tels que les nausées, les gaz intestinaux ou la douleur gastrique. Signes d’allergie ou d’intolérance alimentaire. Incidence de facteurs psychologiques tels que la dépression, l’anxiété et le concept de soi sur l’alimentation. E Événements/environnement Environnement professionnel et personnel du client (situation de travail, contraintes physiques ou psychologiques associées à l’emploi, exposition à certains agents polluants ou à des bruits excessifs, etc.) Aménagement intérieur du domicile (présence de tapis, plantes, poussière, animaux). Tout facteur de stress, changement à la situation du client, événement stressant au cours des mois précédents. Source : Adapté de Gordon (2010) 74 Partie 1 Évaluation globale de la personne • Avez-vous des problèmes de santé connus ? • Avez-vous déjà été hospitalisé ou opéré ? • Y a-t-il des problèmes de santé connus dans votre famille ? Quel est votre lien familial avec ces personnes ? Quel est le type de problème ? À quel âge est-il survenu ? • • • • Quand avez-vous mangé et bu pour la dernière fois ? Qu’avez-vous mangé ? Qu’avez-vous bu ? Prenez-vous des suppléments ? Suivez-vous une diète ? Pour quelle raison ? Depuis quand ? Avez-vous du mal à respecter cette diète ? • Y a-t-il une situation stressante ou qui vous préoccupe en ce moment ? • Décrivez-moi le milieu où vous habitez (p. ex., à la campagne, en ville, dans une maison ou en appartement). • Parlez-moi de votre environnement de travail (p. ex., la présence de poussière, le bruit, un équipement sécuritaire, le contact avec le public). Maladies graves ou chroniques Date du dernier examen Le diabète, l’HTA, les problèmes cardiaques, l’anémie falciforme, le cancer ou les convulsions. L’inrmière doit noter la date du dernier examen physique, dentaire, ophtalmologique, audiométrique, l’électrocardiogramme (ECG) ainsi que les radiographies (RX). Hospitalisations La cause, le nom du centre hospitalier, les traitement reçus, la durée de l’hospitalisation et le nom du médecin traitant. 4.1.5 Antécédents familiaux 4 Histoire obstétricale À l’ère de la génomique, une histoire de famille précise mettra en évidence les maladies et les conditions pour lesquelles un client peut être à risque. Une personne qui se sait vulnérable à une certaine condition pourra obtenir un dépistage, une surveillance et être amenée à adopter un mode de vie sain lorsqu’il est possible d’atténuer ces risques. Le nombre de grossesses (G), le nombre de naissances d’un fœtus à terme (T), le nombre d’accouchements prématurés (P), le nombre de grossesses interrompues (A) et le nombre d’enfants vivants (V). Par exemple, ces données sont nommées comme suit : G3 ; T2 ; P1 ; A0 ; V3. La façon la plus fructueuse d’effectuer une histoire de santé complète de la famille consiste à faire parvenir un questionnaire détaillé à la personne avant la rencontre. La compilation de l’information prend du temps, et les renseignements viennent souvent de plusieurs membres de la famille. Pour chacune des grossesses menées à terme, l’inrmière note : 1) le déroulement de la grossesse, du travail et de l’accouchement ; 2) le sexe, le poids et l’état de santé de chaque bébé ; 3) la période postpartum. Pour chaque grossesse interrompue, elle note aussi la durée de celle-ci et précise si la grossesse s’est terminée à la suite d’un avortement spontané ou provoqué. Ensuite, l’inrmière peut proter de la visite de santé pour compléter le génogramme et l’écocarte. Le génogramme est un arbre généalogique graphique qui utilise des symboles pour représenter le sexe, la relation et l’âge des parents immédiats d’au moins trois générations, par exemple, les grands-parents, les parents, les frères et les sœurs FIGURE 4.3. Interventions chirurgicales Les types de chirurgie, le nom du ou des chirurgiens, le nom du centre hospitalier et la façon dont s’est déroulée la période de convalescence. Immunisations Les vaccins reçus : rougeole-oreillons-rubéole (ROR), poliomyélite, diphtérie-coqueluche-tétanos (DCT), hépatite A et B, méningite, virus du papillome humain (VPH), inuenza de type b, pneumonie. L’inrmière note la date de la dernière immunisation contre le tétanos, le dernier test de la tuberculine (ou test de Mantoux) et le dernier vaccin contre la grippe. Le Protocole d’immunisation du Québec 2013 pour la vaccination publié par la Direction des communications du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) contient plusieurs changements (MSSS, 2013). En outre, le vaccin contre le VPH est maintenant aussi recommandé pour les enfants et les jeunes hommes âgés de 9 à 26 ans an de réduire les condylomes. Le vaccin contre la pneumonie est recommandé aux personnes de 65 ans et plus et à celles ayant reçu des soins médicaux pour traiter l’asthme au cours des 12 derniers mois (Agence de la santé publique du Canada [ASPC], 2014a). De même, une dose de vaccin contre le zona est recommandée aux personnes âgées de 60 ans et plus chez qui il n’y a pas de contre-indications (ASPC, 2014a). L’état de santé des proches parents, tels que le conjoint et les enfants, est tout aussi important parce qu’il pourra mettre en lumière le contact prolongé du client avec une maladie transmissible, ou un risque associé à l’environnement – comme la fumée de tabac – ou l’effet de la maladie d’un membre de la famille sur cette personne. L’écocarte sert à décrire les liens que les membres de la famille entretiennent avec les organismes extérieurs. Elle permet de visualiser ces liens FIGURE 4.4. Le génogramme de la famille peut être placé dans le grand cercle ; les autres cercles représentent les personnes, les organismes ou les établissements qui jouent un rôle essentiel dans le contexte de la famille. La taille des cercles n’a pas d’importance. Ce qui compte vraiment, ce sont les liens qu’entretiennent les membres de la famille avec le contenu de ces cercles. Les liens très forts peuvent être représentés par des lignes multiples ; un lien moins fort, mais tout aussi positif, par deux lignes. En revanche, un lien posant des difcultés peut être représenté par des barres obliques ou par une ligne brisée. Des èches peuvent aussi indiquer le sens du lien. Des èches pointant dans les deux sens représentent des liens réciproques. Q uestion de suivi Vous savez que madame Moisan a cinq enfants ; quelles sont les autres questions que vous devrez lui poser an de compléter son histoire obstétricale ? Vous voyez ceci dans le dossier antérieur de madame Moisan. Grav 6 T5 P0 A1 V5 Qu’est-ce que cela signie ? Q uestion de suivi Dans le cas de madame Moisan, pour quel vaccin est-il particulièrement important de connaître la date de sa dernière administration ? Il faut documenter la condition médicale de chaque parent proche, mais aussi les autres données importantes sur la santé, comme l’âge et la Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 75 FIGURE 4.3 Génogramme 76 Partie 1 Évaluation globale de la personne 4 FIGURE 4.4 Écocarte cause de la mort d’un parent proche, la grossesse de jumeaux, l’usage du tabac et l’utilisation excessive d’alcool. Selon l’examen qu’elle fait des données de l’histoire familiale, l’inrmière peut poser des questions plus précises pour relever une cardiopathie coronarienne, de l’hypertension artérielle (HTA), un accident vasculaire cérébral, du diabète, de l’obésité, une hémopathie, un cancer du sein ou des ovaires, un cancer du côlon, une drépanocytose, de l’arthrite, des allergies, la consommation d’alcool ou la toxicomanie, un trouble mental, un risque de suicide, un trouble épileptique, une néphropathie et la tuberculose. Dessin du génogramme Pour dessiner le génogramme, il faut : • dresser une liste de tous les membres de la famille ; • utiliser l’exemple de l’arbre généalogique comme un guide pour dessiner le propre génogramme ; • écrire en haut de la feuille, le nom et la date à laquelle est dessiné le génogramme ; • remplacer les mots « père », « mère », etc., par les noms des membres de la famille ; • si possible, placer de gauche à droite sur la feuille les frères et les soeurs ainsi que les frères et les soeurs des parents, des plus âgés aux plus jeunes ; • si l’âge ou la date de naissance des personnes est inconnue, en faire l’estimation, par exemple en indiquant « cinquantaine » ou « n soixantaine » FIGURE 4.3. Particularités culturelles et génétiques Il est parfois nécessaire de poser plusieurs autres questions pour compléter l’histoire de santé lorsque la personne examinée a immigré récemment. Données sociodémographiques Quand la personne est-elle entrée au Canada et de quel pays provenait-elle ? Si la personne est réfugiée, quelles étaient les conditions prévalant dans son pays au moment de son émigration ? A-t-elle été torturée ? D’autres questions peuvent s’ajouter selon le contexte. Drépanocytose : Maladie non contagieuse, génétique, héréditaire, atteignant les globules rouges (hématies) du sang, qui présentent une forme de croissant ou de faucille. Adulte vieillissant L’adulte vieillissant pourrait être une personne arrivée au pays après la Seconde Guerre mondiale, et il pourrait même être un survivant de l’Holocauste. Les questions portant sur la famille et le passé peuvent évoquer des souvenirs douloureux ; elles exigent beaucoup de délicatesse et de prudence. Ressources spirituelles/religion Il peut être important de préciser si certaines interventions ne devraient pas être planiées telles qu’une transfusion sanguine chez un témoin de Jéhovah. Antécédents de santé Il faut connaître les immunisations que la personne a reçues dans son pays d’origine, par exemple le bacille de Calmette-Guérin (BCG) ; plusieurs pays utilisent ce vaccin pour prévenir la tuberculose. L’ASPC (2012) indique que la plupart des provinces ont abandonné le BCG obligatoire chez les Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 77 nouveau-nés, sauf dans quelques communautés autochtones où la tuberculose est encore endémique. Si la personne a reçu le BCG, elle aura une réaction positive à la tuberculine, et d’autres examens paracliniques seront nécessaires, dont un test de crachat et une radiographie pulmonaire. Perception de la santé Comment la personne décrit-elle la santé et la maladie ? Comment perçoit-elle le problème dont elle fait actuellement l’expérience ? Alimentation Quels sont les aliments interdits à cette personne ? Y a-t-il des aliments qu’elle ne devrait jamais consommer simultanément ? 4.1.6 Revue des systèmes Cette section présente la démarche de revue des systèmes, qui a pour but : 1) d’évaluer l’état de santé antérieur et actuel de chacun des systèmes de la personne ; 2) de revérier si des données concernant le problème de santé actuel ont été omises dans l’histoire de santé ; 3) d’évaluer les habitudes de promotion de la santé de la personne. L’ordre selon lequel l’inrmière procède à l’examen du client doit être de la tête aux pieds. Les éléments notés pour chacun des systèmes ne sont pas exhaustifs, et la liste ne couvre que les symptômes les plus communs FIGURE 4.5. Il n’est pas nécessaire de répéter ici toutes les données déjà recueillies au sujet du problème de santé actuel. Par exemple, si la raison de la consultation est un mal d’oreilles et que l’histoire de santé portant sur le problème actuel décrit déjà la plupart des symptômes propres à l’ouïe, l’inrmière n’aura alors qu’à procéder à un examen ciblé en deman- dant les détails qui n’ont pas déjà été couverts jusqu’à ce moment. La liste qui suit propose certains termes utilisés par les professionnels de la santé ; ils devront être adaptés pour que la personne qui consulte les comprenne. (Seuls les symptômes et les activités de promotion de la santé sont énumérés ici. Chacun des chapitres portant sur l’examen physique reprend ces termes et les précise tout en suggérant et en justiant des façons appropriées de questionner la personne.) Lorsqu’elle consigne l’information, l’inrmière évite d’écrire « négatif » (ou Ø) à la suite de l’en-tête portant le nom du système qui fait l’objet de l’examen. Elle note plutôt la présence ou l’absence de chacun des symptômes pour éviter qu’un autre lecteur (en l’occurrence un autre professionnel de la santé) ne sache pas à quel facteur l’inrmière fait référence. Une autre erreur commune aux inrmières nouvellement diplômées consiste à noter des signes physiques et objectifs tels que « peau chaude et sèche ». L’inrmière doit se rappeler que l’histoire de santé se limite aux énoncés de la personne subissant l’examen et, par conséquent, qu’elle est restreinte à des données subjectives, c’est-à-dire à des facteurs présents ou absents, selon les réponses de la personne. État de santé global Poids actuel (gain ou perte de poids, période de temps, à la suite d’un régime ou en raison d’autres facteurs), fatigue, faiblesse ou malaise, èvre, frissons, transpiration, sueurs nocturnes. Peau, cheveux et ongles Histoire des problèmes de peau (eczéma, psoriasis, urticaire), changements dans la pigmentation ou la couleur, variation de l’aspect d’un grain de beauté (nævus), sécheresse ou humidité excessive, prurit, hématome, irritation ou lésion. Perte récente de cheveux, changement dans la texture des cheveux. Changements dans la forme ou la couleur des ongles. Les ongles sont-ils devenus plus cassants ? Promotion de la santé Fréquence et durée de l’exposition au soleil, utilisation d’un écran solaire, méthode de soins personnels pour les ongles et les cheveux. Tête La personne se plaint-elle de céphalées fréquentes ou intenses ? Histoire de blessures à la tête, d’étourdissements (syncopes) ou de vertiges. Cou FIGURE 4.5 L’inrmière procède à l’examen clinique du client. 78 Partie 1 Évaluation globale de la personne Douleur, mouvements limités, présence de masses ou d’œdème, augmentation ou sensibilité des ganglions, goitre. Yeux Fonction respiratoire La personne se plaint-elle de troubles de la vision (vision moins précise ou embrouillée, taches aveugles), de douleur aux yeux, de diplopie (vision double), de rougeur ou d’œdème, de sécheresse ? A-t-elle les yeux larmoyants ou purulents, présentet-elle un glaucome ou une cataracte ? Antécédents de problèmes pulmonaires (asthme, emphysème, bronchite, pneumonie, tuberculose), douleur thoracique à l’inspiration, sifement ou respiration bruyante, dyspnée, degré d’activité qui provoque la dyspnée, toux, expectorations (couleur et quantité), hémoptysie, exposition aux toxines ou à la pollution. Promotion de la santé La personne porte-t-elle des lunettes ou des verres de contact ? À quand remonte le dernier examen de la vision ou le test pour le glaucome ? De quelle fa çon cette personne compose-t-elle avec la perte de sa vision, le cas échéant ? Oreilles Maux d’oreilles, infections, écoulement et ses caractéristiques, acouphènes, vertiges. Promotion de la santé Perte de l’ouïe, utilisation d’un appareil auditif : comment la perte de l’ouïe touche-t-elle la personne dans sa vie quotidienne ? Est-elle exposée à un environnement bruyant ? Quelle méthode emploie-t-elle pour se nettoyer les oreilles ? Nez et sinus Écoulement et ses caractéristiques, rhumes fréquents ou importants, douleur sinusale, obstruction nasale, épistaxis (saignements de nez), allergies, rhume des foins, changements dans l’odorat. Bouche et gorge Douleur buccale, maux de gorge fréquents, saignement des gencives, maux de dents, lésions dans la bouche ou sur la langue, dysphagie, voix rauque ou changement dans la voix, amygdalectomie, altération du goût. Promotion de la santé Soins dentaires quotidiens, utilisation de prothèses dentaires (dentiers ou ponts), dernier examen dentaire. Seins Douleur, présence de masses, écoulement des mamelons, rougeur, antécédents de maladies des seins, chirurgie du sein. Aisselles Sensibilité, présence de masses ou d’œdème, irritation. Promotion de la santé La cliente procède-t-elle à l’autoexamen de ses seins, à quelle fréquence et par quelle méthode ? A-t-elle besoin d’enseignement pour le faire adéquatement ? Date de la dernière mammographie. 4 Promotion de la santé Date de la dernière radiographie pulmonaire, besoin d’enseignement sur le tabagisme. Cœur et vaisseaux du cou (fonction cardiovasculaire) Douleur précordiale ou rétrosternale, dyspnée à l’effort (spécier le type d’effort, par exemple monter un escalier, faire quelques pas ou simplement parler), orthopnée, dyspnée nocturne paroxystique, nycturie, œdème, antécédents de soufe cardiaque, HTA, troubles coronariens, anémie. Promotion de la santé Date du dernier ECG ou d’autres épreuves cardiaques dont le cholestérol. La personne a-t-elle besoin d’enseignement sur l’alimentation, l’exercice, la façon de se détendre ? Système vasculaire périphérique Froideur, engourdissements et picotements, œdème des jambes (période de la journée, activité), décoloration des mains ou des pieds (rouge bleuâtre, pâles, marbrés) liée à la position (spécialement autour des pieds et des chevilles), varices ou complications, claudication intermittente, thrombophlébite, ulcères. Promotion de la santé Le travail de la personne exige-t-il qu’elle demeure assise ou debout durant de longues périodes ? Port de bas élastiques de soutien. Évite-t-elle de croiser les jambes à la hauteur des genoux ? Exercices pour faciliter la circulation, port de bonnes chaussures de marche. Abdomen (fonction gastro-intestinale) Appétit, intolérances alimentaires, dysphagie, brûlements d’estomac, indigestion, douleur (associée à l’ingestion d’aliments), autres douleurs abdominales, pyrosis (sensation de brûlure à l’œsophage et à l’estomac avec éructation aigre), nausées, vomissements (description), présence de sang dans les vomissements, antécédents de troubles abdominaux (ulcères, troubles du foie ou de la vésicule biliaire, ictère, appendicite, colite), atulence, fréquence des selles et changements récents, caractéristiques des selles, constipation ou diarrhée, selles noirâtres, saignement rectal, autres conditions liées au rectum (hémorroïdes, stule). Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 79 Promotion de la santé Utilisation d’antiacides ou de laxatifs (explorer aussi les habitudes alimentaires, les incidences de régimes et l’utilisation d’autres produits). Système musculosquelettique Antécédents d’arthrite ou de goutte. Articulations : la personne se plaint-elle de douleurs, de raideurs, d’œdème (location, migration, difformité, mouvements limités, craquements pendant les mouvements) ? Muscles : la personne se plaint-elle de douleurs, de crampes, de faiblesse, de problèmes de posture ou de coordination ? Dos : la personne se plaint-elle de douleurs (endroit et irradiation possible aux extrémités), de raideurs, de mouvements limités, d’antécédents de maux de dos ou d’un problème de vertèbres ? Promotion de la santé Quelle distance ou pendant combien de temps la personne marche-t-elle quotidiennement ? Quel est l’effet d’une mobilité réduite sur les AVQ telles que procéder à ses soins d’hygiène, se nourrir, aller à la toilette, s’habiller ? La personne utilise-t-elle des appareils pour l’aider à se déplacer ? Système neurologique Antécédents de troubles convulsifs, accidents vasculaires cérébraux ou cardiaques, pertes de conscience ou faiblesses. Fonction motrice : faiblesse, tics ou tremblements, paralysie ou problèmes de coordination. Fonction sensorielle : engourdissement et fourmillement paresthésie). Fonction cognitive : troubles de mémoire de travail (ou mémoire récente) ou à long terme, désorientation. État mental : nervosité, changements dans l’humeur, dépression, antécédents de problèmes de santé mentale ou d’hallucinations. Promotion de la santé Données au sujet des relations interpersonnelles, des façons habituelles de composer avec les situations (mécanismes d’adaptation). Le client a-t-il besoin d’accompagnement ou d’enseignement ? Système génital de l’homme Douleur pénienne ou testiculaire, plaies ou lésions, écoulement, masse, hernie. Polyurie : Sécrétion d’urine en quantité abondante, entraî­ nant un volume urinaire supé­ rieur à 2 500 mL par jour. Polydipsie : Soif excessive avec augmentation de l’ab­ sorption de liquide liée à la polyurie. Polyphagie : Sensation de faim exagérée entraînant un appétit démesuré. 80 Partie 1 Promotion de la santé Le client est-il capable de procéder à l’autoexamen de ses testicules ? Si oui, à quelle fréquence le faitil ? Sinon, a-t-il besoin d’enseignement ? Système génital de la femme Histoire menstruelle, âge au moment des premières menstruations (ménarche), date des dernières menstruations, cycle et durée, aménorrhée ou ménorragie, douleur prémenstruelle ou dysménorrhée, saignements entre les menstruations, Évaluation globale de la personne prurit vaginal, écoulement vaginal et ses caractéristiques, âge à la ménopause, signes et symptômes de la ménopause, saignements après la ménopause. Promotion de la santé Dernier examen gynécologique et dernier test de Papanicolaou. La cliente a-t-elle besoin d’enseignement ou d’accompagnement durant une grossesse ? Est-elle renseignée sur la ménopause ? Système urinaire Fréquence, urgence, nycturie (nombre de fois que la personne doit se lever pour uriner la nuit, changements récents), dysurie, polyurie, oligurie, hésitation ou effort, force ou faiblesse du débit d’urine, couleur de l’urine (embrouillée ou présence d’hématurie), incontinence, antécédents de troubles urinaires (maladies rénales, lithiase rénale, infections de l’appareil urinaire, problèmes de prostate), douleur au anc, à l’aine, à la région suprapubienne ou douleur à la région lombaire. Promotion de la santé Mesures prises pour éviter ou traiter les infections de l’appareil urinaire, pratique des exercices de Kegel après un accouchement. Santé sexuelle La personne vit-elle actuellement une relation intime incluant des relations sexuelles ? Cette personne est-elle satisfaite des divers aspects de l’expression de sa sexualité ? Y a-t-il présence de dyspareunie (douleur due aux rapports sexuels chez la femme), de changements dans l’érection ou l’éjaculation ? Y a-t-il utilisation d’une méthode contraceptive ? Cette méthode est-elle satisfaisante ? La personne sait-elle si elle a pu être en contact avec un ou une partenaire atteint d’une infection transmissible sexuellement et par le sang (ITSS) (gonorrhée, herpès, chlamydia, condylome acuminé ou verrue génitale, VIH, SIDA, syphilis) ? Fonction hématologique Tendance de la peau et des muqueuses à saigner, tendance excessive à faire des hématomes, gonement des nodules lymphatiques, exposition à des agents toxiques ou à des radiations, transfusions sanguines et réactions. Fonction endocrinienne Antécédents de diabète ou de symptômes diabétiques (polyurie, polydipsie, polyphagie), histoire de troubles de la glande thyroïde, intolérance à la chaleur et au froid, changements dans la pigmentation ou la texture de la peau, diaphorèse excessive, lien entre l’appétit et le poids, distribution anormale des cheveux, nervosité, tremblements et besoin d’une thérapie hormonale. 4.1.7 Évaluation fonctionnelle L’évaluation fonctionnelle mesure la capacité de la personne à prendre soin d’elle-même dans un contexte de santé physique ou d’absence de maladie. Cela inclut les activités de la vie quotidienne (AVQ) et les activités de la vie domestique (AVD). L’évaluation fonctionnelle peut signier d’organiser toute l’évaluation selon les modes de fonctionnement tels qu’enseignés par Gordon (2010). Les outils d’évaluation qui mettent l’accent sur les catégories fonctionnelles peuvent aboutir à un constat d’évaluation. L’évaluation fonctionnelle peut aussi inclure l’utilisation d’un instrument standardisé d’évaluation fonctionnelle qui s’ajoute à l’histoire de santé. Un tel instrument mesure objectivement la capacité actuelle de la personne et montre les changements qui surviennent avec le temps 30 . Que l’inrmière utilise ou non ces outils, il lui faut tout de même inclure, dans l’histoire de santé, des questions semblables à celles présentées dans ce qui suit ou inspirées des éléments énumérés. Ces questions fournissent des données sur le style de vie de la personne et sur le genre d’environnement dans lequel elle est habituée à vivre. Puisque certaines de ces données peuvent sembler strictement privées, il est important de prendre d’abord le temps d’établir un bon rapport avec la personne. Voilà pourquoi ces questions se trouvent plutôt vers la n de l’entrevue. Sommeil/repos Les habitudes de sommeil, les siestes durant la journée, l’utilisation de somnifères, de produits offerts en vente libre ou de produits naturels. Alimentation/élimination L’inrmière prend note de tout ce que la personne peut lui dire au sujet de la nourriture et des boissons qu’elle a consommées durant les 24 dernières heures 11 . L’infirmière peut demander au client : Est-ce là un menu typique de la plupart de vos journées ? Elle décrit les habitudes alimentaires et l’appétit du client. L’inrmière demande aussi : Qui achète et prépare la nourriture ? Votre revenu vous permet-il d’acheter la nourriture que vous voulez ? Qui mange à table avec vous ? Elle indique aussi les allergies ou les intolérances alimentaires et s’informe de l’ingestion quotidienne de caféine (café, thé, cola) du client. L’inrmière s’informe de la routine d’élimination urinaire et fécale du client en incluant l’incontinence et l’utilisation de laxatifs, les problèmes possibles de mobilité ou de transfert sur le siège de toilette. Relations interpersonnelles/ressources Le niveau d’instruction (dernière année d’études complétée et autre formation), la situation nancière (revenu sufsant pour maintenir le style de vie et satisfaire les besoins en matière de santé), le système de valeurs et de croyances (la pratique religieuse et la perception des forces personnelles). Les rôles sociaux : Comment décririez-vous votre rôle dans la famille ? Comment vous entendez-vous avec les membres de votre famille, vos amis et vos collègues de travail ? L’inrmière demande au client de lui décrire son système de soutien dans sa famille et avec ses proches : Vers qui iriez-vous si vous aviez besoin de soutien pour affronter des difcultés au travail, un problème de santé ou un problème personnel ? Elle explore aussi la qualité des contacts que la personne entretient avec son conjoint, ses parents, ses enfants, ses amis, les organisations locales ou le milieu de travail : Le temps que vous passez seul est-il agréable et propice à la détente ou est-ce, au contraire, un moment où vous vous sentez isolé ? Activités/exercice Ressources spirituelles L’inrmière établit un prol du client qui reète ses activités quotidiennes habituelles. Elle peut lui demander : Décrivez-moi comment se déroule une journée ordinaire. Elle note le degré d’habileté avec lequel la personne effectue ses AVQ : indépendance ou besoin d’aide pour manger, pour prendre un bain, pour procéder aux soins d’hygiène, pour s’habiller, aller à la toilette, pour le transfert du lit à une chaise, pour marcher, se tenir debout ou monter un escalier. La personne utilise-t-elle un fauteuil roulant, des prothèses ou des appareils pour se déplacer ? L’inrmière inscrit aussi les loisirs que la personne apprécie et son mode d’exercice (genre, quantité par jour ou par semaine, méthode de réchauffement, méthode de surveillance de la réponse corporelle à l’exercice). Dans un milieu traditionnel de soins, plusieurs personnes croient qu’il existe une relation entre la spiritualité et la santé, et elles peuvent désirer parler de questions spirituelles. L’inrmière utilise des questions portant sur la foi, l’inuence, la communauté et l’abord (FICA) pour intégrer les valeurs spirituelles de la personne dans son histoire de santé (Post, Puchalski, Larson et collab., 2000). La foi : Quel rôle joue la foi religieuse ou la spiritualité dans votre vie ? Vous considérez-vous comme une personne religieuse ou dotée d’une spiritualité ? L’inuence : Comment la foi ou la spiritualité inue-t-elle sur la façon dont vous considérez votre santé ou la manière dont vous prenez soin de vous-même ? La communauté : Faites-vous partie d’un groupe religieux, d’une communauté spirituelle ou d’une congrégation ? L’abord : Aimeriez-vous que nous abordions Estime de soi/concept de soi Chapitre 4 Activités de la vie quotidienne (AVQ) : Activités actuellement accomplies au cours d’une journée pour satisfaire les besoins fondamentaux (se déplacer, manger, s’habiller, procéder aux soins d’hygiène, éliminer). Activités de la vie domestique (AVD) : Activités associées à l’exer­ cice des rôles sociaux et à la réalisation de tâches comme faire l’épicerie, le ménage, la cuisine, etc. L’inrmière doit s’assurer que le client peut assumer ces rôles ou qu’il obtient le soutien de son entourage. 11 Le questionnaire de rappel des 24 heures est présenté dans le chapitre 11, Évaluation nutritionnelle. 30 L’évaluation fonctionnelle de la personne âgée est décrite dans le chapitre 30, portant le même nom. Regard global sur l’histoire de santé 81 4 ensemble des questions spirituelles ou des préoccupations que vous pourriez avoir à ce sujet ? Adaptation au stress/gestion du stress L’inrmière s’enquiert des stresseurs dans la vie de la personne, surtout durant la dernière année, des changements dans son style de vie ou des facteurs actuels de stress. Elle note également les méthodes employées pour soulager le stress et l’efcacité de celles-ci. Habitudes personnelles Tabac L’inrmière note les habitudes de tabagisme passées ou présentes de la personne : Fumez-vous la cigarette, la pipe ou utilisez-vous du tabac à chiquer ? À quel âge avez-vous commencé à fumer ? Combien de cigarettes fumez-vous par jour ? Elle demande ensuite : Avez-vous déjà essayé d’arrêter de fumer ? Comment cela s’est-il passé ? Le but est de proposer, s’il y a lieu, un plan de cessation du tabagisme. Alcool 6 Le questionnaire AUDIT (Alcohol Use Disorders Identication Test) pour le dépistage d’une consom ­ mation abusive d’alcool est présenté dans le chapitre 6, Évaluation de la consom­ mation de substances. 6 Les quatre questions liées au questionnaire CAGE sont abordées dans le chapitre 6, Évaluation de la consom­ mation de substances. Des outils de dépistage permettant d’évaluer la dépendance à l’alcool, aux drogues, aux médicaments et au jeu sont proposés sur le site Internet www.toxquebec.com. Le test ADS (Alcohol Dependence Scale) élaboré par le Centre for Addiction and Mental Health y est notamment accessible. 82 Partie 1 Les professionnels de la santé oublient souvent de vérier la consommation d’alcool à moins qu’un problème ne soit évident. L’alcool interagit toutefois d’une manière nuisible avec les médicaments ; il engendre plusieurs problèmes sociaux tels que les agressions, les viols, les conduites sexuelles à risque élevé et les sévices envers les enfants. L’alcool pris en grande quantité contribue d’une façon importante aux accidents mortels de la route et est l’une des deux principales causes d’accidents au Québec (Société de l’assurance automobile du Québec [SAAQ], 2014). L’inrmière se doit d’être assez alerte pour détecter l’usage problématique de l’alcool. Elle demande d’abord à la personne si celle-ci consomme de l’alcool. Si la réponse est positive, elle posera alors des questions précises sur la quantité et la fréquence de la consommation d’alcool : À quand remonte votre dernier verre ? Quelle quantité d’alcool avezvous consommée cette fois-là ? Combien y a-t-il de jours où vous avez consommé de l’alcool durant le dernier mois ? Avez-vous déjà eu un problème de consommation d’alcool 6 ? Enn, l’inrmière peut également avoir recours au questionnaire CAGE (Cutdown, Annoyed, Guilty, Eye-opener) (Ewing, 1984), bien connu dans les milieux de prévention et de traitement des toxicomanies 6 . Drogues illicites ou drogues de rue L’inrmière pose aussi des questions précises sur la consommation de drogues incluant la marijuana, la cocaïne, le crack, les amphétamines et les barbituriques. Elle note la fréquence de l’utilisation de ces drogues et la façon dont leur usage a inué sur le travail de la personne et sur sa famille. Évaluation globale de la personne Environnement/risques Le logement et le voisinage (vivre seul, connaître les voisins), la sécurité du quartier, la qualité du chauffage et des autres services (eau, électricité, téléphone), l’accès aux transports en commun et l’engagement dans les services communautaires. L’inrmière note les facteurs de santé liés à l’environnement en incluant les risques associés au milieu de travail et à la maison ; l’utilisation d’une ceinture de sécurité dans un véhicule ; l’exposition à des risques associés au lieu géographique ou à l’emploi, les voyages ou les périodes de résidence à l’étranger, incluant celles exigées par le service militaire, s’il y a lieu. Violence conjugale et familiale L’inrmière devrait amorcer cette partie par des questions ouvertes telles que : Comment cela se passe-t-il à la maison ? Vous sentez-vous en sécurité chez vous ? Les réponses à ces questions sont précieuses pour dépister la violence parce que certaines personnes peuvent très bien ne pas réaliser qu’on abuse d’elles ou peuvent hésiter à se coner à cause de la culpabilité qu’elles ressentent, de la peur, de la honte ou parce qu’elles en sont encore à l’étape du déni. Si la personne avoue se sentir menacée, il est bon de poursuivre l’histoire avec quelques questions fermées : Avez-vous déjà été maltraitée ou violentée, physiquement ou psychologiquement, par votre partenaire ou par une personne proche de vous ? Vous est-il arrivé, durant la dernière année, d’être frappée, giée, poussée, bousculée, de recevoir un coup de pied ou d’être blessée par votre conjoint ou un ex-partenaire ? Si oui : Par qui ? Combien de fois ? Votre partenaire vous impose-t-il parfois d’avoir une relation sexuelle que vous ne désirez pas ? Avez-vous peur de votre partenaire ou de votre ex-partenaire ? Santé au travail L’inrmière demande au client de décrire son emploi. A-t-il déjà travaillé dans un milieu où il était exposé à des contaminants tels que l’amiante, à des inhalations de gaz, à des produits chimiques ou a-t-il occupé un emploi où il devait constamment répéter les mêmes gestes ? Porte-t-il un équipement protecteur ? Existe-t-il, dans son milieu, des programmes de surveillance des risques pour la santé ? Le client est-il conscient des problèmes de santé et de sécurité au travail ? L’inrmière note le moment de la demande de consultation et précise si cette dernière est liée au travail ou à la maison, aux responsabilités inhérentes à l’emploi ou au fait d’être exposé ou d’avoir été exposé à des contaminants. Elle recueille aussi de l’information sur les habitudes de tabagisme qui peuvent contribuer aux risques associés au travail. Elle demande nalement au client ce qu’il aime ou n’aime pas dans son travail. 4.1.8 Perception de la santé Pour connaître la perception que le client a de sa santé, l’inrmière lui pose des questions telles que : Comment dénissez-vous la santé ? Comment percevez-vous votre situation actuelle de santé ? Quelles sont vos préoccupations à cet égard ? Comment envisagez-vous l’avenir quant à votre santé ? Quels sont vos objectifs de santé ? Qu’attendez-vous des inrmières, des médecins ou d’autres professionnels de la santé ? Particularités liées au développement Enfants L’histoire de santé d’un enfant doit être adaptée de façon à y inclure les renseignements propres à son âge et à l’étape de son développement (p. ex., la santé de la mère pendant la grossesse, le travail, l’accouchement et la période postnatale). L’histoire du développement de l’enfant et les données portant sur l’alimentation sont traitées séparément à cause de leur importance pour la situation actuelle de santé. Données sociodémographiques L’inrmière doit indiquer le nom de l’enfant, le prénom et le surnom, son adresse et son numéro de téléphone, les noms des parents, leur numéro de téléphone au travail, l’âge de l’enfant et sa date de naissance, l’endroit de sa naissance, son sexe, son origine ethnique de même que toute information pertinente sur les autres enfants ou les membres de la famille qui vivent dans la même maison. Elle inscrit également les sources de l’histoire de santé et certains éléments associés : • la personne qui fournit les renseignements et sa relation avec l’enfant ; • ses impressions quant à la abilité de l’information fournie ; • les circonstances entourant la collecte des données, par exemple l’utilisation d’un interprète. Raisons de la consultation L’inrmière prend note de ce que les parents lui disent spontanément. Comme ceux-ci consultent régulièrement lorsque les enfants sont en bonne santé, par exemple pour un examen de routine, l’inrmière entend plus souvent des raisons comme celles-ci : « C’est le temps de son examen de routine. » « C’est le temps de ses vaccins. » Les raisons de consulter pour un problème de santé chez un enfant peuvent être fournies par celui-ci, par ses parents ou par une autre personne, comme un enseignant ou un travailleur social. Les raisons énoncées peuvent parfois différer des motifs réels de la consultation. Un parent peut avoir des intentions inavouées, par exemple une mère qui amène sa lle de quatre ans parce qu’elle « a l’air pâle ». Quelques questions pertinentes font vite ressortir que la mère a récemment renoué avec une de ses anciennes amies dont la lle de quatre ans vient de recevoir un diagnostic de leucémie. Histoire du problème de santé actuel Si le parent ou l’enfant consulte pour des soins de routine, l’inrmière prend en considération l’état de santé habituel de l’enfant, tout en notant les problèmes courants et les inquiétudes majeures que son état pourrait soulever. Elle décrit tous les symptômes et les signes, comme elle le ferait pour un adulte. Voici toutefois quelques considérations additionnelles. 4 Intensité de la douleur L’inrmière demande aux parents : Comment savez-vous que votre enfant ressent de la douleur ? (Par exemple, l’enfant qui tire sur ses lobes d’oreille alerte ses parents quant à la possibilité d’une affection aux oreilles.) L’inrmière prend note des effets de la douleur sur les comportements habituels de l’enfant (p. ex., s’il a cessé de jouer). • Facteurs associés. Activité, alimentation ou position du corps. • Intuition. Un parent peut deviner un problème. En assurant une présence constante auprès de l’enfant, le parent a souvent des intuitions qui se révèlent très justes. Même si le contraire peut aussi se produire, ce facteur permet de reconnaître les préoccupations du parent. • Capacité des parents. L’inrmière évalue comment les parents ou les autres membres de la famille réagissent aux symptômes manifestés par l’enfant ou à sa maladie. Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux L’inrmière commence cette partie de l’entrevue avec une question ouverte : « Parlez-moi de votre grossesse. » Si la mère hésite à répondre, l’inrmière peut lui préciser que ces questions sont importantes parce qu’elles lui permettent de mieux évaluer la santé de l’enfant. Histoire prénatale Période de gestation et déroulement de la grossesse. Était-elle planiée ? Quelle était l’attitude de la mère quant à cette grossesse ? Quelle était l’attitude du père ? La mère était-elle sous surveillance médicale ? À quel mois de grossesse la mère a-t-elle commencé à consulter ? Quel était l’état de santé de la mère pendant la grossesse ? A-t-elle vécu des complications au cours de cette période (saignements, nausées excessives et vomissements, gain de poids inhabituel, HTA, œdème des mains et des pieds, infections – rubéole ou ITSS – chutes) ? À quel mois de grossesse la mère a-t-elle reçu une prescription pour une diète ou une ordonnance de médicaments et quand at-elle commencé à prendre des médicaments Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 83 (posologie et durée) ? L’inrmière note également si la mère consommait de l’alcool, des drogues de rue ou du tabac de même que toute radiographie subie durant la grossesse. Travail/accouchement Nombre de naissances antérieures, durée de chaque grossesse, nom du centre hospitalier, déroulement et durée du travail, utilisation d’anesthésie, type d’accouchement (tête, siège, césarienne), poids à la naissance, score APGAR, première respiration, présence de cyanose, besoin de réanimation et utilisation d’équipement ou de procédures spéciales, s’il y a lieu. Histoire postnatale Problèmes à la pouponnière, durée du séjour au centre hospitalier, jaunisse néonatale, congé pour le bébé (en même temps que celui de la mère ?). Le bébé était-il nourri au sein ou au biberon ? Gain de poids, problèmes d’alimentation, coliques, diarrhée, habitudes de pleurs et de sommeil, santé postnatale de la mère, réaction de la mère envers son nourrisson ou présence de dépression postnatale. Maladies de l’enfance Âge de l’enfant au moment de la maladie et complications possibles de la rougeole, des oreillons, de la rubéole, de la varicelle, de la coqueluche, de l’angine à streptocoque et des otites fréquentes. L’enfant a-t-il récemment été exposé à une maladie ? ou à l’entrée à l’école, selon les politiques en vigueur dans les provinces ou les territoires. Allergies Médicaments, aliments, allergènes de contact, éléments de l’environnement auxquels l’enfant est allergique et sa réaction à l’allergène. L’inrmière s’informe des réactions allergiques qui sont particulièrement communes durant l’enfance telles que les rhinites allergiques, l’hypersensibilité aux piqûres d’insectes, l’eczéma et l’urticaire. Médicaments Médicaments prescrits et ceux achetés en vente libre à la pharmacie (ou vitamines) que prend l’enfant, incluant la posologie, l’horaire quotidien, la raison pour laquelle l’enfant prend le médicament et les problèmes associés aux effets secondaires possibles de celui-ci. Croissance Taille et poids à la naissance et à 1 an, 2 ans, 5 ans et 10 ans, périodes marquées par un gain ou une perte rapide de poids et développement de la dentition (âge des premières dents et perte de la première dentition) FIGURE 4.6. Étapes de développement Âge où l’enfant a pu tenir sa tête droite, se retourner, s’asseoir seul, marcher seul, a eu sa première dent, a dit ses premiers mots en leur accordant un sens, a parlé en utilisant des phrases, a été entraîné à la propreté, a attaché ses souliers, Accidents graves ou blessures À quel âge ces incidents se sont-ils produits ? Comment l’enfant a-t-il été traité ? Complications d’accidents d’automobile, de chutes, de blessures à la tête, de fractures, de brûlures ou d’empoisonnements. Maladies chroniques ou graves Âge de l’enfant au début de la maladie, modes de traitement et complications de la méningite ou de l’encéphalite ; de troubles convulsifs ; de l’asthme, de la pneumonie et d’autres problèmes pulmonaires chroniques ; de la èvre rhumatismale ; de la scarlatine ; du diabète ; de problèmes rénaux ; d’anémie à hématies falciformes ; d’HTA ; d’allergies. Interventions chirurgicales ou hospitalisations Raison pour les soins, âge à l’admission, nom du chirurgien ou du médecin traitant, nom du centre hospitalier, durée du séjour, réactions de l’enfant à l’hospitalisation et complications possibles (si l’enfant a mal réagi, il peut avoir peur et nécessiter une préparation spéciale pour l’examen qui suivra). Il est possible de consulter le calendrier de vaccination pour les nourrissons et les enfants sur le site Web de l’ASPC à l’adresse suivante : www. phac-aspc.gc.ca. 84 Partie 1 Immunisations Âge de l’enfant au moment de l’administration des vaccins, date des vaccins, réactions à la suite des immunisations. À cause des épidémies, l’ASPC (2014b) recommande de donner deux doses du vaccin combiné ROR. La première dose ne doit pas être donnée avant l’âge de 12 mois, tandis que la deuxième peut être administrée n’importe quand à partir de 1 mois suivant la première immunisation. La deuxième dose de ce vaccin est toutefois donnée le plus souvent à l’âge de 18 mois Évaluation globale de la personne FIGURE 4.6 Les mesures de la taille et du poids de l’enfant sont comparées à celles des courbes de croissance normalisées. s’est habillé sans aide. Les parents perçoivent-ils le développement de l’enfant comme normal ? De quelle façon le développement de cet enfant se compare-t-il avec celui des autres enfants de la famille ou de l’entourage ? La tenue d’un journal alimentaire durant 7 jours peut fournir une information plus exacte qu’un simple rappel de 24 heures. Il faut aussi tenir compte des pratiques culturelles au moment de l’évaluation nutritionnelle de l’enfant 11 . Développement actuel (chez les enfants de un mois jusqu’à l’âge préscolaire) Motricité grossière (se retourne, s’assoit seul, marche seul), motricité ne (examine ses mains, porte ses mains à sa bouche, saisit les objets ou autres en faisant une pince avec le pouce et l’index, empile des blocs, se nourrit, utilise un crayon pour dessiner, utilise des ciseaux), langage (vocalises, premiers mots empreints de sens, phrases, persistance du langage de bébé, troubles de langage) et habiletés d’interactions sociales (sourit, suit les mouvements avec ses yeux, regarde de côté, tourne sa tête vers les sons, reconnaît son nom). Si l’enfant est en période d’entraînement à la propreté, indiquer la méthode utilisée, l’âge auquel l’enfant a appris à contrôler sa vessie et ses intestins, l’attitude des parents envers l’entraînement à la propreté et les mots utilisés pour le faire. Antécédents familiaux Enfant d’âge scolaire Motricité grossière (court, saute, grimpe, roule à bicyclette, a des gestes généralement coordonnés), motricité ne (attache ses lacets de souliers, utilise des ciseaux, écrit des noms et des chiffres, dessine) et langage (étendue du vocabulaire, habiletés verbales, capacité de dire l’heure et niveau de lecture). Histoire nutritionnelle La quantité d’information requise dépend de l’âge de l’enfant ; plus il est jeune, plus les données doivent être précises et spéciques. Pour le nourrisson, l’inrmière demande s’il est alimenté au sein ou au biberon. Si l’enfant est allaité, elle prend en note la fréquence des tétées et leur durée, l’ajout de suppléments (vitamines, fer, uor, préparation de lait commerciale pour nourrisson), le soutien familial pour l’allaitement ainsi que l’âge et la méthode du sevrage. Si l’enfant est nourri au biberon, elle retient la sorte de lait utilisé, la fréquence et la quantité, la présence de problèmes (régurgitations, coliques, diarrhée), les suppléments offerts et les moments où l’enfant est laissé seul avec son biberon. Elle s’informe aussi au sujet de l’introduction d’aliments solides (âge auquel l’enfant a commencé à manger, aliments, mode de préparation – maison ou commerciale –, quantité, réactions de l’enfant aux nouveaux aliments, réactions des parents aux moments passés à nourrir l’enfant). Lorsque l’enfant est d’âge préscolaire ou scolaire, l’inrmière s’informe de son appétit ; elle s’enquiert des aliments consommés durant les 24 dernières heures (repas, collations, quantités) et des vitamines que prend l’enfant, des aliments qu’il aime ou n’aime pas et de la perception des parents quant à l’alimentation de l’enfant. 11 Les particularités culturelles liées à la nutrition sont présentées dans le chapitre 11, Évaluation nutritionnelle. Tout comme pour l’adulte, l’inrmière trace un génogramme de la famille de l’enfant en incluant la fratrie, les parents et les grands-parents. Elle indique l’âge et l’état de santé ou l’âge et la cause de décès de chacun. Elle porte une attention particulière aux antécédents familiaux de problèmes cardiaques, d’HTA, de diabète, de troubles hématologiques, de cancer, d’anémie falciforme, d’arthrite, d’allergies, d’obésité, de brose kystique, d’alcoolisme, de troubles mentaux, de troubles convulsifs, de problèmes rénaux, de retard mental, de troubles d’apprentissage, de malformations congénitales et de syndrome de mort subite du nourrisson. (En interrogeant la mère, l’inrmière s’assure d’utiliser l’expression « père de l’enfant » plutôt que « votre conjoint », au cas où les parents biologiques de l’enfant seraient séparés.) 4 Revue des systèmes (enfants et adolescents) État de santé global Gains ou pertes de poids importants, retard de croissance, rhumes fréquents, otites, maladies, degré d’énergie, fatigue, hyperactivité et changements de comportement (irritabilité, augmentation des pleurs, nervosité). Peau, cheveux et ongles Marques de naissance, maladies de la peau, changement de coloration ou de pigmentation, peau marbrée, variation de l’aspect d’un grain de beauté, prurit, urticaire, lésions, acné, hématomes ou pétéchies, saignements fréquents et changements dans la texture des cheveux ou des ongles. Tête, visage et cou Céphalées, blessures à la tête, étourdissements. Glandes ou ganglions enés ou sensibles, mouvements limités du cou ou raideur. Yeux Strabisme, diplopie, douleur, rougeur, écoulements, cataractes, changements de la vision, problèmes de lecture. À l’école, l’enfant voit-il clairement au tableau ? Est-il porté à s’asseoir trop près de la télévision ? Promotion de la santé : utilisation de lunettes, date du dernier test d’acuité visuelle. Oreilles Otalgies, fréquence des infections, myringotomie (insertion de tubes dans les oreilles par chirurgie), écoulement (caractéristiques), cérumen, tintements ou craquements et perception par les parents d’un problème d’audition. Promotion de la santé : comment les oreilles de l’enfant sont-elles nettoyées ? Nez et sinus Écoulement et ses caractéristiques, fréquence des rhumes, congestion nasale, saignements et allergies. Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 85 26 Le chapitre 26, Système génito-urinaire féminin, présente des questions d’évaluation spéciques permettant de recueillir l’histoire de santé chez les enfants, les préadoles­ centes et les adolescentes. 17 Le chapitre 17, Seins et ganglions lymphatiques régionaux, présente des suggestions de questions à poser sur l’autoexamen des seins. Bouche et gorge Histoire de fente labiale ou palatine, fréquence des infections de la gorge, maux de dents, caries, plaies de la bouche et de la langue, présence des amygdales, respiration par la bouche, difcultés à la mastication, difcultés à avaler, voix rauque ou changeante. Promotion de la santé : hygiène dentaire de l’enfant et date du dernier examen dentaire. Seins et ganglions lymphatiques régionaux Moment où la préadolescente ou l’adolescente s’est aperçue que ses seins subissaient des changements. Comment l’adolescente se perçoit-elle à ce stade de son développement ? Pratique-t-elle l’autoexamen des seins 17 ? Thorax et poumons (fonction respiratoire) Croup ou asthme, respiration sifante ou bruyante, dyspnée, toux chronique. Cœur et vaisseaux du cou (fonction cardiovasculaire) Problèmes cardiaques congénitaux, histoire d’un soufe cardiaque et de cyanose (à quoi cette condition est-elle associée ?). L’enfant doit-il limiter ses activités ou peut-il suivre ses pairs ? Existe-t-il de la dyspnée d’effort, des palpitations, de l’HTA ou de la froideur aux extrémités ? Abdomen (fonction gastro-intestinale) Douleurs abdominales, nausées et vomissements, antécédents d’ulcère, fréquence des selles, couleur et caractéristiques, diarrhée, constipation ou rétention des selles, saignement rectal et prurit anal, histoire d’oxyures ou de vers intestinaux et utilisation de laxatifs. Système musculosquelettique Articulations : arthrite, douleur dans les articulations, raideur, œdème, mouvements limités, force et coordination de la démarche. Muscles : douleur, spasmes et faiblesse. Dos : douleur, posture, courbure de la colonne vertébrale, tout traitement reçu. Système neurologique Engourdissements et picotements. (Les questions de comportement et de cognition ont été traitées dans la section sur le développement, et les relations interpersonnelles seront discutées dans la section sur l’évaluation fonctionnelle et les AVQ.) Système génito-urinaire masculin Douleur au pénis ou aux testicules, descente des testicules, plaies ou lésions, écoulement, hernie ou hydrocèle, œdème du scrotum lorsque l’enfant pleure. Le préadolescent ou l’adolescent a-t-il remarqué des changements à son pénis ou à son scrotum ? Est-il familiarisé avec l’évolution normale de son appareil génital, les émissions nocturnes et l’éducation sexuelle ? Dépistage de tout signe de sévices sexuels. Système génito-urinaire féminin La jeune lle souffret-elle de démangeaisons ou d’urticaire ou a-t-elle remarqué un écoulement vaginal ? À quel âge les menstruations ont-elles commencé ? Y était-elle 86 Partie 1 Évaluation globale de la personne préparée ? Dépistage de tout signe de sévices sexuels 26 . Fonction urinaire Dysurie, polyurie/oligurie, jet restreint, couleur de l’urine (brouillée ou foncée), antécédents d’infections de l’appareil urinaire. À quel âge l’enfant a-t-il été entraîné à la propreté ou quand cela est-il prévu ? Problème de nycturie (quand cela a commencé, fréquence, association avec le stress, réaction de l’enfant à ce sujet). Santé sexuelle Quelle est l’attitude de l’enfant envers le sexe opposé ? Qui fait son éducation sexuelle ? Comment la famille compose-t-elle avec l’éducation sexuelle, la masturbation, les fréquentations ? L’adolescent est-il engagé dans une relation incluant des relations sexuelles ? A-t-il reçu de l’information sur la contraception et les ITSS ? Fonction hématologique Ecchymoses fréquentes, œdème des ganglions lymphatiques et exposition à des agents toxiques ou à des radiations. Fonction endocrinienne Antécédents de diabète ou de troubles de la glande thyroïde ; polyurie, polydipsie et polyphagie ; distribution pileuse anormale et puberté précoce ou retardée. Évaluation fonctionnelle et activités de la vie quotidienne Relations interpersonnelles L’inrmière s’informe du rang de l’enfant à l’intérieur de la famille ; Qui s’occupe prioritairement de l’enfant ? Qui prend soin de l’enfant si les deux parents travaillent à l’extérieur de la maison ? Soutien familial ou soutien du voisinage et des amis ; milieu culturel et ethnique. L’inrmière souligne le degré de cohésion de la famille. Les membres de la famille partagent-ils des activités communes ? Y a-t-il eu un changement récent ou une crise (décès, divorce, déménagement) dans la famille ? Elle note aussi des éléments d’information sur l’image que l’enfant a de lui-même et sur son degré d’indépendance. L’enfant utilise-t-il une « doudou » (couverture de « sécurité ») ou un jouet ? Démontret-il un comportement répétitif (se bercer dans son lit, se frapper la tête), de pica (absorption compulsive de substances qui ne sont pas des aliments), suce-t-il son pouce ou se ronge-t-il les ongles ? Quelle est la méthode de discipline utilisée avec l’enfant ? Le type de discipline utilisé à la maison est-il efcace ? Qui s’occupe de discipliner l’enfant ? L’enfant a-t-il parfois recours au négativisme, à des crises de colère, au retrait ou manifeste-t-il des comportements agressifs ? L’inrmière s’enquiert au sujet des amis de l’enfant : se fait-il facilement des amis ? Comment s’accorde-t-il avec ses amis ? Ses compagnons de jeu sont-ils du même âge, plus vieux ou plus jeunes que lui ? Activité/repos Il est pertinent de noter les activités de jeu de l’enfant. L’inrmière indique la proportion de jeux actifs et de jeux plus calmes, de jeux à l’extérieur, du temps passé à regarder la télévision ; elle note les loisirs ou les activités. Elle tient compte aussi du sommeil et du repos en indiquant les habitudes de sommeil et le nombre d’heures de sommeil durant la nuit et durant le jour. L’enfant fait-il des siestes durant la journée ? Quelle est la routine de l’enfant au moment d’aller au lit ? L’enfant dort-il profondément ou, au contraire, s’éveille-t-il facilement ? A-t-il des cauchemars, des moments de panique durant la nuit ou est-il somnambule ? Quelle est la réaction des parents ? Présence à l’école Demander quelle est la fréquentation scolaire. Aborder toute expérience avec la garderie en milieu scolaire ou l’école maternelle. En quelle année l’enfant est-il à l’école ? A-t-il déjà sauté une année ou échoué ? L’enfant semble-t-il aimer l’école ? Quel est son rendement scolaire ? Les parents et l’enfant sont-ils satisfaits du rendement ? L’enfant manquet-il des jours d’école ? Demander une raison de l’absence. (Les réponses à ces questions donnent un indice important du fonctionnement de l’enfant à l’extérieur de la maison.) Situation matérielle L’inrmière recueille de l’information sur les emplois du père et de la mère. Elle indique le nombre d’heures durant lesquelles chaque parent est absent de la maison. Quelle est la perception des parents quant à leur revenu d’emploi ? Comment la maladie peut-elle inuer sur la situation nancière de la famille ? Risques associés à l’environnement L’inrmière se renseigne sur la sécurité à la maison : les précautions prises pour ranger les poisons, les médicaments et les produits ménagers hors d’atteinte ; la présence de barrières pour les escaliers et des équipements sécuritaires dans la cour. Elle pose aussi des questions sur les installations du domicile et le milieu de vie (chauffage adéquat, ventilation, salle de bains) ainsi que sur le type de quartier (résidentiel ou industriel, sécurité, voisinage, compagnons de jeu disponibles, distance de l’école, circulation automobile). Le domicile est-il situé dans un quartier retiré ou congestionné et TABLEAU 4.2 surpeuplé ? La criminalité est-elle un problème dans le quartier ? Y a-t-il présence de pollution de l’air ou l’eau dans l’environnement ? Quelles sont les mesures de sécurité adoptées pour les déplacements en automobile (siège auto, ceintures de sécurité) ? Adaptation au stress/gestion du stress L’enfant est-il capable de s’adapter aux nouvelles situations ? Expériences stressantes récentes (décès, divorce, déménagement, perte d’un ami important). Comment l’enfant fait-il face au stress ? Les parents ont-ils noté des changements récents dans le comportement ou l’humeur de l’enfant ? A-t-il déjà été nécessaire de recourir à un service professionnel de counseling ? 4 Habitudes de consommation L’enfant a-t-il déjà essayé de fumer la cigarette ? Quelle quantité a-t-il fumée ? A-t-il déjà goûté à l’alcool ? Quelle est la quantité d’alcool consommée durant la journée ou la semaine ? A-t-il déjà consommé d’autres drogues (marijuana, cocaïne, amphétamines, barbituriques) ? Promotion de la santé : qui est le principal fournisseur des soins de santé, incluant les soins dentaires ? À quand remonte le dernier examen de santé et dentaire de l’enfant ? Il est important de noter la date et le résultat du dernier examen de la vision et de l’audition, du dernier test d’urine, de phénylcétonurie, d’hématocrite, du test à la tuberculine, d’anémie falciforme, de plombémie et d’autres tests spéciques des populations à risque élevé. Adolescents Cette section présente un examen psychosocial des symptômes créé en vue de maximiser la communication avec les jeunes. Il s’agit de la méthode d’entrevue HEEADSSS TABLEAU 4.2. Elle met l’accent sur l’évaluation du domicile, de l’instruction et de l’emploi, de l’alimentation, des activités avec les pairs, de l’usage de drogues, de la sexualité, du suicide et de la dépression ainsi que de la sécurité quant aux blessures et à la violence. Le but de cet outil est de diminuer le stress de l’adolescent en posant d’abord des questions usuelles et moins menaçantes pour ensuite aborder des sujets d’ordre plus personnel. Il est recommandé d’avoir un entretien privé avec l’adolescent pendant que le parent attend dans Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents CATÉGORIE QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU SI LA SITUATION LE REQUIERT Domicile (Home) • • • • • • • • • Où vis-tu ? Quelles sont les personnes qui vivent avec toi ? Comment sont les relations à la maison ? À qui peux-tu te coner à la maison ? Y a-t-il une ou des nouvelles personnes à la maison ? Y a-t-il eu un ou des départs récemment ? As-tu déménagé récemment ? As-tu déjà vécu loin de la maison ? (Si oui, pour quels motifs ?) As-tu déjà fugué de la maison ? Si oui, pour quelle(s) raison(s) ? Y a-t-il de la violence physique à la maison ? Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 87 Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents (suite) TABLEAU 4.2 CATÉGORIE QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU SI LA SITUATION LE REQUIERT Éducation et emploi (Education and employment) • Parle-moi de l’école. • Vois-tu ton école comme un endroit sécuritaire ? (Pourquoi ?) • As-tu déjà été victime d’intimidation ? • Quels sont tes liens avec l’école ? • As-tu l’impression que tu appartiens à ce milieu ? • À l’école, y a-t-il des adultes avec qui tu pourrais discuter de ce qui est important pour toi ? • Qui sont ces personnes ? • Quels sont tes résultats à l’école ? • Ces résultats ont-ils changé récemment ? • Quelle sorte d’études voudrais-tu faire dans l’avenir ? • Quels sont tes plans et tes objectifs d’emploi ? • As-tu un emploi en ce moment ? Où ? • Combien d’heures travailles-tu par semaine ? • As-tu changé d’école durant les dernières années ? • Parle-moi de tes amis à l’école. • Dans le passé, as-tu déjà remarqué un changement important dans tes résultats scolaires ? • As-tu déjà eu à reprendre un cours ou une année ? • As-tu déjà été suspendu de l’école ou renvoyé ? • As-tu déjà pensé à abandonner tes études ? • Quelle sorte de relation as-tu avec les autres personnes à l’école ? Comment sont tes relations au travail ? • Tes responsabilités ont-elles augmenté au travail ? • Quelles sont tes matières favorites à l’école ? • Laquelle aimes-tu le moins ? Alimentation (Eating) • • • • • • Dis-moi ce que tu aimes et ce que tu n’aimes pas à propos de ton corps. • Qu’as-tu fait d’autre pour essayer de gérer ton poids ? • Combien de temps consacres-tu à l’exercice en moyenne dans une journée ? Et dans une semaine ? • En quoi consisterait une alimentation saine d’après toi ? • Comment cette alimentation se compare-t-elle avec la tienne actuellement ? • Que se passerait-il si tu prenais environ 4,5 kg ? • As-tu l’impression de ne pas pouvoir contrôler ton alimentation ? • As-tu déjà pris des médicaments pour maigrir ? Activités (Activities) • Que faites-vous, tes amis et toi, pour avoir du plaisir ? (Avec qui, où et quand ?) • Que faites-vous, ta famille et toi, pour avoir du plaisir ? (Avec qui, où et quand ?) • Certains adolescents disent qu’ils passent beaucoup de leur temps en ligne. À quelles ns utilises-tu Internet ? • Combien d’heures par jour passes-tu devant un écran (ordinateur, télévision, téléphone cellulaire) ? • Souhaiterais-tu parfois y passer moins de temps ? • Participes-tu à des sports d’équipe ou à d’autres activités ? • Fais-tu partie d’un groupe de jeunes dans ta communauté, dans un club ou dans d’autres activités organisées ? • Combien d’heures passes-tu devant la télévision durant une semaine ? • T’est-il déjà arrivé de transmettre des photos ou des messages texte que tu as ensuite regretté d’avoir envoyés ? • Combien d’heures par semaine passes-tu à regarder de la pornographie (ou des images et vidéos à caractère sexuel) sur Internet ? • T’arrive-t-il de lire uniquement par plaisir ? Quelle sorte de lecture préfères-tu ? • Joues-tu à des jeux vidéo ? Quel type de jeu aimes-tu ? • Quelle sorte de musique préfères-tu ? Drogues (Drugs) • Dans ta famille, est-ce que quelqu’un fume, prend de l’alcool ou consomme des drogues ? • Quel usage fais-tu du tabac, de la cigarette électronique, de l’alcool ou des drogues ? • Prends-tu des boissons énergisantes, des stéroïdes ou des médicaments (avec ou sans ordonnance) ? • Y a-t-il déjà eu des problèmes d’alcool ou de drogues dans ta famille ? • T’arrive-t-il de boire de l’alcool ou de consommer de la drogue quand tu es seul ? (L’inrmière évalue la fréquence, l’intensité et les habitudes d’utilisation ou d’abus et comment l’adolescent obtient la drogue, l’alcool ou le tabac et en paye les coûts.) 88 Partie 1 Es-tu inquiet au sujet de ton poids ? As-tu remarqué un changement récent dans ton poids ? As-tu suivi un régime durant la dernière année ? Quelle sorte de régime était-ce ? Combien de fois ou pendant combien de temps l’as-tu suivi ? Évaluation globale de la personne TABLEAU 4.2 Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents (suite) CATÉGORIE QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU SI LA SITUATION LE REQUIERT Sexualité (Sexuality) • As-tu déjà vécu une relation amoureuse ? Parle-moi des personnes avec qui tu es sorti. • Certaines des relations que tu as vécues ont-elles inclus des relations sexuelles ? • Es-tu attiré par quelqu’un en ce moment ? • Parle-moi de ta vie sexuelle. • Qui t’intéresse le plus, les garçons, les lles ou les personnes des deux sexes ? • Tes relations sexuelles sont-elles agréables ? • Que signie pour toi le terme « relations sexuelles protégées » ? • T’es-tu déjà senti obligé ou contraint d’accomplir des actes sexuels que tu ne voulais pas faire ? • Est-ce qu’on t’a déjà touché sexuellement d’une manière dont tu ne voulais pas ? • As-tu déjà été violé à l’occasion d’un rendez-vous ou en d’autres circonstances ? • Combien de partenaires sexuels as-tu eus ? • (Fille) As-tu déjà été enceinte ou inquiète de l’être ? • (Garçon) Une lle a-t-elle déjà été enceinte de toi ou as-tu déjà été inquiet que cela ait pu se produire ? • Qu’utilisez-vous comme méthode contraceptive ? • Cette méthode est-elle satisfaisante ? • Utilises-tu un condom chaque fois que tu as une relation sexuelle ? • T’arrive-t-il parfois de ne pas pouvoir utiliser un condom ? • As-tu déjà été atteint d’une ITSS ou as-tu déjà été inquiet d’être atteint d’une ITSS ? Suicide et dépression (Suicide and depression) • T’arrive-t-il d’être triste ou plus abattu que d’habitude ? • T’arrive-t-il de pleurer plus que d’habitude ? • T’arrive-t-il de trouver que tout est monotone ou ennuyeux tout le temps ? • As-tu de la difculté à t’endormir quand tu te couches ? • As-tu déjà pensé à te faire du mal ou à en faire à quelqu’un d’autre ? • Est-il déjà arrivé que quelqu’un se moque de toi sur Internet ? • Est-il déjà arrivé que tu te sentes triste en utilisant des réseaux sociaux tels que Facebook ? • As-tu l’impression d’avoir perdu tout intérêt pour ce que tu aimais auparavant ? • As-tu l’impression de passer de moins en moins de temps avec tes amis ? • Préfères-tu être seul la plupart du temps ? • As-tu déjà fait une tentative de suicide ? • T’est-il déjà arrivé de te blesser volontairement (en te coupant, par exemple) pour te calmer ou te sentir mieux ? • As-tu commencé à consommer de l’alcool ou des drogues pour t’aider à te détendre, à te calmer ou à te sentir mieux ? Sécurité (Safety) • As-tu déjà été blessé sérieusement ? (Comment ?) • Des personnes que tu connais ont-elles déjà été blessées sérieusement ? • Attaches-tu toujours ta ceinture de sécurité en auto ? • As-tu déjà rencontré (ou planié une rencontre) avec une personne que tu as connue sur Internet pour la première fois ? • À quand remonte la dernière fois où tu as envoyé un message texte en conduisant ? • As-tu déjà voyagé en auto avec un conducteur ivre ou drogué ? Quand ? Combien de fois ? • Y a-t-il de la violence à la maison ? Cette violence devient-elle physique parfois ? • Y a-t-il de la violence à l’école ? Y en a-t-il dans le voisinage ou dans ton groupe d’amis ? • As-tu déjà été victime de violence physique ou de sévices sexuels ? As-tu déjà été violé, à l’occasion d’un rendez-vous ou en d’autres circonstances ? (Si cette question n’a pas déjà été posée.) • Utilises-tu un équipement de protection pour pratiquer des sports ou d’autres activités physiques, par exemple un casque pour le vélo ou la planche à roulettes ? • As-tu déjà été impliqué dans un accident d’automobile ou de motocyclette ? (Qu’est-il arrivé ?) • As-tu déjà été harcelé ou battu ? • Est-ce encore un problème ? • T’es-tu déjà battu à l’école ou dans ton voisinage ? • T’arrive-t-il encore de te battre ? • As-tu déjà eu l’impression qu’il te fallait posséder un couteau, un fusil ou une autre arme pour te protéger ? Est-ce encore le cas ? • As-tu déjà été incarcéré ? 4 Source : Adapté de Klein, Goldering et Adelman (2014). Adapté et reproduit avec la permission de Contemporary Pediatrics, janvier 2014, p. 16-28. Contemporary Pediatrics est une publication de Advanstar Communications Inc. protégée par un droit d’auteur. Tous droits réservés. Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 89 une autre pièce et qu’il remplit le questionnaire sur l’histoire de santé. Une mise à jour de la dernière version de l’outil HEEADSSS, effectuée en 2014, comporte certaines modications ; des questions portant sur l’utilisation des nouveaux médias ont été ajoutées surtout dans le contexte de l’utilisation massive d’Internet, des médias sociaux et du téléphone cellulaire par les adolescents. De plus, cette mise à jour met l’accent sur une approche centrée sur les forces de l’adolescent an de favoriser le rapport inrmière-adolescent (Goldenring et Rosen, 2004). L’inrmière met l’accent sur les forces de l’adolescent, car elles sont directement liées à sa capacité d’adaptation et à une image positive de soi (Ginsburg, 2007). Adultes vieillissants Cette histoire de santé suit le même modèle que celui décrit pour l’adulte plus jeune et comprend quelques questions additionnelles. Celles-ci portent sur la manière dont le vieillissement normal, les atteintes chroniques à la santé ou un handicap inuent sur les AVQ de la personne. Il n’y a pas vraiment d’âge précis pour poser ces questions. L’inrmière les pose lorsqu’elles lui semblent appropriées. Tonométrie : Mesure de la pression oculaire permettant de détecter un glaucome. Il est important de savoir reconnaître toutes les mesures positives que prend la personne pour maintenir ou promouvoir sa santé et vivre plus longtemps. Les personnes âgées ont connu une façon plus traditionnelle d’envisager la santé, davantage axée sur la recherche de la pathologie et sur les problèmes de santé évidents. La personne pourrait être agréablement surprise et encouragée de se faire conrmer que ses actions pour maintenir sa santé sont pertinentes et reconnues. Dans cette section, seules les questions additionnelles propres aux personnes âgées ou celles liées à des préoccupations les concernant sont indiquées. L’histoire de santé applicable à l’adulte plus jeune reste toutefois valable dans sa globalité. Raisons de la consultation Il sera peut-être nécessaire de prendre un peu plus de temps pour comprendre les motifs qui ont amené la personne âgée à consulter. Un adulte vieillissant peut croire qu’un symptôme fait tout simplement partie du processus d’avancée en âge et ne pas être certaine qu’il vaille la peine d’être mentionné. Il faut aussi souligner que certaines personnes âgées ont une philosophie plutôt « conservatrice » vis-à-vis de leur état de santé : « N’essaie pas de réparer ce qui n’est pas brisé. » Ces personnes ne rechercheront des soins que pour les problèmes les plus évidents. Une personne âgée peut éprouver plusieurs problèmes chroniques tels que le diabète, l’HTA ou la constipation. Être capable de découvrir ce qui la motive à consulter peut représenter un défi. 90 Partie 1 Évaluation globale de la personne L’inrmière devra indiquer la raison pour laquelle la personne consulte et non une hypothèse relative au problème réel. Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux Santé générale État de santé durant les cinq dernières années. • Accidents et blessures, maladies graves ou chroniques, hospitalisations, chirurgies. Les questions peuvent donner lieu à des réponses plutôt longues, et il est fort possible que la personne ne réponde pas selon un ordre chronologique. De préférence, l’inrmière laisse la personne s’exprimer librement ; elle remet les événements en ordre plus tard lorsqu’elle inscrit les notes au dossier. La quantité de données fournies par la personne peut indiquer l’importance du stress ou des stresseurs avec lesquels elle a dû composer durant sa vie. Cette partie de l’histoire de santé peut être préparée à la maison ou avant l’entretien si la personne est en mesure de lire et d’écrire adéquatement. L’inrmière pourra ensuite consacrer la rencontre à revoir les données pertinentes et à explorer l’état de santé actuel de la personne. • Dernier examen. À quand remonte la dernière mammographie, coloscopie ou tonométrie? L’Association canadienne du cancer colorectal (ACCC) recommande que tous les Canadiens (hommes et femmes) âgés de 50 ans ou plus se soumettent au moins tous les 2 ans à une recherche de sang occulte dans les selles ou à un test immunochimique de recherche de sang occulte dans les selles (ACCC, s.d.). En cas de résultat positif, il faut toujours faire une coloscopie an de déterminer la cause du saignement. Les personnes qui présentent plus de risques d’avoir un cancer colorectal devraient en parler à leur médecin an de commencer plus tôt le dépistage et de passer des tests plus fréquemment ; le médecin peut alors déterminer la méthode de dépistage qui convient le mieux dans leur cas. • Histoire obstétricale. Il n’est pas nécessaire de recueillir des données sur chaque grossesse et accouchement si la femme est postménopausée et ne présente aucun symptôme gynécologique. L’inrmière prend simplement note du nombre de grossesses et de la santé de chacun des nouveau-nés. • Médicaments actuels. Pour chacun des médicaments, l’inrmière inscrit le nom, le but et la posologie. La personne a-t-elle établi un système qui lui permet de se souvenir de prendre ses médicaments ? Les médicaments semblentils être efcaces ? Quels sont leurs effets secondaires ? Si les médicaments entraînent des effets secondaires, la personne évite-t-elle de les prendre à cause de ces effets ? Il est important de considérer aussi les éléments suivants. – Certaines personnes âgées prennent une grande quantité de médicaments prescrits par différents médecins. – La personne peut ignorer le nom d’un médicament ou le but de ce dernier. Lorsque cela se produit, l’inrmière lui demande d’apporter ses médicaments pour qu’elle puisse les identier. – Le coût des médicaments cause-t-il un problème ? Si elle éprouve des difcultés à payer le coût d’un médicament, la personne peut décider d’en diminuer la dose, de prendre un comprimé au lieu des deux prescrits ou de ne pas faire renouveler son ordonnance en temps voulu. – La personne âgée a-t-elle de la difculté à se rendre à la pharmacie pour obtenir des médicaments ? – La personne prend-elle des médicaments offerts en vente libre ? Certaines personnes utilisent la pharmacie du voisinage pour s’automédicamenter. – La personne a-t-elle déjà partagé ses médicaments avec des voisins ou des amis ? Certaines personnes établissent un réseau informel « de consultation » en comparant leurs symptômes et leurs médicaments. Antécédents familiaux Cette histoire est moins pertinente lorsqu’il s’agit de prédire les maladies familiales que la personne pourrait contracter, la plupart de celles-ci étant déjà survenues lorsqu’elle était plus jeune. Ces données demeurent toutefois utiles pour connaître les maladies ou les causes de décès de ses parents. Elles servent aussi à décrire le réseau social de la personne. Revue des systèmes Il est bon ici de rappeler que les éléments qui suivent s’ajoutent au questionnaire de santé utilisé pour l’adulte plus jeune, qui fournit la liste des questions de base. État de santé global Poids actuel de la personne et poids qu’elle souhaite conserver (donne un aperçu de l’image corporelle). Peau La personne a-t-elle noté un changement dans sa manière de ressentir la douleur, la chaleur ou le froid ? Yeux La personne porte-t-elle des lunettes à doubles foyers, a-t-elle de la difculté à voir de loin (problème avec les escaliers) ? Oreilles La personne est-elle plus sensible aux bruits de l’environnement ? Perçoit-elle clairement les conversations ou celles-ci sont-elles confuses ? Bouche La personne a-t-elle des prothèses dentaires ? Quand les porte-t-elle (toujours, toute la journée, seulement pour les repas, seulement en public ou jamais) ? Comment les nettoie-t-elle ? Les prothèses créent-elles des difcultés (mauvais ajustement, douleur, bruit sifant ou claquant, ssures aux coins de la bouche) ? Thorax et poumons (fonction respiratoire) Dyspnée et degré d’activité provoquant la dyspnée. La dyspnée est souvent un signe de dysfonctionnement cardiaque, mais plusieurs personnes âgées en attribuent la cause à un simple rhume ou croient « manquer de soufe » à cause de leur âge. 4 Cœur et vaisseau du cou (fonction cardiovasculaire) Si elle présente des douleurs thoraciques, la personne peut ne pas les ressentir aussi intensément qu’un adulte plus jeune. La personne âgée ressentira plutôt de la dyspnée d’effort. Système vasculaire périphérique Port de vêtements serrés, de jarretières ou de bas roulés au genou. Y a-t-il un changement de coloration aux pieds ou aux chevilles ? Système génito-urinaire Rétention urinaire, vidange incomplète de la vessie, effort à la miction, changement dans la force du jet. Les hommes peuvent ressentir le besoin de se tenir plus près des toilettes si le jet d’urine faiblit. Les femmes peuvent se plaindre d’incontinence lorsqu’elles toussent, rient ou éternuent. Santé sexuelle L’inrmière demande si la personne a noté des changements dans ses relations sexuelles. Elle tient compte que, pour les hommes, il est normal que l’érection se produise plus lentement. Chez les femmes, il peut y avoir de la sécheresse vaginale et de la douleur à la pénétration. L’infirmière explore aussi les aspects des relations sexuelles qui sont satisfaisants et demande si la personne a sufsamment d’intimité pour se permettre d’avoir des relations sexuelles. Système musculosquelettique Changement dans la posture (équilibre, faiblesse, difculté à marcher, peur de tomber), utilisation d’appareils de locomotion : canne, quadripode réglable, déambulateur. Les articulations sont-elles raides ? À quel moment de la journée cette raideur apparaît-elle ? La douleur ou la raideur survient-elle durant une période d’activité ou au repos ? Système neurologique Troubles de la mémoire de travail ou à long terme), désorientation (dans le temps et dans l’espace). Évaluation fonctionnelle et activités de la vie quotidienne L’évaluation fonctionnelle mesure la façon dont une personne gère ses AVQ. Pour les personnes âgées, la santé se mesure d’abord dans la capacité ou non d’accomplir les activités habituelles. Dans la population âgée, l’impact de la maladie sur les AVQ et sur la qualité de vie (appelé fardeau de la maladie) est plus important encore que le Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 91 diagnostic ou la pathologie elle-même. Il va sans dire que l’évaluation fonctionnelle – puisqu’elle met l’accent sur le fonctionnement de la personne – occupe une place très importante dans celle des personnes âgées. 30 Des outils d'évaluation sont présentés dans le chapitre 30, Évaluation fonctionnelle de la personne âgée. Il existe plusieurs outils d’évaluation fonctionnelle qui peuvent mesurer objectivement le fonctionnement actuel d’une personne et en détecter les changements dans le temps 30 . La plupart de ces outils mesurent la performance dans l’accomplissement de tâches précises telles que les AVQ et les AVD. L’évaluation complète de la personne âgée est particulièrement utile parce qu’elle permet d’apprécier les AVQ et les AVD de base et les préoccupations physiques, sociales, psychologiques, démographiques, nancières et légales qu'elle pourrait avoir TABLEAU 4.3. Que l’inrmière utilise ou non un outil standardisé, les questions d’évaluation fonctionnelle qui suivent ajoutent à l’histoire de santé de la personne âgée de façon importante. Estime de soi/concept de soi Les personnes âgées n’ont pas eu accès à toutes les possibilités de s’instruire qui sont offertes aujourd’hui aux jeunes, et cela est encore plus vrai dans le cas des femmes. Il se peut qu'elle se sente diminuée parce qu’elle n’a pu dépasser le niveau d’études primaires ou parce qu’elle a très peu fréquenté l’école. Occupations Les emplois antérieurs, les activités de bénévolat et communautaires. Plusieurs personnes continuent à travailler après avoir atteint l’âge de 65 ans ; elles ont évolué avec un sens très prononcé de l’éthique du travail et elles sont ères de continuer à travailler. Si la personne est retraitée, comment s’est-elle adaptée à ce changement de statut ? La retraite peut entraîner la perte d’un rôle ou d’un statut social, de relations interpersonnelles créées au travail et celle d’un revenu. Activités/exercice Comment la personne vit-elle une journée sur les plans du travail, des loisirs et du repos ? Cette routine change-t-elle certaines journées, par exemple le dimanche lorsque sa famille lui rend visite ? La personne atteinte d’une maladie chronique ou d’une décience physique peut afcher un manque de soins personnels, présenter des changements musculosquelettiques tels que l’arthrite ou encore de la confusion. Il est indiqué de dresser une liste des moments de détente, des activités de loisirs, de sport ou communautaires de la personne. La personne âgée a-t-elle accès à un centre où elle peut prendre des repas, proter d’un réseau social et être évaluée au point de vue de sa santé ? Quelle sorte d’exercices la personne fait-elle (intensité, durée, fréquence) ? Sommeil/repos Le mode habituel de sommeil : la personne se sent-elle reposée durant le jour ? At-elle sufsamment d’énergie pour accomplir ses activités quotidiennes ? Doit-elle faire des siestes ? 92 Partie 1 Évaluation globale de la personne Se réveille-t-elle durant la nuit au point que cela lui cause un problème (nycturie, dyspnée, sommeil léger, insomnie, difculté à s’endormir, réveil très tôt le matin) ? Si elle n’a pas établi de routine dans sa journée, est-elle portée à dormir tout l’aprèsmidi ? L’insomnie devient-elle plus prononcée quand elle n’a pas d’horaire journalier ? Alimentation/élimination L’inrmière encourage la personne âgée à se remémorer ce qu’elle a mangé au cours des 24 dernières heures et prend en note ce rappel. La réponse est-elle représentative de l’alimentation habituelle (elle peut varier considérablement d’une journée à l’autre) ? Elle demande à la personne de tenir un journal hebdomadaire et de l’apporter à une prochaine consultation. À quoi ressemblent les repas ? La personne prend-elle trois repas consistants ou plutôt cinq ou six petits repas par jour ? Combien de plats préparés et de nourriture molle la personne consomme-t-elle ? Qui prépare les repas ? La personne est-elle seule pour manger ? Qui fait le marché ? Qui transporte les emplettes à la maison ? La personne a-t-elle suffisamment d’argent pour payer le marché ? Un problème quelconque empêche-t-il la personne de préparer les repas (vision, motricité ou énergie) ? Les appareils électroménagers, l’eau et les services (mazout, gaz ou électricité) sont-ils adéquats pour la préparation des repas ? La personne a-t-elle des difcultés à mastiquer les aliments ou à les avaler ? Quelles sont ses préférences alimentaires (les personnes âgées mangent souvent une plus grande quantité de féculents parce que ces aliments coûtent moins cher, qu’ils sont plus faciles à préparer et qu’ils se mastiquent plus facilement) ? Relations interpersonnelles/ressources Qui d’autre vit à la maison avec la personne âgée ? Vit-elle seule ? Est-ce satisfaisant pour elle ? Vit-elle avec un membre de la famille tel qu’un conjoint, des enfants, un frère ou une sœur ? Cet arrangement est-il satisfaisant pour elle ? La personne a-t-elle un animal de compagnie ? Sa famille et ses amis habitent-ils près d’elle ? À quelle fréquence les voit-elle ? Si les visites ne sont pas fréquentes, la personne âgée perçoit-elle cela comme une perte ? Quel rôle joue la famille dans la préparation des repas, l’entretien ménager et d’autres activités ? Sur qui la personne âgée peutelle compter pour un soutien affectif et pour de l’aide lorsque survient un problème ? Avec qui peutelle combler son besoin d’affection ? Existe-t-il des conits ? Des gestes ou une absence de geste dans les relations de conance lui causent-ils du tort ou de la détresse ? La personne est-elle victime d’un manque intentionnel de soins ou d’une administration abusive ou insufsante de médicaments ? Estelle victime de violence verbale comprenant des injures, du chantage ou des paroles dégradantes ? Il est important que l’inrmière soit attentive aux risques d’abus envers la personne âgée. TABLEAU 4.3 Évaluation complète de la personne âgée Nom : (en caractères d’imprimerie) _________________________________________________ Date de la visite : _____________________________ Raisons de la consultation : _________________________________________________________________________________________________ J’aimerais aujourd’hui vous poser quelques questions sur votre état de santé en général et sur votre fonctionnement au quotidien. Je vais utiliser un questionnaire pour m’aider à obtenir ces renseignements. Les premières questions vont d’abord vérier votre mémoire. Questionnaire préliminaire : dimension cognitive. Inscrire (+) pour une bonne réponse et (–) si la réponse est incorrecte. Inscrire aussi le nombre total d’erreurs. (+, –) 1) Quelle est la date aujourd’hui ? ______ 2) Quel jour de la semaine sommes-nous ? ______ 3) Où sommes-nous en ce moment ? ______ 4) Quel est votre numéro de téléphone ou votre numéro de chambre ? ______ Si la personne n’a pas le téléphone, lui demander : Quelle est votre adresse ? 5) Quel âge avez-vous ? ______ 6) Quelle est votre date de naissance ? (Inscrire la réponse à partir du dossier si la personne ne peut répondre à la question.) ______ 7) Qui est le premier ministre du Canada actuellement ? ______ 8) Qui était premier ministre avant lui ? ______ 9) Quel était le nom de lle de votre mère ? ______ 10) Soustrayez 3 de 20 et continuez à soustraire 3 de chaque nouvelle réponse que vous obtenez. ______ Nombre total d’erreurs ______ Si la personne fait plus de quatre erreurs, passer à la question n° 11. Si elle fait plus de six erreurs, remplir le questionnaire avec une personne capable de donner l’information. 11) Croyez-vous qu’il vous serait utile de nommer une personne mandataire pour s’occuper de vos affaires légales et financières ? a) Oui b) Non Avez-vous fait un testament ? Aimeriez-vous en faire un ? a) Non b) À une personne mandatée spéciquement pour s’occuper de gérer ses nances. (Décrire : ____________________________________________) c) À un curateur. d) Oui Données démographiques 1) Race ou groupe ethnique : __________________________________ 2) Sexe Homme Femme 3) À quel niveau avez-vous terminé vos études ? a) Études de 2e ou de 3e cycle (maîtrise, doctorat) b) Études de 1er cycle (baccalauréat) c) Collège ou école technique d) Secondaire terminé e) Secondaire non terminé f) Primaire Soutien social : J’ai maintenant quelques questions à vous poser au sujet de votre famille et de vos amis. 4) Êtes-vous marié(e), veuf ou veuve, séparé(e), divorcé(e) ou avez-vous déjà été marié(e) ? a) Actuellement marié(e) b) Veuf ou veuve c) Séparé(e) d) Divorcé(e) e) Jamais marié(e) 5) Avec qui vivez-vous ? (Encercler les réponses données.) a) Conjoint b) Autre membre de la famille ou ami(e) (Préciser : ______________) c) Avec un groupe (non lié à la santé) d) Seul(e) e) Dans une maison de soins inrmiers (Depuis combien d’années ? ____________________________) 6) Avez-vous parlé au téléphone à des amis ou à des membres de votre famille durant la dernière semaine ? a) Oui b) Non 7) Êtes-vous satisfait de la fréquence à laquelle vous rencontrez votre famille et vos amis ? a) Satisfait (Aller au n° 8.) b) Non satisfait (Aller à A) A. Aimeriez-vous fréquenter un centre pour les personnes âgées, soit pour participer à des activités sociales, soit pour prendre des repas ? 1) Non 2) Fréquente déjà un centre (Décrire : ___________________) 3) Oui 8) Si vous étiez malade ou handicapé, quelqu’un pourrait-il prendre soin de vous aussi longtemps que vous en auriez besoin ? a) Oui (Aller à C ) b) Non (Aller à A) A. Est-ce que quelqu’un pourrait prendre soin de vous durant une brève période de temps ? 1) Oui (Aller à C) 2) Non (Aller à B ) B. Est-ce que quelqu’un pourrait vous aider à l’occasion ? 1) Oui (Aller à C) 2) Non (Aller à C ) C. Qui devrions-nous appeler en cas d’urgence ? (Inscrire le nom et le numéro de téléphone : ____________________________ ______________________________________________) Finances 9) Possédez-vous ou êtes-vous en train d’acheter votre propre maison ? a) Oui (Aller au n° 10 ) b) Non (Aller à A) A. Croyez-vous avoir besoin d’aide pour vous loger ? 1) Non 2) A déjà de l’aide pour un logement. 3) Oui (Décrire : __________________________________) B. Quelle sorte de maison ou de logement aviez-vous avant de venir habiter ici ? 10) Avez-vous une assurance médicale privée, un régime de santé d’une autre province ou une assurance-invalidité ? a) Assurance médicale privée (Spécier et aller au n° 11 : _________) b) Régime d’une autre province c) Assurance-invalidité (Spécier et aller à A : _________________) d) Aucune assurance e) Autre (Spécier : ____________________________________) Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 93 4 TABLEAU 4.3 Évaluation complète de la personne âgée (suite) A. Croyez-vous avoir besoin d’aide pour défrayer le coût de vos soins ? 1) Non 2) Oui 11) Lequel des énoncés suivants décrit le mieux votre situation nancière ? a) Je n’ai pas de problème à payer mes comptes. (Aller au n° 12 ) b) J’ai de la difculté à payer mes comptes en raison de mes dépenses. (Aller à A) c) J’ai des dépenses si élevées que je n’arrive pas à payer mes comptes. (Aller à A) A. Croyez-vous avoir besoin de recevoir : Oui Non 1) une aide pour acheter de la nourriture ? _____ _____ 2) une pension d’invalidité ou de l’aide sociale ? _____ _____ 3) une aide pour payer le chauffage et l’électricité ? _____ _____ 4) une aide pour payer d’autres dépenses ? (Décrire : _________________________________) Santé psychologique : Les prochaines questions portent sur la façon dont vous vous sentez dans votre vie en général. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, mais seulement des réponses qui s’appliquent à votre situation. Oui Non 12) Votre vie quotidienne est-elle remplie de choses qui vous intéressent ? _____ _____ 13) Avez-vous déjà vivement souhaité partir de la maison ? _____ _____ 14) Avez-vous parfois l’impression que personne ne vous comprend ? _____ _____ 15) Êtes-vous une personne heureuse la plupart du temps ? _____ _____ 16) Vous arrive-t-il parfois de vous sentir dans un état de faiblesse générale ? _____ _____ 17) Votre sommeil est-il troublé ou agité ? _____ _____ 18) En considérant tout ce dont nous avons parlé, comment décririez-vous votre satisfaction envers votre vie en général à ce moment-ci : je suis une personne satisfaite, plus ou moins satisfaite ou peu satisfaite ? a) Satisfaite b) Plus ou moins satisfaite c) Peu satisfaite 19) Croyez-vous avoir besoin d’aide en ce moment pour ce qui est de votre santé mentale, par exemple un conseiller, un psychologue ou un psychiatre ? a) Non b) J’ai déjà de l’aide. (Spécier : _____________________________) c) Oui Santé physique : Les prochaines questions concernent votre santé physique. 20) Durant le dernier mois (30 jours), combien de jours avez-vous été malade au point de ne pas pouvoir faire vos activités habituelles comme travailler autour de la maison ou visiter vos amis ? 21) Si vous vous comparez à d’autres personnes de votre âge, comment décririez-vous votre santé en général à ce moment-ci ? a) Excellente (Aller au n° 22 ) b) Très bonne (Aller au n° 22 ) c) Bonne (Aller à A ) d) Passable (Aller à A ) e) Mauvaise (Aller à A) A. Croyez-vous avoir besoin de bénécier de plus de services médicaux tels que ceux d’un médecin, d’une inrmière (ou inrmière visiteuse) ou d’un physiothérapeute ? (Encercler les réponses données.) 1) Médecin 2) Inrmière 3) Inrmière visiteuse 4) Physiothérapeute 5) Aucun 22) Avez-vous besoin d’assistance pour vous déplacer, par exemple un fauteuil roulant, une marchette (déambulateur), une canne ou autre ? (Encercler la forme d’assistance utilisée habituellement.) a) Fauteuil roulant b) Inrmière visiteuse c) Marchette (déambulateur) d) Autre (Spécier : _____________________________________) e) Aucune 23) Comment vos problèmes de santé vous empêchent-ils de faire les activités que vous souhaitez réaliser : pas du tout, un peu ou beaucoup ? a) Pas du tout (Aller au n° 24) b) Un peu (Aller à A) c) Beaucoup (Aller à A) A. Croyez-vous avoir besoin d’assistance pour faire vos activités de tous les jours ? Par exemple, auriez-vous besoin qu’une personne vive avec vous ou d’un employé qui accomplirait les tâches ménagères ? 1) Une personne qui vivrait au domicile 2) Une aide ménagère 3) J’ai de l’aide ménagère ou une autre forme d’assistance. (Décrire : ______________________________________) 4) Je n’ai pas besoin d’aide. 24) Avez-vous déjà eu ou avez-vous maintenant l’un ou l’autre des problèmes de santé suivants ? (Si oui, placer un « X » dans la case appropriée et décrire le problème ; certains renseignements tirés du dossier médical peuvent aussi servir pour compléter cette section.) PROBLÈME DE SANTÉ a) Arthrite ou rhumatisme b) Troubles respiratoires/ pulmonaires c) Hypertension d) Problèmes cardiaques e) Phlébite ou trouble circulatoire dans les bras ou les jambes f) Diabète ou hypoglycémie g) Ulcère gastrique h) Autres problèmes digestifs i) Cancer j) Anémie 94 Partie 1 Évaluation globale de la personne Antécédents Actuel Décrire TABLEAU 4.3 Évaluation complète de la personne âgée (suite) PROBLÈME DE SANTÉ Antécé- Actuel Décrire dents k) Effets d’un accident vasculaire cérébral l) Autres troubles neurologiques (Spécier :___________________) m) Troubles de la thyroïde ou glandulaires (Spécier :___________________) n) Troubles de la peau tels qu’ulcères de décubitus, ulcères aux jambes, brûlures o) Troubles du langage p) Troubles de l’ouïe q) Troubles de la vision ou troubles oculaires r) Maladie rénale, troubles vésicaux ou incontinence s) Troubles de l’équilibre/chutes t) Problèmes d’alimentation ou de poids (Spécier :____________________) u) Trouble dépressif ou nerveux (Spécier :____________________) v) Problèmes de comportement (Spécier :____________________) w) Problèmes liés aux activités sexuelles x) Problèmes liés à la consommation d’alcool y) Problèmes liés à la douleur z) Autres problèmes de santé (Spécier :____________________) l) m) n) o) p) q) r) Pour l’arthrite Contre la douleur Pour la pression artérielle Pour l’élimination de liquides Pour le coeur Pour les poumons Pour éclaircir le sang Pour la circulation Insuline ou médicaments pour le diabète j) Contre les convulsions k) Pour la glande thyroïde Stéroïdes Hormones Antibiotiques Pour les nerfs ou la dépression Pour dormir Autres médicaments prescrits Autres médicaments sans ordonnance 4 OUI 25) Quels sont les médicaments que vous prenez actuellement ou que vous avez pris au cours du dernier mois ? Puis-je voir les contenants de vos médicaments ? (Si la personne ne réussit pas à nommer ses médicaments, demander à quelle catégorie ils appartiennent et noter la posologie et l’horaire ou obtenir l’information à partir du dossier médical ou pharma­ ceutique et en vérier l’exactitude avec la personne.) a) b) c) d) e) f) g) h) i) TYPE DE MÉDICAMENTS : POSOLOGIE ET HORAIRE 26) Plusieurs personnes ont de la difficulté à se souvenir de l’heure à laquelle elles doivent prendre leurs médicaments, tout spécialement pour ceux qu’elles consomment sur une base régulière. À quelle fréquence oubliez-vous de prendre vos médicaments ? Diriez-vous que vous oubliez souvent, parfois, rarement ou jamais ? a) Souvent c) Rarement b) Parfois d) Jamais Activités de la vie quotidienne : Les prochaines questions concernent votre besoin d’aide pour accomplir les activités suivantes. 27) Dites-moi si vous avez besoin d’aide ou non pour faire ces activités. (Si oui, décrire les besoins de la personne.) Immunisations :_______________________________________________ _________________________________________________________ Allergies : Allergies : TYPE DE MÉDICAMENTS : POSOLOGIE ET HORAIRE NON DÉCRIRE (en incluant les besoins) a) Utiliser le téléphone. b) Aller à des endroits situés trop loin pour marcher (utiliser un moyen de transport). c) Magasiner pour acheter des vêtements et de la nourriture . d) Accomplir les tâches ménagères. e) Gérer vos nances. f) Manger. g) Vous habiller et vous déshabiller. h) Prendre soin de votre apparence. i) Vous mettre au lit ou vous relever. j) Prendre un bain ou une douche. k) Préparer vos repas. l) Avez-vous de la difculté à vous rendre à la toilette à temps ? 28) Avez-vous eu de l’aide au cours des six derniers mois pour faire des activités telles que le magasinage, les tâches ménagères, prendre un bain, vous habiller et sortir de la maison ? a) Oui (Spécier : _______________________________________) b) Non Signature de la personne qui remplit le formulaire : _____________________________________________________ __ Source : Adapté de Pearlman (1987). Development of a functional assessment questionnaire for geriatric patients : the comprehensive older person’s evaluation (COPED). J Chronic Dis, 40, 85S-94S. Reproduit avec permission. Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 95 30 L'évaluation fonctionnelle de la personne âgée est décrite dans le chapitre 30, portant le même nom. Le gouvernement du Québec a mis sur pied un plan d’action et plusieurs ressources visant à comprendre la maltraitance envers les aînés, à la recon­ naître et à agir. Le site peut être consulté au http :// maltraitanceaines.gouv.qc.ca/. Les problèmes de maltraitance chez les aînés sont une réalité à explorer. Il y a maltraitance quand un geste singulier ou répétitif ou quand une absence d’action appropriée se produit dans une relation où il devrait y avoir de la conance ; cela cause alors du tort ou de la détresse chez une personne aînée 30 . Adaptation au stress/gestion du stress Changement récent dans le style de vie de la personne : perte d’un emploi, d’un conjoint, d’amis, déménagement ; maladie chez la personne elle-même ou chez un autre membre de la famille ; baisse de son revenu. Comment compose-t-elle avec le stress ? Si la personne a perdu un être cher, comment vit-elle son deuil ? Comment se sent-elle en étant seule et devant faire face à de nouvelles responsabilités ? Environnement/risques Sécurité dans la maison : le domicile comprend-il un seul étage, un ou plusieurs escaliers ? Dans quel état sont les murs, les planchers ou les escaliers ? La personne a-t-elle sufsamment d’argent pour entretenir la maison ? Les sorties d’urgence, le chauffage et les services sont-ils adéquats ? Depuis combien de temps la personne vit-elle dans sa maison ? Transport : la personne possède-t-elle une automobile ? À quand remonte son dernier examen de conduite automobile ? Se considère-t-elle comme une conductrice prudente ? Ses revenus sont-ils sufsants pour assurer l’entretien de sa voiture ? La personne peut-elle accéder facilement aux transports en commun ? Peut-elle compter sur des amis ou sur des ressources communautaires pour la conduire ? Voisinage : le voisinage est-il sécuritaire le jour et la nuit ? Existe-t-il un danger pour la personne de se faire voler ou soutirer des biens ? L’environnement de la personne est-il bruyant et pollué ? La personne âgée a-t-elle accès à sa famille, à ses amis, à l’épicerie, à la pharmacie, à la buanderie, à l’église, au temple, à la mosquée, aux services de santé ? En ce qui concerne les immunisations, il est recommandé de recevoir le vaccin contre la pneunomie (pneumocoque) après l’âge de 65 ans. Il faut que les personnes considérées comme non protégées soient vaccinées. De plus, à compter de 50 ans, il est préférable d’administrer le vaccin contre le zona. Évaluation et jugement clinique Dossier : Christine Moisan (suite) À son retour de radiologie, vous questionnez madame Moisan à propos de sa famille et vous dessinez ensuite le génogramme. Les résultats sont présentés à la page suivante. 1. Compte tenu de ce que vous apprend le génogramme de madame Moisan, déterminez les maladies aiguës et chroniques pour lesquelles elle est à risque. Expliquez votre réponse. (suite) Le RX du bras a démontré une double fracture du radius et du cubitus. Madame Moisan devra être opérée pour réduire et consolider ses fractures. Vous effectuez la RVS avec elle en attendant l’arrivée de l’orthopédiste. 2. Formulez deux questions que vous allez lui poser pour évaluer son état de santé global. 3. Madame Moisan vous dit qu’il lui est arrivé de ressentir des vertiges à l’occasion lorsqu’elle passe de la position couchée à assise ou l’inverse dans les deux dernières semaines. Sous quelle rubrique de l’histoire de santé allez-vous noter cette information ? 4. En ce qui concerne l’évaluation du système cardiovasculaire de madame Moisan, indiquez deux questions pertinentes à lui poser compte tenu des données dont vous disposez jusqu’à présent. 5. Concernant l’aide pour les AVQ et l’évaluation fonctionnelle en vue du retour à domicile, que pouvez-vous déduire à partir des données recueillies par le génogramme ? 6. Il est toujours important de poser des questions sur les habitudes de consommation de tabac, d’alcool ou d’autres substances. Dans le cas de madame Moisan, indiquez une raison pour laquelle il est nécessaire de vérier ces éléments. 96 Partie 1 Évaluation globale de la personne 4 Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Quel acronyme peut vous aider à recueillir des données pertinentes lorsqu’une personne présente de la douleur ? Quelle est la signication de chacune des lettres ? 2. Dans le cas d’une personne chez qui vous suspectez un problème de consommation d’alcool, indiquez un outil que vous pourriez utiliser pour faciliter l’évaluation. 3. Dans le cas du test ADS, jusqu’où faut-il remonter dans le temps an de bien évaluer les habitudes de consommation d’alcool de la personne ? 6. Quel est l’avantage de cette méthode d’entrevue ? 4. Quelle est la conduite à adopter si vous rencontrez un adolescent accompagné par un parent ou par ses deux parents ? 8. Lorsque vous procédez à l’évaluation d’une personne âgée, outre le problème actuel, indiquez deux éléments sur lesquels vous allez la questionner plus en profondeur. Justiez votre réponse. 5. Sur quels éléments la méthode d’entrevue HEEADSSS, recommandée auprès des adolescents, met-elle l’accent ? 7. Est-il nécessaire d’obtenir toutes les données obstétricales chez une femme âgée ? Chapitre 4 Regard global sur l’histoire de santé 97 Dossier : Bernard Gamache Bernard Gamache, âgé de 34 ans, est admis à l’unité de psychiatrie pour trouble psychotique non spécié. Il se trouve sans travail depuis qu’il a été congédié voilà deux semaines en raison de son manque de productivité. Vous le rencontrez pour la première fois ce matin an d’effectuer la collecte de données d’admission et d’évaluer son état mental. Il est couché en boule dans son lit, les couvertures relevées par-dessus la tête. Vous cognez à la porte avant d’entrer, et il ne se retourne pas. Vous vous approchez de lui et vous le saluez avant de vous présenter. Il déplace les couvertures et vous regarde. Vous lui demandez de vous accompagner à la salle d’entrevue, mais il refuse en vous disant qu’il préfère demeurer dans la chambre. Vous y êtes seuls, alors vous commencez l’entrevue. 5.1 Dénition de l’état mental À l’instar de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), plusieurs auteurs de la discipline inrmière associent le concept de « santé » à celui du « bien-être » humain. Selon Patricia Benner (Benner, 1985 ; Benner et Wrubel, 1989), la notion de « bien-être » s’inscrit dans le contexte culturel, historique et temporel de l’être humain. Ainsi, cette notion est comprise comme étant l’expérience holistique de la santé, impliquant des façons distinctes d’être dans le monde et prenant un sens dans le vécu expérientiel de chaque humain. Par ailleurs, dans une perspective positiviste-cartésienne, l’OMS (World Health Organization [WHO], 2008) reconnaît au « bien-être » humain des aspects physique, mental et social. Ainsi, la santé mentale est une partie constituante de la notion de santé globale de l’OMS. Pour l’ASPC (2014), la santé mentale est considérée ainsi : « … la capacité qu’a chacun d’entre nous de ressentir, de penser et d’agir de manière à améliorer notre aptitude à jouir de la vie et à relever les dés auxquels nous sommes confrontés. Il s’agit d’un sentiment positif de bien-être émotionnel et spirituel qui respecte l’importance de la culture, de l’équité, de la justice sociale, des interactions et de la dignité personnelle. » Dans sa Politique de la santé mentale, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) (1989) mentionne que la santé mentale d’une personne est « [la] capacité d’utiliser ses émotions de façon appropriée […] (affectif), d’établir des raisonnements qui lui permettent d’adapter ses gestes aux circonstances (cognitif) et de composer de façon signicative avec son environnement (relationnel) » (p. 21). Monsieur Gamache s’assoit au bord du lit, les pieds pendants, et il relève les couvertures sur ses épaules et sa tête. Il porte une chemise d’hôpital, il est dépeigné, et ses cheveux sont gras. Vous remarquez une odeur de transpiration importante, et ses ongles sont sales. Vous commencez par lui demander comment il se sent ce matin. Il vous regarde brièvement, puis observe les alentours avant de xer le sol. Il vous dit d’une voix faible : « Comme d’habitude. » Vous lui demandez ce qui l’a amené au centre hospitalier, et il vous xe un moment avant de dire : « Police ! C’est eux, c’est eux qui m’ont amené... J’ai pas d’affaire ici… » Vous avez lu plus tôt qu’il a été accompagné par les policiers après qu’un voisin s’est plaint du bruit provenant de son appartement au beau milieu de la nuit. 5 Ainsi, l’état mental correspond généralement au fonctionnement situationnel d’une personne, relativement aux aspects émotif, cognitif, somatique et relationnel, et révélant sa qualité de vie au travail, dans ses relations humaines et avec elle-même. Le stress lié aux événements de la vie (p. ex., le décès d’un être cher, un déménagement, un problème de santé) peut occasionner un dérèglement transitoire du fonctionnement situationnel, si l’événement s’avère traumatisant. L’évaluation de l’état mental d’une personne à l’occasion d’un événement anxiogène permet de découvrir chez elle des forces qui peuvent l’aider à mobiliser ses ressources et à utiliser ses habiletés pour composer avec la situation. Le trouble mental se manifeste lorsque le comportement d’une personne soumise à un événement traumatisant est très différent de celui attendu dans une culture donnée. Un trouble mental se dénit comme un mode de fonctionnement comportemental ou psychologique associé à de la détresse (symptôme douloureux) ou à de l’incapacité (fonctionnement diminué) et qui comporte un risque important de douleur et d’incapacité accrues ou la mort ou la perte de liberté (American Psychiatric Association [APA], 2013). Les troubles mentaux comprennent les troubles organiques (trouble du cerveau de cause organique connue, par exemple délirium, troubles neurocognitifs [démence], intoxication à l’alcool et aux drogues, repli sur soimême) et le trouble psychiatrique (pour laquelle l’étiologie organique n’est pas encore établie, comme pour les problèmes d’anxiété ou de schizophrénie). L’évaluation de l’état mental documente le dysfonctionnement en établissant la façon dont celui-ci inue sur les soins personnels de la vie quotidienne. Chapitre 5 Q uestion de suivi En vous basant sur cette dénition et sur les données contenues dans la situation de monsieur Gamache, quels sont les aspects du fonction­ nement de ce client qui vous semblent perturbés ? Q uestion de suivi Indiquez à quelle catégorie de troubles mentaux s’ap­ parente le cas de monsieur Gamache. Évaluation de l’état mental 99 L’état mental ne peut être examiné directement comme l’inrmière le fait pour la peau ou encore pour les bruits du cœur. Aussi, le fonctionnement ENCADRÉ 5.1 Dénitions comportementales Attention : pouvoir de concentration, habileté à se centrer sur un objet précis sans être distrait par les multiples stimulus environnementaux. Conscience : faculté mentale qui perçoit sa propre existence, ses sentiments, ses pensées et son sens moral, en lien avec son environnement. Elle est la plus élémentaire des caractéristiques de l’état mental. Contenu de la pensée : idées particulières de la personne, ses croyances, son usage des mots – ce que pense la personne. Humeur et affect : aspects qui traduisent les sentiments dominants ; l’humeur est un état émotionnel prolongé et envahissant des sentiments qui colore toute la vie émotive, tandis que l’affect est une expression temporaire de cet état ou de ces sentiments par des manifestations externes, des comportements. L’humeur est subjective, alors que l’affect est objectif. Particularités liées au développement Nourrissons et enfants Q uestion de suivi Si monsieur Gamache avait 78 ans, quel type de mémoire devriez-vous évaluer dans le cadre de l’examen de l’état mental du client ? 100 Partie 1 Le fonctionnement émotionnel et cognitif se développe de façon progressive, à partir d’un simple réexe comportemental jusqu’à devenir une pensée complexe, logique et abstraite. Il est difcile d’isoler et de retracer le développement d’un seul aspect de l’état mental. Tous les aspects sont interdépendants. Par exemple, la conscience est rudimentaire à la naissance parce que le cortex cérébral n’est pas encore développé ; le nourrisson ne peut pas distinguer son moi de celui de sa mère. La conscience se développe graduellement avec le langage. C’est ainsi que, vers l’âge de 18 à 24 mois, le nourrisson apprend qu’il est distinct des objets de son environnement, et il a les mots pour l’exprimer. Il est aussi possible de suivre l’acquisition du langage : par les différents pleurs à quatre semaines, par les balbutiements à six semaines, dans les phrases composées de un mot à un an et dans celles de plusieurs mots à deux ans. Le concept du langage est reconnu comme instrument social de communication aux alentours de l’âge de quatre ou cinq ans, et il coïncide avec la préparation de l’enfant à jouer de façon coopérative avec d’autres enfants. L’attention s’accroît graduellement de façon importante pendant les années préscolaires, de telle sorte qu’à l’âge scolaire, les enfants sont capables de s’asseoir et de se concentrer sur leur travail Évaluation globale de la personne de l’état mental est-il déduit par l’évaluation des comportements individuels qui sont dénis dans l’ENCADRÉ 5.1. Langage : expression vocale de la pensée et du sentiment. Instrument fondamental de communication de l’humain. Sa perte a un impact social important pour la personne atteinte. Mémoire : habileté à xer des expériences et des perceptions et à s’en souvenir pour utilisation ultérieure. La mémoire de travail (à court terme) évoque des événements quotidiens ; la mémoire à long terme rappelle des années d’expérience. Orientation : faculté mentale qui perçoit objectivement le monde en relation avec soi-même. Perception : prise de connaissance des objets par les cinq sens et transformation de l’information obtenue en représentations mentales. Processus de la pensée : façon dont pense une personne, la logique de sa ligne de pensée. Raisonnement abstrait : capacité de l’esprit à considérer un sens plus profond qui va au-delà du concret et du littéral. pendant un certain temps. Certains accusent du retard dans le développement de leur concentration. Vers l’âge de sept ans, alors que l’enfant a déjà commencé à fréquenter l’école, le processus de la pensée évolue ; celle-ci devient plus logique et systématique, et l’enfant est capable de raisonner et de comprendre des notions. La pensée abstraite, cette capacité à considérer une situation hypothétique, survient habituellement entre l’âge de 12 et 15 ans, bien que certains adolescents ne parviennent pas à l’atteindre. Adultes vieillissants Le processus du vieillissement laisse les paramètres de l’état mental presque intacts. Il n’y a pas de diminution des connaissances générales et peu ou pas de perte de vocabulaire. Le temps de réponse est toutefois plus lent que celui des jeunes personnes ; le cerveau vieillissant traite l’information et y réagit moins rapidement. Aussi, le rendement aux tests d’intelligence, lié au temps de performance, peut être plus faible chez une personne vieillissante – non pas parce que son intelligence faiblit, mais parce qu’il lui faut plus de temps pour répondre aux questions. Un temps de réponse plus long nuit à l’apprentissage ; si de nouvelles connaissances sont présentées à un rythme rapide, la personne âgée n’a pas le temps de réagir à celles-ci (Birren et Schaie, 2006). La mémoire de travail, qui fait appel à un certain processus (p. ex., retenir les instructions pour la prise de médicaments, se rappeler les noms de nouvelles connaissances ou une diète de 24 heures), est quelque peu diminuée avec l’âge. La mémoire à long terme demeure intacte. Les changements liés à l’âge, sur le plan de la perception sensorielle, peuvent inuer sur l’état mental. Par exemple, la perte de la vision peut conduire à l’apathie, à l’isolement social et à la dépression. Les changements de l’audition sont courants chez l’adulte vieillissant 15 . La perte auditive associée à l’âge est liée aux sons de haute fréquence. Ainsi, les personnes âgées qui ont de la difculté à entendre les consonances associées à des sons de haute fréquence éprouvent des problèmes à entretenir une conversation normale. Cela peut occasionner de la frustration, de la méance et de l’isolement social. En outre, l’entou­ rage peut avoir l’impression que la personne est désorientée. La période de l’âge adulte avancé comporte un potentiel de pertes plus important que les étapes antérieures de la vie : la perte des êtres aimés, celle du statut de travailleur et du prestige associé, celle d’un corps énergique et résistant. De plus, l’expérience de la maladie chronique (insufsance cardiaque, cancer, diabète, ostéoporose) s’accom­ pagne souvent de la crainte de la perte de la vie. Le deuil et le désespoir liés à ces événements peuvent nuire à l’état mental. Ces pertes peuvent aussi se solder par la désorientation, l’invalidité ou la dépression. 5.2 Composantes de l’examen de l’état mental L’examen complet de l’état mental est une vérica­ tion systématique du fonctionnement émotionnel et cognitif. Cependant, les étapes décrites ont ra­ rement besoin d’être suivies intégralement. Habituellement, l’inrmière peut évaluer l’état mental au moyen de l’entrevue sur l’histoire de santé. Durant celle­ci, il lui suft de garder en tête les quatre principaux éléments de l’évaluation de l’état mental : apparence, comportement, fonctions cognitives et processus de la pensée (A-C-C-P). L’intégration de l’examen de l’état mental dans l’entrevue portant sur l’histoire de santé est suf­ sante pour la plupart des gens. L’inrmière peut recueillir sufsamment de données pour évaluer les forces et les habiletés d’adaptation de la per­ sonne quant à sa santé mentale et dépister tout problème lié à celle­ci. Il est nécessaire d’effectuer un examen complet de l’état mental lorsque l’inrmière découvre des troubles de l’affect ou du comportement et dans les situations suivantes. • Lorsqu’un bref dépistage initial indique la possibilité d’un trouble anxieux ou d’une dépression. • Lorsque des membres de la famille s’inquiètent des changements dans le comportement d’un des leurs, comme la perte de mémoire ou des inter­ actions sociales inappropriées. • Dans le cas de lésions au cerveau (traumatisme, tumeur ou accident vasculaire cérébral [AVC]). Une évaluation de l’état mental documente tout changement émotionnel ou cognitif associé à la lésion. Ne pas reconnaître ces changements entrave la planication des soins et engendre des problèmes sur le plan du réajustement social. • Dans le cas d’aphasie. L’examen de l’état men­ tal évalue le problème de langage aussi bien que tous les problèmes émotionnels qui lui sont associés, comme la dépression ou l’agitation. • Lorsqu’il y a présence de symptômes d’un trouble mental psychiatrique, spécialement dans le cas d’une crise aiguë. 15 Le chapitre 15, Oreilles, décrit les changements liés à l’audition et la presbyacousie. 5 Q uestion de suivi Monsieur Gamache devraitil subir un examen complet de l’état mental ? Justiez votre réponse. Aphasie : Difculté ou incapacité à s’exprimer (aphasie motrice) ou incapacité à comprendre le langage (aphasie de compréhension du langage ou de Wernicke). Dans tout examen de l’état mental, il faut noter les facteurs associés à l’histoire de santé qui peuvent inuer sur l’interprétation des résultats : • tous les problèmes de santé connus, comme les troubles liés à la consommation d’alcool ou une maladie rénale chronique ; • la prise actuelle de médicaments dont les effets secondaires peuvent causer de la confusion ou de la dépression ; • le niveau d’instruction et le comportement de la personne – l’inrmière note cela en tant que don­ née de base, sans espérer, au moment de l’exa­ men de l’état mental, un résultat supérieur à celle­ci ; • les réponses aux questions sur l’histoire person­ nelle indiquant le degré actuel de stress, le genre d’interactions sociales, les habitudes de som­ meil, l’usage de drogues et d’alcool. La séquence des étapes à parcourir, présentée dans la section suivante, forme une hiérarchie dans laquelle les fonctions les plus fondamen­ tales (conscience, langage) sont évaluées en pre­ mier. La première étape doit être effectuée adéquatement afin d’assurer la validité des étapes suivantes. Cela veut dire que si la conscience est perturbée, l’inrmière ne peut pas s’attendre à une attention complète de la per­ sonne et à sa coopération pour de nouveaux apprentissages. Si le langage est altéré, toute évaluation subséquente de nouveaux apprentis­ sages ou du raisonnement abstrait peut donner des conclusions erronées. Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 101 5.3 Données objectives Schéma séquentiel résumant les étapes de l’examen clinique. 5.3.1 Préambule Matériel nécessaire (Occasionnellement) Crayon, papier, matériel de lecture 5.3.2 Examen physique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES ÉVALUATION DE L’APPARENCE Un aide-mémoire complet pour réaliser l’examen de l’état mental est présenté dans le tableau 4.3 du manuel de Fortinash, K.M., et HolodayWorret, P.A. (2012), Santé mentale et psychiatrie. Montréal : Chenelière Éducation. Posture Posture droite et attitude décontractée. • S’asseoir sur le bout de la chaise, se recroqueviller dans le lit, muscles tendus, froncer les sourcils, avoir un regard de déance, être agité : dans le cas d’anxiété et d’hyperthyroïdie. • S’effondrer sur une chaise, avoir une démarche lente, se traîner les pieds : dans le cas de dépression et de certaines maladies organiques du cerveau. Mouvements du corps Hyperkinésie : Augmentation anormale de la rapidité et de l’amplitude des mouvements. Mouvements du corps volontaires, délibérés, coordonnés, uniformes et réguliers. • Apparence agitée, mouvements d’impatience ou hyperkinésie dans le cas d’anxiété. • Apathie et ralentissement psychomoteur : dans le cas de dépression et d’un trouble neurocognitif. • Gestes bizarres et posture anormale : associés à la schizophrénie. • Grimaces. Habillement Habillement approprié pour la circonstance, la saison, l’âge, le sexe et le groupe social. Les vêtements font bien à la personne et sont portés de façon adéquate. • Habillement inapproprié : peut être associé à un syndrome organique cérébral. • Vêtements excentriques et maquillage bizarre : parfois associés à la schizophrénie ou au syndrome maniaque. Soins personnels et hygiène La personne est propre et bien soignée ; les cheveux sont lavés ; les femmes n’ont pas de maquillage ou celui-ci est discret ; les hommes sont rasés ou leur barbe ou leur moustache sont bien taillées. Les ongles sont propres (toutefois, certains emplois laissent les ongles chroniquement sales). 102 Partie 1 Évaluation globale de la personne • Négligence unilatérale (inattention totale quant à un côté du corps) : peut se produire à la suite d’un AVC. OBSERVATIONS NORMALES Note à l’inrmière Une apparence échevelée chez une personne antérieurement bien soignée est significative. Il faut faire preuve de prudence avant d’interpréter la signification d’un habillement négligé, bizarre ou en mauvaise condition, des piercings et des tatouages, car ceux-ci peuvent refléter la situation économique ou une volonté de suivre une tendance mode. ANOMALIES • Habillement inapproprié, hygiène déciente et manque d’intérêt pour son apparence : se manifestent dans le cas de dépression, par exemple. • Habillement recherché et apparence soignée associés à des façons d’agir exagérées : manifestations possibles de troubles obsessifs compulsifs. 5 ÉVALUATION DU COMPORTEMENT Niveau de conscience La personne est éveillée, alerte et à l’affût des stimulus de l’environnement et de son moi intérieur, et elle répond de façon appropriée aux stimulus. • Perd le l de la conversation et s’endort. • Personne léthargique (somnolente), affaiblie (confusion) TABLEAU 5.1. Expression faciale L’expression faciale est appropriée à la situation et change adéquatement selon le sujet abordé. Le contact des yeux est adéquat, sauf s’il est interdit culturellement (p. ex., dans la culture amérindienne). • Personne hypervigilante et facilement distractible. • Visage sans expression qui ressemble à un masque : dans le cas de la maladie de Parkinson et de la dépression. Langage Juger la qualité du langage en notant si les sons laryngiens sont émis sans effort par la personne et si elle prend part à la conversation de façon appropriée. • Dysphonie: volume anormal de la voix, son aigu TABLEAU 5.2. • Monopolise l’entrevue. Personne silencieuse, secrète ou qui ne communique pas. • Tics, contractions ou spasmes involontaires du visage pouvant être le résultat d’effets secondaires de la médication neuroleptique fréquemment utilisée en santé mentale. Le rythme de la conversation est modéré, et son déroulement évolue normalement. • Langage lent et monotone : dans le cas de la maladie de Parkinson et de la dépression. • Langage précipité, tendu et fort : dans le cas du syndrome maniaque. L’articulation (capacité de faire entendre distinctement les mots et les sons d’une langue) est claire et compréhensible. • Dysarthrie : discours déformé TABLEAU 5.2. • Mauvais usage des mots ; omission des lettres, des syllabes ou des mots ; transposition des mots : accompagne l’aphasie. • Circonlocution ou mode répétitif anormal : néologisme, écholalie TABLEAU 5.4. Chapitre 5 Circonlocution : Périphrase qu’une personne utilise pour éviter de dire franchement, directement ce qu’elle pense. Écholalie : Tendance à répéter de façon spontanée, involontaire et systématique les derniers mots prononcés par un interlocuteur. Évaluation de l’état mental 103 OBSERVATIONS NORMALES Le choix des mots se fait sans effort, et ils sont appropriés au niveau d’éducation de la personne. Celle-ci complète ses phrases et, occasionnellement, prend une pause pour rééchir. ANOMALIES Recherche de mots indûment longue ou échec à trouver les mots : dans le cas de l’aphasie. Humeur et affect Juger ces aspects par le langage corporel et l’expression faciale et en demandant directement à la personne : « Comment vous sentez-vous ? » ou « Comment vous sentez-vous habituellement ? » L’humeur devrait être appropriée à la situation et à la condition de la personne et changer de façon adéquate selon les sujets discutés. La personne collabore volontiers avec l’inrmière. Variations importantes de l’humeur : associées au syndrome maniaque. Humeur étrange : présente dans le cas de schizophrénie TABLEAU 5.8. ÉVALUATION DES FONCTIONS COGNITIVES Orientation Vérier l’orientation temporelle et spatiale au cours de l’entrevue en posant des questions concernant l’adresse, le numéro de téléphone et l’histoire de santé de la personne ou en demandant directement, mais avec tact : « Certaines personnes ont de la difculté à se souvenir des dates lorsqu’elles sont hospitalisées. Savez-vous quelle est la date d’aujourd’hui ? » Évaluer les trois sphères suivantes : 1. temps : jour de la semaine, date, année, saison ; 2. lieu : endroit où vit la personne, localisation actuelle, type d’établissement, nom de la ville et nom de la province ; 3. personne : nom de famille, prénom, âge, identication de l’inrmière, type d’emploi. Plusieurs personnes hospitalisées ont de la difculté à indiquer la date du jour, mais elles répondent adéquatement aux autres questions. Désorientation : dans le cas du délirium et d’un trouble neurocognitif. L’orientation se perd habituellement dans l’ordre suivant : le temps, puis le lieu et, rarement, la personne. Période d’attention Vérier l’habileté de la personne à se concentrer en notant si elle complète sa pensée, sans errer et sans se perdre dans ses réexions. Noter aussi sa distraction ou sa difculté à suivre ce que dit ou fait l’inrmière. Ou encore, lui donner une série de consignes à suivre et noter les séquences des comportements réalisés, comme : « S’il vous plaît, prenez ce verre d’eau avec votre main gauche, buvez, changez le verre de main et placez-le sur la table. » La période d’attention est généralement diminuée chez les gens anxieux, fatigués ou intoxiqués par les médicaments. • Digression de la pensée initiale. Réponses inappropriées aux questions. Personne facilement distraite, « stimulus dépendante », c’est-à-dire que tout nouveau stimulus attire rapidement son attention. • Confusion, négativisme. Mémoire de travail Syndrome de Korsakoff : Affection neurologique caracté­ risée par une amnésie antéro­ grade avec fabulations, souvent associée à une polynévrite des membres inférieurs. Sa cause la plus fréquente est une carence en vitamine B1 secondaire à un alcoolisme chronique. Évaluer la mémoire de travail pendant l’entrevue par le rappel de la diète des 24 dernières heures ou en demandant l’heure d’arrivée au lieu d’examen. Poser des questions dont les réponses peuvent être vériées. Cela permet de reconnaître la personne qui fabule ou qui compose des réponses an de camouer sa perte de mémoire. Mémoire à long terme Demander à la personne de parler d’événements passés vériables ; par exemple, lui demander de parler de son état de santé antérieur, de son premier emploi, de sa date de naissance ainsi que des dates d’anniversaire et d’événements historiques qui la concernent. 104 Partie 1 Décit de la mémoire de travail : manifestation de troubles organiques (p. ex., le délirium, le trouble neurocognitif, le syndrome amnésique ou le syndrome de Korsakoff dans le cas d’alcoolisme chronique). Évaluation globale de la personne Perte de la mémoire à long terme : quand la région corticale d’emmagasinage est endommagée comme dans la maladie d’Alzheimer. OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Nouvel apprentissage Test des quatre mots (non reliés entre eux). Ce test vérie l’habileté de la personne à se rappeler les apprentissages nouveaux. Il est hautement adéquat et valide. Il requiert plus d’effort que le rappel d’événements personnels ou historiques. Il évite aussi le danger de faits non vériables, par exemple si l’inrmière demande à la personne de parler de ses nouveaux apprentissages. Celle-ci peut répondre ce qu’elle veut sans que l’inrmière puisse en vérier la véracité. Dire à la personne : « Je vais vous dire quatre mots. Je veux que vous vous en souveniez. Dans quelques minutes, je vais vous demander de les répéter. » Répéter les mots, an de s’assurer que la personne les a bien compris. Choisir quatre mots différents sur les plans sémantique et phonétique : 1. 2. 3. 4. Brun Honnêteté Tulipe Onguent 1. 2. 3. 4. 5 Plaisir Carotte Cheville Loyauté Après cinq minutes, demander à la personne de répéter les quatre mots. Pour vérier la durée de mémorisation, lui demander de les répéter dans les 10 et 30 minutes suivantes. La réponse normale pour les personnes âgées de moins de 60 ans est un rappel adéquat de 3 ou 4 mots, après un délai de 10 et 30 minutes (Strub et Black, 2000). Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ne se rappellent aucun mot ou se souviennent d’un seul. L’habileté affaiblie à faire de nouveaux apprentissages est associée à l’anxiété (causée par le manque d’attention et la vulnérabilité à la distraction) et à la dépression (due au manque d’effort consenti pour évoquer des souvenirs). Tests complémentaires pour des personnes atteintes d’aphasie Compréhension des mots Demander à la personne de montrer, par exemple, le lit, la lampe, le cadre, son nez, son genou, ses pieds ou ses clés. L’aphasie est une perte de l’habileté à parler ou à écrire de fa çon cohérente ou à comprendre des paroles ou un texte, causée par une atteinte au cerveau TABLEAU 5.2. Lecture Demander à la personne de lire quelques phrases à voix haute, à partir de documents imprimés. Se rappeler que la lecture est liée au niveau d’instruction et que l’inrmière ne vérie pas seulement la compréhension du texte par la personne. La lecture et l’écriture sont importantes pour planier l’enseignement de la promotion d’une bonne santé et pour la réadaptation. Écriture Demander à la personne d’inventer et d’écrire une phrase. Noter la cohérence, l’orthographe et les composantes de la phrase (celleci doit avoir un sujet et un verbe). Fonction intellectuelle supérieure Les tests mesurent les habiletés à résoudre les problèmes et à raisonner. Les résultats sont étroitement liés au niveau d’intelligence de la personne, et il faut les évaluer en considérant son prol éducatif et culturel. Les tests du fonctionnement intellectuel supérieur ont été utilisés pour distinguer les troubles organiques Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 105 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES du cerveau des troubles psychiatriques ; les erreurs obtenues dans les tests indiquent un dysfonctionnement organique. Même s’ils ont été grandement utilisés, leur validité pour diagnostiquer un trouble organique du cerveau n’est pas évidente. De plus, la plupart d’entre eux sont peu pertinents pour le soin clinique quotidien. Bien qu’ils soient reconnus, les tests standards de la fonction intellectuelle supérieure ne sont pas discutés ici, comme ceux de l’ensemble des connaissances générales, de la distance digitale répétitive, du calcul, de l’interprétation des proverbes et des similitudes pour vérier le raisonnement abstrait ou celui des situations hypothétiques, qui évalue le jugement. Jugement Une personne fait preuve de jugement lorsqu’elle compare et évalue les possibilités dans une situation donnée et qu’elle entreprend les actions appropriées. Plutôt que de vérier la réponse d’une personne à une situation hypothétique (p. ex. : « Que feriezvous si vous trouviez sur le trottoir une enveloppe affranchie et adressée ? »), s’intéresser davantage à ses objectifs quotidiens ou à ceux de sa vie à long terme, à la possibilité qu’elle agisse en fonction de ses illusions ou hallucinations et à sa propension à la violence ou à des actes suicidaires. An d’évaluer le jugement au cours de l’entrevue, noter ce que la personne dit au sujet de ses projets d’emploi et d’avenir ou de ses obligations sociales ou familiales. Les projets doivent être réalistes et compatibles avec sa situation de santé. Aussi, demander à la personne quels sont les motifs qui l’ont amenée à consulter pour ses soins personnels de santé et vérier si elle accepte ou non de se soumettre au traitement prescrit. Les décisions et les actions de la personne devraient être réalistes. Jugement affaibli (décisions irréalisables ou impulsives, pensée magique) : dans le cas de retard mental, de troubles émotionnels, de schizophrénie et de troubles organiques du cerveau. PROCESSUS DE LA PENSÉE ET PERCEPTIONS Processus de la pensée Se demander : « Les propos de cette personne ont-ils du sens ? Est-ce que je peux suivre ce qu’elle dit ? » La façon de penser de la personne devrait être logique, cohérente, pertinente et guidée par des objectifs. La personne devrait compléter sa pensée. Un processus de la pensée illogique, irréel, une digression de la pensée initiale, le fait d’avoir plusieurs idées en même temps et une évidence de blocage (la personne cesse de parler au milieu de sa phrase) sont tous des troubles du processus de la pensée TABLEAU 5.4. Contenu de la pensée Ce que la personne dit doit être sensé et logique. Obsessions, compulsions TABLEAU 5.5. Perceptions La personne devrait être constamment dans la réalité. Ses perceptions devraient concorder avec celles de l’inrmière. Pour vérier ses perceptions, lui poser les questions suivantes. • Comment les gens vous traitent-ils ? • Les autres personnes parlent-elles de vous ? • Vous sentez-vous épié, suivi, contrôlé ? • Votre imagination est-elle très active ? • Avez-vous déjà entendu prononcer votre nom alors que vous étiez seul ? 106 Partie 1 Évaluation globale de la personne Illusions, hallucinations TABLEAU 5.6. Hallucinations auditives et visuelles : associées aux troubles psychiatriques et organiques du cerveau et à la consommation de drogues psychédéliques. Hallucinations tactiles : au cours du sevrage de l’alcool. OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Dépistage de l’anxiété Les troubles anxieux et la dépression sont parmi les problèmes de santé mentale les plus couramment observés dans les milieux de soins de santé généraux. Les troubles anxieux sont communs, débilitants et souvent non traités. Toutefois, il est possible de faire un dépistage rapide des principaux symptômes en posant les deux premières questions du questionnaire GAD-7 (Kroenke, Spitzer, Williams et collab., 2007) FIGURE 5.1. Les résultats pouvant être obtenus pour les deux premières questions varient de 0 à 6 ; un résultat de 0 suggère que la personne n’est pas atteinte de trouble anxieux. Si la personne répond aux deux premières questions par l’afrmative, il est recommandé de poursuivre avec les cinq autres questions. Cet outil permet de reconnaître les personnes atteintes d’un trouble anxieux et de mesurer la gravité des symptômes présents. Les quatre troubles anxieux les plus souvent rencontrés sont : 1) le trouble d’anxiété généralisée; 2) le trouble panique ; 3) le trouble d’anxiété sociale ; 4) le trouble de stress post-traumatique TABLEAU 5.10. Q uestion de suivi Monsieur Gamache vous semble anxieux ; quel outil pourriez-vous utiliser an d’objectiver davantage votre évaluation ? • Un résultat de 10 au GAD-7 traduit la présence du trouble d’anxiété généralisé ; des résultats de 5, 10 et 15 représentent respectivement des degrés léger, modéré et grave d’anxiété. • Les symptômes communs de la dépression doivent faire l’objet d’une évaluation plus poussée : insomnie, perte d’énergie, perte du plaisir (anhédonie) et pensées suicidaires TABLEAU 5.9. FIGURE 5.1 GAD-7 – Dépistage de la dépression Mis au point par les Drs Robert L. Spitzer, Janet B.W. Williams, Kurt Kroenke et collègues, grâce à une bourse de Pzer Inc. Selon une revue systématique effectuée par le Canadian Task Force on Preventive Health Care (2013), les résultats probants sur les risques et les bénéces du dépistage de la dépression ne permettent pas de justier un dépistage de routine de celle-ci dans les milieux de soins de santé primaires. Toutefois, rester attentif aux symptômes de la dépression. Dépistage des pensées suicidaires Lorsque la personne exprime des sentiments de tristesse, de désespoir, de détresse ou de deuil, il est important d’évaluer la possibilité du risque d’automutilation. Commencer par poser des questions d’ordre général. Si les réponses sont afrmatives, continuer avec des questions plus précises. • Vous êtes-vous senti désespéré au point de vous faire du mal ? • Le suicide est un problème de santé mentale évitable. Il s’est classé au 9e rang comme principale cause de décès au Canada et au 2e rang chez les jeunes âgés de 15 à 34 ans (Statistique Canada, 2012). Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 107 5 OBSERVATIONS NORMALES • Sentez-vous que vous pourriez vous faire du mal maintenant ? • Avez-vous établi un plan pour vous faire du mal ? – Comment le feriez-vous ? • Qu’arriverait-il à votre entourage (parents, amis) si vous étiez mort ? • Comment ces personnes réagiraient-elles si elles apprenaient que vous étiez mort ? Il est très difcile de questionner les gens sur leurs idées suicidaires, spécialement pour les inrmières nouvellement diplômées. Elles craignent d’être indiscrètes et peuvent éprouver un déni personnel à l’égard de la mort et du suicide. Cependant, le risque augmente si l’inrmière évite de poser ces questions et si elle a le moindre doute que celles-ci sont appropriées. L’inrmière peut être la seule professionnelle de la santé à recueillir ces indices de risque suicidaire. Elle doit encourager la personne à parler de ses pensées suicidaires. Parfois, le suicide d’une personne vraiment décidée ne peut être empêché. Cependant, il est possible d’aider les personnes ambivalentes – la majorité des gens – à trouver une autre solution quant à leur situation. Il est essentiel que l’inrmière partage ses préoccupations, concernant l’idéation suicidaire d’une personne, avec d’autres professionnels de la santé mentale. ANOMALIES • Un plan précis devant mener à un suicide dans les 24 à 48 heures, utilisant une méthode létale, témoigne d’un très grand risque. Voici quelques indices et signes d’avertissement importants d’un suicide : – tentatives antérieures de suicide ; – dépression, désespoir ; – présence d’armes à feu dans la maison ; – antécédent familial de suicide ; – incarcération ; – violence familiale incluant sévices physiques ou sexuels ; – retrait social, fuite ; – automutilation ; – hypersomnie ou insomnie ; – activité psychomotrice lente ; – anorexie ; – messages verbaux de suicide (défaite, échec, dévalorisation, perte, abandon, désir de se suicider) ; – thèmes de la mort exprimés à travers les arts, les plaisanteries, les écrits, les comportements ; 6 – messages d’adieu (en donnant ses possessions de valeur). Les signes cliniques qui révèlent un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues sont présentés dans le tableau 6.5 du chapitre 6, Évaluation de la consommation de substances. La Faculté de médecine de l’Université Laval propose un outil permettant de faire passer le test de Folstein, le test MoCA et le test de l’horloge. Il peut être consulté au www.fmed. ulaval.ca. Une version PDF de l’examen de Folstein sur l’état mental peut être consultée au http:msssa4.msss.gouv.qc.ca. 108 Partie 1 • Extraits des nouveaux critères du DSM-5 sur les problèmes mentaux : délirium, troubles neurocognitifs et troubles amnésiques TABLEAU 5.7 ; problèmes associés à la consommation de drogues 6 ; schizophrénie TABLEAU 5.8 ; troubles de l’humeur TABLEAU 5.9 ; troubles anxieux TABLEAU 5.10. EXAMENS SUPPLÉMENTAIRES DE L’ÉTAT MENTAL Il existe plusieurs outils d’évaluation de l’état mental permettant d’estimer les fonctions mentales et cognitives tels que le MiniMental State Examination (MMSE ou Test de Folstein), le Montreal Cognitive Assessment (MoCA) ou le test de l’horloge. Le test MoCA est un outil d’évaluation de la fonction cognitive qui permet de déceler des déciences cognitives légères (Nasreddine, Phillips, Bédirian et collab., 2005) FIGURE 5.2. Le test évalue plusieurs fonctions : la concentration, l’attention, les Évaluation globale de la personne Un résultat inférieur à 26 exige une évaluation approfondie de la fonction cognitive, car il est probable que la personne soit atteinte d’une décience cognitive légère ou modérée (signe précoce de la démence). OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES fonctions exécutives, les capacités visuoconstructives, la mémoire, le langage, les capacités d’abstraction, le calcul et l’orientation. Le MoCA est un test de 1 page et ne prend que 10 minutes à faire passer. Le nombre maximum de points pouvant être obtenus est de 30 ; un résultat supérieur ou égal à 26 est considéré comme normal. 5 FIGURE 5.2 Test MoCA Droit d’auteur Z. Nasreddine MD. Reproduit avec permission. Copies disponibles au www.mocatest. org/pdf_les/test/MoCA-TestFrench_7_1.pdf Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 109 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT Nourrissons et enfants L’évaluation de l’état mental des nourrissons et des enfants comporte le développement comportemental, cognitif et psychosocial et examine comment l’enfant compose avec son environnement. Essentiellement, il faut suivre la même démarche que celle associée aux aspects de l’adulte (apparence, comportement, fonctions cognitives et processus de la pensée [A-CC-P]), avec une considération spéciale pour les étapes de développement. Les troubles relèvent souvent de problèmes d’omission ; l’enfant n’arrive pas à atteindre l’étape de développement anticipée. L’histoire de santé des parents, spécialement les sections portant sur l’histoire du développement et l’histoire personnelle, contient la plupart des données sur l’état mental de l’enfant. De plus, le test de dépistage de Denver II permet d’interagir directement avec un jeune enfant pour évaluer son état mental. En outre, il sert à déceler, chez l’enfant âgé de zéro à six ans, les retards de développement du comportement, du langage, de la cognition et du volet psychosocial. L’examen de dépistage de l’articulation de Denver est un test complémentaire portant sur le langage. Pour les enfants d’âge scolaire, de 7 à 11 ans, qui ont grandi au-delà de l’âge (ou qui sont plus matures que leur âge) où les étapes de développement sont très utiles, la « liste de contrôle des comportements » est un outil complémentaire qui peut être donné aux parents avec celui de l’histoire de santé ENCADRÉ 5.2. ENCADRÉ 5.2 Liste de contrôle des comportements pour les enfants de 7 à 11 ans 1. Préfère jouer seul. 2. Se blesse dans des accidents majeurs. 3. Joue-t-il avec le feu ? 4. A des difcultés avec les enseignants. 5. Obtient de faibles notes à l’école. 6. S’absente de l’école. 7. Se fâche facilement. 8. S’adonne à des rêveries. 9. Se sent malheureux. 10. A un comportement plus jeune que celui des autres enfants de son âge. 11. N’écoute pas ses parents. 12. Ne dit pas la vérité. 13. N’est pas sûr de lui. 14. A de la difculté à dormir. 15. Semble avoir peur de quelqu’un ou de quelque chose. 16. Est nerveux ou agité. 17. A une habitude nerveuse. 18. Ne montre pas ses émotions. 19. Se bat avec les autres enfants. 20. Est compréhensif à l’égard des sentiments des autres. 21. Refuse de partager. 22. Manifeste de la jalousie. 23. Prend des choses qui ne sont pas les siennes. 24. Accuse les autres pour les problèmes qu’il a pu causer. 25. Préfère jouer avec des enfants qui ne sont pas de son âge. 26. S’entend bien avec les adultes. 27. Taquine les autres. Le système de points correspond à : 0 – jamais ; 1 – quelquefois ; 2 – souvent. Le pointage est inversé pour les éléments 20 et 26 (jamais = 2 et souvent = 0). Un résultat se situant entre 15 et 22 exige un suivi de près ; un pointage au-dessus de 22 justie une évaluation psychiatrique. Source : Adapté de Jellinek, Evans et Knight (1979) 110 Partie 1 Évaluation globale de la personne OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Il couvre cinq aspects majeurs : 1) l’humeur ; 2) le jeu ; 3) l’école ; 4) les amis ; 5) les relations familiales. Il est facile à faire passer et dure environ cinq minutes. Pour les adolescents, suivre les mêmes directives des éléments de l’A-C-C-P décrites pour l’adulte. Adultes vieillissants Il est important d’effectuer un examen, même bref, auprès de toutes les personnes âgées admises au centre hospitalier. Il est facile de mal diagnostiquer la confusion, courante chez les personnes vieillissantes. Entre le tiers et la moitié des adultes plus âgés admis dans les services médicaux et chirurgicaux, pour des soins aigus, manifestent des degrés variés de confusion, déjà présente (Inouye, 2006). Il est estimé qu’environ 750 000 Canadiens sont atteints de la maladie d’Alzheimer et de maladies apparentées, ce qui représente 14,9 % des Canadiens âgés de 65 ans et plus (Société d’Alzheimer du Canada, 2012). 5 • Le délirium est un état de confusion aiguë ou une perturbation de la conscience et de la perception. Il peut accompagner une maladie aiguë (p. ex., une pneumonie), la consommation d’alcool ou de médicaments et il se résorbe habituellement quand la cause sous-jacente est traitée. • Au contraire, le trouble neurocognitif est un processus graduel qui provoque une détérioration progressive et irréversible du fonctionnement cognitif de la personne, bien que celle-ci soit pleinement consciente et éveillée. La maladie d’Alzheimer représente environ les deux tiers des cas de trouble neurocognitif chez les adultes vieillissants TABLEAU 5.7 . Le trouble neurocognitif ne fait pas partie du vieillissement normal. Q uestion de suivi Vérier l’état sensoriel avant d’évaluer tout autre aspect de l’état mental. La vision et l’audition changent avec l’âge, ce qui peut altérer la vigilance et donner l’impression que la personne n’est pas alerte. Lorsque les gens âgés n’entendent pas clairement les questions de l’inrmière, leurs résultats aux tests peuvent être inférieurs à ceux attendus et ne pas reéter la réalité. Les personnes âgées ayant un trouble psychiatrique obtiennent des résultats signicativement supérieurs lorsqu’elles portent un appareil auditif. Il faut suivre ici les mêmes directives relatives aux aspects de l’A-C-C-P décrites pour l’adulte plus jeune, en tenant compte des considérations additionnelles suivantes. Si monsieur Gamache avait 78 ans, que devriez-vous évaluer avant de commencer l’évaluation de l’état mental an de vous assurer de la abilité de celle-ci ? Comportement Niveau de conscience Dans un centre hospitalier ou un établissement de soins de longue durée, l’échelle de coma de Glasgow est un instrument de mesure quantitative utile pour vérier la conscience des adultes vieillissants, chez qui la confusion est fréquente. Il accorde une valeur numérique aux réponses de la personne, selon trois catégories : 1) les yeux ouverts ; 2) la meilleure réponse verbale ; 3) la meilleure réponse motrice. Ce système évite l’ambiguïté lorsque plusieurs inrmières prennent soin de la même personne. Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 111 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Fonctions cognitives Orientation Plusieurs adultes vieillissants expérimentent l’isolement social : par la perte d’un cadre de vie – sans emploi à l’extérieur –, par un changement de lieu de résidence ou par certaines pertes de mémoire, de courte durée. Ces facteurs nuisent à l’orientation, et la personne peut ne pas être en mesure de fournir la date précise ou le nom complet de l’établissement où elle se trouve. On considère que les adultes vieillissants sont orientés lorsqu’ils savent généralement où ils se trouvent et reconnaissent le moment présent. Ainsi, ils sont orientés dans le temps s’ils nomment l’année et le mois courants correctement et orientés dans le lieu s’ils reconnaissent le milieu (p. ex., le centre hospitalier) et le nom de la ville où ils sont. Nouvel apprentissage Chez les personnes ayant un fonctionnement cognitif normal, un déclin, lié à l’âge, survient dans l’exécution du test des quatre mots (non reliés entre eux). En moyenne, les personnes âgées d’environ 80 ans se souviennent de 2 mots sur 4 après 5 minutes. Elles accroissent leur performance après 10 et 30 mi nutes avec l’aide d’un rappel d’indices verbaux (p. ex. : « Un des mots était une couleur ; l’autre représente une fleur commune en Hollande. »). Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer n’améliorent pas leur performance dans les essais subséquents. Examen supplémentaire de l’état mental Mini-Cog Le Mini-Cog est un outil de dépistage des troubles cognitifs qui est rapide, efcace et facilement accessible (Borson, Scanlan Watanabe et collab., 2006 ; Brodaty, Low, Gibson et collab., 2006). Il peut être utilisé avec une variété de niveaux d’alphabétisation, et ce, dans plusieurs langues et cultures. De plus, il ne prend que trois à cinq minutes à faire passer. Le Mini-Cog comporte un test de rappel de trois mots et le test de l’horloge. Demander à la personne âgée d’écouter attentivement et de se souvenir des trois mots que l’inrmière lui dira an de pouvoir les répéter. S’assurer qu’il n’y a pas de sources de distraction et que la personne peut bien l’entendre. Les mots doivent être courts et non reliés. Dire à la personne : « Écoutez-moi attentivement. Je vais prononcer trois mots. Répétez ces mots quand j’arrêterai. Êtes-vous prêt ? Tasse (pause), train (pause), bleu. Maintenant, répétez ces mots. » Ensuite, donner une feuille de papier vierge à la personne et lui dire : « Maintenant, je veux que vous dessiniez une horloge et que vous y inscriviez tous les chiffres. Ensuite, je veux que vous y dessiniez les aiguilles pour que l’horloge indique qu’il est 11 h 10. » Puis : « Vous souvenez-vous des trois mots que vous avez répétés ? Je veux que vous me les répétiez maintenant. » Le Mini-Cog permet d’évaluer le fonctionnement exécutif de la personne, y compris sa capacité de planication, de gestion du temps et d’organisation d’activités (Doerflinger, 2007). Une personne qui n’a pas d’atteinte à la fonction cognitive est capable de se rappeler les trois mots et de dessiner une horloge complète et ronde avec tous les chiffres au bon endroit et les aiguilles indiquant l’heure demandée. 112 Partie 1 Évaluation globale de la personne Être capable de se souvenir de un ou de deux mots indique un trouble neurocognitif potentiel ; se souvenir d’aucun mot traduit la présence d’un trouble neurocognitif . Dessiner une horloge anormale (chiffres au mauvais endroit, entassés ou dans un mauvais ordre ; aiguilles au mauvais endroit) révèle un trouble cognitif. 5.4 Anomalies Les TABLEAUX 5.1 à 5.3 présentent la terminologie associée aux niveaux de conscience, aux troubles du langage, ainsi qu’aux anomalies de l’humeur et de l’affect. TABLEAU 5.1 Niveaux de conscience Les termes expliqués ci-dessous sont couramment utilisés en pratique clinique. Ils s’appliquent à un continuum de niveaux de conscience allant du plein éveil au coma profond 23 . Les termes sont qualitatifs, et, par conséquent, ils ne sont pas toujours ables. Ces termes sont largement acceptés, mais ils ne s’avèrent utiles que si tous les intervenants s’entendent sur leur dénition et sont conséquents dans leur application. An d’être plus clair dans l’utilisation de ces termes, noter aussi les éléments suivants. 1. Le niveau de stimulus utilisé, selon la progression suivante : 2. La réponse de la personne : a. Appel du nom de la personne en utilisant un ton de voix normal a. Quantité et qualité du mouvement b. Appel du nom à voix haute b. Présence et cohérence du langage c. Contact délicat sur le bras de la personne d. Secousse vigoureuse sur l’épaule c. Ouverture et contact des yeux 3. Que fait la personne lorsqu’il y a arrêt du stimulus ? e. Application d’un stimulus douloureux (1) Alerte La personne est éveillée ou aisément réveillée, orientée, pleinement consciente des stimulus internes et externes et y répond adéquatement, elle entretient des interactions interpersonnelles signicatives. (2) Léthargique (ou somnolente) La personne n’est pas complètement alerte, portée à dormir lorsqu’elle n’est pas stimulée, peut être réveillée lorsqu’on dit son nom avec une voix normale, mais semble somnolente. Elle répond convenablement aux questions ou aux ordres, mais la pensée est lente et confuse ; elle est inattentive avec perte du l des idées et diminution des mouvements spontanés. (3) Obnubilée État de transition entre la léthargie et la stupeur ; certaines sources omettent ce niveau. La personne dort la plupart du temps, est difcile à réveiller (a besoin d’entendre un cri fort ou d’être secouée vigoureusement), agit confusément lorsqu’elle est éveillée, converse par monosyllabes ; le langage peut être marmonné et incohérent ; elle requiert une stimulation constante, même pour une coopération minimale. (4) Stupeur ou semi-coma La personne est spontanément inconsciente, répond seulement à une secousse persistante et vigoureuse ou par de la douleur ; elle a des réponses motrices appropriées (p. ex., elle retire la main pour éviter la douleur) ; autrement, elle ne peut que gémir, marmonner ou bouger nerveusement ; persistance d’activités de réexe. (5) Coma La personne est complètement inconsciente, ne répond pas à la douleur ou aux stimulus externes ou internes (p. ex., elle ne cherche pas à repousser le cathéter pendant une succion). Dans un coma léger, certaines activités de réexe sont notées, mais il n’y a aucun mouvement intentionné, planié. Dans le coma profond, il n’y a aucune réponse motrice. État de confusion aiguë (délirium) Obscurcissement de la conscience (affaiblissement de la connaissance et de la vigilance) ; la personne est inattentive, sa conv ersation est incohérente, sa mémoire de travail se trouve affaiblie, et elle fabule sur les événements récents. Elle est souvent agitée et a des hallucinations visuelles ; elle est désorientée avec de la confusion, laquelle est pire la nuit alors que les stimulus environnementaux sont diminués. Source : Adapté de Strub et Black (2000). Reproduit avec permission. 23 L’échelle du coma de Glasgow, présentée dans la gure 23.59 du chapitre 23, Système neurologique, est un outil quantitatif qui sert à mesurer le niveau de conscience et qui élimine l’ambiguïté. Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 113 5 Troubles du langage TABLEAU 5.2 CONDITION TROUBLE DESCRIPTION Aphasie Atteinte de l’émission ou de la compréhension du langage secondaire à un dommage au cerveau Véritable trouble du langage, défaut dans le choix des mots et de la grammaire ou défaut dans la compréhension ; le problème se situe dans le processus du langage intégratif supérieur. Dysarthrie De l’articulation Les sons du langage sont altérés ; le discours peut apparaître inintelli gible ; le langage de base (choix des mots, grammaire, compréhension) est intact. Dysphonie De la voix Difculté ou inconfort à parler, le ton ou le volume est anormal en raison d’un problème laryngien. La voix semble enrouée ou basse, mais l’articulation et le langage sont intacts. Types d’aphasie Une dichotomie antérieure classiait les aphasies comme étant expressives (difculté à produire le langage) ou réceptives (dif culté à comprendre le langage). Les personnes atteintes d’aphasie éprouvent quelques difcultés d’expression, d’où une tendance à toutes les classier comme étant expressives. Pour aider les inrmières moins expérimentées, le système qui suit présente une description plus détaillée de diverses conditions. CONDITION DESCRIPTION Aphasie motrice du langage (ou a phasie de Broca) Aphasie expressive. La personne peut comprendre le langage, mais ne peut s’exprimer par celui-ci. Son discours est difcile, dysarthrique et requiert beaucoup d’efforts. Il est principalement constitué de noms et de verbes (mots riches en contenu) avec peu de prépositions ou il est « télégraphique ». La répétition et la lecture, à voix haute, sont gravement atteintes. La compréhension auditive et celle de la lecture sont étonnamment intactes. La lésion se situe dans l’aire antérieure du langage, appelée aire motrice du langage (ou aire de Broca). Aphasie de compréhension du langage (ou aphasie de Wernicke) Aphasie réceptive. Celle-ci est l’opposé linguistique de l’aphasie motrice du langage. La personne peut entendre des sons et des mots, mais elle ne peut les relier à des expériences antérieures. Le discours est facile, sans effort et bien articulé, mais il présente plusieurs paraphasies (substitution de mots qui sont difformes ou incorrects), des néologismes (invention de mots) et souvent un manque de mots substantifs. Le discours peut aussi être totalement incompréhensible. Souvent, il y a une grande impulsion à parler. La répétition, la lecture et l’écriture sont aussi altérées. La lésion se situe dans l’aire postérieure du langage, appelée aire de compréhension du langage (ou aire de Wernicke). Aphasie globale Dans la forme la plus commune et majeure, le langage spontané est absent ou réduit à quelques mots ou il est stéréotypé. La compréhension est absente ou réduite seulement au nom propre de la personne et à la sélection de quelques mots. La répétition, la lecture et l’écriture sont gravement affaiblies. Le pronostic pour le recouvrement du langage est pauvre, à cause d’une lésion importante qui endommage la plupart des aires combinées antérieures et postérieures du langage. Anomalies de l’humeur et de l’affect TABLEAU 5.3 TYPE D’HUMEUR OU D’AFFECT DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Affect émoussé Manque de réponses émotives ; aucune expression de sentiment ; voix monotone et visage immobile. Les sujets de conversation varient sans que l’expression du visage change. Affect inapproprié Affect clairement discordant avec le contenu du discours de la personne. La personne rit alors qu’elle discute de son admission pour une biopsie du foie. Ambivalence Présence d’émotions opposées envers une idée, un objet, une personne. La personne éprouve, en même temps, de l’amour et de la haine envers une autre personne. Anxiété Inquiétude, la personne est troublée, craintive par anticipation d’un danger dont la source est inconnue. « Je me sens nerveuse et très tendue. » « Je m’inquiète tout le temps. » « Je n’arrive pas à prendre une décision. » Dépersonnalisation (manque de délimitation de l’ego) Perte de l’identité ; la personne se sent aliénée, perplexe concernant sa propre identité et le sens de l’existence. « Je ne me sens pas réelle. » « Je me sens comme n’étant pas vraiment ici. » 114 Partie 1 Évaluation globale de la personne TABLEAU 5.3 Anomalies de l’humeur et de l’affect (suite) TYPE D’HUMEUR OU D’AFFECT DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Dépression Tristesse, mélancolie, abattement ; les symptômes peuvent apparaître quand le temps est pluvieux, après une fête ou en cas de problème de santé ; si la situation est temporaire, les symptômes disparaissent rapidement. « J’ai les bleus. » « Je suis down. » « Je n’éprouve plus de plaisir à faire des choses que j’aime habituellement. » Euphorie Bien-être excessif ; la personne est exceptionnellement gaie ou exaltée, ce qui est peu approprié, considérant la condition physique et mentale associée à un problème de l’humeur. « Je suis high. » « Je me sens comme si je volais. » « Je me sens au-dessus du monde. » Exaltation Joie et optimisme, conance aveugle, activités motrices accrues qui ne constituent pas nécessairement un problème de santé. « Je me sens heureuse à la folie. » Irritabilité Sentiment de contrariété, la personne est facilement provoquée, impatiente. La personne intériorise un sentiment de tension, et il suft d’un faible stimulus pour qu’elle l’extériorise. Labilité Changement rapide des émotions. La personne exprime de l’euphorie, du larmoiement et de la colère, lesquels se succèdent rapidement. Peur Inquiétude, la personne est troublée, craintive ; le danger externe est connu et reconnu. La personne a peur de prendre l’avion. Rage Perte de contrôle ; la personne est furieuse. La personne présente un comportement violent envers ellemême ou les autres. 5.5 Anomalies pour une pratique avancée Les TABLEAUX 5.4 à 5.10 présentent les troubles du processus de la pensée et les troubles de la pensée, les troubles de la perception, le délirium, les troubles cognitifs et les troubles amnésiques, ainsi que la schizophrénie, les troubles de l’humeur et les troubles anxieux. TABLEAU 5.4 Troubles du processus de la pensée TYPE DE PROCESSUS DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Associations lâches Passage d’un sujet à un autre sans qu’ils soient liés ; la personne ne semble pas consciente que les sujets sont sans rapport entre eux. « Mon patron est fâché contre moi, et ce n’était même pas ma faute. (pause) J’ai aussi vu le lm de Piaf. Je me suis sentie vraiment mal à ce sujet. Mais elle continuait à essayer de faire atterrir l’avion, et elle n’a jamais su ce qui se passait. » Association sonore Choix de mots basés sur le son, non sur le sens, incluant des rimes et des calembours de non-sens. « Mes pieds sont froids. Froid, droit, loi. La cloche a sonné pour moi. » Blocage Interruption soudaine du l de la pensée ; la personne est incapable de compléter ses phrases, ce qui semble lié à une forte émotion. « J’ai oublié ce que je voulais dire. » Circonlocution Expression indirecte de la pensée, substitution d’une phrase lorsque la personne ne peut se souvenir du nom d’un objet. Elle dit « la chose avec laquelle vous ouvrez la porte » au lieu de « clé ». Écholalie Imitation, répétition des mots ou des phrases d’autres per sonnes, souvent en marmonnant, d’un ton moqueur ou d’une façon mécanique. L’inrmière : « Je veux que vous preniez votre pilule. » La personne (moqueuse) : « Prenez votre pilule. Prenez votre pilule. » Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 115 5 Troubles du processus de la pensée (suite) TABLEAU 5.4 TYPE DE PROCESSUS DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Fabulation Façonnement des événements pour remplir les trous de mémoire. La personne donne une description détaillée de sa longue promenade autour du centre hospitalier alors que son entourage sait qu’elle est demeurée dans sa chambre tout l’après-midi. Fuite des idées Changement brusque de sujet. La personne saute rapidement d’un sujet à l’autre, et son discours est presque un ot accéléré et continu de paroles ; ses propos sont ordinairement constitués d’associations reconnaissables ou de jeux de mots. « Prendre cette pilule ? La pilule est bleue. J’ai “les bleus” (elle chante). Elle portait du velours bleu. » Logorrhée Loquacité excessive, surabondance démesurée du discours avec une vitesse accélérée. La personne tient un discours fragmenté et dénué de sens. Elle saute du coq à l’âne. Son rythme est rapide et difcile à suivre. Néologisme Création d’un mot nouveau ; celui-ci peut être un condensé de plusieurs mots ; le mot inventé n’a pas de véritable sens, excepté pour la personne qui l’a émis. « J’ai à mettre en marche mon “penséelateur”. » Persévération Persistance de répétition d’une même réponse verbale ou motrice même avec des stimulus variés. « Je vais fermer la porte à clé, la porte à clé. Je marche chaque jour et je ferme la porte à clé. Je prends ordinairement le chien avec moi et je ferme la porte à clé. » Proxilité circonlocutoire Utilisation de détails de façon excessive et inutile, la personne tarde à conclure ; ses phrases ont un rapport de sens, mais elles sont sans importance (cela survient chez certaines personnes normales). « Quand a eu lieu ma chirurgie ? Bien, j’avais 28 ans, je vivais avec ma tante qui a du psoriasis, elle l’a eu gravement, cette année, avec la chaleur, qui a été pire que celle de l’été 1992… » Salade de mots Mélange incohérent de mots, de phrases et de jugements ; discours illogiques, décousus, incluant des néologismes. « Beauté, base rouge cinq, pigeon, le coin de la rue, en quelque sorte. » Tangentialité Incapacité à produire des associations de pensée orientées vers un but. La personne s’éloigne de plus en plus du but à un tel point qu’elle n’y répond jamais. « Je n’ai pas de nom, j’ai tous les âges, le fluide éternel qui coule dans mes veines ; de l’or ; je vois ce que vous pensez, j’ai un troisième œil qui tourne dans mon cerveau. Je sais que vous voulez m’appauvrir, mais vous ne m’aurez pas. » Troubles de la pensée TABLEAU 5.5 TYPE DE PENSÉE DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Compulsion Acte intentionnel, répétitif, non désiré ; la personne se sent contrainte à agir ; le comportement est perçu comme pouvant neutraliser ou prévenir l’inconfort ou un événement redouté. Lavage répété des mains ; compter et recompter ; vérifier et revérier ; toucher. Obsession Pensées ou impulsions persistantes non désirées ; la logique ne les éliminera pas de la conscience ; elles sont vécues comme étant inopportunes et insensées. Violence (le parent ayant une impulsion répétée de tuer son enfant bien-aimé) ; contamination (la personne craint de devenir infectée en serrant la main des gens). Hypocondrie Morbide inquiétude concernant sa propre santé. La personne se sent malade, mais sans fondement. Peur d’avoir le cancer ; n’importe quel symptôme est associé au cancer. Idées délirantes Croyances fausses, fermes, arrêtées et fixes ; irrationalité ; la personne s’accroche à l’illusion, en dépit de l’évidence objective du contraire. Idées de grandeur : la personne croit qu’elle est Dieu, un personnage célèbre ou historique, une gure sportive reconnue ou toute autre personne bien connue ; idée de persécution : « Ils sont là pour m’avoir. » Phobie Peur intense, persistante, irrationnelle d’un objet ou d’une situation ; la personne se sent contrainte d’éviter l’objet ou la situation. Chats, chiens, hauteurs, espaces clos. 116 Partie 1 Évaluation globale de la personne TABLEAU 5.6 Troubles de la perception TYPE DE PERCEPTION DÉFINITION EXEMPLE CLINIQUE Hallucinations Perceptions sensorielles pour lesquelles il n’y a pas de stimulus externes ; elles peuvent toucher n’importe quel sens : visuel, auditif, tactile, olfactif, gustatif. Visuel : voir une image (fantôme) d’une personne qui n’est pas là ; auditif : entendre des voix ou de la musique ; tactile : ressentir une brûlure au toucher ; olfactif : sentir des odeurs absentes ; gustatif : avoir un goût anormal et souvent désagréable des aliments. Illusion Perception inappropriée d’un stimulus existant réellement, par n’importe quel sens. Les plis, dans les draps du lit, semblent animés. TABLEAU 5.7 5 Délirium, troubles neurocognitifs et troubles amnésiques TROUBLE CRITÈRES DIAGNOSTIQUES État confusionnel (délirium) A. Une perturbation de l’attention (c.-à-d. une diminution de la capacité à diriger, focaliser, soutenir et déplacer son attention) et de la conscience (diminution de l’orientation dans l’environnement). B. Un changement dans la connaissance (décit de la mémoire, désorientation, trouble du langage) ou le développement d’un trouble de la perception. C. Le problème se développe sur une courte période de temps (ordinairement de quelques heures à quelques jours) et tend à uctuer au cours de la journée. Le délirium peut être lié à une condition médicale générale : infections systémiques, dérèglement métabolique (p. ex., l’hypoxi e, l’hypercapnie, l’hypoglycémie), déséquilibres électrolytiques ou liquidiens, maladies hépatiques ou rénales, carence en thiamine, états postopératoires, encéphalopathie hypertensive ou à la suite de convulsions ou d’un trauma crânien. Le délirium peut aussi survenir à la suite d’une intoxication par une substance (abus de drogues, de médicaments ou exposition à des toxines) ou par le sevrage d’une substance. Trouble neurocognitif léger et majeur A. Il y a présence d’une détérioration par rapport à un meilleur fonctionnement antérieur dans un domaine cognitif ou plus (attention, fonctionnement exécutif, apprentissage et mémoire, langage, perception et motricité ou cognition sociale). B. Les décits cognitifs doivent être sufsamment importants pour perturber l’indépendance dans les activités quotidiennes. Il y a différents sous-types de troubles neurocognitifs légers ou majeurs selon leur étiologie : trouble dû à la maladie d’Alzheimer, à une lésion cérébrale traumatique, à la maladie de Parkinson, à une infection par le virus de l’immunodécience humaine (VIH), à une maladie vasculaire, à l’usage d’un médicament ou d’une substance, etc. Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre. TABLEAU 5.8 Symptômes caractéristiques Schizophréniea Deux des symptômes suivants ou plus doivent être présents pour une période importante à l’intérieur de un mois (au moins un de ces symptômes doit être parmi les trois premiers) : 1. Illusions, soit l’interprétation erronée de la perception sensorielle de faits ou d’objets réels, telles que la radiodiffusion de la pensée, être sous l’emprise d’une personne décédée. 2. Hallucinations (les hallucinations auditives sont les plus communes), par exemple des voix parlent directement à la personne ou font des commentaires sur les comportements de celle-ci. 3. Discours désorganisé, par exemple un déraillement fréquent ou de l’incohérence. 4. Comportement désorganisé ou catatonique. 5. Symptômes négatifs, soit affaissement affectif, mutisme (incapacité à parler) ou absence de volonté. a Dysfonctionnement professionnel et social Un domaine majeur de fonctionnement ou plus comme celui du travail, des relations interpersonnelles et des soins personnels se situent nettement sous le niveau atteint avant le début du problème de santé. Durée Les signes persistent pendant au moins six mois, dont au moins un mois où se manifestent des symptômes du critère A ci-dessus (phase active) et qui peuvent inclure des périodes de symptômes prémonitoires ou résiduels (persistants). Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour la description d’autres catégories et des sous-types de schizophrénie tels que le type paranoïde, catatonique ou désorganisé. Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 117 TABLEAU 5.9 Troubles de l’humeur a TROUBLE CRITÈRES DIAGNOSTIQUES Épisode dépressif majeur A. Au moins cinq des symptômes suivants ont été présents pendant une même période de deux semaines et ont représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est : 1) une humeur dépressive ou 2) une perte d’intérêt ou de plaisir. Note : ne pas inclure les symptômes qui découlent manifestement d’une condition médicale générale, d’illusions ou d’hallucinations. 1. Humeur dépressive presque toute la journée et presque chaque jour telle qu’indiquée par un rapport subjectif (p. ex., la personne se sent triste ou vide) ou par les observations d’autres personnes (p. ex., la personne semble larmoyante). Note : les enfants et les adolescents peuvent présenter une humeur irritable. 2. Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir dans toutes ou presque toutes les activités, presque toute la journée et prati quement chaque jour (signalée par la personne ou observée par les autres). 3. Perte importante de poids, sans être au régime, ou gain de poids (p. ex., un changement de poids > 5 % pendant 1 mois), ou diminution ou augmentation de l’appétit, presque chaque jour. Note : chez les enfants, il faut considérer la non-atteinte du gain de poids attendu. 4. Insomnie ou hypersomnie, presque chaque jour. 5. Agitation psychomotrice ou retard psychomoteur, presque chaque jour. 6. Fatigue ou perte d’énergie, presque chaque jour. 7. Sentiments de dévalorisation ou culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante), presque chaque jour. 8. Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision, presque chaque jour. 9. Pensées récurrentes sur la mort (pas seulement la peur de mourir), idées suicidaires récurrentes, sans plan précis, ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider. B. Les symptômes causent de la détresse clinique importante ou la détérioration du fonctionnement social, professionnel ou ils touchent d’autres aspects importants du fonctionnement. C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex., l’abus de drogues, un médicament) ou à une condition médicale générale (p. ex., l’hypothyroïdisme) ni causés par un deuil, comme celui de la perte d’un être cher (à moinsqu’ils ne persistent plus de deux mois ou qu’ils ne soient caractérisés par une détérioration fonctionnelle, une préoccupation morbide av ec dévalorisation, une idée suicidaire, des symptômes psychotiques ou un retard psychomoteur). Épisode maniaque A. Une période distincte d’une humeur persistante et anormalement élevée, expansive ou irritable pendant au moins une semaine (ou de toute autre durée si l’hospitalisation est nécessaire). B. Durant cette période de perturbation de l’humeur, trois (ou plus) des symptômes suivants ont persisté (quatre si l’humeur est seulement irritable). 1. Estime de soi exagérée ou emphatique. 2. Besoin de sommeil diminué (p. ex., la personne se sent reposée après seulement trois heures de sommeil). 3. Personne plus bavarde que d’habitude ou pressée à continuer à parler. 4. Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées se précipitent. 5. Distractibilité (p. ex., l’attention est trop facilement attirée vers des stimulus externes sans importance ou non pertinents). 6. Augmentation des activités dirigées vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice. 7. Engagement excessif dans des activités agréables qui ont un haut potentiel de conséquences douloureuses (p. ex., s’engager d ans des achats sans restriction, s’adonner à des activités sexuelles non protégées ou faire des investissements nanciers insensés). C. Le problème d’humeur est sufsamment grave pour causer une détérioration marquée dans le fonctionnement professionnel, dans les activités sociales habituelles ou dans les relations interpersonnelles, ou il nécessite une hospitalisation pour prévenir des blessures à soi-même ou à d’autres, ou la personne présente des traits psychotiques. D. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex., un abus de drogues, de médicament) ou à une condition médicale générale (p. ex., l’hyperthyroïdisme). Le trouble dépressif majeur se caractérise par un épisode de dépression majeur ou plus (au moins deux semaines d’humeur dépressive ou de perte d’intérêt accompagnée par au moins quatre symptômes supplémentaires de dépression) ; le trouble dépressif persistant (dysthymie) se caractérise par au moins deux ans d’humeur dépressive, où les jours de dépression sont plus nombreux que les jours où l’humeur est normale, accompagnée de symptômes dépressifs supplémentaires ; les troubles bipolaires se caractérisent par un épisode maniaque ou hypomaniaque ou plus accompagné d’épisodes de dépression majeurs. a Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour la description d’autres catégories, comme ceux des problèmes de personnalité ou ceux de forme somatique. Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre. 118 Partie 1 Évaluation globale de la personne TABLEAU 5.10 Troubles anxieuxa TROUBLE CRITÈRES DIAGNOSTIQUES Agoraphobie A. Une anxiété causée par le fait de se trouver dans des endroits ou de vivre des situations où la fuite peut être difcile (ou embarrassante), où l’aide ne peut pas être disponible au moment d’une attaque de panique ou en présence de symptômes similaires à la panique ; l’agoraphobie regroupe, typiquement, la peur d’être seul, en dehors de la maison ; d’être dans une foule ou debout en ligne ; de se trouver sur un pont ; de voyager en autobus, en train ou en automobile. B. Les situations sont évitées (p. ex., des voyages restreints) ou sont endurées avec beaucoup de détresse ou vécues avec l’anxiété d’avoir une attaque de panique ou des symptômes similaires de panique ; ou elles requièrent la présence d’une autre personne. Attaque de panique Une période discrète de peur intense ou d’inconfort, dans laquelle quatre (ou plus) des symptômes suivants se développent abruptement, et qui atteint un sommet à l’intérieur de 10 minutes. 1. Palpitations, battements frénétiques du cœur ou fréquence cardiaque accélérée 2. Transpiration 3. Tremblement ou agitation 4. Sensations de soufe court ou de suffocation 5. Sentiment d’étranglement 6. Douleur à la poitrine ou inconfort 7. Nausées ou douleur abdominale 8. Sensations de vertige, d’instabilité, d’étourdissement, d’évanouissement 9. Sentiment déréalisant (fait perdre le caractère du réel) ou dépersonnalisation (être détaché de soi-même) 10. Peur de perdre le contrôle ou de devenir fou 11. Peur de mourir 12. Paresthésie (sensation d’engourdissement ou de picotement) 13. Sueurs froides ou bouffées de chaleur Phobie spécique A. Une peur marquée et persistante de nature excessive ou déraisonnable provoquée par un objet ou une situation (p. ex., prendre l’avion, craindre les hauteurs ou les animaux, recevoir une injection, voir du sang). B. L’exposition au stimulus phobique provoque invariablement une réponse immédiate d’anxiété, laquelle peut être une crise de panique. Note : chez les enfants, l’anxiété peut s’extérioriser par des pleurs, des crises de colère, par l’immobilité (« geler » sur place) ou en se cramponnant à quelqu’un ou à quelque chose. C. La personne reconnaît que la peur est excessive ou déraisonnable. D. La situation phobique est évitée ou est endurée avec une anxiété intense ou avec détresse. E. Cela entrave considérablement la routine normale de la personne, dans son fonctionnement professionnel (ou scolaire) ou dans ses activités sociales ou relationnelles. Trouble d’anxiété généralisé A. Une anxiété excessive et une inquiétude survenant la plupart du temps pendant au moins six mois, concernant un certain nombre d’événements ou d’activités (comme la performance au travail ou à l’école). B. La personne trouve difcile de maîtriser son inquiétude. C. L’anxiété et l’inquiétude sont associées à trois (ou plus) des éléments suivants. 1. Nervosité ou surexcitation 2. Fatigue rapide 3. Concentration difcile ou trou de mémoire 4. Irritabilité 5. Tension musculaire D. Sommeil perturbé Trouble d’anxiété sociale (phobie sociale) A. Une peur marquée ou persistante à l’égard d’une situation sociale ou de performance ou plus. La personne est exposée à des gens qu’elle ne connaît pas vraiment et qui peuvent l’observer minutieusement ; la personne craint d’agir de façon humiliante ou emb arrassante (ou de montrer ses symptômes d’anxiété). B.–E. Identique à la phobie spécique. Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 119 5 TABLEAU 5.10 Troubles anxieuxa (suite) TROUBLE CRITÈRES DIAGNOSTIQUES Trouble de stress post-traumatique A. La personne a été exposée à des événements durant lesquels sa vie ou son intégrité physique a été menacée, l’exposant à desblessures graves ou à la violence sexuelle de une façon ou plus. 1. Expérience personnelle de l’événement traumatique 2. Témoignage, en personne, de l’événement impliquant une autre personne 3. Prise de connaissance d’un événement traumatique subi par une personne de sa famille ou un ami 4. Exposition répétitive à des événements de nature semblable (p. ex., les ambulanciers, les policiers) Elle a subi une menace de mort, a été témoin ou a été confrontée à la mort ou à une menace de mort, ou elle a risqué d’être sérieusement blessée. La réponse de la personne implique une peur intense, de l’impuissance ou de l’horreur. B. L’événement traumatique est réexpérimenté de façon persistante par la présence de un des symptômes intrusifs suivants ou plus. 1. Des souvenirs pénibles, importuns et récurrents de l’événement ; ils intègrent des pensées, des images ou des perceptions. 2. Des rêves pénibles et récurrents de l’événement. 3. Des réactions de dissociation (ashback ) pendant lesquelles la personne revit l’événement traumatique. 4. Une détresse psychologique intense ou prolongée en réponse à un signal interne ou externe lui rappelant l’événement traumatique. C. La personne évite de façon persistante le stimulus associé au traumatisme et présente un « engourdissement » de ses réactions générales (p. ex., un sentiment de détachement ou d’éloignement des autres, une incapacité à éprouver de l’affection, le sentiment d’un avenir abrégé). D. Symptômes persistants d’excitation accrue 1. Difculté à s’endormir ou à demeurer endormi 2. Irritabilité ou crise de colère 3. Difculté de concentration 4. Hypervigilance 5. Réponse exagérée de sursaut Trouble obsessionnelcompulsif A. La personne a des obsessions : 1. Les pensées, les impulsions ou les idées récurrentes et persistantes sont vécues comme étant indésirables et inappropriées, et elles causent une anxiété marquée ou de la détresse. 2. La personne cherche à ignorer ou à supprimer ses pensées, ses impulsions ou ses idées ou à les neutraliser avec une autre pensée ou une action (p. ex., avec une compulsion). ou des compulsions : 1. Des comportements répétitifs (p. ex., se laver les mains, ranger, vérier) ou des actes intellectuels (p. ex., prier, compter, répéter des mots silencieusement) que la personne se sent forcée d’accomplir en réponse à une obsession ou conformément à des règles devant être appliquées de façon rigide. 2. Les comportements ou les actes intellectuels ont pour objectifs de prévenir ou de réduire la détresse ou de prévenir une sit uation ou un événement redouté. B. Les obsessions ou les compulsions causent une grande détresse ; elles constituent une perte de temps ou une interférence considérable dans la routine normale de la personne, dans son fonctionnement professionnel (ou scolaire) ou dans ses activités sociales ou relationnelles habituelles. Trouble panique A. Les deux symptômes suivants se manifestent. 1. Crises de panique inattendues et récurrentes (voir ci-dessus). 2. Un des éléments suivants ou plus perdurent pendant plus d’un mois à la suite des premières attaques de panique. a. Inquiétude persistante d’avoir d’autres crises. b. Inquiétude entourant les conséquences d’une crise (p. ex., perdre le contrôle, avoir une crise cardiaque, « devenir fou »). c. Changement important dans le comportement associé aux crises. B. L’agoraphobie peut être présente ou absente. a Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour obtenir d’autres détails et pour la description d’autres catégories de troubles anxieux. Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre. 120 Partie 1 Évaluation globale de la personne Évaluation et jugement clinique Exemple de notes au dossier Données objectives • Apparence : posture de la personne droite, sans mouvements involontaires du corps. Habillement et toilette appropriés pour la saison et le contexte. • Comportement : personne alerte, avec une expression faciale appropriée et agréable et tient un langage compréhensible. Affect et réponses verbales appropriés. • Fonctions cognitives : personne orientée dans le temps, vers les personnes et le lieu. Capable d’attention coopérative avec les inrmières. Mémoire de travail et à long terme intacte. Peut se rappeler les 4 mots (non reliés entre eux) aux intervalles de 5, de 10 et de 30 minutes du test. Plans d’avenir comprennent le retour à la maison et à l’université locale après établissement de la thérapie individuelle et ajustement de la médication. • Processus de la pensée et perceptions : processus de la pensée et perceptions logiques et cohérents. Aucune idée suicidaire. • Pointage du mini-examen de l’état mental de 28. Exemple d’évaluation ciblée Lorette P. est une femme de 79 ans, mariée et de race blanche, hospitalisée récemment pour l’évaluation d’une augmentation de pertes de mémoire, de confusion et de comportements sociaux inappropriés. La famille rapporte qu’elle a diminué ses soins de toilette et son hygiène ; elle mange très peu et a perdu du poids, elle ne dort pas toute la nuit, a des sautes d’humeur empreintes de colère qui sont peu conformes à sa conduite antérieure ; elle ne reconnaît pas la plus jeune de ses petits-enfants. Son mari raconte qu’elle s’est éloignée de la cuisinière alors qu’elle faisait de la cuisson, laissant brûler la nourriture sur la plaque chauffante. Il l’a aussi trouvée errant dans la maison, au milieu de la nuit, incertaine du lieu où elle était. Elle avait l’habitude de « parler au téléphone plusieurs heures », mais maintenant il doit l’inciter à converser. Pendant la présente hospitalisation, elle a passé une série de tests médicaux incluant un test négatif de ponction lombaire, un électroencéphalogramme normal et une tomographie assistée par ordinateur de la tête. Son médecin suggère maintenant un diagnostic de démence sénile de type Alzheimer. Données objectives • Apparence : assise calmement, quelque peu affaissée, tirant sur les ls décousus de sa robe. Porte une veste munie d’une fermeture éclair et d’un capuchon par-dessus sa robe. Cheveux négligemment attachés en queue de cheval. Aucun maquillage. • Comportement : éveillée et regarde ses mains et ses genoux. Affect émoussé, peu mobilisable. Établit un contact avec les yeux lorsqu’on l’appelle par son nom, bien que le regard se xe rapidement et retourne vite aux genoux. Discours un peu lent, mais articulé ; quelques difcultés avec le choix des mots. • Fonctions cognitives : orientée vers la personne et le lieu. Peut nommer la saison, mais pas la journée de la semaine ou l’année. Est incapable de répéter la séquence correcte de directives complexes, soit celle de soulever un verre d’eau et de le transférer d’une main à l’autre. Enregistre un mot de rappel dans le test des quatre mots (non reliés entre eux). Ne peut dire aux inrmières comment elle planierait un achat à l’épicerie. • Processus de la pensée et perceptions : a des blocages dans le déroulement de sa pensée. Contenu de la pensée logique. Agit impatiemment et avec suspicion envers les membres de sa famille. Pas d’idée suicidaire. • Pointage du mini-examen de l’état mental de 17 ; montre que la capacité de rappel est affaiblie et qu’une difculté majeure existe avec la série de 7. Évaluation • Confusion chronique. • Interaction sociale affaiblie. • Mémoire affaiblie. • Errance. Dossier : Bernard Gamache (suite) Vous amorcez l’entrevue en demandant à monsieur Gamache ce qui s’est passé pour que les policiers l’amènent à l’urgence. Il vous dit : « Ils me surveillent, me suivent… Ils veulent m’enlever ma liberté… Ils sont dans le complot ! » Vous lui demandez ce qu’il entend par complot, et il répond : « Codes secrets dans radio… télé aussi, je dois prévenir… prévenir les hommes. » Durant l’entrevue, vous remarquez que monsieur Gamache est sur ses gardes, il demeure à l’affût du moindre bruit et il surveille régulièrement la porte de sa chambre. Après un moment, il se lève du lit lentement et place le fauteuil de façon à voir la porte avant de s’y asseoir en se couvrant toujours la tête avec les couvertures. Vous lui demandez s’il place les couvertures sur sa tête parce qu’il a froid. Il vous répond que vous êtes bien naïve et que c’est pour bloquer les ondes de la police qui essaie de l’écouter à distance. Monsieur Gamache semble analyser ce que vous dites et prend en moyenne de 20 à 30 secondes avant de vous répondre. Il vous paraît anxieux, son visage afche peu d’expression, mais il plisse les yeux et ne maintient pas le contact visuel avec vous. À un moment durant Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 121 5 (suite) l’entrevue, il se retourne sur sa droite et fait non de la tête en xant le lit où il était assis quelques minutes auparavant. Tout au long de l’entrevue, il est orienté dans les trois sphères, sa mémoire, autant de travail qu’à long terme, semble intacte. Il est attentif à ce que vous dites et suit bien la conversation, mais son discours sur la police qui le piste et qui lui veut du mal revient régulièrement. Il croit que son voisin d’appartement est un informateur pour les policiers. Il a refusé de participer au test MoCA. 1. Vous souhaitez évaluer le jugement de monsieur Gamache ; formulez une question que vous pourriez lui poser. 2. À partir des données dont vous disposez jusqu’à présent, comment évaluez-vous le jugement de monsieur Gamache ? 3. Comment qualiez-vous la pensée de monsieur Gamache ? 4. Comment qualiez-vous le contenu de sa pensée ? 5. Le client présente-t-il un trouble de la perception ? Expliquez votre réponse. 6. Indiquez deux questions que vous pourriez lui poser an d’évaluer si monsieur Gamache a des hallucinations. 7. Vous observez le visage de monsieur Gamache tout au long de l’entrevue ; il est peu expressif. Il ne manifeste aucun signe de joie ou de tristesse. Il a froncé les sourcils lorsqu’il parlait de la police qui le persécute, mais c’est tout. Il conserve le même ton de voix tout au long de l’entrevue et parle de ce qu’il a vécu dans les dernières semaines avec un certain détachement. Comment qualieriez-vous l’affect et l’humeur de monsieur Gamache ? (suite) L’entrevue avec monsieur Gamache est difcile. Voici un exemple de phrase qu’il vous a dite lorsque vous lui avez demandé s’il avait de la famille proche que vous pourriez contacter : « Ma sœur, c’est ma famille. La famille Desmarais est milliardaire. Comme les étoiles dans le ciel. Les étoiles me surveillent et volent mes idées. Idéx, c’est un chien. Hot dog, c’est le nom d’un lm. » 8. Comment qualieriez-vous le cours de la pensée et le discours de monsieur Gamache ? Expliquez votre réponse. 9. Rédigez la note au dossier à la suite de l’évaluation de l’état mental de monsieur Gamache. 10. Indiquez un constat prioritaire et trois directives au plan thérapeutique inrmier (PTI) de monsieur Gamache. Extrait CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date Heure 2015-05-08 10:15 N° Problème ou besoin prioritaire Initiales 1 RÉSOLU / SATISFAIT Professionnels / Date Heure Initiales Services concernés J.L. SUIVI CLINIQUE Date Heure N° Directive inrmière Initiales CESSÉE / RÉALISÉE Date Heure Initiales J.L. J.L. J.L. J.L. Signature de l’inrmière Judith Lefebvre 122 Partie 1 Évaluation globale de la personne Initiales J.L. Programme / Service Unité de psychiatrie Signature de l’inrmière Initiales Programme / Service Que retenez-vous ? 1. Quelles sont les quatre principaux éléments de l’état mental qu’il faut évaluer ? 3. Au cours de l’examen de l’état mental, pourquoi est-il important de questionner la personne sur ses habitudes de consommation de médicaments (prescrits ou offerts en vente libre), d’alcool et de drogues ? 5. Vers quel âge l’enfant développe-t-il un processus de la pensée plus logique et systématique et qu’il devient capable de raisonner et de comprendre des notions ? 2. Indiquez les facteurs associés à l’histoire de santé qui peuvent inuer sur l’interprétation des résultats d’évaluation. 4. Lorsque vous évaluez l’apparence d’une personne dans le cadre de l’évaluation de l’état mental, que devez-vous observer ? 7. Chez une personne âgée, que devez-vous évaluer avant de procéder à l’examen de l’état mental et pourquoi ? Pour en savoir davantage, consultez . 6. Qu’en est-il de la pensée abstraite chez l’enfant ? Chapitre 5 Évaluation de l’état mental 123 5 Dossier : Michel St-Hilaire Michel St-Hilaire, âgé de 57 ans, est électricien depuis 25 ans. Chaque jour, il travaille sur les chantiers. Sa journée de travail commence à 7 h et se termine vers 16 h. Ensuite, il aime bien aller prendre quelques bières « avec les gars ». « C’est notre façon de décompresser après une bonne journée d’ouvrage. C’est mieux que de rentrer chez moi dans une maison vide depuis que ma femme est partie. En plus, mes ls de 20 et 22 ans ont quitté la maison pour l’université il y a 3 mois, c’est décourageant de manger seul tous les soirs, j’aimerais mieux avoir d’autres occasions de voir mes amis que d’aller au bar, mais c’est tout ce qui me reste », dit-il. Aujourd’hui, il est hospitalisé en raison d’un essoufement apparu soudainement après être monté dans une échelle sur un chantier. « Je ne sais pas trop comment expliquer ce qui s’est produit. Je suis monté dans l’échelle pour aller installer des ls sur le chantier comme je le fais tous les jours, mais une fois en haut, je me suis senti très essoufé. Je sentais mon cœur battre très fort et très vite dans ma poitrine. J’étais étourdi, j’ai été obligé de m’asseoir et d’attendre 6.1 Consommation d’alcool En 2012, 92,8 % des Québécois âgés de 15 ans et plus ont déclaré avoir consommé de l’alcool au moins une fois au cours de leur vie (Santé Canada, 2012b). L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) rapporte qu’en 2005, 29,5 % des hommes et 11,9 % des femmes reconnaissaient avoir consommé de l’alcool de façon excessive (5 consommations ou plus par occasion) (INSPQ, 2010). Chez les Canadiens âgés de 15 à 24 ans, 35 % ont déclaré avoir consommé de l’alcool de façon excessive au moins 1 fois par mois au cours de la dernière année (Santé Canada, 2012b). Certains groupes sont disproportionnellement affectés par les troubles liés à la consommation de substances. À titre d’exemple, une enquête nationale menée auprès des communautés des Premières Nations a révélé que la consommation problématique d’alcool et de drogues dans les réserves amérindiennes était perçue comme étant le problème social le plus important par 82,6 % des répondants (Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations [CGIPN], 2012). L’alcool constitue la drogue psychoactive la plus consommée, mais aussi la plus fréquemment prise de façon problématique. Étant donné le taux de consommation d’alcool dans la population, il n’est pas surprenant que bon nombre de clients hospitalisés ou que mes amis m’aident à redescendre », vous explique-t-il. Vous mesurez ses signes vitaux, dont voici les valeurs : PA : 154/92 mm Hg ; P : 104 bpm, irrégulier. Au cours de l’entrevue, lorsque vous lui avez posé la question sur les habitudes de consommation de tabac, d’alcool et de drogue, monsieur St-Hilaire vous a dit ne pas fumer ni consommer de drogue. Il a admis prendre deux ou trois bières par jour les soirs de semaine. 6 Un peu plus tard dans la journée, l’exconjointe de monsieur St-Hilaire vient le visiter. Elle se rend ensuite au poste des inrmières et demande à vous parler. « Je suis inquiète pour Michel. Je suis partie il y a deux mois, car j’en avais assez de ses sautes d’humeur et de sa consommation. Il arrivait de travailler vers 19 h et il sentait l’alcool. Il se fâchait pour rien et il était imprévisible. Il ne faisait plus rien dans la maison et nous nous disputions presque chaque jour, c’était pire si je lui disais qu’il buvait trop. Cela a commencé depuis qu’il a eu des problèmes avec un contremaître au travail il y a six mois », vous raconte-t-elle. se présentant en consultation externe soient aux prises avec des troubles liés à ce type de consommation. La morbidité ainsi que la mortalité associées à la consommation excessive d’alcool reètent les conséquences négatives d’un tel comportement. En 2010, plus du tiers des décès (33,6 %, soit environ 1 000 décès) causés par des accidents de la route étaient liés à l’alcool (Fondation de recherches sur les blessures de la route au Canada, 2013). L’étude complète la plus récente, menée en 2002, estime que le coût total des méfaits liés à l’alcool pour l’ensemble du Canada est de 14,6 G$ par année, dont 3,3 G$ en coûts directs de soins de santé. De plus, cette même étude estime que le nombre total de décès annuels attribuables à l’alcool est d’environ 8 100 (Rehm, Baliunas, Brochu et collab., 2006). Dans la population générale, la consommation d’alcool à raison d’au moins 4 verres standards par jour (chacun contenant 12 g d’alcool) est associée à une augmentation du taux de mortalité due à une cirrhose et à un trouble liés à l’utilisation de l’alcool ; de cancers de la bouche, de l’œsophage, du pharynx et du foie combinés ; de blessures et d’autres accidents de causes externes chez l’homme (Thun, Peto, Lopez et collab., 1997) ENCADRÉ 6.1. Chez la femme, la consommation d’alcool accroît le risque de cancer du sein dans un rapport dose/ effet à partir d’une consommation de 24 g d’alcool Chapitre 6 Morbidité : Caractère de ce qui est propre à une maladie ou, en épidémiologie, nombre de personnes souffrant d’une maladie donnée pendant un temps donné, en général une année, dans une population. Elle comprend l’incidence (nouveaux cas) ou la prévalence (la somme de tous les cas) qui sont deux façons d’exprimer la morbidité d’une maladie. Q uestion de suivi Monsieur St-Hilaire afrme consommer trois pintes de bière au bar chaque soir ; calculez sa consommation et dites s’il dépasse les recommandations d’Éduc’Alcool. Évaluation de la consommation de substances 125 ENCADRÉ 6.1 Qu’est-ce qu’une consommation standard ? Au Canada, une consommation standard contient environ 14 g d’alcool pur. Le tableau présenté ci-dessous illustre les équivalences entre les diverses consommations. Il s’agit de quantités approximatives, car la teneur en alcool diffère selon le type de boisson et la marque choisis. Bon nombre de gens ignorent ce que constitue une consommation standard. Ils ne savent donc pas combien de verres standards sont contenus dans les bouteilles qu’ils achètent. En voici quelques exemples. Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de bière, selon le volume : Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de vin de table, selon le volume : • 340 mL = 1 • Une boisson mélangée = au moins de 1 à 3 • 650 mL = 2 • 475 mL = 1,3 • 1 200 mL = 3,3 Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de bière forte, selon le volume : • 340 mL = 1,5 • 650 mL = 2,5 • 475 mL = 12 • 1 200 mL = 4,5 • Bouteille normale de 750 mL = 5 Nombre approximatif de consommations standards de spiritueux à 40 % d’alcool (ou « alcool fort ») dans : • Une chopine = 11 • Un setier = 17 • 1,75 L = 39 a Il peut s’avérer difcile d’estimer le nombre de consommations standards contenues dans une boisson mélangée contenant un spiritueux. Selon divers facteurs tels que le type d’alcool et la recette employés, une boisson mélangée peut contenir de une à trois consommations standards et plus. Source : Adapté de Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) et Éduc’alcool (2012) Arythmogène : Qui est susceptible de générer un trouble du rythme cardiaque. Q uestion de suivi Dans le cas de monsieur St-Hilaire, quels sont les signes ou les symptômes qui pourraient vous laisser croire qu’il est atteint d’arythmie ? 126 Partie 1 par jour (environ 2 verres) (Longnecker, Berlin, Orza et collab., 1988). De plus, le lien entre la consommation chronique d’alcool et la maladie hépatique alcoolique est bien connu. Les effets de l’alcool sur la fonction cardiaque sont nombreux. Une consommation d’alcool excessive et chronique accroît le risque de cardiomyopathie alcoolique accompagnée d’une augmentation de la masse ventriculaire gauche, d’une dilatation des ventricules et d’un amincissement de la paroi cardiaque (Urbano-Marquez, Estruch, Fernandez-Sola et collab., 1995). L’hypertension constitue également un effet nocif courant de la consommation d’alcool. Évaluation globale de la personne Il y aurait d’ailleurs une association causale entre la prise de 30 à 60 g d’alcool par jour (de 3 à 5 verres standards) et l’élévation de la pression artérielle (PA) chez l’homme et la femme (Keil, Liese, Filipiak et collab., 1998). Finalement, l’alcool et les drogues illicites sont arythmogènes en plus d’être liés à la fréquence cardiaque (FC) accélérée propre à la fibrillation auriculaire (Krishnamoorthy, Lip et Kane, 2009), et ce, même dans le cas d’une consommation modérée chez une personne âgée de plus de 55 ans atteinte d’une maladie cardiovasculaire ou du diabète (Liang, Mente, Yusuf et collab., 2012). Étant donné la morbidité associée à la consommation d’alcool, de nombreux clients que rencontrent les professionnels de la santé en milieux hospitalier et de soins de santé primaires (centres de santé et de services sociaux, groupes de médecine de famille, unités de médecine familiale) présentent des habitudes de consommation d’alcool plutôt tenaces. Les clients qui consultent dans un contexte de soins de santé primaires ont en effet un risque nettement plus élevé de trouble lié à l’utilisation de l’alcool (23 %) que la population en général (9 %) (Manwell, Fleming, Johnson et collab., 1998 ; National Institute on Alcool Abuse and Alcholism, 2003). Des enquêtes menées auprès du service de l’admission aux soins intensifs ont révélé une prévalence de la dépendance à l’alcool de l’ordre de 12 à 21 % chez les clients de cette unité (Marik et Mohedin, 1996 ; O’Brien, Lu, Ali et collab., 2007). De plus, la consommation excessive d’alcool accroît le risque d’admission aux soins intensifs attribuable à un trauma, à une hypothermie ou à une pancréatite. Une fois qu’il se trouve au centre hospitalier, la forte consommation d’alcool d’un client peut donner lieu à une insufsance respiratoire en raison d’une intoxication alcoolique aiguë ou d’un syndrome de sevrage d’alcool. Par ailleurs, la dépendance à l’alcool accroît le risque de septicémie, de choc septique et de mortalité hospitalière chez les clients qui séjournent aux soins intensifs (O’Brien et collab., 2007). 6.2 Consommation de drogues illicites En 2012, environ 10,6 % des Canadiens âgés de 15 ans et plus ont admis avoir consommé des drogues illicites au cours des 12 derniers mois (Santé Canada, 2012b). Parmi celles-ci gurent notamment le cannabis, la cocaïne et le crack, l’héroïne, les substances hallucinogènes, l’ecstasy et les amphétamines. Le cannabis s’est avéré la drogue illicite la plus couramment consommée. En effet, 10,2 % des personnes âgées de 15 ans et plus ont afrmé en avoir consommé au cours des 12 derniers mois (Santé Canada, 2012b). Entre 2004 et 2012, parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans, le taux de consommation de drogues illicites en général a diminué de manière considérable (de 37,9 à 21,3 %) (Santé Canada, 2012b). Néanmoins, cela signie qu’environ un adolescent sur cinq consomme des drogues illicites. Cela mérite qu’on y porte une grande attention et que des interventions ciblées soient mises en place. En effet, toute consommation de drogues illicites entraîne de graves répercussions légales de même que des conséquences sur la santé, les relations, l’emploi, l’éducation et la carrière de la personne. En outre, la consommation abusive de médicaments d’ordonnance a été reconnue comme un domaine prioritaire d’intervention au cours d’un processus de consultation entrepris par Santé Canada et le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies (CCLT) (CCLT, 2013a). Entre 2005 et 2011, le nombre de consultations à l’urgence attribuable à la consommation non médicale d’analgésiques opioïdes en Ontario a augmenté de près de 250 % (Groupe de travail d’experts sur la dépendance aux stupéants et substances contrôlées, 2012). Par ailleurs, l’utilisation abusive de médicaments d’ordonnance entraîne non seulement de graves répercussions sur la santé et la sécurité du client, mais constitue également un fardeau que doivent assumer les urgences. Les médicaments ayant des propriétés psychoactives, dont les analgésiques opioïdes, les sédatifs hypnotiques et les stimulants, sont fortement susceptibles d’être consommés de façon abusive (Groupe de travail d’experts sur la dépendance aux stupéants et substances contrôlées, 2012). 6.3 6 Diagnostic des troubles liés à la consommation de substances Au cours de leur vie, environ 21,6 % des Canadiens âgés de 15 ans et plus seront atteints d’un trouble lié à la consommation d’alcool ou d’autres substances (Santé Canada, 2012a). Le trouble lié à la prise d’alcool touche environ 18,6 % des personnes de ce groupe (au cours de leur vie), alors que le trouble lié à la consommation du cannabis en atteint environ 6,8 %, alors que celui associé à l’utilisation d’autres drogues illicites en touche environ 4 % (Santé Canada, 2012a). Selon les résultats d’une enquête canadienne, 4,4 % des Canadiens satisfaisaient aux critères d’un trouble lié à l’utilisation d’une substance en 2012 (Pirie, Jesseman, Di Giacchino et collab., 2014). Par ailleurs, il existe un continuum relativement à la consommation d’alcool et de drogues. Celui-ci s’amorce par une consommation au cours d’occasions spéciales, puis la personne passe d’une consommation modérée à une consommation nocive TABLEAU 6.1. Les troubles liés à l’utilisation de l’alcool ou d’autres substances constituent un problème de santé chronique avec risque de rechutes pour plusieurs personnes. En fait, des études antérieures ont démontré qu’environ 40 à 60 % des clients traités pour un trouble lié à la consommation d’une substance recommencent à consommer moins de un an après la n de leur traitement (Finney & Moos, 1992 ; Hubbard, Craddock, Flynn et collab., 1997). Ainsi, une évaluation globale s’impose an d’établir un plan de soin individualisé et adapté aux besoins et aux objectifs du client. Chapitre 6 Septicémie : Propagation de microorganismes pathogènes dans la circulation sanguine. Évaluation de la consommation de substances 127 TABLEAU 6.1 Catégories et dénition des habitudes de consommation d’alcool CATÉGORIE ORGANISME DÉFINITION Consommation modérée Éduc’alcool, Québec • Hommes : ≤ 3 consommations/jour ; maximum 15 consommations/sem. • Femmes : ≤ 2 consommations/jour ; maximum 10 consommations/sem. Consommation à risque Éduc’alcool (s.d.) • Hommes : > 15 consommations/sem. ou > 4 consommations/occasion • Femmes : > 10 consommations/sem. ou > 3 consommations/occasion Consommation dangereuse Organisation mondiale de la Santé (2006) • Risque d’apparition des effets négatifs de l’alcool Consommation nocive Organisation mondiale de la Santé (2006) • Présence de dommages physiques ou psychologiques causés par l’alcool Trouble lié à l’utilisation de l’alcool American Psychiatric Association (2013) • ≥ 2 des événements suivants au cours d’une même année : consommation accrue ou prolon gée au-delà du seuil prévu ; désir persistant ou tentative infructueuse de réduire ou de gérer sa consommation d’alcool ; beaucoup de temps passé à se procurer de l’alcool, à en consommer ou à récupérer des effets de l’alcool ; désir impérieux de consommer ( craving) ; consommation répétée conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures ; per sistance de la consommation malgré des problèmes sociaux ou interpersonnels causés ou accentués par l’alcool ; abandon ou diminution des activités importantes pour la personne en raison de l’alcool ; consommation répétée dans des situations physiquement dangereuses pour la personne (p. ex., la conduite en état d’ébriété) ; poursuite de la consommation même si la personne est consciente des problèmes psychologiques que l’alcool provoque ou accentue chez elle ; tolérance (besoin de consommer davantage pour ressentir les effets de l’alcool) ; sevrage Les risques associés aux substances psychoactives autres que l’alcool pour la grossesse, le fœtus et le développement de l’enfant sont présentés de manière détaillée dans le tableau 16.4 du manuel de Fortinash, K.M., et Holoday-Worret, P.A. (2012). Santé mentale et psychiatrie. Montréal : Chenelière Éducation. 128 Partie 1 Les options thérapeutiques pour les troubles liés à la consommation de substances sont nombreuses : la désintoxication (gestion du sevrage), le traitement en établissement (durée variant de quelques jours à plus de un an), la thérapie de groupe (p. ex., une formation comportementale en compétences sociales), la thérapie individuelle (p. ex., en entrevue motivationnelle), les groupes d’entraide (p. ex., les Alcooliques Anonymes [AA], les Narcotiques Anonymes [NA]), le traitement autodirigé, le traitement par substitution aux opioïdes (p. ex., la méthadone, le suboxone), la réduction des méfaits (p. ex., les échanges de seringue, des sites d’injection supervisée) (Association des inrmières et inrmiers du Canada [AIIC], 2011 ; CCLT, 2013b). L’inrmière devrait favoriser les modalités de traitements fondés sur des résultats probants. Notons qu’en 2011, seul 0,4 % de la population a eu accès à des services publics de traitement de la toxicomanie au Canada (Pirie et collab., 2014). Toutefois, cette statistique ne tient pas compte des services offerts dans les centres privés, dans les centres hospitaliers et par les programmes de soutien communautaires. Le diagnostic est bien déni par l’American Psychiatic Association (APA) dans la cinquième édition de son Diagnostic ans Statistical Manual of Mental Disorders, DSM 5. L’ENCADRÉ 6.2 énonce les critères de ces diagnostics. Évaluation globale de la personne Malheureusement, les problèmes liés à l’alcool sont sous-diagnostiqués tant dans les milieux de soins primaires que dans les centres hospitaliers. En effet, la consommation excessive d’alcool n’est souvent reconnue que lorsque de graves complications apparaissent chez le client. Particularités liées au développement Femmes enceintes Près de 10,5 % des femmes canadiennes enceintes âgées de 15 ans et plus afrment consommer de l’alcool ; de ce nombre, 9,7 % en prennent de manière sporadique, et 0,7 %, de manière abusive (Society of Obstetricians and Gynaecologists of Canada [SOGC], 2010). Ces chiffres sont bien moins élevés que ceux notés chez les femmes non enceintes appartenant au même groupe d’âge (74,4 %) (Santé Canada, 2012b). Toutefois, chez la femme enceinte, il n’existe pas de quantité d’alcool jugée sécuritaire. Les conséquences néfastes possibles de l’alcool sur le fœtus sont bien connues TABLEAU 6.2. Ainsi, la consommation d’alcool de toutes les femmes qui songent à devenir enceintes devrait être évaluée, et l’abstinence alcoolique est recommandée. ENCADRÉ 6.2 Critères du trouble d’utilisation de substance Un mode d’utilisation inadéquat d’une substance conduisant à au moins deux des manifestations suivantes au cours d’une année. 8. Abandon ou réduction d’activités sociales, professionnelles ou de loisirs importants à cause de l’utilisation de la substance. 1. Utilisation répétée d’une substance conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures, au travail, à l’école, ou à la maison (p. ex., des absences répétées ou de mauvaises performances au travail du fait de l’utilisation de la substance ; des absences, des exclusions temporaires ou dénitives de l’école attribuables à la consommation ; la négligence des enfants ou des tâches ménagères). 9. Désir impérieux de consommer (p. ex., le client a fréquemment des cravings qu’il doit satisfaire en consommant la substance). 2. Utilisation répétée d’une substance dans des situations où cela peut être physiquement dangereux (p. ex., pendant la conduite d’une voiture ou en faisant fonctionner une machine alors que la personne est sous l’inuence d’une substance). 3. Problèmes judiciaires répétés liés à l’utilisation d’une substance (p. ex., une arrestation pour comportement anormal associé à l’utilisation de la substance). 4. Utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux, persistants ou récurrents, causés ou exacerbés par les effets de la substance (p. ex., des conits avec le conjoint à propos des conséquences de l’intoxication, des bagarres). 5. Prise de la substance en quantité plus importante ou pendant une période plus prolongée que prévu. 6. Désir persistant ou tentatives infructueuses de diminuer ou de gérer l’utilisation de la substance. 10. Poursuite de l’utilisation de la substance bien que la personne sache qu’elle a un problème psychologique ou physique persistant ou récurrent susceptible d’avoir été causé ou exacerbé par la substance (p. ex., la poursuite de la prise de cocaïne bien que la personne admette une dépression liée à la cocaïne ou la poursuite de la prise de boissons alcoolisées bien que le sujet reconnaisse l’aggravation d’un ulcère du fait de sa consommation d’alcool). 11. Tolérance : a. besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obte nir une intoxication ou l’effet désiré ; ou b. effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même quantité de la substance. 12. Sevrage : a. syndrome de sevrage caractéristique de la substance ; ou b. prise de la même substance (ou d’une substance très proche) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage. La sévérité du trouble est déterminée par la quantité de symptômes présents : 7. Beaucoup de temps passé à des activités nécessaires à l’obtention de la substance (p. ex., la consultation de nombreux médecins ou un déplacement sur de longues distances), à la consommation du produit (p. ex., fumer sans arrêt) ou à la récupération des effets de celui-ci. • Trouble léger : deux ou trois symptômes • Trouble modéré : quatre ou cinq symptômes • Trouble sévère : six symptômes ou plus Source : Adapté de American Psychiatic Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. TABLEAU 6.2 Symptômes cliniques du syndrome d’alcoolisation fœtale RÉGION/SYSTÈME SIGNES Faciale • Faciès plat, écrasement de la racine du nez avec retroussement de l’extrémité, philtrum indistinct et convexe (aucun relief de la peau entre le nez et la lèvre supérieure), lèvre supérieure amincie, mâchoire inférieure réduite et rétrécissement des fentes palpébrales (yeux bridés) Optique • Strabisme, anomalie de la rétine et globes oculaires réduits • Correction visuelle nécessaire Squelettique • Retard de croissance, poids et taille réduits, périmètre crânien réduit, petits doigts courts, ongles hypoplasiques (formation incomplète), syndrome de Klippel-Feil (fusion des vertèbres cervicales) et scoliose (incurvation latérale anormale de la colonne vertébrale) Cérébrale • Microcéphalie (circonférence crânienne sous la normale), hydrocéphalie, anomalies diverses dans la structure du cerveau ainsi que taille réduite des zones cérébrales, bulbe olfactif non développé, retard mental de léger à grave, surdité d’origine neurologique ou physiologique, décit de l’attention et altération des capacités d’apprentissage, désordres de légers à graves de la coordination motrice et de l’équilibre Cardiaque • Malformations diverses des compartiments du cœur et des vaisseaux sanguins Autres • Malformations congénitales diverses (p. ex., des voies biliaires, des organes génitaux externes) d’origine inconnue, dans le cas d’abus d’alcool en période de gestation (documentées) • Naissance prématurée • Mortalité de l’enfant à la naissance Sources : Adapté de Ben Amar et Léonard (2009) ; Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) (2009) ; Richard, Senon et Valleur (2009) Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 129 6 Adultes vieillissants De façon générale, la prévalence de la consommation d’alcool à raison de une à trois consommations par semaine diminue avec l’âge ; elle passe de 47,0 % chez les hommes et de 23,4 % chez les femmes âgés de 25 à 34 ans à 40,5 % chez les hommes et à 29,1 % chez les femmes de 55 à 64 ans, puis à 30,9 % chez les hommes et à 21,9 % chez les femmes de 65 ans et plus (Santé Canada, 2008). Par contre, les personnes âgées présentent nombre de facteurs qui peuvent faire grimper le risque associé à la consommation d’alcool. Par exemple, le métabolisme hépatique et la fonction rénale ralentissent avec l’âge, ce qui accroît la biodisponibilité de l’alcool dans le sang, et ce, pour une période prolongée. De plus, la masse musculaire des personnes âgées diminue. Ainsi, le moins grand volume de tissus dans lequel l’alcool peut être distribué fait en sorte que la concentration sanguine de la substance est accrue. En outre, certaines personnes âgées prennent plusieurs médicaments, lesquels peuvent entraîner des interactions néfastes avec l’alcool (p. ex., les benzodiazépines, les antidépresseurs, les antihypertenseurs et l’acide acétylsalicylique). Par ailleurs, la consommation d’alcool augmente les risques de chute, de dépression et de troubles d’ordre gastro-intestinal. Finalement, il arrive que la détection d’un problème associé à l’alcool prenne plus de temps chez la personne âgée. Par exemple, cette dernière peut éviter certaines conséquences liées à la consommation d’alcool comme la conduite en état d’ébriété uniquement parce qu’elle ne conduit plus ou les problèmes vécus au travail parce qu’elle est retraitée. 6.4 Données subjectives 6.4.1 4 Les outils mnémotechni­ ques AMPLE et PQRSTU sont présentés dans le chapitre 4, Regard global sur l’histoire de santé. Histoire de santé Le fait de recueillir les données subjectives permet de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces éléments d’information sont ensuite combinés aux données objectives provenant de l’examen physique et des examens paracliniques. L’ensemble des données sert à poser un jugement clinique sur l’état de santé du client et à formuler un constat d’évaluation. An de reconstituer l’histoire de santé, l’inrmière peut utiliser l’outil mnémotechnique AMPLE. Lorsque le client présente des symptômes particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue ceux-ci à l’aide de l’outil PQRSTU 4 . Si le client se présente en état d’ébriété ou s’il est en sevrage, il pourrait s’avérer difcile de recueillir de l’information sur ses antécédents de santé ou alors les données recueillies pourraient se révéler peu ables. Cependant, une fois à jeun, la plupart des clients sont prêts et aptes à fournir de l’information able à condition que le contexte soit privé, confidentiel et non conictuel. Il est également important de reconnaître que les personnes qui consomment des drogues ont souvent vécu des expériences désagréables à l’occasion de contacts antérieurs avec des professionnels de la santé, et elles craignent beaucoup la stigmatisation et la discrimination à leur égard (Ahern, Stuber et Galea, 2007). L’inrmière représente souvent le premier point de contact des personnes qui consomment des drogues : il est donc primordial qu’elle aborde ce sujet sans porter de jugement et de façon respectueuse. Une bonne relation thérapeutique s’avère essentielle pour favoriser un climat de conance propice à la collaboration entre l’inrmière et le client qui consomme des drogues illicites. Séquence d’évaluation QUESTIONS • Buvez-vous du café ? Combien de cafés par jour ? Fumez-vous ? Combien de cigarettes par jour ? 130 Partie 1 Évaluation globale de la personne JUSTIFICATIONS Le fait de commencer l’évaluation en demandant au client s’il consomme des substances qui sont socialement acceptables permet d’établir un climat de conance. QUESTIONS JUSTIFICATIONS • Vous arrive-t-il de boire de la bière, du vin ou toute autre boisson alcoolisée ? Si la réponse est « oui », poser la question suivante relativement à la consommation abusive d’alcool : Au cours de la dernière année, combien de fois vous est-il arrivé de boire au moins cinq consommations par jour (si le client est un homme) ou quatre consommations par jour (s’il s’agit d’une femme) ? • En moyenne, combien de jours par semaine vous arrive-t-il de boire de l’alcool ? De façon générale, combien de verres consommez-vous pendant ces journées ? Recommander au client de maintenir des habitudes de consommation modérée, soit trois consommations ou moins chez l’homme, deux consommations ou moins chez la femme et une consommation ou moins chez la personne âgée (National Institute on Alcool Abuse and Alcoholism, 2005). Recommander une diminution de la consommation d’alcool ou l’abstinence complète chez les clients qui prennent des médicaments qui interagissent avec l’alcool, chez ceux qui sont atteints d’une affection accentuée par l’alcool ou chez la femme enceinte (dans ce cas, recommander l’abstinence). Employer des méthodes diagnostiques rapides an de déceler un problème de consommation d’alcool et de reconnaître les clients qui nécessitent une évaluation plus poussée. Demander au client de répondre aux questions du test AUDIT (Alcohol Use Disorders Identification Test) présentées dans le TABLEAU 6.3 ENCADRÉ 6.3. La démarche quantitative offre l’avantage d’associer un chiffre à chaque réponse an d’éviter qu’il y ait place à une interprétation subjective. Le questionnaire AUDIT permet de déceler les problèmes d’alcool moins graves (consommation dangereuse et consommation nocive), de même que le trouble lié à la consommation d’alcool. Ce test s’avère utile auprès des clients du service d’urgence ou de traumatologie, car il cerne les problèmes d’alcool actuels et non passés. Il se révèle également utile en soins primaires, notamment auprès des adolescents et des personnes âgées. Finalement, ce questionnaire est relativement exempt de biais lié au sexe ou à la culture du client. TABLEAU 6.3 • À partir d’au moins une occurrence de consommation abusive, le client est qualié de consommateur « à risque ». • Comportement à risque : – chez l’homme, 15 consommations ou plus par semaine ou 5 consommations ou plus par occasion ; 6 – chez la femme, 10 consommations ou plus par semaine ou 3 consommations ou plus par occasion. Q uestion de suivi Complétez le test AUDIT de monsieur St-Hilaire à l’aide des données disponibles dans la situation et estimez le niveau de risque selon le résultat obtenu. Les habitudes de consommation dangereuse entraînent un risque élevé d’atteinte éventuelle à la santé physique et mentale du et l’client. Quant à la consommation nocive, elle a déjà donné lieu à des problèmes chez le client. Une version intégrale des questionnaires DÉBA-Alcool et DÉBA-Drogues permettant de déterminer le type de service adapté aux besoins du client peut être consultée au https:// oraprdnt.uqtr.uquebec.ca. Test AUDIT a (Alcohol Use Disorders Identication Test ) QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE INTERPRÉTATION Questions 0 1 2 1. À quelle fréquence consommezvous de l’alcool ? Jamais 1 fois par mois ou moins De 2 à 4 fois par mois 2 ou 3 fois par semaine Au moins 4 fois par semaine 2. Combien de verres standards buvez-vous au cours d’une journée normale où vous buvez de l’alcool ? 1 ou 2 3 ou 4 5 ou 6 De 7 à 9 10 ou plus 3. À quelle fréquence buvez-vous au moins cinq consommations au cours d’une même occasion ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque 4. Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous constaté que vous n’étiez plus capable de vous arrêter de boire après avoir commencé ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque Chapitre 6 3 4 Évaluation de la consommation de substances 131 QUESTIONS TABLEAU 6.3 JUSTIFICATIONS Test AUDIT a (Alcohol Use Disorders Identication Test ) (suite) QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE INTERPRÉTATION Questions 0 1 2 3 4 5. Au cours de la dernière année, combien de fois votre consommation d’alcool vous a-t-elle empêché de faire ce qui était normalement attendu de vous ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque 6. Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous eu besoin d’un premier verre, après une période de forte consommation, pour pouvoir vous remettre en forme ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque 7. Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous eu un sentiment de culpabilité ou des remords après avoir bu ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque 8. Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous été incapable de vous rappeler ce qui s’était passé la soirée précédente parce que vous aviez bu ? Jamais Moins de une fois par mois Une fois par mois Une fois par semaine Tous les jours ou presque 9. Avez-vous été blessé ou quelqu’un d’autre a-t-il été blessé parce que vous aviez bu ? Non Oui, mais pas au cours de la dernière année Oui, au cours de la dernière année 10. Un parent, un ami, un médecin ou un autre professionnel de la santé s’est-il inquiété de votre consommation d’alcool ou a-t-il suggéré que vous la réduisiez ? Non Oui, mais pas au cours de la dernière année Oui, au cours de la dernière année Total a An de reéter le verre standard américain, le nombre de verres énoncé à la question 3 est passé de 6 à 5. Source : Reproduit avec l’autorisation de l’éditeur. Tiré de : Organisation mondiale de la Santé. (2001). AUDIT The Alcohol Use Disorders Identication Test : Guidelines for Use in Primary Care, 2e éd. Repéré à : whqlibdoc.who.int/hq/2001/WHO_MSD_MSB_01.6a.pdf?ua=1 ENCADRÉ 6.3 Fonctionnement du test AUDIT Le questionnaire AUDIT aborde trois thèmes : 1) la consommation d’alcool (questions 1 à 3) ; 2) les habitudes de consommation ainsi que la dépendance (ques tions 4 à 6) ; 3) les conséquences néfastes de la consommation d’alcool (questions 7 à 10). Il suft d’attribuer une note de 0 à 4 à chaque réponse obtenue, puis d’additionner le tout. La note maximale possible est de 40 points. Le questionnaire AUDIT-C constitue une forme abrégée du test. Il s’avère utile dans un contexte de soins aigus ou critiques. Il s’agit d’un test de dépistage valide de la consommation abusive d’alcool et de l’alcoolisme (Bush, Kivlahan, McDonell et collab., 1998). Ce test comprend trois questions portant sur la consommation d’alcool (questions 1 à 3), dont la question 3 qui, en ellemême, constitue un court test de dépistage de la consommation abusive. Cet 132 Partie 1 Évaluation globale de la personne outil permet, en très peu de temps (moins de deux minutes), de faire la différence entre une consommation excessive, une consommation à risque et une consommation à faible risque. La note totale peut être de 0 à 12. Une note de 2 points ou moins représente un faible risque. La valeur seuil de 8 points ou plus chez l’homme et de 4 points ou plus chez la femme, les adolescents et les personnes âgées de plus de 60 ans révèle une consommation dangereuse. De plus, la valeur seuil de 3 points ou plus indique une consommation abusive ou à risque. Finalement, si le client répond qu’il lui est déjà arrivé de boire six consommations ou plus au cours d’une même occasion pendant la dernière année, il s’avère nécessaire de procéder à une évaluation approfondie. QUESTIONS JUSTIFICATIONS Le questionnaire CAGE (Cutdown, Annoyed, Guilty, Eyeopener), convient aux milieux de soins primaires achalan ‑ dés, car il ne prend qu’une minute à remplir, et il est facile pour les professionnels de la santé de se rappeler ses quatre questions directes auxquelles il suft de réponde par oui ou non. Ce questionnaire permet de déceler les problèmes de consommation abusive d’alcool au cours de la vie du client, mais il ne peut aider à distinguer un problème passé d’un problème actuel de consommation (Bush et collab., 1998). De plus, il arrive qu’il ne permette pas aux intervenants de recon‑ naître une faible consommation qui constitue toutefois un comportement à risque, et il s’avère moins efcace auprès des femmes et des minorités (Steinbauer, Cantor, Holzer et col‑ lab., 1998). Une réponse « oui » à deux ques‑ tions ou plus du questionnaire CAGE indique une consommation d’alcool possiblement abusive et la nécessité de procéder à une évaluation approfondie. Évaluer la présence de troubles liés à l’utilisation de l’alcool à l’aide des critères diagnostiques cliniques standards. Déterminer si une habitude de consommation inadaptée donne lieu à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement signicative (APA, 1994 ; National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism, 2005). Poser la question suivante au client : Au cours des 12 derniers mois, votre consommation d’alcool a‑t‑elle causé l’une des situations suivantes ou a‑t‑elle contri‑ bué à ces dernières ? • Si le client répond « oui » à au moins une question, cela signi‑ e qu’il satisfait aux critères diagnostiques de consomma‑ tion abusive. Cela nécessite des conseils et une brève interven‑ tion auprès du client. • Si le client répond « oui » à deux questions ou plus, c’est qu’il satisfait aux critères dia‑ gnostiques du trouble lié à l’utilisation de l’alcool. • Si le client répond « non », il risque tout de même d’être aux prises avec des problèmes liés à sa consommation d’alcool. Cela nécessite des conseils et une brève intervention auprès du client. • Risque de blessure physique (conduite d’une automobile ou fonctionnement d’une machine en état d’ébriété). • Problèmes interpersonnels (famille et amis). • Incapacité à remplir ses obligations (négligence du travail, des études ou des tâches domestiques). • Désir impérieux de consommer (avoir des cravings). • Ne pas être en mesure de respecter la limite xée (limite de consommation dépassée). • Ne pas être en mesure de réduire sa consommation d’al‑ cool ou d’arrêter de boire (nombreuses tentatives infruc‑ tueuses). Q uestion de suivi Remplissez le questionnaire CAGE à l’aide des données contenues dans l’histoire de monsieur St-Hilaire. Que vous indique le résultat obtenu au questionnaire CAGE ? 6 • Présenter une tolérance à l’alcool (besoin de bien plus grandes quantités pour obtenir les mêmes effets). • Présenter des signes de sevrage (tremblements, transpiration, nausées ou insomnie en période d’abstinence ou de diminu‑ tion de la consommation). • Continuer à consommer de l’alcool malgré son problème de consommation (problèmes récurrents d’ordre physique ou psychologique). • Passer beaucoup de temps à boire (ou à se préparer à boire ou à se remettre des effets de l’alcool). • Passer moins de temps à faire autre chose (activités autrefois jugées importantes et agréables). Le questionnaire TWEAK (Russel, Materier et Sokol, 1994) constitue une combinaison des éléments de deux autres ques‑ tionnaires ; il permet de déceler la consommation à risque chez la femme et plus particulièrement chez la femme enceinte. La question relative au sentiment de culpabilité du questionnaire CAGE a été remplacée par une question visant à mesurer la tolérance. Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 133 QUESTIONS JUSTIFICATIONS • (T) Tolérance : combien de verres tolérez-vous ou combien devez-vous en boire avant de ressentir les effets de l’alcool ? • (W) (Worry) Inquiétude : au cours de la dernière année, vos amis ou des membres de votre famille se sont-ils déjà inquiétés ou plaints de votre consommation d’alcool ? • (E) (Eye-opener) Réveil : vous arrive-t-il de boire dès votre réveil ? • (A) Amnésie : quelqu’un vous a-t-il déjà rapporté des choses que vous avez dites ou faites alors que vous aviez bu, mais dont vous êtes incapable de vous souvenir ? • Le fait de devoir prendre trois consommations ou plus avant de ressentir les effets de l’alcool indique une tolérance. • Un pointage de 2 points ou plus révèle un problème lié à la consommation d’alcool. • (K) (Kut down) Diminution : avez-vous parfois l’impression que vous devriez diminuer votre consommation d’alcool ? Une note de 2 points est accordée à chaque réponse positive aux questions portant sur la tolérance et sur l’inquiétude. Pour ce qui est des autres questions, une réponse positive vaut 1 point. Un pointage de 1 point ou moins révèle un comportement à faible risque. Employer le questionnaire SMAST-G (Short Michigan Alcoholism Screening Test-Geriatric) auprès des personnes âgées qui se qualient de buveurs mondains ou qui consomment de l’alcool sur une base régulière, quelle que soit la quantité (Naegle, 2008). Les personnes âgées présentent des réactions émotionnelles et physiques particulières à l’alcool, et les 10 questions de ce test abordent ces réactions. Un pointage de 0 ou de 1 point indique un comportement à faible risque TABLEAU 6.4. TABLEAU 6.4 Un pointage de 2 points ou plus révèle un problème lié à l’alcool et nécessite une évaluation approfondie. SMAST-G (Short Michigan Alcoholism Screening Test-Geriatric) QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE 1. Vous arrive-t-il de sous-estimer votre consommation d’alcool lorsque vous en parlez avec d’autres ? 2. Vous arrive-t-il de ne pas manger ou d’être capable de sauter un repas parce que vous avez pris quelques verres et n’avez pas faim ? 3. Le fait de boire quelques verres atténue-t-il vos tremblements ? 4. Vous arrive-t-il d’avoir de la difculté à vous rappeler une partie de la journée ou de la soirée lorsque vous consommez de l’alcool ? 5. Avez-vous pris l’habitude de boire un verre pour vous détendre ou vous calmer ? 6. Vous arrive-t-il de consommer de l’alcool pour oublier vos problèmes ? 7. Vous est-il déjà arrivé d’augmenter votre consommation d’alcool après avoir subi une perte dans votre vie ? 8. Un médecin ou une inrmière vous a-t-il déjà dit qu’il s’inquiétait de votre consommation d’alcool ? 9. Avez-vous déjà établi des règles en vue de maîtriser votre consommation d’alcool ? 10. Lorsque vous souffrez de solitude, le fait de boire un verre vous aide-t-il à mieux vous sentir ? Pointage total au SMAST-G (de 0 à 10 points) POINTAGE : deux réponses afrmatives ou plus révèlent un problème lié à l’alcool. Source : Tiré de © The Regents of the University of Michigan, 1991 134 Partie 1 Évaluation globale de la personne OUI (1 POINT) NON (0 POINT) QUESTIONS • Utilisez-vous des médicaments d’ordonnance tels que des analgésiques opioïdes, des sédatifs et des stimulants ? Exemples : médicaments pour le traitement du trouble du décit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). • Vous arrive-t-il de prendre plus de médicaments que la dose prescrite ? • Consommez-vous d’autres drogues telles que le cannabis, la cocaïne, l’héroïne, les amphétamines, les hallucinogènes et les inhalants ? Si le client dit consommer une ou plusieurs substances, obtenir les informations suivantes pour chacune d’entre elles. – Quelle quantité de substance consommez-vous (nombre de verres, nombre de joints, poids en grammes, nombre de comprimés) ? – Combien d’argent dépensez-vous (par jour/semaine/mois) ? – À quelle fréquence consommez-vous ? – Depuis quand consommez-vous ? – À quand remonte votre dernière consommation ? – Quelle est la voie d’administration utilisée (orale, nasale, par inhalation, sous-cutanée, intraveineuse [IV]) ? JUSTIFICATIONS Plusieurs médicaments d’ordonnance sont susceptibles d’être consommés de façon problématique en raison de leur effet physiologique agréable (p. ex., le soulagement de l’insomnie avec la prise d’un sédatif). L’évaluation de la consommation de substances psychoactives doit être complète et doit permette de déterminer si la consommation du client augmente ou diminue au cours des entretiens subséquents. – En cas d’inhalation ou d’utilisation de la voie IV, y a-t-il parfois partage du matériel avec d’autres personnes ? Avezvous accès à du matériel stérile ? Le partage de pipes à crack et du matériel d’injection (p. ex., une seringue, un ltre, un contenant de dilution et de chauffage, un garrot) présente un risque de transmission du virus de l’immunodécience humaine (VIH) et de l’hépatite C. La rubrique « Promotion de saines habitudes de vie » traite des programmes d’échange de seringues. • Explorer les raisons pour lesquelles le client consomme ces substances. Qu’est-ce qui motive votre consommation ? Consommez-vous seul ou entre amis ? Quels sont les aspects positifs de votre consommation ? Comment vous sentez-vous après avoir consommé ? Votre consommation a-t-elle eu des conséquences négatives sur votre vie ? Il est fréquent qu’une personne ait recours à la consommation de substances psychoactives pour composer avec le stress, l’anxiété, un événement traumatique (p. ex., un abus physique ou sexuel) ou encore pour soulager les symptômes d’un trouble de santé mentale concomitant (CCLT, 2009). L’inrmière évalue également les déterminants sociaux de la santé : plusieurs études ont démontré, entre autres, qu’un logement instable, un revenu insufsant et l’absence d’un réseau de soutien social sont des facteurs de risque importants des troubles liés à l’utilisation de substances (Galea & Vlahov, 2002). • Avez-vous déjà essayé de réduire ou de cesser votre consommation de substances ? Exemples : participation antérieure dans un programme d’entraide (AA, NA), de désintoxication ou dans un traitement pharmacologique. Les réponses à ces questions peuvent être utiles à la planication ultérieure d’une intervention. Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 6 135 QUESTIONS JUSTIFICATIONS • Avez-vous atteint vos objectifs personnels ? Pendant combien de temps ? Qu’est-ce qui a été utile dans le passé ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné pour vous ? Quelle était la raison de votre rechute ? Il est important de discuter de moyens de prévention de rechute avec un client qui désire réduire ou cesser sa consommation. Une rechute dans la consommation de narcotiques après une période d’abstinence ou de réduction importante de consommation peut causer la mort du client (la diminution de sa tolérance physiologique peut mener à une surdose) (Binswanger, Nowels, Corsi et collab., 2012). Il est primordial d’informer le client de ce risque et de lui recommander de consommer une plus petite quantité de drogues en cas de rechute future (ce risque s’applique également aux personnes incarcérées retournant dans la communauté). • Quel est votre objectif personnel par rapport à votre consommation de substances psychoactives ? Exemples : maintien du niveau actuel de consommation, réduction des méfaits associés à sa consommation, réduction de la consommation, abstinence. L’inrmière doit reconnaître que la consommation de substances psychoactives se retrouve sur un continuum (de l’abstinence à la consommation nocive) et que le client peut ne pas vouloir devenir abstinent pour le moment. L’approche utilisée doit être individualisée et centrée sur les besoins et les objectifs du client. 6.5 Données objectives OBSERVATIONS NORMALES 136 Partie 1 ANOMALIES Les résultats d’analyses de laboratoire fournissent des données objectives relatives à une consommation problématique d’alcool. Ces données s’avèrent moins sensibles et précises que les questionnaires d’autoévaluation, mais elles sont utiles en vue de corroborer les données subjectives. La gamma-glutamyl-transférase (GGT), une protéine sérique, constitue le marqueur biochimique de la consommation d’alcool le plus couramment utilisé. La consommation occasionnelle n’entraîne pas d’augmentation de la concentration de cette protéine, mais la consommation excessive le fait. Cependant, il est important de savoir qu’une maladie hépatique non alcoolique peut également provoquer une augmentation de la concentration de GGT, même en l’absence d’alcool dans l’organisme. La consommation chronique d’alcool à raison de quatre verres par jour ou plus pendant quatre à huit semaines accroît la concentration de GGT de façon considérable. Par ailleurs, quatre ou cinq semaines d’abstinence sont nécessaires pour que la GGT retrouve une valeur normale (National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism, 2002). L’aspartate aminotransférase (AST) est une enzyme présente en forte concentration dans le cœur et le foie. Plusieurs mois de consommation chronique donnent lieu à une augmentation de l’AST. Évaluation globale de la personne OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Issu de l’hémogramme, le volume globulaire moyen (VGM) constitue un indice de la taille des érythrocytes. Le VGM ne représente pas une valeur sufsamment sensible pour servir de biomarqueur, mais il permet toutefois de déceler plus tôt la consommation d’alcool après une longue période d’abstinence que le font les autres valeurs (National Institutes of Health, 2006). Une forte consommation d’alcool pendant quatre à huit semaines entraîne une augmentation du VGM. L’éthylométrie détecte toute quantité d’alcool présente dans l’air expiré à la suite d’une profonde inspiration, et ce, jusqu’à ce que l’ensemble de l’alcool ingéré ait été métabolisé par l’organisme. Cette mesure peut-être corrélée avec le taux d’alcoolémie et constitue la base de l’interprétation juridique de la consommation d’alcool. La valeur normale révélant l’absence d’alcool dans l’organisme est de 0,00. Une éthylométrie ≥ 0,08 % indique une intoxication sur le plan légal dans la plupart des provinces (trois verres standards) et se manifeste par une perte d’équilibre et de coordination. 6 Promotion de saines habitudes de vie Consommation abusive de médicaments d’ordonnance contre le trouble du décit de l’attention avec ou sans hyperactivité Les médicaments d’ordonnance pour traiter le trouble du décit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) gurent parmi les substances les plus couramment consommées de façon abusive. Dans le cadre d’un récent sondage canadien, les jeunes âgés de 15 à 24 ans affichaient le taux le plus élevé de consommation de stimulants d’ordonnance, soit une prévalence de 2,4 % au cours des 12 derniers mois (Centre canadien de lutte contre les toxicomanies [CCLT], 2013). En 2010-2011, 2,2 % des élèves canadiens du secondaire ont afrmé avoir consommé des stimulants d’ordonnance à des ns récréatives, et non thérapeutiques, dans les 12 mois précédant l’enquête (CCLT, 2013). La consommation abusive de ces médicaments survient lorsqu’une personne prend les médicaments prescrits pour quelqu’un d’autre ou lorsqu’elle prend ses propres médicaments, mais d’une manière qui ne respecte pas la posologie. Les médicaments prescrits pour traiter le TDAH sont connus des professionnels de la santé sous leur nom générique (dexamphétamine et méthylphénidate) ou commercial (Dexedrine md ou Adderall md et Ritalin md ou Concerta md). Chez les adolescents et les jeunes adultes, ces médicaments sont également appelés par leur nom anglais dans la langue de la rue, dont les suivants : Skippy, Vitamine R, Cramming Drug (littéralement, la « drogue du bourrage de crâne »), R-Ball, The Smart Drug (la « drogue de l’intelligence »), Bennies, Black Beauties, Roses, Speed ou Uppers. Le méthylphénidate et les amphétamines sont des stimulants fréquemment prescrits pour traiter le TDAH. L’action thérapeutique de ces stimulants consiste à augmenter lentement et progressivement la dopamine, un neurotransmetteur qui intervient dans l’attention. La dose prescrite est généralement faible au départ, puis elle augmente graduellement jusqu’à l’obtention des effets thérapeutiques recherchés, soit atteindre une concentration de dopamine dans le cerveau semblable à celle d’une personne qui n’est pas atteinte du TDAH. La personne qui souffre d’un TDAH est alors capable de se concentrer. Or, lorsque ces médicaments sont pris de façon inadéquate (dose ou voie d’administration différente de celle prescrite), soit en écrasant le comprimé avant de l’inhaler ou de se l’injecter, par exemple, la concentration de dopamine connaît une augmentation rapide et fulgurante. Ce faisant, la neurotransmission normale est perturbée, et il s’ensuit fréquemment un état d’euphorie. Par voie orale, si une personne prend le médicament contre le TDAH à plus forte dose que ne l’indique la posologie, ou si une personne qui n’est pas atteinte du TDAH prend ce type de médicaments, il lui devient possible de rester éveillée et de maintenir un niveau de concentration anormalement élevé (Setlik, Bond et Ho, 2009). Toutefois, une consommation abusive continue ou une surdose de stimulants peut provoquer une anxiété, une panique, des tremblements, une arythmie, une élévation dangereuse de la température corporelle et même une crise cardiaque. De plus, les adolescents et les jeunes adultes qui cessent de prendre ces stimulants peuvent souffrir de fatigue et de dépression, un état qui risque d’ouvrir la voie à la consommation d’autres médicaments, à plus d’abus et à la dépendance. La principale mission du CCLT consiste à mettre le pouvoir de la science au service de la nation de manière à réduire les méfaits de l’alcool et des drogues sur la société. À cet effet, le document Sommaire canadien sur la drogue. Stimulants d’ordonnance présente un survol des dernières données scientiques portant sur ces médicaments d’ordonnance, notamment en ce qui a trait à leur consommation et aux problèmes liés à celle-ci. L’Ordre des pharmaciens du Québec a récemment créé un site Internet dans le cadre d’une campagne de sensibilisation qui porte sur la consommation abusive de médicaments d’ordonnance chez les adolescents, en plus d’afcher des liens vers des ressources utiles à ce sujet. Ce site comprend des renseignements qui s’adressent tant aux adolescents qu’à leurs parents. RÉFÉRENCES Centre canadien de lutte contre les toxicomanies (CCLT) (2013). Sommaire canadien sur la drogue. Stimulants d’ordonnance . Repéré à www.ccsa.ca/ Resource%20Library/CCSA-Prescription-Stimulants-2013-fr.pdf Setlik, J., Bond, G. R., et Ho, M. (2009). Adolescent Prescription ADHD Medication abuse is rising along with prescriptions for these medications. Paediatrics, 124 (3), 875-880. RESSOURCE Ordre des pharmaciens du Québec. Votre ordonnance. Sa dépendance ? Repéré à www.monordonnance.ca Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 137 6.6 Anomalies L’ENCADRÉ 6.4 et le TABLEAU 6.5 présentent les constats et les signes cliniques d’un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues. ENCADRÉ 6.4 Constats liés à la consommation d’alcool ou de drogues Le terme « substance » renvoie aux agents consommés à des fins non médicales en vue de modifier son humeur ou son comportement. • Intoxication : comportement mésadapté produit à la suite de l’ingestion d’une substance qui agit sur le système nerveux central. • Dépendance : assujettissement à une drogue, à une substance toxicomanogène, se manifestant au moment de la suppression de cette dernière par un ensemble de troubles physiques ou psychiques. TABLEAU 6.5 • Consommation abusive : consommation quotidienne nécessaire pour pouvoir fonctionner, incapacité d’arrêter de consommer, perturbation du fonctionnement social et professionnel, consommation récurrente malgré la présence d’un danger physique, problèmes d’ordre juridique liés à la consommation. • Tolérance : augmentation nécessaire de la quantité consommée an d’obtenir les effets recherchés. • Sevrage : ensemble de symptômes physiologiques produit par l’arrêt de la consommation d’une substance. Signes cliniques révélant un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues SUBSTANCE INTOXICATION SEVRAGE Alcool • Apparence : démarche mal assurée, manque de coordination, nystagmus, rougeur du visage • Comportement : sédation, soulagement de l’anxiété, détachement, manque de jugement, comportement exubérant et désinhibé, verbomanie, troubles d’élocution, troubles de mémoire, irritabilité, dépression, labilité émotionnelle • Sans complications. (Survient rapidement après l’arrêt de la consommation, atteint un sommet au deuxième jour, puis s’améliore au quatrième ou au cinquième jour.) Forts tremblements des mains, de la langue et des paupières, anorexie, nausées et vomissements, malaise, hyperactivité de la fonction autonome (tachycardie, transpiration, ↑ PA), céphalée, insomnie, anxiété, dépression ou irritabilité, hallucinations ou illusions temporaires • Sevrage de l’alcool ou délire alcoolique (delirium tremens). (Bien moins courant que le sevrage sans complications ; survient au cours de la première semaine suivant l’arrêt de la consommation.) Tremblements forts et irréguliers, hyperactivité marquée de la fonction autonome (tachycardie, transpiration), vives hallucinations, délire, agitation, èvre Sédatif et hypnotiques (benzodiazépines) • Semblable à l’alcool • Apparence : démarche mal assurée, manque de coordination • Comportement : verbomanie, troubles d’élocution, inattention, troubles de mémoire, irritabilité, labilité émotionnelle, agressivité sexuelle, manque de jugement, perturbation du fonctionnement social ou professionnel • Anxiété ou irritabilité, nausées ou vomissements, malaise, hyperactivité de la fonction autonome (tachycardie, transpiration), hypotension orthostatique, forts tremblements des mains, de la langue et des paupières, insomnie marquée, convulsions Nicotine • Apparence : ↑ vigilance, ↑ PA systolique, ↑ FC, vasoconstriction • Comportement : nausées, vomissements, indigestion (première fois) ; perte d’appétit, vertiges, étourdissements, sensation d’agitation, stimulation modérée • Vasodilatation, maux de tête, colère, irritabilité, frustration, anxiété, nervosité, réveil au cours de la nuit, difcultés de concentration, dépression, faim, impatience ou agitation, désir de fumer Cannabis (marijuana) • Apparence : rougeur des yeux, tachycardie, sécheresse buccale, ↑ appétit, goût particulier pour la malbouffe, manque de coordination et d’équilibre • Aucun symptôme de sevrage si la consommation est occasionnelle. Sevrage léger en présence d’une forte consommation chronique : irritabilité, perturbation du sommeil, perte de poids, perte d’appétit, transpiration 138 Partie 1 Évaluation globale de la personne TABLEAU 6.5 Signes cliniques révélant un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues (suite) SUBSTANCE INTOXICATION SEVRAGE • Comportement : euphorie, sensation agréable de détente et de tranquillité, perception temporelle ralentie, ↑ perceptions sensorielles, manque de jugement, retrait social, anxiété, soupçons ou paranoïa Cocaïne (y compris le crack) • Apparence : dilatation des pupilles, tachycardie ou bradycardie, ↑ ou ↓ PA, transpiration, frissons, nausées et vomissements, perte de poids, nombreuses marques d’aiguille (si utilisation par voie IV) • Comportement : euphorie, verbomanie, hypervigilance, agitation (« fait les cent pas »), agitation psychomotrice, perturbation du fonctionnement social ou professionnel, tendance à vouloir se battre, idées de grandeur, hallucinations visuelles ou tactiles • Humeur dysphorique (anxiété, dépression, irritabilité), fatigue, insomnie ou hypersomnie, agitation psychomotrice Amphétamines • Semblable à la cocaïne • Apparence : dilatation des pupilles, tachycardie ou bradycardie, ↑ ou ↓ PA, transpiration ou frissons, nausées et vomissements, perte de poids • Comportement : exaltation, verbomanie, hypervigilance, agitation psychomotrice, tendance à vouloir se battre, idées de grandeur, manque de jugement, perturbation du fonctionnement social et professionnel • Humeur dysphorique (anxiété, dépression, irritabilité), fatigue, insomnie ou hypersomnie, agitation psychomotrice Opioïdes (morphine, héroïne, hydromorphone, mépéridine) • Apparence : contraction des pupilles, ↓ PA ↓ pouls, ↓ fréquence respiratoire et ↓ température corporelle, marques d’aiguille (si utilisation par voie IV) Note : si la fréquence respiratoire du client est < 12 Resp./min et qu’il y a une altération importante du niveau de conscience, il est possible qu’il s’agisse d’une surdose (overdose). Cette situation urgente nécessite une intervention (p. ex., l’administration d’oxygène ou de naloxone, un antidote des opioïdes) • Comportement : léthargie, somnolence, troubles d’élocution, euphorie initiale suivie d’une apathie, d’une dysphorie et d’un retard psychomoteur, inattention, troubles de la mémoire, manque de jugement, perturbation du fonctionnement social et professionnel • Dilatation des pupilles, larmoiement, écoulement nasal, tachycardie, èvre, ↑ PA, horripilation, transpiration, diarrhée, bâillements, insomnie, agitation, irritabilité, dépression, nausées, vomissements, malaise, tremblements, douleurs musculaires et articulaires ; symptômes s’apparentant beaucoup à ceux du tableau clinique de la grippe Promotion de saines habitudes de vie Évaluation de la consommation de drogue du client En évaluant la consommation de drogue du client, l’inrmière lui pose des questions quant aux voies d’administration utilisées. Si le client indique qu’il consomme des drogues par voie IV, l’infirmière doit s’assurer qu’il a accès à de l’équipement propre (p. ex., des seringues, de l’eau stérile, des tampons d’alcool, un garrot, des filtres) et qu’il possède une bonne connaissance des techniques d’injection sécuritaires. Plusieurs villes canadiennes ont des programmes d’échange de seringues où les personnes qui consomment des drogues peuvent se procurer l’équipement nécessaire. Ces programmes s’inscrivent dans une approche appelée réduction des méfaits ; elle vise à minimiser les conséquences négatives de comportements à risque (p. ex., le VIH, les hépatites virales, une cellulite, un abcès dans le cas de la consommation de drogues injectables) sans nécessairement exiger que le client devienne abstinent (AIIC, 2011). L’inrmière devrait être en mesure d’orienter le client vers le programme d’échange de seringues et de lui fournir de l’information quant aux techniques d’injection plus sécuritaires. Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 139 6 Évaluation de la consommation de drogue du client (suite) CATIE est un organisme canadien qui rend accessible l’information à jour et impartiale sur le VIH et l’hépatite C. Il offre entre autres des ressources quant à la réduction des méfaits chez les utilisateurs de drogues injectables. L’inrmière peut utiliser les nombreuses ressources an de donner un enseignement approprié au client. Ces ressources sont disponibles au www.catie.ca/fr/prevention/utilisation-drogues. RÉFÉRENCE Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) (2011). La réduction des méfaits et les drogues actuellement illicites : Implications pour les politiques, la pratique, la formation et la recherche en soins infirmiers. Repéré à http://cna-aiic.ca/~/media/cna/page-content/pdf-fr/harm_ reduction_2011_f.pdf Évaluation et jugement clinique Dossier : Michel St-Hilaire (suite) Monsieur St-Hilaire est hospitalisé depuis deux jours. Vous remarquez qu’il parle peu et qu’il n’a pas adressé la parole à son voisin de chambre une seule fois depuis son arrivée. Vous lisez dans les notes au dossier qu’il dort en moyenne de deux à quatre heures par nuit et que son sommeil est agité. Vous observez monsieur St-Hilaire alors qu’il est alité et vous remarquez qu’il est très maigre (1,85 m, 62 kg). Il n’a presque rien mangé au déjeuner, seulement une demi-rôtie, et il a bu deux cafés. Après s’être mouché, il a saigné du nez. Il dit ne pas avoir d’appétit : « Je n’ai plus faim depuis un bout de temps. Je n’ai plus d’énergie et je n’ai plus de plaisir à faire mon travail non plus. » Vous observez des tremblements aux mains. Vous le questionnez de nouveau sur sa consommation d’alcool, et il vous cone que dans les dernières semaines, il buvait régulièrement de six à neuf bières chaque jour. Vous croisez son ex-conjointe dans le corridor. « Je suis passée chez lui pour récupérer des effets personnels. Je crois que son problème d’alcool est pire qu’avant. Dans les dernières semaines où j’étais encore avec lui, il lui arrivait assez souvent de ne pas manger au souper, il s’installait plutôt devant la télé avec une bière jusqu’à ce qu’il aille se coucher vers minuit. Selon moi, il devait en boire trois ou quatre chaque soir. Par contre, j’ai regardé tantôt dans le frigo, et il était presque vide si l’on exclut la bière qui s’y trouvait. La maison est sale comme jamais, et il y a des bouteilles vides partout dans le salon », vous rapporte-t-elle. 1. Considérant que monsieur St-Hilaire est aux prises avec un problème de consommation d’alcool depuis plus de six mois, dites ce que vous devriez observer relativement aux examens paracliniques suivants : GGT, AST, volume globulaire moyen, éthylométrie. 2. Monsieur St-Hilaire présente-t-il des signes de sevrage ? Si oui, lesquels ? 3. Que pourrait-il se produire si aucune action n’est entreprise pour traiter le sevrage de monsieur St-Hilaire ? 4. De quel trouble mental souvent associé au problème de consommation d’alcool monsieur St-Hilaire est-il susceptible d’être atteint ? 5. Relevez les critères du trouble lié à l’utilisation de l’alcool que présente monsieur St-Hilaire selon le DSM-5. 140 Partie 1 Évaluation globale de la personne Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Pourquoi est-il important de questionner systématiquement les clients par rapport à leurs habitudes de consommation ? 2. Quels sont les outils à votre disposition pour évaluer la consommation d’alcool chez un adulte et que permettent-ils d’évaluer ? 3. Pourquoi est-il important d’évaluer les habitudes de consommation d’alcool et d’autres substances chez une femme enceinte ou qui désire l’être ? 6. Expliquez pourquoi les personnes âgées présentent un risque accru si elles consomment de l’alcool de façon abusive. 4. Que risque-t-il de se produire si une femme enceinte consomme de l’alcool pendant sa grossesse ? 7. Quel outil pouvez-vous utiliser pour évaluer la consommation d’alcool chez une personne âgée ? 5. Que risque-t-il de se produire si une femme enceinte consomme des drogues illicites durant sa grossesse ? Chapitre 6 Évaluation de la consommation de substances 6 141 Dossier : Korina Beauregard Les parents Beauregard se présentent à l’urgence avec la petite Korina, leur llette âgée de trois ans. La mère, Sandrine, vous raconte que Korina est tombée alors qu’elle courait dans la maison avec son trotteur plus tôt cet après-midi. Depuis, elle est pleurnicharde et elle n’a pas dormi pendant sa sieste. Vous questionnez la mère sur les circonstances de l’accident, et Michel, son conjoint, vous répond que Korina est tombée sur le coude gauche sur le plancher de la cuisine après qu’elle a heurté un obstacle avec son trotteur. Vous procédez à l’examen physique de Korina. Lorsque vous vous approchez d’elle, la fillette adopte une position défensive et de retrait. Elle vous regarde d’un air méant, elle vous semble triste et anxieuse. Vous retirez son chandail et vous observez son coude gauche. Celui-ci est œdématié, et vous constatez des éraures sur la face externe. Il est impossible de mobiliser son bras en raison de la douleur. Vous poursuivez l’examen physique et vous constatez que Korina présente quelques anciennes ecchymoses jaunâtres sur les jambes. Sa mère vous explique nerveusement que sa lle La violence conjugale et la maltraitance envers les enfants et les aînés constituent d’importants problèmes sociaux que les professionnels de la santé doivent pouvoir reconnaître et évaluer. Au Québec, la Loi sur la protection de la jeunesse (c. P-34.1) et la Politique d’intervention en matière de violence conjugale (ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 1995) assurent un certain cadre de protection pour les jeunes et les enfants. Aussi, à l’instar de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l’Ontario, de l’Île-duPrince-Édouard et de l’Alberta (Gnaedinger, 1989), le Québec s’est doté d’outils et de stratégies an de disposer de ressources adaptées pour l’intervention contre la maltraitance envers les aînés. Au cours des dernières années, ces outils se sont multipliés dans la province. En particulier, le ministère de la Famille et des Aînés (2010) a mis sur pied une panoplie d’actions regroupées dans un plan (pour 2010-2015) destiné à contrer la maltraitance envers les personnes aînées. En outre, les conseils, tables de concertation et groupes de recherche ont proliféré an de produire de nouvelles analyses et de mieux appuyer la création de politiques publiques et de plans d’intervention adaptés à la réalité des aînés. Parallèlement à ce regain d’intérêt pour la question des personnes âgées, il faut rappeler que, comme tout autre citoyen québécois, celles-ci sont protégées par la Charte des droits et libertés de la personne, le Code est tombée de son lit il y a environ une semaine. Puisque celle-ci ne s’est pas plainte par la suite, elle n’avait pas jugé bon de consulter à ce moment. La taille et le poids de Korina sont normaux pour son groupe d’âge, son développement langagier vous apparaît toutefois inférieur à la moyenne, et elle vous semble peu curieuse et renfermée, contrairement aux autres enfants de cet âge que vous voyez habituellement. 7 La mère, âgée de 23 ans, vous semble attentionnée envers sa lle, et elle se sent responsable de ces accidents. Michel, 24 ans, n’est pas le père biologique de Korina, il est le nouveau conjoint de la mère depuis environ 8 mois, à la suite du divorce de celle-ci. À la n de l’entrevue, vous les informez que le médecin viendra évaluer Korina sous peu. Vous remarquez à ce moment que la mère a de la difculté à se lever, elle semble courbaturée. Vous remarquez aussi la présence de près d’une dizaine de petites marques circulaires sur son avant-bras droit. Lorsque vous la questionnez à ce sujet, elle vous mentionne qu’elle s’est brûlée en fumant. civil du Québec et le Code criminel. Les principaux organismes de soins inrmiers et médicaux tels que l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec et le Collège des médecins du Québec ont mis sur pied des politiques relatives à cette question et reconnaissent la nécessité pour les professionnels de la santé d’évaluer la violence familiale. En somme, la violence et la maltraitance à l’égard des enfants et des aînés constituent des formes de violence qui incitent les intervenants à concevoir des stratégies et des plans d’intervention adaptés à ces populations plus vulnérables. 7.1 Dénition de la violence conjugale Il existe plusieurs dénitions de la violence conjugale ; certaines sont de nature scolaire (voir notamment Saltzman, Fanslow, McMahon et collab., 1999), d’autres proviennent d’instances gouvernementales. Dans le cadre de ce chapitre, la dénition retenue s’inspire de celle du MSSS : la violence conjugale est la violence faite au sein du couple. Il s’agit d’une forme de pouvoir exercée par un conjoint pour dominer l’autre, et elle peut prendre diverses formes : psychologique, verbale, physique, économique, émotionnelle et même sexuelle. Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 143 En somme, cette violence conjugale revêt plusieurs dimensions selon le MSSS. • Une violence psychologique qui se traduit par l’humiliation de l’autre, la dévalorisation, le dénigrement, le mépris, le chantage et l’isolement de la personne violentée. • Une violence verbale qui se manifeste dans les insultes, les hurlements, les propos dégradants et les menaces du partenaire violent (la violence verbale est le corollaire de la violence psychologique). • Une violence physique qui se manifeste par des sévices de toutes sortes (bousculade, morsure, brûlure, fracture, voire homicide) et qui démontre la domination de l’agresseur. Q uestion de suivi Dans le cas de Korina, quel type de violence suspectez-vous ? • Une violence sexuelle qui se manifeste par des agressions sexuelles, du harcèlement, de l’intimidation, de l’humiliation et de la brutalité dans une relation sexuelle non consentie. • Une violence économique qui se traduit par la construction d’une situation de dépendance du conjoint engendrée par le contrôle, voire la privation des ressources nancières nécessaires aux soins et au fonctionnement de la vie familiale. 7.2 Dénition de la maltraitance et de la négligence envers les enfants Au Québec, un instrument légal encadre la protection des enfants mineurs. Ainsi, la Loi sur la protection de la jeunesse fournit de l’information aux intervenants et aux professionnels de la santé quant aux procédures et aux recours légaux existants pour garantir l’intégrité physique et mentale de l’enfant. Aux termes de cette loi, la maltraitance et la négligence renvoient plus spéciquement aux actes qui compromettent sa sécurité et son développement, voire au risque que le milieu familial (parent, tuteur, adulte responsable) lui porte préjudice. Q uestion de suivi Quels éléments évoqués dans la situation de Korina pourraient vous laisser croire à de la maltraitance envers cette enfant ? L’article 38 de cette loi stipule d’ailleurs ceci : « Pour l’application de la présente loi, la sécurité ou le développement d’un enfant est considéré comme compromis lorsqu’il se retrouve dans une situation d’abandon, de négligence, de mauvais traitements psychologiques, d’abus sexuels ou d’abus physiques ou lorsqu’il présente des troubles de comportement sérieux. » Plus concrètement, la négligence et les mauvais traitements peuvent revêtir plusieurs facettes : • la négligence renvoie au défaut de combler les besoins de base de l’enfant, sur les plans physique, éducatif, médical et émotionnel ; • la violence physique correspond aux blessures corporelles consécutives au fait de donner des coups 144 Partie 1 Évaluation globale de la personne de poing ou des coups de pied à l’enfant, de le mordre, de le brûler, de le secouer ou à tout autre préjudice qui lui est inigé. Même si le parent ou la personne qui a la garde de l’enfant n’a pas l’intention de lui nuire, ces actes sont considérés comme de mauvais traitements ; • la violence sexuelle inclut les caresses aux organes génitaux de l’enfant, l’inceste, la pénétration, le viol, la sodomie, la grossière indécence et l’exploitation commerciale au moyen de la prostitution ou de la production de matériel pornographique ; • la violence psychologique est un mode de comportement qui nuit à l’enfant dans son développement affectif ou dans son estime de soi. Elle comprend souvent l’humiliation, le rejet, les menaces et les privations affectives (manque de soutien ou d’amour). 7.3 Dénition de la maltraitance et de la négligence envers les personnes âgées Les codes de déontologie, les procédures et les protocoles d’intervention indiquent la marche à suivre si un professionnel de la santé reconnaît les signes de mauvais traitements chez une personne. Comme il est obligatoire de rapporter les cas de sévices, il faut seulement avoir des raisons de penser que la maltraitance ou la négligence envers une personne âgée ont eu lieu an de faire appel aux autorités. Le personnel inrmier, les médecins et les travailleurs sociaux ont tort de croire qu’ils doivent avoir la preuve du mauvais traitement avant de le signaler aux autorités compétentes. Il est important que les professionnels inrmiers ainsi que les intervenants sociaux œuvrant dans les communautés frontalières (Canada/ÉtatsUnis, Québec/Ontario, Québec/ Nouveau-Brunswick, Québec/Terre-Neuve-et-Labrador) rapportent les cas de sévices aux autorités compétentes an que la victime soit prise en charge par son réseau de santé et de services sociaux le plus tôt possible. Les inrmières travaillant dans ces milieux particuliers ont tout intérêt à connaître leurs homologues des communautés voisines an de s’assurer que le cas est reconnu et que la personne est prise en charge rapidement. Bien que les dénitions précises de la maltraitance et de la négligence envers les personnes âgées varient selon les pays, les provinces, les professions et les protocoles propres aux différents établissements, l’American Medical Association (AMA) a mis au point une liste de dénitions cliniquement utile TABLEAU 7.1 (Aravanis, Adelman, Breckman et collab., 1992). Aux États-Unis, le National Research Council (Bonnie et Wallace, 2003) suggère ces dénitions de la violence contre les aînés : TABLEAU 7.1 Maltraitance et négligence envers les personnes âgées selon l’American Medical Association TYPE DE MALTRAITANCE DÉFINITION Sévices physiques Actes violents qui se traduisent ou qui pourraient se traduire par des blessures, des douleurs, des déciences ou des maladies. Négligence physique Carence en matière de soins, de médicaments, d’hygiène, de nourriture ou d’un abri décent engendrée par l’inattention involontaire ou délibérée d’un membre de la famille ou d’un soignant. Violence psychologique Comportements qui provoquent de l’angoisse chez la personne âgée. Négligence psychologique Inattention involontaire ou délibérée menant à une carence de stimulation sociale de base. Abus nancier Mauvaise utilisation délibérée des ressources nancières ou matérielles de la personne âgée sans son consentement éclairé. Négligence nancière Non-utilisation des capitaux de la personne âgée pour lui fournir les services requis. 7 Source : Adapté d’Arvanis et collab. (1992) • des actions intentionnelles qui causent des blessures ou qui constituent des risques importants pour la sécurité d’un aîné vulnérable (que ces gestes soient posés dans l’intention ou non de le blesser). Ces gestes sont normalement commis par un aidant ou par une personne qui bénécie de la conance de cet aîné. • l’incapacité par une personne aidante ou par toute personne qui est responsable d’un aîné et qui bénécie de sa conance de lui fournir des soins satisfaisants, de répondre à ses besoins minimaux ou de le protéger. Au Québec, le Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance à l’égard des personnes aînées 2010-2015 propose une autre dénition admise de la maltraitance des aînés : « Il y a maltraitance quand un geste singulier ou répétitif, ou une absence d’action appropriée, se produit dans une relation où il devrait y avoir de la conance et que cela cause du tort ou de la détresse chez une personne aînée. » (ministère de la Famille et des Aînés, 2010, p. 17) Cette dénition est une traduction libre et une reformulation des esquisses de dénition proposées par l’Organisation mondiale de la Santé qui se penchait sur la question dès 2002. 7.4 Effets physiques de la violence Selon les études américaines de Tjaden et Thoennes (2000), un peu plus de 1 000 000 de femmes aux États-Unis seraient physiquement ou sexuellement agressées par leur conjoint. Ces chercheurs afrment que de 5 à 51 % des femmes américaines seront victimes de violence conjugale au moins une fois dans leur vie, le taux moyen se situant entre 25 et 35 %. Aussi élevés que soient ces chiffres, ils représentent une sous-estimation de la véritable fréquence de la violence conjugale, notamment en ce qui concerne les données liées aux crimes. Les femmes sont beaucoup plus susceptibles d’être agressées physiquement ou sexuellement par un partenaire intime actuel ou antérieur que par une connaissance, un membre de la famille, un ami ou un étranger (Rennison, 2003 ; Tjaden et Thoennes, 2000). Au Québec, 19 371 personnes ont subi de la violence dans un contexte conjugal en 2012 (ministère de la Sécurité publique, 2012). Ces chiffres représentent non pas des statistiques, mais bien des actes rapportés aux services policiers. Dans un portrait statistique, l’Institut de la statistique du Québec (2011) indique que 121 900 Québécoises ont connu une forme mineure ou majeure de violence au sein d’une relation conjugale. La violence conjugale représentait près du quart des actes criminels rapportés aux corps policiers du Québec. Depuis 2008, ces actes de violence augmentent considérablement, alors que les crimes contre la personne ont tendance à diminuer de près de 5 % par an. La violence conjugale est également une réalité qui s’exprime de manière différente selon la situation géographique. En 2012, la Côte-Nord, l’Abitibi-Témiscamingue et l’Outaouais gurent au sommet du palmarès des taux les plus élevés de violence conjugale par 100 000 habitants. Pour la même année, les taux de violence conjugale de ces régions sont en fait au-delà de deux fois plus élevés que ceux des régions comme le Bas-Saint-Laurent, l’Estrie ou Chaudière-Appalaches (ministère de la Sécurité publique, 2012). Chapitre 7 Q uestion de suivi À la lumière de ces données, qui serait le premier suspect qui vous viendrait en tête concernant les petites marques circulaires sur l’avant-bras de la mère de Korina, madame Beauregard ? Quel est votre rôle comme inrmière dans ce cas-ci ? Évaluation de la violence familiale 145 Q uestion de suivi En tant qu’inrmière, quel est votre devoir dans la situation de Korina ? En 2007, aux États-Unis, les services de protection de l’enfance ont dépisté 794 000 enfants victimes de maltraitance. Parmi ces enfants, une proportion d’environ 59 % ont été négligés, 11 % ont subi des violences physiques, 8 % ont été victimes de sévices sexuels, 8 % ont été émotionnellement ou psychologiquement maltraités, et environ 1 % étaient médicalement négligés (U.S. Department of Health and Human Services, 2009). Le décès d’environ 1 760 enfants pour cause de mauvais traitements a été conrmé. Les jeunes enfants constituent la majorité de ces décès : plus de 80 % des enfants décédés des suites de maltraitance étaient âgés de moins de 4 ans. Bien qu’un certain nombre d’enfants soient blessés par des personnes extérieures à la famille et qui en ont la garde, environ 70 % des enfants blessés l’ont été par un ou par les deux parents. Au Québec, selon le bilan des directeurs de la protection de la jeunesse, en 2013-2014, les centres jeunesse du Québec ont reçu 82 919 signalements. De ce nombre, 32 661, soit 42,3 % des signalements, ont été retenus : 7 550 enfants ont été suivis pour négligence, 119 pour abandon, 1 822 pour sévices sexuels, 6 889 pour mauvais traitements physiques et les autres pour troubles de comportement ou autres difcultés (Association des centres jeunesse du Québec, 2014). Comme dans les cas de violence envers les personnes âgées, des motifs raisonnables de croire qu’un enfant a été maltraité sont sufsants pour faire un rapport aux autorités compétentes. Attendre qu’un diagnostic de maltraitance soit établi peut mettre les enfants en danger de subir d’autres formes de violence et de blessures. Une somme considérable de travaux réalisés au cours de la dernière décennie a permis d’établir que la violence conjugale a un effet indéniable sur la santé à long terme des femmes (Sheridan, Nash, Poulos et collab., 2009). Les blessures constituent de toute évidence le risque de première importance pour leur santé. Les blessures cutanées sont causées par des coups, des pressions ou encore par des objets tranchants. Les blessures par coups sont les plus fréquentes chez les victimes de violence conjugale (Sheridan et Nash, 2007). On parle de lacérations lorsque ces coups nissent par déchirer les tissus de la peau. Lorsqu’un instrument tranchant est utilisé (p. ex., un couteau, un rasoir, un scalpel, du verre), il s’agit plutôt de coupure ou d’incision. La strangulation est également une forme physique de l’expression de la violence conjugale dont les signes sont reconnaissables sur le corps des victimes (Sheridan, 2007 ; Sheridan et collab., 2009 ; Taliaferro, Hawley, McClane et collab., 2009). Selon plusieurs études, les femmes victimes de violence sont plus sujettes aux problèmes de santé chroniques, y compris les troubles neurologiques, gastro-entérologiques et gynécologiques ainsi que la douleur chronique (Campbell, 2002 ; Nicholaidis et Liebschutz, 2009). Il a aussi été démontré que 146 Partie 1 Évaluation globale de la personne les femmes victimes de violence visitent plus souvent les professionnels de la santé que les autres femmes, ce qui a des conséquences à la hausse sur les coûts des soins de santé. Sur le plan de la santé mentale, les femmes violentées ont plus de tendances suicidaires et souffrent également davantage de dépression, de symptômes liés à l’état de stress post-traumatique (ESPT), ainsi que de problèmes de toxicomanie (Warsaw, Brashler et Gill, 2009). Les relations sexuelles forcées qui accompagnent les violences physiques dans 40 à 45 % des cas contribuent à une foule de problèmes de santé associés à la fonction de reproduction : les douleurs pelviennes chroniques, les grossesses non désirées, les infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), dont le virus de l’immunodécience humaine (VIH), et les infections urinaires (Campbell et Soeken, 1999a). Les sévices subis au cours de la grossesse représentent également un risque important pour la santé, car ils ont de graves conséquences à la fois pour la femme enceinte (p. ex., la dépression, la toxicomanie) et pour l’enfant (p. ex., une insufsance pondérale à la naissance, un risque accru d’être victime de violence) (Goodman, 2009 ; Murphy, Schei, Myhr et collab., 2001). Bien que plus de la moitié des femmes maltraitées disent avoir été blessées, de 25 à 30 % d’entre elles seulement déclarent avoir effectivement cherché à obtenir des soins de santé pour l’une des blessures subies (Saltzman et Houry, 2009). Toutefois, la majorité des femmes victimes de violence (80 %) disent avoir consulté des professionnels de la santé pour une raison quelconque, que ce soit pour subir des examens ou pour l’un des problèmes de santé décrits précédemment. Parce que de nombreuses femmes maltraitées ne sont pas encore prêtes à chercher de l’aide auprès d’un centre d’hébergement ou du système de justice, le réseau de la santé peut devenir un point de contact extrêmement important pour les sortir du cycle de la violence. En reconnaissant les sévices inigés le plus tôt possible, les intervenants peuvent espérer atténuer ou éviter la violence et, à long terme, minimiser ou enrayer les problèmes de santé qui y sont associés. Les effets sur la santé de la maltraitance inigée aux personnes âgées ne sont pas aussi bien documentés que ceux liés à la violence conjugale ou aux mauvais traitements envers les enfants. Les complications découlant de blessures intentionnelles peuvent aller d’une légère douleur et de l’inconfort à des traumatismes causant la mort (Dyer, Connolly et McFeely, 2003). Les saignements consécutifs à des blessures intentionnelles peuvent entraîner des changements majeurs dans l’homéostasie circulatoire, ce qui conduit à d’importantes uctuations de la pression artérielle et du pouls, à un état de choc, voire au décès. Les infections localisées peuvent évoluer vers une septicémie généralisée et causer la mort, dans le cas de personnes vieillissantes immunodéprimées. Une agression et le stress qui s’ensuit peuvent entraîner des complications cardiaques. Toutes les ITSS et les problèmes associés aux violences sexuelles ont les mêmes incidences chez les femmes âgées que chez les plus jeunes. En outre, les femmes ménopausées ont les muqueuses vaginales plus fragiles, un effet secondaire de la diminution de la production d’œstrogènes (Poulos et Sheridan, 2008). Les sévices physiques que subissent les personnes âgées sont souvent jumelés avec de la négligence. Celle-ci, intentionnelle ou non, peut se manifester par des symptômes de déshydratation et de malnutrition. Ainsi, il arrive que plusieurs membres de la famille ou d’autres personnes s’occupant de la personne âgée la privent de façon consciente et malveillante de nourriture, d’eau, de médicaments et des nécessités de base ; ils peuvent même voler les avoirs nanciers de gens âgés dépendants. Ce type de négligence est souvent de nature criminelle. Des membres de la famille ou des personnes qui travaillent avec une personne âgée peuvent aussi être aux prises avec leurs propres problèmes de santé, sur le plan physique ou cognitif. Malgré leurs bonnes intentions, ils font parfois preuve de négligence non intentionnelle envers l’aîné. Même si elle n’est généralement pas considérée comme un crime, la négligence involontaire doit être signalée à des organismes de protection des adultes. Par exemple, les centres locaux de services communautaires (CLSC) peuvent fournir de l’aide. Par ailleurs, l’autonégligence suscite des questions au sujet du droit de la personne âgée à vivre de manière autonome ; ces questions demeurent souvent sans réponse, car il est difcile de statuer entre l’obligation sociale de s’occuper d’une personne soi-disant incapable de prendre soin d’elle-même et le droit de celle-ci à demeurer autonome. Toutefois, les soupçons d’autonégligence doivent aussi être rapportés aux services de protection des adultes. Il existe de nombreux effets possibles à long terme sur les plans physique et psychologique de la maltraitance envers les enfants. Les conséquences immédiates peuvent inclure un éventail de blessures physiques telles que les ecchymoses, les fractures et les lacérations, et cela peut aussi comprendre des sévices importants comme le syndrome du bébé secoué. De plus, des formes graves de mauvais traitements peuvent causer le décès ou entraîner des incapacités de longue durée telles que l’arriération mentale, la cécité et l’invalidité physique. La maltraitance à l’égard de l’enfant peut avoir des effets sur son développement en brisant le lien d’attachement entre celui-ci et la personne qui en prend soin (Arnow, 2004 ; Corso, Edwards, Fang et collab., 2008). La maltraitance à répétition peut conduire à des changements dans la structure et la chimie du cerveau, ce qui peut mener à long terme à des problèmes physiques, psychologiques, affectifs et sociaux, puis à un dysfonctionnement cognitif à l’âge adulte (Hagele, 2005). Les enfants victimes de violence sont 11 fois plus susceptibles d’être arrêtés pour des crimes violents quand ils sont mineurs et 2,7 fois plus susceptibles d’être appréhendés pour avoir commis des crimes violents au cours de leur vie d’adulte (English, Widom et Brandford, 2004). Environ un tiers des enfants maltraités feront subir des sévices physiques à leurs propres enfants. Aux États-Unis, deux personnes sur trois inscrites aux programmes de traitement de la toxicomanie rapportent avoir été victimes de sévices au cours de leur enfance. 7 Voici des exemples de facteurs de risque qui peuvent contribuer à la maltraitance envers les enfants (Child Welfare Information Gateway, 2007) : • une décience ou des retards mentaux chez l’enfant qui risquent d’augmenter le fardeau de la personne qui en prend soin ; • l’isolement social des familles ; • le manque de compréhension des parents quant au développement de l’enfant et de ses besoins ; • une histoire de violence familiale des parents ; • la pauvreté et les autres problèmes socioéconomiques tels que le chômage ; • la désorganisation familiale, son éclatement et la violence, notamment conjugale ; • le manque de cohésion familiale ; • l’abus de consommation de substances dans la famille ; • de jeunes parents, un parent non biologique ; • une mauvaise relation parent-enfant et des interactions négatives ; • les pensées et les émotions des parents entraînant des comportements de maltraitance ; • le stress et la détresse des parents, comme la dépression ou d’autres problèmes de santé mentale ; • la violence dans la communauté. Q uestion de suivi Quels sont les facteurs de risque de maltraitance ou de violence envers les en‑ fants dans la situation de Korina ? Malgré le fait que certains facteurs de risque soient reconnus pour entraîner la maltraitance envers les enfants, une étude portant sur des cas non dépistés de traumatismes crâniens a relevé plusieurs facteurs signicatifs liés à la non-reconnaissance de ces blessures (Jenny, Hymel, Ritzen et collab., 1999). Ces chercheurs ont ainsi constaté que les cas non dépistés de violence physique ayant causé des blessures à la tête surviennent plus souvent chez les enfants blancs que chez les enfants des minorités culturelles, de même que chez les enfants vivant avec les deux parents, ainsi que chez les jeunes enfants et chez ceux présentant des symptômes moins apparents. Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 147 7.5 Dépistage de la violence conjugale son contenu an de l’adapter à son milieu de soins de santé ENCADRÉ 7.1. Le dépistage systématique et généralisé de la violence conjugale consiste à demander à toute femme, chaque fois qu’elle se présente dans un milieu de soins de santé, si elle a été maltraitée par son mari, un petit ami, un autre partenaire ou un ex-partenaire. La majorité d’entre elles, maltraitées ou non, disent être favorables à un dépistage systématique et croient que cela aiderait les femmes à obtenir de l’aide pour régler les problèmes de violence conjugale (Anglin, 2009 ; Glass, Dearwater, Campbell, 2001). Le dépistage systématique et généralisé de la violence conjugale a été demandé par l’OIIQ, comme cela se fait aux États-Unis ; par exemple, par l’American Nurse Association, l’American College of Nurse Midwives, l’Association of Women’s Health and Obstetrics and Neonatal Nursing, l’Emergency Nurses Association, l’International Association of Forensic Nurses, le Nursing Network on Violence Against Women International (Mitchell et James, 2009). 7.5.1 Le site du gouvernement du Québec consacré à la violence conjugale est accessible au www.violenceconjugale. gouv.qc.ca. ENCADRÉ 7.1 Outils de dépistage Un test de dépistage des sévices est largement utilisé dans de nombreux établissements de soins de santé. Il s’agit du Test de dépistage des abus (Abuse Assessment Screen: AAS), traduit dans au moins sept langues et apprécié pour sa validité et sa abilité (Soeken, McFarlane, Parker et collab., 1998). Le test a été soustrait aux droits d’auteurs an que le personnel inrmier puisse revoir et restructurer 1. Lorsque vous vous disputez avec votre partenaire, avez-vous peur de lui (ou d’elle) ? 2. Lorsque vous vous disputez avec votre partenaire, croyez-vous qu’il (ou elle) tente de vous blesser émotionnellement ? 3. Votre partenaire essaie-t-il (ou elle) de vous contrôler ? de savoir où vous allez ? de savoir qui vous rencontrez ? Détermine-t-il (ou elle) la somme d’argent dont vous devez disposer ? 4. Votre partenaire (ou quiconque) vous a-t-il (ou elle) déjà gié(e), poussé(e), frappé(e) ou a-t-il (ou elle) utilisé une autre forme de violence physique an de vous blesser ? Source : Nursing Research Consortium on Violence and Abuse (NRCVA) (1988) Partie 1 Le Family Violence Prevention Fund (1999) a mis au point un protocole concernant la fréquence recommandée du dépistage des sévices ENCADRÉ 7.2. Au Québec, il existe une banque de ressources adaptées aux familles, aux proches et aux intervenants qui côtoient des personnes victimes de violence conjugale. Cette plate-forme informationnelle rappelle notamment à quel point il est nécessaire de briser les tabous en matière de violence conjugale, et elle évoque ou mentionne aussi que ce type de violence peut se produire dans tous les milieux de vie. 7.5.2 Évaluation Si une femme répond par l’afrmative à l’une des questions de l’AAS, le personnel inrmier doit tenter d’évaluer la nouveauté et la gravité des sévices. Un bon point de départ est de demander Test de dépistage des abus La violence, commune dans le monde d’aujourd’hui, peut même survenir dans nos foyers. Parce que la violence touche beaucoup de gens, je demande maintenant systématiquement à toutes mes clientes (ou clients) de répondre aux questions concernant la violence dans leur vie. Tous les couples se disputent à l’occasion, même les plus harmonieux. 148 De nombreux professionnels de la santé présentent le test à l’aide d’un bref énoncé d’introduction, par exemple : « Parce que la violence conjugale est très répandue dans notre société, il est demandé à toutes les femmes de répondre aux questions suivantes. » Ou encore : « Parce que la violence conjugale a de graves conséquences sur la santé, nous demandons à toutes nos clientes de répondre aux questions suivantes. » Cette entrée en matière a pour but de rassurer la femme, d’une part, en annonçant la teneur du questionnaire et, d’autre part, en lui assurant qu’elle n’est pas personnellement ciblée par ce test de dépistage. Évaluation globale de la personne 5. Depuis que vous avez été enceinte (ou quand vous étiez enceinte), votre partenaire vous a-t-il déjà mordue, giée, poussée, frappée ou a-t-il fait usage de violence physique an de vous blesser ? 6. Votre partenaire vous a-t-il (ou elle) déjà forcé(e) à participer à des activités sexuelles contre votre gré ? Si vous obtenez une réponse positive à l’une des questions, dites à la personne : « Merci de m’avoir fait part de ces éléments d’information. Pourriez-vous me parler un peu plus de la dernière fois où une telle situation s’est produite ? » Le Nursing Research Consortium on Violence and Abuse (1988) encourage la reproduction, la modication et/ou l’usage de ce questionnaire de dépistage dans les examens de routine ou dans les cas de violence conjugale. ENCADRÉ 7.2 Résumé du protocole de dépistage pour les femmes âgées de 14 ans et plus MILIEU OBSTÉTRIQUE/GYNÉCOLOGIE Fréquence du dépistage de la violence conjugale. À chaque visite prénatale et postnatale, à chaque nouvelle relation intime, à toutes les visites de routine gynécologique (périodiques et basées sur des symptômes), à toutes les visites de planication familiale et à toutes les visites dans les cliniques d’avortement et d’ITSS. SOINS PRIMAIRES À chaque première visite à la suite d’une nouvelle plainte, à chaque nouvelle rencontre intime que fait la personne, à chaque nouvelle relation intime et à tous les examens périodiques. SERVICE D’URGENCE ET DE SOINS D’URGENCE Toutes les femmes, à toutes les visites. SANTÉ MENTALE À chaque évaluation initiale, à chaque nouvelle relation intime et à chaque année d’un traitement continu ou périodique. 7 HOSPITALISATION Pour toutes les admissions et tous les congés du centre hospitalier. Source : Adapté de Family Violence Prevention Fund (1999) à la femme de s’exprimer : « Parlez-moi de ces mauvais traitements dans votre relation. » Même si la femme ne répond « oui » qu’à la première question et qualie le mauvais traitement comme étant « seulement émotionnel », ou si elle décrit les sévices comme « pas si mal », ou si elle dit « c’est seulement que nous nous disputons souvent », l’inrmière pourra peu à peu en savoir plus sur les réels sévices dont elle est victime au cours de l’évaluation de la situation. Ce type d’évaluation par étape rappelle le geste de peler un oignon ; ainsi, tout au long de l’évaluation, l’inrmière pourra découvrir une situation plus violente que le laisse sous-entendre la personne. Ce n’est pas un déni que fait la femme de la violence qu’elle subit, mais plutôt une minimisation normale causée par les traumatismes qui accompagnent souvent la violence. Il faut que le personnel inrmier montre qu’il se sent concerné et même qu’il est bouleversé et peiné par le degré de violence que la cliente subit. Un message important à transmettre au cours de l’évaluation, et ce, à plusieurs reprises, est que la victime n’est pas coupable de cette violence. Un autre message primordial à faire passer est que l’inrmière s’intéresse à la situation de la personne et qu’il existe des ressources pour lui venir en aide. De plus, la victime doit savoir que plusieurs problèmes de santé peuvent survenir à cause de la violence dans la famille et qu’il est nécessaire de procéder à une évaluation approfondie. En fait, dans une étude américaine menée auprès de 265 femmes maltraitées qui ont accepté d’être dirigées vers un travailleur social, 59 % ont dit qu’elles avaient consenti à cette aide parce qu’un professionnel de la santé a exprimé sa crainte que leur problème de santé soit associé à une situation de violence conjugale (McCaw, Bauer, Berman et collab., 2002). 7.6 Dépistage de la maltraitance et de la négligence chez les aînés et les personnes vulnérables Le dépistage systématique d’une possible négligence ou maltraitance envers les aînés peut serévéler plus compliqué que l’évaluation de la violence conjugale. Le dépistage de la violence conjugale chez les femmes aînées est très similaire à celui destiné aux femmes plus jeunes si la personne âgée ne présente pas de troubles cognitifs (Koin, 2009). Le test de dépistage AAS peut être utile pour évaluer la violence conjugale chez les femmes âgées. Il est possible de modier ainsi la phrase d’introduction : « Parce que la violence conjugale a de graves conséquences sur la santé, nous demandons aux femmes de tous âges de répondre aux questions suivantes. » Alors que certaines femmes âgées vivent une relation violente depuis des décennies, d’autres connaissent pour la première fois les sévices physiques et sexuels de la part de partenaires normalement non violents, mais qui sont atteints de maladies neurologiques modiant leur comportement (p. ex., la maladie d’Alzheimer, le syndrome cérébral organique). Une femme âgée maltraitée depuis longtemps espérera peut-être survivre à son partenaire violent, mais une femme âgée qui subit des sévices depuis peu hésitera peut-être à révéler sa condition en raison de l’embarras, de la honte et des peurs engendrés par le placement en maison d’hébergement de son partenaire. Un document de l’Institut national de santé publique du Québec concernant une recherche de cas de maltraitance envers les aînées peut être consulté au www.inspq.qc.ca ; une mise à jour des connaissance en matière de maltraitance envers les aînés peut aussi être consultée au Centre québécois de ressources en promotion de la sécurité et en prévention de la criminalité : www.crpspc.qc.ca. Les aînés sont vulnérables aux sévices que peuvent leur iniger des membres de leur famille et du personnel soignant. Les neuf questions formulées par l’AMA sont cliniquement efcaces et peuvent être utilisées auprès de personnes âgées qui sont saines sur le plan cognitif ENCADRÉ 7.3. Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 149 ENCADRÉ 7.3 Questions de dépistage de sévices chez les aînés de l’American Medical Association 1. Quelqu’un vous a-t-il déjà touché(e) de façon inappropriée, sans votre consentement ? 6. Avez-vous déjà signé des documents que vous ne compreniez pas ? 2. Quelqu’un vous a-t-il déjà fait faire des choses que vous n’aviez pas envie de faire ? 7. Avez-vous peur de qui que ce soit à votre domicile ou qui entre dans votre maison ? 3. Quelqu’un vous a-t-il déjà pris des choses sans d’abord vous le demander ? 8. Êtes-vous souvent seul(e) ? 4. Quelqu’un vous a-t-il déjà blessé(e) physiquement ? 5. Quelqu’un vous a-t-il déjà grondé(e) ou menacé(e) ? 9. Quelqu’un a-t-il déjà refusé de vous offrir son aide afin que vous puissiez obtenir des soins alors que vous en aviez grandement besoin ? Source : Adapté d’Arvanis et collab. (1992) 5 Le chapitre 5, Évaluation de l’état mental, fournit des orientations pour la con­ duite de cette partie de l’histoire de la situation. 7.7 Q uestion de suivi Dans le cas de Korina, pourquoi est-il crucial que vous questionniez la mère à propos de la violence conjugale ? 150 L’évaluation de la violence physique ou de la négligence envers une personne atteinte d’un décit cognitif s’avère beaucoup plus complexe. Des preuves physiques qui ne correspondent pas à l’histoire fournie par la personne, les membres de sa famille ou le personnel soignant sont des signes potentiels révélateurs de sévices ou de négligence. Presque tous les établissements de santé utilisent certains formulaires de déclaration obligatoire en cas de soupçons concernant des sévices envers les personnes âgées de 65 ans et plus. Comme il a déjà été mentionné dans ce chapitre, pour signaler ces cas, il n’est pas nécessaire d’avoir la preuve des mauvais traitements ou de la négligence ; des motifs raisonnables de soupçonner que de mauvais traitements ou de la négligence ont eu lieu envers la personne sont sufsants. Partie 1 Historique de la situation Il est aussi important d’évaluer et de documenter les sévices antérieurs, y compris l’histoire de violence familiale, la violence physique et sexuelle subie dans l’enfance et l’histoire de viols de toutes sortes (par des étrangers, des partenaires occasionnels ou intimes). L’accumulation de traumatismes s’est révélée associée à l’augmentation des problèmes de santé physique et mentale (Warsaw et collab., 2009). Il faut également déterminer l’histoire de ces traumatismes, car ils peuvent avoir un impact sur l’état de santé actuel. Par exemple, une femme ayant subi des épisodes antérieurs de trauma craniocérébral et de strangulation peut présenter des symptômes qui s’apparentent à ceux d’une maladie chronique. Un autre aspect très important de l’histoire et de l’évaluation des cas de maltraitance des aînés ou de violence conjugale est une évaluation de l’état mental, à la fois en vue de détecter un éventuel traumatisme crânien et des symptômes neurologiques, mais aussi pour déceler des problèmes de santé mentale. Toutes les personnes ayant subi de la violence devraient être soumises à une Évaluation globale de la personne évaluation de l’état mental, en portant une attention particulière aux problèmes de santé mentale les plus fréquemment associés à la violence : la dépression, les tendances suicidaires, l’ESPT, la toxicomanie et l’anxiété 5 . 7.8 Dépistage de la maltraitance et de la négligence chez les enfants L’American Academy of Pediatrics (1998) recommande le dépistage de la violence conjugale comme un moyen efcace de prévenir la maltraitance chez les enfants. On observe une cooccurrence signicative de la violence chez les enfants et de la violence conjugale ; dans tous les cas, des effets à long terme sur leur santé peuvent être envisagés (Herrenkohl, Sousa, Tajima et collab., 2008). La maltraitance envers les enfants est signalée dans 33 à 77 % des foyers où il y a sévices envers un adulte (American Academy of Pediatrics, 1998). Une évaluation qui révèle de la violence conjugale devrait inciter l’inrmière à impliquer d’autres membres de l’équipe de soins de santé (p. ex., des médecins, des travailleurs sociaux). Une partie importante de l’évaluation d’un enfant quant à des soupçons de sévices est de déterminer son âge et son niveau de développement. L’enfant pourrait-il avoir subi une blessure liée à ce dernier ? Par exemple, le cas d’un enfant âgé de trois semaines dont les parents se présentent en consultation pour une blessure consécutive à une chute de son lit n’est pas une histoire très plausible étant donné le niveau de développement du nourrisson. Parce que l’inrmière n’est pas toujours en mesure d’observer les capacités motrices et cognitives de l’enfant, il est important qu’elle pose certaines questions directement aux parents ou à la personne qui a la garde de l’enfant : Votre enfant rampe-t-il, tente-t-il de se lever ou de marcher ? Quels autres problèmes de développement éprouvez-vous actuellement à la maison : crises de colère, entraînement à la propreté, etc. ? • Une ecchymose est liée au purpura sénile. Si l’enfant est capable de parler, il serait important d’avoir une discussion avec lui à l’écart des adultes qui s’en occupent, et ce, en tentant de poser des questions ouvertes ou tout simplement en recueillant ses propos spontanés. Il est nécessaire de rappeler que les enfants qui ont subi des traumatismes répondent difcilement aux questions ouvertes (Myers, Berliner, Briere et collab., 2002). L’inrmière peut enrichir la collecte d’information auprès de l’enfant en lui posant des questions courtes, en utilisant un langage approprié à son âge et des mots qu’il connaît bien. Les enfants âgés de plus de 11 ans sont en mesure de raconter leur histoire comme le font la plupart des adultes (Myers et collab., 2002). • Une brûlure par frottement est plus précisément décrite comme une abrasion par frottement. L’histoire médicale représente aussi une partie importante de l’évaluation. L’enfant a-t-il déjà été hospitalisé, blessé ou est-il atteint d’une maladie chronique ? Prend-il des médicaments qui peuvent favoriser l’apparition d’ecchymoses ? L’enfant a-t-il fait des visites répétées au centre hospitalier ? Pour les blessures qu’il aurait subies, autres que mineures, s’est-il écoulé une longue période de temps avant qu’il soit conduit chez un professionnel de la santé ? 7.9 Examen physique L’examen physique complet, c’est-à-dire de la tête aux pieds, constitue une partie essentielle de l’évaluation d’une personne victime de violence conjugale ou d’une personne âgée victime de maltraitance ; cet examen revêt une importance toute particulière surtout si la personne a une histoire connue de sévices. Une connaissance de la terminologie de la médecine légale est importante pour la communication des résultats d’un examen physique. Le TABLEAU 7.2 énumère et dénit la plupart des termes les plus courants de ce domaine. Parmi ceux-ci, les termes ecchymose et lacération sont souvent mal utilisés. Les ecchymoses ne sont pas nécessairement associées à une blessure causée par l’usage d’un objet contondant. Par ailleurs, ce ne sont pas toutes les blessures ouvertes qui peuvent être qualiées de lacérations, mais seulement les blessures ouvertes produites par un instrument ayant causé une coupure ou une déchirure du tissu. Il faut garder à l’esprit les indications terminologiques suivantes au moment de documenter l’examen physique (Sheridan, 2007 ; Sheridan et collab., 2009). • Le terme ecchymose peut être utilisé de façon interchangeable avec contusion. • Une lacération est liée à une déchirure. Q uestion de suivi • Une pétéchie est liée à un purpura. • Le terme incision peut être utilisé de façon interchangeable avec coupure ou avec blessure par objet coupant. • Le terme coupure peut être utilisé de façon interchangeable avec incision ou avec blessure par objet coupant. • La plaie par arme blanche est une perforation, une coupure pénétrante plus profonde que large. • L’hématome est un amas de sang souvent, mais pas toujours causé par un trauma de force brutale. Beaucoup de praticiens tentent de dater une blessure par la couleur de l’ecchymose ; cependant, il n’y a pas de preuves scientiques qui appuient cette stratégie (Langlois et Greshman, 2001 ; Nash et Sheridan, 2009). En conséquence, tenter de déterminer avec précision la date à laquelle la blessure a eu lieu s’avère futile du point de vue de la médecine légale. Quelques lignes directrices peuvent cependant aider à déterminer si la date approximative de la blessure concorde avec l’histoire rapportée par la personne blessée ou par celle qui en prend soin. Pourquoi vous êtes-vous attardée au niveau de développement de Korina dans cette situation ? Q uestion de suivi Dans le cas de Korina, comment allez-vous faire pour valider vos soupçons ? Q uestion de suivi Dans la situation de Korina, comment le dossier antérieur peut vous aider à valider vos soupçons en matière de maltraitance ou de violence? Une blessure causée par un objet contondant est habituellement rouge et prend une couleur violacée ou bleu violacé dans les 12 à 36 heures. Pour ce qui est des contusions, leur couleur progresse la plupart du temps en passant d’un bleu violacé à un bleu verdâtre, puis à un brun verdâtre, pour ensuite passer à un brun jaunâtre avant de s’estomper (Nash et Sheridan, 2009). Ce processus est le même pour toutes les personnes, mais selon la couleur de la peau, les changements peuvent être plus ou moins visibles et difciles à photographier. En général, les blessures les plus récentes seront rouge violacé, tandis que les ecchymoses qui commencent à vieillir seront plutôt brun verdâtre ou brun jaunâtre. Plusieurs facteurs expliquent que les aînés sont plus sujets aux meurtrissures et aux contusions que ne le sont les personnes plus jeunes. Les médicaments (et leurs effets secondaires) ainsi que leurs impacts sur la composition des uides secondaires peuvent entraîner un désordre hématologique susceptible de favoriser la formation de meurtrissures ou d’ecchymoses. Plusieurs médicaments couramment utilisés en médecine peuvent accroître les risques de meurtrissures ou de saignements : l’acide acétylsalicylique, l’ibuprofène, les antiinflammatoires non stéroïdiens, la warfarine, l’héparine, l’acide valproïque, la prednisone et le clopidogrel. Les suppléments vitaminés peuvent également contribuer aux désordres hématologiques, et ces risques augmentent si la personne Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 151 7 consomme une médication anticoagulante ou des médicaments qui altèrent le taux de plaquettes sanguines. Les myrtilles, l’ail, le gingembre ou le ginkgo sont parmi les plus communs parmi les suppléments associés à un risque accru de meurtrissures ou de complications hémorragiques (Doyle, Harold et Johnson, 2001). Terminologie médicolégale TABLEAU 7.2 TERME DÉFINITION Abrasion Blessure causée par le frottement de la peau ou des muqueuses. Alopécie traumatique Perte de cheveux causée par l’action de les tirer ou de les arracher brusquement ou par d’autres moyens traumatisants. Avulsion Arrachement d’une structure ou d’une partie de celle-ci. Blessure Terme général se rapportant à une atteinte corporelle provoquée par des moyens matériels (balle, couteau). Blessure avec marques Blessure causée par un objet qui laisse une marque distincte sur la peau ou sur un organe (p. ex., être battu avec un fouet) ou préjudice causé par un mécanisme unique de blessure (p. ex., des brûlures par immersion aux mains [gants] ou aux pieds [chaussettes]). Cicatrices de blessures Blessures, généralement des contusions et des fractures, à diverses étapes de la guérison. Contusion Meurtrissure ; blessure aux tissus sans rupture de la peau, où du sang s’accumule à cause de la rupture de vaisseaux sanguins ; occasionne de la douleur, de l’enure et de la sensibilité. Coup de poignard Blessure pénétrante faite par un couteau tranchant ; la coupure est plus profonde que large. Coupure ou incision Coupure ou blessure faite par un instrument tranchant ; le fait de couper. Ecchymose Tache hémorragique bleue ou violacée, plus grande qu’une pétéchie, dans la peau ou sur les muqueuses, souvent ronde ou de forme régulière, sans surélévation. Hématome Accumulation de sang hors des vaisseaux, généralement coagulée dans un organe, un espace ou un tissu. Hémorragie : fuite de sang d’un vaisseau rompu, qui peut être externe, interne, dans la peau ou dans tout autre organe. Lacération Plaie produite par la déchirure ou la séparation de tissu, le plus souvent causée par un impact brutal sur une surface osseuse ; acte de déchirer ou de séparer. Lésion Terme communément utilisé pour faire référence à n’importe quelle pathologie ou traumatisme d’un tissu ou à la perte d’usage d’une partie du corps. Pétéchie Lésion parfaitement ronde, non surélevée, rouge violacé, causée par une hémorragie intradermique qui devient plus tard bleue ou jaune. Ponction Acte de percer ou de pénétrer une partie du corps avec un objet pointu ou un instrument. Sources : Adapté de Miller, Keane et O’Toole (2005) ; Sheridan (2001) ; Taber et Thomas (1997) 152 Partie 1 Évaluation globale de la personne Toute évaluation d’une personne âgée victime ou présumée victime de sévices ou de négligence devrait inclure des analyses de laboratoire de base, y compris, au minimum, un hémogramme avec taux de plaquettes, les éléments chimiques du sang (incluant l’azote uréique sanguin, la créatinine, les protéines et l’albumine), le test des sérums et des fonctions hépatiques, des tests de coagulation et une analyse d’urine (Geroff et Olshaker, 2001). 7.9.1 Examen physique de l’enfant La terminologie de la médecine légale utilisée pour documenter la violence conjugale et la maltraitance envers les aînés s’applique également à l’enfant. Une inspection visuelle de celui-ci, de la tête aux pieds, est importante dans tout examen physique. Des blessures importantes peuvent être dissimulées sous des vêtements, des couches, des chaussettes ou sous les cheveux longs. L’American Academy of Pediatrics (2002) dénit un traumatisme majeur comme une blessure qui va au-delà des rougeurs temporaires de la peau. Malheureusement, il n’est pas rare que ces signes ne soient pas détectés par le personnel soignant, limitant du coup la possibilité de déployer un plan d’intervention rapide auprès de l’enfant. Selon une étude américaine, les meurtrissures et les premiers signes de violence faite aux enfants n’ont pas été adéquatement rapportés et détectés, et ce, dans 44 % des cas de décès et de sévices majeurs survenus chez des enfants en bas âge (Pierce, Kaczoe, Aldridge et collab., 2010). Certes, les blessures accidentelles chez les enfants actifs sont chose commune ; toutefois, les blessures et les meurtrissures chez les nourrissons et les enfants en bas âge doivent être abordées avec beaucoup de soin compte tenu du fait qu’elles peuvent être le signe de maltraitance potentielle. Les enfants qui ne marchent pas encore sans aide ne devraient pas présenter de telles blessures (Sugar, Taylor et Feldman, 1999). Des blessures observées chez les nourrissons qui n’en sont pas encore à leurs premières tentatives de marcher – notamment chez les enfants âgés de moins de neuf mois – devraient alerter l’inrmière quant à des sévices potentiels ou relativement à une condition médicale qui nécessite un suivi. Une fois que les enfants commencent à marcher, des contusions, en particulier sur les proéminences osseuses, sont courantes (Sugar et collab., 1999). Reece et Ludwig (2001) ont constaté que de 40 à 50 % des enfants qui marchent afchent des meurtrissures sur les proéminences osseuses à l’avant du corps. Les contusions atypiques observées sur les fesses, les mains, les pieds et l’abdomen sont extrêmement rares et devraient susciter l’inquiétude (Sugar et collab., 1999). À l’instar de ces travaux, les recherches de Pierce et de ses collaborateurs (2010) semblent aller dans ce sens et suggèrent également qu’il existe une forte corrélation entre la présence de certaines blessures (au torse, aux oreilles et au cou) et une situation de violence et d’abus notamment pour les enfants âgés de moins de quatre ans et en particulier pour les nourrissons. En l’absence d’une justication crédible pour ces marques et blessures, notamment chez les enfants qui ne se déplacent pas seuls, celles-ci devraient être examinées avec une attention toute particulière. De même, Mosqueda, Burnight et Liao (2005) ont étudié les adultes qui présentaient des meurtrissures accidentelles et ont révélé que près de 90 % de celles-ci se situaient sur les extrémités, tandis que les meurtrissures non accidentelles ont été trouvées sur le cou, les oreilles, les organes génitaux, les fesses ou la plante des pieds. En outre, toute meurtrissure qui révèle la forme d’un objet doit être considérée comme très suspecte. La détection de meurtrissures sur un enfant non mobile devrait soulever l’inquiétude et pousser à la recherche d’autres blessures, y compris les fractures et les lésions intracrâniennes. Les professionnels de la santé se font souvent demander d’estimer la date des contusions. Cette tâche est difcile, car il ne s’agit pas d’une science exacte. Puisque certaines recherches laissent entendre aujourd’hui qu’il est trop difcile de dater des blessures à partir de leur couleur ou d’une seule photographie, les professionnels de la santé devraient s’abstenir de le faire ; il faut donc reconsidérer cette pratique autrefois admise (Maguire, Mann, Sibert et collab., 2005). En plus de certaines blessures inigées par des coups, d’autres meurtrissures comme des lacérations, des abrasions, des morsures et des brûlures sont communément observées chez les enfants victimes de maltraitance. Plusieurs facteurs peuvent contribuer à aider à déterminer si un enfant est victime de sévices, ainsi que la gravité de ceux-ci. Par conséquent, il est nécessaire de remettre en contexte ces blessures, leur fréquence et leur endroit sur le corps de l’enfant avec son niveau de développement et l’histoire sociale qui caractérisent sa situation. 7.10 La documentation écrite des cas de violence conjugale et de maltraitance des aînés doit être réalisée à partir du verbatim de la personne qui a subi les sévices, mais dans des limites raisonnables. Sur le plan clinique, il est irréaliste de faire la transcription de tous les faits énoncés par une personne maltraitée. Cependant, il est important de documenter les déclarations les plus signicatives de la victime, notamment celles qui permettent d’identier l’agresseur et de révéler les menaces qu’il a proférées. Par ailleurs, la documentation du cas de maltraitance peut inclure des déclarations de la personne portant sur des incidents de sévices antérieurs. 7 Quand il faut citer ou paraphraser l’historique de la situation, il convient de ne pas tenter d’épurer les mots que rapporte la victime. La documentation FIGURE 7.1 Abrasion de forme latérale sur le côté droit du cou résultant d’une éraure à la suite d’une strangulation Notes au dossier Les notes au dossier des victimes de violence conjugale et des aînés victimes de maltraitance doivent inclure une documentation détaillée basée sur des écrits non falsiés de la situation, sur des représentations graphiques de la disposition des blessures sur le corps et sur des documents photographiques. Les FIGURES 7.1 à 7.7 présentent des exemples de documents photographiques pris auprès des clients d’un des auteurs. Plusieurs de ces photos ont été publiées pour la première fois dans Sheridan (2001). Elles sont reproduites avec permission. FIGURE 7.2 Abrasion résultant d’un coup de poing asséné au milieu du visage par un assaillant portant une bague sertie d’une pierre ; lacération suturée au sourcil droit ; déchirure partielle au nez (suturée), contusion sclérotique à l’œil droit provoquée par un coup de poing et abrasion au cou à la suite d’une strangulation Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 153 FIGURE 7.6 Blessure (contusions) de type défensif à l’avant-bras droit FIGURE 7.3 Contusion récente en boucle au haut de l’épaule postérieure droite et en bas de l’épaule postérieure gauche ; motif de boucle et cicatrice du côté droit du milieu du dos ; dos de l’épaule droite, abrasion cicatrisée à la suite d’une agellation par un l électrique au milieu du dos ; contusion et motif de coup de pied avec apparence de talon à gauche du milieu du dos ; motif de coup de pied, de coup de talon et d’empreinte de semelle au haut de la partie postérieure de l’épaule gauche 154 Partie 1 par verbatim des menaces de l’agresseur, y compris ses injures, peut se révéler d’une extrême importance pour un éventuel procès. Aussi, il faut être attentif et reprendre les mêmes termes que ceux utilisés par la personne violentée pour décrire ses organes génitaux ou les comportements traduisant des actes sexuellement agressifs. FIGURE 7.4 Contusions multiples causées par des coups à la partie supérieure du bras droit La documentation photographique dans le dossier médical peut être d’une importance inestimable. Auprès des adultes lucides, il faut obtenir un consentement écrit préalablement à touteprise de photographies. La plupart des établissements de santé possèdent des formulaires de consentement standardisés. Si la personne est inconsciente ou qu’elle manifeste des troubles cognitifs, la prise de photographies sans l’obtention du consentement ne pose pas de problèmes éthiques puisqu’il s’agit d’une pratique non effractive, indolore et qui offre un important potentiel d’aide pour la personne que l’on soupçonne être victime de sévices. Chaque type d’appareils photographiques les plus courants présente des avantages et des inconvénients (35 mm et appareil numérique) (Besant-Matthews et Smock, 2001 ; Sheridan, 2007). En fait, il vaut mieux avoir une photographie claire d’une blessure, peu importe l’appareil utilisé, que pas de photo du tout. FIGURE 7.5 Contusions multiples (cachées) au haut de l’abdomen et au bas du thorax avant Quand l’inrmière documente un cas et qu’elle commente les résultats des examens physiques d’un enfant maltraité ou négligé, il lui faut utiliser les mots que l’enfant emploie pour décrire comment ses blessures se sont produites. Il est probable que l’enfant soit accompagné de la personne qui le maltraite. Si l’enfant ne parle pas, demander une déclaration du parent ou de la personne qui en a la garde. Par ailleurs, il est important de connaître le protocole de son établissement de santé en matière de documentation et de suivi des enfants soupçonnés d’être victimes de maltraitance. Certains protocoles peuvent reporter une entrevue complète jusqu’à ce qu’un intervieweur compétent en médecine légale soit disponible. Évaluation globale de la personne 7 FIGURE 7.7 Série de deux photographies permettant d’illustrer comment les clichés peuvent être révélateurs de la mécanique des blessures. A La victime présente une blessure grave à la paupière gauche, une blessure latérale au côté gauche du nez et de la bouche. La contusion latérale au côté gauche du nez a été provoquée par l’enfoncement des coussinets de ses lunettes à la suite d’un coup de poing porté à l’oeil gauche. Les lunettes de la victime ont absorbé l’essentiel de la force de frappe et se sont brisées (non illustré). Un deuxième coup de poing a engendré le traumatisme à la bouche. B La force du coup de poing asséné à la bouche a laissé des marques de dents à la lèvre supérieure, provoquant ainsi des contusions, des abrasions et une lacération mineure à la muqueuse orale de la lèvre supérieure. 7.11 Évaluation des risques d’homicide Au Canada, comme aux États-Unis, les femmes sont plus souvent tuées par leur conjoint, leur petit ami ou par leur ex-conjoint que par toute autre personne ; en outre, environ 75 % de ces femmes ont été violentées par l’homme qui les aura subséquemment tuées (Campbell, Sharps et Glass, 2001). « En 2000, environ 80 femmes canadiennes ont été assassinées par leur partenaire masculin ; 55 % des femmes assassinées le sont par quelqu’un de très proche. » (Chamberland, 2003, p. 40). Une étude américaine portant sur le meurtre conjugal des femmes rapporte que 42 % des femmes tuées ont été en contact avec un service de soins de santé (urgence, médecine générale, clinique, soins prénataux) dans l’année qui a précédé leur décès (Sharps, Koziol-McLaine, Campbell et collab., 2001). Ces contacts avec les services et les professionnels de la santé ont constitué autant d’occasions manquées pour le dépistage de la violence ENCADRÉ 7.4 conjugale et pour établir un plan d’intervention an d’en réduire les risques. La même étude a révélé la abilité et la validité de la grille d’évaluation du danger (Danger Assessment), un questionnaire en 19 points (oui/non) utilisé par les inrmières et les intervenants en violence conjugale (Campbell et collab., 2001) . Cet instrument d’évaluation comprend d’abord un calendrier des événements pour que les femmes puissent établir de manière précise la fréquence et l’intensité des épisodes de violence qu’elles ont subis au cours des dernières années. Cet outil s’avère également un excellent moyen de comptabiliser la fréquence et la gravité des agressions en vue d’établir des statistiques institutionnelles ENCADRÉ 7.4. Bien qu’il ne soit pas des plus précis, cet instrument indique que plus le nombre de réponses positives (oui) aux questions augmente, plus le potentiel de danger s’accroît. À titre d’exemple, dans l’étude américaine mentionnée précédemment, les femmes victimes de sévices et subséquemment d’homicide afchaient un score moyen de 7,1 dans le test initial qui comptait alors 15 questions. Q uestion de suivi Compte tenu de ce que vous avez pu observer chez la mère de Korina au cours de l’entrevue, à quel niveau situeriez-vous le dernier épisode violent dont elle a été victime ? Évaluation du danger (Danger Assessment ) Des recherches effectuées à la suite d’homicides touchant à la fois des femmes violentées et leur agresseur ont associé plusieurs facteurs de risque à ces situations. Nous ne pouvons pas prévoir ce qui va se passer dans votre situation, mais nous aimerions que vous soyez consciente du danger d’homicide associé aux cas de violence ; ainsi, nous tentons de déterminer combien de facteurs de risque s’appliquent à votre situation. Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 155 ENCADRÉ 7.4 Évaluation du danger (Danger Assessment ) (suite) À l’aide d’un calendrier, veuillez indiquer les dates approximatives, au cours de la dernière année, où vous avez été violentée par votre conjoint ou votre partenaire. Pour chaque date, précisez, selon l’échelle qui suit, la gravité de l’incident. 1. Gies, bousculades, pas de blessures et/ou de douleurs qui perdurent 2. Coups de poing, coups de pied ; contusions, coupures et/ou douleur continue 3. Volées de coups (« raclées ») ; importantes contusions, brûlures, fractures 4. Menace d’utilisation d’armes ; blessures à la tête, blessures internes, blessures permanentes 5. Usage d’une arme ; blessure par arme (Si, pour l’une des descriptions, un chiffre plus élevé s’applique, veuillez l’ins crire sur votre calendrier.) Indiquez Oui ou Non pour chacune des questions suivantes. (« Il » fait référence à votre conjoint, partenaire, ex-conjoint, ex-partenaire ou à la personne qui vous violente.) 1. La violence physique a-t-elle augmenté en gravité ou en fréquence au cours de la dernière année ? 2. A-t-il déjà utilisé une arme contre vous ou vous a-t-il menacée avec une arme ? 3. A-t-il déjà essayé de vous étouffer ? 4. Est-il propriétaire d’armes à feu ? 5. Vous a-t-il déjà forcée à avoir des relations sexuelles quand vous ne le souhaitiez pas ? 6. Fait-il usage de drogues (amphétamines, phencyclidine [psychotrope PCP], cocaïne, crystal meth, crack, héroïne, mélange de drogues) ? 7. A-t-il menacé de vous tuer et/ou croyez-vous qu’il soit capable de vous tuer ? 8. Est-il ivre (saoul) tous les jours ou presque tous les jours ? (En quantité d’alcool) 9. Contrôle-t-il la plupart ou la totalité de vos activités quotidiennes ? Par exemple, vous dicte-t-il avec qui vous devez être amie ou non, les moments où vous pouvez voir votre famille, la somme d’argent que vous pouvez dépenser ou les occasions d’utiliser la voiture ? (S’il tente d’agir ainsi, mais que vous ne le laissez pas faire, cochez ici : _______.) 10. Vous a-t-il déjà battue alors que vous étiez enceinte ? (Si vous n’avez jamais été enceinte de lui, cochez ici : _______.) 11. Est-il intensément et constamment jaloux ? (Par exemple, dit-il : « Si je ne peux pas t’avoir, personne ne le pourra » ?) 12. Avez-vous déjà menacé ou tenté de vous suicider ? 13. A-t-il déjà menacé ou tenté de se suicider ? 14. Menace-t-il de faire du tort à vos enfants ? 15. Avez-vous un enfant qui n’est pas le sien ? 16. Est-il chômeur ? 17. L’avez-vous déjà laissé durant la dernière année ? (Si vous n’avez jamais vécu avec lui, cochez ici : _______.) 18. Avez-vous actuellement un autre (différent) partenaire intime ? 19. Vous suit-il ou vous espionne-t-il, vous laisse-t-il des notes de menaces, détruit-il vos biens et/ou votre maison ou vous appelle-t-il lorsque vous ne voulez pas lui parler ? Nombre total de « Oui » : ___ Merci. S’il vous plaît, parlez à votre inrmière, avocat ou conseiller sur ce que signient les résultats de ce questionnaire « Évaluation du danger » en fonction de votre situation. Note : le document américain connu sous le nom de Danger Assesment est soumis à la loi sur les droits d’auteur ; ainsi, ses utilisateurs ne peuvent pas le modier et doivent communiquer avec l’auteur s’ils ont l’intention de l’utiliser à des ns de recherche. Ce document peut par ailleurs être téléchargé au www.son.jhmi.edu. Source : Adapté de Jacquelyn C. Campbell, Ph.D., RN. © 1985, 1988, 2001 7.12 Q uestion de suivi Pourquoi serait-il important qu’une évaluation de l’état mental de la mère de Korina soit effectuée ? 156 Partie 1 Autres indices de violence conjugale à considérer malgré une réponse négative En plus d’avoir recours à la grille d’évaluation du danger, et si la personne a répondu par la négative au test ASS, les professionnels de la santé doivent faire preuve de vigilance quant aux problèmes de santé particulièrement associés à la violence conjugale, y compris les problèmes gynécologiques (surtout les ITSS, les douleurs pelviennes ainsi que les plaintes de dysfonction sexuelle), le syndrome du côlon irritable, les maux de dos, la dépression et les symptômes de l’ESPT (en particulier les troubles du sommeil, les crises de panique ou les problèmes nerveux). Lorsque ces problèmes se produisent et surtout s’ils persistent, une Évaluation globale de la personne évaluation approfondie et répétée de la violence familiale est nécessaire. Dans ce cas, un instrument tel que l’échelle WEB (Women’s Experience With Battering Scale) (Coker, Smith, McKeown et collab., 2000) pourrait être utilisé en plus de la grille d’évaluation du danger ; le professionnel peut aussi mener une enquête discrète en demandant, par exemple : Je suis inquiet au sujet de votre santé ; y a-t-il un risque que le stress que vous vivez à domicile contribue à ces problèmes ? Particularités culturelles et génétiques La violence familiale est un phénomène qui se produit dans toutes les cultures. Elle peut toutefois être plus difcile à reconnaître dans de nombreux groupes culturels. Par exemple, les coups et les blessures peuvent être cachés, couverts par les vêtements et le maquillage excessif du visage chez de nombreuses femmes chinoises victimes de violence. Les indices que la violence familiale peut être un problème incluent des taux élevés d’alcoolisme, de suicide et d’homicide, ce qui se vit chez certaines communautés amérindiennes ou autres. La violence familiale a des répercussions profondes sur la personne, la famille et la communauté ; ses causes ou ses conséquences sont manifestes dans les exemples américains suivants (National Center for Health Statistics, 2006). • La déclaration de graves troubles psychologiques chez les personnes âgées de 18 ans et plus était de 3,0 % pour la population en général, de 3,0 % pour les Blancs, de 7,1 % pour les Amérindiens et de 3,0 % pour les Noirs. • L’utilisation massive d’alcool par les personnes âgées de 12 ans et plus était de 7,5 % chez la population blanche, de 4,4 % chez la population noire et de 8,7 % chez les Amérindiens. • Les taux de mortalité par suicide dans l’ensemble de la population masculine étaient de 10,9 pour 100 000 habitants, de 16,4 pour 100 000 Amérindiens de sexe masculin et de 9,8 pour 100 000 hommes noirs. • Les taux de mortalité globale par homicide dans la population de sexe masculin étaient de 9,4 pour 100 000 habitants. Après ventilation, ce taux est de 11,6 pour 100 000 Amérindiens de sexe masculin et de 36,4 pour 100 000 Noirs. 7 Évaluation et jugement clinique Dossier : Korina Beauregard (suite) À son retour de la radiologie, Korina est seule avec sa mère puisque le conjoint de celle-ci a dû se rendre à son travail. Vous en protez pour questionner la mère de nouveau au sujet des circonstances de l’accident de sa lle. Elle vous raconte la même histoire que lors de votre première entrevue. À ce moment, la petite Korina, qui jouait près de sa mère, dit : « Papa fait mal à maman et à moi. » La mère réprimande sa lle et éclate ensuite en sanglots. Vous souhaitez lui venir en aide et préserver la relation thérapeutique avec celle-ci, tout en lui reétant vos doutes sur les circonstances entourant les marques de brûlures sur son avant-bras. Vous discutez une vingtaine de minutes avec la mère, puis vous lui demandez de remplir la grille d’évaluation du danger présentée dans l’ENCADRÉ 7.4. Elle répond « oui » à 12 des 19 questions. Madame Beauregard vous mentionne que les gestes violents de son conjoint sont plus fréquents depuis quelques semaines. Celui-ci vit des difcultés à son travail, et il consomme de cinq à huit bières tous les soirs. Elle se sent responsable de ce qui lui arrive et dit qu’elle mérite bien cette punition puisqu’elle n’est pas une bonne conjointe. 1. Quelle sera votre approche pour intervenir auprès de madame Beauregard ? 2. Quelle sera votre intervention auprès de madame Beauregard ? 3. Quelle sera votre intervention prioritaire maintenant que vos soupçons de violence conjugale et de maltraitance envers Korina sont conrmés ? 4. Comment allez-vous consigner l’information au dossier ? Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Dans le cas de madame Beauregard, comment avezvous été en mesure de détecter un risque d’abus ? 2. Dans la situation d’un enfant comme Korina, comment pouvez-vous détecter un risque de maltraitance ? 3. Dans un cas de violence conjugale comme celui de madame Beauregard, nommez un élément sur lequel vous devez insister à plusieurs reprises durant la relation thérapeutique. preuves irréfutables des mauvais traitements pour effectuer un signalement ? 5. Dans des cas comme celui de madame Beauregard et sa lle, que devez-vous consigner au dossier ? 4. Dans un cas de violence conjugale, de maltraitance envers un enfant ou d’abus envers une personne âgée, est-il nécessaire que vous obteniez des Chapitre 7 Évaluation de la violence familiale 157 Dossier : Matisse Comtois Matisse est âgé de six ans. Il se présente au Centre de santé et de services sociaux (CSSS) avec sa mère pour son rendez-vous annuel de contrôle puisqu’il commencera sa première année du primaire dans quelques semaines. En tant qu’inrmière, vous devez procéder à l’évaluation de santé de Matisse an de vous assurer que son développement est normal et qu’il n’éprouve pas de problèmes susceptibles de lui causer des difcultés à l’école. Dans le dossier de Matisse, vous constatez que son poids et sa taille ont toujours été L’examen physique exige que l’inrmière acquière des compétences techniques et une base de connaissances. Les compétences techniques sont les outils de collecte de données. L’inrmière doit relier ces données à ses connaissances et à son expérience antérieure. Une solide base de connaissances lui permet d’effectuer une recherche plutôt qu’une simple observation. Une citation du poète allemand Goethe (1749/1832), datant du xviiie siècle, reprend cette idée : « Nous ne voyons que ce que nous connaissons. » Pour reconnaître un élément signicatif, l’inrmière doit savoir ce qu’elle cherche, ce qu’il lui faut trouver. 8.1 Développer ses sens Les sens – la vue, l’odorat, le toucher et l’ouïe – serviront pour recueillir des données au cours de l’examen physique. Normalement sollicités pour percevoir l’environnement, ils seront orientés autrement ici. L’utilisation des sens pour évaluer l’état de santé de chaque personne peut sembler difcile ou intimidante au début, mais cela s’améliorera avec la répétition et des cours pratiques dirigés. Les techniques requises pour effectuer l’examen physique sont l’inspection, la palpation, la percussion et l’auscultation. Les techniques sont habituellement exécutées une à la fois et dans cet ordre, excepté pour l’abdomen 21 . L’examen physique comprend aussi la prise de mesures (indice de masse corporelle, circonférence de la tête, mesure du tissu adipeux, etc.). 8.1.1 Inspection L’inspection consiste en une observation visuelle attentive. C’est un examen minutieux, effectué de près, d’abord de la personne dans son ensemble, puis de chaque système. L’inspection commence normaux depuis sa naissance. Outre quelques épisodes d’infections des voies respiratoires supérieures (IVRS) et d’otites moyennes, il n’a jamais éprouvé de problèmes de santé majeurs. Matisse est venu à la clinique sans rendez-vous il y a trois jours à la suite d’une chute en vélo. Le médecin avait constaté des abrasions aux genoux, aux coudes et à la joue droite. En chutant, Matisse s’était aussi cogné la tête, mais son casque lui avait évité une commotion cérébrale. au moment de la première rencontre avec la personne, où le questionnaire général est effectué 9 . Au cours de l’évaluation physique, commencer l’évaluation de chaque système par l’inspection. L’inspection constitue toujours la première technique à employer. Au début, il est possible de ressentir un certain malaise à prendre le temps d’observer ainsi la personne. Mais il ne faut pas être trop pressé de la toucher. Une inspection complète et ciblée prend du temps, mais elle procure une étonnante quantité de données. Il faut s’habituer à ne pas précipiter l’inspection ; au début, le fait garder les mains derrière le dos durant celle-ci peut faciliter les choses. Chaque personne peut représenter en elle-même un outil personnel d’examen ; il faut apprendre à comparer les côtés droit et gauche de son corps. En général, les deux côtés sont à peu près symétriques. L’inspection nécessite un bon éclairage de même qu’une exposition et un positionnement adéquats du corps. L’utilisation occasionnelle de certains instruments (otoscope, ophtalmoscope, lampe de poche, spéculum nasal ou vaginal) peut s’avérer utile pour approfondir l’examen visuel. 8.1.2 Au moment de mettre sous presse, la loi 10, Loi modiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales (Québec), remplaçait les Centres de santé et de services sociaux (CSSS) par les Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS). 9 Les données précises à recueillir pour l’inspection de l’aspect général sont décrites dans le chapitre 9, Questionnaire général, mesure des signes vitaux. Q uestion de suivi Quelle technique devrezvous utiliser en premier pour commencer l’évaluation de Matisse ? Q uestion de suivi Dans le cas de Matisse, avant même de vous attarder à un système en particulier, vous devriez évaluer ou observer trois éléments. Nommez-les. Palpation La palpation constitue l’étape suivante, et elle conrme souvent des points observés au cours de l’inspection. La palpation s’effectue avec le sens du toucher pour évaluer les éléments suivants : la texture, la température, la moiteur, l’emplacement et la taille des organes, un gonement, une vibration ou une pulsation, la rigidité ou la spasticité musculaire, la crépitation, la présence de protubérances ou de masses, la présence d’inconfort ou de douleur. Certaines parties de la main sont mieux adaptées pour évaluer les différents facteurs : 21 Le chapitre 21, Abdomen, détaille l’examen physique de celui-ci. Spasticité : Contractions musculaires involontaires ou exagération de la tonicité musculaire se manifestant par des spasmes. • Pulpe des doigts : la meilleure partie pour la discrimination tactile ne, comme pour la texture Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 159 8 de la peau, les gonements, la recherche d’une pulsation ou de protubérances. • Doigts et pouce : pour saisir (comme une pince) an de détecter la position, la forme et la consistance d’un organe ou d’une masse. Q uestion de suivi Durant l’examen, vous allez vérier le pouls de Matisse et tenter de palper son foie ; quelles parties de la main utiliserez-vous alors ? • Dos (face externe) des mains et des doigts : la meilleure partie pour déterminer la température de la peau, car celle-ci est plus ne à cet endroit que dans la paume, et elle perçoit mieux les sensations de chaleur et de froid. • Base des doigts (articulations métacarpophalangiennes) ou surface ulnaire de la main : pour mieux percevoir les vibrations. La palpation doit être lente et systématique. La personne aura tendance à se raidir sous un toucher brusque, ce qui rendra la palpation plus difcile. Rester calme, utiliser une approche douce. Se réchauffer préalablement les mains en les frottant l’une contre l’autre ou en les tenant sous l’eau chaude. Repérer les zones tendues et les palper en dernier. Commencer par une palpation légère an de détecter les caractéristiques de surface et de permettre à la personne de s’habituer à se laisser toucher. Ensuite, procéder à une palpation plus profonde ; peut-être faudra-t-il aider la personne à se détendre en utilisant des techniques de relaxation telles que la visualisation ou des respirations profondes. Le sens du toucher perd de l’acuité lorsque la pression exercée est trop forte ou continue. Lorsque la palpation profonde est nécessaire (comme pour le système abdominal), une pression intermittente se révèle préférable à une palpation plus longue et continue. Éviter toute situation dans laquelle la palpation profonde pourrait causer des blessures internes ou de la douleur. 21 et 26 La palpation bimanuelle est particulièrement illustrée dans les chapitres 21, Abdomen, et 26, Système génito-urinaire féminin. La palpation bimanuelle nécessite l’utilisation des deux mains pour envelopper ou « saisir » certaines parties du corps ou des organes tels que les reins, l’utérus ou les ovaires an d’en établir les délimitations avec plus de précision 21 et 26 . 8.1.3 Percussion La percussion est la technique qui consiste à cogner sur la peau de la personne avec de petites frappes précises pour évaluer les structures sousjacentes. Les frappes créent des vibrations et un bruit caractéristique qui dépeignent l’emplacement, la taille et la densité de l’organe sous-jacent. Pourquoi apprendre la percussion alors qu’une radiographie ou une échographie est tellement plus précise ? Parce que les mains, pour percuter, sont toujours disponibles et accessibles, et elles fournissent une rétroaction instantanée. La percussion est employée dans les situations suivantes : 160 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique • détermination de l’emplacement et de la taille d’un organe : en explorant les changements de tonalité pendant la percussion, déterminer où se situe la limite d’un organe par rapport aux organes avoisinants ; • distinction de la densité (gaz, liquide ou solide) d’une structure par un son caractéristique ; • détection d’une masse anormale si elle est assez supercielle : les vibrations causées par la percussion pénètrent à environ 5 cm de profondeur – une masse située plus profondément ne serait pas révélée ; • mise en évidence d’une douleur qui serait causée par une structure sous-jacente inflammée, comme dans la région des sinus ou sur les reins ; • sollicitation d’un réexe ostéotendineux en utilisant le marteau réexe. Deux méthodes de percussion peuvent être utilisées : directe (parfois appelée immédiate) et indirecte (ou de médiation). Dans la percussion directe, la main qui percute entre directement en contact avec la surface corporelle de la personne, ce qui produit un son. Cette méthode est utilisée pour la percussion du thorax du nourrisson ou de la région sinusale chez l’adulte. La percussion indirecte est plus fréquente et nécessite l’utilisation des deux mains. La main qui percute frappe l’autre main qui, elle, est appuyée sur la peau de la personne examinée. Cela produit un son et une vibration subtile. La procédure est décrite ci-après. Main stationnaire Placer le majeur (parfois appelé plessimètre) en hyperextension et appuyer fermement la phalange distale et l’articulation interphalangienne distale sur la peau de la personne. Éviter d’appuyer sur une côte ou sur les omoplates puisque la percussion d’un os ne donne pas d’indication, car le son produit est toujours mat. Soulever les autres parties de la main pour qu’elles n’appuient pas sur la peau de la personne, sinon elles assourdissent les sons et les vibrations, à l’image du batteur qui arrête un roulement de tambour en utilisant sa main FIGURE 8.1. Main qui percute Utiliser le majeur de la main dominante comme doigt percuteur FIGURE 8.2. Tenir l’avant-bras à proximité de la surface de la peau, en gardant les bras et les épaules stables. S’assurer d’avoir les muscles stables, mais non tendus. Toute l’action se fait dans le poignet, et il doit être souple. Répartir les doigts, balancer vigoureusement le poignet et faire rebondir le majeur (main dominante) sur celui appuyé (majeur de l’autre main) sur la peau. Viser juste derrière le lit unguéal ou à l’articulation interphalangienne distale ; le but est de frapper la partie du doigt qui appuie le plus 8 FIGURE 8.1 Position des mains pendant la percussion fermement sur la surface de la peau. Fléchir le doigt de façon qu’il frappe avec le bout et non avec la pulpe. Le majeur doit frapper l’autre majeur de façon perpendiculaire. Percuter deux fois au même endroit par coups staccatos. Lever le doigt percuteur rapidement, car un rebond trop lent arrêtera les vibrations et le son. Déplacer ensuite les mains vers un nouvel emplacement sur le corps et répéter la technique de façon égale. La force du coup détermine le volume sonore de la note. Il n’est pas nécessaire d’obtenir un son très fort ; utiliser juste assez de force pour obtenir un son clair. L’épaisseur des tissus de la personne est un facteur dont il faut tenir compte. Il faudra percuter plus fortement pour les personnes obèses ou très musclées. Il arrive que des inrmières ayant peu d’expérience utilisent la percussion de façon maladroite ; elles se sentent alors surprises ou embarrassées si le doigt percuteur passe littéralement à côté de sa cible. Elles peuvent également grimacer si l’ongle de leur doigt percuteur est trop long et qu’il provoque de la douleur en frappant le doigt stationnaire. Comme pour toutes les habiletés techniques à acquérir, le perfectionnement vient avec la pratique. Après quelques semaines d’utilisation de la technique, les doigts deviennent plus habiles et précis, les mouvements sont naturels, et les oreilles apprennent à percevoir les différences subtiles entre les divers sons produits par la percussion. FIGURE 8.2 Mouvement du poignet pendant la percussion caractéristiques entendues comme des « notes » TABLEAU 8.1. Chacune des cinq notes de percussion se distingue par les éléments suivants. 1. Amplitude (ou intensité) – un son intense ou faible. Plus le son est fort, plus l’amplitude est grande. La force du son dépend de la vigueur de la percussion et de la capacité de la structure percutée à vibrer. 2. Son (ou fréquence) – le nombre de vibrations par seconde. Plus les vibrations sont rapides, plus les sons produits sont aigus ; des vibrations plus lentes produisent des sons de faible tonalité, donc graves. 3. Qualité (timbre) – la différence subjective de son en raison des tonalités harmoniques distinctes. Une tonalité pure est un son d’une seule et même fréquence. Les variations au sein d’une onde sonore produisent des harmoniques. Elles permettent de distinguer la note do sur un piano d’un do sur un violon. 4. Durée – le temps écoulé jusqu’à la n de l’audition de la note. Le son suit un principe fondamental : une structure contenant relativement plus d’air (comme les poumons) produit un son plus fort, plus profond Production d’un son Tous les sons résultent de la vibration d’une structure FIGURE 8.3. Percuter une structure corporelle provoque des vibrations qui produisent des ondes FIGURE 8.3 Onde sonore Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 161 et plus long, car elle vibre librement ; une structure dense, plus solide (comme le foie) donne un son plus doux, plus haut et plus court, car elle ne vibre pas aussi facilement. Bien que le TABLEAU 8.1 détaille cinq « normalités » de notes de percussion, il existe des variations dans la pratique clinique. La note entendue dépend de la nature de la structure sous-jacente, ainsi que de l’épaisseur de la paroi du corps et de la technique de percussion. Il ne faut pas apprendre ces différentes notes uniquement de la façon dont elles sont décrites. Il convient de se pratiquer sur un partenaire consentant. L’auscultation est l’écoute de sons produits par le corps ; il peut s’agir du cœur, des vaisseaux sanguins, des poumons ou encore de l’abdomen, par exemple. L’ajustement et la qualité du stéthoscope sont importants. Un instrument de mauvaise qualité ne transmettra pas les sons permettant une évaluation précise. L’angle des embouts doit pointer vers l’avant, en direction du nez. Cela correspond à l’angle naturel du canal auditif, et cette position bloque plus efcacement les sons de l’environnement. Si nécessaire, tordre légèrement les embouts pour qu’ils deviennent parallèles à l’angle des canaux auditifs. Les embouts devraient être bien ajustés ; s’ils causent de la douleur, c’est qu’ils sont insérés trop loin. Ajuster la tension des branches et essayer différents embouts en caoutchouc ou en plastique rigide pour atteindre le maximum de confort. Le tube devrait être fait d’un matériau épais, d’un diamètre intérieur de 4 mm et d’environ 36 à 46 cm de long. Un tube plus long peut déformer les sons entendus. Certains sons peuvent être perceptibles avec les oreilles – par exemple, la rudesse du gargouillement d’une respiration très embarrassée. Toutefois, la plupart des sons du corps demeurent très faibles et doivent être acheminés à l’oreille par l’intermédiaire d’un stéthoscope pour que l’inrmière puisse les évaluer. Le stéthoscope n’amplie pas le son du corps, mais il bloque les sons extérieurs. De tout l’équipement qui sera utilisé, le stéthoscope deviendra rapidement un instrument indispensable. Il faut apprendre ses caractéristiques et prendre le temps de l’ajuster pour soi-même. Choisir un stéthoscope avec une double tête – un diaphragme et une cloche (ou cupule) FIGURE 8.4. Le plus souvent, l’inrmière utilise le diaphragme parce qu’il est conçu pour mieux entendre les sons aigus de la respiration et du côlon, ainsi que les bruits normaux du cœur. (Puisque le stéthoscope touche de nombreuses personnes, en nettoyer la tête et la tubulure avec un tampon d’alcool an d’éliminer une éventuelle transmission d’infection.) Tenir le diaphragme fermement contre la peau de la personne – assez fermement pour laisser, quelques secondes, une empreinte du diaphragme 8.1.4 Q uestion de suivi Vous souhaitez ausculter l’abdomen de Matisse ; dans quelle position devriez-vous l’installer ? Q uestion de suivi Lorsque vous auscultez le thorax de Matisse, quelle partie de la tête du stéthoscope devez-vous utiliser ? Auscultation TABLEAU 8.1 162 Partie 2 Caractéristiques des notes de percussion CARACTÉRISTIQUE AMPLITUDE TONALITÉ QUALITÉ DURÉE EXEMPLE Matité Très faible Haute Sourde, sèche, matité absolue Très courte Lorsqu’il n’y a pas d’air dans la structure, muscles fermes, os, au-dessus d’une tumeur Submatité Faible Moyenne Sourde, étouffée Courte Organes relativement denses tels que le foie et la rate Sonorité Forte Basse Non musicale Modérée Au-dessus du tissu pulmonaire normal Hypersonorité Très forte Très basse Profonde et résonante Longue Normale au-dessus des poumons des enfants, anormale chez l’adulte ; poumons avec volume alvéolaire augmenté comme chez les personnes atteintes d’emphysème Tympanisme Forte Haute Musicale, comme le son d’un tambour (caisse claire) Longue et soutenue Au-dessus des viscères contenant de l’air tels que l’estomac et les intestins Connaissances préalables à l’examen clinique • Ne jamais écouter par-dessus les vêtements. Le fait d’écouter par-dessus les vêtements peut modier les bruits cardiaques et pulmonaires. Atteindre la région à ausculter en passant le stéthoscope sous les vêtements, mais veiller à ce que ceux-ci ne frottent pas sur la tête du stéthoscope. • Éviter l’interférence avec les bruits que l’in rmière produit elle-même tels que la respiration sur le tube ou le thump des tubes qui se heurtent. FIGURE 8.4 Stéthoscope : diaphragme (dessous) et cloche (dessus) après l’auscultation. La cloche a un creux profond en forme de cône ; il est préférable d’utiliser ce côté de la tête pour l’écoute des sons doux et aigus de faible intensité tels que les bruits cardiaques surajoutés et les murmures. Tenir la cloche en appliquant une légère pression contre la peau – juste assez pour obtenir une parfaite étanchéité. Toute pression supplémentaire créera l’effet d’un diaphragme en raison de la peau tendue, faisant ainsi disparaître les sons aigus faibles. Certains stéthoscopes plus récents ont un diaphragme ottant en guise de tête. Cela permet d’écouter à la fois les basses et les hautes fréquences des sons sans devoir tourner la tête du stéthoscope. Pour écouter les sons de basse fréquence (en mode cloche traditionnelle), il faut tenir très légèrement la tête sur la peau ; pour entendre les sons de haute fréquence (en mode diaphragme traditionnel), il faut appuyer le stéthoscope fermement sur la peau. Avant de pouvoir évaluer les sons corporels, il faut éliminer toute confusion avec les bruits environnants. • Garder la salle d’examen dans le calme. Tout bruit supplémentaire en provenance de l’environnement peut produire un grondement dans le stéthoscope. • Garder la salle d’examen chaude. Si la personne commence à trembler, les contractions musculaires involontaires pourraient étouffer les autres sons. • Nettoyer la tête du stéthoscope avec un tampon d’alcool, puis la réchauffer par des frottements dans la paume de la main. Cela permet d’éviter le « signe du chandelier » suscité lorsqu’un objet froid entre en contact avec le thorax chaud. • Minimiser le frottement de la tête du stéthoscope sur une poitrine velue – cela provoque un crépitement qui imite des bruits respiratoires anormaux appelés crépitants – en mouillant les poils du torse avant l’auscultation de cette région. L’auscultation est une compétence que les inrmières moins expérimentées doivent apprendre, mais qui est difcile à maîtriser. Il faut d’abord connaître la large gamme des sons normaux. Une fois que l’inrmière les reconnaît, elle peut distinguer les sons anormaux et surajoutés. Dans certaines parties du corps, il arrive d’entendre plusieurs sons différents, et cela peut être source de confusion. Il est possible d’écouter, de façon sélective, et d’essayer d’isoler un seul bruit à la fois pour bien l’entendre. En écoutant, il faut se demander : Qu’est-ce que j’écoute en ce moment ? Que devrais-je entendre à cet endroit ? 8.2 8 Q uestion de suivi Dans le cas de Matisse, que devriez-vous entendre au cours de l’auscultation pulmonaire ? Préparation La salle d’examen devrait être chaude et confortable, tranquille, privée et bien éclairée. Dans la mesure du possible, éliminer tout bruit distrayant (appareils bruyants, radio, télévision, personnes qui parlent), sinon, il sera difcile d’entendre les sons corporels. L’examen de la personne ne devrait pas être interrompu par d’autres membres de l’équipe soignante. L’éclairage par la lumière du jour reste le meilleur, même s’il est rarement disponible ; une lumière articielle provenant de deux sources sufra et empêchera l’ombre. Une lampe murale ou en col de cygne est nécessaire pour procurer un éclairage de haute intensité. Cela permet un éclairage tangentiel (à angle) qui favorise le visionnement des pulsations et des contours corporels, mieux que ne le fait l’éclairage perpendiculaire. Positionner la table d’examen an que les deux côtés de la personne soient facilement accessibles FIGURE 8.5. La table doit être à une hauteur sufsante pour que l’inrmière se tienne droite, sans se pencher. Elle doit également permettre d’élever la tête de la personne jusqu’à un angle de 45°. Un siège rotatif est utilisé pour les parties de l’examen où il faut être assis. Une table de chevet ou une table sur roulettes est nécessaire pour installer tout le matériel. 8.2.1 Préparation et matériel Pendant l’examen, éviter de chercher de l’équipement ou de quitter la salle pour trouver un article. Tout le matériel doit être à la portée de la main et Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 163 • échelle de Snellen de poche (pour évaluer la vision) ; • papier et crayon pour prendre des notes ; • stylo pour écrire sur la peau ; • ruban à mesurer souple et règle, marqués en centimètres ; • marteau à réexes ; • objet pointu (s’il y a aucune aiguille, fendre un abaisse-langue sur la longueur) ; • saturomètre (en milieu hospitalier) ou oxymètre ; • boules de ouate ; • spéculum vaginal ; • gants non stériles ; • nécessaire à prélèvement cytologique ; • lubriant ; • matériel pour le dépistage de sang occulte dans les selles ; • adipomètre. FIGURE 8.5 Disposition optimale d’une table d’examen 15 La technique d’utilisation de l’otoscope est présentée dans le chapitre 15, Oreilles. placé d’une façon organisée FIGURE 8.6. Les articles ou les instruments suivants sont généralement nécessaires pour effectuer l’examen physique : • balance avec toise pour prendre le poids et la taille de la personne ; • étriers amovibles ; • sphygmomanomètre ; • stéthoscope avec cloche et diaphragme ; • thermomètre (tympanique ou électronique) ; • saturomètre (en milieu hospitalier) ou oxymètre de pouls ; La plupart des instruments sont décrits à leur première mention dans le texte qui suit. Toutefois, il est conseillé de lire cette introduction portant sur l’otoscope et l’ophtalmoscope. L’otoscope projette la lumière dans le canal de l’oreille et sur la membrane tympanique 15 . La base sert de poignée et contient l’alimentation électrique par une pile. Pour attacher la tête de l’otoscope, l’appuyer délicatement sur la portion mâle de la base et tourner vers la droite jusqu’à ce qu’un arrêt se fasse sentir. Pour allumer l’ampoule, appuyer sur le bouton rouge (ou noir ou vert) du rhéostat vers le bas et vers la droite. (Toujours l’éteindre après l’avoir utilisé pour augmenter la durée de vie de l’ampoule et de la pile.) Cinq spéculums, chacun ayant une taille différente, peuvent être xés à la tête FIGURE 8.7. (Le spéculum court • lampe de poche ; • otoscope/ophtalmoscope ; • diapason ; • spéculum nasal (s’il n’y a pas de spéculum court et large avec l’otoscope) ; • abaisse-langue ; FIGURE 8.6 Matériel nécessaire à l’examen 164 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique FIGURE 8.7 Otoscope et spéculums et large est conçu pour l’examen des narines.) Choisir le spéculum le plus large qui pourra s’insérer aisément dans le canal auditif. L’ophtalmoscope éclaire l’intérieur des structures de l’œil. Son système de lentilles et de miroirs permet de regarder au fond de l’œil (arrière-plan) par la pupille, un peu comme le fond d’une pièce peut être vu par le trou de la serrure. La tête de l’ophtalmoscope se xe sur la base de l’instrument, comme pour l’otoscope FIGURE 8.8. La tête comporte cinq parties : 1. fenêtre d’ouverture, avec cinq ouvertures ; 2. disque de sélection des ouvertures sur la face avant ; 3. miroir de renvoi à l’avant ; FIGURE 8.9 Ouvertures de l’ophtalmoscope 8 4. disque de sélection des lentilles ; 5. indicateur de lentilles (dioptries). Sélectionner l’ouverture à utiliser FIGURE 8.9. La rotation du sélecteur de lentilles permet de faire la mise au point sur la partie examinée. L’indicateur de lentilles montre un nombre, ou dioptrie, qui indique la valeur de la lentille utilisée. Les chiffres noirs (ou verts) indiquent une lentille positive, de 0 à +40. Les chiffres rouges indiquent une lentille négative, de 0 à –20. L’ophtalmoscope peut compenser la myopie ou l’hypermétropie, mais il ne corrige pas l’astigmatisme 14 . Le matériel suivant sera utilisé occasionnellement, selon les besoins : goniomètre pour mesurer l’amplitude des mouvements communs, sonomètre doppler pour augmenter l’écoute du pouls ou la mesure de la pression artérielle (PA), FIGURE 8.8 Ophtalmoscope fœtoscope pour ausculter le cœur fœtal et pelvimètre pour mesurer la largeur du bassin. Pour un enfant, utiliser des embouts pédiatriques pour le stéthoscope et l’otoscope, du matériel pour faire l’évaluation de son développement, ainsi que des jouets adaptés à son âge ; pour un nourrisson, se servir également d’une tétine ou d’une sucette. 8.2.2 Propreté Il ne faut pas laisser le stéthoscope devenir un « staph-oscope » couvert de bactéries ! Les stéthoscopes et tout le matériel fréquemment utilisé sur plusieurs clients peuvent devenir des véhicules de transmission des infections. Le nettoyage des instruments avec un tampon d’alcool avant et après l’examen de chaque client est un moyen efcace de prévention et de contrôle des infections (PCI). Pour la manipulation de l’équipement, il est important de désigner une surface « propre » et une surface « souillée ». Dans un environnement hospitalier, il est pratique d’utiliser la table de chevet comme surface propre et la table d’appoint pour y déposer le matériel souillé. En clinique, déterminer deux aires de travail différentes sur la table d’appoint ajustable. Délimiter l’emplacement de la surface propre par une ou deux serviettes en papier jetables. Sur les serviettes, disposer le nouvel équipement, récemment nettoyé ou désinfecté, qui sera utilisé avec le client. Employer des lingettes désinfectantes pour nettoyer tout matériel ayant servi pour chacun des clients (p. ex., la tête du stéthoscope, le marteau à réexes, la règle). Tout au long de l’examen physique, choisir chaque instrument sur la surface propre et, après s’en être servi auprès du client, le placer sur la surface souillée ou, dans le cas des abaisse-langue ou des gants, les jeter directement dans la poubelle. Chapitre 8 14 Le chapitre 14, Yeux, donne plus de détails sur la façon de tenir l’instrument et sur ce qu’il faut inspecter pen­ dant l’examen. Q uestion de suivi Nommez une précaution que vous devriez prendre avant de procéder à l’auscultation de Matisse. Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 165 8.3 Environnement sain et sécuritaire En plus de surveiller étroitement la propreté de l’équipement, il est nécessaire de prendre toutes les mesures possibles pour éviter une éventuelle transmission d’infections entre les clients ou encore entre le client et l’infirmière ENCADRÉ 8.1 . Contracter une infection nosocomiale (une infection acquise au cours d’une hospitalisation) représente un danger réel. Environ 10 % des clients admis dans un centre hospitalier québécois contracteraient une infection nosocomiale, ce qui représente annuellement de 80 000 à 90 000 personnes (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2008). Certains endroits dans les centres hospitaliers peuvent constituer des réservoirs pour des microorganismes virulents, dont certains sont devenus résistants aux antibiotiques tels que le staphylocoque doré résistant à la méticilline, l’entérocoque résistant à la vancomycine ou la tuberculose multirésistante. Pour certains autres microorganismes, il n’existe encore aucun traitement connu, par exemple pour le virus de l’immunodécience humaine (VIH). Q uestion de suivi Devriez-vous porter des gants pendant l’évaluation de Matisse ? ENCADRÉ 8.1 Puisqu’environ le tiers de ces infections seraient évitables, il est important de mettre en place un programme structuré de PCI comportant notamment la désinfection de l’appareillage utilisé pour l’examen physique, mais surtout en mettant l’accent sur une hygiène des mains exemplaire (OIIQ, 2008). Ainsi, le meilleur moyen de réduire le risque de transmission des microorganismes pathogènes est de procéder à l’hygiène des mains à fond pendant 10 à 15 sec. (ou plus longtemps si les mains paraissent souillées) FIGURE 8.10 et ENCADRÉ 8.1. Dans les centres hospitaliers, des distributeurs sont maintenant installés à l’extérieur des chambres des clients. Ils contiennent une solution antiseptique sans eau, à séchage rapide, pour le lavage des mains avant d’entrer dans une chambre et en sortant de FIGURE 8.10 Procéder à une hygiène adéquate des mains permet de réduire le risque de transmission de microorganismes pathogènes. celle-ci. Cette solution antiseptique à base d’alcool nécessite moins de temps qu’une hygiène des mains, permet de tuer les germes plus rapidement et est moins dommageable pour la peau puisqu’elle contient généralement un émollient. Les solutions à base d’alcool sont particulièrement efcaces contre les bactéries à Gram positif et à Gram négatif, le Mycobacterium tuberculosis de même que contre la plupart des virus, notamment les virus de l’hépatite B et C, le VIH et les entérovirus (Boyce et Pittet, 2002). Procéder à l’hygiène des mains avec de l’eau et du savon en les frottant bien lorsque les mains sont visiblement souillées ou à l’occasion de contacts avec des clients qui sont infectés par des microorganismes à spores tels que le Clostridium difcile ou le Bacillus anthracis. Porter des gants lorsqu’il existe un risque potentiel de contact avec n’importe quel liquide corporel (p. ex., le sang, les muqueuses, le liquide de drainage, les lésions cutanées). Le port de gants ne remplace toutefois pas l’hygiène des mains, puisque les gants peuvent comporter des trous indétectables ou se déchirer pendant leur utilisation ; en outre, les mains pourraient être contaminées au moment de retirer les gants. Normes de précaution à appliquer à tous les clients Les normes de précaution de base s’appuient sur le principe que le sang, les liquides corporels – sécrétions et excrétions (sauf la sueur), – la peau présen tant des lésions, ainsi que les membranes muqueuses peuvent contenir des agents infectieux transmissibles. Ces normes sont conçues pour être appliquées auprès de toutes les personnes, nonobstant leur risque ou leur statut infectieux conrmé ou présumé, en tout temps lorsque des soins sont prodigués. Ces normes de précaution sont les suivantes. • avant de procéder à une intervention aseptique ; • après un risque de contact avec du liquide organique et après avoir enlevé les gants ; • après un contact avec la personne ou son environnement. HYGIÈNE DES MAINS L’usage d’un désinfectant pour les mains à base d’alcool est la méthode privilégiée d’hygiène des mains dans tous les milieux de soins à moins que ne s’appliquent les situations suivantes, pour lesquelles il faudrait préférer l’hygiène des mains avec de l’eau et du savon : Cette mesure, qui permet de prévenir la transmission d’infections nosoco miales, devrait être appliquée : • lorsqu’une accumulation de désinfectant pour les mains à base d’alcool engendre un inconfort après de multiples utilisations ; • avant de toucher à une personne ou à son environnement ; • pour retirer la saleté ou les matières organiques visibles ; 166 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique ENCADRÉ 8.1 Normes de précaution à appliquer à tous les clients (suite) • au point de service, après avoir soigné un client atteint d’une infection à norovirus ou à Clostridium difcile ; une protection oculaire ou faciale durant des interventions susceptibles d’entraîner des éclaboussures de liquide organique. • durant les éclosions ou dans les établissements où le degré de transmission des norovirus ou des infections à C. difcile est élevé ; TECHNIQUES SÉCURITAIRES D’INJECTIONS • en cas d’exposition soupçonnée ou avérée à des articles contaminés au bacille du charbon ; • immédiatement après avoir utilisé les toilettes. PORT DE GANTS, DE BLOUSE, DE MASQUE, DE PROTECTION OCULAIRE OU FACIALE 1) Employer une technique aseptique pour prévenir la contamination du maté riel stérile utilisé pour faire des injections. 2) Les aiguilles, les canules et les seringues sont du matériel stérile et à usage unique ; ne pas les réutiliser pour d’autres clients. HYGIÈNE RESPIRATOIRE/CIVISME Le port de gants ne remplace pas l’hygiène des mains. Ils devraient être portés au cours des tâches impliquant un contact réel ou potentiel avec des liquides organiques, les muqueuses, la peau non intacte d’une personne ou des surfaces contaminées par ces substances. Si les mains du soignant ne sont pas intactes, le port des gants s’impose également. Le port de la blouse est recommandé pendant les soins présentant un risque pour le soignant de contact avec le sang et les liquides organiques du client par des éclaboussures ou des pro jections de gouttelettes, de soins comportant un risque de transmission d’un agent pathogène venant d’un client et de son environnement et au cours de soins prodigués à une personne immunodéprimée. Il faut utiliser un masque et Cette norme s’adresse aux clients et aux personnes qui les accompagnent et qui sont porteurs d’infections respiratoires transmissibles, mais non diagnostiquées. Il faut inclure : 1) l’éducation du personnel hospitalier, des clients et des visiteurs ; 2) la pose d’afches lisibles dans les différentes langues utilisées par la population ; 3) des mesures de contrôle (p. ex., se couvrir le nez et la bouche avec un mouchoir lorsque la personne tousse ou éternue, jeter rapidement les mouchoirs utilisés, utiliser des masques chirurgicaux pour les per sonnes qui toussent) ; 4) l’hygiène des mains après avoir eu un contact avec des sécrétions respiratoires ; 5) des espaces de plus de un mètre entre les personnes atteintes d’infections respiratoires et celles qui se trouvent dans les aires d’attente communes. Sources : Adapté de Agence de la santé publique du Canada (ASPC) (2012a, 2012b) ; Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS) (s.d.) 8.4 Contexte clinique 8.4.1 Approche générale L’inrmière tient compte de son propre état émotionnel et de celui de la personne à être examinée. Celle-ci est habituellement anxieuse (nerveuse) en raison de l’appréhension qu’elle éprouve à se faire examiner par une personne étrangère et à cause du résultat inconnu de l’examen physique. Si cette anxiété peut être réduite, la personne se sentira plus à l’aise, et les données recueillies reéteront son état naturel plus fidèlement. Une infirmière conante, sûre d’elle, attentionnée et paisible peut aider à diminuer cette anxiété. Les inrmières moins expérimentées peuvent éprouver une certaine appréhension. La plupart d’entre elles s’inquiètent au sujet de leurs compétences techniques, ont peur de ne pas remarquer quelque chose d’important ou d’oublier une étape. Plusieurs sont gênées elles-mêmes à l’idée de rencontrer une autre personne partiellement vêtue. Toutes ces peurs sont naturelles et fréquentes. Le meilleur moyen de les réduire est d’effectuer beaucoup de séances pratiques dirigées sur un sujet volontaire et en santé, habituellement une collègue étudiante. L’inrmière doit avoir conance en ses capacités motrices avant d’être en mesure de réellement déterminer ce qu’elle voit ou entend chez un « vrai » client. Cette conance se développera à l’aide d’une pratique supervisée par un tuteur expérimenté, dans une atmosphère où il est acceptable de commettre des erreurs et de poser des questions. La collègue-sujet devra agir comme un client, permettant ainsi à l’inrmière d’expérimenter une situation « réelle » tout en demeurant dans un contexte sécuritaire. Une fois qu’elle se sent à l’aise, elle accompagne son tuteur pour l’examen physique d’un client réel et elle observe comment se comporte une inrmière expérimentée. 8.4.2 Déroulement de l’examen À l’aide de cette préparation, l’inrmière pourra interagir avec son propre client d’une manière conante. Commencer par prendre les mesures de la personne : taille, poids, PA, température, pouls et respiration 9 . Si cela est jugé nécessaire à cette étape, mesurer aussi l’acuité visuelle de la personne à l’aide de l’échelle de Snellen. Toutes ces actions semblent coutumières et sont relativement peu menaçantes ; elles permettront à la personne de s’habituer graduellement à l’examen physique. Par la suite, demander à la personne de se dévêtir et de mettre une chemise d’examen, tout en conservant sa culotte ou son caleçon. La personne se sentira plus à l’aise, et le sous-vêtement pourra être facilement retiré juste avant l’examen des organes génitaux. Chapitre 8 9 Le chapitre 9, Questionnaire général, mesure des signes vitaux, explique la façon de prendre les mesures du client. Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 167 8 À moins que son aide ne soit requise, l’inrmière quitte la pièce pendant que la personne se dévêt. Lorsqu’elle revient dans la pièce, l’inrmière procède à l’hygiène des mains en présence de la personne. Cela démontre qu’elle est soucieuse de la protection de celle-ci et qu’elle reprend l’examen à neuf pour elle. Expliquer à la personne chaque étape de l’examen physique et la façon dont elle peut y collaborer. L’encourager à poser des questions. S’assurer que ses propres mouvements demeurent lents, méthodiques et délibérés. 12 et 22 Le chapitre 12, Peau, cheveux et ongles, décrit l’examen de ces éléments. Le chapitre 22, Système musculosquelettique, décrit les étapes de l’examen de ce système. Commencer par toucher les mains de la personne, en vériant la coloration de la peau, les ongles et les jointures 12 et 22 . Encore une fois, il s’agit d’une manière moins menaçante d’habituer la personne à se faire toucher, la rendant ainsi plus à l’aise. La plupart des gens sont habitués à se faire toucher les mains par des personnes plus ou moins étrangères. Tout au long du déroulement de l’examen physique, il est essentiel d’éviter les distractions et de se concentrer sur une étape à la fois. La séquence des étapes peut changer en fonction de l’âge de la personne et de la préférence de l’infirmière. Toutefois, il faudrait que celle-ci adopte une méthode qui lui convient et qu’elle s’y tienne an d’éviter toute omission. Organiser les étapes de manière à éviter à la personne de changer de position trop souvent. Même si une exposition adéquate de la personne est nécessaire, utiliser des couvertures supplémentaires au besoin pour conserver son intimité et éviter qu’elle prenne froid. 27 Pour la séquence des étapes d’un examen complet, con­ sulter le chapitre 27, Évalua­ tion complète de la santé. Ne pas hésiter à mettre sur papier la séquence de l’examen et s’y référer tout au long de son déroulement. En lui expliquant que ces notes assurent l’exactitude de l’information, l’inrmière rassure la personne, et celle-ci acceptera tout naturellement cette démarche. Plusieurs établissements proposent l’utilisation d’un formulaire imprimé. Avec l’expérience, le recours à ces formulaires devient moins fréquent. Toutefois, même avec un formulaire, il arrive parfois de manquer une étape de l’examen. Lorsqu’elle s’en rend compte, l’inrmière effectue la manœuvre au cours de la séquence ultérieure qui lui apparaît la plus logique 27 . Pendant l’examen physique, il est possible, à l’occasion, d’offrir de brefs enseignements à la personne examinée. Par exemple, l’inrmière peut lui dire : « Ce tapotement dans votre dos (percussion) est un peu comme de jouer sur différents tambours. Les différentes notes que j’entends m’indiquent où commence et où nit chaque organe. Vous entendez probablement ces différences vous-même à l’intérieur de votre corps. » Ou encore : « Tout le monde émet deux sons pour chaque battement cardiaque, un peu comme “lub-dup”. Le vôtre semble normal. » L’infirmière n’agit pas ainsi à chaque étape de l’examen, autrement il lui faudra fournir un 168 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique commentaire même si elle découvre une anomalie. Mais un certain partage d’information bâtit une relation et fait s’accroître la conance que la personne éprouve envers l’inrmière. Cela permet aussi à la personne d’avoir un petit peu plus de maîtrise sur une situation où, autrement, elle pourrait se sentir complètement désemparée. À un certain moment, l’inrmière voudra s’attarder sur une partie du corps de la personne an de se concentrer pour y rechercher quelque chose de complexe. Pour éviter que la personne devienne anxieuse, lui dire : « Je choisis toujours plusieurs endroits différents de la poitrine pour écouter les bruits du cœur. Ce n’est pas nécessairement parce que je prends beaucoup de temps que cela indique une anormalité chez vous. » Mais il peut arriver que l’inrmière trouve effectivement quelque chose d’anormal, et elle voudra alors qu’un autre professionnel de la santé valide son opinion. Il faudra en informer la personne, mais se garder de l’alarmer inutilement. Dire quelque chose comme : « Je n’ai pas pu obtenir une évaluation complète des bruits de votre cœur. J’aimerais que ma collègue vienne les écouter, elle aussi. » À la n de l’examen physique, résumer les éléments d’information recueillis et faire part de ce qui est nécessaire à la personne. La remercier pour ce temps passé avec elle. Dans un contexte hospitalier, l’informer de ce qui est prévu par la suite. Avant de quitter une personne hospitalisée, rebaisser le lit, rendre la cloche d’appel accessible, s’assurer que la personne est confortablement installée et en sécurité et replacer dans leur position initiale la table de chevet, la télévision ou tout autre équipement déplacé pour l’examen. Particularités liées au développement Les enfants sont différents des adultes. Leur différence de taille est évidente. Leur corps croît d’après une courbe prévisible qui est évaluée au cours de l’examen physique. Cependant, leur comportement diffère aussi, et il se modie selon des stades prédénis, tout comme le corps. Toute inrmière se doit de connaître les caractéristiques émotionnelles et cognitives liées à chacun de ces stades, et elle effectue un examen physique en fonction de ces principes de développement (Berk, 2007 ; Hockenberry et Wilson, 2006). Avec les enfants, le but recherché dans ce contexte est d’augmenter leur confort. Cette approche révèle le plus possible leur état naturel et leur laisse un bien meilleur souvenir des professionnels de la santé. Il faut se souvenir qu’un examen de routine ne sera jamais que de la routine pour les enfants. L’inrmière peut contribuer à augmenter leur confort en appliquant ces quelques approches et principes développementaux. L’ordre des stades du développement est bien plus signicatif que l’âge chronologique exact. Chaque enfant est une personne unique et ne cadre pas exactement dans une catégorie en particulier. Par exemple, si les efforts pour « jouer à un jeu » avec un enfant d’âge préscolaire sont repoussés, il faut modier l’approche en se référant aux mesures de sécurité, comme avec un trottineur. Préparation Nourrissons • Un nourrisson ne s’opposera pas à être nu. Faire retirer les vêtements par le parent, mais laisser la couche à un garçon pour éviter un jet d’urine vers le haut. Selon le psychanalyste américain Erik Erikson (1902-1994) la principale tâche de la petite enfance est de bâtir la conance. Un nourrisson est complètement dépendant de ses parents pour ses besoins fondamentaux. Si ces derniers sont comblés constamment et rapidement, le nourrisson se sent en sécurité et apprend à faire conance aux autres. Position • Le parent devrait toujours être présent pendant l’examen afin de comprendre comment se déroulent une croissance et un développement normaux et aussi pour assurer un sentiment de sécurité à l’enfant. • Déposer le nouveau-né ou le nourrisson à plat sur une table d’examen matelassée FIGURE 8.11. Le nourrisson peut aussi être maintenu contre la poitrine de son parent au cours de certaines étapes de l’examen physique. • Quand le nourrisson peut se tenir assis sans appui (vers l’âge de six mois), la plus grande partie possible de l’examen devrait se dérouler lorsqu’il est assis sur les genoux de son parent. • Vers l’âge de 9 à 12 mois, le nourrisson est pleinement conscient de son entourage. Pour lui, tout ce qui se trouve à l’extérieur de son champ de vision est perdu ; donc, pour cette raison, son parent doit demeurer bien en vue. • L’examen physique devrait avoir lieu une ou deux heures après que le bébé a été nourri, lorsqu’il n’est ni trop somnolent ni trop affamé. • Maintenir un environnement chaud. Au besoin, utiliser un système de chauffage d’appoint pour un nouveau-né. • Un nourrisson se laissera volontiers toucher, mais l’inrmière doit s’assurer que ses mains et la tête de son stéthoscope sont assez chaudes. 8 • L’inrmière utilise une voix douce et mélodieuse au cours de l’examen ; un bébé réagit davantage au timbre de voix qu’aux paroles. • Un nourrisson apprécie le contact visuel ; il aimera être xé dans les yeux de temps en temps. • Un nourrisson préfère un visage souriant à un visage renfrogné. (Il arrive souvent que les inrmières peu expérimentées soient tellement absorbées par leur technique qu’elles afchent un air sérieux ou sévère.) Sourire et prendre le temps de jouer avec l’enfant. • Garder les mouvements souples et délibérés, non saccadés. • Avoir recours à une sucette lorsque le nourrisson pleure ou au cours des étapes plus effractives. • Offrir des jouets aux couleurs vives pour distraire le nourrisson ou lorsqu’il est incommodé. • Laisser un nourrisson plus âgé toucher au stéthoscope ou à un abaisse-langue. Séquence • Si le nourrisson dort, en proter pour écouter le cœur, les poumons et les sons abdominaux en premier. • Effectuer les étapes les moins incommodantes en premier 27 . Garder les étapes effractives de l’examen pour la n : yeux, oreilles, nez et gorge. • Susciter le réexe de Moro (ou réexe des bras en croix) seulement à la n de l’examen étant donné qu’il peut faire pleurer le nourrisson. Trottineurs FIGURE 8.11 L’inrmière maintient un contact visuel et physique avec le nourrisson pendant l’examen. 27 Le chapitre 27, Évaluation complète de la santé, décrit la séquence des étapes de l’examen physique occasionnant le moins d’inconfort pour le client. Il s’agit du stade de développement de l’autonomie, comme vu par Erikson. Cependant, le besoin de découvrir le monde et d’être indépendant entre en conit avec la dépendance envers les parents. Cela occasionne souvent de la frustration et du négativisme. Il peut être difcile d’effectuer l’examen physique chez un trottineur ; il ne faut pas prendre cela personnellement. Comme il est pleinement conscient de ce nouvel environnement, Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 169 le trottineur peut avoir peur et s’accrocher à son parent. De plus, il craint en général les procédures effractives et n’aime pas être contraint dans ses mouvements. Position 15 Dans le chapitre 15, Oreilles, la gure 15.15 montre de quelle façon faire collaborer un enfant à l’examen. 16 La gure 16.21 du cha­ pitre 16, Nez, bouche et gorge, montre comment le parent doit maintenir l’enfant pour l’examen. • Le trottineur devrait être assis sur les genoux de son parent pour toute la durée de l’examen. Lorsqu’il doit être allongé sur le dos (comme pour l’examen de l’abdomen), déplacer les chaises de façon que les genoux de l’inrmière soient accolés à ceux du parent. Faire s’étendre le trottineur sur les genoux de son parent et déposer ses jambes sur ceux de l’inrmière. • Demander l’aide d’un parent coopératif pour maintenir l’enfant en place au cours des procédures effractives. Les jambes de l’enfant peuvent être coincées entre celles du parent. Un des bras du parent peut entourer la tête de l’enfant et la maintenir contre la poitrine du parent, et l’autre bras peut immobiliser les bras de l’enfant 16 . • Féliciter l’enfant lorsqu’il collabore. Séquence • Recueillir des données objectives au cours de l’histoire de santé, qui est une période moins stressante. Pendant que l’attention est portée sur le parent, noter les capacités motrices et la motricité fine de l’enfant ainsi que sa démarche. • Débuter avec des « jeux », par exemple le test Denver II ou l’évaluation neurologique des nerfs crâniens. • Commencer par les endroits non menaçants. Garder pour la n les procédures pénibles telles que l’évaluation de la tête, des oreilles, du nez ou de la gorge. Enfants d’âge préscolaire • Les enfants âgés de un ou deux ans peuvent comprendre les symboles ; donc un objet familier et sécurisant, comme une couverture ou un toutou, peut être utile. À ce stade, l’initiative de l’enfant est en cours d’acquisition. L’enfant d’âge préscolaire entrevoit les tâches indépendamment les unes des autres, il planifie chacune et la mène à terme. Il est souvent coopératif, serviable et facile à impliquer. Toutefois, les enfants de cet âge ont beaucoup d’imagination et peuvent percevoir la maladie comme étant une punition pour avoir été « méchants ». Le concept de l’image corporelle est limité. L’enfant craint toute blessure ou mutilation corporelle ; il peut donc être réticent devant une procédure effractive (p. ex., l’utilisation d’un abaisse-langue, la prise de température rectale, une injection ou une ponction veineuse). • Un enfant de deux ans n’aime pas se dévêtir ; laisser le parent lui enlever ses vêtements, un à la fois. • Les enfants âgés de un ou deux ans aiment dire « non ». Ne pas offrir la possibilité de choisir lorsqu’il n’y a pas de choix à faire. Éviter de dire : « Est-ce que je peux écouter ton cœur maintenant ? » Lorsqu’un enfant de un ou deux ans dit « non », mais que l’inrmière effectue quand même ce qu’elle a à faire, elle perd sa conance. Énoncer plutôt une directive claire et ferme, d’un ton qui recommande la collaboration : « J’aimerais que tu te couches, car j’ai besoin de regarder ton ventre. » • Les enfants âgés de un ou deux ans aiment faire des choix. Lorsque c’est possible, favoriser Partie 2 • Faire la démonstration de la procédure d’examen sur le parent 15 . Préparation • Commencer par accueillir l’enfant et le parent en les nommant, mais avec un enfant âgé de un à six ans, mettre l’accent sur le parent. Faire mine d’ignorer l’enfant au début permet à celuici de s’adapter graduellement et à distance à l’inrmière. Porter ensuite graduellement l’attention sur l’enfant, en s’attardant d’abord à un jouet ou à un objet qu’il tient ou encore en le complimentant au sujet de ses vêtements, de ses cheveux ou à quel point il est un grand garçon ou elle est une grande lle. Si l’enfant se sent prêt, des signes se manifesteront : contact visuel avec l’inrmière, sourire, conversation avec lui ou encore jouet ou pièce d’équipement qu’il accepte de prendre. 170 l’autonomie en offrant des options limitées : « Tu fais bien cela. Maintenant, je dois écouter ton coeur. » Connaissances préalables à l’examen clinique Position • Avec un enfant âgé de trois ans, le parent devrait être présent, et il pourrait le tenir assis sur ses genoux FIGURE 8.12. • Un enfant de quatre ou cinq ans se sent habituellement à l’aise sur la table d’examen « de grand garçon » ou « de grande lle », avec le parent près de lui. Préparation • Un enfant d’âge préscolaire peut parler. La communication verbale devient maintenant utile, mais il ne faut pas oublier que la capacité de compréhension de l’enfant demeure limitée. Donner des explications courtes et simples. • L’enfant d’âge préscolaire accepte habituellement de se dévêtir. Lui laisser ses sousvêtements jusqu’à l’examen des organes génitaux. d’écouter ceux de l’enfant. Une technique qui permet de garder l’attention de l’enfant d’âge préscolaire est de tracer sa silhouette sur le papier de la table d’examen. Commenter la grandeur de l’enfant et, par la suite, dessiner un cœur et un estomac et écouter les sons de cette poupée de papier avant d’écouter ceux de l’enfant. Après l’examen, l’enfant peut rapporter cette poupée de papier à la maison en guise de souvenir. • Avoir une approche lente, patiente et délibérée. Ne pas se presser. • Au cours de l’examen, rassurer l’enfant d’âge préscolaire et lui fournir la rétroaction dont il a besoin : « Ton bedon va très bien. » 8 • Complimenter l’enfant pour sa collaboration. FIGURE 8.12 Enfant d’âge préscolaire assis sur sa mère durant l’examen • Parler à l’enfant et lui expliquer exactement les étapes de l’examen physique. • Ne pas offrir la possibilité de choisir lorsqu’il n’y a pas de choix à faire. • Comme pour le trottineur, favoriser l’autonomie de l’enfant d’âge préscolaire en lui proposant de choisir lorsque c’est possible. • Permettre à l’enfant de jouer avec l’équipement dans le but de réduire ses peurs FIGURE 8.13. • Un enfant d’âge préscolaire aime aider ; lui laisser tenir le stéthoscope. • Avoir recours aux jeux. Demander à l’enfant « d’éteindre » la lumière de la lampe de poche en soufant dessus pendant l’écoute des sons respiratoires. Ou encore, faire semblant d’écouter les sons cardiaques de son toutou avant Séquence • Examiner d’abord le thorax, l’abdomen, les extrémités et les organes génitaux. Même si l’enfant d’âge préscolaire est habituellement coopératif, continuer d’évaluer seulement à la n la tête, les yeux, le nez et la gorge. Enfants d’âge scolaire Au cours de la période de l’âge scolaire, la principale occupation de l’enfant est de développer sa compétence. Il acquiert des compétences de base à l’école et dans son réseau social et il cherche l’approbation de ses parents et enseignants. Lorsqu’il réussit quelque chose, l’enfant éprouve un sentiment d’accomplissement. Au cours de l’examen, il se montre coopératif et souhaite en apprendre plus au sujet de son corps. Même si le langage est maintenant plus sophistiqué, il ne faut pas surestimer l’enfant d’âge scolaire et ne pas le traiter comme un petit adulte. Le degré de compréhension de l’enfant ne correspond pas à celui de son discours. Q uestion de suivi Dans le cas de Matisse, allez-vous lui permettre de manipuler le matériel et lui donner des explications tout au long de l’examen ? Position • L’enfant d’âge scolaire devrait s’asseoir sur la table d’examen. • Un enfant âgé de cinq ans a de la pudeur. Pour préserver son intimité, laisser un enfant plus âgé (de 11 ou 12 ans) décider si ses parents ou ses frères et sœurs doivent être présents. Préparation • Briser la glace en discutant brièvement de sa famille, de l’école, des amis, de la musique ou des sports. • L’enfant devrait se dévêtir seul, garder sa culotte ou son caleçon et utiliser une chemise d’examen et une couverture. FIGURE 8.13 Laisser l’enfant d’âge préscolaire jouer avec le matériel. • Faire la démonstration de l’équipement ; un enfant d’âge scolaire est curieux de comprendre comment fonctionne le matériel. Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 171 17, 24 et 26 Pour connaître l’estimation de la maturité sexuelle chez l’homme et la femme selon Tanner, voir les tableaux 17.1, 24.1 et 26.1 des chapitres 17, Seins et ganglions lymphati­ ques régionaux, 24, Système génito­urinaire masculin, et 26, Système génito­ urinaire féminin. • Émettre des commentaires au sujet de certains bruits du corps et de son fonctionnement. Un enfant âgé de huit ou neuf ans a déjà une certaine compréhension du corps et désire en apprendre davantage. Il est gratiant de voir s’illuminer les yeux de l’enfant lorsqu’il entend les bruits cardiaques, par exemple. Séquence • Comme pour l’adulte, progresser de la tête aux pieds. Adolescents L’adolescence est la période du développement d’une identité propre. Celle-ci se forme à partir de différentes valeurs et de rôles sociaux variés (ls ou lle, frère ou sœur, étudiant). Ultimement, chaque personne doit se sentir bien et satisfaite d’elle-même. Au cours de ce processus, l’adolescent est introspectif et de plus en plus conscient de lui-même. Les valeurs de son groupe de pairs de même que l’acceptation et l’image corporelle sont importantes. Position • L’adolescent devrait s’asseoir sur la table d’examen FIGURE 8.14. • Effectuer l’examen de l’adolescent seul, sans parent ni frère ou sœur présent. Préparation • Le corps se modie rapidement à ce stade. Au cours de l’examen physique, l’adolescent a besoin d’une rétroaction qui l’informe que son corps est en santé et se développe normalement. • L’adolescent a une conscience aiguë de son image corporelle, se comparant souvent à ses pairs. L’informer des très grandes variations que l’on observe chez les adolescents en ce qui a trait aux courbes de croissance et de développement 17, 24 et 26 . • Communiquer avec précaution. Établir un climat de conance et mettre l’adolescent à l’aise. Ne pas le traiter comme un enfant, mais ne pas le surestimer non plus en le considérant comme un adulte. • L’adolescent a assez de maturité pour accueillir des enseignements sur la santé. Des attitudes positives acquises dès maintenant peuvent durer toute la vie adulte. Concentrer les enseignements sur les moyens que l’adolescent peut utiliser pour accroître son propre bien-être. Séquence • Comme pour l’adulte, une approche de la tête aux pieds est appropriée. Il faut terminer l’examen par des questions plus sensibles et embarrassantes. Procéder à l’examen des organes génitaux en dernier et avec professionnalisme. Adultes vieillissants Au cours du processus de vieillissement, la personne plus âgée doit donner une signication à la vie et à son existence propre et s’adapter aux changements qui inuent sur sa force physique et sa santé. Position • La personne âgée devrait s’asseoir sur la table d’examen ; un adulte plus âgé, fragile, pourrait avoir besoin d’être couché. • Minimiser le plus possible les changements de position en organisant la séquence de l’examen de façon adéquate. • Permettre des périodes de repos si nécessaire. Préparation • Adapter le rythme de l’examen à celui probablement ralenti de la personne âgée. Il est préférable de répartir un examen complet sur plusieurs visites que de se précipiter et de fatiguer la personne outre mesure. • Avoir recours au toucher (à moins d’une contre-indication culturelle). Cela est particulièrement important avec l’adulte vieillissant, car les autres sens, comme la vue et l’ouïe, peuvent être diminués. 5 Les étapes de l’examen complet de l’état mental de la personne âgée sont présentées dans le chapitre 5, Évaluation de l’état mental. 172 Partie 2 FIGURE 8.14 Auscultation d’une adolescente assise sur la table d’examen Connaissances préalables à l’examen clinique • Ne pas prendre une baisse de la vision ou de l’audition pour de la confusion. L’apparition soudaine de confusion peut signier un état maladif. Cela se perçoit par des pertes de la mémoire de travail, une diminution du processus de la pensée, une réduction de la période d’attention et une labilité 5 . • Être conscient que les années de vieillissement sont marquées par de grands stress. La perte est inévitable, et elle inclut les changements dans l’apparence physique du visage et du corps, un niveau d’énergie qui décline, la n d’un emploi à cause de la retraite, l’insécurité nancière, la perte de la demeure où s’est déroulée une grande partie de la vie ainsi que la mort des amis ou du conjoint. La manière dont la personne s’adapte à toutes ces pertes a un impact important sur l’évaluation de son état de santé. Séquence • Utiliser l’approche de la tête aux pieds, comme pour l’adulte plus jeune. Personnes malades Pour la personne souffrante ou éprouvant des difcultés respiratoires, adapter les positions au cours de l’examen. Par exemple, une personne ayant le soufe court ou souffrant d’une douleur à l’oreille pourrait vouloir être assise, contrairement à une personne très faible ou très fatiguée, qui pourrait vouloir être couchée. Initialement, il pourrait s’avérer nécessaire d’examiner seulement les parties du corps touchées par le problème, ce qui permet d’établir une base de données préalable. Il sera par la suite possible de compléter l’évaluation une fois le malaise résorbé. 8 Évaluation et jugement clinique Dossier : Matisse Comtois (suite) Matisse vous semble en bonne santé, son poids et sa taille se trouvent dans les normales pour son groupe d’âge, et sa mère le décrit comme un enfant enjoué et énergique. Sa tenue vestimentaire est adéquate, et vous n’observez aucun signe de négligence ou de mauvais traitement au cours de l’inspection. Vous observez que Matisse montre encore des signes de sa chute à vélo, à savoir des abra- sions aux deux genoux et aux coudes, et elles sont en voie de guérison. Il ne présente aucune marque de blessure récente ou ancienne à la tête. Pen dant l’examen, Matisse est curieux, et il vous pose plusieurs questions. Il vous demande à quelques reprises s’il peut écouter dans votre stéthoscope et regarder dans les oreilles de sa mère. 1. Comment allez-vous procéder pour observer ses plaies aux genoux et aux coudes ? 2. À la suite de l’évaluation de ses plaies, quelle information allez-vous consigner au dossier ? 3. Nommez deux systèmes qu’il est primordial d’évaluer étant donné que Matisse commencera l’école sous peu. Expliquez votre réponse. Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Au cours de l’évaluation de santé de Matisse, quelle technique devez-vous utiliser en premier ? 2. Avant de procéder à l’auscultation de Matisse, quelles mesures devez-vous prendre an de bien entendre les sons corporels ? 4. Pendant la percussion de l’abdomen de Matisse, que devriez-vous entendre dans la région où se trouve le côlon ? 3. Quelle partie de la main devrez-vous utiliser pour évaluer la température de la peau ? 5. Était-il nécessaire de procéder à un examen de tous les systèmes dans le cas de Matisse ? Chapitre 8 Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique 173 Dossier : Éric Chabot Vous êtes inrmière dans un groupe de médecine familiale, et votre tâche consiste à rencontrer tous les clients qui se présentent à la clinique sans rendez-vous pour commencer l’examen physique avant de les diriger vers le médecin qui fait les consultations. Vous vous rendez à la salle d’attente pour appeler le prochain client, Éric Chabot, qui est âgé de 32 ans selon les renseignements inscrits au dossier. Vous mentionnez son nom à voix haute ; un homme assis au milieu de la salle vous fait signe. Il se lève lentement et péniblement de sa chaise, se redresse et marche en boitant jusqu’à vous. Vous remarquez qu’il n’effectue pas de mise en charge sur son pied gauche et qu’il sautille sur son pied droit pour vous suivre. À son entrée dans le bureau, vous observez que son visage est rouge, qu’il a l’air tendu et qu’il a le front couvert de sueur. Il s’assoit devant vous et dit, en se massant la cheville gauche : « C’est pas facile de marcher sur une seule jambe. » Vous lui demandez ce qui lui est arrivé, et il vous raconte qu’il jouait au soccer, qu’il a couru vers le ballon pour aller en échappée et lorsqu’il a changé de direction pour semer le défenseur de l’autre équipe, son pied a glissé. Il a senti sa cheville se tordre vers l’intérieur, puis a entendu un « crac ». Il est ensuite tombé au sol, car il était incapable de s’appuyer sur sa jambe en raison de la douleur. « Je me suis rendu au banc de joueurs et j’ai mis de la glace. Ça n’a rien donné, j’ai été obligé d’arrêter de jouer et de venir ici. » 9 Monsieur Chabot ne prend aucun médicament, il préfère contrôler la douleur de façon non pharmacologique. 9.1 Données objectives 9.1.1 Préambule Le questionnaire général est une étude de la personne en entier, comprenant l’état de santé global et toute autre caractéristique physique évidente. Il s’agit d’une introduction à l’examen physique qui suivra ; il devrait en ressortir une impression d’ensemble, une compréhension des interactions entre les divers systèmes de la personne. Les paramètres objectifs sont utilisés pour former le questionnaire général, mais ils s’appliquent aussi à toute la personne, pas seulement à un seul de ses systèmes corporels. L’inrmière entreprend un questionnaire général dès la première rencontre avec la personne. Quelle est l’impression immédiate que dégage la personne ? Se lève-t-elle promptement lorsqu’on l’appelle et se 9.1.2 dirige-t-elle volontiers vers l’inrmière ? Ou la personne semble-t-elle malade, se redresse-t-elle lentement ou avec des efforts, a-t-elle les épaules affaissées, ses yeux sont-ils sans éclat ou son regard est-il baissé vers le sol ? La personne hospitalisée converse-t-elle avec ses visiteurs, s’intéresse-t-elle à la lecture ou à la télévision ou reste-t-elle étendue, parfaitement immobile ? Même une simple poignée de main fournit des renseignements. La personne étend-elle complètement son bras, secoue-t-elle la main fermement, établit-elle un contact visuel ou sourit-elle ? Les paumes de ses mains sont-elles sèches ou moites ? Tout en effectuant l’histoire de santé, la prise des mesures anthropométriques et des signes vitaux (SV), l’inrmière note les aspects suivants qui devront s’ajouter au questionnaire général et en tenir compte : l’apparence physique, la structure du corps, la mobilité et le comportement de la personne. Schéma séquentiel résumant les étapes de l’examen clinique. Examen physique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES QUESTIONNAIRE GÉNÉRAL Apparence physique Âge L’apparence de la personne est conforme à son âge. La personne semble plus vieille que son âge, comme dans les cas de maladies chroniques et d’alcoolisme chronique. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 175 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Sexe 5 Le développement sexuel est approprié au sexe et à l’âge. Dans le tableau 5.1 du chapitre 5, Évaluation de l’état mental, sont décrits les différents niveaux de conscience. État de conscience Q uestion de suivi À partir des données contenues dans la situation jusqu’à présent, comment qualieriezvous l’état de conscience de monsieur Chabot ? La personne est alerte et orientée, prête attention aux questions posées et y répond adéquatement. Q Confusion, somnolence, léthargie 5 . Couleur de la peau Le teint est uniforme, la pigmentation variant en fonction des antécédents génétiques ; la peau est intacte, sans lésion évidente. Pâleur, cyanose, jaunisse, érythème, toute lésion 12 . Traits du visage Les traits du visage sont en symétrie avec les mouvements. Traits immobiles, ayant l’apparence d’un masque, asymétriques, affaissés. La personne ne présente aucun signe de détresse ou de douleur aiguë. • Signes respiratoires ou cardiaques – diaphorèse, serrement à la poitrine – respiration courte, respiration sifante. • Douleur, exprimée par une grimace faciale, la personne se tenant la partie douloureuse du corps. 12 Les lésions de la peau sont traitées dans le chapitre 12, Peau, cheveux et ongles. Puberté retardée ou précoce. uestion de suivi Quels signes vous laissent croire que monsieur Chabot éprouve de la douleur ? Structure du corps Stature La taille semble normale pour l’âge et selon l’hérédité (voir Mesures anthropométriques). Taille excessivement petite ou grande TABLEAU 9.6. Nutrition Le poids semble normal pour la taille et la musculature. La distribution adipeuse est uniforme. • Apparence cachectique, émaciée. • Obésité simple avec distribution uniforme du tissu adipeux. • Obésité centripète (troncale). Le gras est concentré au visage, au cou et au tronc, avec les extrémités minces comme dans le syndrome de Cushing (hyperadrénalisme) TABLEAU 9.6. Symétrie Les parties du corps semblent égales bilatéralement et sont proportionnelles les unes aux autres. 176 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique • Atrophie ou hypertrophie unilatérale. • Position asymétrique d’une partie du corps. OBSERVATIONS NORMALES Posture La personne se tient confortablement dans une position appropriée pour son âge. Noter la ligne verticale de référence qui passe par l’avant de l’oreille, l’épaule, la hanche, la rotule et la cheville. Exception pour les trottineurs debout, qui ont un abdomen protubérant (lordose du trottineur) et pour la personne vieillissante, qui peut avoir le dos voûté par une cyphose. Position La personne est assise confortablement sur la chaise, le lit ou la table d’examen, les bras pendant de chaque côté, la tête tournée vers l’inrmière. ANOMALIES • Colonne vertébrale et cou rigides ; bougent en bloc (p. ex., dans le cas d’arthrite). • Posture raide, tendue, prête à bondir de sa chaise, mouvements agités. • Épaules affaissées, semblent « dégonées » (p. ex., dans le cas de dépression). • Position en tripode – se tenant penchée vers l’avant, se soutenant avec les bras appuyés sur les bras de la chaise (p. ex., dans le cas de maladies pulmonaires chroniques). • Assise bien droite et résiste à se coucher (p. ex., dans le cas d’insufsance cardiaque congestive). • Recroquevillée en position fœtale (p. ex., dans le cas de douleur abdominale). 9 Structure corporelle, prol Les proportions sont les suivantes. • L’envergure des bras (du bout des doigts d’une main à l’autre) est égale à la hauteur de la personne. • La distance tête-pubis est sensiblement la même que la distance pubis-sol. Difformités physiques évidentes – noter toute malformation congénitale ou acquise. • Envergure des bras allongée, plus grande que la hauteur (p. ex., dans le cas du syndrome de Marfan, d’hypogonadisme TABLEAU 9.6). • Extrémités ou doigts manquants, doigts palmés, membres raccourcis. Mobilité Démarche Normalement, la largeur de la base équivaut à celle des épaules, la position du pied est correcte ; la marche se fait en douceur, d’une manière régulière et bien équilibrée, et des mouvements associés sont présents tels qu’un balancement symétrique des bras. • Base exceptionnellement large. • Chancellement, trébuchement. • Pieds qui traînent, jambe non fonctionnelle. • Boiterie avec blessure. • Propulsion – difculté à arrêter 23 . 23 Dans le chapitre 23, Système neurologique, le tableau 23.7 présente différents types de démarches anormales. Amplitude des mouvements Observer la mobilité totale pour chacune des articulations et noter si le mouvement est volontaire, précis, souple et coordonné 22 . Il y absence de mouvements involontaires. • Amplitude limitée des articulations. • Paralysie – absence de mouvement. • Mouvements saccadés, non coordonnés. • Tics, tremblements, crises ou contractures 23 . Chapitre 9 22 et 23 L’amplitude des mouvements est décrite dans le chapitre 22, Système musculosquelettique, alors que les tics et les tremblements sont détaillés dans le tableau 23.5 du chapitre 23, Système neurologique. Questionnaire général, mesure des signes vitaux 177 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Comportement Expression faciale La personne maintient un contact visuel (excepté en présence d’un tabou culturel), les expressions sont appropriées à la situation (p. ex., pensive, sérieuse, souriante). (Observer les expressions du visage lorsque la personne est au repos et lorsqu’elle parle.) Épuisée, déprimée, fâchée, triste, anxieuse. Cependant, prendre en compte que l’anxiété est fréquente chez les personnes malades. Aussi, certaines personnes sourient lorsqu’elles sont anxieuses. Humeur et affect La personne se sent à l’aise et coopère. Elle interagit de façon agréable. Hostile, méfiante, suspicieuse, en pleurs. Discours 5 Les différents troubles du langage sont décrits dans le tableau 5.2 du chapitre 5, Évaluation de l’état mental. L’articulation (l’habileté à former des mots) est claire et compréhensible. • Le débit de parole est uide et bien cadencé. • La personne communique clairement ses idées. • Le choix des mots est approprié à sa culture et à son éducation. • Dysarthrie et dysphagie. Défauts de langage, monotonie, confusion du discours 5 . • Ne parle presque pas ou parle constamment. • La personne communique facilement par elle-même dans un langage courant ou avec l’aide d’un interprète. Habillement Les vêtements sont appropriés au climat, semblent propres et sont ajustés à la personne, ils sont conformes à sa culture et à son groupe d’âge ; par exemple, les femmes amish portent normalement des vêtements du XIXe siècle, et les femmes indiennes peuvent porter le sari. L’habillement qui est dicté par la culture ne devrait pas être étiqueté comme étant bizarre en fonction des critères occidentaux ou selon les façons de penser des adultes. • Des pantalons trop grands et soutenus par une ceinture suggèrent généralement une perte de poids, au même titre qu’un ajout de trous dans la ceinture. Si la ceinture est ajustée à une taille plus grande, cela peut indiquer de l’obésité ou de l’ascite. • Le port constant de certains vêtements ou accessoires peut fournir certains indices : des manches longues peuvent camouer des marques d’aiguilles liées aux abus de drogue ou cacher les bras maigres des personnes anorexiques ; des attaches en velcro au lieu des boutons peuvent indiquer une dysfonction motrice chronique. Hygiène personnelle 178 Partie 2 La personne semble propre et soignée d’une manière appropriée pour son âge, son emploi, ses occupations et son groupe socioéconomique. Prendre en compte qu’une grande variation dans l’habillement et l’hygiène est considérée comme « normale ». Par exemple, dans plusieurs cultures, les personnes n’utilisent pas de déodorant, et le rasage des jambes chez les femmes n’est pas une pratique courante. Odeur corporelle, odeur d’alcool. Les cheveux sont propres, peignés. Le maquillage de la femme est approprié pour son âge et sa culture. Chez une femme habituellement bien soignée, des cheveux mal coiffés peuvent indiquer un malaise ou une maladie. Connaissances préalables à l’examen clinique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES MESURES ANTHROPOMÉTRIQUES Poids Utiliser une balance mécanique calibrée ou une balance électronique. Demander à la personne d’enlever ses chaussures et ses autres vêtements lourds avant de se tenir debout sur la balance. Lorsque des mesures de poids répétitives sont nécessaires, tenter de les prendre au même moment de la journée, la personne portant le même type de vêtements chaque fois. Inscrire le poids (en kilogrammes et en livres) FIGURE 9.1. Une perte de poids inexpliquée peut être le signe d’une maladie de courte durée (p. ex., de la èvre, une maladie de la bouche ou de la gorge) ou d’une maladie chronique (p. ex., une maladie endocrinienne, une tumeur maligne ou un trouble de l’état mental tel que la dépression, l’anorexie, la boulimie). 9 FIGURE 9.1 Balance mécanique à colonne Montrer à la personne où se situe son propre poids par rapport au tableau des recommandations selon la taille TABLEAU 9.1. Lui indiquer également où elle se situe dans le tableau des indices de masse corporelle (IMC) FIGURE 9.2. Comparer le poids actuel de la personne avec celui noté à la visite médicale précédente. Une perte de poids récente peut être expliquée par un régime réussi. Un gain de poids reète habituellement un apport calorique excessif, de mauvaises habitudes alimentaires et un style de vie sédentaire. Il est à noter que l’IMC tend à sous-estimer le gras total chez les personnes plus âgées qui ont perdu de la masse musculaire. Taille Utiliser une toise murale ou la toise de la balance. Aligner la rallonge supérieure de la toise étroite avec le dessus de la tête. La personne doit enlever ses chaussures, se tenir droite et élever légèrement le menton pour regarder droit devant elle. Les pieds, les épaules et les fesses doivent être en contact avec la toise. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 179 OBSERVATIONS NORMALES TABLEAU 9.1 ZONE DE POIDS 180 ANOMALIES Taille et poids normaux pour les adultes âgés de 18 ans et plus POIDS INSUFFISANT (MAIGREUR) POIDS SANTÉ (POIDS NORMAL) EXCÈS DE POIDS (EMBONPOINT) OBÉSITÉ GRADE 1 (OBÉSITÉ MODÉRÉE) OBÉSITÉ GRADE 2 (OBÉSITÉ SÉVÈRE) OBÉSITÉ GRADE 3 (OBÉSITÉ MORBIDE) Taille IMC : < 18,5 IMC : 18,5-24,9 IMC : 25-29,9 IMC : 30-34,9 IMC : 35-39,9 IMC : 40 cm kg (moins de) kg kg kg kg kg (plus de) 155 44 44-60 60-72 72-84 84-96 96 156 45 45-61 61-73 73-85 85-97 97 157 46 46-61 62-74 74-86 86-98 99 158 46 46-62 62-75 75-87 87-100 100 159 47 47-63 63-76 76-88 89-101 101 160 47 47-64 64-77 77-89 90-102 102 161 48 48-65 65-78 78-90 91-103 104 162 49 49-65 66-79 79-92 92-105 105 163 49 49-66 66-79 80-93 93-106 106 164 50 50-67 67-80 81-94 94-107 108 165 50 50-68 68-81 82-95 95-109 109 166 51 51-69 69-82 83-96 96-110 110 167 52 52-69 70-83 84-97 98-111 112 168 52 52-70 71-84 85-99 99-113 113 169 53 53-71 71-85 86-100 100-114 114 170 54 54-72 72-86 87-101 101-115 116 171 54 54-73 73-87 88-102 102-117 117 172 55 55-74 74-88 89-103 104-118 118 173 55 55-75 75-90 90-104 105-119 120 174 56 56-75 76-91 91-106 106-121 121 175 57 57-76 77-92 92-107 107-122 123 176 57 57-77 77-93 93-108 108-124 124 177 58 58-78 78-94 94-109 110-125 125 178 59 59-79 79-95 95-111 111-126 127 179 59 59-80 80-96 96-112 112-128 128 180 60 60-81 81-97 97-113 113-129 130 181 61 61-82 82-98 98-114 115-131 131 182 61 61-82 83-99 99-116 116-132 132 183 62 62-83 84-100 100-117 117-134 134 184 63 63-84 85-101 102-118 118-135 135 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique OBSERVATIONS NORMALES TABLEAU 9.1 ZONE DE POIDS ANOMALIES Taille et poids normaux pour les adultes âgés de 18 ans et plus (suite) POIDS INSUFFISANT (MAIGREUR) POIDS SANTÉ (POIDS NORMAL) EXCÈS DE POIDS (EMBONPOINT) OBÉSITÉ GRADE 1 (OBÉSITÉ MODÉRÉE) OBÉSITÉ GRADE 2 (OBÉSITÉ SÉVÈRE) OBÉSITÉ GRADE 3 (OBÉSITÉ MORBIDE) Taille IMC : < 18,5 IMC : 18,5-24,9 IMC : 25-29,9 IMC : 30-34,9 IMC : 35-39,9 IMC : 40 cm kg (moins de) kg kg kg kg kg (plus de) 185 63 63-85 86-102 103-119 120-137 137 186 64 64-86 86-103 104-121 121-138 138 187 65 65-87 87-105 105-122 122-140 140 188 65 65-88 88-106 106-123 124-141 141 189 66 66-89 89-107 107-125 125-143 143 190 67 67-90 90-108 108-126 126-144 144 9 Source : Adapté de Direction régionale de santé publique de la Capitale-Nationale, 2004. FIGURE 9.2 Nomogramme de l’indice de masse corporelle (IMC). Santé Canada, 2012. Reproduit avec la permission du Ministre de la santé, 201 5. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 181 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Indice de masse corporelle Q uestion de suivi Monsieur Chabot mesure 1,78 m, et il pèse 80 kg. Calculez son IMC et indi­ quez dans quelle zone il se situe. L’indice de masse corporelle (IMC) est un indicateur pratique du poids santé en fonction de la taille et est révélateur de l’obésité ou d’une malnutrition dans le rapport protéines/calories. Il est cal­ culé ainsi : Poids (en kilogrammes) IMC = Taille (en mètres)2 Poids (en livres) ou Taille (en pouces)2 × 703 Des données probantes indiquent que l’utilisation de l’IMC pour l’évaluation du risque d’obésité procure des données plus précises du gras total comparé à la simple mesure du poids de la personne (NIH, 2000). Un IMC optimal se situe entre 19 et 25. Q uestion de suivi Le tour de taille de monsieur Chabot est de 88,7 cm. Quel est son niveau de risque d’être atteint de mala­ dies cardiovasculaires ? Circonférence de la taille L’excès de gras abdominal est un facteur de risque important dans certaines affections, encore plus que l’IMC (NIH, 2000). Pour le mesurer, demander à la personne de se tenir debout, localiser l’os de la hanche puis le dessus de la crête iliaque droite. À cet endroit, prendre une mesure à l’aide d’un ruban à mesurer en s’assurant que le ruban ne serre pas la peau. Noter la mesure en n d’expiration FIGURE 9.3. FIGURE 9.3 Position du ruban à mesurer pour la mesure de la circonférence de la taille 182 Partie 2 • Un gain de poids est habituel­ lement causé par un apport calorique excessif ; parfois, il peut être le résultat d’un pro­ blème endocrinien, d’un traite­ ment médicamenteux (p. ex., la prise de corticostéroïdes) ou d’une dépression. • Interprétation de l’IMC chez l’adulte, en kg/m 2 (National Institutes of Health [NIH], 2000) : – < 18,5 : poids insufsant – 18,5 – 24,9 : poids normal – 25,0 – 29,9 : surpoids – 30,0 – 34,9: obésité (classe 1) – 35,0 – 39,9 : obésité (classe 2) – ≥ 40 : obésité morbide (classe 3) • Interprétation de l’IMC chez l’enfant âgé de 2 à 20 ans (Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2000) : 85e au 95e centile = risque de surcharge pondérale Connaissances préalables à l’examen clinique Une circonférence du tour de taille ≥ 89 cm chez la femme et ≥ 102 cm chez l’homme augmente le risque de diabète de type 2, d’hyperlipidémie, d’hypertension artérielle (HTA) et de maladies cardiovasculaires, particulière­ ment chez les personnes dont l’IMC est de 25 à 35. OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES SIGNES VITAUX Température Le métabolisme cellulaire requiert une température interne stable, ou température basale, à une moyenne de 37,2 °C. Le corps maintient une température stable en utilisant un thermostat, ou mécanisme de rétroaction, régulé par l’hypothalamus du cerveau. Le thermostat équilibre la production de chaleur (en provenance du métabolisme, de l’exercice, de la digestion de nourriture, de facteurs externes) avec la perte de chaleur (par la radiation, l’évaporation de la sueur, la convection et la conduction). Plusieurs voies de mesure de température reètent la température interne du corps. La température buccale normale d’une personne au repos est de 37 °C ; elle peut s’étaler de 35,8 à 37,3 °C. La température rectale est de 0,4 à 0,5 °C plus élevée. La fonction thermostatique de l’hypothalamus peut fortement varier au cours d’une maladie ou d’un trouble du système nerveux central. La température normale est inuencée par les facteurs suivants. • L’hyperthermie, ou èvre, est causée par des pyrogènes sécrétés par des bactéries toxiques durant un processus infectieux ou une rupture tissulaire tels qu’un infarctus du myocarde (IDM), un trauma, une chirurgie, une tumeur maligne ou un cancer. Un trouble neurologique (p. ex., un accident vasculaire cérébral (AVC), un œdème cérébral, un traumatisme au cerveau, une tumeur ou une chirurgie) peut aussi réinitialiser le thermostat cérébral à un niveau plus élevé, ayant pour effet une production de chaleur et sa conservation. • L’hypothermie est habituellement causée par une exposition accidentelle prolongée au froid. Elle peut également être induite délibérément pour diminuer les besoins en oxygène du corps au cours d’une chirurgie cardiaque ou vasculaire périphérique, d’une neurochirurgie, d’une amputation ou d’une hémorragie gastro-intestinale. • Un cycle diurne de 0,5 à 2,5 °C, avec un creux à l’aube et dans les quelques heures qui suivent et un pic survenant en n d’après-midi jusqu’en début de soirée. • Le cycle menstruel de la femme ; la sécrétion de progestérone, survenant au milieu du cycle ovulatoire, cause une augmentation de la température de 0,28 à 0,50 °C qui se poursuit jusqu’aux menstruations. • L’exercice ; un exercice, de modéré à intense, augmente la température corporelle. • L’âge ; des variations normales plus grandes surviennent chez le nourrisson et le jeune enfant en raison de leur mécanisme moins efcace de régulation de la température. Chez la personne âgée, la température est habituellement plus basse que celle observée dans les autres groupes d’âge, avec une moyenne de 36,2 ° C. La température buccale est commode et est la plus précise. Le site sublingual est riche en apport sanguin par les artères carotides, qui réagissent rapidement aux changements de température interne. En raison des considérations environnementales relatives à la pollution par le mercure en provenance des incinérateurs de déchets médicaux, les thermomètres et les sphygmomanomètres au mercure ont été remplacés par des appareils électroniques. Secouer le thermomètre en verre sans mercure jusqu’à ce qu’il indique 35,5 °C et le placer à la base de la langue dans un des sacs sublinguaux postérieurs – pas en avant de la langue. Dire à la personne de garder les lèvres fermées l’une contre l’autre. Laisser le thermomètre en place trois ou quatre minutes si la personne est afébrile et jusqu’à huit minutes si la personne est fébrile. (Prendre les autres SV durant ce temps.) Attendre 15 minutes si la personne vient tout juste de consommer des liquides chauds ou glacés et 2 minutes si elle vient tout juste de fumer. Le thermomètre électronique a l’avantage de fournir une mesure rapide et précise (habituellement en 20 à 30 sec.) de même que celui d’offrir des couvre-sondes sécuritaires, incassables et jetables. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 9 183 OBSERVATIONS NORMALES Diaphorèse : Transpiration abondante. L’instrument doit être complètement rechargé et correctement calibré. La plupart des enfants aiment regarder les chiffres de leur température progresser sur l’écran du thermomètre. Prendre la température rectale seulement dans les cas où aucune autre voie n’est disponible – par exemple, en cas de coma ou lorsque les personnes sont désorientées, en état de choc, pour celles qui ne peuvent garder la bouche fermée à cause de leur respiration ou de la présence de tubes d’oxygène, dans le cas de mâchoires brochées ou d’autre dysfonction faciale ou encore s’il n’y a pas de thermomètre tympanique disponible. Porter des gants jetables et insérer la sonde du thermomètre électronique recouverte d’un couvre-sonde lubrié dans le rectum de l’adulte en la dirigeant vers l’ombilic à une profondeur de 2-3 cm. (Avec un thermomètre en verre, le laisser en place durant 2 ½ min). Les inconvénients de la voie rectale sont l’inconfort du client et la nature perturbatrice et considérablement longue de cette prise de température. Le thermomètre de membrane tympanique perçoit les émissions infrarouges de la membrane tympanique (tympan). Cette dernière partage le même réseau sanguin que celui qui perfuse l’hypothalamus (les artères carotides internes) ; il s’agit donc d’une mesure précise de la température interne. Le thermomètre de membrane tympanique est un appareil non effractif et non traumatique extrêmement rapide et efcace. La sonde a la même forme que celle d’un otoscope, l’instrument utilisé pour inspecter l’oreille. Placer délicatement la sonde (recouverte d’un couvre-sonde) dans le canal auditif de la personne FIGURE 9.16. Ne pas forcer et ne pas obstruer complètement le canal auditif. Activer l’appareil, et la température sera afchée en deux ou trois secondes. Il y a un risque minimal de contamination croisée avec l’utilisation du thermomètre tympanique, puisque le canal auditif est recouvert de peau et non de membrane muqueuse. Ce thermomètre peut être utilisé chez des personnes inconscientes ou qui sont incapables de coopérer aux techniques traditionnelles ou qui les refusent (p. ex., des clients aux soins intensifs, à l’urgence, dans les salles de réveil ou d’accouchement). Certaines études (Fountain, Goins, Hartman et collab., 2008 ; Frommelt, Ott et Hays, 2008 ; Lawson, Bridges, Ballou et collab., 2007) suggèrent de ne pas utiliser le thermomètre tympanique chez les personnes atteintes de maladie chronique. Ces chercheurs ont basé leurs observations initiales de ces personnes alors qu’elles étaient afébriles. Les situations de soins aigus chez celles-ci nécessiteraient de plus amples recherches à ce sujet. Une innovation médicale permet une prise non effractive de la température par la mesure des émissions infrarouges de l’artère temporale. Les données recueillies sont presque les mêmes que celles de la température basale (Lawson et collab., 2007), mais l’exactitude pourrait être perturbée par la diaphorèse. Inscrire la température en degrés Celsius, à moins que l’établissement n’utilise les degrés Fahrenheit. Au besoin, utiliser cette formule de conversion : Degrés C = 5 9 (°F – 32) Degrés F = (9 5 °C) + 32 184 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique ANOMALIES OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Se familiariser avec les deux échelles de température. Il est beaucoup plus facile d’apprendre à penser avec l’échelle Celsius que de devoir effectuer les conversions. Voici des équivalences pratiques à mémoriser : 104,0 °F = 40,0 °C 98,6 °F = 37,0 °C 95,0 °F = 35,0 °C Pouls À chaque battement, le cœur propulse une quantité de sang – le volume d’éjection – dans l’aorte. Cela représente environ 70 mL chez l’adulte. La force du pouls dilate les parois artérielles et génère une vague de pression, laquelle est ressentie en tant que pouls à la périphérie. La palpation du pouls périphérique fournit la fréquence et le rythme du pouls de même que des données locales sur l’état de l’artère. En utilisant la pulpe des trois premiers doigts, palper le pouls radial au pli du poignet, latéralement le long du radius FIGURE 9.4. Appuyer jusqu’à ce que soit ressentie la pulsation la plus forte. Si le rythme est régulier, compter le nombre de battements pendant 30 secondes et multiplier ce nombre par 2. Quoique la prise de pouls sur un intervalle de 15 secondes soit fréquente, une erreur de comptage d’un seul battement se répercute en une inscription d’erreur de 4 battements par minute (bpm). L’intervalle de 30 secondes est le plus précis et le plus efcace lorsque la fréquence cardiaque (FC) est normale ou rapide et que le rythme est régulier. Cependant, si le rythme est irrégulier, compter pendant une minute complète. En commençant à compter, le premier battement ressenti est « zéro ». Le second battement est « un » et ainsi de suite. Évaluez le pouls en incluant : 1) sa fréquence ; 2) son rythme ; 3) sa force. 9 FIGURE 9.4 Prise du pouls radial Fréquence Chez l’adulte au repos, des données probantes indiquent que la FC normale varie de 50 à 90 bpm (Spodick, 1996). Ces données diffèrent des fréquences normales de 60 à 100 bpm établies par consensus dans les années 1950 et qui n’ont jamais été formellement documentées. La FC varie habituellement selon l’âge, étant plus rapide chez le nourrisson et durant l’enfance et ralentissant à l’âge adulte et avec le vieillissement. Elle diffère également selon le sexe ; après la puberté, les femmes ont une FC légèrement plus élevée que celle des hommes TABLEAU 9.2. Chez l’adulte, une FC < 50 bpm se nomme bradycardie. Cela survient habituellement chez les athlètes bien entraînés, dont le muscle cardiaque se développe en même temps que les muscles squelettiques. Un muscle cardiaque plus fort et plus efcace propulse un volume d’éjection plus grand à chaque battement, nécessitant ainsi moins de bpm pour conserver un débit cardiaque stable. Anomalies liées à la fréquence et au rythme cardiaques 20 . Une FC > 90 bpm est appelée tachycardie. Elle survient normalement lorsque la personne est anxieuse ou au cours d’exercices intenses afin de soutenir la demande du métabolisme qui a augmenté. La tachycardie survient en cas de èvre, de septicémie, de pneumonie, de pancréatite et après un IDM. Chapitre 9 20 Le tableau 20.1, dans le chapitre 20, Système vasculaire périphérique et système lymphatique, décrit les variations du pouls artériel. Questionnaire général, mesure des signes vitaux 185 OBSERVATIONS NORMALES TABLEAU 9.2 ÂGE/SEXE ANOMALIES Fréquences normales du pouls au repos selon le groupe d’âge MOYENNE (bpm) LIMITES NORMALES ÂGE/SEXE MOYENNE (bpm) LIMITES NORMALES Nouveau-né 120 70-190 1 an 120 80-160 Femme 80 60-100 2 ans 110 80-130 Homme 75 55-95 4 ans 100 80-120 6 ans 100 75-115 Femme 75 55-95 8 ans 90 70-110 Homme 70 50-90 10 ans 90 70-110 Peut être de 50 à 60 50-100 Adulte 74-76 50-100 Personne âgée 74-76 50-100 12 ans Femme 90 70-110 Homme 85 65-105 Femme 85 65-105 Homme 80 60-100 16 ans 18 ans Athlète bien entraîné 14 ans Rythme 19 Les arythmies sinusales sont discutées dans le chapitre 19, Cœur et vaisseaux du cou. Le rythme du pouls est habituellement régulier. Cependant, l’arythmie sinusale est une irrégularité qui survient fréquemment chez l’enfant et le jeune adulte. Dans ce cas, la FC varie en fonction du cycle respiratoire, accélérant au pic de l’inspiration et revenant à la normale avec l’expiration. L’inspiration cause momentanément une diminution du volume d’éjection du côté gauche du cœur ; pour compenser, la FC augmente. Si d’autres formes d’irrégularités sont ressenties, ausculter les bruits cardiaques pour une évaluation plus complète 19 . Force La force du pouls représente la puissance du volume d’éjection. Un pouls bondissant dénote un volume d’éjection augmenté, comme cela se produit à cause de l’anxiété, de l’exercice et dans certaines conditions anormales. Inscrire le pouls en utilisant une échelle à trois niveaux : • 3+ : bondissant • 2+ : normal • 1+ : faible, lant • 0 : absent Certains établissements utilisent une échelle en quatre points. S’assurer de la concordance de son système avec celui du reste du personnel. Le choix de l’une ou l’autre des échelles demeure subjective. L’expérience améliorera le jugement clinique de l’inrmière. 186 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Un pouls faible et lant reète un volume d’éjection diminué, par exemple dans le cas d’un choc hémorragique. OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Respiration Normalement, la respiration d’une personne est régulière, automatique et silencieuse. Puisque la majorité des clients sont peu conscients de leur respiration, ne pas mentionner à la personne que sa respiration sera calculée parce qu’une prise de conscience soudaine pourrait en modier le rythme normal. Conserver plutôt la même position que celle adoptée pendant le calcul de la fréquence du pouls radial et compter discrètement les respirations. Compter pendant 30 secondes ou pendant 1 minute complète si une anomalie est suspec tée. Ne pas utiliser l’intervalle de 15 secondes. Le résultat pourrait varier de +4 ou −4, ce qui est considérable avec un si petit nombre. Noter certaines données objectives supplémentaires (p. ex., la dyspnée, la respiration superficielle ou profonde, le tirage chez les enfants et l’utilisation des muscles accessoires chez l’adulte). Observer que les fréquences respiratoires (FR) présentées dans le TABLEAU 9.3 sont normalement plus élevées chez les nourrissons et les enfants. De plus, il existe un ratio assez constant entre la fréquence du pouls et la FR, soit environ 4:1. Normalement, le pouls et la respiration augmentent en réponse à l’anxiété et à l’exercice 18 . TABLEAU 9.3 Fréquence respiratoire normale selon l’âge ÂGE RESPIRATIONS PAR MINUTE Nouveau-né 30-40 1 an 20-40 2 ans 25-32 8-10 ans 20-26 12-14 ans 18-22 16 ans 12-20 Adulte 12-20 18 9 Une évaluation plus détaillée de l’état respiratoire est présentée dans le chapitre 18, Thorax et poumons. Pression artérielle La pression artérielle (PA) est la force avec laquelle le sang pousse sur les côtés de son contenant, la paroi des vaisseaux. La force de la poussée change selon la phase du cycle cardiaque. La pression systolique est la pression maximale ressentie sur l’artère pendant la contraction ventriculaire gauche (ou systole). La pression diastolique (ou de repos) correspond à la détente de la paroi des vaisseaux due à leur élasticité, soit la pression que le sang exerce constamment entre chaque contraction cardiaque. La pression du pouls est la différence entre la pression systolique et la pression diastolique FIGURE 9.5. La pression artérielle moyenne (PAM) est la pression forçant le sang dans les tissus, dont la moyenne est calculée sur l’ensemble du cycle cardiaque. Ce n’est pas une moyenne arithmétique des pressions systolique et diastolique, puisque la diastole dure plus longtemps. Il s’agit plutôt d’une valeur se rapprochant de la pression diastolique à laquelle a été ajouté un tiers de la pression du pouls. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 187 OBSERVATIONS NORMALES FIGURE 9.5 Graphique de la pression artérielle La PAM chez le jeune adulte varie normalement en fonction de plusieurs facteurs. • L’âge. Normalement, une augmentation graduelle se produit de l’enfance à l’âge adulte FIGURE 9.18. • Le sexe. Avant la puberté, il n’existe pas de différence entre les garçons et les lles. Après la puberté, les femmes présentent habituellement une PA inférieure à celle des hommes. Après la ménopause, la PA des femmes est plus élevée que celle des hommes. • L’origine ethnique. Aux États-Unis, les adultes afro-américains ont habituellement une PA plus élevée que les personnes blanches du même âge. L’incidence de l’HTA est deux fois plus élevée chez les Afro-Américains que chez les Blancs. Les raisons expliquant cette différence ne sont pas totalement comprises, mais elles seraient liées à l’hérédité et aux facteurs environnementaux. • Le rythme diurne. La PA suit un cycle quotidien au cours duquel surviennent un pic et un creux : la pression augmente pour parvenir à un sommet en n d’après-midi ou au début de la soirée et redescend pour atteindre son minimum vers l’aube. • Le poids. La PA est plus élevée chez les personnes obèses que chez les personnes de poids normal pour le même âge (incluant les adolescents). • L’exercice. L’augmentation de l’activité physique engendre une hausse proportionnelle de la PA. Habituellement, elle revient à son niveau de base dans les cinq minutes suivant la n de l’exercice. • Les émotions. La PA augmente momentanément à cause de la peur, de la colère ou de la douleur en raison de la stimulation du système nerveux sympathique. 188 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique ANOMALIES OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES • Le stress. La PA est élevée chez les personnes qui ressentent une tension constante en raison de leur style de vie, de leur degré de stress au travail ou de leurs problèmes personnels. Le niveau de PA est déterminé par cinq facteurs FIGURE 9.6. 1. Le débit cardiaque. Si le cœur pompe plus de sang dans le contenant (réseau sanguin), la pression sur les parois de celuici augmente. 2. La résistance vasculaire périphérique. Elle est l’opposition au ux sanguin dans les artères. Lorsque le contenant rétrécit (p. ex., en présence de vaisseaux constrictés), la pression nécessaire pour pousser le contenu (le sang) augmente. Plusieurs médicaments utilisés dans le traitement de personnes gravement malades affectent la résistance vasculaire périphérique. 3. Le volume sanguin circulant. Il fait référence à la « densité » avec laquelle le sang est entassé dans les artères. L’ajout de contenu dans le contenant fait augmenter la pression. Le volume sanguin est augmenté par des transfusions de sang ou de succédanés du volume et diminué par une hémorragie. 4. La viscosité. La densité du sang est déterminée par ses éléments constitutifs : les cellules sanguines. Lorsque le sang est plus épais, la pression augmente. 9 5. L’élasticité des parois des vaisseaux. Lorsque les parois du contenant sont raides et rigides, la pression nécessaire pour pousser le contenu augmente. FIGURE 9.6 Facteurs déterminant la pression artérielle Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 189 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Mesurer la PA avec un stéthoscope et un sphygmomanomètre anéroïde. Le sphygmomanomètre anéroïde est sujet au mouvement ; il faut le recalibrer au moins chaque année, et il doit être à zéro lorsque le brassard est complètement dégoné. Le brassard est une poche (ballon plat) de caoutchouc gonable recouverte de tissu. La largeur de la poche doit équivaloir à 40 % de la circonférence du bras de la personne. Sa longueur doit correspondre à 80 % de cette circonférence. Les brassards sont offerts en six tailles pour convenir tant à l’adulte ayant un très gros bras qu’au nouveau-né ; des brassards fuselés peuvent s’ajuster au bras conique de la personne obèse, et il existe aussi des brassards pour les cuisses. Choisir la taille de brassard appropriée en fonction du format du bras de la personne et non selon son âge FIGURE 9.7. FIGURE 9.7 Types de brassard – pour adulte A Brassard pour cuisse ou gros bras B La taille du brassard est importante : utiliser un brassard trop étroit conduit à un résultat faussement élevé de la PA, parce qu’une pression supplémentaire est nécessaire pour comprimer l’artère. Brassard standard Pression du bras Une personne installée confortablement et reposée fournit une mesure valide de la PA. Plusieurs personnes sont anxieuses au début d’un examen médical ; permettre à la personne de se reposer au moins cinq minutes avant de mesurer sa PA. Par la suite, prendre deux mesures ou plus de celle-ci, à intervalles de deux minutes. Pour chaque personne, vérier la PA aux deux bras, au moins une fois, soit à son arrivée ou au cours du premier examen physique complet. Il n’est pas nécessaire de continuer à vérier la pression aux deux bras pour le dépistage et la surveillance. Occasionnellement, une différence de 5 à 10 mm Hg peut survenir dans la mesure de la PA entre les deux bras (si les données sont différentes, utiliser les valeurs les plus élevées). La personne peut être assise ou couchée, avec le bras dénudé et supporté au même niveau que le cœur. (Si un sphygmomanomètre au mercure est utilisé, s’assurer qu’il est à la verticale et au niveau des yeux de l’inrmière.) Si la personne est assise, ses pieds doivent être à plat sur le sol, étant donné que la PA est faussement élevée lorsque les jambes sont croisées plutôt que décroisées (Keele-Smith et Price-Daniel, 2001). Palper l’artère brachiale, qui se situe juste au-dessus de la fosse antécubitale (pli du coude), au milieu du tendon du biceps. Centrer le brassard dégoné à environ 2,5 cm au-dessus de l’artère brachiale et l’envelopper uniformément autour du bras. 190 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Une différence de plus de 10 à 15 mm Hg de pression entre les deux bras peut indiquer une obstruction artérielle du côté de la lecture la plus basse. OBSERVATIONS NORMALES Palper ensuite l’artère brachiale ou radiale FIGURE 9.8. Goner le brassard jusqu’à ce que la pulsation artérielle cesse d’être perçue, puis le goner de 20 à 30 mm Hg supplémentaires. Cela permet d’éviter de manquer un trou auscultatoire, un moment où les bruits de Korotkoff disparaissent durant l’auscultation. Dégoner le brassard rapidement et complètement ; par la suite, attendre de 15 à 30 secondes avant de le regoner an de laisser le sang se disperser dans les veines. Placer la cupule du stéthoscope sur le site de l’artère brachiale, en créant un sceau léger, mais étanche. Le diaphragme s’avère habituellement adéquat, mais la cupule est conçue pour capter les sons de basse tonalité, comme ceux de la PA. Il est recommandé de l’utiliser. Goner rapidement le brassard au niveau prédéterminé. Ensuite, dégoner le brassard lentement et graduellement, d’environ 2 mm Hg par battement cardiaque. Noter la lecture du premier bruit entendu, l’assourdissement du bruit et sa disparition. Ce sont les phases I, IV et V des bruits de Korotkoff, lesquelles correspondent aux composantes de la lecture de la PA telles que décrites initialement par un chirurgien russe en 1905 TABLEAU 9.4. Pour tous les groupes d’âge, le cinquième bruit de Korotkoff est maintenant utilisé pour marquer la pression diastolique (Chobanian et collab., 2003). Cependant, lorsqu’il existe un écart supérieur à 10-12 mm Hg entre les phases IV et V, il faut inscrire les lectures de ces deux phases en plus de la mesure de la pression systolique (p. ex., 142/98/80). Une communication claire entre les professionnels de la santé est importante puisque les résultats inuent considérablement sur le diagnostic et la planication des soins. Le TABLEAU 9.5 présente une liste des erreurs fréquentes commises pendant la mesure de la PA. ANOMALIES Un trou auscultatoire survient chez environ 5 % des personnes, la plupart du temps dans les cas d’HTA causée par un système artériel non conforme. Trou auscultatoire : Abolition transitoire des bruits de Korotkoff observée au moment de la décompression du brassard chez certaines personnes atteintes de rétrécissement aortique ou d’hypertension artérielle. 9 FIGURE 9.8 Palpation de l’artère brachiale • Hypotension – PA anormalement basse. • Hypertension – PA anormalement élevée TABLEAU 9.7. Signes vitaux en orthostatisme (ou posturaux) Prendre une série de mesures du pouls et de la PA si l’on suspecte : 1) une diminution du volume circulatoire ; 2) lorsque la personne a reçu un diagnostic d’HTA ou qu’elle prend des médicaments antihypertenseurs ; ou 3) si la personne rapporte des épisodes de faiblesse ou de syncope. Demander à la personne de rester couchée pendant deux ou trois minutes, prendre son pouls de base et sa PA. Reprendre ces mesures une fois la personne assise, puis debout. Si la personne est trop faible ou étourdie pour se tenir debout, faire l’évaluation en position couchée, et ensuite assise, les jambes pendantes. Lorsque la position change de couchée à debout, il est normal que se produise une légère diminution (moins de 10 mm Hg) de la pression systolique. Indiquer les mesures de la PA en utilisant des nombres pairs. Noter également la position de la personne, le bras utilisé et la grandeur du brassard si elle diffère de la grandeur standard pour adulte. Écrire la fréquence et le rythme du pouls en remarquant si celui-ci est régulier. Hypotension orthostatique : une diminution de la pression systolique de plus de 20 mm Hg ou une augmentation du pouls de 20 bpm ou plus apparaît au moment d’un changement rapide en position debout. Ces changements sont causés par une vasodilatation périphérique rapide sans compensation du volume d’éjection. Les changements orthostatiques peuvent aussi survenir en raison du repos prolongé, du vieillissement, de l’hypovolémie et de l’effet de certains médicaments. Pression à la cuisse Lorsque la pression mesurée au bras est excessivement élevée, particulièrement chez les adolescents et les jeunes adultes, il faut la comparer avec la pression à la cuisse pour vérier une coarctation de l’aorte (une forme congénitale de rétrécissement). Normalement, la pression à la cuisse est supérieure à celle du bras. Lorsque cela est possible, coucher la personne sur le ventre. (Si la personne doit rester couchée sur le dos, lui plier légèrement les genoux.) Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 191 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES TABLEAU 9.4 Bruits de Korotkoff PHASE BRUIT Brassard goné adéquatement Aucun son I Bien frappé Son frappé bien clair, augmentant en intensité Pression systolique. Alors que la pression du brassard diminue pour atteindre la même que celle de l’artère brachiale, l’artère s’ouvre et laisse passer une première poussée de sang. Le sang a une très grande vélocité en raison de la petite ouverture de l’artère et de la grande différence de pression de chaque côté de l’ouverture. Cela crée une turbulence du ux, lequel est audible. Trou auscultatoire Aucun son Silence durant 30-40 mm Hg au moment du dégonage du brassard : résultat anormal Les bruits disparaissent temporairement à la n de la phase I et réapparaissent au début de la phase II. Fréquent avec l’HTA. S’il n’est pas détecté, il peut conduire à sous-estimer la pression systolique ou à surestimer la pression diastolique. II Glissement Doux murmure suivant le bruit frappé Passage du ux sanguin en turbulence par ouverture partielle de l’artère. III Frappé Craquement, haute tonalité Longue durée du ux sanguin à travers l’artère. L’artère reste fermée brièvement durant la télédiastole. IV Assourdissement rapide Son qui s’assourdit, basse tonalité, murmure coussiné, comme un son de soufe L’artère n’est plus obstruée à aucune phase du cycle cardiaque. Le changement du bruit est entendu en qualité et non en intensité. V Silence 192 Partie 2 DESCRIPTION JUSTIFICATION Le gonement du brassard comprime l’artère brachiale. La pression du brassard excède celle de la pression systolique ventriculaire, obstruant le ux sanguin de l’artère brachiale. Connaissances préalables à l’examen clinique Diminution de la vélocité du ux sanguin. Celui-ci est silencieux. Le dernier bruit audible (marquant la disparition des bruits) est la pression diastolique. Le cinquième bruit de Korotkoff est maintenant utilisé pour déterminer la pression diastolique pour tous les groupes d’âge (Chobanian, Bakris, Black et collab., 2003). OBSERVATIONS NORMALES TABLEAU 9.5 ANOMALIES Principales erreurs dans la mesure de la pression artérielle ERREURS FRÉQUENTES RÉSULTAT JUSTIFICATION La prise de la mesure de la PA est faite alors que la personne est anxieuse, fâchée ou qu’elle vient tout juste d’être active. • Faussement élevée • Stimulation du système nerveux sympathique • Faussement diminuée • Faussement élevée • Élimination des effets de la pression hydrostatique • Force de gravité supplémentaire ajoutée à la pression de l’artère brachiale • Pression diastolique faussement élevée • Contraction musculaire isométrique soutenue Les jambes de la personne sont dans une mauvaise position (p. ex., les jambes croisées). • Pressions systolique et diastolique faussement élevées • Isolement du volume sanguin des jambes de la région thoracique Les yeux de l’inrmière ne sont pas au même niveau que le ménisque du sphygmomanomètre au mercure : • regarde le ménisque vers le haut ; • regarde le ménisque vers le bas. • Faussement élevée • Faussement diminuée • Parallaxe des yeux • Parallaxe des yeux Le brassard est de grandeur inappropriée (erreur la plus fréquente) : • le brassard est trop étroit ; • Faussement élevée • Pression excessive nécessitée pour comprimer entièrement l’artère • Pression excessive nécessité pour comprimer entièrement l’artère Le bras de la personne est mal positionné : • au-dessus du niveau du cœur ; • au-dessous du niveau du cœur. La personne supporte son propre bras. • l’enveloppement du bras par le brassard n’est pas sufsamment tendu ou inégal, la poche du brassard sort de son emplacement. L’inrmière omet de palper l’artère radiale pendant le gonage du brassard : • gonage insufsant ; • Faussement élevée 9 • gonage excessif. • Pression systolique faussement diminuée • Douleur • Bruit systolique initial non entendu ou reprise de l’écoute durant le trou auscultatoire (les bruits bien frappés disparaissent durant 10 à 40 mm Hg, puis réapparaissent ; commun dans les cas d’HTA) Le stéthoscope est appuyé trop fortement sur l’artère brachiale. • Pression diastolique faussement diminuée • Déformation de l’artère par la pression excessive, poursuite du bruit • Pression systolique faussement diminuée ou pression diastolique faussement élevée • Pression diastolique faussement élevée • Temps insufsant pour entendre les bruits bien frappés • Pression diastolique faussement élevée • Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse dans l’avant-bras • Pression diastolique faussement élevée • Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse dans l’avant-bras Le dégonement du brassard est : • trop rapide ; • trop lent. Il y a arrêt du dégonage durant la prise de mesure et regonage immédiat pour reprendre la lecture de la pression systolique. L’inrmière omet d’attendre 1-2 min avant de reprendre une lecture complète. Chapitre 9 • Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse dans l’avant-bras Questionnaire général, mesure des signes vitaux 193 OBSERVATIONS NORMALES TABLEAU 9.5 ANOMALIES Principales erreurs dans la mesure de la pression artérielle (suite) ERREURS FRÉQUENTES RÉSULTAT Erreurs liées à l’inrmière : • a priori subjectif de l’inrmière : idée préconçue de ce que le résultat devrait être en fonction de l’âge, de l’ethnie, du sexe, du poids, de l’histoire de santé ou de la condition physique de la personne ; • précipitation de l’inrmière ; • technique incorrecte ; • préférence de l’inrmière pour les nombres arrondis : « entend » plus de résultats se terminant par zéro qu’il n’en survient en réalité (p. ex., 130/80 plutôt que 132/78) ; • diminution de l’audition de l’inrmière ; • matériel défectueux ou sphygmomanomètre mal calibré. • Possibilité de multiples erreurs JUSTIFICATION Installer un brassard large, de 18-20 cm, autour du tiers inférieur de la cuisse, centré sur l’artère poplitée à l’arrière du genou. Ausculter l’artère poplitée pour prendre la mesure de la pression FIGURE 9.9. Normalement, la pression systolique est de 10 à 40 mm Hg plus élevée dans la cuisse que dans le bras, alors que la pression diastolique demeure la même. FIGURE 9.9 Auscultation de l’artère poplitée PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT Nourrissons et enfants Questionnaire général • Apparence physique, structure du corps et mobilité. Noter les mêmes éléments de base que chez l’adulte, en prenant en considération l’âge et le développement. • Comportement. Noter la réponse aux stimulus et le degré de vivacité approprié à l’âge. 194 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Dans les cas de coarctation de l’aorte, la PA est élevée au bras. La pression à la cuisse est plus basse puisque le sang amené à la cuisse est en deçà du rétrécissement aortique. OBSERVATIONS NORMALES • Lien parental. Noter les interactions entre l’enfant et son parent, s’ils afchent un échange mutuel. Les contacts devraient être chaleureux et affectueux, avec une attitude adaptée à l’état de l’enfant. Le parent procure des soins physiques appropriés et favorise les nouveaux apprentissages. ANOMALIES • Certains signes de la maltraitance de l’enfant se traduisent par le fait que celui-ci évite tout contact visuel ; l’enfant ne manifeste pas l’angoisse de séparation attendue à son âge ; le parent est dégoûté par l’odeur de l’enfant, par ses sons, sa salive ou ses selles. • Privation de soins physiques ou émotionnels 7 . 7 Les signes de maltraitance chez l’enfant sont discutés dans le chapitre 7, Évaluation de la violence familiale. Mesures anthropométriques Poids Peser un nourrisson sur une balance à plateau FIGURE 9.10. Pour vérier la calibration, placer le poids à zéro et observer le éau. Surveiller le bébé an qu’il ne tombe pas. Peser les nourrissons aux 10 g près et les trottineurs aux 100 g près. 9 FIGURE 9.10 Pesée du nourrisson Pour l’enfant âgé de deux ou trois ans, utiliser la balance à éau. L’enfant doit garder son caleçon. Certains jeunes enfants sont parfois apeurés par la plateforme mobile et peuvent préférer s’asseoir sur la balance pour nourrissons. Utiliser la balance à éau avec les enfants d’âge préscolaire et scolaire, en préservant leur pudeur par le port de vêtements légers FIGURE 9.11. FIGURE 9.11 Pesée d’enfants d’âge préscolaire et scolaire Taille Jusqu’à l’âge de deux ans, mesurer le nourrisson couché sur le dos en utilisant une toise horizontale FIGURE 9.12. Maintenir la tête du nourrisson appuyée sur la plaque de tête de la toise. Étant donné que le nourrisson garde normalement ses jambes échies, étirer ses jambes momentanément en tenant ses genoux ensemble et en les appuyant sur la plaque de pieds de la toise. Il se peut que l’inrmière doive répéter la mesure pour plus de précision. Éviter d’utiliser un ruban à mesurer placé à côté du nourrisson puisque cette méthode est imprécise. Mesurer la taille des enfants âgés de deux ou trois ans à l’aide de la toise de la balance à éau ou encore le dos appuyé sur une FIGURE 9.12 Mesure du nourrisson Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 195 OBSERVATIONS NORMALES toise xée au mur FIGURE 9.13. (Parfois, un enfant peut se tenir plus droit en étant appuyé contre le mur plutôt que contre l’étroite toise de la balance.) Encourager l’enfant à se tenir bien droit et à regarder droit devant lui sans incliner la tête. Les épaules, les fesses et les talons doivent toucher le mur. Tenir un niveau sur la tête de l’enfant de façon perpendiculaire au mur. Faire une marque juste sous le niveau, en notant la mesure au millimètre près. La croissance est peut-être le meilleur indicateur de la santé générale d’un enfant. La taille et le poids de l’enfant sont inscrits au dossier à chacune des visites médicales pour déterminer si sa courbe de croissance est normale. Les résultats sont inscrits sur les courbes de croissance normale. La croissance normale de l’enfant est continue, mais inégale, avec des poussées de croissance rapide se produisant au cours de l’enfance et de l’adolescence. Les résultats sont plus ables lorsque de nombreuses mesures sont comparées sur une longue période de temps. Ces courbes de croissance comparent aussi les mesures de l’enfant avec celles de la population en général. Les limites de la normalité varient du 5e au 95e centile des courbes normalisées. Utiliser son jugement et tenir compte de l’hérédité de l’enfant qui peut sembler petit pour son âge. Explorer les courbes de croissance des parents et de la fratrie. Les différences de taille et de poids chez les différents groupes ethniques aux États-Unis et au Canada semblent minimes (CDC, 2000). Les courbes de croissances publiées par l’OMS sont utilisables sans discrimination ethnique. L’OMS dénote que les principaux facteurs de croissance semblent être d’ordre économique, nutritionnel et environnemental (OMS, 2014). Circonférence de la tête Mesurer la circonférence de la tête du nourrisson à la naissance et à chaque visite médicale d’un enfant en santé, jusqu’à l’âge de deux ans et, par la suite, chaque année jusqu’à l’âge de six ans. Utiliser un ruban à mesurer en plastique plutôt qu’en papier. Entourer la tête avec le ruban à mesurer au sommet des os frontaux (à la hauteur des sourcils) et occipitaux ; la mesure la plus large est la bonne FIGURE 9.14. Transcrire la mesure sur les courbes de croissance normalisées. Comparer la dimension de la tête du nourrisson avec celle attendue pour son âge. Une série de mesures est plus valable qu’une seule donnée pour démontrer le rythme de croissance de la tête. La tête du nouveau-né mesure de 32 à 38 cm (moyenne autour de 34 cm), soit environ 2 cm de plus que la circonférence du thorax. Le thorax grandit plus rapidement que le crâne ; à certains moments, entre six mois et deux ans, les deux mesures sont sensiblement les mêmes, mais après l’âge de deux ans, la circonférence thoracique est plus grande que celle de la tête. 196 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique ANOMALIES FIGURE 9.13 Mesure de la taille d’un enfant à l’aide d’une toise Pousser plus loin l’exploration chez les enfants dont les mesures de croissance : • se situent en deçà du 5e centile ou au-dessus du 95e centile, sans explication génétique ; • montrent un écart important entre les centiles de taille et de poids – par exemple, une taille dans le 10e centile et un poids dans le 95e centile ; • démontrent que la croissance s’est subitement arrêtée alors qu’elle était stable ; • n’ont pas pu démontrer des poussées de croissance normales durant la petite enfance et l’adolescence. FIGURE 9.14 Mesure de la circonférence de la tête du nourrisson OBSERVATIONS NORMALES La mesure de la circonférence thoracique est utile dans la comparaison avec celle de la tête, mais n’a pas vraiment de valeur en elle-même. Entourer le thorax avec le ruban à mesurer au niveau de la ligne des mamelons FIGURE 9.15. Le ruban doit être tendu, mais pas sufsamment serré pour laisser une marque. ANOMALIES Une circonférence de tête augmentée survient à cause d’une hypertension intracrânienne 13 . Signes vitaux 13 Les manifestations de l’hyper­ tension intracrânienne sont décrites dans le chapitre 13, Tête, visage et cou, englobant le drainage lymphatique. Mesurer les SV de l’enfant pour les mêmes raisons et avec la même fréquence que pour un adulte. • Avec un nourrisson, inverser l’ordre de la prise des SV, soit : respiration, pouls et température. La prise de température rectale peut faire pleurer le nourrisson et ainsi augmenter sa FR et son pouls, modiant donc les résultats normaux au repos. • Chez l’enfant d’âge préscolaire, la peur d’être mutilé est normale et augmentée par toute procédure effractive. Lorsque cela est possible, éviter de prendre la température rectale, par exemple. Utiliser plutôt la voie tympanique. Si cela s’avère impossible, utiliser l’ordre inversé de la prise des SV et prendre la température rectale en dernier. • Chez l’enfant d’âge scolaire, favoriser la coopération en lui expliquant complètement la procédure et en l’encourageant à manipuler le matériel. 9 FIGURE 9.15 Mesure de la circonférence thoracique du nourrisson • Pour l’adolescent, l’approche pour mesurer les SV ressemble plus à celle utilisée chez l’adulte. Température Tympanique La mesure de la température tympanique est utile chez les trottineurs, qui se tortillent pour tenter d’échapper à la contrainte que nécessite la prise de la température rectale, et avec les enfants d’âge préscolaire, qui ne sont pas encore capables de coopérer pour une prise de température orale et qui, en plus, craignent de se dévêtir et redoutent le caractère effractif de la prise de la température rectale. La mesure de la température tympanique, très rapide, est habituellement déjà prise avant que l’enfant ne le réalise FIGURE 9.16. Axillaire La voie axillaire est plus sécuritaire et plus accessible que la voie rectale. Cependant, son exactitude et sa abilité ont été remises en question (Cusson, Madonia et Taekmen, 1997). Lorsque les thermorécepteurs de froid sont stimulés, le tissu adipeux brun de cette région libère de la chaleur par une réaction chimique qui élève articiellement la température de la peau. Dans le cas où la température axillaire est utilisée, placer l’ampoule du thermomètre correctement sous l’aisselle et maintenir le bras de l’enfant en adduction. (Avec un thermomètre en verre, la température inscrite sera stable en cinq minutes et demie.) FIGURE 9.16 Prise de la température tympanique chez le nourrisson Orale Utiliser la voie orale lorsque l’enfant est sufsamment âgé pour garder la bouche fermée, soit habituellement vers l’âge de cinq ou six ans, mais il arrive parfois que certains enfants de quatre ans puissent collaborer. Lorsque cela s’avère possible, utiliser un thermomètre électronique puisqu’il est incassable et qu’il fournit rapidement un résultat. Rectale Utiliser la voie rectale chez les nourrissons ou les enfants plus âgés lorsque les autres voies sont impraticables, comme avec les Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 197 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES enfants qui ne peuvent pas collaborer, qui sont agités, inconscients, gravement malades ou qui sont enclins à faire des crises. Un nourrisson peut être couché sur le dos ou sur le côté, et avec une main, lui tenir les genoux appuyés sur l’abdomen. (Lorsque le bébé garçon est couché sur le dos, recouvrir son pénis avec une couche pour éviter un jet d’urine vers le haut.) Un nourrisson peut aussi être étendu sur le ventre, en travers des cuisses d’un adulte. Écarter les fesses d’une main et insérer la sonde lubriée du thermomètre électronique tout au plus à 2,5 cm de profondeur. Toute insertion plus profonde pourrait causer une perforation rectale en raison de la courbe postérieure du sigmoïde à 3 cm. (Avec un thermomètre en verre, la température inscrite sera stable en trois minutes.) Normalement, la température rectale est plus élevée chez les nourrissons et les jeunes enfants que chez les adultes, avec une moyenne de 37,8 °C (100 °F) à 18 mois. En outre, il est normal que la température soit plus élevée en n d’après-midi, après que l’enfant a joué vigoureusement ou a mangé. Pouls 19 La palpation et l’auscultation du pouls apical sont décrites dans le chapitre 19, Cœur et vaisseaux du cou. Palper ou ausculter le pouls apical chez les nourrissons et les trottineurs 19 . Chez les enfants âgés de plus de deux ans, évaluer le pouls radial. Prendre le pouls pendant une minute complète an de tenir compte des irrégularités normales, comme les arythmies sinusales. La FC varie davantage chez les nourrissons et les enfants que chez l’adulte en réponse aux exercices, aux émotions et à la maladie. Jusqu’à l’âge de six à huit ans, lorsque les enfants sont malades, leur èvre peut monter à un degré plus élevé que chez les adultes. Même en présence d’une infection mineure, la èvre peut s’élever de 39,5 à 40,5 °C (103 à 105 °F). Respiration Observer l’abdomen du nourrisson à la recherche de mouvements puisque sa respiration est plus diaphragmatique que thoracique FIGURE 9.17. La FR durant le sommeil est la plus précise. Calculer la FR pendant une minute complète puisque celle-ci varie considérablement, allant de respirations rapides à de courtes périodes d’apnée. Se reporter aux fréquences normales inscrites dans le TABLEAU 9.3. Il est possible qu’une tachypnée, ou une respiration rapide dont la fréquence > 60 Resp./min chez le nouveau-né jusqu’à l’âge de 2 mois et > 50 Resp./min chez l’enfant de 2 à 12 mois soit présente. Cela peut survenir avec la èvre et peut indiquer une infection. Une tachypnée et une difculté respiratoire peuvent faire suspecter une pneumonie. FIGURE 9.17 Observation des mouvements respiratoires du nourrisson Pression artérielle Chez les enfants âgés de trois ans et plus, de même que chez les enfants plus jeunes à risque, mesurer la PA au moins annuellement. An d’obtenir des mesures précises auprès des enfants, il faut faire certains ajustements quant au choix du matériel et de la technique. L’erreur la plus fréquente est l’utilisation d’un 198 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Des données probantes indiquent qu’une HTA primaire est décelable chez les enfants et se produit couramment (National High Blood Pressure Education Program OBSERVATIONS NORMALES brassard de taille inappropriée. La largeur du brassard doit couvrir les deux tiers supérieurs du bras, et la poche gonable du brassard doit l’encercler entièrement. Utiliser un stéthoscope pédiatrique pour localiser les bruits. Si possible, tranquilliser un nourrisson qui pleure durant 5 à 10 minutes avant de mesurer sa PA ; les pleurs peuvent faire augmenter la pression systolique de 30 à 50 mm Hg. Se servir de la disparition des bruits (phase V des bruits de Korotkoff) pour la lecture de la pression diastolique chez l’enfant comme pour l’adulte. Les enfants âgés de moins de trois ans ont les artères brachiales si petites qu’il est difcile d’entendre les bruits de Korotkoff avec un stéthoscope. Utiliser plutôt un sphygmomanomètre électronique, lequel fonctionne par oscillométrie tel que le DinamapMD. Celui-ci fournit une lecture numérique des pressions systolique, diastolique et moyenne de même que le pouls. Ou encore, employer un sonomètre Doppler pour amplier les bruits. Cet appareil est facile d’utilisation et il peut être manipulé par une seule personne. (Voir la technique d’utilisation de l’appareil Doppler.) ANOMALIES [NHBPEP], 2004). Une PA se situant entre les 90e et 95e centiles est considérée comme de la préhypertension chez l’adolescent, une PA ≥ 120/80 mm Hg traduit également une préhypertension même si elle est sous le 90e centile. Une PA qui se situe au-delà du 95e centile peut être de l’HTA et devrait être mesurée à l’occasion de deux autres visites. Si la PA excède le 99e centile, l’adolescent devrait obtenir une ordonnance médicale pour une évaluation plus poussée et un traitement éventuel. 9 Adultes vieillissants Questionnaire général • Apparence physique. Vers la 8e ou la 9e décennie, le contour du corps se découpe plus nettement, avec davantage d’angles dans les traits du visage, et les proportions corporelles sont redistribuées (voir Mesure du poids et de la taille). • Posture. Une exion générale survient vers la 8 e ou la 9 e décennie. • Démarche. Les personnes âgées ont souvent recours à une base plus large pour compenser la diminution de l’équilibre, les bras peuvent être étendus pour aider à garder celle-ci, et les pas sont parfois plus courts ou inégaux. Mesures anthropométriques Poids La personne vieillissante paraît avoir un contour corporel plus net avec davantage de proéminences osseuses que l’adulte plus jeune. Le poids décroît durant les 80es et 90es années. Cet élément est plus évident chez les hommes, peut-être en raison du rétrécissement musculaire plus important. La distribution adipeuse change aussi durant ces années. Malgré une saine alimentation, le tissu adipeux sous-cutané disparaît du visage et de la périphérie (particulièrement aux avant-bras), tandis que du tissu adipeux additionnel s’accumule sur l’abdomen et les hanches. Ce changement dans la répartition adipeuse et dans la perte de masse musculaire peut inuencer l’interprétation de l’IMC d’une personne vieillissante. À IMC égal, cette dernière possède plus de tissus adipeux qu’un jeune adulte. Comme la personne âgée a tendance à devenir plus petite en taille, l’IMC pourrait surestimer le volume de gras corporel. Toutefois, ces facteurs ne nuisent pas à la validité de l’IMC en tant que méthode pour surveiller le poids d’une personne (NIH, 2000). Taille Vers les 80es et 90es années, plusieurs personnes sont plus petites qu’elles ne l’étaient durant leurs 70es années. Ce phénomène provient d’un raccourcissement de la colonne vertébrale causé par Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 199 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES l’amincissement des disques intervertébraux, le raccourcissement des vertèbres de même que les changements posturaux liés à une cyphose et à une légère exion des genoux et des hanches. Parce que les os longs ne rétrécissent pas avec l’âge, les proportions corporelles d’ensemble paraissent différentes – un tronc plus court avec des extrémités relativement longues. Signes vitaux Température Les changements dans le mécanisme de régulation de la température corporelle rendent la personne vieillissante moins susceptible de faire de la èvre, mais le risque d’hypothermie est plus élevé. Donc, la température est un indice moins able du véritable état de santé de la personne âgée. L’activité des glandes sudoripares est également diminuée. Pouls L’étendue normale de la FC est de 50 à 100 bpm, mais le rythme peut être légèrement irrégulier. L’artère radiale peut sembler raide, rigide et tortueuse chez la personne âgée. Malgré ces caractéristiques, cela ne signie pas nécessairement la présence d’une affection vasculaire cardiaque ou cérébrale. La rigidité croissante de la paroi artérielle nécessite un apport sanguin accéléré ; le pouls devient donc plus facile à palper. Respiration Le vieillissement cause une diminution de la capacité vitale et une réduction du volume de réserve inspiratoire. Il est possible de noter une phase inspiratoire plus supercielle et une FR accrue. Pression artérielle L’aorte et les artères majeures ont tendance à durcir avec l’âge. Comme le cœur pompe le sang contre une artère plus dure, la pression systolique augmente, conduisant ainsi à une plus grande pression du pouls FIGURE 9.18. Chez plusieurs personnes âgées, FIGURE 9.18 Moyenne des pressions artérielles chez des personnes apparemment en bonne santé, de la naissance à l’âge avancé 200 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES tant les pressions systolique et diastolique sont augmentées, rendant difcile la distinction entre les valeurs normales de ces personnes et l’HTA anormale. TECHNIQUES COMPLÉMENTAIRES Mesure de la saturation en oxygène L’oxymétrie pulsée (saturométrie) est une méthode non effractive qui permet d’évaluer la saturation du sang en oxygène (SpO2) au moyen d’un sphygmooxymètre. Un capteur, attaché au doigt ou au lobe d’oreille de la personne, est muni d’une diode qui émet un rayon lumineux et d’un détecteur qui mesure la quantité de lumière absorbée par l’oxyhémoglobine et l’hémoglobine non oxygénée (réduite). Le sphygmooxymètre compare le ratio de lumière émise par rapport à celle absorbée et convertit ce ratio en pourcentage de SpO2. Puisque cela ne mesure que l’absorption de lumière du ux sanguin pulsatile, le résultat obtenu est la SpO2 du sang artériel. Une personne en bonne santé, sans maladie pulmonaire ni anémie, a normalement une SpO2 de 95 à 100 %. Choisir le capteur du sphygmooxymètre approprié. Le capteur pour le doigt possède un ressort et fait l’effet d’une pince à linge attachée au doigt, mais ne cause pas de douleur FIGURE 9.19. Dans les cas de faible SpO2 (p. ex., l’hypoxie, la tachypnée, la cyanose, etc.), le capteur attaché au lobe de l’oreille est plus précis et moins inuencé par la vasoconstriction périphérique. 9 FIGURE 9.19 Oxymètres de pouls (sphygmooxymètres) Moniteur électronique de signes vitaux Un appareil électronique de monitorage des SV est fréquemment utilisé dans les centres hospitaliers et les cliniques, particulièrement lorsque des mesures répétées de la PA sont nécessaires. La pulsation artérielle crée une vibration qui est détectée par un capteur électronique. Cet appareil non effractif et rapide permet de prendre automatiquement des mesures à intervalles réguliers et de lire les résultats sur un écran numérique. Comme pour la mesure de la PA manuelle, l’exactitude dépend de l’installation correcte d’un brassard de grandeur appropriée. Le moniteur électronique ne peut percevoir les vibrations d’une PA basse ; il ne faut donc pas l’utiliser chez des personnes dont la PA se situe en deçà de 90 mm Hg ni chez celles ayant un pouls irrégulier, des frissons, des tremblements ou des convulsions. Si le résultat afché est incohérent avec les autres données cliniques recueillies, vérier de nouveau la PA avec un sphygmomanomètre anéroïde et le stéthoscope. Certains moniteurs de PA intègrent également un thermomètre et un sphygmooxymètre FIGURE 9.20. FIGURE 9.20 Appareil électronique de monitorage de la pression artérielle avec sphygmooxymètre Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 201 OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES Technique Doppler 20 Pour en savoir plus sur la technique Doppler, consul­ ter le chapitre 20, Système vasculaire périphérique et système lymphatique. Dans plusieurs situations, le pouls et la mesure de la PA sont enrichis par l’utilisation d’un appareil électronique : le débitmètre ultrasonique Doppler. La technique Doppler fonctionne selon un principe découvert au xix e siècle par un physicien autrichien, Johannes Doppler. Le son varie en tonalité en fonction de la distance entre la source sonore et l’auditeur. La tonalité est plus aiguë lorsque la distance est petite, et elle diminue lorsque la distance augmente. Une comparaison peut être faite avec un train roulant à grande vitesse : le son du sifet devient plus aigu quand le train s’approche, et il baisse lorsque le train s’éloigne. Dans ce cas-ci, la source sonore est le sang circulant dans les artères d’une manière rythmée. Un transducteur de poche saisit les changements dans les fréquences sonores causées par le ux et le reux sanguins et les amplie. L’auditeur entend un son de glissement au rythme des battements pulsatiles. La technique Doppler est utilisée pour localiser les sites des pouls périphériques 20 FIGURE 9.21. Pour la mesure de la PA, elle amplie les bruits de Korotkoff. À l’aide de cette technique, il est possible d’évaluer les sons qui sont difficiles à entendre avec un stéthoscope, comme ceux des personnes gravement malades ayant une PA basse, ceux des nourrissons ayant de petits bras et ceux des personnes obèses pour qui les bruits sont assourdis par les couches de gras. De plus, l’installation du brassard sur une personne obèse s’avère difcile en raison de la forme conique de son bras. Dans cette situation, il faut placer le brassard sur une partie plus plate de l’avant-bras et tenir la sonde Doppler au-dessus de l’artère radiale. À chaque site, utiliser la technique suivante. • Appliquer du gel conducteur sur la sonde du transducteur. • Mettre en marche le débitmètre Doppler. • Toucher la peau à l’aide de la sonde en la tenant perpendiculairement à l’artère. • Un son de glissement pulsatile indique qu’il s’agit bien de l’artère. Faire tourner la sonde tout en maintenant le contact avec la peau. Ne pas appuyer trop fort sur la sonde an de ne pas perdre le pouls. • Goner le brassard jusqu’à ce que les bruits disparaissent, puis le goner jusqu’à 20 ou 30 mm Hg supplémentaires. • Dégoner lentement le brassard jusqu’au moment d’entendre le premier bruit de glissement et noter cette valeur. C’est la pression systolique. • Il est difcile d’entendre l’assourdissement ou la disparition certaine des bruits qui indiquent la pression diastolique (phases IV et V des bruits de Korotkoff). Cependant, la pression systolique fournit, à elle seule, une donnée valable de la perfusion des tissus et du ux sanguin dans les artères du client. 202 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique FIGURE 9.21 Technique Doppler Particularités culturelles et génétiques Apparence générale Certaines différences liées à l’origine ethnique sont observées dans les proportions corporelles. En général, les hommes blancs mesurent 1,27 cm de plus que les hommes afro-américains, alors que les femmes blanches et afro-américaines sont, en moyenne, de la même grandeur. Le ratio de grandeur assis/debout révèle que les afro-américains, hommes ou femmes, ont les jambes plus longues et le tronc plus court que les blancs. Parce qu’ils ont proportionnellement plus de poids au niveau du tronc, les hommes blancs semblent plus obèses que les Afro-Américains. Les Asiatiques sont nettement plus petits, plus légers et ont une ossature plus petite (Gilsanz, Skaggs, Kovanlikaya et collab., 1998). Malgré tout, la génétique n’est pas garante de l’avenir… Au xxe siècle, les personnes habitant dans les pays développés ont connu une plus grande croissance que celles provenant de pays en voie de développement, principalement en raison de l’inuence de l’environnement (Beard et Blaser, 2002). Cela est encore plus apparent chez les enfants d’immigrants. Les hommes d’origine japonaise vivant au Japon sont plus petits que ceux qui habitent à Hawaii, et encore plus petits que ceux qui vivent en Californie. De même, les enfants hawaïens d’immigrés nés au Japon sont signicativement plus grands que leurs parents. En outre, les enfants réfugiés du Guatemala ou du Mexique nés aux États-Unis sont notablement plus grands que leurs homologues nés au Guatemala ou au Mexique et immigrant aux États-Unis. Au total, les enfants mayas qui ont grandi aux États-Unis sont en moyenne 5,5 cm plus grands que leurs homologues demeurant au Guatemala. En général, les générations ultérieures d’enfants d’immigrants ont tendance à augmenter en taille jusqu’à ce qu’ils atteignent celle de la population d’accueil (Beard et Blaser, 2002). La longueur des os, telle que révélée par la stature, démontre des différences bioculturelles précises : les Afro-Américains ont les jambes et les bras plus longs que les Blancs. Les Asiatiques et les personnes des Premières Nations ont en moyenne le tronc proportionnellement plus long et les membres plus courts que les Blancs. Les Afro-Américains ont tendance à avoir les épaules plus larges et les hanches plus nes, alors que les Asiatiques tendent à avoir les hanches plus larges et les épaules plus étroites. La largeur des épaules est grandement déterminée par la longueur de la clavicule. Puisque celle-ci est un os long, les personnes plus grandes ont tendance à avoir les épaules plus larges, alors que les petites personnes ont les épaules plus étroites. Obésité En 2012, au Canada, les mesures autodéclarées rapportent que 18,4 % des adultes canadiens ont dit avoir une taille et un poids qui les classaient dans la catégorie des personnes obèses. Ces mesures précisent que 41,3 % des hommes et 26,9 % des femmes ont une taille et un poids qui les classaient dans la catégorie des personnes faisant de l’embonpoint. Ces taux sont stables depuis 2003. 9 Lorsqu’on combine les personnes obèses et les personnes faisant de l’embonpoint, 59,9 % des hommes (7,7 millions) et 45,0 % des femmes (5,8 millions) faisaient face à un risque accru pour la santé en raison d’un excédent de poids. Les taux d’embonpoint et d’obésité combinés des femmes et des hommes sont demeurés stables depuis 2009 (Statistique Canada, 2012). Les données de la plus récente étude du National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES) montrent que 32,2 % des adultes américains sont obèses (Ogden, Ogden, Curtin et collab., 2006). Les taux d’obésité par groupes ethniques indiquent de l’obésité chez 30 % des adultes non hispaniques blancs ; chez 45 % des non hispaniques noirs ; et chez 37 % des Américains mexicains. Aucune différence de poids n’est observée entre les groupes ethniques masculins. Cependant, les femmes mexicaines américaines et les Noires non hispaniques sont plus susceptibles d’être obèses que les femmes blanches non hispaniques, et ce, de façon notable. La tendance des 30 dernières années montre que les enfants afro-américains ont afché de plus grandes augmentations de l’IMC, du poids et de la taille que les enfants blancs. Les augmentations notées chez les enfants américains mexicains se situent entre celles observées pour ces deux groupes (Ogden et collab., 2006). Quelles sont les causes de l’augmentation de l’obésité ? Probablement une interaction de facteurs biologiques et sociaux, mais notamment un environnement qui offre peu de possibilités d’activité physique et une surabondance de nourriture riche en calories (Ogden et collab., 2006). Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 203 9.2 Anomalies Les TABLEAUX 9.6 et 9.7 présentent des anomalies dans la taille et les proportions corporelles, ainsi que de la pression artérielle. TABLEAU 9.6 Anomalies dans la taille et les proportions corporelles SYNDROME DE MARFAN Abraham Lincoln, Paganini ainsi que Rachmaninoff auraient hérité de ce trouble du tissu conjonctif caractérisé par une stature grande et mince (au-delà du 95e centile), une arachnodactylie (doigts longs et eflés), des articulations hyperextens ibles , une envergure des bras plus grande que la taille, une distance pubis/sol dépassant la distance tête/pubis, une déformation sternale, un palais étroit et arqué, et des pieds plats. Une morbidité et une mortalité surviennent tôt en raison d’une complication cardiovasculaire telle qu’une régurgitation mitrale ou une dissection de l’aorte. ANOREXIE NERVEUSE Trouble psychologique sérieux caractérisé par une perte de poids grave et menaçante pour la vie et même une aménorrhée chez l’adolescente et la jeune femme autrement en santé. Le comportement est caractérisé par une obsession au sujet de son poids, une aversion pour la nourriture, une image corporelle déformée (la personne se perçoit comme grasse malgré une apparence squelettique), un régime de privation, des séances frénétiques d’exercices et une quête de la perfection. 204 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique NANISME HYPOPITUITAIRE Un décit en hormone de croissance durant l’enfance conduit à un retard de croissance sous le 3e centile, à une puberté retardée, à l’hypothyroïdie et à une insufsance surrénale. La lle de neuf ans, à gauche, semble plus jeune que son âge réel, avec un visage infantile et potelé. La lle de neuf ans à droite paraît son âge et montre une taille accrue, un faciès mature et la perte du gras infantile. ACROMÉGALIE (HYPERPITUITARISME) Une hypersécrétion de l’hormone de croissance à l’âge adulte, une fois la croissance normale terminée, cause une surcroissance des os du visage, de la tête, des mains et des pieds, mais ne change pas la taille de la personne. Les organes internes sont également hypertrophiés (p. ex., une cardiomégalie et des troubles métaboliques tels que le diabète de type 2). TABLEAU 9.6 Anomalies dans la taille et les proportions corporelles (suite) OBÉSITÉ ENDOGÈNE – SYNDROME DE CUSHING L’administration de corticotrophine (ACTH) ou la production excessive d’ACTH par la glande pituitaire va stimuler les corticosurrénales à sécréter un excès de cortisol. Cela entraîne le syndrome de Cushing, caractérisé par un gain de poids et de l’œdème avec de l’obésité au tronc et à la région cervicale (bosse de bison) de même qu’un visage pléthorique rond (faciès lunaire). Le catabolisme excessif cause une atrophie musculaire, de la faiblesse, des membres amincis, une taille réduite et une peau mince et fragile avec des stries abdominales violacées, des meurtrissures et de l’acné. Noter que l’obésité est nettement différente ici de l’obésité exogène causée par un apport calorique excessif, dans laquelle le tissu adipeux est réparti également et où la masse musculaire demeure intacte. GIGANTISME Une sécrétion excessive d’hormone de croissance par la glande pituitaire antérieure entraîne une surcroissance de tout le corps. Lorsque cela survient durant l’enfance, avant la fermeture des épiphyses osseuses à la puberté, cela cause une augmentation de la taille (ici, 2,09 m) et du poids de même qu’un retard du développement sexuel. 9 NANISME ACHONDROPLASIQUE Trouble génétique qui transforme le cartilage en os. Caractérisé par une tête relativement large, avec une bosse frontale et hypoplasie centrée, une petite stature, des membres courts et souvent une cyphose thoracique, une lordose lombaire marquée et l’abdomen en saillie. La taille moyenne de l’homme adulte est de 131,5 cm et celle de la femme adulte est d’environ 125 cm. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 205 Anomalies de la pression artérielle TABLEAU 9.7 Hypotension • Chez les adultes normotendus : < 95/60 mm Hg • Chez les adultes hypertendus : < moyenne des lectures de la personne, mais > 95/60 mm Hg • Chez l’enfant : < valeurs attendues pour son âge Survient dans le cas Justication • • • • • • • • • D’infarctus aigu du myocarde (IADM) De choc D’hémorragie De vasodilatation De maladie d’Addison (fonctionnement diminué des glandes surrénales) ↓ débit cardiaque ↓ débit cardiaque ↓ volume sanguin total ↓ résistance vasculaire périphérique Signes et symptômes associés Dans les cas de diminution du débit cardiaque, une PA basse est accompagnée d’un pouls augmenté, d’étourdissements, de diaphorèse, de confusion et de vision trouble. La peau semble froide et moite en raison de la constriction des vaisseaux sanguins superciels pour détourner le sang vers les organes vitaux. Une personne ayant un IADM peut aussi se plaindre de douleur d’écrasement rétrosternal, de douleur épigastrique forte et de douleur à l’épaule ou à la mâchoire. Hypertension Hypertension primaire Cela se produit sans cause connue, mais est responsable de 95 % des cas l’HTA chez l’adulte. Classication et suivi de la PA chez les adultes âgés de 18 ans et plus a Thérapie médicamenteuse initiale Classication de la PA Pression systolique (mm Hg) Pression diastolique (mm Hg) Modication du style de vie Normale < 120 < 80 Encourager Préhypertension 120-139 80-89 Stade I Hypertension 140-159 Stade II Hypertension ≤ 160 206 Partie 2 Sans indication d’obligation de traitement Avec indication d’obligation de traitement Oui Aucun médicament antihypertenseur indiqué. Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c. 90-99 Oui Diurétiques de type thiazide pour la plupart. Considérer aussi IECA, BRA, BB et BCC. Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c. Autres médicaments antihypertenseurs (diurétiques, IECA, BRA, BB, BCC) au besoin. ≥ 100 Oui Combinaison de deux médicaments pour la plupart b, habituellement un diurétique de type thiazide et IECA, BRA, BB ou BCC. Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c. Autres médi caments antihypertenseurs (diurétiques, IECA, BRA, BB, BCC) au besoin. Connaissances préalables à l’examen clinique TABLEAU 9.7 Anomalies de la pression artérielle (suite) Stratication du risque cardiovasculaire chez les clients hypertendus Facteurs de risque majeurs • Tabagisme • Dyslipidémie • Diabète de type 2 Dommages à l’organe cible/maladie cardiovasculaire • Maladies cardiaques • Atrophie ventriculaire gauche • Angine, infarctus myocardique antérieur • Âge > 60 ans • Sexe (hommes et femmes postménopausées) • Antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire : femmes < 65 ans ou hommes < 55 ans • • • • • • Revascularisation coronarienne antérieure Crise cardiaque AVC ou ischémie cérébrale transitoire Néphropathie Maladie artérielle périphérique Rétinopathie 9 Modication des habitudes de vie pour la prévention et la gestion de l’hypertension • Perdre du poids dans le cas de surcharge pondérale. • Limiter l’ingestion d’alcool à 30 mL d’éthanol (soit 720 mL [24 oz] de bière, 300 mL [10 oz] de vin ou 60 mL [2 oz] de spiritueux) par jour pour les hommes et à 15 mL (0,5 oz) d’éthanol par jour pour les femmes ou les personnes de petit poids. • Augmenter l’activité physique aérobique (30-45 min presque tous les jours de la semaine). • Diminuer l’apport en sodium à moins de 100 mmol/jour (moins de 2,4 g de sodium ou 6 g de chlorure de sodium). • Maintenir un apport sufsant en potassium (environ 90 mmol/jour). • Maintenir un apport sufsant en calcium et en magnésium pour garder une bonne santé en général. • Cesser de fumer et diminuer l’apport en gras saturés et en cholestérol pour favoriser une santé cardiovasculaire globale. BB : bêtabloquant ; BCC : bloqueur des canaux calciques ; BRA : bloqueur des récepteurs de l’angiotensine ; IECA : inhibiteur d e l’enzyme de conversion de l’angiotensine a Traitement déterminé par la catégorie d’hypertension la plus élevée. b Une thérapie combinée initiale doit être utilisée avec précaution chez les personnes à risque d’hypotension orthostatique. c Traiter obligatoirement les clients atteints de maladies rénales chroniques ou de diabète avec une PA cible < 130/80 mm Hg. Source : Adapté de Chobanian, Bakris, Black et collab. ; National Committee on Prevention, Detection, Evaluation and Treatment of High Blood Pressure ; National High Blood Pressure Education Program Coordinating Committee, 2003 Évaluation et jugement clinique Exemple de notes au dossier Femme noire âgée de 47 ans. Directrice d’école secondaire. Bonne santé apparente. Paraît son âge. Alerte, orientée et coopérative. Sans signe de détresse aiguë. Taille : 163 cm ; poids : 57 kg ; T° buccale : 36,8° C ; FC : 76 bpm ; FR : 14 Resp./min ; PA, assise : 146/84 mm Hg au bras droit. Exemple d’évaluation ciblée Grazia S. est une femme d’origine hispanique âgée de 76 ans, secrétaire retraitée, antérieurement en bonne santé, qui est amenée à l’urgence par son mari de 83 ans. Ils ont été malades tous les deux durant la nuit : nausées, vomissements, douleur abdominale et diarrhée, ce qu’ils attribuent à de la « mauvaise » nourriture qu’ils ont consommée au restaurant le soir précédent. L’état du mari s’est amélioré durant la journée qui a suivi, alors que celui de Grazia S. s’est aggravé avec des vomissements intenses, de la diarrhée, de la faiblesse, des étourdissements et une douleur abdominale. Données subjectives Fatigue extrême. Faiblesse et étourdissements survenant chaque fois que la cliente essaie de s’asseoir ou de se lever : « Je me sens comme si j’allais perdre connaissance. » Nausées et vomissements intenses, a soif, mais ne garde rien, chaque gorgée d’eau se transforme en « haut-le-cœur ». La douleur abdominale est modérée et intermittente. Les diarrhées sont sous forme de selles brunes liquides, abondantes durant la nuit, mais diminuées maintenant. Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 207 Données objectives Signes vitaux (couchée) : T° : 36,8 °C ; PA 102/64 mm Hg au bras gauche ; FC : 70 bpm régulier ; FR : 18 Resp./min. Aidée pour s’asseoir, jambes pendantes : PA : 74/52 mm Hg au bras gauche ; FC : 138 bpm régulier ; FR : 20 Resp./min. Peau pâle et moite (diaphorèse). Rapporte voir des étoiles et avoir des étourdissements en position assise. Recouchée. Système neurologique : état de conscience : alerte et orientée, pupilles égales, rondes, réactives à la lumière et à l’accommodation (PERRLA). État sensitif normal. Légère faiblesse des bras et des jambes. Démarche et posture debout non vériées en raison de son incapacité à se tenir debout. Réexes ostéotendineux 2+ et égaux bilatéralement. Réexe de Babinski négatif. Évaluation Respiration : bruits respiratoires clairs dans toutes les plages pulmonaires. Aucun bruit adventice. Hypotension orthostatique, augmentation du pouls en orthostatisme et symptômes de syncope, liés à l’hypovolémie. Système cardiovasculaire : FC régulière à 70 bpm lorsque couchée. B1 et B2 ne sont pas accentués ni diminués, aucun bruit surajouté. Tous les pouls sont présents à intensité 2+ et égaux bilatéralement. Carotides 2+ sans bruits carotidiens. Diarrhée possiblement liée à l’ingestion de nourriture contaminée. Abdomen : hyperactivité des bruits intestinaux, peau pâle et moite, abdomen légèrement souple à la palpation. Pas d’augmentation du volume du foie ni de la rate. Risque d’hyperthermie lié à la déshydratation et au vieillissement. Décit du volume liquidien. Dossier : Éric Chabot (suite) Après avoir pris les mesures anthropométriques de monsieur Chabot, vous poursuivez l’entrevue. 1. Formulez deux questions pertinentes que vous pourriez poser à monsieur Chabot relativement aux données obtenues au moment de la mesure de son poids et de son tour de taille. 2. En consultant le dossier de monsieur Chabot, vous voyez que ses SV à l’occasion de sa dernière visite il y a 13 mois étaient les suivants : PA : 134/84 mm Hg ; P : 78 bpm ; FR : 16 Resp./min ; T° : 37,3 °C. Quelles sont les données manquantes relativement aux SV ? 3. Voici les SV actuels de monsieur Chabot : PA bras gauche, assis : 128/72 mm Hg ; P : 54 bpm régulier, 2+ ; FR : 16 Resp./min, régulier, amplitude normale ; T° : 37,2 °C buccale. Quelles questions allezvous lui poser à la lumière des différences que vous observez ? 4. Serait-il pertinent de vérier la PA à la cuisse dans le cas de monsieur Chabot ? (suite) Monsieur Chabot vous dit qu’il a perdu près de 14 kg dans la dernière année. « Il fallait que je me prenne en main, j’étais rendu obèse. J’ai réduit mes portions aux repas et je me suis mis au vélo de route. Je me suis payé un programme personnalisé en vélo avec un entraîneur. Je m’entraîne quatre ou cinq fois par semaine et je me sens beaucoup mieux maintenant. » 5. Sachant que le questionnaire général et la mesure des SV sont des moments privilégiés an d’encourager la personne à adopter de bonnes habitudes de vie, quelles autres questions pourriez-vous poser à monsieur Chabot an d’évaluer celles-ci et déterminer si de l’enseignement serait pertinent dans son cas ? 208 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Dans quel ordre devez-vous mesurer les SV d’un nourrisson ? Justiez votre réponse. 2. Quelle est l’erreur la plus fréquente au moment de la mesure de la PA chez les nourrissons et les enfants ? Expliquez comment l’éviter. 3. Si vous deviez mesurer la pression artérielle d’un bébé, quel serait le moment idéal pour vous assurer d’obtenir le résultat le plus able possible ? 4. Dans le cas d’une personne âgée, l’IMC est-il able ? Expliquez votre réponse. 5. Chez une personne âgée, la température est-elle aussi able que chez l’adulte plus jeune ? Expliquez votre réponse. 9 Chapitre 9 Questionnaire général, mesure des signes vitaux 209 Dossier : Mikael Pinsonneault Mikael Pinsonneault, âgé de 16 ans, se présente à la clinique sans rendez-vous du groupe de médecine de famille en raison d’une douleur à un genou. Il se présente à votre bureau en sautillant sur sa jambe gauche. Vous remarquez qu’il porte un bandage élastique au genou droit, sous lequel est placé un sac de glace. Vous amorcez l’entrevue en lui demandant ce qui est arrivé à son genou. Mikael vous mentionne qu’il joue comme demi-défensif pour l’équipe de football de son école secondaire. Lors d’un match hier soir, il a plaqué le porteur de ballon de l’équipe adverse avec l’aide d’un de ses coéquipiers. Il est alors tombé, avec les deux autres joueurs, et ses crampons sont demeurés ancrés dans le sol ; les deux joueurs sont tombés par-dessus lui. Il a senti sa jambe se plier latéralement au niveau du genou. Mikael a alors ressenti une importante douleur sous forme de brûlure au genou droit. Il a dû arrêter de jouer et mettre de la glace. La douleur était moins vive hier que ce matin. Il vous mentionne qu’il ressent plus de raideur en ce moment ainsi qu’une sensation de brûlure. Il se dit déçu, car son équipe a gagné le match, et il devait jouer la nale vendredi soir prochain au stade de son école. Il vous dit : « Avec ma chance habituelle, je suis certain que je ne serai pas en état de jouer la nale. » 10 10.1 Anatomie et physiologie 10.1.1 Dénition du concept de douleur La douleur se dénit comme une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire actuel ou potentiel ou décrite en de tels termes (International Association for the Study of Pain [IASP], 1979). Cette dénition, reconnue de façon universelle, souligne la nature subjective et multidimensionnelle de ce phénomène. McCaffery (1979) a d’ailleurs indiqué que seule la personne qui expérimente la douleur est en mesure de la décrire. Outre les dimensions sensorielle et émotionnelle de la douleur, McGuire (1992) en a aussi précisé les composantes cognitive, comportementale et physiologique. Ces composantes sont d’ailleurs bien illustrées dans le modèle circulaire de la douleur de Marchand (2009), qui comporte une composante nociceptive, une composante sensoridiscriminative, une composante motivoaffective et une composante cognitivocomportementale FIGURE 10.1. La composante nociceptive renvoie à la nociception, à savoir l’activité de composantes nerveuses, qui sera discutée ultérieurement. La composante sensoridiscriminative constitue la perception de la personne quant aux caractéristiques de la douleur expérimentée, soit son intensité, sa localisation et sa qualité (sensation de douleur). La composante motivoaffective représente les émotions négatives liées à la douleur telles que l’anxiété et la peur. Cette composante est souvent associée à l’aspect désagréable de la douleur. L’interprétation ou la signication que la personne attribue à son expérience de douleur ainsi que les comportements et les stratégies qu’elle utilise pour exprimer, éviter ou maîtriser la douleur renvoient à la dimension cognitivocomportementale. La douleur constitue ainsi un phénomène complexe à évaluer et à traiter. Une telle dénition présente une limite importante. En effet, en reconnaissant que la douleur est essentiellement subjective, son autoévaluation constitue la seule méthode de mesure valide. Et pourtant, celle-ci n’est pas réalisable pour toutes les personnes. Plusieurs clientèles, comme les nourrissons, les personnes inconscientes et les personnes vieillissantes atteintes de décits cognitifs majeurs, ne peuvent exprimer verbalement leur douleur. Des experts (Anand et Craig, 1996) se sont penchés sur cette problématique et ont proposé une FIGURE 10.1 Modèle circulaire de la douleur Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 211 Nociception : Activité de récepteurs et de bres nerveuses provoquée par une stimulation potentiellement dangereuse pour l’organisme. Q uestion de suivi Dans le cas de Mikael, relevez un indicateur comportemental de la douleur qu’il éprouve. dénition autre de la douleur pour les nourrissons, mais celle-ci s’applique aussi à toute clientèle incapable de communiquer verbalement. Ils mentionnent que les manifestations comportementales causées par la douleur doivent être considérées dans l’évaluation de celle-ci pour ces clientèles, et ce, au même titre que l’autoévaluation. L’utilisation d’indicateurs comportementaux (p. ex., les expressions faciales, les mouvements corporels) pour l’évaluation de la douleur est d’ailleurs reconnue et fortement recommandée auprès de ces clientèles vulnérables dans les lignes directrices de l’American Society for Pain Management Nursing (Herr, Coyne, Key et collab., 2006). FIGURE 10.2 Étapes du processus de la nociception Na+ : ions sodium ; K+ : ions potassium 212 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique 10.1.2 De la nociception à la douleur La nociception représente l’activité chimioélectrique de récepteurs et de bres nerveuses provoquée par un stimulus potentiellement dangereux pour l’organisme (Marchand, 2009). La nociception consiste en un processus purement physiologique. La douleur, quant à elle, constitue l’expérience consciente résultant de l’activité cérébrale impliquée dans la nociception (Charlton, 2005). Celle-ci comporte quatre étapes : 1) la transduction ; 2) la transmission ; 3) la perception ; 4) la modulation (Carr et Goudas, 1999 ; McCaffery et Pasero, 1999) FIGURE 10.2. Transduction Transmission La première phase, la transduction, est déclenchée lorsqu’un stimulus d’origine mécanique (p. ex., une incision chirurgicale, un trauma), thermique (p. ex., une engelure, une brûlure) ou chimique (impliquant des substances nocives ou toxiques) entraîne un dommage tissulaire dans l’organisme. Les tissus lésés libèrent alors différentes substances chimiques, appelées neurotransmetteurs, incluant la substance P, l’histamine, les prostaglandines, la sérotonine et la bradykinine. Ces neurotransmetteurs stimulent les récepteurs nociceptifs (ou nocicepteurs), des terminaisons nerveuses spécialisées qui permettent de détecter les stimulus nociceptifs, puis un potentiel d’action est créé an d’amorcer la transmission du message nociceptif. Les nocicepteurs se trouvent à différents endroits du corps, notamment dans la peau, les articulations, les tendons, les viscères et les muscles (Marchand, 2009). Le message nociceptif est alors transmis par des bres nerveuses de la périphérie jusqu’à la corne dorsale de la moelle épinière, puis de celle-ci jusqu’au cerveau. Cette seconde phase correspond à la transmission. Deux types de bres nerveuses afférentes servent à transmettre le message nociceptif de la périphérie jusqu’à la moelle épinière : les bres A-δ et les bres C FIGURE 10.3. Ces bres atteignent les cordons postérieurs de la corne dorsale de la moelle épinière dans la zone marginale de Lissauer. Les bres A- sont myélinisées et de diamètre intermédiaire. Elles permettent de transmettre rapidement le signal nociceptif de première douleur. Ce type de bres intervient dans la transmission de sensations de douleur aiguë bien localisée. Quant aux bres C, elles sont amyélinisées et de faible diamètre. Elles transmettent le signal nociceptif plus lentement, à savoir celui de seconde Q uestion de suivi Dans le cas de Mikael, quel type de stimulus a déclen­ ché la première étape du processus de nociception ? Fibre A- (A-delta) : Fibre myélinisée, de calibre intermédiaire, ayant un rôle important dans la localisation de la stimulation nociceptive. Fibre C: Petite bre amyélinisée responsable des afférences noci­ ceptives qui joue principalement un rôle dans la sensation de la douleur lente et diffuse. FIGURE 10.3 Trajet du message nociceptif Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 213 10 douleur. Ce type de bres est davantage impliqué dans la transmission de sensations de douleur diffuse, sourde et persistante. Q uestion de suivi Dans la situation de Mikael, quelles bres nerveuses ont été utilisées pour la transmission des inux nerveux ? An que le message nociceptif atteigne le cerveau, les bres nerveuses font synapse avec des interneurones localisés dans une région précise de la corne dorsale de la moelle épinière, appelée substance gélatineuse de Rolando. Celle-ci est divisée en plusieurs couches de cellules nerveuses et reçoit les messages nociceptifs provenant de différentes régions de l’organisme. Pour que les bres nerveuses fassent synapse, des neurotransmetteurs, dont la substance P, le glutamate et l’adénosine triphosphate, sont libérés. Cela permet au message nociceptif d’emprunter le faisceau spinothalamique ascendant jusqu’au cerveau. Perception de la douleur Le message nociceptif passe par le thalamus pour atteindre les régions corticales du cerveau où il est perçu comme une expérience de douleur. Cela correspond à la phase de perception, pendant laquelle la personne a conscience de la sensation douloureuse. Plusieurs structures corticales interviennent dans ce processus. Le système limbique et le cortex frontal sont associés à la dimension émotionnelle de la douleur (aspect désagréable), alors que le cortex somesthésique, situé dans le lobe pariétal, permet à la personne de décrire les caractéristiques de la douleur expérimentée (dimension sensorielle). Le cortex moteur, situé dans le lobe frontal, est impliqué dans l’expression des indicateurs comportementaux associés à la présence de douleur. D’autres structures du cortex cérébral interviennent dans l’interprétation de la douleur, notamment dans la dimension cognitive. Modulation Q uestion de suivi La douleur de Mikael est­ elle aiguë ou chronique ? Fibre A (A-bêta) : Fibre myélinisée à large diamètre responsable de la conduction des affé­ rences non nociceptives. 214 Partie 2 Enn, la modulation correspond au mécanisme de contrôle du message nociceptif. Heureusement, le corps possède des mécanismes qui lui permettent d’atténuer la douleur en inhibant son processus à différents endroits. L’information douloureuse ne circule pas de façon linéaire, mais est plutôt modulée à plusieurs niveaux du système nerveux central (SNC). Il est possible de classier les différents mécanismes endogènes de contrôle de la douleur selon trois niveaux du SNC. Il s’agit des mécanismes spinaux, qui créent une analgésie localisée, des contrôles inhibiteurs descendants, qui entraînent des effets diffus, et des mécanismes des centres supérieurs pouvant produire des effets locaux ou diffus selon les conditions. Les mécanismes spinaux sont associés à la théorie du portillon et reposent sur le fait que la stimulation de larges bres non nociceptives (bres A ), pendant un massage léger ou l’application d’une pression par exemple, permet le recrutement des interneurones inhibiteurs situés dans la corne dorsale de la Connaissances préalables à l’examen clinique moelle épinière. Ceux-ci atténuent l’activité des bres nociceptives (A-δ et C) et permettent ainsi de diminuer la sensation de douleur. Les contrôles inhibiteurs descendants – ou modulation conditionnée de la douleur – expliquent comment une stimulation douloureuse localisée peut entraîner une inhibition de la douleur diffuse. Ces mécanismes impliquent des structures du tronc cérébral, dont la substance grise périaqueducale et les noyaux du raphé, qui vont à leur tour envoyer des efférences inhibitrices dans la moelle. Des neurotransmetteurs, aussi appelés opioïdes endogènes (p. ex., les bêtaendorphines, les enképhalines, les dynorphines), sont alors libérés dans la moelle épinière. Ces neurotransmetteurs se xent aux récepteurs opioïdergiques localisés sur les fibres nociceptives, bloquant ainsi la libération de neurotransmetteurs excitateurs, dont la substance P. Cela ralentit ou inhibe le message nociceptif et produit un effet analgésique. Quant aux mécanismes des centres supérieurs, ils font référence aux diverses techniques cognitives telles que la relaxation et l’hypnose. Ces techniques inuent sur la perception de la douleur, entre autres en modiant l’activité cérébrale et en potentialisant la libération d’opioïdes endogènes, d’où leur effet analgésique. 10.1.3 Types de douleur La douleur est classiée en fonction de sa durée ou de son origine (Marchand, 2009 ; McCaffery et Pasero, 1999). Selon sa durée, la douleur sera aiguë ou chronique. Généralement, une douleur aiguë peut durer jusqu’à 30 jours, une période qui correspond au processus de guérison normal d’une blessure ou d’une chirurgie, par exemple. La douleur aiguë constitue un mécanisme d’autoprotection de l’organisme et envoie un signal d’alarme à la personne quant à un dommage tissulaire actuel ou potentiel. Une douleur aiguë non soulagée peut évoluer vers un syndrome de douleur chronique (Katz, Jackson, Kavanagh et collab., 1996). Quant à la douleur chronique, il en existe plusieurs dénitions. Selon la Société canadienne de la douleur, la douleur devient chronique lorsqu’elle perdure au-delà d’une période de six mois (Jovey, Ennis, Gardner-Nix et collab., 2002). En d’autres termes, elle persiste au-delà de la période de guérison normale et peut être associée à un dommage permanent du système nerveux (central ou périphérique) ou encore à un processus anormal du SNC, comme une suractivation des mécanismes excitateurs ou une sous-activation des mécanismes inhibiteurs. Une douleur qui se situe entre la douleur aiguë et la douleur chronique est habituellement qualiée de douleur subaiguë (Marchand, 2009). La douleur chronique peut être catégorisée en douleur cancéreuse ou non cancéreuse. La douleur cancéreuse, découlant de la pathologie elle-même, est souvent induite par la compression d’un organe par la tumeur cancéreuse, par le développement de tissu nécrosant ou elle est associée aux traitements reçus. La douleur peut ainsi uctuer selon l’évolution de la maladie. La douleur non cancéreuse est généralement liée à des pathologies musculosquelettiques (p. ex., l’arthrite, une douleur lombaire), à des neuropathies ou à des troubles fonctionnels (p. ex., la bromyalgie, le syndrome du côlon irritable, la cystite interstitielle). En fonction de son origine, la douleur est classée en deux grandes catégories : nociceptive et neurogène. Le TABLEAU 10.1 présente un résumé de ces différents types de douleur. La douleur nociceptive, associée au processus de nociception, est d’origine somatique ou viscérale. La douleur somatique touche la peau, les muscles, les articulations et les os. Ce type de douleur peut être lié à un trauma, à une pression ou à une ischémie. Une incision cutanée, l’arthrite et une fracture osseuse sont des exemples de douleur somatique. Quant à la douleur viscérale, elle est associée aux différents organes internes (p. ex., l’estomac, le cœur, le foie, le pancréas, les intestins, les reins). Ce type de douleur peut provenir d’une blessure directe, de la présence d’une tumeur, d’une ischémie, d’une distension ou d’une contraction majeure de l’organe. La colique néphrétique, l’appendicite aiguë, un ulcère gastrique et une cholécystite sont des exemples de douleur viscérale. On la décrit souvent comme étant sourde, profonde, constrictive ou crampoïde. Alors que la douleur somatique demeure habituellement bien localisée, la douleur viscérale est plus TABLEAU 10.1 souvent diffuse et irradiante (d’où le concept de douleur irradiée). La douleur somatique profonde est souvent décrite comme étant une douleur persistante ou pulsatile, tandis que la douleur cutanée est une douleur supercielle, vive ou cuisante. Il arrive que les douleurs somatiques, comme les douleurs viscérales, s’accompagnent de nausées, de transpiration, de tachycardie et d’hypertension provoquées par la réponse du système nerveux autonome (SNA). Q uestion de suivi À partir des données dont vous disposez, diriez-vous que la douleur de Mikael est nociceptive ou neurogène ? Il est question de douleur irradiée, qui peut également être qualiée de douleur référée, lorsque la personne ressent celle-ci à un site différent de celui de sa blessure ou de sa maladie. Généralement, ce site référé est innervé par le même nerf spinal que le site de l’atteinte tissulaire, et le cerveau peut difcilement reconnaître le point d’origine de la douleur. Plusieurs structures conservent leur innervation embryonnaire. Par exemple, une personne atteinte d’une inammation de l’appendice, situé dans le quadrant inférieur droit de l’abdomen, peut avoir une douleur irradiée dans la région périombilicale. Il est ainsi utile de connaître les différents sites de douleur irradiée 21 . 21 10 Les sites fréquents de la douleur référée sont décrits dans le tableau 21.4 du chapitre 21, Abdomen. La douleur neurogène peut être d’origine centrale (moelle épinière, cerveau, nerfs crâniens) ou périphérique (nerfs périphériques). Différentes causes sont à l’origine de la douleur neurogène. Elle peut se produire à la suite d’une lésion résultant d’une blessure, d’une chirurgie ou elle est consécutive à une maladie. Des céphalées secondaires à un accident vasculaire cérébral, la paralysie de Bell, Description sommaire des types de douleur TYPE DE DOULEUR ÉTIOLOGIE DESCRIPTEURS DE DOULEUR PROBLÈMES ASSOCIÉS TRAITEMENTS SUGGÉRÉS Nociceptive (somatique ou viscérale) • Activité des nocicepteurs des tissus cutanés et musculosquelettiques profonds à la suite d’une stimulation causant des dommages tissulaires • Inammation • Somatique : supercielle ou profonde, bien localisée, nocturne • Viscérale : profonde, crampiforme, mal localisée (irradiée) • Somatique : douleur postopératoire, métastases osseuses, arthrite, blessures sportives, douleur lombaire (mécanique) • Viscérale : métastases au foie, cancer du pancréas • Traitement de la cause sous-jacente • Anti-inammatoires non stéroïdiens • Analgésiques opioïdes • Relaxants musculaires • Corticostéroïdes Neurogène • Lésion primaire ou dysfonction du système nerveux périphérique ou central • Constante : brûlure, décharge électrique, coup de couteau, allodynie, hyperalgésie • Neuropathies (diabètes, virus de l’immunodécience humaine (VIH)), zona postherpétique, névralgie du trijumeau, douleur lombaire neuropathique, syndrome de douleur régionale complexe • • • • • Cancéreuse • Inltration ou lésion • Blessure d’un nerf de provenance centrale ou périphérique • Selon la pathologie sous-jacente • Métastases osseuses • Neuropathie • Contrôle des symptômes à l’aide des traitements précédemment mentionnés Anticonvulsivants Antidépresseurs Anesthésiques locaux Analgésiques opioïdes Interventions techniques Source : Miller-Saultz, D. (2008). Identifying chronic pain: awareness important. The Nurse Practionner, 33 (9), 7. Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 215 Hypoesthésie : Diminution de la sensibilité de l’ensemble des fonctions sensorielles sous ses diverses formes. la sclérose en plaques, la neuropathie diabétique et les compressions nerveuses causées par une hernie discale sont des exemples de douleur neurogène. Elle se présente généralement sous forme de brûlure, de décharge électrique ou d’engourdissement et est habituellement localisée, mais parfois irradiante. La douleur neurogène peut également se produire à la suite d’un processus anormal de transmission du message nociceptif qui diffère du processus de nociception. Bien que le mécanisme exact demeure inconnu, il est proposé que la douleur neurogène périphérique soit le résultat de la production d’inux nerveux anormaux spontanés et répétitifs similaires à ceux qui surviennent au moment de convulsions. Melzack (1999) a proposé la théorie de la neuromatrice, soit la création d’une mémoire somatosensorielle dans le cerveau qui permettrait d’expliquer, entre autres, la douleur neurogène centrale telle que la douleur fantôme postamputation. Un bref questionnaire d’aide au diagnostic des douleurs neurogènes, appelé DN4, a été validé an de détecter rapidement la présence de ce type de douleur (Bouhassira, Attal, Alchaar et collab., 2005) TABLEAU 10.2. Le score obtenu Questionnaire DN4 TABLEAU 10.2 Répondez aux quatre questions suivantes en cochant une seule case pour chaque élément de réponse. INTERROGATOIRE DE LA PERSONNE Question 1 : La douleur présente-t-elle une ou plusieurs des caractéristiques suivantes ? oui non oui non 1. Brûlure 2. Sensation de froid douloureux pour ce questionnaire peut varier de 0 à 10 ; un résultat égal ou supérieur à 4 indique que le test est positif, donc que la personne souffre de douleur neurogène. Bien que ce questionnaire facilite la détection de ce type de douleur, le traitement de celle-ci demeure un dé clinique important. Particularités liées au développement Nourrissons et enfants Le nourrisson possède la même capacité que l’adulte à ressentir la douleur. Après 20 semaines de gestation, les bres nerveuses ascendantes, les neurotransmetteurs et le cortex cérébral sont déjà développés et fonctionnels, de sorte que le fœtus est en mesure de ressentir la douleur (Anand, 1993). Cependant, les neurotransmetteurs inhibiteurs (les opioïdes endogènes) sont produits en quantité insufsante jusqu’à ce que la gestation soit à terme. Ainsi, le nourrisson prématuré ressent plus la douleur, et son système nerveux ne peut adéquatement l’inhiber ; il est donc plus sensible aux stimulus douloureux que le bébé né à terme. L’enfant au stade préverbal est à risque élevé de sous-traitement de la douleur en raison des mythes et des croyances, entre autres celle qu’il ne garde pas de souvenir de la douleur. Dans les faits, la recherche indique qu’une douleur répétée et mal soulagée chez le nourrisson (p. ex., des ponctions veineuses) peut entraîner une hypersensibilité à la douleur plus tard dans la vie. Cette situation suggère l’administration d’analgésiques pendant les interventions douloureuses courantes (Knaepen, Patjin, van Kleef et collab., 2013 ; Morin, Marchand, Couturier et collab., 2014). 3. Décharges électriques Question 2 : La douleur est-elle associée dans la même région à un ou à plusieurs des symptômes suivants ? 4. Fourmillements 5. Picotements 6. Engourdissements 7. Démangeaisons EXAMEN DE LA PERSONNE Question 3 : La douleur est-elle localisée dans une région où l’examen la met en évidence ? oui non oui non 8. Hypoesthésie au toucher 9. Hypoesthésie à la piqûre Question 4 : La douleur est-elle provoquée ou augmentée par : 10. Frottement Source : Adapté de Bouhassira et collab. (2005) 216 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Adultes vieillissants Bien qu’elle soit une expérience commune chez les personnes âgées de 65 ans et plus, la douleur ne constitue pas un phénomène normal du vieillissement. En effet, la douleur signale la présence d’une blessure ou d’une pathologie. Malheureusement, des professionnels de la santé et des personnes âgées croient à tort que la douleur est normale au cours du vieillissement, ce qui mène à des traitements moins rigoureux. Les personnes âgées éprouvent également la crainte de devenir dépendantes au traitement, de devoir subir des procédures effractives ou d’être hospitalisées. Les pathologies comme l’arthrite, l’arthrose, l’ostéoporose, les maladies cardiovasculaires et vasculaires périphériques, le cancer, les neuropathies périphériques, l’angine et la constipation chronique constituent des sources courantes de douleur chez l’adulte vieillissant. Par ailleurs, des changements quant à la nociception seraient observés chez la personne vieillissante (Gibson et Farrell, 2004). À titre d’exemple, une diminution de la production de la substance P et de la densité des bres nociceptives modierait les processus de transduction et de transmission, alors qu’une réduction de l’efcacité de la réponse des opioïdes endogènes altérerait le processus de modulation. Ces changements permettraient d’expliquer les seuils de douleur plus élevés, la sensibilité diminuée à des stimulus nociceptifs de faible intensité et une réponse plus marquée à des stimulus nociceptifs plus intenses chez la personne vieillissante (Gibson et Helme, 2001). Ainsi, la présence de douleur que rapporte une personne âgée peut indiquer une pathologie plus grave que chez l’adulte plus jeune et devrait alerter les professionnels de la santé. un impact important sur la sensibilité des femmes à la douleur. En effet, ces dernières seraient deux ou trois fois plus à risque de souffrir de migraines pendant l’enfance et de six à neuf fois plus à risque d’être atteintes de bromyalgie (McNally, Matheson et Bakovsky, 2006). Les résultats du Human Genome Project mettraient en lumière l’existence de différences génétiques entre les deux sexes et que celles-ci permettraient d’expliquer les écarts quant à la perception de la douleur (Mogil, 2002). La maladie d’Alzheimer ne touche généralement pas le cortex somesthésique. La discrimination sensorielle est aussi préservée chez la personne aux prises avec un décit cognitif (Vreeling, Houx, Jolles et collab., 1995). Cependant, le système limbique serait perturbé chez la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, et des chercheurs se penchent actuellement sur la façon dont ces personnes interprètent et décrivent les messages douloureux (Jensen-Dahm, Werner, Dahl et collab., 2014 ; Horgas, Elliott et Marsiske, 2009 ; Cole, Gavrilescu, Johnston et collab., 2011). Comme il est difcile d’évaluer ce que ressentent ces personnes à l’égard de la douleur, il importe de considérer leurs comportements comme des indicateurs de la présence de celle-ci. Les professionnels de la santé doivent éviter de stéréotyper les réactions à la douleur en les associant à la culture 3 . Chaque personne est différente et a une façon personnelle d’exprimer la douleur et d’y réagir. Différences selon le sexe Les différences liées au sexe sont inuencées par les attentes sociales, les hormones et le bagage génétique. De manière traditionnelle, les hommes ont tendance à demeurer stoïques devant la douleur, alors que les femmes expriment plus leurs émotions. Les changements hormonaux auraient Particularités culturelles et génétiques Certains travaux de recherche portant sur les différences ethniques et la douleur ont révélé des variations dans le soulagement de celle-ci. Il a été montré que les personnes noires et les Hispaniques se voient prescrire et administrer moins de traitements analgésiques que les personnes blanches (Ezenwa, Ameringer, Ward et collab., 2006). 3 Les particularités intercultu­ relles sont présentées en détail dans le chapitre 3, Entrevue. L’expérience de la douleur comporte plus de facettes que la seule souffrance physique. La douleur et l’expression de la douleur sont inuencées par des questions d’ordre social, culturel, émotionnel et spirituel. Le praticien compétent sur le plan culturel intègre un aspect de l’évaluation culturelle dans son évaluation de la douleur pour dresser un portrait plus complet de l’expérience personnelle de cette douleur (Bhui et Dinos, 2008 ; Narayan, 2010 ; Spencer et Burke, 2011). 10.2 Données subjectives 10.2.1 Histoire de santé Le fait de recueillir les données subjectives permet de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces éléments d’information sont ensuite combinés aux données objectives provenant de l’examen physique et des examens paracliniques. L’ensemble des données sert à poser un jugement clinique sur l’état de santé du client et à formuler un constat d’évaluation. An de reconstituer l’histoire de santé, l’inrmière peut utiliser l’outil mnémotechnique AMPLE. Lorsque le client présente des symptômes particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue ceux-ci à l’aide de l’outil PQRSTU 4 . Comme la douleur se dénit d’abord comme un concept subjectif, l’autoévaluation de la personne souffrante constitue la méthode la plus valide de la mesurer. Il faut la privilégier et obtenir la collaboration de la personne, autant que possible. Les autres méthodes d’évaluation (p. ex., les indicateurs comportementaux) peuvent être utiles, mais elles ne doivent pas prévaloir sur l’autoévaluation. Une évaluation initiale (ou globale, suivant l’acronyme PQRSTU) de la douleur doit être faite pour toute personne qui se présente en consultation et au moment de son admission dans un établissement, à l’apparition d’une douleur non liée au site de la maladie ou de la chirurgie ou à la Chapitre 10 4 Les outils mnémotechni­ ques AMPLE et PQRSTU sont présentés dans le chapitre 4, Regard global sur l’histoire de santé. Évaluation de la douleur : autre signe vital 217 10 Q uestion de suivi Effectuez l’évaluation de la douleur de Mikael à l’aide de l’acronyme PQRSTU et des données de la situation. manifestation d’une douleur inattendue et importante. L’évaluation de la douleur se fait également chaque fois que les signes vitaux sont vériés. Une fois l’évaluation initiale complétée, un suivi de l’intensité de la douleur est assuré à l’aide d’échelles validées auprès de la clientèle cible. Séquence d’évaluation QUESTIONS JUSTIFICATIONS Douleur Aide-mémoire : PQRSTU P Provoquer Qu’est-ce qui a provoqué votre douleur ? Que faisiez-vous lorsque votre douleur est apparue ? Qu’est-ce qui aggrave votre douleur ? Permet d’établir la cause de la douleur ainsi que les facteurs aggravants et palliatifs. Pallier Qu’est-ce qui aide à soulager (ou à diminuer) votre douleur ? Permet d’évaluer l’efcacité de l’intervention effectuée (p. ex., l’administration d’un analgésique). Q Qualité Décrivez votre douleur. Que ressentez-vous ? Exemples : élancement, brûlure, crampe, pression, coup de couteau, engourdissement, etc. La description de la sensation de douleur aide à différencier la douleur nociceptive de la douleur neurogène. La douleur nociceptive d’origine somatique se présente généralement sous forme d’élancement, alors que celle d’origine viscérale est généralement sourde ou crampiforme. Quant à la douleur neurogène, elle peut être décrite sous forme de brûlure, d’engourdissement ou de décharge électrique. Quantité À combien évaluez-vous votre douleur sur une échelle de 0 (aucune douleur) à 10 (pire douleur imaginable) ? Note : bien qu’il soit préférable de faire l’utilisation standardisée d’un seul type d’échelle dans un même établissement, il peut parfois être nécessaire de recourir à d’autres types d’échelles selon les capacités cognitives de la personne. Permet de déterminer la gravité ou l’intensité de la douleur. R Région À quel endroit ressentez-vous de la douleur ? Permet de distinguer une douleur localisée d’une douleur irradiée. Irradiation Ressentez-vous une douleur ailleurs ? Montrez la ou les régions douloureuses avec votre doigt FIGURE 10.4. FIGURE 10.4 Localisation de la douleur 218 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique QUESTIONS JUSTIFICATIONS S Symptômes et signes associés/sévérité Ressentez-vous d’autres malaises en plus de cette douleur ? Prendre les signes vitaux et observer la personne pour documenter les signes associés (p. ex., l’expression faciale, la position du corps). À noter que les signes vitaux présentent des limites importantes dans le cadre de l’évaluation de la douleur ; celles-ci sont discutées plus loin dans le chapitre. Permet de découvrir d’autres signes et symptômes accompagnant la douleur et d’obtenir de l’information additionnelle sur la gravité de la situation. T Temps Depuis quand éprouvez-vous de la douleur ? Durée Votre douleur est-elle constante ou intermittente ? Si elle est intermittente, à quel(s) moment(s) de la journée la ressentez-vous ? U (Understanding) Compréhension et signication pour Permet de décrire le moment d’apparition et la durée de la douleur. La douleur aiguë est présente en cours de guérison et ne dure généralement pas plus de trois mois, alors que la douleur chronique persiste au-delà de cette période. • De quel problème croyez-vous qu’il s’agit ? Une personne qui a vécu une expérience similaire dans le passé ou qui souffre d’un problème de santé chronique se connaît très bien. • Que signifie cette douleur pour vous ? Pourquoi pensez-vous avoir de la douleur ? Permet de déceler des mythes et des croyances associés à la douleur. • Quel est l’effet de la douleur sur votre fonctionnement au quotidien et sur votre famille ? Permet de vérier l’effet qu’a la douleur sur le degré de fonctionnement de la personne et sur sa qualité de vie. • Comment réagissez-vous habituellement lorsque vous avez de la douleur ? Comment vos proches savent-ils que vous éprouvez de la douleur ? Quelles stratégies (ou méthodes) utilisez-vous pour soulager votre douleur ? Les comportements associés à la douleur varient d’une personne à l’autre, plus particulièrement dans le cas des syndromes de douleur chronique. Cette information aide à la détection et à l’évaluation de la douleur. Il est également pertinent de connaître les méthodes utilisées par la personne pour gérer sa douleur an de les intégrer au plan de traitement. le client 10.2.2 Outils d’évaluation de la douleur En plus d’être subjective, la douleur est une expérience multidimensionnelle, comprenant des dimensions physique, affective et fonctionnelle. Plusieurs outils ont été mis au point pour soutenir l’autoévaluation de la personne. Certains de ces outils sont unidimensionnels et mesurent spéciquement l’intensité de la douleur, alors que d’autres permettent d’en évaluer plusieurs dimensions. Le choix de l’outil à utiliser dépendra de plusieurs facteurs, dont le but recherché, le temps disponible et surtout la capacité de la personne à l’utiliser ou à le remplir (questionnaire). Chaque personne devrait 10 recevoir l’enseignement approprié quant à l’échelle utilisée. Les caractères de l’échelle devraient être adaptés pour les clients ayant une vision altérée. L’outil devrait être disponible dans leur langue d’origine. Une traduction de l’échelle peut s’avérer nécessaire et doit être validée avant son utilisation. Plusieurs milieux cliniques ont conçu des questionnaires inspirés de la méthode PQRSTU pour documenter et assurer le suivi de l’évaluation de la douleur. D’autres questionnaires d’évaluation de la douleur ont été élaborés et validés auprès de clientèles variées, tels que le Brief Pain Inventory (BPI) (Daut et Cleeland, 1982) et le Short-Form McGill Pain Questionnaire (SF-MPQ) (Melzack, 1987). Dans le BPI, l’infirmière demande à la Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 219 personne d’évaluer sa douleur au cours des 24 dernières heures en utilisant une échelle de 0 (aucune douleur) à 10 (pire douleur imaginable) en regard de son effet sur l’humeur, la capacité à se mobiliser et à dormir FIGURE 10.5. Dans le SF-MPQ, la personne doit évaluer l’aspect sensoriel de sa douleur, soit l’intensité et la qualité, ainsi que l’aspect affectif de son expérience de douleur FIGURE 10.6. Ces deux questionnaires sont offerts en français (Poundja, Fikretoglu, Guay et collab., 2007). Différents types d’échelles d’intensité de douleur sont disponibles (Agency for Health Care Policy and Research [AHCPR], 1992). Ces échelles permettent d’assurer un suivi quant à l’intensité de la douleur, de noter les changements et d’évaluer l’efcacité des interventions choisies pour son soulagement. Par exemple, la personne utilisant l’échelle numérique indiquera un chiffre de 0 (aucune douleur) à 10 (pire douleur imaginable) pour indiquer son degré de douleur. Un tel type d’échelle (de 0 à 10) peut être laissé au chevet de la personne, accessible sous la forme d’un outil portatif, ou être utilisé verbalement par l’inrmière. La plupart de ces échelles sont offertes en format horizontal et vertical FIGURE 10.7. FIGURE 10.5 Questionnaire concis sur les douleurs (Brief Pain Inventory [BPI]) (format réduit) Source : © 1991, Charles S. Cleeland, PhD, Pain Research Group. Tous droits réservés. 220 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Le thermomètre d’intensité de douleur constitue une échelle récente qui a été validée auprès d’une clientèle adulte et âgée en phase postopératoire (Gélinas, 2007). Il possède des qualités psychométriques (délité et validité) satisfaisantes et a été évalué positivement par les personnes l’ayant utilisé. Différents milieux cliniques du Québec ont recours à cette échelle. Il faut demeurer prudent quant à l’interprétation des scores numériques (de 0 à 10) d’intensité de la douleur. À titre d’exemple, les auteurs du BPI (Daut, Cleeland et Flanery, 1983) proposent la catégorisation suivante, largement utilisée dans les milieux cliniques : douleur légère (1 à 3), modérée (4 à 6) et importante (7 à 10). D’autres études ont mené à des catégorisations différentes. En effet, des chercheurs en oncologie s’étant intéressés à la catégorisation de l’intensité de la douleur à partir de l’échelle numérique ont obtenu des résultats différents. Serlin, Mendoza, Nakamura et leurs collaborateurs (1995) ont déni la douleur légère comme étant de 1 à 4, modérée de 5 ou 6 et importante de 7 à 10, alors que d’autres chercheurs ont obtenu qu’une douleur légère correspond à des scores de 1 à 4, modérée de 5 à 7 et importante de 8 à 10 (Paul, Zelman, Smith et collab., 2005). Une constatation s’ensuit : il est très difcile d’interpréter les scores d’intensité de douleur fournis par l’échelle numérique (Hodgins, 2002). L’utilisation d’échelles numériques de douleur pose ainsi tout un dé aux personnes qui doivent mesurer leur expérience subjective de douleur. Des experts suggèrent même qu’aucun standard absolu ne soit établi quant à l’interprétation des scores. Lorsque l’évaluation de la douleur est effectuée à plusieurs reprises auprès d’une personne, il est recommandé d’utiliser le même outil d’évaluation an de favoriser une meilleure compréhension pour cette personne et de permettre des comparaisons entre les différents temps de mesure. Particularités liées au développement Nourrissons et enfants 10 Les nourrissons et les enfants au stade préverbal ne peuvent fournir leur autoévaluation de la douleur. Malgré cette réalité, il est important de se rappeler qu’ils peuvent ressentir la douleur et que l’inrmière peut la détecter par l’observation d’indices comportementaux et physiologiques. Une description détaillée de ces indicateurs est fournie plus loin dans la section des données objectives. Bien qu’à l’âge de deux ans certains enfants soient capables de rapporter la présence de douleur et d’en montrer le site, ils ont plus de difculté à en évaluer le degré (intensité). Il peut alors être utile de demander au parent le type de mot(s) utilisé par l’enfant pour signier la présence de douleur (p. ex., bobo, « ouch »). Attention, certains enfants peuvent se montrer braves et nier la présence de douleur devant un étranger ou par crainte de recevoir une injection. Les échelles d’intensité de douleur peuvent être utilisées chez l’enfant vers l’âge de quatre ans (Di Maggio, 2002). Une version révisée d’une échelle présentant des visages neutres et plus représentatifs de l’intensité de la douleur a été conçue et validée auprès de la clientèle pédiatrique (Hicks, von Baeyer, Spafford et collab., 2001). Cette échelle évite l’utilisation du sourire et des larmes an que l’enfant ne confonde pas l’intensité de la douleur à d’autres émotions comme la joie ou la tristesse. Elle utilise six visages présentant différentes intensités de douleur, allant de « pas mal du tout » à « très très mal ». Cette échelle peut également être convertie en échelle numérique de 0 à 10, mais les chiffres ne sont pas montrés aux enfants. L’inrmière s’adresse ainsi à l’enfant : « Ces visages montrent combien on peut avoir mal. Ce visage montre quelqu’un qui n’a pas mal du tout. Ces visages montrent quelqu’un qui a de plus en plus mal, jusqu’à celui-ci, qui montre quelqu’un qui a très très mal. Indique-moi le visage qui montre combien tu as mal en ce moment. » Les scores sont, de gauche à droite, 0, 2, 4, 6, 8, 10. Le score 0 correspond donc à « pas mal du tout » et le FIGURE 10.6 Questionnaire McGill sur la douleur (Short-Form McGill Pain Questionnaire) (SF-MPQ) : version courte Source : © R. Melzack (1987) score 10 correspond à « très très mal ». Il faut exprimer clairement les limites extrêmes : « pas mal du tout » et « très très mal ». Les mots « triste » ou « heureux » ne doivent pas être utilisés. L’inrmière précise bien qu’il s’agit de la sensation intérieure, et non de l’aspect afché du visage. Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 221 Adultes vieillissants De façon générale, les personnes âgées peuvent éprouver de la difculté à utiliser une échelle numérique de douleur, et ce, particulièrement si celle-ci uctue dans le temps. Quel que soit le FIGURE 10.7 Échelles d’intensité de douleur – A Échelle numérique B Échelle descriptive visuelle analogique D Thermomètre d’intensité de douleur C Échelle type d’échelle envisagé, il est recommandé d’utiliser un format vertical plutôt qu’horizontal chez la clientèle âgée. En effet, le format vertical rappelle le thermomètre, qui représente un concept connu chez ces personnes, et il facilite ainsi son interprétation (Herr et Mobily, 1991). L’utilisation de termes simples tels que absence de douleur, douleur légère, douleur modérée et douleur importante peut aussi être facilitante. Alors que l’utilisation des échelles numérique et descriptive d’intensité de douleur FIGURE 10.7A et B est recommandée auprès de la clientèle âgée n’ayant pas de décit cognitif (Aubin, Giguère, Hadjistavropoulos et collab., 2007 ; Hadjistavropoulos, Herr, Turk et collab., 2007), d’autres études ont montré que cette clientèle préfère l’échelle des visages aux autres types d’échelles (Carey, Turpin, Smith et collab., 1997 ; Gélinas, 2007 ; Stuppy, 1998). Quant aux personnes âgées atteintes d’un décit cognitif, plusieurs d’entre elles (dont certaines aux prises avec un décit cognitif important) sont capables d’utiliser une échelle d’intensité de douleur (Aubin et collab., 2007 ; Bjoro et Herr, 2008 ; Hadjistavropoulos et collab., 2007). La majorité des échelles (numérique, descriptive, visages) ont montré une délité et une validité acceptables auprès de la clientèle âgée atteinte de décit cognitif. Cependant, l’EVA FIGURE 10.7C est la plus difcile à utiliser pour cette clientèle, et elle afche le plus haut taux d’échec comparativement aux autres types d’échelles (Aubin et collab., 2007 ; Hadjistavropoulos et collab., 2007 ; Herr, Spratt, Garabd et collab., 2007 ; Wynne, Ling et Remsbourg, 2000). Il demeure essentiel de s’assurer de la préférence de la personne quant au type d’échelle à utiliser, de faire l’enseignement approprié et de conserver la même échelle pour un même client. Source : © Gélinas (2007) 10.3 Données objectives Schéma séquentiel résumant les étapes de l’examen clinique. Q uestion de suivi Dans le cas de Mikael, quelle évaluation allez-vous effectuer en plus de celle de la douleur ? 222 Partie 2 10.3.1 Préambule L’examen physique peut aider à comprendre la problématique de douleur aiguë ou chronique que présente une personne. Cependant, il est important de se rappeler que les résultats obtenus à cet examen ne correspondent pas nécessairement aux plaintes de la personne, particulièrement dans le cas de pathologies de douleur chronique. La présence de douleur doit être considérée même en l’absence de signes physiques. Le professionnel de la santé doit toujours tenir compte de l’autoévaluation de la personne et prendre les mesures Connaissances préalables à l’examen clinique nécessaires an de diminuer sa douleur à l’aide d’interventions appropriées à sa condition. Selon l’American Pain Society (APS) (1992), l’établissement d’un diagnostic en présence d’une douleur aiguë est primordial, mais un traitement visant à diminuer celle-ci devrait être mis en œuvre dès que possible. En effet, une personne ayant atteint un seuil de confort acceptable coopère plus facilement aux procédures diagnostiques et thérapeutiques. Matériel nécessaire • Ruban à mesurer • Abaisse-langue 10.3.2 Examen physique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES ARTICULATIONS Évaluer la taille et le contour de l’articulation. Mesurer la circonférence de l’articulation atteinte et la comparer avec l’articulation saine. Vérier les mouvements actifs et passifs. Normalement, la mobilisation de l’articulation ne devrait pas causer de sensibilité, de douleur ou de crépitements 22 . • Œdème, inammation, blessure, déformation, diminu tion de l’amplitude du mouve ment, douleur augmentée à la palpation. • Les crépitements sont des bruits de craquements audibles pendant les mouvements. 22 Le chapitre 22, Système musculosquelettique, décrit les mouvements articulatoires. PEAU ET MUSCLES Observer la peau et noter sa coloration, la présence d’œdème, de masse(s) ou de déformation. Contusions, lésions, blessures ouvertes, dommage tissulaire, atrophie, protubérance, changement dans la distribution des poils. An d’évaluer les changements quant à la sensation, demander à la personne de fermer ses yeux. Évaluer sa capacité à percevoir les sensations en utilisant un abaisse-langue ayant une extrémité pointue et l’autre arrondie. Appuyer légèrement chacune des extrémités de l’abaisse-langue sur la peau de la personne et lui demander d’indiquer si l’extrémité est pointue ou arrondie 23 . Ce test peut aider à déterminer la localisation et l’étendue de l’altération de sensation. Absence de sensation à la douleur (analgésie), augmentation de la sensation de douleur (hyperalgésie) ou présence d’une douleur intense à l’application d’un stimulus non douloureux (allodynie). 10 23 Dans le chapitre 23, Système neurologique, la gure 23.23 montre comment procéder à l’évaluation de la douleur chez une personne. ABDOMEN Observer la symétrie et le contour de l’abdomen. Palper l’abdomen et observer la présence de résistance involontaire 21 . Noter tout site douloureux (localisé ou irradié). 10.3.3 Indicateurs comportementaux de la douleur Lorsque l’autoévaluation s’avère impossible à obtenir, le recours à l’observation d’indicateurs comportementaux est fortement recommandé (Anand et Craig, 1996 ; Herr et collab., 2006). Il est important de savoir que les réactions consécutives à la douleur varient d’une personne à l’autre. En effet, les comportements associés à la douleur peuvent être inuencés par différents facteurs tels que la nature de la douleur (aiguë ou chronique), l’âge de la personne, le sexe et la culture. Indicateurs comportementaux de la douleur aiguë La douleur aiguë agit comme un signal d’alarme et a une fonction de protection pour l’organisme. Elle peut être accompagnée de comportements tels que les expressions faciales (p. ex., un front plissé, une grimace), les mouvements de protection (p. ex., 21 Œdème, protubérance, hernie, inammation, hypertrophie d’un organe. Le tableau 21.4 du cha­ pitre 21, Abdomen, décrit les sites fréquents de la douleur référée. toucher ou frotter le site de douleur), l’agitation, la rigidité musculaire ou l’émission de sons (p. ex., des gémissements, des cris). À noter que certaines personnes peuvent ne pas manifester de comportements particuliers en présence de douleur. Bien que ces comportements puissent aider à détecter celle-ci, leur absence n’indique pas nécessairement qu’il n’y a pas de douleur (Gélinas, Viens, Fortier et collab., 2005). Une grille d’observation comportementale de la douleur aiguë, appelée Critical Care Pain Observation Tool (CPOT), a été développée et validée auprès d’une clientèle adulte et âgée de soins intensifs ne pouvant s’exprimer verbalement (Gélinas, Fillion, Puntillo et collab., 2006 ; Gélinas et Johnston, 2007) TABLEAU 10.3. Les résultats de sa validation, en versions française et anglaise, ont montré que cet outil était pertinent pour détecter la présence de douleur au cours de procédures nociceptives et était positivement associé à l’autoévaluation des clients. Même s’il existe une Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 223 Critical-Care Pain Observation Tool (CPOT) TABLEAU 10.3 SCORE (DE 0 À 8) DESCRIPTION Expression faciale Détendue, neutre 0 • Aucune tension musculaire observable au visage Tendue 1 • • • • • Front plissé Sourcils abaissés Légers plis nasolabiaux Yeux serrés Ou tout autre changement de l’expression faciale (p. ex., ouvre soudainement les yeux, présente des larmes pendant la mobilisation) Grimace 2 • • • • Front plissé, sourcils abaissés, plis nasolabiaux Yeux serrés Bouche peut être ouverte Peut mordre le tube endotrachéal Absence de mouvements ou position normale 0 • Immobile, ne bouge pas (ne signie pas nécessairement une absence de douleur) • Position normale (mouvements non dirigés vers la douleur ou non réalisés dans le but de se protéger de la douleur) Mouvements de protection 1 • • • • • • Mouvements lents, prudents Touche ou frotte le site de douleur Se dirige vers le site de douleur, les tubes Touche à ses tubes Attire l’attention en tapant du pied ou des mains Décortication, décérébration Agitation 2 • • • • • • Tire sur ses tubes Essaie de s’asseoir dans son lit Bouge constamment Ne collabore pas Repousse le personnel Tente de passer les ridelles du lit Mouvements corporels Tension musculaire (évaluation par exion et extension passives des membres supérieurs au repos ou évaluation pendant la mobilisation) Détendue 0 • Absence de résistance aux mouvements, tonus normal Tendue, rigide ou crispée 1 • Résistance aux mouvements Très tendue, rigide ou crispée 2 • Difculté ou incapacité à réaliser les mouvements Serre les poings Interactions avec le respirateur (personne sous ventilation mécanique) Tolère la ventilation ou les mouvements 0 • Alarmes non actives, se laisse ventiler Tousse, mais tolère la ventilation 1 • Tousse, mais se laisse ventiler ; alarmes peuvent s’activer, mais cessent spontanément Combat la ventilation 2 • Asynchronie : bloque sa respiration, déclenche constamment les alarmes Émissions de sons (personne sans ventilation mécanique) S’exprime normalement ou demeure silencieuse 0 • S’exprime normalement ou demeure silencieuse Gémit, soupire 1 • Gémit, soupire Crie, pleure 2 • Crie, pleure Source : Traduit et adapté de Gélinas, Fillion, Puntillo et collab. (2006). Validation de Critical-Care Pain Observation Tool in adult patients. Am J Crit Care, 15 (4), 420-427. 224 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique relation entre l’intensité des comportements et l’autoévaluation du degré de douleur, il faut interpréter les scores de comportements avec prudence. Par exemple, un score de 6 sur 8 à l’aide du CPOT ne correspond pas nécessairement à un résultat de 7,5 sur 10 à l’aide d’une échelle numérique graduée de 0 à 10. De plus, il est important que l’inrmière connaisse les comportements de la personne lorsqu’elle est au repos et lorsqu’elle se trouve exposée à des procédures nociceptives ou douloureuses an de détecter tout changement de comportements pouvant indiquer la présence de douleur (Herr et collab., 2006). Des instructions concernant l’utilisation du CPOT sont données dans l’ENCADRÉ 10.1. Indicateurs physiologiques de la douleur aiguë La douleur aiguë représente une source de stress pouvant déclencher la réponse biologique qui y est associée (McCance et Huether, 2006). En présence de douleur aiguë, le système nerveux sympathique est généralement activé. La noradrénaline et l’adrénaline sont alors libérées, ce qui a pour effet d’agir sur les signes vitaux et de faire augmenter la pression artérielle, la fréquence cardiaque et la fréquence respiratoire. La diaphorèse et la dilatation pupillaire sont d’autres signes que l’inrmière peut observer au moment de l’activation du système nerveux sympathique. Lorsque la douleur persiste ou si elle se situe à la vessie ou aux intestins, par exemple, il est possible que le système nerveux parasympathique soit activé. Les valeurs des signes vitaux vont alors diminuer plutôt qu’augmenter. ENCADRÉ 10.1 Ainsi, l’absence de signes découlant de l’activation du système nerveux sympathique ne signie pas nécessairement la non-présence de douleur (Gélinas et collab., 2005). Par ailleurs, la validité de tels indicateurs relativement à la douleur n’a pas été établie chez la clientèle adulte, d’où l’incitation à la prudence quant à leur utilisation dans un contexte d’évaluation de la douleur (Tousignant-Laamme, Rainville, et Marchand, 2005). Les experts soutiennent que les indicateurs physiologiques, soit les signes vitaux, devraient être considérés uniquement à titre d’indices de douleur aiguë puisque de nombreux autres facteurs peuvent les inuencer (Herr et collab., 2006). Indicateurs comportementaux de la douleur chronique Les personnes atteintes de douleur chronique peuvent vivre avec ce problème pendant des mois, des années, voire toute leur vie. Dans un contexte de douleur chronique, la personne développe des mécanismes d’adaptation, ce qui fait en sorte que les comportements de douleur aiguë décrits précédemment font place à d’autres types de manifestations. Parmi celles-ci gurent la fatigue, les troubles du sommeil, l’anxiété, les changements d’humeur, la dépression, les troubles de l’appétit, une mobilisation restreinte, une limitation dans les activités de la vie quotidienne, des difcultés de couple, une diminution des contacts sociaux et des loisirs (Gélinas et Bourgault, 2007). Ces modications de comportement doivent être détectées, car elles peuvent nuire à l’autonomie et à la qualité de vie. 10 Instructions concernant l’utilisation du Critical-Care Pain Observation Tool (CPOT) 1. Observer la personne au repos pendant une minute an d’obtenir une valeur de référence sur le CPOT. 2. Observer ensuite la personne au cours de procédures nociceptives ou douloureuses (p. ex., la mobilisation, un changement de pansement) an de détecter tout changement de comportement pouvant indiquer la présence de douleur. 3. Observer la personne à la suite de l’administration d’un agent analgésique (avant son administration et au pic d’action) an d’évaluer l’efcacité du traitement pour le soulagement de la douleur. 4. Attribuer à la personne le score le plus élevé observé sur le CPOT pendant la période d’observation. À titre d’exemple, pour l’expression faciale, une personne qui grimace seulement quelques secondes durant la période d’observation se verra attribuer le score de 2 pour cet indicateur. 5. Attribuer un score à la personne pour chacun des indicateurs de la grille. Au cours de l’évaluation au repos, évaluer la tension musculaire en dernier lieu, car la simple stimulation des mouvements passifs (exion et extension du membre supérieur) peut déclencher des réactions. Cependant, à l’évaluation de la personne pendant la mobilisation, l’inrmière participant à la manœuvre peut facilement détecter la tension musculaire lorsqu’elle tourne la personne sur le côté et lui attribuer le score approprié. Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 225 Particularités liées au développement Nourrissons et enfants Antalgique : Propre à diminuer la douleur. Figure 10.1W, EVENDOL Encadré 10.1W, Instructions concernant l’utilisation de l’EVENDOL. L’échelle EVENDOL est pré­ sentée au www.pediadol.org. De nombreux outils efcaces de l’évaluation de la douleur chez l’enfant s’y retrouvent également. 30 Dans le chapitre 30, Évaluation fonctionnelle de la personne âgée, le tableau 30.4 présente une codication de l’Échelle comportemen­ tale de la douleur de la personne âgée. Tableau 10.1W, Face Legs Activity Cry Consolability (FLACC) 226 Partie 2 La recherche portant sur la douleur chez les nourrissons a surtout été orientée vers la douleur aiguë au cours de procédures nociceptives. Plus de 35 instruments d’évaluation de la douleur chez le nourrisson, la majorité de nature multidimensionnelle (indicateurs comportementaux et physiologiques), ont été relevés dans la littérature (Duhn et Medves, 2004). Bien que la mise au point d’instruments multidimensionnels soit répandue dans le cadre de l’évaluation de la douleur chez le nourrisson, les signes physiologiques ne peuvent être utilisés de façon exclusive pour conclure à la présence ou à l’absence de douleur puisqu’ils peuvent être inuencés par d’autres facteurs tels que le stress, certains médicaments et des changements de l’équilibre hydrique (Herr et collab., 2006). Ainsi, les variations dans les signes physiologiques doivent constituer des signaux d’alarme pour mener à une évaluation plus approfondie de la douleur (Foster, 2001). Parmi les indicateurs comportementaux de la douleur, les changements de l’expression faciale (p. ex., un froncement des sourcils, des yeux fermés serrés, la présence du sillon nasolabial) constituent les indices les plus ables et révélateurs de la présence de douleur (Stevens, McGrath, Gibbins et collab., 2007). Le type de pleurs, des changements dans le tempérament et le niveau d’activité du nourrisson sont d’autres indices pouvant indiquer la présence de douleur. Le Premature Infant Pain Profile (PIPP) (Stevens, Johnson, Petryshen et collab., 1996) est un instrument d’évaluation de la douleur dont les qualités psychométriques ont été les plus documentées auprès des nourrissons prématurés et à terme (Duhn et Medves, 2004). Le PIPP comprend des indicateurs comportementaux et physiologiques. L’inrmière documente d’abord les valeurs de base de la fréquence cardiaque et de la saturation en oxygène du nourrisson ; elle observe celuici pendant les 30 secondes suivant la procédure douloureuse. Elle attribue ensuite un score correspondant aux changements physiologiques et à l’expression du visage de l’enfant. Le Face Legs Activity Cry Consolability (FLACC) (Merkel, Voepel-Lewis, Shayevitz, et collab., 1997 ; Nilsson, Finnström et Kokinsky, 2008) est une échelle reconnue internationalement et validée pour mesurer la douleur postopératoire chez l’enfant âgé de 2 mois à 7 ans et la douleur associée aux soins chez les enfants de 5 à 16 ans. Le FLACC inclut cinq éléments comportementaux simples concernant le visage, les jambes, l’activité, les cris et la consolabilité, dont le score total varie de 0 à 10 . Les auteurs de cette échelle n’ont pas Connaissances préalables à l’examen clinique déni de seuil de prescription (celui où un analgésique est recommandé), mais le seuil de 3/10 utilisé pour les échelles de 0 à 10 est généralement appliqué. L’EVENDOL, une récente échelle conçue et validée en français, est de plus en plus utilisée pour évaluer la douleur de l’enfant âgé de moins de sept ans aux urgences et dans les services de pédiatrie médicale ou chirurgicale francophones (FournierCharrière, Tourniaire, Carbajal et collab., 2012). Il s’agit d’une échelle composée de cinq éléments comportementaux simples qui permettent d’évaluer : 1) l’expression vocale ou verbale (pleurs, cris, gémissements) ; 2) la mimique de douleur (front plissé, sourcils froncés, bouche crispée) ; 3) les mouvements (agitation, raideur) ; 4) les positions (attitude inhabituelle ou antalgique, protection, immobilité) ; 5) la relation avec l’environnement (possibilité de consolation, intérêt pour les jeux, communication avec l’entourage) . Pour remplir cette échelle, deux temps d’observation sont nécessaires : en dehors de tout soin ou approche anxiogène et au cours de l’examen ou de la mobilisation de la zone présumée douloureuse. La cotation de ces éléments permet l’obtention d’un score variant de 0 à 15, où le seuil de prescription d’un analgésique est établi à 4/15 . Adultes vieillissants Plusieurs conditions associées à la douleur (p. ex., l’arthrose, l’ostéoporose, le cancer, l’angine) sont présentes chez les aînés. Il n’est donc pas surprenant de constater que plus de 50 % des personnes âgées résidant en milieu d’hébergement et en centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) ressentent de la douleur sur une base hebdomadaire, dont 25 % quotidiennement (Proctor et Hirdes, 2001). Cette douleur chronique se répercute sur le fonctionnement et sur la qualité de vie de ces personnes (p. ex., une dépression, l’isolement social, des troubles du sommeil, une perte d’autonomie) (American Geriatrics Society, 2002). Puisque près des deux tiers des personnes âgées résidant en CHSLD ont un diagnostic de démence, et que près de la moitié présente une perte d’autonomie fonctionnelle ou des décits cognitifs, la communication verbale devient difcile (Fox, Raina et Jadad, 1999). Cette réalité fait en sorte que l’évaluation de la douleur représente un dé clinique important. De plus, peu d’outils valides sont disponibles pour utilisation auprès des personnes âgées atteintes de démence ou de déficits cognitifs majeurs. Cela contribue, entre autres, à la sous-détection et au traitement inadéquat de la douleur chez cette clientèle 30 . Bien qu’il existe des instruments d’évaluation de la douleur, la plupart de nature comportementale, pour les aînés atteints de démence et incapables d’exprimer verbalement la douleur, leur processus de validation demeure incomplet. Une évaluation systématique des instruments disponibles a été réalisée (Aubin et collab., 2007). Un total de 24 instruments ont été analysés quant à leur abilité (test-retest, interjuges) et à leur validité (contenu, construit). Seulement six de ces instruments sont offerts en français. Les instruments recommandés par les experts et ayant présenté les résultats de validation les plus avancés sont le Pain Assessment Checklist for Seniors with Limited Ability to Communicate (PACSLAC) (Fuchs-Lacelle et Hadjistavropoulos, 2004), le Abbey Pain Scale (Abbey, Piller, De Bellis et collab., 2004) et le DOLOPLUS 2 (Wary et Serbouti, 2001). La version française du PACSLAC a été validée il y a quelques années (Aubin, Verreault, Savoie et collab., 2008) FIGURE 10.8. Cet instrument comprend quatre composantes (expressions faciales, activités et mouvements corporels, comportement/ personnalité/humeur, autres) pour un total de 60 énoncés. Des scores peuvent être calculés pour 10 FIGURE 10.8 Grille d’observation de la douleur pour les personnes âgées non communicantes (Pain Assessment Checklist for Seniors with Limited Ability to Communicate) (PACSLAC) Source : Aubin, Verreault, Savoie et collab. (2008) Les droits d’auteur du PACSLAC-F sont détenus par Sylvie LeMay, Maryse Savoie, Shannon Fuchs-Lacelle, Thomas Hadjistavropoulos et Michèle Aubin. Le PACSLAC-F est reproduit ici avec leur permission. Pour obtenir la permission d’utiliser le PACSLAC-F, veuillez joindre Michèle Aubin (michele.aubin@mfa.ulaval.ca) ou Thomas Hadjistavropoulos (thomas.hadjistavropoulos@uregina.ca). Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 227 chacune des composantes, et un score global peut aussi être obtenu. L’utilisation répétée et systématique du PACSLAC permet de déterminer les indicateurs propres à chaque personne et de reconnaître les épisodes d’exacerbation de la douleur. En effet, le PACSLAC permettrait de distinguer les situations de douleur, de détresse psychologique et de calme chez les sujets (Fuchs-Lacelle et collab., 2004). 10.4 Anomalies pour une pratique avancée L’ENCADRÉ 10.2 traite un trouble qui touche les nerfs périphériques. ENCADRÉ 10.2 Neuropathie périphérique La neuropathie périphérique est une atteinte des nerfs périphériques (des pieds ou des mains) provoquant de la douleur sans stimulation préalable des nerfs. Il s’agit d’une douleur neuropathique fréquente caractérisée par des engourdissements et des fourmillements, entremêlés de douleurs fulgurantes ou lancinantes non attribuables à une source nociceptive précise (Hannersla et Kapustin, 2012). La neuropathie diabétique est une complication fréquente du diabète, et elle peut être liée à une démyélinisation de gros nerfs périphériques, accompagnée d’une augmentation des petits nerfs myélinisés. L’atteinte ischémique des nerfs ou l’hyperglycémie sont d’autres étiologies qui entraînent des modications du microenvironnement des nerfs (Copstead et Banasik, 2013). Le client ressent une douleur cuisante dans les deux pieds, qui s’intensie souvent pendant la nuit. 10.4.1 La neuropathie périphérique induite par la chimiothérapie apparaît à la suite d’une chimiothérapie anticancéreuse. Les risques augmentent avec le nombre d’agents utilisés pendant la série de traitements, les doses cumulatives plus élevées d’agents neurotoxiques, la présence d’une neuropathie causée par le diabète ou d’autres causes, ainsi qu’avec l’âge (Davies, 2013 ; Hannersla et Kapustin, 2012). L’un des symptômes est un engourdissement ou une douleur fulgurante et cuisante dans les extrémités. Il faut noter que dans le cas de tout survivant du cancer, l’inrmière doit agir rapidement s’il y a une nouvelle apparition de la douleur pour écarter la possibilité d’une réci dive pathologique du cancer, car c’est ce que les survivants craignent le plus (Davies, 2013). Syndrome de douleur régionale complexe L’appellation de syndrome de douleur régionale complexe (SDRC) est utilisée pour décrire une variété de troubles caractérisés par une douleur disproportionnée en durée et en intensité par rapport à l’événement déclencheur. D’autres signes et symptômes tels que de l’œdème, de la sudation, de la rougeur ou une diminution de la fonction motrice du membre peuvent être observés. Ce syndrome touche davantage les personnes âgées entre 40 et 60 ans, et les femmes en sont plus fréquemment atteintes. Il existe deux types de SDRC (type I et type II) où la physiopathologie peut être diversiée (p. ex., une inammation, un dérèglement du système nerveux sympathique, une modication du SNC). Dans environ 90 % des cas, ce syndrome se caractérise par une douleur de type neurogène invalidante qui ne se limite pas à un dermatome et qui apparaît généralement à la suite d’un traumatisme physique mineur ou modéré (type I). Les autres cas seraient attribuables à une lésion nerveuse (type II) (Maihofner, Seifert et Markovic, 2010 ; Marinus, Moseley, Birklein, et collab., 2011). Ce syndrome peut occasionner de l’allodynie, c’est-à-dire qu’un stimulus non nociceptif tel que le simple efeurement d’un coton-tige ou le contact de la peau avec les vêtements déclenche une douleur. À l’examen physique, l’inrmière peut observer la présence d’œdème, une rougeur, des phlyctènes, une décoloration, un assèchement et une température froide de la peau, des ongles se cassant facilement et une atrophie musculaire. Le traitement n’est pas discuté en détail dans ce chapitre. Celui-ci inclut initialement la prise de médicaments pour diminuer les symptômes ; de la physiothérapie peut être ajoutée an de récupérer une certaine force musculaire des membres. Évaluation et jugement clinique Exemple de notes au dossier Données subjectives Indique que la douleur a débuté au cours des deux dernières semaines. Afrme que sa douleur est épigastrique et qu’elle est apparue environ 30 minutes après avoir mangé un repas riche 228 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique en gras saturés. Précise que la douleur prend la forme de coups de couteau et de serrement, et qu’elle irradie à l’épaule droite. Évalue son degré de douleur sur une échelle à 10/10. A également des nausées et précise avoir pris des antiacides, ce qui lui a procuré un soulagement minimal. Dit que la douleur diminue lorsque immobile et que les genoux sont pliés contre sa poitrine. Données objectives • Diaphorèse, faciès grimaçant et difculté à se concentrer. • Dyspnée pendant l’entrevue. • Bras maintenus sur la région supérieure de l’abdomen. Celui-ci est distendu et présente une sensibilité importante dans la région épigastrique et dans le quadrant supérieur gauche à la palpation légère. Bruits intestinaux hyperactifs dans les quatre quadrants abdominaux. Évaluation Événement épisodique de douleur aiguë. au genou droit. Douleur constante, intensité 10/10. Difficulté à marcher et à monter les escaliers. Ibuprofène 400 mg q.4 h et application de glace : aucun soulagement. Rapporte une indigestion avec vomissements et diarrhée une semaine avant l’apparition de sa douleur. Données objectives • Aide pour s’asseoir sur la table d’examen, aucune mise en charge sur sa jambe droite. Grimace et serre la mâchoire aux changements de position. • Sensibilité à la palpation des articulations des coudes, des poignets, des doigts et des genoux. Exemple d’évaluation ciblée Raoul M. est un homme d’origine africaine âgé de 20 ans aux prises avec un épisode aigu de drépanocytose (crise drépanocytaire). Il vient d’être admis à l’urgence d’un centre hospitalier. Données subjectives Douleur articulaire aux membres supérieurs et inférieurs qui augmente depuis 48 heures avec œdème • Amplitude des mouvements diminuée aux poignets et aux genoux. • Genou droit chaud au toucher et œdème observé. Circonférence articulaire genou gauche : 39 cm et genou droit : 42 cm. 10 Évaluation Douleur aiguë. Dossier : Mikael Pinsonneault (suite) Vous observez le genou droit de Mikael. En défaisant le bandage, vous enlevez le sac de glace et vous examinez la peau dans la région où se trouvait celui-ci. Elle est rouge, froide et présente un cercle blanc d’environ 1 cm de diamètre sur la face interne. Mikael vous dit qu’il a laissé le sac de glace en place pendant environ 45 minutes dans la salle d’attente. Il dit ressentir une sensation de fourmillement où était la glace. La douleur est stable au repos, mais augmentée lorsque vous bougez sa jambe ou qu’il la remue lui-même. Il est incapable de marcher en raison de la douleur. 1. Quelle recommandation allez-vous lui faire concernant l’application de glace ? 2. Étant donné que Mikael a fait une chute à la suite de sa collision avec deux autres joueurs, formulez deux autres questions pertinentes à lui poser. (suite) Vous observez le genou de Mikael ; voici ce que vous voyez. Vous remarquez une diminution de la mobilité de l’articulation et vous n’entendez pas de craquements à la mobilisation passive. 3. Consignez vos observations au dossier (données objectives). Que retenez-vous ? Pour en savoir davantage, consultez . 1. Dans l’évaluation de la douleur, que signie chacune des lettres de l’acronyme PQRSTU ? 2. Pourquoi l’évaluation de la douleur devrait-elle toujours être suivie de l’évaluation de un ou de plusieurs autres systèmes du corps ? 4. Dans le cas de personnes âgées non communicantes, quels outils pouvez-vous utiliser an d’évaluer la douleur ? 3. Auprès d’un nourrisson et de jeunes enfants, quels moyens pouvez-vous utiliser pour évaluer la douleur ? Chapitre 10 Évaluation de la douleur : autre signe vital 229 Dossier : Antoine Savard Antoine Savard, âgé de 84 ans, vit dans une résidence pour personnes retraitées semiautonomes. Il est veuf depuis deux ans. En temps normal, il se déplace de façon autonome avec un déambulateur ; il pouvait effectuer ses activités de la vie quotidienne jusqu’à ce qu’il se présente au centre hospitalier en raison d’une douleur dorsale importante qui l’empêche de se déplacer depuis deux jours. Il compte quelques antécédents médicaux, dont un infarctus du myocarde survenu il y a 10 ans. À la suite de son infarctus, il a subi l’implantation d’un cardiostimulateur débrillateur en raison d’accès de tachycardie ventriculaire et d’une brillation auriculaire avec réponse ventriculaire rapide. Il y a sept ans, il a été victime d’un AVC dont il n’a gardé aucune séquelle ; il présente aussi une hyperplasie bénigne de la prostate diagnostiquée il y a quatre ans en même temps qu’une leucémie lymphoïde chronique. Lorsque vous lui demandez à quel endroit précisément il ressent de la douleur, il place sa main à la hauteur de la dernière côte ottante. Les examens radiologiques et la résonnance magnétique ont démontré que monsieur Savard est atteint d’arthrose importante au niveau cervical et lombaire. Il mesure 180 cm et il pèse 59 kg actuellement, alors que son poids habituel est de 65 kg. Vous remarquez qu’il est amaigri et frêle. 11 11.1 Dénition de l’état nutritionnel L’état nutritionnel de la personne fait référence au degré d’équilibre entre l’apport en nutriments dans l’organisme et les besoins en nutriments de celui-ci, ainsi qu’à la capacité de l’organisme à les digérer, à les absorber et à les utiliser dans une situation de santé normale ou en présence d’une maladie aiguë ou chronique. Les facteurs physiologiques, psychologiques, développementaux, socioculturels et économiques peuvent inuer sur le maintien optimal de l’état nutritionnel. L’état nutritionnel optimal est atteint lorsque sufsamment de nutriments sont consommés an de répondre aux différents besoins quotidiens de l’organisme, autant dans les périodes de croissance que pendant la grossesse ou la maladie. Il est toutefois possible que l’état de santé de la personne nuise à l’absorption des éléments nutritifs ou à leur utilisation par l’organisme, malgré un apport optimal. Par exemple, une personne dont tous les besoins quotidiens en macronutriments et en micronutriments sont satisfaits peut se trouver dans un état nutritionnel décient si elle souffre d’une maladie inammatoire chronique ou si une condition médicale particulière nuit à leur absorption ou à leur utilisation par l’organisme. Un état nutritionnel optimal représente un signe de bonne santé. Il est question de malnutrition lorsque l’apport en éléments nutritifs est insufsant pour répondre aux besoins alimentaires quotidiens ou aux demandes métaboliques supplémentaires. En 2010, l’International Consensus Guideline Commitee a proposé des lignes directrices pour établir une nouvelle terminologie internationale an de classier les types de malnutrition selon l’étiologie de cette dernière, et non à partir de la présentation clinique. Jensen et ses collaborateurs ont suggéré trois types de malnutrition à partir de ces lignes directrices (Jensen, Compher, Sullivan et collab., 2013 ; Jensen, Hsiao et Wheeler, 2012 ; Jensen, Mirtallo, Compher et collab., 2010) : 1) la malnutrition dans un contexte de maladie aiguë (p. ex., un trauma craniocérébral, une situation de soins critiques, une pancréatite, une sepsie, une chirurgie abdominale importante) ; 2) la malnutrition dans un contexte de maladie chronique (p. ex., une maladie cardiovasculaire, la brose kystique, des troubles neurocognitifs, le diabète, des lésions de pression, une maladie pulmonaire obstructive chronique, une insufsance cardiaque) ; 3) la malnutrition dans un contexte d’apports insufsants. Plusieurs étapes doivent être franchies avant d’établir un diagnostic de malnutrition. Une fois le dépistage du risque de malnutrition effectué par l’inrmière (qui indiquera, par exemple, que le client a perdu du poids ou que ses apports alimentaires sont à la baisse), la nutritionniste clinicienne ou le médecin traitant doit d’abord statuer sur le degré d’inammation dont la personne est atteinte : inammation marquée (maladie aiguë), inflammation modérée (maladie Chapitre 11 Q uestion de suivi À partir des données dont vous disposez dans la situation de monsieur Savard, de quel type de malnutrition pourrait-il souffrir ? Macronutriments : Regroupent les glucides (ou sucres), les lipides (ou graisses) et les protéines (ou protides). Ce sont des nutriments qui apportent de l’énergie. Micronutriments: Regroupent les vitamines, les minéraux et les oligoéléments. Ils sont actifs à de très faibles doses. Malnutrition : Apport insufsant, excessif ou déséquilibré en calories, en protéines et en d’autres nutriments. Évaluation nutritionnelle 231 chronique) ou absence d’inammation (apports insufsants) (Malone et Hamilton, 2010). Par la suite, six critères sont à considérer an d’évaluer la sévérité de la malnutrition : 1) un apport en énergie insufsant ; 2) une perte pondérale ; 3) la perte de masse adipeuse sous-cutanée ; 4) la perte de masse musculaire ; 5) l’accumulation de uides ; 6) le statut fonctionnel réduit (White, Guenter, Jensen et collab., 2012). La présence de deux de ces six critères est recommandée pour le diagnostic de malnutrition TABLEAU 11.1. Le rôle de l’inrmière s’avère primordial puisque c’est souvent elle qui effectue le dépistage des personnes à risque de malnutrition. Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition) TABLEAU 11.1 MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE DE MALADIE AIGUË MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE DE MALADIE CHRONIQUEa MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE D’APPORTS INSUFFISANTS Inammation Marquée Légère à modérée Absente Caractéristiques cliniques Non grave (modérée) Grave Non grave (modérée) Grave Non grave (modérée) Grave Apport énergétique < 75 % des besoins pour > 7 jours ≤ 50 % des besoins pour ≥ 5 jours < 75 % des besoins pour ≥ 1 mois ≤ 75 % des besoins pour ≥ 1 mois < 75 % des besoins pour ≥ 3 mois ≤ 50 % des besoins pour ≥ 1 mois Perte de poids • 1-2 % en 1 sem. • > 2 % en 1 sem. • 5 % en 1 mois • > 5 % en 1 mois • 7,5 % en 3 mois • > 7,5 % en 3 mois • • • • • • • • • • • • • • • • Fonte de masse adipeuse souscutanée Légère Modérée Légère Sévère Légère Sévère Fonte de masse musculaire Légère Modérée Légère Sévère Légère Sévère Accumulation de uide (généralisée ou localisée : extrémités [MI, MS]b, vulvaire, scrotal, ascite Légère Modérée à sévère Légère Sévère Légère Sévère Force de préhension N/A Réduite signicativement N/A Réduite signicativement N/A Réduite signicativement 5 % en 1 mois 7,5 % en 3 mois 10 % en 6 mois 20 % en 1 an > 5 % en 1 mois > 7,5 % en ≈ 3 mois > 10 % en 6 mois > 20 % en 1 an 5 % en 1 mois 7,5 % en 3 mois 10 % en 6 mois 20 % en 1 an > 5 % en 1 mois > 7,5 % en 3 mois > 10 % en 6 mois > 20 % en 1 an • Les protéines sériques, comme l’albumine et la transthyrétine, ne sont pas incluses dans les caractéristiques qui dénissent la malnutrition parce que les données récentes démontrent que les taux sériques de ces protéines ne varient pas en réponse aux changements dans l’apport en nutriments. • Un minimum de deux des six caractéristiques est recommandé pour diagnostiquer la malnutrition. 232 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique TABLEAU 11.1 Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition) (suite) ÉVALUATION NUTRITIONNELLE - EXAMEN DES RÉSERVES ADIPEUSES ET MUSCULAIRES, AINSI QUE DE L’ŒDÈME Régions à évaluer Conseils pratiques Malnutrition grave Malnutrition non grave Client bien nourri Région orbitale – entourant l’œil Observer le client en se tenant directement devant lui au-dessus de l’os de la joue. Apparence creuse, dépressions, cernes foncés, peau lâche Cernes foncés légers, apparence légèrement creusée Coussinets adipeux légèrement bombés. Attention : la rétention liquidienne pourrait masquer la fonte adipeuse. Région supérieure du bras – triceps/biceps Rouler la peau entre les doigts, sans pincer le muscle. Le bras du client doit être légèrement plié. Peu d’espace entre les plis, les doigts se touchent Certaine épaisseur du pli, les doigts ne se touchent pas Tissu adipeux évident entre les plis de la peau Région thoracique et lombaire – côtes, bas du dos, ligne axillaire médiane Demander au client de peser avec force sur un objet solide. Dépression entre les côtes très apparente ; crête iliaque très proéminente Côtes apparentes, mais dépression moins prononcée ; crête iliaque légèrement proéminente La poitrine est remplie, les côtes ne sont pas apparentes ; saillie très légère à absente de la crête iliaque. Région temporale – muscle temporal Observer le client en se tenant directement devant lui. Lui demander de tourner la tête d’un côté et de l’autre au besoin. Apparence creuse, dépression. Dépression légère Muscle bien défini, visible, palpable Région claviculaire – grand pectoral, deltoïdes, trapèzes Vérifier la présence d’os proéminents. S’assurer que le client n’est pas courbé vers l’avant. Os (clavicule) proéminent, en saillie ; dépression importante du deltoïde Clavicule visible chez l’homme, saillie légère chez la femme ; dépression légère du deltoïde. Clavicule non visible chez l’homme, visible mais non proéminente chez la femme Région claviculaire et acromiale – muscles deltoïdes Observer la forme des épaules alors que les bras du client sont de chaque côté du corps. Allure carrée des épaules, os proéminents ; saillie importante de l’acromion Acromion peut être légèrement en saillie Épaule arrondie, jonction cou-épaules et épaules-bras arrondie Région scapulaire – trapèzes, muscles infraet sus-épineux Demander au client d’étendre les bras vers l’avant et de pousser contre le mur ou un objet solide. Os visibles et proéminents, dépression entre les côtes et l’omoplate ou entre l’épaule et la colonne vertébrale Dépression légère ou os légèrement visibles Os non proéminents, absence de dépression signicative Région dorsale de la main – muscles interosseux Regarder la main du côté du pouce en demandant au client de joindre l’extrémité du pouce et de l’index. Région creuse entre le pouce et l’index Dépression légère entre le pouce et l’index Muscle bombé, mais pourrait être plat chez certaines personnes bien nourries Région patellaire – quadriceps Demander au client de s’asseoir avec la jambe pliée et légèrement surélevée sur un meuble bas. Os proéminents, peu de signes de muscle autour du genou Rotule moins proéminente, plus ronde Muscles en saillie, os non proéminents Réserves adipeuses Réserves musculaires Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 233 11 Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition) (suite) TABLEAU 11.1 Régions à évaluer Conseils pratiques Malnutrition grave Malnutrition non grave Client bien nourri Région antérieure de la cuisse – quadriceps Demander au client de s’asseoir avec la jambe pliée et surélevée sur un meuble bas ; palper le quadriceps pour différencier la masse musculaire de la masse adipeuse. Dépression/ligne sur la cuisse, allure franchement amaigrie ; cuisse parfois plus étroite que le genou Dépression légère de la partie interne de la cuisse Cuisse bien arrondie, bien développée Région du mollet postérieur – muscles jumeaux Palper les muscles jumeaux pour déterminer la quantité de tissus. Mollet mince, muscle très peu ou pas déni Muscle peu développé Muscle bien développé, arrondi (bulbe) Œdème 1+ Dépression de 2 mm, difcilement détectable. Rebond immédiat. 2+ Dépression de 4 mm. Rebond de quelques secondes. 3+ Dépression de 6 mm. Rebond de 10-12 secondes. 4+ Dépression de 8 mm, très profonde. Rebond > 20 secondes. Note : Les trouvailles à l’examen physique doivent être bilatérales pour être causées par la malnutrition. De plus, il faut exclure les fontes musculaires liées à des décits neurologiques, à des handicaps physiques ou à l’alitement. Attention aux conditions qui peuvent inuencer des résultats de l’examen physique (p. ex., une scoliose peut faire ressortir la clavicule malgré l’absence de fonte musculaire). a The National Center for Health dénit « chronique » comme une maladie ou une condition qui dure trois mois et plus. MI : membres inférieurs ; MS : membres supérieurs. Source : Adapté de Academy of Nutrition and Dietetics and American Society for Parenteral and Enteral Nutrition (2012). Characteristics Recommended for identication and Documentation of Adult Malnutrition (Undernutrition) © 2012 American Society for Parental and Enteral Nutrition and the Academy of Nutrition and Dietetics. Publié par Elsevier Inc. Tous droits réservés. b La malnutrition englobe la dénutrition, à savoir un apport insufsant en énergie, en protéines et en d’autres nutriments. La dénutrition a des conséquences sur les tissus de l’organisme, sur les capacités fonctionnelles de la personne atteinte et sur sa santé en général. Chez les clients hospitalisés, elle s’accompagne souvent d’affections, d’infections et de maladies aiguës qui causent de l’inammation. Ces complications aggravent l’état de dénutrition et peuvent rendre plus difcile la gestion du problème ; en outre, une diminution de l’appétit entraîne des changements physiologiques importants et une augmentation des besoins nutritionnels (Groupe de travail canadien sur la malnutrition [GTCM], 2013). Les groupes de personnes suivants sont plus à risque de malnutrition : les nourrissons, les enfants, les femmes enceintes, les nouveaux immigrants, les personnes à faible revenu, les personnes hospitalisées et les personnes âgées. Ces groupes de personnes sont exposés à différents risques, comme des problèmes de croissance et de développement, une baisse de la résistance aux infections et à la maladie, une mauvaise cicatrisation ou un retard de celle-ci, une hospitalisation plus longue et des frais accrus liés aux soins de santé. Lorsque la consommation en nutriments d’une personne dépasse les besoins de son organisme, 234 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique le risque de souffrir d’embonpoint ou d’obésité est accru. L’obésité demeure un important facteur de risque pour les cardiopathies, l’hypertension artérielle (HTA), le diabète de type 2, les AVC, les lithiases biliaires, l’apnée du sommeil, certains cancers et l’ostéoarthrite (National Heart, Lung, and Blood Institute [NHLBI], 2006). Les dernières données populationnelles portant sur l’obésité au Canada datent de 2004, lorsqu’a été effectuée l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. Santé Canada estime que 18 % des adolescents âgés de 12 à 17 ans (soit environ 1,1 million de jeunes) souffrent d’embonpoint et que 8 % de ces adolescents (soit environ un demimillion de jeunes) et 23,1 % des adultes sont obèses au Canada (Statistique Canada, 2014). Pour l’enfant, un surplus pondéral se dénit comme un indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur au 95e centile en fonction de l’âge et du sexe. Il est important de prendre en considération un excès pondéral pendant l’enfance ou l’adolescence, car il est associé à un risque accru d’obésité à l’âge adulte (NHLBI, 2006). Pour les adultes, un surplus pondéral se dénit comme un IMC égal ou supérieur à 25, et l’obésité se dénit comme un IMC égal ou supérieur à 30 (Centers for Disease Control and Prevention, 2006). Plus de 1 adulte canadien sur 4 (les estimations varient de 24,3 % à 25,4 %) est obèse, selon les données de la taille et du poids mesurés recueillies de 2007 à 2009 (Agence canadienne de la santé publique [ASPC), 2011) ; ces données sont particulièrement préoccupantes. Particularités liées au développement Nourrissons et enfants La période de la naissance à l’âge de quatre mois constitue sans aucun doute celle où la croissance est la plus rapide dans le cycle de la vie. Bien que le nourrisson perde du poids au cours des premiers jours de sa vie, son poids revient à celui de sa naissance vers le septième ou le dixième jour. Vers le quatrième mois, son poids double, et il triple à l’âge de un an. L’allaitement exclusif, sans autres liquides ou aliments, est recommandé pendant les six premiers mois de vie du nourrisson, car le lait maternel contient des nutriments nécessaires à sa croissance et à son développement, tout en lui procurant une immunité naturelle. L’allaitement peut ensuite se poursuivre au moment de l’introduction des solides, jusqu’à ce que la mère le désire et en soit capable (Ordre professionnel des diététistes du Québec [OPDQ], 2012). Les autres avantages de l’allaitement maternel sont : 1) un risque moins élevé d’allergies et d’intolérances alimentaires ; 2) une probabilité réduite de suralimentation ; 3) un coût moins élevé que les formules commerciales ; 4) une augmentation du temps d’interaction entre la mère et l’enfant. Il existe peu de contre-indications à l’allaitement maternel ; cependant, les femmes atteintes du virus de l’immunodécience humaine ne devraient pas allaiter, car la femme séropositive peut transmettre le virus à son enfant par le lait maternel. Pendant la deuxième année de vie, le gain pondéral du nourrisson devrait égaler le poids de sa naissance. Le nourrisson grandit d’environ 50 % au cours de sa première année, et sa taille double à l’âge de 4 ans. Son cerveau se développe également très rapidement : à l’âge de 2 ans, il atteint 50 % de sa taille adulte, 75 % à 4 ans et 100 % à 8 ans. Pour cette raison, les nourrissons et les enfants âgés de moins de deux ans ne devraient jamais boire de lait écrémé ou à faible teneur en gras ou encore être soumis à un régime alimentaire pauvre en gras puisque les calories et les acides gras sont essentiels au développement du système nerveux central. Adolescents Faisant suite à une période de croissance un peu plus lente à la n de l’enfance, l’adolescence se caractérise par une croissance physique rapide. Le développement endocrinien et les changements hormonaux s’effectuent. Les besoins caloriques et protéiques augmentent en raison des demandes associées à la croissance osseuse et à l’augmentation de la masse musculaire et, chez la lle, au début des cycles menstruels. Les exigences en zinc, en fer et en calcium s’accroissent également, tout comme celles en vitamines A, D, C et B9 (acide folique) (Shatenstein et Ghadirian, 1996). Évidemment, avec une demande de cet ordre, la prise de trois repas par jour peut être insufsante ; l’ajout de collations joue donc un rôle important dans l’apport supplémentaire de nutriments nécessaires à l’organisme de l’adolescent en croissance. Q uestion de suivi Calculez l’IMC de monsieur Savard. Que signie le résultat ? En général, les garçons sont plus grands et plus minces que les lles. Au cours de l’adolescence, le gain de masse maigre chez les garçons est de 35 kg, comparativement à 12 kg pour les lles. Chez elles, la masse grasse augmentera, puisqu’il faut un minimum de 20 % de graisse pour déclencher la ménarche. Après la puberté, les femmes auront en moyenne un pourcentage de masse grasse de 22 à 26 % (Shatenstein et Ghadirian, 1996). Il est à noter que les lles doublent leur poids entre l’âge de 8 et 14 ans, alors que les garçons doublent le leur entre l’âge de 10 et 17 ans. 11 Femmes enceintes ou qui allaitent La femme enceinte requiert un apport nutritif supplémentaire en calories, en protéines, en vitamines et en minéraux – comme l’acide folique, le calcium, le fer et la vitamine D – an de faciliter son adaptation aux changements physiologiques liés à la grossesse et au développement du fœtus. Santé Canada recommande un gain pondéral de 12,5 à 18 kg pour les femmes ayant un IMC prégrossesse inférieur à 20, de 11,5 à 16 kg pour celles ayant un IMC prégrossesse de 20 à 27 et de 7 à 11,5 kg pour les femmes souffrant d’embonpoint ou d’obésité, dont l’IMC avant la grossesse était supérieur à 27 (Santé Canada, 2013). La femme enceinte doit également prendre des précautions importantes sur le plan de l’hygiène et de la salubrité dans la préparation des repas ainsi que pour la prise alimentaire. Sa réponse immunitaire étant modiée, elle est plus à risque de contracter des toxi-infections alimentaires (Santé Canada, 2015) ; la toxoplasmose et la listériose sont particulièrement dangereuses pour la femme enceinte (Santé Canada, 2013). Adultes Chez l’adulte en santé, la croissance et les besoins nutritionnels se stabilisent. Toutefois, le mode de vie et les facteurs de risque tels que le tabagisme, le stress, le manque d’exercice, la consommation excessive d’alcool ainsi que les régimes riches en gras saturés et en gras trans, en sodium, en sucres concentrés et pauvres en bres favorisent le développement de l’HTA, de l’obésité, de l’athérosclérose, de néoplasies, de l’ostéoporose et du diabète de type 2. L’âge adulte est donc une période de la vie Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 235 où l’éducation et la promotion de saines habitudes de vie aident à préserver la santé et à prévenir ou à retarder l’apparition de maladies chroniques. Adultes vieillissants Q uestion de suivi Quels sont les facteurs de risque potentiels de malnutrition chez monsieur Savard ? Ostéomalacie : Défaut de minéralisation de la matrice protéique de l’os. Au l des années, un certain nombre de changements physiologiques se produisent et rendent la personne âgée susceptible de souffrir de malnutrition. Une santé mentale ou physique déciente, l’isolement social, l’alcoolisme ou la toxicomanie, certaines limitations fonctionnelles, la pauvreté et la polypharmacie sont les principaux facteurs de risque de malnutrition chez la personne âgée (Furman, 2006). Le vieillissement entraîne certains changements physiologiques qui ont une inuence directe sur l’état nutritionnel : une diminution de l’appétit, une satiété précoce, une mauvaise dentition, une baisse de l’acuité visuelle, une diminution de la production salivaire, un ralentissement de la motilité intestinale, une réduction de l’absorption de certains micronutriments en raison de l’atrophie gastrique ainsi qu’une diminution de l’odorat et de la perception des saveurs. Chez la personne âgée, une baisse des besoins énergétiques causée par une perte de masse maigre (de 35 à 45 % de masse musculaire et de 15 à 30 % de masse osseuse), le ralentissement du métabolisme basal et l’augmentation de la masse adipeuse de 30 % avec redistribution (Ferland, 1998) sont aussi remarqués. Les conditions socioéconomiques peuvent aussi avoir un effet sur l’état nutritionnel de la personne âgée. La diminution du nombre de membres dans la famille ou du cercle d’amis et l’augmentation de la mobilité des familles contribuent à restreindre les ressources de soutien disponibles. La préparation des repas, le transport vers les marchés d’alimentation, les contraintes physiques, le revenu et l’isolement social sont des sources de difcultés fréquemment éprouvées qui peuvent de toute évidence nuire à une saine alimentation. La consommation de médicaments doit aussi être prise en considération, car les personnes âgées prennent souvent plusieurs médicaments ayant un potentiel d’interaction à la fois entre eux et avec les nutriments absorbés. Particularités culturelles et génétiques Toutes les cultures ont des habitudes alimentaires différentes qui leur sont propres ; ainsi, chaque personne possède un héritage culturel unique pouvant inuer sur son état nutritionnel. Les immigrants ont tendance à maintenir plus longtemps leurs coutumes alimentaires traditionnelles, même après avoir adopté la langue, les usages et les habitudes vestimentaires de leur pays d’adoption. La profession, la 236 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique classe sociale, la religion, le sexe et le degré de sensibilisation à de saines habitudes de vie ont une inuence sur la nutrition des immigrants. Au cours des dernières décennies, des centaines de milliers de personnes en provenance de tous les continents ont émigré vers le Canada et le Québec. Ces personnes adaptent leurs habitudes alimentaires pour tenir compte de leur nouvelle culture, mais ces habitudes influencent aussi celles de leur pays d’adoption. La popularité des tortillas, de la salsa, des bananes, du riz, du tofu, du pain pita, de l’humus et du curry est un exemple de cette influence sur les habitudes alimentaires des Nord-Américains. Les nouveaux immigrants peuvent être à risque de souffrir de problèmes nutritionnels pour plusieurs raisons. Ils peuvent être originaires de pays pauvres où l’approvisionnement alimentaire s’avère faible et où l’assainissement de l’eau est absent, ou de pays en guerre ou aux prises avec des problèmes d’ordre politique. La malnutrition, l’HTA, l’anémie ferriprive, les problèmes gastro-intestinaux, l’intolérance au lactose, l’ostéoporose, l’ostéomalacie et les problèmes de santé buccodentaire font partie des problématiques les plus communes liées à la nutrition des nouveaux immigrants. D’autres facteurs contribuent à augmenter leurs problèmes nutritionnels. Les immigrants résident désormais dans un pays où l’on parle une autre langue, ils doivent s’adapter à une culture différente de la leur et à une nouvelle société. Ils découvrent des plats qu’ils ne connaissaient pas. Le mode de conservation, la préparation des aliments et les habitudes d’achat diffèrent aussi. De nombreux aliments qu’ils utilisaient sont difciles ou impossibles à obtenir. Leur faible re venu peut aussi en limiter l’accès. La perturbation des habitudes alimentaires traditionnelles dans une nouvelle culture peut entraîner des altérations de l’état nutritionnel qui ont des conséquences néfastes sur la santé de la personne. Les valeurs culturelles peuvent aussi entrer en conit avec la notion de nutrition optimale ; par exemple, de nombreuses cultures considèrent l’obésité comme un indice de beauté, de richesse et de bien-être. Il est important de garder à l’esprit que certains groupes d’immigrants récents, comme ceux en provenance de l’Asie, sont souvent moins grands et de poids inférieur à leurs homologues occidentaux. Les normes standardisées canadiennes du poids selon l’âge, de la taille selon l’âge et du poids selon la taille peuvent ne pas être appropriées pour évaluer la croissance et le développement d’enfants immigrants. Les normes nutritionnelles sont généralement fondées sur les régimes alimentaires occidentaux. Actuellement, il n’existe aucune norme able permettant l’évaluation de chaque groupe d’immigrants. Chez certains groupes ethniques, des groupes alimentaires sont sous-représentés, ce qui peut laisser supposer une apparence de déciences nutritionnelles. Par exemple, la majorité des Autochtones du Canada ainsi que beaucoup d’immigrants provenant de l’Asie, de l’Afrique, de l’Inde du Sud, du Mexique et d’Haïti souffrent d’intolérance au lactose, et le lait est très peu consommé dans ces populations. Or, leur apport en soya, en légumes, en noix et graines, en yogourt et en fromage leur permettent souvent de satisfaire leurs besoins nutritionnels en calcium (Szilagyi, Nathwani et Vinokuroff, 2006). L’intolérance au lactose est moins fréquente chez les personnes d’origine nord-européenne, nord-américaine (Canada et États-Unis) et australienne. Coutumes alimentaires et groupes culturels Il faut éviter les stéréotypes culturels qui considèrent les membres d’une même culture comme étant identiques et ne pas entretenir d’idées préconçues sur la façon dont ils « devraient » se comporter. Toutefois, certains grands principes régissent l’alimentation de populations provenant de différentes régions du globe (p. ex., les Grecs et les Italiens ont une alimentation de type méditerranéenne, à base de fruits, de légumes, de grains entiers, de noix et d’huile d’olive, de poisson, et contenant peu de lait, de viande rouge et d’aliments transformés). Les préférences alimentaires peuvent aussi être liées à des croyances et à des pratiques religieuses. De nombreuses religions utilisent des aliments comme symboles dans leurs célébrations et leurs rituels. La connaissance des pratiques religieuses de la personne liées à son alimentation permet de proposer des améliorations ou des modications qui n’entrent pas en conit avec les règles d’une saine alimentation. Le TABLEAU 11.2 résume certaines coutumes alimentaires religieuses. 11 TABLEAU 11.2 Coutumes alimentaires et religion GROUPE RELIGIEUX RESTRICTIONS ALIMENTAIRES Bouddhistes • Viande chez les fervents pratiquants (maintenant, elle est consommée en petite quantité) • Oignon et ail parfois évités Catholiques • Viande et boissons alcoolisées évitées pendant le mercredi des Cendres, les vendredis du carême et le Vendredi saint Hindous • Bœuf, porc, certaines volailles • Alcool permis, mais peu consommé • Jeûne fréquent Musulmans • • • • • Mormons • Boissons alcoolisées • Boissons contenant de la caféine (p. ex., le café, le thé, les boissons gazeuses) et médicaments contenant de la caféine, des stimulants ou de l’alcool (p. ex., Sudafed MD, NyquilMD, certains comprimés d’acétaminophène) • Aliments et liquides le premier dimanche de chaque mois Juifs orthodoxes • • • • • • Adventistes du septième jour • Boissons alcoolisées, thé et café • Régime ovo-lacto-végétarien recommandé Viande de porc et ses dérivés Sang (la viande doit être bien cuite) Viande provenant d’animaux n’ayant pas été abattus selon le rite musulman (halal) Boissons alcoolisées et produits de l’alcool Aliments et liquides du lever au coucher du soleil pendant le ramadan Viande de porc et ses dérivés Viande provenant d’animaux n’ayant pas été abattus selon le rituel juif Crustacés (p. ex., le crabe, le homard, les crevettes, les huîtres) et mollusques Produits laitiers et viande dans un même repas Pains ou gâteaux contenant du levain pendant les fêtes de Pâques Aliments ou liquides pendant le Yom Kippour Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 237 D’autres situations peuvent limiter l’alimentation d’une personne ou sa consommation de liquide pendant un certain temps. Par exemple, beaucoup de catholiques s’abstiennent de manger de la viande le mercredi des Cendres, les vendredis pendant le carême et le Vendredi saint. Les musulmans ne prennent aucune nourriture ni aucun liquide du lever au coucher du soleil pendant le mois du ramadan dans le calendrier islamique et s’alimentent deux fois par jour, soit avant l’aube et après le coucher du soleil. Les juifs observent 24 heures de jeûne à l’occasion du Yom Kippour, une célébration juive représentant le jour du Grand Pardon dans le calendrier hébreu. Le terme casher se dit des aliments préparés conformément à la religion juive ; l’interdiction de mélanger le lait et les produits à base de viande pendant un même repas, ainsi que celle de manger de la viande de porc et des crustacés sont des exemples des nombreuses règles que régit la religion juive. Par ailleurs, le terme halal renvoie à la terminologie alimentaire islamique (où l’interdiction de consommer la viande de porc est aussi l’une des nombreuses règles de ce régime alimentaire). 11.2 Q uestion de suivi Quelle méthode de collecte de données privilégeriezvous pour évaluer si les apports alimentaires de monsieur Savard sont adéquats ? Q uestion de suivi Calculez le pourcentage de poids perdu de monsieur Savard. 238 Partie 2 Objectifs et composantes de l’évaluation nutritionnelle L’état nutritionnel peut être apprécié à l’aide d’outils d’évaluation non invasifs, standardisés et validés pour des populations générales ou particulières. Les buts de l’évaluation nutritionnelle sont : 1) de reconnaître les personnes souffrant de malnutrition, de décience ou de carence nutritionnelle ou à risque d’en être atteintes ; 2) de fournir des données pour la conception d’un plan thérapeutique inrmier (PTI) relatif aux besoins nutritionnels permettant de prévenir ou de minimiser la malnutrition ; 3) d’établir des données de référence pour l’évaluation de l’efficacité des soins nutritionnels. Le dépistage nutritionnel est la première étape à réaliser dans l’évaluation de l’état nutritionnel ; il peut se faire à différents endroits, par exemple à domicile, dans une clinique, un CLSC, un centre hospitalier, un CHSLD. Basé sur des données objectives et subjectives, le dépistage nutritionnel permet de reconnaître rapidement les personnes à risque de troubles nutritionnels, comme ceux liés à la perte pondérale, à un apport alimentaire inadéquat ou à une maladie récente. Il permet également de déterminer si une évaluation nutritionnelle complète est nécessaire. Les paramètres utilisés pour le dépistage sont : l’évaluation du poids actuel, du poids habituel, du pourcentage de poids perdu ; Connaissances préalables à l’examen clinique les conditions associées au risque de malnutrition, comme la présence d’un état inammatoire, d’une dysphagie ou d’une hospitalisation prolongée ; le régime alimentaire de la personne évaluée ; les résultats des analyses de laboratoire. Plusieurs outils ont été créés an de permettre l’évaluation de différentes populations. Par exemple, le Mini Nutritional Assessment est un outil d’évaluation nutritionnel validé pour usage par les inrmières auprès de personnes hospitalisées FIGURE 11.1. Les personnes reconnues à risque de malnutrition au cours du dépistage doivent faire l’objet d’une évaluation nutritionnelle complète, comprenant l’histoire alimentaire, les données cliniques, l’examen physique selon les signes observés, les mesures anthropométriques et des examens paracliniques. Cette évaluation nutritionnelle est effectuée par la nutritionniste clinicienne, qui établira ensuite le plan de traitement nutritionnel, un acte réservé aux nutritionnistes selon le Code des professions du Québec (L.R.Q., c. C-26, articles 37c, 37.11 a et b). Les habiletés nécessaires pour recueillir l’information portant sur les antécédents alimentaires, l’histoire médicale et les données cliniques pour effectuer l’examen physique et l’évaluation nutritionnelle sont décrites plus loin dans les sections Données subjectives et Données objectives. Il existe plusieurs méthodes de collecte de données portant sur l’apport alimentaire. Le rappel des 24 heures est un questionnaire évaluant l’alimentation pour une journée complète. C’est la méthode la plus simple et la plus utilisée pour obtenir des renseignements sur les ingesta quotidiens. La personne évaluée (ou un membre de sa famille ou un proche) remplit le questionnaire ou est interrogée, et l’inrmière lui demande de se rappeler tout ce qu’elle a mangé et bu au cours des 24 dernières heures. Toutefois, avec cette méthode, certaines erreurs peuvent se produire : 1) la personne ou le membre de sa famille (ou le proche) peut ne pas être en mesure de se rappeler le type ou la quantité d’aliments consommés ; 2) l’apport des ingesta dans les 24 dernières heures peut ne pas être représentatif de ses habitudes alimentaires ; 3) la personne ou le membre de sa famille (ou le proche) peut altérer la vérité pour diverses raisons ; 4) les collations et la consommation de certains aliments, comme les sauces et des condiments, peuvent être sous-évaluées. Pour contrer certaines des difcultés inhérentes à la méthode du rappel des 24 heures, un questionnaire sur la fréquence alimentaire peut être utilisé. Celui-ci permet de recueillir de l’information sur la fréquence de consommation de certains aliments et de certaines boissons par la personne : le nombre de fois par jour, par semaine ou par mois. Toutefois, comme pour le questionnaire du rappel des 24 heures, il se base sur la mémoire de la personne ou du membre de sa famille ou d’un proche pour évaluer si un aliment est consommé. 11 FIGURE 11.1 Mini Nutritional Assessment Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 239 Q uestion de suivi Pour quelle raison devriezvous évaluer la présence de signes de dysphagie chez monsieur Savard ? Quels signes tenterez-vous d’observer pendant les repas ? Le TABLEAU 11.1W, Grille d’évaluation globale subjective, fournit un exemple d’éléments d’évaluation permettant de recueillir des données subjectives portant sur l’évaluation nutritionnelle. Le journal des aliments ingérés ou l’enregistrement des données alimentaires exigent de la personne (ou d’un membre de sa famille ou d’un proche) qu’elle consigne tous les aliments et toutes les boissons consommés pendant une certaine période de temps. Trois jours non consécutifs sont habituellement utilisés, soit deux jours de la semaine et une journée de la n de semaine. Le journal alimentaire est sans aucun doute le mode d’évaluation le plus précis et le plus complet, surtout si la personne chargée de consigner l’information le fait immédiatement après les repas. Cependant, des problèmes potentiels sont associés à cet outil : 1) le non-respect des consignes ; 2) l’enregistrement d’une information inexacte ; 3) la façon aléatoire dont les journées utilisées pour répondre au questionnaire peuvent être choisies d’une semaine à l’autre ; 4) le changement volontaire d’alimentation pendant la période d’enregistrement ; 5) une mauvaise évaluation des quantités d’aliments ou des boissons consommés. L’observation directe de l’alimentation et du processus nutritionnel peut aider à la détection des 240 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique problèmes difciles à percevoir avec la grille d’évaluation ou le journal des aliments ingérés. Par exemple, l’observation des techniques alimentaires utilisées par les parents ou par un proche aidant peut être utile au cours de l’évaluation du retard de croissance chez un enfant ou d’une perte de poids non intentionnelle chez une personne âgée. L’observation effectuée pendant le repas permet aussi de détecter des signes de dysphagie, une condition pouvant nuire à la prise alimentaire. Le Guide alimentaire canadien est un outil de référence couramment utilisé pour valider la justesse d’un régime alimentaire. La dernière version du Guide, qui fournit des lignes directrices nutritionnelles, a été publiée en 2007 ENCADRÉ 11.1 et FIGURE 11.2. Ce guide constitue une référence qui permet d’aider la personne à choisir les aliments et à comprendre comment planier des repas équilibrés. Les apports nutritionnels de référence (ANREF) fournissent des recommandations sur les quantités de nutriments nécessaires an de prévenir une décience ou une carence nutritionnelle ou de réduire le risque de maladies chroniques. En plus de recommander les apports nutritifs adéquats, l’ANREF fournit des précisions quant aux quantités de nutriments à ne pas dépasser an d’éviter le ENCADRÉ 11.1 risque de toxicité. Avec l’utilisation accrue des suppléments alimentaires, de vitamines, de minéraux ainsi que de produits de santé naturels, ce risque est en hausse. Recommandations nutritionnelles quotidiennes selon le Guide alimentaire canadien 1. Consommer de 7 à 10 portions de fruits et de légumes par jour. Opter pour des fruits et des légumes variés. Manger au moins un légume vert foncé et un légume orangé chaque jour. Préférer les légumes et les fruits à leurs jus. 5. Choisir des viandes maigres et des substituts préparés avec peu ou pas de matières grasses ou de sodium. Consommer deux portions de poisson par semaine au moins. 2. Consommer de 6 à 8 portions de produits céréaliers par jour, dont la moitié sous forme de grains entiers. Choisir des produits céréaliers plus faibles en lipides, en sucre ou en sodium. 7. Consommer le moins de sucre possible (ou autres édulcorants à teneur calorique élevée). 3. Consommer au moins deux portions de lait et substituts par jour, en favorisant les produits faibles en matières grasses. 6. Consommer moins de 2 300 mg (approximativement 1 c. à thé) de sel par jour. 8. Faire au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée chaque jour. 4. Consommer une petite quantité (de 30 à 45 mL ou de 2 à 3 c. à table) de lipides insaturés chaque jour. Limiter la consommation de gras saturés et de gras trans autant que possible. 11 FIGURE 11.2 Guide alimentaire canadien. © Sa Majesté la Reine, Chef du Canada, représentée par le ministre de Santé Canada, 2007. Cette publication peut être reproduite sans autorisation. Toute modication est interdite. Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 241 11.3 Données subjectives 4 11.3.1 Histoire de santé Les outils mnémotechni­ ques AMPLE et PQRSTU sont dénis dans le cha­ pitre 4, Regard global sur l’histoire de santé. Le fait de recueillir les données subjectives permet de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces éléments d’information sont ensuite combinés aux données objectives provenant de l’examen physique et des examens paracliniques. L’ensemble des données sert à poser un jugement clinique sur l’état de santé du client et à formuler un constat d’évaluation. An de reconstituer l’histoire de santé, l’inrmière peut utiliser l’outil mnémotechnique AMPLE. Lorsque le client présente des symptômes particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue 4 . ceux-ci à l’aide de l’outil PQRSTU Séquence d’évaluation QUESTIONS JUSTIFICATIONS Habitudes alimentaires • Combien prenez-vous de repas et de collations par jour ? • Quels sont les aliments que vous mangez dans une journée et en quelle quantité ? • Où prenez-vous vos repas ? • Quelles sont vos préférences alimentaires ? • Quels sont les aliments qui vous déplaisent ou pour lesquels vous éprouvez du dégoût ? • Êtes-vous capable de vous alimenter seul ? La plupart des personnes ont une bonne connaissance de leur alimentation. Cependant, il arrive qu’elles entretiennent de fausses idées à ce sujet ; il s’agit alors d’amener la personne à les corriger progressivement en lui donnant l’information nécessaire sur une alimentation saine et équilibrée. • Avez-vous des restrictions alimentaires associées à votre religion ? Des restrictions alimentaires liées à la religion ou à certaines cultures peuvent inuer sur la consommation d’aliments en particulier et ainsi entraîner une insufsance d’apports en certains nutriments. • Suivez-vous un régime particulier ? Plusieurs régimes dont l’efcacité et la sécurité ne sont pas prouvées scientifiquement peuvent nuire à une saine alimentation. Poids habituel • Quel est votre poids habituel ? • Votre poids a-t-il changé récemment ? • Combien de kilos avez-vous perdus ou gagnés ? Sur quelle période de temps cette modication pondérale s’est-elle produite ? Y a-t-il une raison particulière expliquant cette perte ou ce gain pondéral ? 242 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique La personne qui a récemment perdu ou gagné du poids, de façon involontaire ou volontaire, est à risque d’altérer son état nutritionnel. La personne ayant un poids sous la normale est vulnérable parce que ses réserves énergétiques peuvent être épuisées ; par contre, l’excès pondéral est associé à un certain nombre de problèmes de santé, allant de l’HTA au cancer. Il faut garder en tête qu’une personne en excès pondéral ou obèse peut également être dénutrie. QUESTIONS JUSTIFICATIONS Modication de l’appétit, du goût, de l’odorat, de la capacité de mastication et de déglutition Quel changement avez-vous remarqué ? Quand avez-vous remarqué ce changement ? La ↓ de l’appétit, une modication du goût ou de l’odorat, ainsi que des difcultés à mastiquer ou à déglutir peuvent interférer avec la capacité de la personne à se nourrir adéquatement, ce qui accroît le risque de dénutrition. De telles altérations peuvent également diminuer le plaisir lié à l’alimentation et ainsi entraîner une baisse des apports qui pourrait mener à une dénutrition ou à une déshydratation. Chirurgie récente, trauma, brûlure, infection 11 • Avez-vous récemment subi une chirurgie ? Quand avez-vous subi cette chirurgie ? Quel type de chirurgie avez-vous eu ? Les personnes qui ont récemment subi une intervention chirurgicale, un trauma, une septicémie ou qui ont vécu des situations entraînant des pertes nutritionnelles peuvent avoir des besoins en calories et en nutriments qui sont deux ou trois fois supérieurs à la normale. • Quels traitements ou soins avez-vous reçus (nutrition entérale/parentérale, antibiothérapie) relativement à cette chirurgie ? Les chirurgies touchant le système digestif peuvent altérer les capacités de digestion et d’absorption des aliments. Ces personnes doivent parfois prendre des suppléments de vitamines et minéraux à vie, comme les celles qui ont subi une chirurgie bariatrique malabsorptive, par exemple. Maladies chroniques • De quels problèmes de santé chronique souffrez-vous ? Quand le diagnostic a-t-il été posé ? Quelle sorte de traitement recevez-vous pour ces problèmes de santé ? Avez-vous dû modier votre alimentation ? • Avez-vous récemment été atteint de cancer ou avez-vous reçu des traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie ? La personne atteinte de problèmes de santé chroniques qui nuisent à l’utilisation des nutriments (p. ex., le diabète ou tout autre problème diminuant la capacité d’absorption des nutriments comme une cirrhose, une pancréatite ou une maladie inammatoire de l’intestin) et celle qui reçoit des traitements contre le cancer sont à risque de dénutrition. Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 243 QUESTIONS JUSTIFICATIONS Nausées, vomissements, diarrhée, constipation (autres problèmes) Comment ce problème se manifeste-t-il chez vous ? En connaissez-vous la cause ? Depuis combien de temps avez-vous ce problème ? • Plusieurs symptômes gastrointestinaux tels que nausées, vomissements, diarrhée ou constipation peuvent interférer avec un apport adéquat en nutriments ou avec leur absorption. • De plus, ces symptômes augmentent les pertes d’ions tels que le potassium et plusieurs autres nutriments, ce qui peut engendrer d’autres problèmes, entre autres l’arythmie cardiaque et la déshydratation. Allergies ou intolérances alimentaires Avez-vous déjà eu des réactions indésirables après avoir consommé certains aliments ? De quels aliments s’agissait-il ? Quelles ont été ces réactions ? Quand est-ce arrivé et combien de temps cela a-t-il duré ? • Les allergies alimentaires, en particulier les allergies aux arachides, sont en hausse et peuvent causer d’importants problèmes de santé. Il est bon de se reporter aux publications sur le sujet concernant les directives à suivre ou pour avoir plus d’information sur la gestion des allergies alimentaires. • Une intolérance alimentaire peut entraîner le retrait complet de l’aliment intoléré par la personne, sans que l’aliment ne soit substitué (p. ex., un client intolérant au lactose qui retirerait tous les produits laitiers de son alimentation sans les remplacer par de la boisson de soya ou des produits laitiers sans lactose). Un tel retrait pourrait entraîner à long terme une décience ou une carence nutritionnelle. Médicaments ou suppléments nutritionnels • Prenez-vous des médicaments sous ordonnance ou offerts en vente libre ? Quels sont les médicaments que vous prenez ? Depuis combien de temps les prenez-vous ? 244 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Les analgésiques, antiacides, anticonvulsivants, antibiotiques, diurétiques, laxatifs, agents antinéoplasiques, corticostéroïdes et contraceptifs oraux sont des médicaments pouvant interagir avec l’absorption des nutriments, et ils peuvent altérer le métabolisme. QUESTIONS • Quelle sorte de suppléments vitaminiques prenez-vous ? Quelle en est la posologie ? Depuis combien de temps les prenez-vous ? • Consommez-vous des produits naturels ? Lesquels ? Comment les utilisez-vous ? Qui vous les a recommandés ? Ces produits vous ont-ils aidé d’une quelconque façon ? JUSTIFICATIONS • Les vitamines et les produits naturels peuvent provoquer des effets secondaires s’ils sont consommés en grandes quantités. Certains peuvent mutuellement nuire à leur absorption s’ils sont consommés en même temps (p. ex., le calcium nuit à l’absorption du fer.) • Certains produits naturels peuvent aussi nuire à l’absorption et à la digestion de certains aliments en plus de causer des interactions avec la médication sous ordonnance (p. ex., le millepertuis nuit à l’action des anovulants). Il est donc essentiel de questionner le client à cet effet. 11 Activités de la vie domestique • Êtes-vous autonome dans la préparation de vos repas ? Des facteurs socioéconomiques défavorables peuvent nuire au maintien d’un régime alimentaire équilibré. • Êtes-vous capable d’aller faire seul votre épicerie ? Avez-vous un revenu sufsant pour acheter les produits alimentaires dont vous avez besoin ? Qui fait votre marché et prépare vos repas ? Une perte d’autonomie peut également nuire à la prise alimentaire ou à la préparation des repas. Par exemple, la perte de dextérité chez une personne âgée peut lui rendre la préparation des repas difcile. • Votre environnement est-il propice à la prise de vos repas ? Consommation d’alcool ou de drogues illégales • À quand remonte votre dernière consommation d’alcool? Combien de consommations avez-vous prises à cette occasion ? Quelle est votre consommation journalière et hebdomadaire ? Depuis combien de temps consommez-vous de l’alcool ? • (Reprendre ces questions et les adapter an d’évaluer l’usage de drogues.) La prise régulière d’alcool ou de drogues peut être substituée à l’alimentation et entraîner une dénutrition par insufsance d’apports ou par malabsorption, ou des déciences en certains nutriments (p. ex., la thiamine est souvent déciente chez les grands alcooliques). Les femmes enceintes qui fument, consomment de l’alcool ou des drogues illicites donnent naissance à un nombre important d’enfants de faible poids, ou ayant un retard de croissance, ou qui éprouvent d’autres complications graves. Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 245 QUESTIONS JUSTIFICATIONS Exercice et activité physique • Depuis combien de temps faites-vous de l’activité physique ? • Quel type d’activité physique pratiquez-vous ? À quelle fréquence ? Les besoins en calories et en nutriments s’élèvent avec l’augmentation de l’activité physique, en particulier dans les sports de compétition et le travail physique. L’inaction ou la sédentarité peut conduire à un excès de poids ou à l’apparition de certains problèmes de santé, même en l’absence de gain pondéral. Histoire familiale Quels sont les problèmes de santé dans votre famille immédiate ? La présence de un ou de plusieurs de ces antécédents familiaux a-t-elle modié vos habitudes de vie ? Exemples : alimentation, activité physique. Une carence nutritionnelle présente depuis longtemps peut être le symptôme d’un problème de santé (p. ex., la maladie de Crohn, une colite ulcéreuse). Le dépistage précoce permet de contrer les effets qu’aurait ce problème à long terme sur la personne et ses activités. Il favorise aussi une récupération plus rapide en diminuant les risques d’effets permanents causés par une carence nutritionnelle à long terme. PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT Nourrissons et enfants L’histoire nutritionnelle du nourrisson et de l’enfant est généralement obtenue auprès des parents, du tuteur, de la gardienne ou de l’éducatrice en service de garde. Habituellement, la personne responsable de la préparation des aliments peut fournir une histoire nutritionnelle assez précise. Cependant, la meilleure façon d’obtenir une évaluation complète est la rédaction d’un journal répertoriant l’alimentation sur une période de 24 heures pendant laquelle le nourrisson ou l’enfant est gardé en observation. Nutrition et grossesse • La mère a-t-elle fait usage d’alcool, de tabac ou de drogues illicites pendant sa grossesse ? • La mère a-t-elle eu des complications liées à son alimentation pendant sa grossesse ? • Quel était le poids de l’enfant à sa naissance ? 246 Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique Un faible poids à la naissance (< 2 500 g) est un facteur important de morbidité et de mortalité infantiles. QUESTIONS • Y a-t-il présence de signes ou de symptômes laissant présupposer un retard de croissance physique ou mental chez l’enfant ? JUSTIFICATIONS • Une mauvaise alimentation chez la mère, la faible prise de poids chez celle-ci et la consommation d’alcool, de tabac ou de drogues sont autant de facteurs pouvant augmenter le risque de malformations congénitales et de retard de croissance et de développement. • Dans certains cas, des nausées persistantes en début de grossesse peuvent, si elles ne sont pas traitées, entraîner une baisse de la prise alimentaire et, ainsi, une prise de poids insufsante ou même une perte de poids, ce qui n’est pas recommandé chez une femme enceinte, et ce, même si elle est obèse. 11 Nourrissons alimentés au sein ou au biberon • Comment le nourrisson est-il alimenté, à quelle fréquence, en quelle quantité et quelle est la durée de l’allaitement ? Quelles sont les difcultés éprouvées ? La croissance et le développement du nourrisson se feront normalement si celui-ci est bien nourri. La mère inexpérimentée peut éprouver des problèmes au cours de l’allaitement maternel ou au biberon. De plus, elle se demande souvent si son enfant reçoit les quantités sufsantes de nutriments. • Quel est le calendrier de sevrage et quelle est la méthode utilisée ? Attitudes de l’enfant à l’égard de l’alimentation • Quels aliments votre enfant préfère-t-il ou déteste-t-il ? • Que mange votre enfant comme collation ? • Votre enfant s’est-il déjà étouffé avec de la nourriture ? Que faites-vous pour éviter une aspiration alimentaire chez votre enfant ? La période préscolaire est l’étape de la croissance où s’acquièrent les habitudes alimentaires. Servir de petites portions, préparer des repas simples, offrir une alimentation variée et proposer des collations nutritives sont des stratégies visant à améliorer l’apport alimentaire chez l’enfant. Il faut éviter les aliments susceptibles d’être bronchoaspirés (p. ex., les saucisses à hot-dog non coupées dans le sens de la longueur, les noix, les raisins non coupés, les bonbons ronds ou le maïs soufé). Chapitre 11 Évaluation nutritionnelle 247 QUESTIONS JUSTIFICATIONS Adolescents Poids actuel • Comment percevez-vous votre poids actuel ? • Suivez-vous un régime amaigrissant ? • Avez-vous déjà suivi d’autres régimes amaigrissants ? Si oui, combien de poids avez-vous perdu ? Avez-vous repris le poids perdu ? • Pensez-vous constamment que vous avez un surplus pondéral ? • Après les repas, vous arrive-t-il de vous faire vomir intentionnellement ? Prenez-vous des laxatifs ou des diurétiques ? Faitesvous de l’activité physique plusieurs heures par jour ? Évitez-vous de manger ? Vous sentez-vous coupable après avoir mangé ? Un surplus pondéral, en particulier chez les filles, peut inciter l’adolescente à suivre des régimes amaigrissants qui pourraient nuire à son développement. Comme elles sont préoccupées par l’apparence de leur corps, les adolescentes sont plus facilement sujettes à des troubles alimentaires (anorexie mentale, hyperphagie boulimique, orthorexie ou boulimie). L’image de la femme promue par les médias peut entraîner l’adolescente à entretenir une obsession de son image corporelle. Consommation de substances 248 Partie 2 • Avez-vous déjà fait usage de stéroïdes anabolisants, de suppléments de protéines ou d’autres substances ayant comme effet d’augmenter la taille des muscles et la performance physique ? Quand ? À quel dosage ? Cela vous a-t-il causé des problèmes ? Chez les athlètes (plus souvent les hommes), l’utilisation de stéroïdes anabolisants ou d’autres agents an d’augmenter la taille des muscles et la performance physique (p. ex., suppléments de protéines, créatine, acides aminés à chaine ramiée) est fréquente. Cette tendance peut s’étendre aux adolescents ; ils connaissent mal les effets de ces produits. • Consommez-vous de la caféine ou des boissons énergisantes ? À quels moments ? Quelle sorte ? À quelle fréquence ? Consommer des boissons énergisantes comme Red Bull MD, Full ThrottleMD, ÉnergieMD et RockstarMD, riches en caféine et autres stimulants, ou certains produits à base de plantes peut entraîner des effets indésirables. Les plus fréquents sont la déshydratation, l’HTA, l’arythmie cardiaque et des troubles du sommeil. • Avez-vous recours à la restauration rapide ? De quel type ? À quels moments optez-vous pour la restauration rapide ? Combien de fois par semaine ? Une histoire alimentaire détaillée peut être difcile à obtenir avec précision en raison des collations prises entre les repas et des repas consommés sur le pouce. Ces éléments sont souvent omis ou oubliés pendant l’évaluation ou la rédaction du journal alimentaire. • Combien de repas par semaine prenez-vous au restaurant, tous types confondus ? Les repas pris au restaurant, peu importe le type, sont souvent riches en sodium, en gras et en sucre. Connaissances préalables à l’examen clinique QUESTIONS • À quel âge avez-vous eu vos premières menstruations ? Qualiez votre ot menstruel : peu abondant, normal ou abondant ? JUSTIFICATIONS Le premier cycle menstruel (ménarche) est souvent retardé en présence d’une insufsance pondérale. Le ot menstruel peut aussi être diminué, et les symptômes d’aménorrhée sont fréquents. Femmes enceintes • Combien de grossesses avez-vous eues ? À quand remonte cette dernière grossesse ? Durant cette dernière grossesse, avez-vous éprouvé des problèmes particuliers ? Éprouvez-vous des problèmes particuliers pendant la grossesse actuelle ? • Quels aliments préférez-vous pendant la grossesse ? Quels aliments évitez-vous de consommer ? Éprouvez-vous du dégoût pour des aliments en particulier ? Une femme enceinte multipare dont la dernière grossesse remonte à moins de un an court un risque accru d’épuisement de ses réserves nutritionnelles. Il faut noter les problèmes survenus pendant les grossesses précédentes, comme les vomissements excessifs, l’anémie ou le diabète gestationnel. Le ralentissement de la motilité gastrointestinale et la pression du fœtus dans l’abdomen peuvent causer de la constipation, des hémorroïdes et de la dyspepsie. Des antécédents de naissance avec un nourrisson de faible poids suggèrent des problèmes nutritionnels antérieurs. Donner naissance à un bébé pesant 4,5 kg ou plus peut être un indice latent de diabète chez la mère. 11 La future mère est vulnérable à l’inuence que peuvent avoir sur elle la famille, la culture et les traditions quant aux choix alimentaires. Les fringales ou les aversions pour certains aliments sont fréquentes ; il faut évaluer leurs conséquences sur l’apport nutritionnel nécessaire à la femme enceinte. Adultes vieillissants • Votre régime alimentaire est-il différent de celui que vous aviez auparavant ? Pourquoi ? Quels sont les facteurs qui inuent sur votre alimentation ? • Il est recommandé de remplir, avec l’adulte vieillissant, le questionnaire présenté dans la FIGURE 11.1. Il faut noter tout changement physiologique ou psychologique lié à l’âge ou aux changements socioéconomiques susceptibles d’inuer sur l’apport nutritionnel de l’adulte vieillissant. L’initiative de dépistage nutritionnel de White, Ham et Lipschitz (1991) est une approche en trois étapes qui est utilisée pour le dépistage de la dénutrition chez l’adulte vieillissant. La grille de la FIGURE 11.1 révèle les principaux facteurs de risque et les indicateurs d’un état nutritionnel altéré. Chapitre 11 Q uestion de suivi Depuis son hospitalisation, monsieur Savard se déplace péniblement avec son déambulateur pour se rendre à la toilette ; il vous a coné qu’il mange moins qu’auparavant puisque ses dentiers sont mal ajustés depuis qu’il a perdu du poids. À partir des données dont vous disposez jusqu’à présent, remplissez le Mini Nutritional Assessment de monsieur Savard FIGURE 11.1. Évaluation nutritionnelle 249 11.4 Données objectives Schéma séquentiel résumant les étapes de l’examen clinique. 11.4.1 Préambule L’observation de l’état général de la personne – obésité, cachexie, atrophie musculaire, œdème – peut fournir des indices globaux sur son état nutritionnel. L’examen physique permet aussi de déceler des signes et des symptômes évocateurs de malnutrition et de déshydratation. Comme ces symptômes sont lents à apparaître, l’inrmière privilégie l’évaluation de la densité du tissu cutané, comme la peau, les cheveux, la bouche, les lèvres et les yeux ; ce sont des endroits où les carences nutritionnelles sont détectables. Comme ces symptômes ne constituent pas uniquement des signes de carences nutritionnelles, il est nécessaire d’effectuer des analyses sanguines an d’établir un diagnostic précis (celles-ci seront examinées plus loin dans ce chapitre). Le TABLEAU 11.3 présente les principaux signes cliniques de malnutrition. Matériel nécessaire • Ruban à mesurer • Pèse-personne avec règle à mesurer • Crayon ou stylo • Grille d’évaluation de l’état nutritionnel Signes cliniques de malnutrition TABLEAU 11.3 RÉGION OU SYSTÈME EXAMINÉ APPARENCE NORMALE SIGNES ET SYMPTÔMES ASSOCIÉS À LA MALNUTRITION CARENCE EN NUTRIMENTS Peau Souple, coloration rosée, aucun signe d’éruption cutanée, d’ecchymose ou de desquamation Dermatose squameuse Riboavine, biotine, zinc, manganèse, acides gras essentiels (AGE) Pétéchies, ecchymoses Vitamines C et K Hyperkératose folliculaire (hyperplasie de la couche cornée de l’épiderme) Vitamine A, acide linoléique, malnutrition protéinoénergétique Dermatite séborrhéique nasolabiale Niacine, riboavine, vitamine B6 Dermatose eczématoïde Acide linoléique, biotine Xanthome (taches de petite taille, jaunes ou brunâtres, riches en dépôt lipidique, localisées surtout aux plis de exion et sur les faces latérales du cou) Taux élevé de triglycérides Ternes, secs, clairsemés Acide linoléique, malnutrition protéinoénergétique Changement de couleur Zinc, cuivre ou protéines Trichorrhexie noueuse (formation de nodosités et de boules multiples sur les cheveux séparés par des portions de tige normale) Cuivre Taches nacrées (taches de Bitot) Vitamine A Xérosis conjonctival et cornéen Vitamines A et C, biotine Ramollissement de la cornée (kératomalacie) Vitamine A Pâleur des conjonctives Fer, folacine Blépharite angulaire Vitamines B6 et B12, thiamine, riboavine, niacine Cheveux Yeux 250 Lustrés, ne s’enlèvent pas facilement, cuir chevelu d’apparence saine Cornées claires, brillantes ; membranes rosées et humides ; aucune plaie aux coins des paupières Partie 2 Connaissances préalables à l’examen clinique TABLEAU 11.3 Signes cliniques de malnutrition (suite) RÉGION OU SYSTÈME EXAMINÉ APPARENCE NORMALE SIGNES ET SYMPTÔMES ASSOCIÉS À LA MALNUTRITION CARENCE EN NUTRIMENTS Lèvres Souples, sans gerçures ni œdème Chéilite (ssures, gerçures aux lèvres) Vitamine B6, riboavine, niacine Perlèche Vitamine B 6 , riboflavine, niacine, fer, malnutrition protéinoénergétique Apparence rosée ; lisse, sans œdème ni lésions Glossite (irritée, rouge vif) Vitamines B6 et B12, folacine, niacine, riboavine, pyridoxine, fer Pâle Vitamine B12, fer, biotine Atrophie des papilles linguales Vitamine B12, niacine, folacine, riboavine, fer Fissure, œdème Niacine Couleur magenta/pourpre Riboavine, biotine Langue Gencives De rougeâtre à rosée, fermes, sans œdème ni saignement Gonées et saignantes Vitamine C Ongles Souples, rosés Cassants, striés ou de forme concave (koïlonychie) Fer, chrome Ongles en coquille d’œuf Vitamine A Lignes de Muehrcke (deux arcs blancs parallèles à la lunule) Protéines Lunule bleutée Excès de cuivre Maintien postural droit, aucune malformation, bon tonus musculaire, peut marcher ou courir sans douleur Ostéomalacie Vitamine D, calcium Rachitisme Vitamine D Atrophie musculaire Malnutrition protéinoénergétique Réflexes normaux, affect normal Paresthésie périphérique Vitamines B 6 et B12, thiamine, biotine, acide panthoténique Convulsions Vitamine B6, cuivre, manganèse Irritabilité ou confusion Vitamine B12,, thiamine, niacine, malnutrition protéinoénergétique Système musculosquelettique Système neurologique 11 Sources : Isselbacher, Braunwald, Wilson et collab. (1995) ; Lugate, Pitre, Houde-Nadeau et collab. (1996) ; McDonald (1994) ; Stallings et Fung (1998) 11.4.2 Examen physique OBSERVATIONS NORMALES ANOMALIES MESURES ANTHROPOMÉTRIQUES L’anthropométrie est la mesure et l’évaluation de la croissance, du développement et de la composition du corps. Les données les plus couramment utilisées sont les mesures anthropométriques de la taille, du poids, du pli cutané tricipital, la largeur du coude, la circonférence du bras et de la tête 9 . La FIGURE 11.3 fournit un exemple de courbe de croissance. Mesures du poids La mesure de la masse corporelle est une donnée qui permet de recueillir de l’information sur la variation pondérale de la personne. Cette dernière peut être liée à un apport énergét