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(Soins infirmiers) Carolyn Jarvis, Eric Lavertu - L'examen clinique et l'évaluation de la santé-Chenelière Education (2015)

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SOINS
INFIRMIERS
L’EXAMEN CLINIQUE
ET L’ÉVALUATION DE LA SANTÉ
2e édition
CAROLYN JARVIS
ÉDITION FRANÇAISE
DIRECTION SCIENTIFIQUE
Claire Chapados
DIRECTION PÉDAGOGIQUE
Éric Lavertu
SOINS
INFIRMIERS
L’EXAMEN CLINIQUE
ET L’ÉVALUATION DE LA SANTÉ
2e édition
CAROLYN JARVIS, PHD, APN, CNP
Professeure agrégée adjointe de soins inrmiers
School of Nursing, Illinois Wesleyan University, Bloomington, Illinois
Inrmière praticienne de famille
Bloomington, Illinois
ÉDITION FRANÇAISE
DIRECTION SCIENTIFIQUE
Claire Chapados, inf., Ph. D.
Professeure titulaire
Faculté des sciences inrmières, Université de Montréal
DIRECTION PÉDAGOGIQUE
Éric Lavertu, inf., M. Éd.
Professeur
Département de soins inrmiers, Cégep de Sainte-Foy
Sources iconographiques de la couverture
L’examen clinique et l’évaluation de la santé
2e édition
Traduction et adaptation de : Physical Examination & Health Assessment,
7th Edition, Carolyn Jarvis © 2015 Saunders, une marque d’Elsevier Inc.
(ISBN 978-1-4377-0151-7)
Copyright © 2016 by Elsevier Inc. All rights reserved.
Copyright © 2012, 2008, 2004, 2000, 1996, 1993 by Saunders,
an affiliate of Elsevier Inc. All rights reserved.
Copyright © 2016 par Elsevier Inc. Tous droits réservés.
Copyright © 2012, 2008, 2004, 2000, 1996, 1993 par Saunders,
une division d’Elsevier Inc. Tous droits réservés.
This edition of Physical Examination and Health Assessment 7th by
Carolyn Jarvis, Ph.D., APN, CNP is published by arrangement with
Elsevier Inc.
© 2015 TC Média Livres Inc.
© 2009 Chenelière Éducation inc.
Conception éditoriale: Dominique Hovington et André Vandal
Édition : Nancy Lachance et Corine Archambault
Coordination : Johanne Lessard et Mélanie Nadeau
Traduction partielle pour la 2 e édition : Geneviève Ross
Révision linguistique: Anne-Marie Trudel
Correction d’épreuves: Zérofôte
Adaptation de la conception graphique originale: Christian Campana
Conception de la couverture : Josée Brunelle
Impression : TC Imprimeries Transcontinental
Illustrations originales : Pat Thomas
Photographies d’évaluation : Kevin Strandberg
Rédaction des activités interactives : Isabelle Harnois, inf.,
Karine Lampron, inf., Karine Chantal, inf.
Coordination du matériel complémentaire Web : Marie-Michèle Martel
Catalogage avant publication
de Bibliothèque et Archives nationales du Québec
et Bibliothèque et Archives Canada
Jarvis, Carolyn
Physical examination & Health Assessment. Extraits. Français.
L’examen clinique et l’évaluation de la santé
2e édition
Traduction partielle de la 7e édition américaine de : Physical Examination
& Health Assessment.
Comprend des références bibliographiques et un index.
ISBN 978-2-7650-4844-2
1. Diagnostics cliniques – Guides, manuels, etc. 2. Diagnostics
infirmiers – Guides, manuels, etc. i. Titre : Physical Examination & Health
Assessment. Extraits. Français.
RC76.J3714 2015
616.07’54
C2014-942734-4
TOUS DROITS RÉSERVÉS.
Toute reproduction du présent ouvrage, en totalité ou en partie,
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contrefaçon pouvant donner lieu à une poursuite en justice
contre l’individu ou l’établissement qui effectue la reproduction
non autorisée.
Dépôt légal : 2 trimestre 2015
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
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Imprimé au Canada
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Dans cet ouvrage, le féminin est utilisé comme représentant des deux sexes, sans discrimination à l’égard
des hommes et des femmes, et dans le seul but d’alléger le texte.
Des marques de commerce sont mentionnées ou illustrées dans cet ouvrage. L’Éditeur tient à préciser qu’il
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La pharmacologie évolue continuellement. La recherche
et le développement produisent des traitements et
des pharmacothérapies qui perfectionnent constamment la médecine et ses applications. Nous présentons au lecteur le contenu du présent ouvrage à titre
informatif uniquement. Il ne saurait constituer un avis
médical. Il incombe au médecin traitant et non à cet
ouvrage de déterminer la posologie et le traitement
appropriés de chaque patient en particulier. Nous
recommandons également de lire attentivement la
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la posologie recommandée, la méthode et la durée
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Les cas présentés dans les mises en situation de cet
ouvrage sont fictifs. Toute ressemblance avec des
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pure coïncidence.
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adaptateurs et leurs collaborateurs se dégagent de
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à des fins d’enseignement uniquement.
L’achat en ligne est réservé aux résidants du Canada.
ISBN 978-2-7650-4844-2
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Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition
de livres – Gestion SODEC.
AVANT-PROPOS
Toute inrmière, peu importe la formation reçue – à l’hôpital, au cégep ou à l’université –, détient déjà
les notions de base nécessaires à l’examen clinique puisqu’elle a appris à faire intervenir ses sens : la
vue (observer les sécrétions du client, la coloration de sa peau), le toucher (vérier la température de la
peau), l’ouïe (écouter les bruits pulmonaires comme le wheezing en situation d’asthme) et l’odorat (détec­
ter l’odeur de l’alcool, d’un parfum). Toutefois, lorsque l’inrmière effectue l’examen physique, elle doit
procéder à une inspection plus approfondie ; elle apprendra ainsi à observer la posture du client, sa
stature, ses mouvements, la morphologie des lésions cutanées, par exemple, ainsi que la localisation des
anomalies, les bruits et son état nutritionnel. En cours de formation, l’étudiante apprendra à effectuer
d’autres examens tels que la palpation, la percussion et l’auscultation, qui demandent l’utilisation de
matériel et d’instruments particuliers qu’elle doit manier correctement.
L’efcacité de l’examen physique dépend de l’expérience de l’inrmière. Je ne crois pas qu’une formation
écourtée permette à un professionnel de la santé d’effectuer un examen physique adéquat. Comme je le
répète aux étudiantes, c’est par la pratique que l’on développe ses compétences. Il est évident que l’in­
rmière d’expérience ou l’inrmière praticienne spécialisée (IPS) établit ses constats d’évaluation plus
rapidement que l’inrmière qui commence sa pratique.
Cet ouvrage constitue une référence essentielle visant à former les étudiantes inrmières de niveau col­
légial et universitaire sur l’évaluation de la santé, mais aussi à habiliter les professionnels de la santé
(p. ex., les médecins, les inrmières, les physiothérapeutes, le personnel paramédical) à développer et à
rafner leurs compétences cliniques. Cette deuxième édition française est un ouvrage scientique actuel,
complet. Une démarche systématique de la tête aux pieds, pratique et logique, y est décrite.
Au l des éditions anglaises antérieures, Carolyn Jarvis a obtenu une réponse très positive des utilisateurs
de son ouvrage comme outil d’apprentissage, et elle leur en est très reconnaissante. Elle considère ce
geste comme un signe d’encouragement et demeure ouverte aux suggestions des lecteurs. Voilà pourquoi
elle a permis l’adaptation de son ouvrage en langue française. Cette version concorde avec la réalité
clinique et met l’accent sur l’acquisition des connaissances, le développement et le maintien des com­
pétences et des habiletés des étudiantes et des professionnels du domaine de la santé.
L’importance de former les étudiantes à l’examen clinique
Au Québec, le cours portant sur l’examen clinique (ou désigné autrement) et qui comprend l’histoire de
santé et l’examen physique est donné depuis plusieurs années dans divers programmes d’enseignement
tant au niveau collégial qu’universitaire. Même si l’inrmière effectue déjà l’examen physique, la moder­
nisation de la Loi sur les inrmières et les inrmiers (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec
[OIIQ], 2003) reconnaît clairement l’expertise et le rôle central de l’inrmière en matière de jugement
clinique et de prise de décision pour répondre aux besoins grandissants des clientèles. L’évaluation de
l’état physique et mental des personnes symptomatiques et de leur environnement social et physique
devient l’assise de l’exercice. Les inrmières peuvent établir un ordre de priorité des divers problèmes
pour intervenir en conséquence. Par l’utilisation des différentes méthodes d’évaluation de la santé, les
inrmières contribuent de façon efcace aux soins de santé, ce qui leur permet d’exercer leur leadership.
Il est connu que l’élargissement du rôle de l’inrmière génère plus de satisfaction au travail et que la
collaboration entre l’inrmière et le médecin améliore le travail d’équipe et la communication interpro­
fessionnelle (Brogan, 1969).
Je donne cette formation universitaire depuis maintenant 20 ans et j’ai recueilli plusieurs témoignages
d’étudiantes disant qu’elles s’inscrivent à ce cours soit parce qu’il est obligatoire dans leur programme,
soit parce qu’elles désirent en apprendre davantage sur le sujet. Tous les professionnels de la santé qui
reçoivent une formation sur l’examen clinique doivent poursuivre l’intégration des connaissances et des
compétences apprises. Pour être à l’aise avec les différentes méthodes d’évaluation de la santé, il est
nécessaire de les mettre en pratique régulièrement an de développer et de maintenir ses compétences
cliniques. C’est par l’expérience que s’acquièrent la compétence et le développement d’habiletés. Dans
une étude de Chapados (2013), des IPS révèlent que « la pratique au quotidien améliore leurs
III
compétences » (p. 28). Il en est de même pour l’étudiante qui effectue, pour la première fois, un prélèvement sanguin. Il lui faudra en faire à plusieurs reprises avant de devenir expérimentée.
Par exemple, si l’inrmière est en présence d’un client qui souffre d’une douleur particulière, elle doit
être capable d’évaluer les types de douleur, de reconnaître les signes cliniques typiques des principales
causes de cette douleur et d’établir les priorités pour ainsi assurer la sécurité du client. Elle doit évaluer
et stabiliser le client ; elle procède aussi à la collecte de données sur l’histoire de santé en tentant de
déterminer ce qui provoque (ou soulage) la douleur, d’établir la qualité de celle-ci et elle interroge le
client sur la région, les signes et symptômes associés, la durée de la douleur et sa signication pour lui
à l’aide de l’outil mnémotechnique PQRSTU décrit dans chapitre 4 et utilisé dans la plupart des chapitres
de l’ouvrage. Des symptômes et des signes extrêmement discrets peuvent annoncer les événements les
plus catastrophiques. Il est donc très important d’effectuer une histoire de santé et un examen physique
méticuleux et détaillés. Le faciès, la position du client et son rythme respiratoire sont des facteurs importants à considérer. C’est pourquoi l’examen physique doit être réalisé méthodiquement, consciencieusement et être adapté à l’âge du client en prenant en considération son degré de confort et sa pudeur.
L’inrmière doit aussi connaître ses propres limites et consulter un autre professionnel si nécessaire.
En donnant ce cours, j’ai souvent observé que les étudiantes sont plus préoccupées par l’examen physique
que par l’histoire de santé du client. Pourtant, il est prouvé que celle-ci est essentielle pour procéder à
une évaluation efcace de la condition de la personne. Selon Epstein, Perkin, de Bono et leur collaborateur (1994), des études ont mentionné que, dans plus de 80 % des situations, les diagnostics posés dans
une clinique se sont fondés sur l’histoire de santé. Recueillir une histoire de santé, c’est obtenir des
données subjectives et c’est prendre en compte tous les événements signiants dans la vie du client, y
compris son histoire de maladie actuelle, ses antécédents personnels et de maladie, son histoire familiale
et psychosociale. Pour Braunwald et ses collaborateurs (2002), « l’entrevue est bien plus qu’un recueil
de données » (p. 2). Elle permet aussi de documenter les différentes activités du client pour en comprendre
la situation. La façon de conduire une histoire de santé détermine la qualité des éléments d’information
utiles pour faire connaître ses conclusions (Epstein et collab., 1994).
Dans le contexte d’une pratique inrmière avancée, l’IPS peut prescrire des médicaments et d’autres
substances, des examens paracliniques, des traitements médicaux et des techniques effractives. Toutefois,
elle doit se conformer aux règles d’utilisation des médicaments approuvés par le conseil d’administration
de l’établissement, ou aux règles de soins médicaux en vigueur dans l’établissement, ou aux règles d’utilisation des ressources approuvées par le conseil d’administration (OIIQ – Collège des médecins du
Québec [CMQ], 2006).
En conclusion, toute inrmière qui détient les connaissances et les compétences requises peut effectuer
l’évaluation de la santé d’une personne. Une évaluation adéquate de la santé repose aussi sur une bonne
connaissance des notions d’anatomie, de physiologie, de pathologie et de pharmacologie. L’inrmière doit
aussi démontrer des aptitudes pour établir une relation avec le client et ainsi mener une entrevue de
manière efcace pour recueillir le plus de renseignements possible. Puisqu’elles ont obtenu une reconnaissance accrue de leur rôle, il est nécessaire que les inrmières demeurent à la ne pointe du savoir.
Elles doivent aussi recevoir l’appui de leurs collègues et des instances administratives du milieu clinique
pour soutenir leur apprentissage. L’inrmière ne doit pas se sentir mal à l’aise lorsqu’elle évalue l’état
de santé d’une personne puisque cela fait partie de ses fonctions. Avec la reconnaissance de cette activité,
il reste à souhaiter que l’inrmière effectue l’évaluation de la santé de façon continue. Il s’agit d’une
valeur ajoutée à la pratique professionnelle. Dans une autre étude effectuée par Chapados, Larue, Pharand
et leurs collaborateurs (2011), la majorité des inrmières participantes indique que l’examen clinique
est une activité qui les valorise, les motive et qui s’avère propice au développement et au maintien d’une
relation de conance avec le client.
Dans toutes les étapes de traduction et d’adaptation de la septième édition de l’ouvrage de Jarvis, des
efforts ont été déployés pour produire un document lisible, informatif, pratique, instructif et essentiel.
Les commentaires et les suggestions de chaque adaptateur ont été importants pour la réalisation de cette
nouvelle édition française, et ils seront toujours appréciés en vue des éditions ultérieures.
Claire Chapados
IV
Avant-propos | Remerciements
RÉFÉRENCES
Braunwald, E., et collab. (2002). Principes de médecine interne. Paris : Médecine-Sciences Flammarion.
Brogan, M.M. (1969). Training and retraining of nurses in routine physical examinations. Bull N York
Acad Med, 45(12), 1353-1356.
Chapados, C. (2013). L’évaluation de la santé par les inrmières praticiennes spécialisées : Des IPS
témoignent. Perspective inrmière, 10(3), 26-30.
Chapados, C., Larue, C., Pharand, D., et collab. (2011). L’inrmière et l’évaluation de la santé. Où en
sommes-nous ? Perspective inrmière, 8(5), 18-22.
Epstein, O., Perkin, G.D., de Bono, D.P., et collab. (1994). Examen clinique. Louvain-la-Neuve, Belgique :
DeBoeck Université.
Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) (2003). Guide d’application de la nouvelle Loi sur
les inrmières et inrmiers et la Loi modiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives
dans le domaine de la santé. Montréal : OIIQ.
Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) – Collège des médecins du Québec (CMQ) (2006).
Étendue des activités médicales exercées par l’inrmière praticienne spécialisée en cardiologie et en
néphrologie. Montréal : OIIQ et CMQ.
REMERCIEMENTS
L’éditeur tient à remercier chaleureusement l’équipe d’adaptation qui a mis sa rigueur, son temps et son
savoir au prot de cette nouvelle édition.
Nous tenons particulièrement à souligner l’implication de Claire Chapados à la direction scientique et
d’Éric Lavertu à la direction pédagogique. Leur travail rigoureux et leurs critiques avisées ont largement
contribué à la production d’un ouvrage basé sur des données scientiques probantes et qui reète bien
la réalité clinique d’ici.
Nos remerciements vont également à Isabelle Harnois, Karine Lampron et Karine Chantal pour la rédaction des activités interactives qui accompagnent le manuel.
Enn, la production d’un ouvrage de cette importance ne serait pas possible sans une équipe d’éditrices,
de chargées de projet et de révision-correction déterminée et attentive aux moindres détails qui font un
ouvrage de qualité.
À toutes et à tous : merci !
Avant-propos | Remerciements
V
AU SUJET DE L’AUTEURE
Carolyn Jars a obtenu un BSN avec distinction de l’Université de l’Iowa, un MSN de l’Université Loyola à Chicago
et un PhD de l’Université de l’Illinois à Chicago ; ses travaux de recherche ont porté sur l’effet physiologique de l’alcool
sur le système cardiovasculaire. Elle a enseigné l’évaluation physique et les soins inrmiers intensifs à l’Université Rush
à Chicago, à l’Université du Missouri à Columbia et à l’Université de l’Illinois à Urbana ainsi que l’évaluation physique,
la pharmacologie et la physiopathologie à l’Université Wesleyenne de l’Illinois à Bloomington.
La Dre Jarvis a reçu le Superior Teaching Award de l’Université du Missouri, a enseigné l’évaluation physique à des
milliers d’étudiantes au baccalauréat et d’étudiantes diplômées ainsi qu’à des professionnelles des soins inrmiers ;
elle a donné 150 séminaires de formation continue et est l’auteure de nombreux articles et manuels. Elle a œuvré en
pratique avancée, d’abord comme spécialiste clinique du système cardiovasculaire dans divers établissements de soins
intensifs, puis comme inrmière praticienne de famille certiée en soins primaires. Elle est professeure associée à l’Université Wesleyenne de l’Illinois, inrmière praticienne à Bloomington, en Illinois, où elle détient une licence d’inrmière
praticienne avancée. Au cours des huit dernières années, elle s’est consacrée avec enthousiasme à l’apprentissage de
l’espagnol an de prodiguer des soins au Guatemala. Elle a aussi contribué à l’élaboration d’un programme d’enseignement pour les étudiants de l’Université Wesleyenne offert tant au campus de l’Illinois qu’à celui de Barcelone (Espagne).
vi
ÉQUIPE DE RÉDACTION
ÉQUIPE DE L’ÉDITION FRANÇAISE
Direction scientique
Claire Chapados, inf., Ph. D.
Claire Chapados est professeure titulaire à la Faculté des sciences
inrmières de l’Université de Montréal.
Elle a entrepris sa formation inrmière au Cégep de Jonquière,
a poursuivi ses études et a obtenu un baccalauréat en sciences
inrmières (1985) ainsi qu’une maîtrise en sciences inrmières
(1990) de l’Université de Montréal, un doctorat en psychopédagogie (1997) de l’Université Laval et a terminé une formation
postdoctorale de deux ans au Département de médecine sociale
et préventive à la Faculté de médecine (2002) de l’Université de
Montréal. Elle a acquis une expérience clinique de plus de 10 ans
dans divers domaines spécialisés et ultraspécialisés ainsi qu’en
administration. Ses champs d’intérêt d’enseignement et de
recherche sont liés aux maladies chroniques, dont l’insufsance
rénale, les malformations congénitales, l’évaluation de la santé
et le raisonnement clinique. Depuis 1995, elle enseigne l’examen
clinique et porte une attention particulière à l’acquisition d’habiletés chez les étudiantes leur permettant d’effectuer l’examen
physique de façon adéquate.
Direction pédagogique
Éric Lavertu, inf., M. Éd.
Éric Lavertu a amorcé sa carrière comme inrmier à l’Hôpital SaintSacrement et à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie
de Québec. Depuis 2001, il enseigne les soins inrmiers au Cégep de
Sainte-Foy.
Professeur engagé, il s’intéresse au développement du jugement clinique des étudiantes et en a fait le thème de sa maîtrise
en proposant un outil pour évaluer la pensée critique chez les
étudiantes au cours des stages en milieu clinique. En plus de
collaborer à l’adaptation de différents manuels en soins inrmiers,
il a offert des formations sur mesure aux professeures en soins
inrmiers de divers cégeps : notamment sur la planication et la
préparation de cours, le plan thérapeutique inrmier, l’évaluation
et la correction des travaux en stage ainsi que la conception d’activités d’évaluation. Enn, il participe actuellement à la mise en
place d’un centre de simulation qui servira à la formation des
étudiantes de tous les programmes de la santé au Cégep de
Sainte-Foy.
une maîtrise en éducation de l’Université du Québec en Outaouais
ainsi qu’un diplôme d’études supérieures spécialisées en andragogie. Elle a pratiqué comme infirmière à l’Hôpital
Maisonneuve-Rosemont.
Elle a participé à la révision des lignes directrices des pratiques
cliniques sur la dépression postpartum. De plus, elle a contribué
à la rédaction du manuel d’accompagnement du lm L’évaluation
physique et psychosociale en post-partum ainsi qu’à la révision
du document cinématographique.
Elle a mis sur pied le Centre d’innovation en enseignement et
en simulation de la pratique inrmière (CIESPI) de l’Université
d’Ottawa. Elle est toujours membre du comité de recherche sur
les soins palliatifs à l’École des sciences inrmières de l’Université d’Ottawa.
Rose Arsenault, diplômée en sciences inrmières, certicat en
ophtalmologie
Inrmière en ophtalmologie de 1970 à 2014, Rose Arseneault en
a touché tous les aspects : unité de soins, clinique et salle d’opération au Centre hospitalier de l’Université Laval, à la Clinique
d’ophtalmologie de la Cité et au Centre oculaire de Québec. Elle
a développé une expertise en rétine et en basse vision.
Spécialisée en ophtalmologie, elle s’est grandement impliquée
dans l’enseignement tout au long de sa carrière : formation sur
mesure pour les inrmières en ophtalmologie du Québec et du
Nouveau-Brunswick, cours à des opticiens d’ordonnances, à des
inrmières œuvrant auprès des diabétiques et en dispensaires
autochtones. Elle a aussi enseigné les soins de première ligne
dans les dispensaires de la Basse-Côte-Nord, de la baie d’Hudson
et de La Dominique (Caraïbes).
Jean-Luc Beaumont, inf., B. Sc. éd., spécialisé en soins inrmiers
cardiovasculaires et respiratoires
Jean-Luc Beaumont est inrmier clinicien spécialisé en soins
inrmiers cardiovasculaires et respiratoires. Il est consultant et
chargé de cours pour divers établissements hospitaliers et universitaires canadiens ainsi que pour des organismes de santé
francophones européens. Il est également l’auteur des ouvrages
Les arythmies cardiaques, un guide clinique et thérapeutique,
Lecture progressive de l’ECG et L’examen clinique cardiovasculaire et respiratoire.
Anne Charron, inf., Ph. D.
Diane Alain, inf., M. Éd., DESS en andragogie
Anne Charron est professeure titulaire et chercheuse au Secteur
sciences inrmières de l’Université de Moncton, campus d’Edmundston. Elle détient une maîtrise en sciences inrmières et un
doctorat en éducation de l’Université de Montréal.
Diane Alain est diplômée de l’Université de Montréal en sciences
inrmières et enseigne à La Cité collégiale, à Ottawa. Elle détient
Ses domaines d’intérêt et d’expertise gravitent autour des problématiques de santé mentale de l’adulte, en particulier de la femme,
Adaptation
VII
les besoins d’apprentissage de l’adulte malade et l’éducation à la
santé, l’évaluation physique, psychosociale et psychiatrique, de
même que les concepts de stress, de coping, de chronicité et
de qualité de vie. Elle participe à plusieurs projets de recherche
interdisciplinaire.
de l’approche gériatrique dans les processus interdisciplinaires ;
la reconnaissance de la gériatrie comme spécialité en soutien à
domicile et en hébergement ; le deuil et l’accompagnement des
proches aidants de personnes en perte d’autonomie.
Alain Huot, inf., Ph. D. Éd.
Luc Cormier, I.A., B. Sc. inf.
Luc Cormier travaille à titre d’inrmier autorisé au programme
Oasis du Centre de santé communautaire Côte-de-Sable
à Ottawa. Il travaille principalement auprès de personnes
atteintes du virus de l’immunodécience humaine ou de l’hépatite C, des personnes sans-abri ou aux prises avec un problème
de santé mentale, dont les troubles liés à l’utilisation de substances. Dans le cadre de sa maîtrise en sciences inrmières à
l’Université d’Ottawa, ses travaux se rapportent à la réduction
des méfaits et à la prévention des surdoses d’opioïdes par l’entremise d’un programme d’éducation et de distribution de la
naloxone.
Tina Émond, inf., M. Sc.
Tina Émond est chargée d’enseignement clinique au Secteur
sciences inrmières de l’Université de Moncton, campus d’Edmundston. Elle est présentement étudiante au doctorat en
sciences inrmières à l’Université Laval. Ses domaines d’expertise sont la périnatalité, l’évaluation physique, le soin de l’adulte
ainsi que les bases théoriques en sciences inrmières.
Alain Huot est professeur en sciences de l’éducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Il est titulaire d’un doctorat en
éducation de l’Université du Québec à Montréal et détient également une maîtrise en éducation de l’Université du Québec à
Rimouski. Ses domaines d’intérêt touchent principalement
la santé au travail, la gestion et la supervision de personnel de
même que la multidisciplinarité de la recherche en santéenseignement-gestion.
Manon Lacroix, inf., M. Sc., IPSPL
Manon Lacroix est inrmière praticienne de première ligne et
détient un baccalauréat de l’Université du Québec en AbitibiTémiscamingue (UQAT) ainsi qu’une maîtrise en sciences inrmières, option inrmière praticienne en soins de santé primaires
de l’Université d’Ottawa. Au cours des 17 dernières années, elle
a exercé en santé au travail et majoritairement en CLSC.
Professeure à mi-temps depuis 2003 en sciences inrmières à
l’UQAT, ses domaines d’intérêt sont les soins de première ligne
et la santé communautaire. Elle pratique depuis 2003 à titre d’inrmière praticienne spécialisée dans un centre de santé communautaire dans le Nord-Est ontarien.
Lyne Fecteau, inf., M. Sc.
Lyne Fecteau est professeure agrégée et directrice du Département
des sciences de la santé de l’Université du Québec en AbitibiTémiscamingue. Elle est responsable des cours de physiopathologie, d’examen clinique I et d’examen clinique II offerts au
baccalauréat en sciences inrmières. Ses intérêts de recherche
portent principalement sur le développement du raisonnement
clinique et l’encadrement de la formation pratique.
Céline Pelletier, Ph. D., professeure retraitée en sciences
inrmières
Céline Pelletier détient un doctorat interdisciplinaire en sciences
humaines appliquées de l’Université de Montréal. La santé communautaire, la maltraitance familiale – et particulièrement la
négligence infantile –, l’évaluation et l’intervention en milieu
familial et communautaire constituent ses principaux champs de
recherche.
Raphaèle Ferland-Verry, Dt. P.
Raphaèle Ferland-Verry est diététiste-nutritionniste clinicienne
diplômée de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal
où elle a également terminé un microprogramme de 2 e cycle en
nutrition clinique. Elle exerce principalement dans le milieu hospitalier ainsi qu’à sa clinique privée. Ses champs de pratique sont
la neurologie, la lésion médullaire, la santé mentale, l’hépatologie
et la santé gastro-intestinale.
Bruno Pilote, inf., M. Sc.
Bruno Pilote est professeur au Cégep de Sainte-Foy depuis plus
de 15 ans. Il possède une vaste expérience en soins critiques et en
soins de première ligne. De plus, il détient une maîtrise en médecine expérimentale et il poursuit actuellement ses études doctorales en sciences inrmières à l’Université Laval. Son domaine
d’expertise concerne les interventions en matière d’éducation pour
la santé liées à la problématique de l’hypertension artérielle.
Danielle Gervais, inf., Bc. Sc. inf., DESS en santé communautaire,
MAP
Nathalie Raymond, inf., B. Sc.
Chef d’unité au programme d’hébergement pour évaluation
(PHPE) et des activités professionnelles de réadaptation en hébergement de longue durée, Danielle Gervais possède une vaste
expérience comme chef d’unité en gériatrie active, en unité de
courte durée gériatrique (UCDG) et en hébergement, ainsi qu’en
tant que conseillère en soins inrmiers. Son principal domaine
d’expertise est la gestion clinique et la gériatrie. Ses intérêts professionnels sont le développement du rôle autonome inrmier et
Détentrice d’un baccalauréat et d’un diplôme de deuxième cycle
en sciences inrmières, Nathalie Raymond termine présentement
sa maîtrise dans le même domaine. Elle a travaillé dans différents
milieux (urgences, milieu carcéral, Forces armées canadiennes).
Elle s’est aussi consacrée à la pédagogie comme levier de changement des pratiques. Elle a enseigné à titre d’inrmière clinicienne au collégial et agit maintenant comme chargée de cours
en évaluation clinique à l’université.
VIII
Équipe de rédaction
Émilie Paul-Savoie, Ph. D. (c)
Chargée de cours à l’Université de Sherbrooke et à l’Université
du Québec en Outaouais, Émilie Paul-Savoie termine actuellement son doctorat à l’Université de Sherbrooke où elle s’est intéressée au rôle de l’empathie et de la santé mentale du soignant
dans la prise en charge de la douleur chronique. Elle est également l’auteure de plusieurs articles scientiques. Son expertise
concerne principalement la neurophysiologie et l’évaluation de
la douleur, la pharmacologie et l’épidémiologie.
Pauline Roy, M. A., DESS Sc. inf.
Pauline Roy a fait des études de deuxième cycle à l’Université
Laval en technologie de l’enseignement (sujet : l’utilisation de la
programmation télévisuelle au collégial : l’examen physique du
nouveau-né à terme), puis à l’Université de Sherbrooke (sujet : la
formation à distance en sciences inrmières). Elle a ensuite
obtenu un diplôme de deuxième cycle en sciences inrmières à
l’Université Laval. Elle est actuellement chargée de cours à l’Université du Québec à Rimouski et elle a aussi enseigné au Cégep
Lévis-Lauzon. La périnatalité est son principal champ
d’expertise.
Pierre Verret, inf., M. Sc., CSIO (c)
Pierre Verret détient une maîtrise en sciences inrmières et une formation spécialisée en oncologie. Chargé d’enseignement à l’Université Laval, il est responsable de la formation sur l’examen clinique et
coordonne les cours biomédicaux du programme IPSPL. Il enseigne
également l’examen clinique à l’École des hautes études en santé
publique (ESHEP) de France et collabore à l’intégration de l’examen
clinique inrmier au Centre Universitaire de Genève (Suisse).
ÉQUIPE DE CONSULTATION
• Claire Blais, Université du Québec à Trois-Rivières
• Alain Huot, Université du Québec à Rimouski
• Tina Émond, Université de Moncton, campus d’Edmundston
• Stéphan Lavoie, Université de Sherbrooke
• Salomon Fotsing, Université du Québec en Outaouais
• Nephtalie Maignan, Université de Montréal
• Christelle Goulet D’Onofrio, Université du Québec à TroisRivières, Université du Québec en Outaouais – Pavillon de
Saint-Jérôme, CSSS Drummond
• Danielle Poirier, Université du Québec à Chicoutimi
• Isabelle Harnois, Cégep régional de Lanaudière à Joliette
• Cathy Ross, Cégep de Lévis-Lauzon
• Pierre Verret, Université Laval
Équipe de rédaction
IX
ÉQUIPE DE L’ÉDITION ORIGINALE
SUSAN CAPLAN, PhD, MSN, APRN-BC
Collaboratrice au chapitre 2 (Compétence culturelle : les soins selon la
culture) et au contenu culturel du chapitre 7 (Évaluation de la violence
familiale), elle est professeure adjointe et directrice de la spécialité inrmière praticienne familiale à l’Université Rutgers. Elle détient un doctorat en sciences inrmières de l’Université Yale. Elle compte à son actif
de nombreuses publications et conférences sur la compétence culturelle
au sein des professions de soins de santé.
MARTHA DRIESSNACK, PhD, PNP-BC
Collaboratrice au contenu sur la promotion de la santé, elle est professeure adjointe à l’École des sciences inrmières de l’Oregon Health &
Science University. Détentrice d’un doctorat de l’Université de la santé
et des sciences de l’Oregon, elle a réalisé un stage postdoctoral en
génétique clinique. Son objectif principal est d’être à l’écoute constante
des besoins des enfants dans les décisions liées aux soins de santé les
concernant.
ANN ECKHARDT, PhD, RN
Collaboratrice aux chapitres 1 (Évaluation et jugement clinique), 3 (Entrevue) et 9 (Questionnaire général, mesure des signes vitaux) ainsi qu’au
contenu sur les dossiers de santé électroniques du chapitre 28 (Réévaluation de l’adulte hospitalisé), elle est professeure adjointe à l’École des
sciences inrmières de l’Université Wesleyenne en Illinois. Détentrice
d’un doctorat de l’Université de l’Illinois à Chicago, elle compte
plus d’une décennie d’expérience clinique en soins critiques et en leadership dans la profession inrmière. Ses travaux de recherche portent sur
la symptomatologie des maladies du cœur.
CARLA GRAF, PhD, RN, CNS-BC
Collaboratrice au chapitre 30 (Évaluation fonctionnelle de la personne
âgée), elle est inrmière clinicienne spécialisée en gériatrie à l’École des
sciences inrmières de l’Université de la Californie, à San Francisco. Elle
est actuellement gestionnaire des innovations en matière de transition
dans les soins au Centre médical de l’Université de la Californie, à San
Francisco.
AMANDA F. HOPKINS, PHD, RN
Collaboratrice aux études de cas pédiatriques présentés dans les chapitres
portant sur les différents systèmes physiologiques, elle est professeure
adjointe à l’École des sciences inrmières de l’Université Wesleyenne
en Illinois. Elle se spécialise en soins de santé pédiatriques et en sensibilisation transculturelle.
X
SARAH JARVIS, BSN, RN, DNPc
Collaboratrice au chapitre 10 (Évaluation de la douleur : autre signe
vital), elle est inrmière en hémato-oncologie à la University of Michigan
Health System, à Ann Arbor (Michigan). Elle compte sept années d’expérience dans le domaine de la prise en charge de la douleur liée au cancer. Elle est également doctorante à l’Université de Wayne State, à Détroit
(Michigan).
JOYCE K. KEITHLEY, DNSc, RN, FAAN
Collaboratrice au chapitre 11 (Évaluation nutritionnelle), elle est professeure au département de soins inrmiers aux adultes du Collège de Nursing de l’Université Rush et du Centre médical de l’Université Rush, à
Chicago. Ayant travaillé autant en milieu clinique que pédagogique, elle
est une praticienne, enseignante, chercheuse et auteure chevronnée et
réputée dans le domaine de la nutrition clinique.
KELSEY MERL, MSN, MPH, PNP-C
Collaboratrice au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale), elle est
inrmière praticienne en pédiatrie dans l’équipe de traumatologie chirurgicale de l’Hôpital pour enfants UCSF Benioff, à Oakland. Au sein de
l’équipe du centre médicolégal pour la protection des enfants de l’hôpital, elle travaille auprès des enfants qui sont des victimes possibles de
violence et de négligence. Elle mène des recherches sur la violence familiale pour aider à assurer la sécurité des femmes et des étudiants au
collégial dans leurs relations.
SHAWNA S. MUDD, DNP, PNP-BC, CPNP-AC
Cette collaboratrice au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale)
est inrmière praticienne en pédiatrie au service d’urgence pédiatrique
de l’Hôpital Johns Hopkins à Baltimore. Elle est aussi membre auxiliaire
du corps professoral de cet hôpital.
DANIEL J. SHERIDAN, PhD, RN, FAAN
Collaborateur au chapitre 7 (Évaluation de la violence familiale), il est
professeur agrégé à la Goldfarb School of Nursing. Il est également professeur associé à l’École des Sciences inrmières et d’obstétrique de
l’Université Flinders à Adélaïde en Afrique du Sud. Daniel J. Sheridan
travaille depuis près de 30 ans avec des personnes ayant subi de la violence familiale et des agressions sexuelles.
CARACTÉRISTIQUES DU MANUEL
OUVERTURE DE CHAPITRE
Mots clés
Les mots clés résument les principales notions ou concepts
de base à assimiler dans le chapitre.
Objectifs d’apprentissage
Les objectifs d’apprentissage mettent en évidence les principales connaissances et compétences que l’étudiante acquerra
en étudiant le chapitre.
FERMETURE DE CHAPITRE
Que retenez-vous ?
Cette section présente une série de questions d’objectivation
amenant l’étudiante à formuler ce qui lui a été utile pour porter
un jugement clinique.
DÉVELOPPEMENT DU JUGEMENT CLINIQUE
Dossier clinique
Chaque chapitre d’examen clinique commence par la présentation d’un dossier proposant un cas clinique réaliste. Le questionnement suscité par cet exemple prépare l’étudiante à comprendre la réalité de la pratique inrmière et à établir des liens
avec le contenu théorique présenté.
Questions de suivi
Des questions de suivi sont présentées en marge du chapitre et
permettent de faire le lien avec le dossier clinique au fur et à
mesure que l’étudiante assimile les connaissances.
XI
DIVISION EN CINQ PARTIES
ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE
Cette section présente la structure et la fonction de chacun des
systèmes corporels. Les notions théoriques essentielles à la
compréhension y sont expliquées.
DONNÉES SUBJECTIVES
Cette section présente un questionnaire d’évaluation sur l’histoire de santé en deux colonnes avec des questions et leurs
justications.
P
Q
R
S
T
U
Le questionnaire de santé est organisé selon la séquence PQRSTU
pour l’évaluation d’un symptôme. Des pastilles distinctives facilitent le repérage des divers éléments de la séquence.
DONNÉES OBJECTIVES
La présentation en deux colonnes facilite la reconnaissance des
observations anormales par rapport aux résultats normaux.
ANOMALIES ET ANOMALIES POUR UNE PRATIQUE
AVANCÉE
Ces sections décrivent et illustrent les principales anomalies
pouvant être rencontrées.
ÉVALUATION ET JUGEMENT CLINIQUE
Exemple de notes au dossier
Une section qui comprend un exemple d’évaluation ciblée.
Suite au dossier clinique
Cette section est la suite du
dossier présenté en début de
chapitre avec des questions
amenant l’étudiante à développer son jugement clinique.
Extrait de plan thérapeutique
inrmier
Selon le cas présenté,
un exemple de PTI est
contextualisé.
XII
Caractéristiques du manuel
AUTRES ÉLÉMENTS DISTINCTIFS
Particularités liées au développement
Ces sections mettent en évidence les particularités liées aux
différents stades du développement (nourrissons, enfants, adolescents, adultes, femmes enceintes, adultes vieillissants).
Particularités culturelles et génétiques
Ces sections mettent en évidence les particularités liées au bagage culturel et génétique qui peuvent guider l’inrmière dans
son évaluation du client.
Rubriques Promotion de la santé et Promotion de saines
habitudes de vie
Ces encadrés présentent les pratiques exemplaires en matière
de santé pour le système corporel étudié dans le chapitre. Son
contenu est utile à l’inrmière pour l’enseignement au client.
Termes en gras et mots dénis en marge
Les termes en gras sont dénis en marge pour faciliter la compréhension immédiate du texte.
Picto i+
Ce picto renvoie au contenu présenté sur la plateforme interactive de l’ouvrage.
Caractéristiques du manuel
XIII
TABLE DES MATIÈRES
PARTIE
1
Évaluation globale de la personne
CHAPITRE 1
Éaluation et jugement clinique
1.1 Évaluation : point de départ d’un processus continu . . . . . . . . . . . . 4
1.1.1 Raisonnement scientique et jugement clinique. . . . . . . . . . 4
1.1.2 Démarche de soins et jugement clinique. . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.1.3 Pensée critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.2 Assises de l’exercice de la profession inrmière au Québec . . . . . . 9
1.3 Évaluation fondée sur des résultats probants . . . . . . . . . . . . . . . . 10
1.4 Types de collecte de données selon l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4.1 Collecte de données en entrevue initiale (complète). . . . . . 12
1.4.2 Collecte de données en cours d’évolution (épisodique)
ou centrée sur un problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4.3 Collecte de données en situation de suivi . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4.4 Collecte de données en situation d’urgence . . . . . . . . . . . . 12
1.5 Élargissement du concept de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.6 Évaluation à toutes les étapes de la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.7 Évaluation dans la pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
CHAPITRE 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
2.1 Prol démographique canadien. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.2 Immigration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
2.3 Multiculturalisme et santé au Canada et au Québec. . . . . . . . . . . 19
2.3.1 Compétences linguistiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.3.2 Compétence culturelle et soins adaptés à la culture . . . . . 21
2.4 Héritage culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.4.1 Culture. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.4.2 Ethnicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.4.3 Religion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.4.4 Socialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.4.5 Orientation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.5 Évaluation de l’héritage culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
2.6 Croyances et coutumes liées à la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.7 Causes traditionnelles de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.7.1 Perspective biomédicale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.7.2 Perspective naturaliste. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.7.3 Perspective magicoreligieuse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.7.4 Guérison et culture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
2.8 Expression transculturelle de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
2.8.1 Expression transculturelle de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . 34
xIv
2.8.2 Syndrome lié à l’attachement culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.8.3 Culture et traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.8.4 Culture et prévalence de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
2.9 Étapes vers la compétence culturelle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
2.10 Soins inrmiers culturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
CHAPITRE 3
Entreue
3.1 Processus de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.1.1 Inrmière : l’aidante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.1.2 Client : l’aidé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.1.3 Facteurs internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.1.4 Facteurs externes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.2 Techniques de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.2.1 Début de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.2.2 Phase de travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.2.3 Objectifs et pièges de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
3.2.4 Communication non verbale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
3.2.5 Fin de l’entrevue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
3.3 Entrevue avec une personne ayant des
besoins spéciaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
3.3.1 Personne malentendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
3.3.2 Personne gravement malade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
3.3.3 Personne sous l’inuence de drogues
de rue ou de l’alcool . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
3.3.4 Personne indiscrète . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
3.3.5 Personne agressive sexuellement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
3.3.6 Personne en pleurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
3.3.7 Personne en colère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
3.3.8 Personne potentiellement violente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3.3.9 Personne anxieuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
CHAPITRE 4
Regard global sur l’histoire de santé
4.1 Histoire de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
4.1.1 Informations sociodémographiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
4.1.2 Raisons de la consultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
4.1.3 Histoire du problème de santé actuel . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
4.1.4 Antécédents personnels, médicaux
et chirurgicaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
4.1.5 Antécédents familiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
4.1.6 Revue des systèmes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
4.1.7 Évaluation fonctionnelle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.1.8 Perception de la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
CHAPITRE 5
Éaluation de l’état mental
5.1 Dénition de l’état mental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
5.2 Composantes de l’examen de l’état mental . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
5.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
5.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
5.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
5.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
5.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
CHAPITRE 6
Éaluation de la consommation de substances
6.1 Consommation d’alcool . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
6.2 Consommation de drogues illicites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
6.3 Diagnostic des troubles liés à la consommation
de substances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
6.4 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
6.4.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
6.5 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
6.6 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
CHAPITRE 7
Éaluation de la iolence familiale
7.1 Dénition de la violence conjugale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
7.2 Dénition de la maltraitance et de la négligence
envers les enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
7.3 Dénition de la maltraitance et de la négligence
envers les personnes âgées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
7.4 Effets physiques de la violence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
7.5 Dépistage de la violence conjugale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148
7.5.1 Outils de dépistage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148
7.5.2 Évaluation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148
7.6 Dépistage de la maltraitance et de la négligence
chez les aînés et les personnes vulnérables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
7.7 Historique de la situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
7.8 Dépistage de la maltraitance et de la négligence
chez les enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
7.9 Examen physique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151
7.9.1 Examen physique de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
7.10 Notes au dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153
7.11 Évaluation des risques d’homicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
7.12 Autres indices de violence conjugale à considérer
malgré une réponse négative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
PARTIE
2
Connaissances préalables
à l’examen clinique
CHAPITRE 8
Techniques d’éaluation et préparation
de l’enironnement clinique
8.1 Développer ses sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159
8.1.1 Inspection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159
8.1.2 Palpation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159
8.1.3 Percussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
8.1.4 Auscultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162
8.2 Préparation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
8.2.1 Préparation et matériel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
8.2.2 Propreté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
8.3 Environnement sain et sécuritaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
8.4 Contexte clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
8.4.1 Approche générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
8.4.2 Déroulement de l’examen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173
CHAPITRE 9
Questionnaire général, mesure des signes itau
9.1
Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
9.1.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
9.1.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
9.2 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
CHAPITRE 10
Éaluation de la douleur : autre signe ital
10.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
10.1.1 Dénition du concept de douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
10.1.2 De la nociception à la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
10.1.3 Types de douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214
10.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
10.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
10.2.2 Outils d’évaluation de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219
Table des matières
xv
10.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
10.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
10.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223
10.3.3 Indicateurs comportementaux de la douleur . . . . . . . . . 223
10.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228
10.4.1 Syndrome de douleur régionale complexe . . . . . . . . . . . 228
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229
CHAPITRE 11
Éaluaton nutrtonnelle
11.1 Dénition de l’état nutritionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231
11.2 Objectifs et composantes de l’évaluation nutritionnelle . . . . . . 238
11.3 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242
11.3.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242
11.4 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250
11.4.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250
11.4.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
11.5 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259
11.6 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263
PARTIE
3
Examen clinique
CHAPITRE 12
Peau, cheeu et ongles
13.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320
13.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320
13.2.2 Céphalées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320
13.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327
13.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327
13.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 328
13.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 339
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345
CHAPITRE 14
Yeu
14.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347
14.1.1 Anatomie externe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347
14.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 348
14.1.3 Voies visuelles et champs visuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . 350
14.1.4 Réexes visuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 350
14.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 353
14.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 353
14.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358
14.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358
14.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 359
14.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 380
14.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 384
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 388
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 389
CHAPITRE 15
Orelles
12.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
12.1.1 Peau. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
12.1.2 Annexes épidermiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266
12.1.3 Fonctions de la peau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
12.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270
12.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270
12.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276
12.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276
12.3.2 Examen physique complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276
12.3.3 Examen physique ciblé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277
12.3.4 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277
12.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294
12.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313
15.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391
15.1.1 Oreille externe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391
15.1.2 Oreille moyenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391
15.1.3 Oreille interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 392
15.1.4 Audition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 392
15.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 395
15.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 395
15.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400
15.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400
15.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400
15.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 410
15.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 413
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 416
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 417
CHAPITRE 13
Tête, sage et cou, englobant le dranage lymphatque
CHAPITRE 16
Nez, bouche et gorge
13.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315
13.1.1 Tête . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315
13.1.2 Cou. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 316
13.1.3 Drainage lymphatique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 318
16.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419
16.1.1 Nez. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419
16.1.2 Bouche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420
16.1.3 Gorge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422
xvi
Table des matières
16.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424
16.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424
16.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430
16.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430
16.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 431
16.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 442
16.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 445
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 450
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 451
CHAPITRE 17
Sens et ganglons lymphatques régonau
17.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453
17.1.1 Anatomie supercielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453
17.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453
17.1.3 Drainage lymphatique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454
17.1.4 Sein de l’homme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 457
17.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 459
17.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 459
17.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464
17.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464
17.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 465
17.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474
17.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 477
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 479
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 481
CHAPITRE 18
Thora et poumons
18.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483
18.1.1 Position et points de repère superciels . . . . . . . . . . . . 483
18.1.2 Cavité thoracique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 485
18.1.3 Mécanismes de la respiration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 487
18.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 491
18.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 491
18.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 496
18.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 496
18.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 497
18.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513
18.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 517
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 524
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525
CHAPITRE 19
Cœur et asseau du cou
19.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 527
19.1.1 Position et points de repère superciels . . . . . . . . . . . . 527
19.1.2 Parois du cœur, cavités et valves . . . . . . . . . . . . . . . . . . 528
19.1.3 Direction du ux sanguin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529
19.1.4 Cycle cardiaque. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529
19.1.5 Bruits cardiaques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 531
19.1.6 Conduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 532
19.1.7 Capacité de pompage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533
19.1.8 Vaisseaux du cou. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 534
19.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539
19.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539
19.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545
19.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545
19.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545
19.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 562
19.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 564
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 576
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 577
CHAPITRE 20
Système asculare pérphérque et système lymphatque
20.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579
20.1.1 Artères. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579
20.1.2 Veines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 580
20.1.3 Flux veineux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 580
20.1.4 Vaisseaux lymphatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 582
20.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585
20.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585
20.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588
20.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588
20.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588
20.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 599
20.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 601
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 606
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 607
CHAPITRE 21
Abdomen
21.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609
21.1.1 Points de repère superciels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609
21.1.2 Anatomie interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609
21.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 614
21.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 614
21.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 620
21.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 620
21.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 621
21.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 642
21.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 648
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 649
CHAPITRE 22
Système musculosquelettque
22.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 651
22.1.1 Composantes du système musculosquelettique . . . . . . 651
Table des matières
xvii
22.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 660
22.2.1 Histoire de santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 660
22.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667
22.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667
22.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 668
22.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 701
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 709
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 711
CHAPITRE 23
Système neurologque
23.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 713
23.1.1 Système nerveux central . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 713
23.1.2 Système nerveux périphérique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 718
23.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 722
23.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 722
23.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728
23.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728
23.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728
23.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 765
23.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 770
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 776
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 779
CHAPITRE 24
Système génto-urnare masculn
24.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 781
24.1.1 Organes génito-urinaires masculins. . . . . . . . . . . . . . . . 781
24.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 786
24.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 786
24.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 794
24.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 794
24.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 795
24.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 805
24.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 806
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 812
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 813
25.5 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 831
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 832
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 833
CHAPITRE 26
Système génto-urnare fémnn
26.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835
26.1.1 Organes génitaux externes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835
26.1.2 Organes génitaux internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 836
26.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 839
26.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 839
26.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847
26.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847
26.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847
26.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 865
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 872
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 873
PARTIE
4
Intégration de l’examen clinique
à l’évaluation de la santé
CHAPITRE 27
Éaluaton complète de la santé
27.1 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 875
27.1.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 875
27.2 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876
27.2.1 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 893
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 895
CHAPITRE 28
Rééaluaton de l’adulte hosptalsé
28.1 Évaluation clinique complète ou ciblée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 897
28.2 Séquence de l’examen. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 899
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 905
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 907
CHAPITRE 25
Anus, rectum et prostate
CHAPITRE 29
Femme encente
25.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 815
25.1.1 Anus et rectum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 815
25.1.2 Prostate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 816
25.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 817
25.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 817
25.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822
25.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822
25.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822
25.4 Anomalies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 829
29.1 Anatomie et physiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909
29.1.1 Grossesse et placenta endocrinien . . . . . . . . . . . . . . . . 909
29.1.2 Changements durant la grossesse normale. . . . . . . . . . 910
29.2 Données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 914
29.2.1 Histoire de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 914
29.3 Données objectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921
29.3.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921
29.3.2 Examen physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921
29.4 Anomalies pour une pratique avancée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 931
xviii
Table des matières
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 933
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 935
CHAPITRE 30
Évaluaton fonctonnelle de la personne âgée
30.1 Autonomie fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 938
30.1.1 Activités de la vie quotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 939
30.1.2 Activités de la vie domestique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 939
30.1.3 Système de mesure de l’autonomie fonctionnelle. . . . . 939
30.1.4 Considérations pour planier une évaluation réussie . . 940
30.2 Activités de la vie sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 941
30.2.1 Aspect social de l’autonomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 941
30.2.2 Évaluation du fardeau du proche aidant. . . . . . . . . . . . . 942
30.2.3 Évaluation de l’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 944
30.2.4 Conducteurs âgés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 945
30.3 Évaluation de l’état physique et mental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 947
30.3.1 Syndrome de fragilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 947
30.3.2 Syndrome d’immobilisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 948
30.3.3 Évaluation de la mobilité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 948
30.3.4 Évaluation de la cognition et des clients âgés
présentant une atteinte cognitive . . . . . . . . . . . . . . . . . 949
30.3.5 Dépression. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 950
30.3.6 Évaluation de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 952
30.3.7 Sommeil. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 953
30.4 Contextes de soins et milieu de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 955
30.4.1 Milieu hospitalier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 955
30.4.2 Soutien à domicile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 956
30.4.3 Ressources intermédiaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 957
30.4.4 Centres d’hébergement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958
30.5 Interdisciplinarité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958
Évaluation et jugement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 959
Que retenez-vous ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 961
Références. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 962
Sources iconographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 986
Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 990
Table des matières
xix
Dossier : Hélène Bastien
Hélène Bastien est une femme blanche âgée
de 23 ans, sans emploi. Elle entreprend un programme de désintoxication volontaire à la suite
de nombreuses infractions pour conduite avec
facultés affaiblies. À son arrivée au centre de
désintoxication, vous procédez à son évaluation
initiale ; vous avez recueilli l’histoire de santé et
effectué l’examen physique. Voici ce qui ressort
de votre collecte de données.
• Usage de contraceptifs oraux depuis trois ans,
dernier examen pelvien date de un an.
• Résolution d’un hématome au foramen infraorbitaire droit (sous l’œil droit) de 2 à 3 cm.
• Première molaire droite inférieure manquante, déchaussement des gencives inférieures, taches foncées multiples sur toute la
dentition.
• Pression artérielle (PA) élevée : 142/100 mm Hg
à la n de l’examen aujourd’hui.
• Bruits respiratoires diminués, avec sibilants
expiratoires modérés et ronchus dispersés
aux deux bases.
• Soufe cardiaque systolique de grade 2/6, au
rebord sternal inférieur gauche.
• Cicatrice bien guérie – de 28 cm × 2 cm – à la
jambe droite, celle-ci est de 3 cm plus courte
que la jambe gauche, séquelle d’un accident
de voiture à l’âge de 12 ans.
• Bonne moyenne générale au cours de ses trois
premières années d’études secondaires ; ses
notes ont cependant chuté à ses deux dernières années, mais elle a tout de même obtenu son diplôme.
• Alimentation déciente; omet régulièrement de
déjeuner, mange peu de fruits ou de légumes
de façon quotidienne ; ses repas proviennent la
plupart du temps de chaînes de restauration
rapide.
• Histoire d’agression sexuelle par son père, de
l’âge de 12 à 16 ans.
• Volet relationnel : s’est éloignée de ses parents,
relation correcte avec sa sœur, mais plutôt
chaotique avec son conjoint, depuis deux ans.
Dans le cas de madame Bastien, les techniques
d’évaluation ont pour fonction de recueillir un
ensemble de données cliniques dans le but ultime
d’exercer un jugement à leur égard. Par exemple,
la mesure de la PA vise à déterminer, d’une part, si
madame Bastien présente un état hypertensif et,
d’autre part, si cette situation est sporadique ou
1
Elle le décrit comme étant alcoolique et violent physiquement.
• A fait un usage abusif d’alcool, dès l’âge de
16 ans ; depuis les 3 dernières années,
consomme de l’alcool de façon quotidienne.
• À sa dernière infraction pour trouble à l’ordre
public, le mois dernier, elle avait bu 18 bières.
Cependant, elle est abstinente depuis ce moment.
• Fume 2 paquets de cigarettes par jour depuis
2 ans, utilisation antérieure, 1 paquet de cigarettes par jour pendant 4 ans.
• Histoire de sévices physiques de la part de
son conjoint ; a aujourd’hui un hématome
orbitaire en raison d’un coup asséné par celuici. Elle dit : « C’est correct, je l’avais mérité,
j’avais juste à ne pas le provoquer. »
• Aucun emploi depuis les six derniers mois,
son dernier travail était celui de caissière et
serveuse dans une brasserie.
Vous procédez à l’analyse et à l’interprétation
de toutes les données recueillies ; vous regroupez
les éléments d’information, triant les données
auxquelles vous devez vous référer et celles sur
lesquelles vous pouvez intervenir. Enn, vous
déterminez des problèmes prioritaires à partir de votre évaluation. Bien que le processus de
démarche d’évaluation systématique soit discuté plus loin, il est intéressant, à ce moment, de
noter que l’ensemble des données signicatives
provient de ce que vous avez relevé. Il n’est pas
seulement question des données physiques,
mais aussi des données cognitives, psychosociales et comportementales, témoignant de l’état
de santé de madame Bastien. En outre, les données obtenues sont analysées en considérant le
cycle de vie, c’est-à-dire que la cliente est une
jeune adulte qui, normalement, devrait en
être au stade développemental de l’émancipation parentale. À ce stade, la personne devrait
être en mesure de se construire une vie indépendante de celle de ses parents, se choisissant entre
autres une profession et un compagnon de vie.
En résumé, plusieurs facteurs s’avèrent essentiels lorsqu’il s’agit d’effectuer une évaluation
complète de l’état de santé d’une personne.
chronique. S’il s’agit d’une situation chronique, il
serait alors préférable d’intervenir an de réduire
la PA et ainsi de prévenir les événements cardiovasculaires et l’accident vasculaire cérébral.
Toujours dans la situation de madame Bastien,
l’auscultation pulmonaire vise à déceler des problèmes respiratoires potentiels ou actuels tels que
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
3
Q
uestion de suivi
Quel est le point commun
entre l’évaluation initiale
et l’évaluation en cours
d’évolution ?
Q
uestion de suivi
À partir des données
présentées jusqu’à présent,
formulez deux hypothèses
de problèmes prioritaires
pour madame Bastien.
1.1
Q
uestion de suivi
Quelles sont les quatre
étapes du raisonnement
scientique ?
Problème prioritaire :
Formulation du jugement posé
par l’inrmière sur la situation
de santé du client ou sur un
aspect particulier de celui-ci
à partir de son analyse et de
son interprétation des données
recueillies.
Mise en garde
Le fait d’avoir des idées
préconçues à l’égard d’une
situation peut entraîner
des hypothèses de xation.
Dans ce type d’hypothèse,
l’inrmière cherche des
éléments appuyant sa
thèse tout en rejetant les
éléments l’inrmant. Elle
doit donc en être consciente
et s’assurer de recueillir
toutes les données relatives
à la situation clinique an
de porter un jugement
neutre et basé sur des données ables et complètes.
4
l’asthme, une pathologie pouvant être exacerbée
par le tabagisme. L’auscultation cardiaque, quant à
elle, révèle la présence d’un soufe cardiaque chez
la cliente. Ce soufe peut s’avérer anodin ou être
l’un des signes précurseurs d’une anomalie de certaines structures valvulaires du cœur. Dans ce
contexte, un examen plus approfondi sera nécessaire an de déterminer la portée réelle de cette
observation. L’examen physique n’est donc pas une
simple formalité obligatoire ; il constitue également
une source importante de renseignements lorsqu’il
s’agit d’exercer un jugement clinique basé sur les
bonnes pratiques cliniques.
Partie 1
Évaluation : point de départ
d’un processus continu
L’évaluation clinique comporte deux dimensions : l’évaluation initiale et l’évaluation en
cours d’évolution. Chacune de ces dimensions
mène à la formulation de constats d’évaluation,
inscrits au plan thérapeutique inrmier (PTI).
L’évaluation initiale vise plus particulièrement à
établir un prol de la situation de santé de la
personne, en recueillant, par divers moyens
(p. ex., l’entrevue, l’examen physique, les documents clinicoadministratifs), les données pertinentes. Par la suite, une analyse ainsi qu’une
interprétation des données seront réalisées.
L’un des rôles de l’inrmière est d’évaluer l’état
physique et mental d’un client symptomatique. Pour
ce faire, elle utilise des techniques permettant de
rassembler et d’analyser des données subjectives
(c.-à-d. ce que le client dit au sujet de lui-même) et
des données objectives (c.-à-d. ce que l’inrmière, en
tant que professionnelle de la santé, observe par l’inspection, la percussion, la palpation, l’auscultation et
d’autres mesures au cours de l’examen physique).
Toutes les données recueillies, combinées à l’étude
du dossier et aux analyses de laboratoire, permettent
d’établir les bases sur lesquelles l’inrmière sera en
mesure d’émettre diverses hypothèses qui conduiront à l’établissement de problèmes prioritaires.
C’est notamment à partir de la collecte des données que l’inrmière fait preuve de jugement
clinique. Grâce à celui-ci, elle sera en mesure d’établir les problèmes prioritaires présents chez la personne, de les inscrire au PTI et de déterminer les
interventions pertinentes. Ces problèmes prioritaires peuvent relever d’une situation de santé
réelle ou potentielle. Donc, le but de l’évaluation
initiale est d’abord de formuler une ou des hypothèses, puis de déterminer les problèmes prioritaires sur lesquels l’infirmière doit intervenir.
L’évaluation initiale doit donc être à la fois structurée et complète puisqu’elle constitue le point de
Évaluation globale de la personne
départ des interventions qui seront faites auprès de
la personne tout au long du processus de soins.
1.1.1
Raisonnement scientique
et jugement clinique
La transition entre l’étape de la collecte des données
et celle des interventions cliniques peut se révéler
difcile. La plupart des inrmières qui commencent
leur pratique sont en mesure de recueillir adéquatement les données, pourvu qu’on leur laisse le temps
de s’exercer et ainsi d’acquérir cette compétence. Par
manque d’expérience, elles éprouvent toutefois de
la difculté à discriminer les données essentielles
des données superues. Une inrmière moins expérimentée peut alors traiter tous les renseignements
recueillis comme ayant une importance égale. Cela
rend la prise de décision plus lente et laborieuse.
Le raisonnement scientique, processus d’analyse et d’interprétation des données relatives à la
santé, a pour objectif d’établir les problèmes prioritaires. Basé sur la méthode scientique, ce type de
raisonnement comporte quatre étapes principales :
1) prendre en compte les manifestations cliniques,
soit les signes et les symptômes présents à l’arrivée
du client ; 2) formuler des hypothèses ; 3) procéder
à la collecte des données relatives à ces hypothèses ;
4) évaluer chaque hypothèse avec ces nouvelles
données, ce qui mène au constat d’évaluation.
Un élément déclencheur est une information, un
signe ou un symptôme, ou une donnée de laboratoire.
Une hypothèse est une explication, découlant d’une
donnée ou d’un ensemble de données contextuelles,
qui peut être employée comme base pour approfondir les recherches ou aider à établir une priorité.
Par exemple, madame Bastien, présentée dans
la mise en contexte au début de ce chapitre, afche
un certain nombre d’indices, dont l’hématome en
résolution sous son œil droit. Les composantes du
raisonnement scientique se transposent ici de la
façon suivante : 1) il est facile de faire cette observation avant même de commencer la collecte des
données. Est-ce signicatif ? 2) La jeune femme
commence par prétendre qu’elle a heurté la porte
en courant, mais elle marmonne et évite le contact
visuel. À ce moment, l’inrmière formule une
hypothèse d’agression physique. 3) Les données
recueillies à partir de l’examen clinique vont conrmer ou inrmer cette hypothèse. 4) Les données
rassemblées permettent à l’inrmière de conrmer
son hypothèse d’agression physique et d’éliminer
la cause accidentelle. Les constats d’évaluation sont
les suivants : Contusion à l’orbite droite en état de
résolution et personne à risque de trauma.
Une fois la collecte des données terminée, une
liste préliminaire de manifestations cliniques signicatives et de tous les besoins de santé du client
est établie. Il faut rassembler ou regrouper les données qui semblent être causales ou associées. Par
exemple, chez une personne qui présente une douleur aiguë, les données associées à celle-ci sont
l’augmentation de la fréquence cardiaque et un état
exacerbé d’anxiété. Regrouper les données signicatives peut être long et fastidieux en début de pratique ; cependant, les inrmières expérimentées
rassemblent les données plus rapidement parce
qu’elles se reportent à leurs connaissances et à leur
expérience antérieure de situations similaires
(Benner, Tanner et Chesla, 1996).
An de s’assurer qu’elles sont précises, les données rassemblées doivent être validées. Pendant
cette étape, l’inrmière cherche les lacunes qui
auraient pu se glisser dans sa collecte. Trouver les
données manquantes et repérer l’information
absente est une compétence essentielle an d’exercer une pensée critique. La méthode utilisée an
de valider les données dépend de l’expérience de
l’inrmière. Par exemple, si la PA semble anormale,
il faut la reprendre et éliminer toutes les variables
extérieures l’inuençant telles que la position et la
dimension du brassard, l’anxiété causée par l’examen ou la pratique récente d’une activité physique.
Si elle éprouve de la difculté à analyser les bruits
cardiaques ou respiratoires, l’inrmière peu expérimentée peut demander l’aide d’une collègue d’expérience an qu’elle conrme les bruits entendus.
Même une inrmière cumulant plusieurs années
de pratique clinique doit faire valider certains renseignements, notamment lorsqu’il s’agit d’éléments
dépassant son champ de compétence (p. ex., une
masse sur un sein).
1.1.2
Démarche de soins
et jugement clinique
La pratique inrmière s’appuie sur un processus
critique communément appelé démarche de soins.
Celle-ci comprend cinq étapes : 1) la collecte des
données ; 2) l’analyse et l’interprétation des données ; 3) la planication des interventions ; 4) les
interventions cliniques ; 5) l’évaluation des résultats.
Il s’agit d’un processus dynamique et non linéaire,
dans lequel les activités d’évaluation et les activités
d’intervention s’imbriquent les unes dans les autres
et peuvent faire appel à divers outils de documentation des soins inrmiers (Ordre des inrmières et
inrmiers du Québec [OIIQ], 2006) FIGURE 1.1.
Bien que la démarche de soins soit une approche
de résolution de problèmes, la façon dont elle est
appliquée dépend de l’expérience et des compétences de la soignante. L’inrmière qui amorce sa
pratique a peu d’expérience auprès de clientèles
particulières, mais elle possède tout de même les
compétences minimales nécessaires. Elle s’inspire
de règles établies par l’établissement de santé pour
guider ses soins et ses actions (Benner et collab.,
1996). Elle mettra quelques années, lorsqu’elle est
placée dans des contextes cliniques semblables,
pour acquérir pleinement une compétence alliant
aspect théorique et volet pratique. De son côté, l’inrmière expérimentée maîtrise sa démarche de
soins et l’applique dans des contextes variés ; il est
alors question de compétence intégrée. Forte de son
expérience, cette inrmière considère le client de
façon globale, et non comme une superposition de
systèmes. Elle possède également une vision à long
terme, lui permettant d’anticiper les interventions
inrmières qui aideront le client à atteindre les
résultats escomptés. Il semble donc que les inrmières d’expérience intègrent plus aisément l’ensemble de la démarche de soins et arrivent ainsi à
poser un jugement clinique plus rapidement.
L’inrmière expérimentée possède une vision intégrée lui permettant de trouver la solution adéquate
plus rapidement (Benner et collab., 1996).
Q
1
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Bastien, outre la contusion
à l’œil droit, relevez un
autre élément déclen­
cheur qui laisse croire
à des sévices physiques
de la part de son conjoint.
Le raisonnement de l’inrmière expérimentée en
matière de jugement clinique fait appel à ses expériences antérieures, soit à la somme de ses
connaissances. L’inrmière fait preuve d’un jugement clinique intégré spécialement lorsqu’elle est
en mesure de reconnaître rapidement des situations problématiques. Les professionnels de la santé
exerçant ce type de jugement peuvent répondre
rapidement au changement de l’état de santé d’un
client sans même avoir recours à une collecte de
données ou à une analyse aussi structurée que doit
le faire l’inrmière peu expérimentée. Ce processus
de collecte des données, de leur analyse et de l’établissement d’hypothèses s’effectue en partie de
façon inconsciente. L’inrmière qui cumule moins
d’expérience, quant à elle, réagit plutôt en se basant
sur un ensemble déni de règles (Benner, Tanner
et Chesla, 1997).
Voici une situation où se comparent les actions
de l’inrmière en début de pratique à celles de l’inrmière d’expérience ; ici, un jeune homme est
atteint d’une pneumonie à Pneumocystis jiroveci.
Il frappait les ridelles, émettait des bruits de
suffocation et pointait son tube endotrachéal. Il
était en diaphorèse, suffoquait et était agité.
L’inrmière peu expérimentée a posé sa main
sur son bras et a essayé de savoir s’il avait la
gorge endolorie à cause du tube. Pendant que
cette inrmière était partie chercher un analgésique, l’inrmière d’expérience, passant près du
client, est allée à son chevet, a regoné le ballonnet endotrachéal, puis a vu la gratitude dans
le regard du jeune homme tandis que sa respiration était plus adéquatement assistée par la
ventilation mécanique. L’inrmière en début de
pratique était désemparée, car elle avait mal
interprété la situation. Avec elle, la soignante
expérimentée a alors passé en revue les signes
d’une fuite du ballonnet endotrachéal et a précisé que le fait de frapper les ridelles et l’état de
panique du client l’ont aidée à différencier
la détresse respiratoire aiguë de la douleur.
[Traduction libre] (Hanneman, 1996, p. 333)
Chapitre 1
Démarche de soins :
Cycle d’analyse approfondie
de la situation clinique com­
prenant plusieurs étapes
et dans lequel les résultats
sont évalués en fonction
de la situation de départ.
Évaluation et jugement clinique
5
FIGURE 1.1
Démarche de soins
PSTI : plan de soins et de traitements inrmiers ; PTI : plan thérapeutique inrmier
1.1.3
Pensée critique
L’intégration de la pensée critique et du jugement
clinique est l’une des composantes qui déterminent le passage du statut d’inrmière peu expérimentée à celui d’inrmière d’expérience. Au
début de leur pratique, les inrmières utilisent
toutes la connaissance de règles dénies pour guider leurs actions. Avoir recours à la pensée critique est le moyen par lequel elles apprennent à
évaluer et à modier, au besoin, leurs façons d’agir.
La pensée critique est requise pour construire un
raisonnement solide et pour poser un jugement clinique. Avec les années, de vastes quantités de données
et de renseignements seront évaluées et triées dans le
but de formuler des jugements cliniques exacts quant
aux soins à offrir aux clients. Ces données seront dynamiques, imprévisibles et toujours changeantes. Il
n’existe pas de protocole unique qui peut être appris
par cœur et qui s’appliquera à chaque situation.
6
Partie 1
Évaluation globale de la personne
La FIGURE 1.2 illustrant la capacité d’exercer une
pensée critique est représentée par trois dimensions
qui se chevauchent. La capacité d’exercer une pensée
critique est améliorée lorsque : 1) les caractéristiques
de la pensée critique sont présentes (un engagement
à apprendre les caractéristiques, les attitudes et les
habiletés du processus conduisant à la pensée critique) ; 2) les connaissances théoriques et empiriques
sont présentes (quoi faire, quand le faire et pourquoi
le faire) ; 3) les compétences intellectuelles et manuelles sont mobilisées (l’évaluation systématique
et les compétences psychomotrices) (Alfaro-LeFevre,
2009). Watson et Glaser (1991) offrent une dénition
semblable des trois dimensions de la pensée critique :
une attitude d’enquête, une maîtrise du sujet et une
utilisation de ses connaissances au cours de situations problématiques.
Alfaro-LeFevre (2009) présente 17 habiletés permettant d’acquérir une pensée critique. Elles sont
organisées dans une suite logique et pourraient être
a beaucoup de problèmes, mais, au moment de son
admission, elle n’est pas en phase critique. Ainsi,
plusieurs approches peuvent être utilisées pour l’évaluation : la méthode de la tête aux pieds, la méthode
par système (p. ex., le système cardiovasculaire, le
système gastro-intestinal), la méthode par examen
d’une région (p. ex., l’examen pelvien) ou l’utilisation d’une forme préprogrammée d’évaluation qui a
été mise au point par l’établissement de santé.
FIGURE 1.2
Les trois dimensions de la pensée critique
employées ainsi dans la démarche de soins. Bien
que chaque compétence soit décrite séparément ici,
elles ne sont pas utilisées de cette manière dans les
milieux cliniques. En effet, ces habiletés doivent être
employées de façon intégrée. La pensée critique
relève en effet d’un processus de pensée multidimensionnelle plutôt que d’un processus linéaire,
étape par étape. Avec l’expérience, l’inrmière pourra
utiliser rapidement ces compétences, d’une manière
dynamique et interactive. Le cas de madame Bastien
servira ici à illustrer ces 17 habiletés.
1. Reconnaître les hypothèses. Cela implique
d’éviter de tenir de l’information pour acquise ou
de l’interpréter comme un fait alors qu’aucune
preuve ne le démontre.
Il faut donc se demander si certains éléments
d’information ont été tenus pour acquis dans la
situation. Par exemple, dans le cas de madame
Bastien, selon les données préliminaires recueillies
et selon le prol de la cliente, l’inrmière aurait pu
émettre l’hypothèse que madame Bastien est une
personne consommant de l’alcool de façon abusive.
Cette hypothèse constituerait alors un jugement basé
sur les expériences antérieures de l’inrmière ou
sur ses propres perceptions à l’égard des personnes
consommant de l’alcool. Cependant, la situation de
madame Bastien demeure unique et demande de la
part de l’inrmière de mettre en œuvre l’ensemble
de la démarche an de valider ou d’inrmer son
hypothèse. L’inrmière doit donc retarder son jugement jusqu’à la n de la collecte des données an
d’éviter d’être inuencée par celui-ci et recueillir
toutes les données de façon neutre et impartiale.
2. Choisir la méthode organisée, complète et
appropriée. Cela dépend des besoins prioritaires du
client, de l’expérience de l’inrmière en évaluation
et des protocoles de l’établissement. Madame Bastien
1
3. Valider ou vérier l’exactitude et la abilité des
données. Dans certaines situations, il arrive que l’inrmière ait des raisons de douter de la abilité des
données recueillies. Par exemple, l’inrmière qui a
évalué madame Bastien a appris au cours de sa formation que les victimes de violence conjugale ont souvent tendance à minimiser les gestes de leur agresseur
ou à vouloir le protéger par peur de représailles. En
respectant les normes légales, il serait plus prudent
dans ce cas-ci que l’inrmière communique avec un
membre de la famille dans le but de vérier l’exactitude de l’information recueillie. Cette méthode devient
nécessaire lorsque la personne est inconsciente ou
collabore peu au processus de collecte des données.
4. Distinguer le normal de l’anormal lorsque sont
établis les signes et les symptômes. C’est la première
étape pour déceler des problèmes, et la facilité de
reconnaître cette distinction se développera avec la
connaissance, la pratique et l’expérience. La PA augmentée, les sibilances (wheezing) et le soufe cardiaque sont parmi les nombreux résultats anormaux
présents chez madame Bastien. Une inrmière peu
expérimentée pourrait ne pas être en mesure de
reconnaître correctement les bruits adventices pendant l’auscultation pulmonaire en raison d’un
manque de connaissances ou d’expérience, mais ses
connaissances de base en auscultation lui permettront d’exercer son jugement et de savoir que la présence de ces bruits est anormale ; elle pourra en
assurer le suivi en transmettant l’information pertinente aux autres professionnels de la santé.
5. Faire les constats de l’évaluation. Il s’agit de la
formulation des résultats du jugement clinique de
l’inrmière sur la situation de santé du client ou sur
un aspect particulier de celle-ci. C’est précisément à
partir de l’analyse et de l’interprétation de toutes les
données pertinentes recueillies et de sources différentes que peuvent être formulés les constats d’évaluation. Ils constituent la conclusion de l’évaluation
initiale et de l’évaluation en cours d’évolution (OIIQ,
2009). Cela présente un dé, notamment pour l’inrmière peu expérimentée, puisqu’elle a besoin d’un
certain bagage de connaissances scientiques et d’expériences. Ainsi, la PA de madame Bastien est-elle
augmentée en raison du stress lié à la consultation
ou est-ce une situation présente antérieurement ? Le
soufe cardiaque, causé par un problème de valve
cardiaque, entrave-t-il l’hémodynamie de la cliente ?
6. Regrouper les indices associés. Cette habileté
permet à l’inrmière de relier les données. Par
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
7
exemple, l’abus d’alcool, les conséquences sociales
de cet abus et l’impact sur les plans scolaire et
professionnel sont un groupe d’indices qui suggèrent une consommation abusive d’alcool dans
le cas de madame Bastien.
7. Déterminer les données pertinentes. Une histoire de santé et un examen physique complet fournissent une vaste quantité de données. Celles-ci
seront par la suite regroupées ; les données jugées
pertinentes pour aider à reconnaître un problème ou
celles nécessitant un besoin d’information supplémentaire seront retenues. Cette compétence représente également un dé pour les inrmières qui
amorcent leur pratique ; à cette étape, avoir un mentor
clinique peut constituer une valeur inestimable.
8. Reconnaître les contradictions. Quand elle
explique qu’elle s’est cognée contre une porte (données subjectives), madame Bastien soulève une
contradiction ; en effet, les événements qui ont
mené à sa blessure ne coïncident pas avec l’endroit
où se situe l’hématome, qui est infraorbitaire (données objectives). Avec ce genre d’information, l’infirmière est en mesure de reconnaître une
contradiction. Elle doit donc poursuivre son investigation an de clarier la situation.
9. Connaître les normalités. Cette habileté permet d’obtenir une vision globale (holistique) de la
personne et de découvrir l’information manquante.
Les connaissances de la fonction normale du cœur
et des conséquences physiologiques d’un soufe
cardiaque faciliteront le travail de l’inrmière au
moment d’effectuer l’évaluation des problèmes
qu’éprouve madame Bastien.
10. Déceler l’information manquante. Cette habileté consiste à déceler les lacunes dans les données
ou de percevoir les besoins nécessitant plus d’information pour pouvoir émettre un constat d’évaluation juste et précis. Il faudra faire passer une entrevue
plus approfondie à madame Bastien an d’obtenir
des données témoignant d’une dépendance à l’alcool
telles que des signes et des symptômes de sevrage,
des résultats d’analyses de laboratoire anormaux
(p. ex., un taux anormalement élevé d’enzymes
hépatiques, une anémie objectivée par une formule
sanguine complète). Cette habileté à déceler l’information manquante permettra à l’inrmière de mettre
au jour un problème qu’il faut régler en priorité dans
la situation de madame Bastien.
11. Promouvoir la santé en ciblant les facteurs de
risque. Cela s’applique aux personnes généralement
en bonne santé et concerne la prévention de la maladie et la promotion de la santé. Pour acquérir cette
compétence, il est essentiel que l’inrmière soit en
mesure de déceler les facteurs de risque pour un
groupe d’âge donné ainsi que l’impact du statut
culturel de la personne. L’inrmière aide le client à
reconnaître les facteurs de risque et à mettre en
œuvre des interventions visant leur modication.
Ces choix d’intervention doivent idéalement être
8
Partie 1
Évaluation globale de la personne
faits en respectant les volontés et les capacités du
client, celles-ci pouvant varier dans le temps (OIIQ,
2010). Par exemple, la consommation d’alcool est
l’un des facteurs de risque présent chez madame
Bastien. Cette consommation entraîne des répercussions dans diverses sphères de sa vie, entre autres
en ce qui concerne la conduite automobile. Son
comportement de conduite en état d’ébriété
implique des risques pour la santé de la cliente,
mais également pour celle des autres personnes. Il
est donc de la responsabilité de l’inrmière d’en
discuter et de déterminer avec madame Bastien des
objectifs de modication comme celui de ne pas
conduire lorsqu’elle a consommé de l’alcool.
12. Cerner les problèmes réels et potentiels
(risque) à partir des constats d’évaluation.
13. Établir les problèmes prioritaires et planier
les soins. Dans les unités de soins intensifs, les problèmes prioritaires sont habituellement liés à la
raison de l’admission. Cependant, lorsque plusieurs
problèmes prioritaires ont été déterminés, l’inrmière doit établir l’ordre de priorité des actions en
se basant sur la gravité du problème ENCADRÉ 1.1.
Par exemple, les problèmes urgents sont traités
prioritairement, car ils représentent un danger pour
la vie du client et ils demandent une intervention
immédiate. Il peut s’agir, par exemple, d’une obstruction des voies respiratoires, donc d’un problème d’oxygénation.
Les problèmes semi-urgents représentent ceux
qui sont à risque de devenir urgents. En d’autres
termes, ces problèmes ont un caractère instable ou
sont potentiellement létaux pour le client en cas de
décompensation. Ils exigent donc une intervention
prompte de la part de l’inrmière an de prévenir
une détérioration ; un changement important de
l’état mental, une exacerbation subite et intense
d’une douleur, un problème aigu d’élimination urinaire – tel qu’une anurie –, des problèmes médicaux
non traités ayant un potentiel létal – telle une
urgence hypertensive –, des valeurs anormales
d’analyses de laboratoire, des risques d’infection ou
un danger pour la sécurité en sont des exemples.
Madame Bastien présente des signes physiques anormaux qui entrent dans la catégorie des problèmes
médicaux non traités. Ainsi, les bruits surajoutés au
murmure vésiculaire de la cliente constituent l’un
des indices permettant à l’inrmière de croire que
sa fonction respiratoire pourrait décompenser. Sa PA
modérément élevée représente également un indice
nécessitant une surveillance particulière.
Finalement, les problèmes non urgents ou électifs sont certes importants pour la santé du client,
mais ils revêtent une importance moindre que
ceux de type urgent ou semi-urgent. Ces problèmes
seront donc abordés après la résolution de ceux
que l’inrmière jugera plus urgents. Dans le cas de
madame Bastien, les données génèrent les constats
d’évaluation suivants : connaissances insufsantes,
ENCADRÉ 1.1
1
Approche courante pour l’établissement des priorités
Le traitement pour les priorités urgentes et semi­urgentes est habituellement
amorcé de façon rapide, et même simultanée. Parfois, l’ordre de priorité peut
changer, selon la gravité des problèmes et la relation entre eux. Par exemple, si
un problème prioritaire représente un danger pour la vie, comme dans le cas
d’un client éprouvant des difcultés à respirer en raison d’une douleur aiguë, le
traitement de la douleur pourrait devenir la priorité pour l’infirmière. Il est
important de considérer le lien entre les problèmes : en effet, si le problème Y
entraîne le problème Z, le traitement du problème Y devrait être prioritaire.
1. Priorité élevée ou urgente (priorité immédiate, ne pas oublier l’ABC, soit la res­
piration (airway), le bouche­à­bouche (breathing ) et la circulation (circulation).
• Problème de voies respiratoires
2. Priorité semi­urgente
• Changement dans l’état mental
• Douleur aiguë incontrôlable
• Problème d’élimination urinaire
• Problèmes médicaux non traités exigeant une attention immédiate
(p. ex., un diabétique qui n’a pas reçu son insuline)
• Valeurs d’analyses de laboratoire anormales
• Risques d’infection (pour le client ou pour d’autres personnes)
3. Problème non urgent ou électif (priorités ultérieures)
• Problèmes de santé qui n’entrent pas dans les catégories ci­dessus
(p. ex., un manque de connaissances, d’activité, de repos, l’adaptation à
une situation – coping – familiale)
• Problème d’oxygénation
• Problème cardiaque ou hémodynamique
• Perturbation importante des signes vitaux mettant la vie du client en danger
Source : Adapté d’Alfaro­LeFevre (2009)
dynamique familiale perturbée et diminution de
l’estime de soi. Les interventions pour traiter ces
problèmes prioritaires se situent plus à long terme,
et il faut s’attendre à ce que la réponse au traitement prenne plus de temps.
Les problèmes en collaboration sont ceux pour
lesquels l’approche de traitement implique d’autres
disciplines. Il s’agit de certaines complications physiologiques ou psychologiques qui exigent, de la
part de l’inrmière, l’évaluation de la condition
physique et mentale des clients et la surveillance
des changements de celle-ci (Carpenito-Moyet,
2004). Par exemple, les données concernant l’abus
de consommation d’alcool noté chez madame
Bastien représentent un problème traité en collaboration. En effet, dans ce cas, le retrait soudain de
l’alcool a des impacts sur le système nerveux central et sur le système cardiovasculaire. L’inrmière
doit donc demeurer attentive, pendant la désintoxication, aux réponses physiologiques et psychologiques de madame Bastien afin de pouvoir
demander la collaboration d’autres professionnels
pour corriger une situation liée à cet état.
14. Déterminer les attentes du client. Cette habileté fait référence à la relation établie entre le client
et l’inrmière. Dans une situation idéale, l’inrmière
devrait déterminer les objectifs avec le client, mais
également explorer les attentes de celui-ci à l’égard
des interventions proposées.
15. Déterminer les interventions particulières
qui permettront l’atteinte des objectifs. Cela vise à
prévenir, à surveiller ou à résoudre les problèmes
de santé. La personne qui détermine les interventions particulières à effectuer devrait préciser, dans
les directives inscrites au PTI, le moment, la fréquence et la méthode utilisée pour ces interventions et, le cas échéant, qui devrait les exécuter.
16. Procéder à l’évaluation en cours d’évolution.
Cette habileté inclut les activités d’examen clinique
et d’évaluation des résultats obtenus chez la personne. Cette étape consiste à établir des liens entre
les données de l’évaluation initiale et les données
en cours d’évolution an d’ajuster le PTI, s’il y a lieu,
et à adapter ou à compléter les interventions en fonction des besoins évolutifs du client (OIIQ, 2009).
Q
uestion de suivi
Expliquez ce qu’est un pro­
blème en collaboration et
donnez­en un exemple dans
le cas de madame Bastien.
17. Réaliser ou évaluer le PSTI et ajuster le PTI.
Ce dernier est un document juridique qui regroupe
les décisions de l’inrmière liées au suivi clinique
du client. Il permet d’établir le prol clinique évolutif de la personne et de faire état du suivi clinique
effectué (OIIQ, 2006). Il s’agit donc d’une responsabilité importante de l’inrmière. L’information
qui s’y trouve doit être précise an de pouvoir effectuer l’évaluation et le suivi clinique du client.
Le PSTI est un outil permettant la communication
d’information à l’intérieur de l’équipe de soins ; il
doit être aussi précis que possible, car il permet un
suivi efcace du client pour l’équipe soignante.
1.2
Assises de l’exercice de
la profession inrmière
au Québec
L’OIIQ, dans son document Perspectives de l’exercice de la profession d’inrmière, énonce quatre
concepts clés qui doivent guider la profession au
Québec. Ces concepts donnent une orientation de
base à partir de laquelle l’évolution de la connaissance des soins inrmiers doit se faire (OIIQ, 2010).
Q
uestion de suivi
Indiquez trois caractéristi­
ques essentielles qu’il faut
préciser dans les directives
(ou interventions) inrmières
inscrites au PTI.
1. La personne est vue comme un tout indivisible, unique et en devenir, agissant en conformité
avec ses choix, ses valeurs et ses croyances ainsi
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
9
que selon ses capacités. Elle est en relation avec les
autres (personnes, famille, groupe ou collectivité)
et en interaction avec son environnement.
2. La santé est un processus dynamique et continu
dans lequel une personne aspire à un état d’équilibre
favorisant son bien-être et sa qualité de vie. Ce processus implique l’adaptation à de multiples facteurs
environnementaux, un apprentissage ainsi qu’un
engagement de la personne et de la société.
3. L’environnement est un ensemble d’éléments
constitutifs d’un milieu qui entrent en interaction
avec la personne. Il comprend les dimensions suivantes : physique, politique et économique, spirituelle, culturelle et organisationnelle.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Bastien, indiquez trois
éléments que pourrait
comprendre le concept
« soins ».
4. Le soin est un processus dynamique visant le
maintien, le rétablissement ou l’amélioration de la
santé, du bien-être et de la qualité de vie d’une personne. Ce processus englobe l’évaluation et la surveillance de l’état de santé physique et mentale, la
détermination du PTI et du PSTI, les activités liées
aux soins et aux traitements inrmiers et médicaux
ainsi que l’information, le conseil professionnel,
l’enseignement, l’orientation et le soutien au client.
Ces activités sont effectuées dans une relation
de partenariat avec le client et dans le respect de
ses capacités. Le partenariat sous-entend que tout
client est responsable de sa santé. Lorsqu’il
exprime un besoin ou une attente, l’inrmière l’invite, en tenant compte de ses capacités, à mobiliser
des ressources personnelles et celles de son environnement. L’alliance inrmière-client doit s’établir dans une relation de respect mutuel et dans
le partage d’un but commun.
1.3
Évaluation fondée sur
des résultats probants
Le miel hâte-t-il la guérison des brûlures ? Le millepertuis s’avère-t-il efcace dans le soulagement des
symptômes d’une dépression majeure ? La circoncision réduit-elle les risques de transmission du virus
de l’immunodécience humaine chez les hommes
hétérosexuels ? Le sulfate de magnésium contribuet-il à la diminution du risque de paralysie cérébrale
chez les enfants prématurés ? Une injection intracardiaque de cellules souches favorise-t-elle la guérison
des tissus endommagés à la suite d’un infarctus ?
Les soins de santé constituent un domaine où
l’évolution des connaissances est rapide. La quantité
de données probantes et d’études actuellement disponibles, tant dans le domaine médical que dans
celui des sciences inrmières, est volumineuse. Ces
connaissances ont permis d’afner les soins prodigués aux personnes. De meilleurs soins couplés à une
volonté de diminuer les coûts liés à l’hospitalisation
ont entraîné une réduction de la durée de celle-ci
comparativement à autrefois. De plus, les recherches
10
Partie 1
Évaluation globale de la personne
cliniques ne cessent de faire progresser le domaine
des sciences inrmières. Or, il est extrêmement ardu
d’arriver à suivre cette évolution et de faire le pont
entre les recherches et la pratique. Par ailleurs, les
diminutions de budget, la pénurie de personnel et
l’augmentation constante de la charge de travail ainsi
que l’acuité accrue des clients font en sorte que l’infirmière peine parfois à suivre l’évolution des
sciences inrmières et biomédicales.
Cependant, tous les clients doivent bénécier
des meilleures pratiques cliniques actuelles. C’est
d’ailleurs dans cet esprit qu’est née la pratique fondée
sur des résultats probants. En 1972, Archie
Cochrane, un épidémiologiste britannique et l’un
des premiers défenseurs de la pratique fondée
sur des résultats probants, a reconnu le besoin pressant de procéder à l’examen systématique des essais
cliniques randomisés contrôlés. Dans un cas devenu
célèbre, le docteur Cochrane a remarqué que de
multiples essais cliniques publiés entre 1972
et 1981 ont démontré que l’administration de corticostéroïdes à la femme enceinte visant à éviter
l’accouchement prématuré réduisait également les
risques de mortalité du nourrisson. En effet, un
court traitement à base de corticostéroïdes stimule
le développement des poumons du fœtus, prévenant du même coup le syndrome de détresse respiratoire du nouveau-né, une complication grave
et courante d’un accouchement prématuré.
Pourtant, ces données importantes n’avaient pas
été mises en évidence précédemment, et des milliers de nouveau-nés prématurés continuaient de
mourir inutilement. À la suite d’un examen systématique des données cliniques effectué en 1989,
les obstétriciens ont nalement pris conscience de
la grande efcacité du traitement par corticostéroïdes. Depuis, il a été démontré que ce traitement
réduit le risque de mortalité du nouveau-né prématuré de 30 à 50 % (Cochrane Collaboration, 2009).
La pratique fondée sur des résultats probants va
bien au-delà de la mise en application des meilleures pratiques dans le traitement des clients. Il
s’agit d’une façon de concevoir les soins prodigués
aux personnes ; cette pratique correspond à une
approche systématique qui met l’accent sur la combinaison des meilleures données disponibles issues
de l’expérience clinique. Elle prend également en
compte les préférences et les valeurs du client
en vue de prendre certaines décisions concernant
sa santé (Leufer, 2009) FIGURE 1.3. Cette dénition
est exhaustive et holistique.
La prise de décision clinique dépend des quatre
facteurs suivants : 1) les résultats probants provenant de l’examen attentif et critique de la documentation de recherche ; 2) les préférences du client ;
3) l’expertise et l’expérience du clinicien ; 4) l’examen physique et l’évaluation du client. Les habiletés
et compétences en évaluation doivent donc être
mises en pratique, puis perfectionnées.
Bien que les compétences en jugement clinique
constituent le fondement de la pratique fondée sur
des résultats probants, il s’avère toutefois important
de remettre en question la tradition, voire l’intuition lorsqu’il n’existe aucune preuve irréfutable
pour soutenir l’action à entreprendre. D’ailleurs,
certaines approches traditionnelles ont été éliminées parce que des données issues de recherche
clinique n’ont pas démontré qu’elles présentaient
une réelle utilité. Par exemple, l’auscultation des
bruits intestinaux ne serait pas le meilleur indicateur de la reprise de la motilité gastro-intestinale
chez les clients relevant d’une chirurgie abdominale (Madsen, Sebolt, Cullen et collab., 2005).
L’équipe de recherche qui a soulevé cette hypothèse
a tout d’abord recensé l’ensemble des études traitant du sujet. Elle a ainsi pu démontrer que le retour
hâtif des bruits intestinaux n’indiquait probablement pas une reprise de la motilité normale. Les
recherches portant sur le sujet ont toutefois révélé
que les principaux marqueurs d’un retour à la normale de la motilité gastro-intestinale sont la présence de flatuosités ainsi que de la première
défécation à la suite de la chirurgie. L’équipe de
soins a ainsi instauré un nouveau protocole et a
continué de surveiller les résultats des clients an
de vérier si l’arrêt de l’auscultation des bruits
intestinaux pouvait leur nuire. Aucun résultat préjudiciable n’a été relevé auprès des clients. Ces
nouvelles lignes directrices se sont avérées sécuritaires quant au rétablissement du client et bénéques pour le personnel qui a ainsi gagné du temps.
Malgré les avantages que présente la pratique
fondée sur des résultats probants pour les clients,
il n’est pas rare que les résultats de recherche nécessitent jusqu’à 17 ans pour être appliqués (Balas et
Boren, 2000). Ce décalage a poussé les chercheurs
à se pencher sur les obstacles à la pratique fondée
sur des résultats probants, tant pour les praticiens
que pour les organisations. Sur le plan individuel,
les inrmières ont des lacunes en compétences de
recherche en vue d’évaluer la qualité des études,
elles sont également isolées des collègues qui en
connaissent beaucoup sur le sujet et n’ont pas sufsamment conance en elles pour les inclure dans
le processus permettant l’acquisition des connaissances (DiCenso, Guyatt et Ciliska, 2005). Toutefois,
les obstacles les plus importants proviennent des
éléments organisationnels des milieux de soins. En
effet, les inrmières peuvent manquer de temps
pour faire de la recherche. Elles peuvent ne pas recevoir le soutien adéquat de l’établissement lorsqu’elles souhaitent apporter des changements dans
les soins prodigués aux clients. Favoriser une
culture axée sur la pratique fondée sur des résultats
probants dans les études de premier, de deuxième
et de troisième cycles est l’une des façons par lesquelles des mentors pourront faire de cette pratique
un standard de référence. D’ailleurs, les étudiants
1
FIGURE 1.3
Pratique fondée sur des résultats probants
en sciences inrmières ont maintenant facilement
accès aux différents moteurs de recherche scientique et peuvent faire l’examen critique des résultats
de recherche. De plus, ils apprennent à reconnaître
les interventions les plus bénéques pour leurs
clients. Sur le plan organisationnel, faciliter le soutien à la pratique fondée sur des résultats probants
signie de prévoir du temps pour la consultation
d’études à la bibliothèque ; d’enseigner la façon de
mener une recension des écrits ; de planier des
réunions d’un club de lecture, le cas échéant ; de
former un comité de recherche inrmière ; de faire
le pont entre le personnel et les chercheurs universitaires ; et de s’assurer que la bibliothèque comprend une quantité adéquate de revues scientiques
et de ressources dont le contenu a été prétraité
(DiCenso et collab., 2005). Si les soignants ne sont
pas en mesure de mettre de l’avant des pratiques
fondées sur des résultats probants incluant un
contexte de soins empreint de compassion, d’ouverture culturelle et de respect à l’égard des clients
et de leur famille, les soins inrmiers faillissent
gravement à leur principale mission, soit celle d’offrir des soins sécuritaires, efcaces, holistiques et
spirituels qui répondent aux besoins biologiques,
psychologiques et sociaux de ceux qui en ont besoin
(Melnyk et Fineout-Overholt, 2005).
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
11
1.4
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Bastien, quel type de
collecte de données
avez-vous effectuée ?
Au moment de mettre
sous presse, la loi 10, Loi
modiant l’organisation et la
gouvernance du réseau de la
santé et des services sociaux
notamment par l’abolition des
agences régionales (Québec),
remplaçait les Centres de
santé et de services sociaux
(CSSS) par les Centres intégrés de santé et de services
sociaux (CISSS).
Types de collecte de
données selon l’entrevue
Selon la situation clinique, l’inrmière peut recueillir les données selon quatre types d’entrevue :
1) l’entrevue initiale (complète); 2) l’entrevue en
cours d’évolution (épisodique) ou centrée sur un
problème ; 3) l’entrevue en situation de suivi ;
4) l’entrevue en situation d’urgence.
médecin ou l’inrmière. L’information additionnelle sur la perception que le client a de sa maladie, sur sa capacité ou ses modes de fonctionnement,
ses activités de la vie quotidienne, ses habiletés
d’adaptation (coping), sa réaction à ses problèmes
de santé, ses modes de communication et ses
objectifs pour sa santé est recueillie spéciquement par l’inrmière. Cette démarche complète la
collecte de données à partir de laquelle les problèmes prioritaires seront déterminés.
1.4.1
1.4.2
Collecte de données en
entrevue initiale (complète)
Cette collecte de données inclut une histoire complète de santé et un examen physique. L’état de
santé actuel et antérieur du client y est décrit, et
ces données constituent la base à partir de laquelle
tous les futurs changements pourront être mesurés.
Cela conduit l’inrmière à déterminer les premiers
constats de l’évaluation. Dans les soins de première
ligne, la collecte de données initiale doit être complète ; elle s’effectue dans une unité de soins de
santé primaire telle qu’une clinique pédiatrique ou
de médecine familiale, par les inrmières à domicile ou dans les CSSS. Les professionnels de la
santé qui travaillent dans ces établissements sont
les premières personnes que le client consulte, et
ils ont la responsabilité d’assurer le suivi de son
état de santé. Chez une personne qui n’est pas
malade, cette collecte de données doit décrire son
état de santé, sa perception de la santé, ses forces
ou ses capacités (p. ex., ses comportements à l’égard
de sa santé), ses habiletés d’adaptation, son système
de soutien, ses tâches liées au développement et
tous les facteurs de risque ou les changements dans
ses habitudes de vie. Chez la personne malade, la
collecte de données inclut également une description de ses problèmes de santé, de son adaptation
à ceux-ci et de sa perception de la maladie.
Tant chez les personnes en santé que chez les
personnes malades, la collecte de données complète
est réalisée pour dépister les pathologies, tout
comme la façon dont les clients réagissent à celles-ci
ou à un problème de santé. Cette étape de dépistage
s’avère essentielle, car les professionnels des soins
primaires sont généralement les premiers, sinon les
seuls, à voir le client. Ils peuvent ensuite, au besoin,
le diriger vers un autre professionnel de la santé ou
l’aider à prendre des décisions et à se traiter de façon
appropriée. Cette collecte de données consigne également les réactions de la personne à ses problèmes
de santé. Cet élément important fournit de l’information additionnelle au sujet de la personne et peut
mener au dépistage de problèmes potentiels.
Dans les centres hospitaliers de soins aigus, la
collecte de données complète se fait après l’admission du client. Dans ces centres, les données
propres à la pathologie sont recueillies par le
12
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Collecte de données en cours
d’évolution (épisodique) ou
centrée sur un problème
Cette approche est utilisée dans le cas d’un problème
particulier ou présent pendant une courte période.
Ici, l’inrmière effectue une collecte de données plus
succincte, mais plus précise que la collecte de données initiale. Elle s’intéresse principalement à un
seul problème, à un indice complexe ou à une partie
du corps. Cette collecte de données est réalisée dans
tous les établissements de soins, qu’ils soient de première ligne ou de longue durée. Par exemple, pendant les deux jours suivant sa chirurgie, une
personne hospitalisée a soudainement une toux
grasse, de la dyspnée et de la fatigue. L’examen clinique, incluant l’histoire de santé et l’examen physique, se concentrera principalement sur les systèmes
respiratoire et cardiovasculaire. Il peut aussi s’agir
d’une personne qui se présente dans une clinique
ambulatoire avec une éruption cutanée. L’examen
clinique sera ciblé sur ce problème d’éruption cutanée, pour déterminer si elle est chronique ou aiguë,
associée à de la èvre, localisée ou généralisée. Les
données de l’examen clinique devront donc inclure
une description complète de l’éruption.
1.4.3
Collecte de données
en situation de suivi
L’état d’une personne relatif à ses problèmes de
santé devrait être réévalué à intervalles réguliers
et appropriés. Des changements se sont-ils produits ? Le problème s’est-il amoindri ou accentué ?
Quelles stratégies d’adaptation la personne
emploie-t-elle ? Tous les établissements utilisent
ce type de collecte de données, que ce soit pour
un suivi à court terme ou à long terme.
1.4.4
Collecte de données
en situation d’urgence
En situation d’urgence, la collecte des données est
accélérée, souvent effectuée en même temps que les
mesures de réanimation. Le diagnostic doit être
rapide et sûr. Par exemple, à l’urgence d’un centre
hospitalier, une consommation abusive de drogues
est suspectée chez une personne. Les premières
questions à lui poser seront les suivantes :
« Qu’avez-vous pris ? » « Combien en avez-vous
pris ? » « Quand en avez-vous pris ? » Pendant que
la personne est interrogée, ses voies aériennes, sa
respiration, sa circulation, son état de conscience
et ses incapacités sont simultanément évalués. Bref,
la collecte de données en situation d’urgence exige
une rapidité qui n’est pas nécessaire pendant une
collecte en cours d’évolution (épisodique)
4 .
1.5
Élargissement
du concept de santé
L’évaluation initiale vise à déterminer le prol actuel
de la situation de santé de la personne, en recueillant
par divers moyens (p. ex., l’état de santé actuel, les
antécédents personnels et familiaux – génogramme
et écocarte –, l’histoire psychosociale, la revue des
systèmes, l’examen physique, les outils d’évaluation
standardisés, des examens paracliniques) les données
de base pertinentes. Par la suite, il est important d’en
faire l’analyse et l’interprétation. Il importe également
d’avoir une conception claire de la santé, car celle-ci
aide à choisir les données d’évaluation qui devraient
être regroupées. Généralement, l’ampleur de la liste
des données recueillies est proportionnelle au
concept de santé qu’entretient l’inrmière. Le modèle
biomédical domine en Occident, où la santé est perçue comme une absence de maladie. La santé se situe
à l’opposé de la maladie, ces deux concepts se trouvant aux extrémités d’un continuum linéaire. Dans
cette idéologie, les maladies sont provoquées par des
agents pathogènes. Le modèle biomédical repose sur
la détermination des causes de la pathologie, le traitement des agents pathogènes et la guérison de la
personne. Les facteurs d’évaluation sont donc dirigés
vers une liste de signes et de symptômes associés à
chaque pathologie. La personne est déclarée en
bonne santé quand ces signes et symptômes sont éliminés. Quand une maladie se manifeste, le diagnostic médical sert à la reconnaître et à en expliquer la
cause. L’ENCADRÉ 1.2 explique la distinction entre
le diagnostic médical et le constat d’évaluation.
Le diagnostic et le traitement de la maladie
occupent une place importante dans le système de
santé québécois. Mais le modèle biomédical a des
limites. Il s’agit d’un concept développé dans les
années 1950. Aujourd’hui, la santé est envisagée dans
un contexte plus vaste qui ne fait plus gure de continuum linéaire. En d’autres termes, une personne pourrait se considérer comme en santé tout en étant atteinte
d’une maladie. C’est à la suite de ce changement de
paradigme que les habitudes de vie personnelle et
sociale, l’exercice physique, la nutrition et l’environnement ont suscité un intérêt grandissant. La notion
de bien-être a remplacé celle de santé. Le bien-être est
un processus dynamique et continu, une sorte de mouvement vers un degré de fonctionnement optimal.
Le but de la pratique inrmière au Québec est justement de rendre la personne apte à prendre en charge
sa santé selon ses capacités et les ressources que lui
offre son environnement, à toutes les étapes de sa vie
et quel que soit le stade de sa maladie, le cas échéant,
an d’atteindre un état de bien-être. En effet, elle vise
à rendre la personne capable d’assurer son bien-être
et de maintenir une bonne qualité de vie.
1
4
Le questionnaire AMPLE est
présenté de façon détaillée
dans le chapitre 4, Regard
global sur l’histoire de santé.
Le bien-être est une expérience subjective et multidimensionnelle résultant d’une harmonie entre les
aspirations de la personne, les gestes qu’elle fait
pour favoriser sa santé et son environnement. La
qualité de vie est un principe important, et l’inrmière doit mettre à prot les ressources personnelles
du client et celles de son environnement pour l’accroître. Elle amène le client à exprimer ses besoins
à cet égard et à donner un sens à sa situation de
santé. Les professionnels de la santé contribuent
donc à maximiser le potentiel du client et à l’assister
pour qu’il atteigne un état de bien-être optimal.
La considération de la personne comme un être
à part entière constitue l’essence même de la santé
holistique. Celle-ci englobe l’âme, le corps et l’esprit, qui sont interdépendants et qui évoluent dans
un ensemble appelé environnement. La santé
dépend de toutes ces entités réunies. La maladie
tire sa source de plusieurs origines, soit de la personne ou de l’environnement externe. Le traitement
de la maladie exige donc l’intervention de nombreux professionnels de la santé.
Les lignes directrices mettent l’accent sur le lien
entre le comportement de la personne et sa santé.
Un rapport de Statistique Canada (Statistique
Canada, 2012) afrme que la majorité des décès
survenant avant l’âge de 65 ans est évitable. La prévention revêt donc une importance particulière.
Elle se fait avec l’aide des services de première ligne
ENCADRÉ 1.2
Distinction entre diagnostic médical
et constat d’évaluation
Le diagnostic médical est employé pour évaluer l’étiologie (cause) de la maladie d’une
personne et prescrire un traitement approprié. Le constat d’évaluation est utilisé pour
associer le problème de santé à une cause et
pour évaluer la réponse de la personne à ses
problèmes de santé réels ou potentiels. Le
constat d’évaluation est également au cœur
du suivi clinique et permet de documenter les
réactions du client au traitement dans le PTI.
Par exemple, autant l’inrmière qui a évalué
madame Bastien que le médecin qui l’a vue
plus tard ont entendu les murmures vésiculaires diminués et les bruits surajoutés pendant l’auscultation pulmonaire. Il s’agit d’un
problème médical, mais aussi d’un problème
relevant du domaine infirmier. Le médecin
ausculte la personne pour diagnostiquer la
cause des bruits anormaux (dans ce cas-ci,
l’asthme) et pour prescrire le traitement
médical approprié. L’infirmière ausculte la
cliente pour détecter les bruits anormaux,
surveiller sa réponse au traitement et entreprendre des mesures de soutien et d’enseignement. Par exemple, elle peut enseigner à
madame Bastien les mesures comportementales qui peuvent l’aider à cesser de fumer et
lui recommander d’entreprendre un programme d’exercice physique pour améliorer
sa capacité pulmonaire.
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
13
qui axent leurs interventions sur le changement des
habitudes de vie de la population, le tabagisme,
l’alcoolisme et l’usage de drogues, le manque
d’exercice, l’alimentation déciente et les infections transmissibles sexuellement et par le sang. La
prévention est donc un concept plus large et plus
dynamique de la santé. La promotion de la santé
passe par un ensemble d’actes positifs que chacun
peut faire. Dans cette optique, l’objectif des professionnels de la santé est d’aider la personne à appliquer les choix qu’elle a faits en respectant ses
capacités, celles-ci pouvant varier dans le temps.
Les soins inrmiers font appel à plusieurs
aspects du modèle holistique – l’interaction de
l’esprit et du corps, l’unicité et l’harmonie du
client. La personne, la santé, l’environnement et
les soins sont des systèmes ouverts, dynamiques
et en état d’adaptation continuelle, tous liés les
uns aux autres. Chaque personne est responsable
de son état de santé et devient une participante
active à ses soins. La promotion de la santé et la
prévention de la maladie se situent donc au cœur
même des soins inrmiers.
Dans le modèle holistique, les facteurs utilisés
pour l’évaluation sont élargis pour inclure des
éléments tels que la culture et les valeurs, la
famille et les rôles sociaux, les comportements de
la personne à l’égard de ses soins, le stress lié au
travail, les tâches développementales, les frustrations et les échecs de vie. Tous ont une inuence
importante sur la santé.
1.6
Évaluation à toutes
les étapes de la vie
L’évaluation de l’état de santé est importante à toutes
les étapes de la vie. D’abord, connaître les tâches
développementales prévues pour chaque groupe
d’âge permet à l’inrmière de cibler quels sont les
comportements physique, psychosocial et cognitif
auxquels elle peut s’attendre de chaque personne.
Ensuite, une fois qu’elles sont apprises, les compétences pour effectuer l’évaluation deviennent plus
signicatives si elles sont considérées dans une perspective développementale. La maîtrise des habiletés
de communication permet de recueillir des renseignements pertinents pour compléter l’histoire
de santé, et ce, en tenant compte du développement de la personne à toutes les étapes de sa vie.
9
Dans le chapitre 9, Questionnaire général, mesure des
signes vitaux, la gure 9.18
présente un graphique illustrant la PA moyenne chez
des personnes apparemment en bonne santé de
la naissance à l’âge avancé.
14
Partie 1
L’examen physique est également plus révélateur
quand les données propres à l’âge sur les plans de
l’anatomie, des résultats normaux et anormaux sont
prises en compte. Par exemple, une PA systolique
normale moyenne pour une femme de l’âge de
madame Bastien est de 115 à 125 mm Hg
9 .
Pour chaque groupe d’âge, une approche holistique d’évaluation de la santé mène à une
Évaluation globale de la personne
orientation vers la promotion de la santé et du bienêtre. Il faut apprendre à travailler avec les forces de
la personne. Que fait-elle déjà qui favorise sa santé ?
Quel enseignement l’inrmière peut-elle lui donner
an qu’elle puisse augmenter son bien-être ?
Particularités culturelles et génétiques
Dans un modèle de santé holistique, les facteurs
d’évaluation doivent inclure la culture. Selon les
estimations de Statistique Canada (2013a), la population canadienne dépasse les 35 millions de personnes ; celle du Québec dépasse les 8 millions.
L’enquête nationale auprès des ménages de 2011
(Statistique Canada, 2013b) révèle que la population
compte plus de 200 origines ethniques, incluant les
groupes culturels associés aux peuples autochtones du Canada. Les origines les plus souvent
déclarées comptent les Anglais, les Français, les
Écossais, les Irlandais, les Allemands, les Chinois,
les Italiens, les Amérindiens, les Ukrainiens et les
Hollandais. Au Canada, 1 personne sur 5 appartient
à une minorité visible, soit 19,1 % de la population.
Selon cette enquête, en 2011, près de 6 264 800 personnes faisaient partie des minorités visibles. À titre
de comparaison, le recensement de 2006 avait dénombré 5 068 100 personnes appartenant à ce
groupe, soit 16,2 % de la population totale de
l’époque (Gouvernement du Canada, 2013). L’augmentation de la population issue des minorités visibles est attribuable en grande partie au nombre
d’immigrants qui sont arrivés au Canada en provenance de pays non européens au cours des dernières
décennies. Depuis 2006, les Sud-Asiatiques ont
devancé les Chinois pour devenir le groupe de minorités visibles le plus important au pays.
Pendant sa carrière, l’inrmière peut avoir à évaluer des personnes issues de plusieurs groupes ethniques différents, soit des visiteurs et des étudiants
étrangers, des membres de la famille de diplomates,
des immigrés, des réfugiés. Un problème sérieux se
pose toutefois, car on s’attend à ce que les professionnels de la santé connaissent et comprennent les
besoins en matière de santé des personnes de
milieux culturellement diversiés, sans avoir reçu
de formation pertinente en cette matière.
L’inrmière se doit d’agir de concert avec le client
an de respecter celui-ci dans ses croyances et ses
valeurs et d’obtenir sa collaboration dans la dispensation des soins. L’ensemble de ces mesures a principalement pour but de satisfaire les besoins du
client.
L’inclusion de l’héritage culturel dans l’évaluation de santé est d’une importance primordiale pour
recueillir des données précises et signicatives et
ainsi intervenir avec une attitude appropriée selon
la culture. Les membres de certains groupes culturels exigent que leur culture et leurs croyances
soient respectées et que les soins offerts en tiennent
compte. Étant donné la composition multiculturelle
du Canada et l’augmentation projetée du nombre
de personnes issues de milieux culturels divers, la
connaissance des croyances interculturelles et des
coutumes de ces personnes devient de plus en plus
importante dans le domaine inrmier.
1.7
Évaluation dans
la pratique avancée
Cette attention portée aux étapes de la vie, à l’holisme
et à la diversité culturelle n’enlève rien à l’importance des habiletés d’évaluation. Celles-ci doivent
être mises en pratique et rafnées jusqu’à l’atteinte
d’un haut niveau de compétence (inrmière d’expérience). Dans beaucoup de communautés, l’inrmière est la première professionnelle de la santé – et
souvent la seule – qui rencontre un client. Au centre
ENCADRÉ 1.3
hospitalier, l’inrmière est aussi la seule professionnelle qui côtoie continuellement la personne.
Les efforts continuels pour diminuer les coûts
du système de santé entraînent, chez la population
hospitalisée, des besoins en matière de soins de
santé grandissants, des hospitalisations raccourcies
et des congés plus précoces que dans le passé. Cette
situation demande une évaluation plus rapide et
efcace par l’inrmière. Des procédures qui exigeaient un séjour de plusieurs jours en centre hospitalier (p. ex., une chirurgie pour hernie inguinale,
l’insertion d’un cathéter veineux central pour l’alimentation parentérale totale) sont maintenant
effectuées en chirurgie d’un jour. En conséquence,
des inrmières visitent des personnes à domicile
pour l’évaluation en cours d’évolution et effectuent
ainsi le suivi. Ces situations exigent, de la part de
l’inrmière, des compétences en évaluation auxquelles sont intégrées une approche holistique et
une connaissance des problèmes propres à l’âge
des clients. L’ENCADRÉ 1.3 explique le rôle de l’inrmière praticienne spécialisée (IPS) au Québec.
1
Holisme : Système de pensée
pour lequel les caractéristiques
d’un être ou d’un ensemble ne
peuvent être connues que lors­
qu’on le considère et l’appré­
hende dans son ensemble,
dans sa totalité, et non pas
quand on en étudie chaque
partie séparément.
Rôle de l’inrmière praticienne spécialisée
Au Canada, depuis les années 1990, et au Québec, depuis 2003, le rôle de l’inr­
mière praticienne spécialisée (IPS) s’est accru. Cette modernisation du système
professionnel vise à utiliser de façon optimale les compétences de chacun et
constitue une occasion pour réorganiser les soins et les services dans un objec­
tif de qualité et d’accessibilité. L’IPS est une inrmière qui, par son savoir appro­
fondi, ses compétences spécialisées et son rôle élargi d’experte clinique, assure
aux clientèles dont elle assume la charge les interventions de soins, d’enseigne­
ment et de soutien requis par leurs besoins particuliers, et ce, en faisant preuve
d’un jugement clinique et d’une pensée critique. Elle effectue un travail de colla­
boration avec le médecin traitant et les autres professionnels de la santé
(Durand et Maillé, 2013 ; OIIQ et Collège des médecins du Québec [CMQ], 2006).
Elle intervient principalement de façon directe auprès des clients et de leur
famille dans une proportion de 60 à 75 % de son temps et de façon indirecte
auprès des inrmières à titre d’experte clinique et de consultante, tout en ayant
aussi des fonctions d’éducation et ultimement de recherche.
En plus de son rôle d’infirmière, elle exerce aussi des activités relevant du
domaine médical : la prescription de médicaments ou d’autres substances, d’exa­
mens paracliniques et de traitements médicaux ainsi que l’utilisation de tech­
niques diagnostiques ou thérapeutiques, ou de traitements médicaux effractifs
ou comportant des risques de préjudice.
L’IPS est une inrmière qui dispense, selon une approche globale et syner­
gique, des soins inrmiers et des soins médicaux qui répondent aux besoins
complexes des patients et de leur famille dans un domaine de spécialité,
en tenant compte de leur expérience en matière de santé. Pour ce faire, elle
doit posséder l’expertise dans un domaine clinique spécialisé qui repose à
la fois sur une solide expérience dans le domaine et sur une formation de
deuxième cycle en sciences inrmières et en sciences médicales. (OIIQ et
CMQ, 2006, p. 9)
Les IPS contribuent, par la même occasion, au développement et à l’épanouis­
sement de la profession inrmière.
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Indiquez, pour chaque énoncé, le type de collecte
le plus approprié à la situation.
a) Un homme est amené par les ambulanciers pour
une intoxication à la cocaïne.
b) Une cliente hospitalisée depuis cinq jours pour
pneumonie se plaint de dyspnée.
c) Vous recevez une mère et sa lle pour un bilan
de santé.
3. Quels éléments faut­il ajouter à ceux­ci si la per­
sonne est aux prises avec un problème de santé ?
d) Un homme que vous suivez depuis deux ans de
façon régulière pour la gestion de son diabète
se présente à son rendez­vous de contrôle.
4. Quels sont les quatre concepts clés qui doivent
guider la profession inrmière au Québec ?
2. Quels éléments devez­vous évaluer au cours d’une
collecte de données en entrevue initiale (complète)
chez une personne en santé ?
5. De quelle façon devez­vous effectuer les activités
professionnelles qui découlent de ces quatre
concepts an d’en maximiser la portée ?
Chapitre 1
Évaluation et jugement clinique
15
Dossier : Noélie Faustin
Noélie Faustin, âgée de 50 ans, est hospitalisée pour une douleur abdominale qui perdure depuis environ une semaine. Elle vient
d’un petit village rural au nord d’Haïti d’où
sont originaires ses ancêtres. Ses parents
étaient la troisième génération d’agriculteurs, et elle est la cadette d’une famille de
six enfants. Elle demeure au Canada depuis
environ cinq ans. Elle s’est présentée à l’urgence ce matin sur l’insistance de sa fille
qui était très inquiète au sujet de l’état de
sa mère.
2
Elle ne parle que quelques mots de français,
sa langue maternelle étant le créole. Au cours
de l’entrevue, vous avez appris que la douleur
est très vive et qu’elle se situe au QID ainsi
qu’au QIG. Elle a la diarrhée depuis 5 jours et a
perdu environ 4,5 kg au cours du dernier mois.
Vous observez également une rougeur oculaire.
Madame Faustin est inquiète, et elle prie à
plusieurs reprises durant la journée avec son
chapelet. Vous observez aussi dans sa chambre
une photo d’un saint catholique et divers artéfacts issus de la religion vaudou.
Le Canada, comme les États-Unis et de nombreux
autres pays occidentaux, devient de plus en plus
diversié, non seulement à cause de la mondialisation et de l’immigration, mais aussi parce que se
côtoient une variété de sous-cultures et qu’une multitude de styles de vie s’acceptent mutuellement.
Lorsqu’elle rencontre une personne pour la première fois, l’inrmière doit donc se poser plusieurs
questions. D’où vient cette personne ? De quelle
origine ethnique est-elle ? Quel est son héritage culturel ? De quelle religion est-elle ? Quel genre
de vie mène-t-elle ? Cette personne comprend-elle,
parle-t-elle et lit-elle le français ? Sinon, quelle
langue utilise-t-elle ? Quelles sont les croyances
et les coutumes de cette personne en matière de
santé et de maladie ? L’inrmière doit aussi s’interroger elle-même an de bien se connaître, tant sur
les plans de ses origines, de son héritage ethnique,
culturel et religieux et de ses compétences linguistiques que sur celui de ses propres croyances en
matière de santé et de maladie.
Au cours de sa formation professionnelle, l’inrmière étudie les tâches développementales et
les principes de la promotion de la santé à tous les
âges de la vie ; elle apprend également à réaliser
de nombreuses évaluations : une histoire complète de santé, une évaluation de la santé mentale,
de la violence familiale, de l’alimentation et de
la douleur ainsi qu’un examen physique complet
d’une personne. Toutefois, selon l’héritage – au
sens large – de cette personne, il peut y avoir un
écart important entre l’information recueillie au
cours de l’évaluation et les données obtenues pendant l’examen physique.
Il est donc important que l’inrmière possède
une compétence culturelle, c’est-à-dire qu’elle
ait une connaissance de l’héritage culturel, de la
langue à utiliser ainsi que des croyances et des
coutumes en matière de santé et de maladie de la
population à qui elle devra prodiguer des soins de
santé FIGURE 2.1.
FIGURE 2.1
L’inrmière développe une compétence culturelle
au cours de son expérience professionnelle.
2.1
Prol démographique
canadien
L’estimation de la population par Statistique
Canada en janvier 2014 est d’un peu plus de 35 millions de personnes (Statistique Canada, 2014a).
Environ une personne sur cinq est immigrante,
et parmi les immigrants, une personne sur six
est allophone. En effet, depuis le recensement
de 2001 – et comme le conrment les recensements de 2006 et 2011 –, le Canada est une société
de plus en plus multilingue, mais le portrait linguistique diffère d’un océan à l’autre. Or, si le
Canada accueille depuis longtemps des groupes en
provenance de l’Allemagne, de l’Italie, de la
Pologne, de l’Ukraine et des pays néerlandais,
depuis 1996, ce sont les personnes originaires des
Chapitre 2
Santé : État de complet bienêtre physique, mental et social
qui ne consiste pas seulement
en une absence de maladie ou
de handicap.
Maladie : Altération objective
de l’état de santé se dénissant
par une cause, des symptômes,
des signes cliniques et paracliniques, une évolution, un
pronostic et un traitement.
Allophone : Au Canada,
se dit d’une personne dont
la langue maternelle n’est
ni le français ni l’anglais.
Compétence culturelle : les soins selon la culture
17
pays de l’Asie et du Moyen-Orient qui ont enregistré les gains les plus importants sur le plan de l’immigration au Canada. Le taux de croissance
démographique canadien est le plus élevé de tous
les pays du G8, surpassé seulement par celui des
États-Unis, surtout à cause de l’accroissement
migratoire.
L’âge moyen de la population totale en 2005 se
situait autour de 36 ans, mais celle-ci vieillit. En
effet, le recensement de 2011 note une augmentation
de plus de 14 % de la population âgée de 65 ans et
plus, ce qui la porte à plus de 5 millions de personnes. La population canadienne connaît donc un
vieillissement important en nombre et en rapidité
(Statistique Canada, 2012a). Par ailleurs, parmi les
Canadiens d’origine italienne ou grecque, 1 personne sur 5 est âgée de 65 ans et plus.
Le prol linguistique du Canada s’est beaucoup diversié au gré des dynamiques régionales
d’immigration. Selon les données du recensement de 2011, les trois langues (non ofcielles)
les plus utilisées à la maison sont l’arabe, suivi
de l’espagnol et de l’italien. Dans la région d’Ottawa et de Gatineau, on retrouve un prol similaire à celui de Montréal, à la seule différence
que le chinois remplace l’italien comme troisième langue non ofcielle la plus parlée à la
maison. À Toronto, le cantonais (chinois parlé
dans le sud de la Chine), le pendjabi (Inde) et le
mandarin étaient les langues non ofcielles les
plus utilisées par les populations migrantes de
la région. Dans l’ouest du pays, les langues orientales gurent généralement parmi les langues les
plus parlées. À Vancouver, le pendjabi arrive au
premier rang suivi du cantonais et du mandarin.
À Calgary, le recensement de 2011 place le pendjabi au premier rang des langues non ofcielles
utilisées à la maison suivi du tagalog (Philippines)
et du mandarin. Enn, pour ce qui est de la ville
d’Edmonton, le tagalog arrive au premier rang,
suivi du pendjabi et du mandarin (Statistique
Canada, 2012b).
Selon Statistique Canada (2012b), 1 Canadien
sur 5 appartient à une minorité visible, soit
6,2 millions de personnes. Ce terme pourrait
perdre son sens si la tendance se maintient, car
dans certains villes canadiennes, par exemple à
Toronto, la majorité blanche est en voie de devenir
minoritaire. La fertilité des allophones demeure
la principale source de croissance démographique
dans les provinces les plus populeuses (Québec,
Ontario, Colombie-Britannique et Alberta). Parmi
les personnes âgées de moins de 15 ans, 15 % sont
issues de parents chinois, 24 % de parents pendjabi et 3 % de parents italiens. Néanmoins, sur le
plan de la langue, 9 personnes sur 10 déclarent
parler le français ou l’anglais à la maison ; au
Québec, près du tiers des anglophones ont un
conjoint francophone.
18
Partie 1
Évaluation globale de la personne
2.2
Immigration
Les immigrants sont des personnes qui habitent au
Canada, mais qui n’y sont pas nées. À ce titre, en
2011, le Canada comptait plus de 6,5 millions de
résidents nés à l’étranger. « Le xxe siècle a connu
le plus de mouvements d’immigration de son histoire. » (Fix et Passel, 2001, p. 1) Au Canada, six
personnes sur dix ont été admises à titre d’immigrants économiques en 2009 (Statistique Canada,
2012a). Toutefois, avec les nouvelles orientations
canadiennes en cette matière (Citoyenneté et
Immigration Canada, 2014), ce programme particulier d’immigration économique est appelé à disparaître. Or, si le mouvement migratoire ne
semble pas près de s’arrêter, la question du nombre
de personnes à accueillir se pose autant au Canada
qu’aux États-Unis. Les besoins de main-d’œuvre et
le souci de croissance sont au cœur du débat au
Canada, car le taux de natalité ne permet pas à la
population de se maintenir et de se renouveler en
dépit de la légère augmentation des naissances
constatée au cours des dernières années au Québec.
Selon le bilan démographique de l’Institut de la
statistique du Québec (2013), on dénombre un ux
migratoire d’environ 55 000 nouveaux arrivants
dans la province pour la seule année 2012, avec
un taux de rétention d’environ 80 %. Au Québec,
les dernières vagues d’immigration proviennent
notamment de la Chine, de la France et d’Haïti.
Dans un contexte de services de santé, des questions d’intérêt s’entrecroisent : quel sera l’effet de
l’immigration sur la prestation des services de santé
et sur la pratique des soins inrmiers ? Comment le
système de santé et les soins inrmiers se rejoignentils pour répondre aux besoins de populations d’origines culturelles et ethniques variées ? Les questions
sociopolitiques sont très souvent soulevées dans ce
segment de la population quant aux droits aux services de santé et à l’éducation. Bien qu’au Canada
ces services soient en partie publics, leur accès dans
une langue que les immigrants comprennent sans
avoir recours à une tierce personne (famille ou
interprète) n’est pas toujours possible. Si la scolarité
est gratuite pour les enfants, l’éducation des adultes
leur permettant d’accéder à un travail décent
dans leur domaine de compétence ne répond pas
toujours à leurs besoins dans toutes les régions du
Québec et du Canada.
Les professionnels de la santé côtoient plusieurs
catégories d’immigrants :
• les résidents permanents légaux ;
• les citoyens naturalisés ;
• les « sans-papiers » ;
• les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes remises en liberté venant d’autres pays ;
• les résidents permanents (non immigrants).
De nombreux nouveaux immigrants ont une
compréhension limitée des systèmes de soins de
santé canadien et québécois, des services médicaux ainsi que de la pratique et des interventions
en soins inrmiers modernes ; en outre, ils ne
maîtrisent pas toujours les deux langues ofcielles, ce qui complique la transmission et
la compréhension de l’information. Pourtant, la
communication est essentielle pour pouvoir offrir
des soins individualisés et répondre aux besoins
de ces personnes.
De plus en plus, pour les immigrants venant de
pays très différents culturellement et socialement,
le processus d’acculturation, que ce soit à l’école
ou dans la société, s’avère difcile et douloureux.
Les pertes et les changements découlant de l’ajustement à un nouveau système de valeurs, de
croyances ou de rôles sociaux représentent une
source de stress qui peut avoir de lourdes conséquences sur la santé.
L’inrmière doit donc en être consciente. Le
TABLEAU 2.1 propose une liste de facteurs de stress
qui peuvent être présents durant le processus
d’acculturation.
2.3
Multiculturalisme et santé
au Canada et au Québec
La Loi sur le multiculturalisme canadien (L.R.C.
[1985], c. 24 [4 e suppl.]) a été promulguée
en 1990, en réponse aux changements démographiques générés par l’immigration. Aujourd’hui, le
Canada est considéré comme une terre d’accueil par
excellence dans le monde, et le nombre d’immigrants
n’est pas près d’y diminuer ; au contraire, il s’accentuera à l’avenir. À l’instar du Canada, les États-Unis
ont publié le National Standards for Culturally and
Linguistically Appropriate Services in Health Care
(Ofce of Minority Health, Department of Health and
Human Services, 2001, p. 7), qui énonce ces normes :
« Les organisations de soins de santé devraient
s’assurer que les clients reçoivent, de la part du personnel, des soins à la fois efcaces, compréhensibles et dans le respect, qui sont compatibles avec les
croyances et les coutumes et offerts dans la langue de
leur choix. »
Entre autres à cause de ses lois, le Canada
entretient la vision d’une société libre qui permet
de rassembler des personnes de toutes origines
– ethniques et religieuses – où les racines de chacun sont source de fierté et d’inspiration
ENCADRÉ 2.1. Cet appel à la mobilisation est destiné à tous les groupes et à toutes les personnes
qui ont choisi de vivre dans ce pays. En 2005, le
gouvernement canadien a lancé une invitation à
tous les acteurs de la société – gouvernements,
organisateurs, personnes ainsi que communautés
TABLEAU 2.1
Facteurs de stress durant le processus d’acculturation
2
INSTRUMENTAL /
ENVIRONNEMENTAL
SOCIAL / INTERPERSONNEL
SOCIÉTAL
• Manque de ressources
nancières
• Barrière linguistique
• Manque d’accès aux
soins de santé
• Non-emploi
• Manque d’éducation
•
•
•
•
•
•
• Discrimination / Préjugés
• Niveau d’acculturation
• Environnement politique
et historique
• Statut légal
Perte du réseau social
Perte du statut social
Conit familial
Séparation
Conit intergénérationnel
Changement dans les rôles
sexuels
ethniques et ethnoculturelles – à s’engager activement dans la lutte contre le racisme en partageant à la fois les responsabilités qui s’y rattachent
et les avantages qui en découlent. Il s’agit du Plan
d’action canadien contre le racisme.
Ces initiatives visent entre autres les objectifs
suivants :
• offrir des soins efcaces qui mènent à des résultats positifs et à la satisfaction de la personne ;
• prodiguer des soins dans le respect de la personne et qui tiennent compte de ses valeurs, de
ses préférences et de ses besoins ;
• favoriser une compétence culturelle et linguistique qui résulte d’un ensemble de comportements congruents, d’attitudes et de politiques
formant un système qui rassemble les professionnels de la santé et qui permet le travail dans
des situations transculturelles FIGURE 2.2.
2.3.1
i
Le Plan d’action canadien
contre le racisme peut être
consulté au http://publications.
gc.ca/collections/Collection/
CH34-7-2005F.pdf.
Q
uestion de suivi
Dans la situation de
madame Faustin, nommez
deux éléments dont vous
devrez tenir compte an de
lui offrir un traitement qui
respectera ses croyances.
Compétences linguistiques
Selon Statistique Canada (2012a), il se parle plus
de 200 langues différentes au pays. Parmi les plus
récentes gurent le pendjabi, l’arabe, l’ourdou, le
tagalog et le tamoul. En nombre, selon le recensement de 2011, c’est un peu plus de 6,6 millions
de personnes qui s’expriment dans une « langue
non ofcielle », pour reprendre la nouvelle appellation d’allophone de Statistique Canada
(Statistique Canada, 2014b). Chez les peuples
autochtones, la langue crie est la plus utilisée (par
environ 83 475 personnes), suivie de l’inuktitut
(34 110 personnes) et de l’ojibwé (19 275 personnes). Le Canada compte aussi d’importantes
différences régionales quant aux langues parlées
à la maison. Les réalités de la diversité culturelle
et linguistique sont donc très différentes d’un
océan à l’autre. Ainsi, tandis qu’à Vancouver, c’est
le pendjabi, le cantonais et le mandarin qui sont
les langues non ofcielles les plus courantes, à
Montréal, l’arabe et l’espagnol dominent à titre de
langues non ofcielles les plus parlées (Stastistique
Canada, 2012a).
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
19
ENCADRÉ 2.1
Multiculturalisme et santé au Canada et au Québec : cadre juridique
AU CANADA
Au cours des 40 dernières années, le gouvernement du
Canada s’est doté d’un cadre juridique solide composé de
lois et de politiques. En regard des droits à l’égalité, la
Charte canadienne des droits et libertés est sans équivoque.
L’article 15. (1) de la Charte est clair : « La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont
droit à la même protection et au même bénéfice de la loi,
indépendamment de toute discrimination, notamment des
discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou
ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques. »
L’article 25 reconnaît et afrme expressément les droits existants – et ceux issus des traités – des peuples autochtones
du Canada.
D’autres lois ou textes complètent les positions de la Charte :
• la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C.
[1985], ch. H-6) ;
• la Déclaration canadienne des droits (S.C. 1960, ch. 44) ;
• la Loi sur l’équité en matière d’emploi (L.C. 1995, ch. 44) ;
• la Loi sur les langues officielles (L.R.C. [1985], ch. 31
[4e suppl.]) ;
• la Loi sur le multiculturalisme canadien ;
• la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés
(L.C. 2001, ch. 27) ;
• la Loi sur la citoyenneté (L.R.C. [1985], ch. C-29).
AU QUÉBEC
Dans le document Rapport et recommandations sur le Plan
d’action montréalais en santé publique 2003-2006 (Forum
des partenaires en santé publique mis sur pied sous
l’égide du Conseil régional de développement de l’île de
Montréal, 2003, p. 6) découlant de l’amendement de la Loi
sur la santé publique en décembre 2002, un des principes
directeurs concerne l’adaptation des interventions au caractère multiculturel de Montréal et se lit ainsi :
« Le caractère multiculturel de la population montréalaise doit être pris en compte dans l’élaboration et
la mise en œuvre du plan d’action en santé publique.
Ainsi, les programmes doivent être mieux adaptés an
de répondre aux besoins des communautés ethnoculturelles. Une attention particulière doit être portée
aux problèmes de discrimination et d’exclusion dont
sont victimes les personnes issues de minorités
visibles. »
Ces principes ont été réitérés dans les formulations récentes
des plans de l’Agence de la santé et des services sociaux de
Montréal (2010).
RÉFÉRENCES
Agence de la santé et des services sociaux de Montréal (2010).
Planification stratégique : Des priorités urbaines pour des
Montréalais en santé 2010-2015. Repéré à http://publications.
santemontreal.qc.ca/uploads/tx_asssmpublications/isbn9782-89510-778-1_01.pdf
Forum des partenaires en santé publique mis sur pied sous
l’égide du Conseil régional de développement de l’île de
Montréal (2003). Rapport et recommandations sur le Plan
d’action montréalais en santé publique 2003-2006. Repéré à
www.santecom.qc.ca/bibliothequevirtuelle/hyperion/a37013.pdf
Gouvernement du Canada (2008). Patrimoine canadien.
Repéré à www.pch.gc.ca
Gouvernement du Québec (2014). Loi sur la santé publique
(2014). Repéré à www2.publicationsduquebec.gouv.qc.
ca/dynamicSearch/telecharge.php ?type=2&file=/S_2_2/
S2_2.html
(Statistique Canada, 2014c). Aux États-Unis, près
de 1 personne sur 5 âgée de plus de 5 ans parle une
autre langue que l’anglais à la maison. Les langues
les plus courantes sont l’espagnol (62 %), le chinois
(4,8 %), le français (2,1 %) et le français créole
(3,5 %), l’allemand (1,8 %) et le tagalog (2,6 %).
Comme au Canada, parmi les autres langues en
usage figurent le vietnamien (2,3 %), l’italien
(1,2 %), le coréen (1,9 %), le russe (1,5 %) et le polonais (1 %) (Statistique Canada, 2012b ; U.S. Census
Bureau, 2013).
FIGURE 2.2
L’inrmière développe une compétence culturelle et linguistique lui
permettant de prodiguer des soins adaptés à la culture du client.
En 2011, au Canada, 9,8 % de la population
parlait le plus souvent l’anglais seulement à la
maison, 80,0 % parlait le français seulement et
7,1 % parlait une langue non ofcielle seulement
20
Partie 1
Évaluation globale de la personne
La discrimination fondée sur l’ethnie, la couleur
et la nationalité d’origine revêt diverses formes et
limite souvent l’accessibilité à des services de soins
de santé. Selon Flores (2006), les barrières linguistiques ont des effets délétères sur la santé ; les personnes possédant une faible maîtrise de la langue
disposent de ressources limitées quant aux soins
de santé et présentent un risque élevé de nonadhésion au régime médical et thérapeutique.
L’Enquête internationale sur l’alphabétisation
et les compétences des adultes (EIAC) (Statistique
Canada, 2003) avait pour but de déterminer dans
quelle mesure les adultes utilisent bien l’information imprimée pour fonctionner dans la société.
Elle mesurait les compétences des répondants
dans quatre domaines : 1) la compréhension de
textes suivis ; 2) la compréhension de textes schématiques ; 3) la numératie (soit l’ensemble des
connaissances en mathématiques permettant à
une personne d’être fonctionnelle en société) ;
4) la résolution de problèmes. Les résultats
démontrent que près de 9 millions de Canadiens
(42 %) âgés de 16 à 65 ans obtiennent un score audessous du 3e niveau sur une possibilité de 10
sur le plan de la compréhension de textes suivis
ou schématiques et de 4 sur 10 sur celui de la
numératie. Ces compétences sont encore plus
faibles chez les peuples autochtones et les immigrants qui parlent une langue autre que le français
ou l’anglais. Ces résultats signifient qu’une
grande proportion des immigrants vivant au pays
peuvent difcilement comprendre et suivre les
directives écrites de la posologie d’une ordonnance ou de celle indiquée sur le contenant d’un
médicament offert en vente libre.
Les personnes dont les habiletés sont limitées
pour comprendre, parler, écrire et lire la langue
française affrontent une multitude d’obstacles qui
peuvent se solder par un accès réduit aux services
médicaux et sociaux auxquels elles ont droit. De
nombreux programmes de santé et de services
sociaux fournissent de l’information uniquement
dans la langue de la majorité. Lorsqu’elles se présentent dans les centres hospitaliers ou dans les
cliniques pour obtenir des soins de santé, des personnes ayant une faible compétence en littératie se
trouvent souvent en présence de réceptionnistes,
d’inrmières et de médecins qui ne parlent que le
français ou l’anglais. Les barrières linguistiques
limitent donc sérieusement la possibilité d’accès à
ces services et à ces programmes.
En outre, les obstacles liés à la langue entraînent
parfois des délais quant à l’offre de services, voire
un refus ou une inaccessibilité ; une information
inexacte ou incomplète peut aussi mener à des
services inadéquats. Dans de telles circonstances,
les conséquences sur la santé des personnes qui
maîtrisent mal la langue de la population dominante peuvent être importantes. Certains États
américains (p. ex., la Californie, le Massachusetts,
l’État de New York) ont reconnu la gravité du problème et exigent des fournisseurs de services
qu’ils procurent une assistance linguistique aux
clients qui se présentent dans les milieux de soins
de santé. En Ontario, les services de télésanté
font de même. Au Canada, le Consortium national
de formation en santé assure une formation postsecondaire en français dans tous les domaines de
la santé, dans différentes régions, an de pouvoir
desservir la population francophone résidant hors
Québec.
L’inrmière doit connaître les diverses façons de
communiquer avec les personnes qui ne comprennent pas le français et d’interagir avec un interprète ; la présence de celui-ci est importante non
seulement pour la traduction verbale des mots,
mais aussi pour donner de l’information sur les
aspects culturels propres à la personne
3 .
2.3.2
3
Le chapitre 3, Entrevue, présente les façons de communiquer avec des personnes
dont la langue maternelle
n’est pas le français, ainsi
que la manière d’interagir
avec un interprète.
Compétence culturelle et
soins adaptés à la culture
Ce chapitre met l’accent sur le développement de
la compétence culturelle et sur l’habileté à prodiguer des soins adaptés à la culture du client. De
telles interventions ont de nombreuses facettes,
présentées tout au long de ce chapitre. An de
s’acquitter des mandats énoncés par les lois régissant les services de la santé, les professionnels
du domaine, dont les inrmières et les médecins,
se doivent d’être culturellement compétents an
de prodiguer des soins adaptés à la culture de
chaque personne. La culture relève du domaine
de l’inconscient ; elle inuence les perceptions
quant à la santé et à la maladie, et ce, autant pour
le client que pour le professionnel de la santé.
Comment dénir alors la compétence culturelle
et de quelle façon est-il possible de l’atteindre ?
La compétence culturelle implique de devenir
conscient de sa propre existence, de ses sensations, de ses pensées et de son environnement
pour s’ouvrir à une connaissance et à une compréhension de la culture du client, pour accepter
et respecter les différences et pour adapter les
soins de façon congruente à la culture de la personne (Purnell et Paulanka, 2008).
Q
uestion de suivi
Si vous avez de l’enseignement à donner à madame
Faustin en lien avec le traitement et la prévention de
sa maladie, quelles mesures
devrez-vous prendre quant à
l’aspect linguistique ?
Selon Purnell et Paulanka (2008), la compétence culturelle est un processus conscient et non
linéaire, et l’évolution progressive menant à l’acquisition d’une telle compétence se divise en
quatre stades. Au premier stade, l’incompétence
est inconsciente, c’est-à-dire qu’il y a absence de
conscientisation du manque de connaissances à
l’égard de l’autre culture. Au deuxième stade, l’incompétence devient consciente et renvoie à une
sensibilisation suffisante pour reconnaître
le manque de connaissances relativement à la
culture du client. Au troisième stade, la compétence consciente évolue progressivement vers la
capacité d’apprendre et de prendre en compte des
éléments de la culture d’autrui susceptibles d’être
utiles aux professionnels de la santé pour concevoir des interventions culturellement adaptées. Le
quatrième stade, soit la compétence inconsciente,
se caractérise par l’acquisition d’automatismes
culturellement adaptés à des clients de différentes
cultures. Ce dernier stade est difcile à atteindre,
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
21
2
et la majorité des professionnels de la santé ne
parviendront qu’à la compétence consciente. En
l’absence de soins culturellement adaptés, la participation des clients à la continuité des soins est
loin d’être acquise et met en péril l’efcacité des
services de soins de santé.
Les soins adaptés à la culture doivent être offerts
avec sensibilité et compétence, de façon appropriée. Il est utile de consulter les écrits scientiques
à ce propos ; les principaux éléments sont présentés
brièvement dans ce chapitre.
Socialisation : Processus
qui permet à la personne de
développer sa capacité
de fonctionner de manière
acceptable selon les valeurs
de la société où elle évolue.
• Être sensible à la culture sous-entend que les
soignants possèdent une certaine connaissance
de base et adoptent des attitudes constructives
envers la diversité culturelle des populations
rencontrées dans leur milieu de pratique.
• Être sensible à la culture implique que les soignants utilisent les connaissances nécessaires
acquises antérieurement an d’offrir les meilleurs soins de santé possible à une personne.
• La compétence culturelle signie que les soignants comprennent la situation globale d’une
personne – incluant la sensibilisation au statut
d’immigrant, aux facteurs de stress, aux autres
facteurs sociaux et aux similarités et différences
culturelles (Spector, 2009) – et y répondent adéquatement.
De plus en plus, les établissements de santé
doivent avoir du personnel culturellement compétent. Cependant, cette approche ne s’acquiert
pas en quelques mois ; elle se construit peu
à peu au l des apprentissages et des expériences
de la vie. Étant donné les changements dans le
prol démographique au Canada et l’énorme
impact de l’immigration sur la situation des services de santé, il devient impératif d’acquérir
un ensemble de connaissances fondées sur des
savoirs solides pour relever ce dé dans la pratique. Ces connaissances relèvent de plusieurs
domaines :
• l’héritage personnel de l’inrmière ;
• l’héritage de la profession inrmière ;
• l’héritage du système des services de santé ;
• l’héritage personnel du client.
2.4
Héritage culturel
Le patrimoine culturel d’une personne est fondé
sur le concept de la cohérence de l’héritage. Estes
et Zitzow (1980), en faisant référence à la culture
tribale des Amérindiens, décrivent la cohérence
de l’héritage comme étant le degré du reet de la
culture d’une personne dans ses habitudes de
vie. La théorie a été élargie pour tenter d’étudier à
quel point la personne exprime son héritage traditionnel, qu’elle soit d’origine amérindienne,
22
Partie 1
Évaluation globale de la personne
européenne, latino-américaine, asiatique
ou africaine. Les valeurs dénotant un héritage
cohérent se trouvent sur un continuum, et une
personne peut posséder à la fois les valeurs caractéristiques d’un héritage cohérent (valeurs traditionnelles – c’est-à-dire selon les normes de la
culture traditionnelle) et celles d’un héritage incohérent (valeurs modernes – c’est-à-dire qu’il y a
acculturation aux normes de la culture dominante). Le concept d’héritage cohérent inclut la
détermination des antécédents de la culture d’une
personne, de son ethnie, de sa religion et de ses
expériences de socialisation (Spector, 2009).
2.4.1
Culture
Si tous s’entendent sur l’importance de la culture,
il en va tout autrement en matière de dénition. La
majorité des dénitions tendent à omettre des
aspects importants de la culture ou, trop souvent,
à la rendre tellement générale que le sens original
s’est perdu. Par exemple, une dénition peut avancer que c’est l’amalgame des pensées, des communications, des actions, des croyances et des valeurs
des groupes sociaux organisés selon l’ethnie et la
religion. La culture est un tout complexe, dont
toutes les composantes sont liées ; elle n’est pas
innée, mais apprise. Toutefois, bien que la capacité
d’apprendre la culture soit génétique, l’objet ou le
domaine d’apprentissage en lui-même ne l’est pas,
et il doit être appris dans la famille et par la socialisation dans la communauté. La culture dépend
aussi du modèle social sous-jacent formé des
connaissances, des croyances, des arts, des lois, de
la morale et des coutumes. Bien que la culture se
tisse au moyen d’un réseau de communications,
une grande partie de celle-ci est transmise de façon
non verbale (Spector, 2009).
Enn, la culture comporte quatre caractéristiques : 1) elle est apprise à partir de la naissance et
au l des processus d’acquisition langagiers et de
socialisation ; 2) elle est partagée par tous les
membres d’un même groupe culturel ; 3) elle est
adaptée à des conditions liées à l’environnement,
à des facteurs techniques et à la disponibilité des
ressources naturelles ; 4) elle est dynamique et en
changement constant.
La culture est un phénomène universel sans
lequel personne n’existe. Pourtant, celle qui se
construit dans toute société est toujours spécique
et distincte, englobant toutes les connaissances,
croyances, coutumes et habiletés acquises par les
membres de cette société. Néanmoins, dans une
même culture, certains groupes de personnes partagent des croyances, des valeurs et des attitudes
différentes de celles des autres. Ces différences
découlent de l’ethnicité, de la religion, de l’éducation, de l’emploi, de l’âge et du sexe. Il s’agit alors
de sous-groupes culturels.
2.4.2
Ethnicité
Les antécédents culturels sont une partie fondamentale de l’origine ethnique, alors que l’ethnicité
est associée à un groupe constitué à l’intérieur d’un
système social qui dit posséder des traits communs,
dont l’origine géographique, le statut migratoire, la
religion, la couleur de la peau, la langue, les valeurs,
les traditions ou les symboles et les préférences
alimentaires.
Le terme ethnique est souvent associé à de forts
sentiments négatifs, voire à du rejet dans la population en général. Dans des pays aussi vastes que le
Canada et les États-Unis, pourtant composés de
nombreuses ethnies – et où les Amérindiens sont
les seuls vrais natifs –, les différences ethniques et
d’ethnicité demeurent parfois un sujet tabou. Les
inrmières doivent être sensibles à la très grande
diversité ethnique et culturelle de leur milieu. Cette
connaissance sociale du milieu et cette sensibilité
à la différence sont des facteurs essentiels pour la
qualité de l’intervention dans le milieu, et ce,
notamment pour établir des liens de conance avec
les clients an qu’ils soient réceptifs aux services de
santé. Il n’est pas inhabituel que les groupes minoritaires abordent les institutions publiques (associées au groupe culturel majoritaire) avec un peu
de méance. On sous-estime parfois l’ampleur de
la diversité. En effet, au moins 106 groupes ethniques vivent aux États-Unis, et plus de 120 sont
représentés au Canada ; quant aux nations amérindiennes, il en existe plus de 500 aux États-Unis. La
plupart de ces nations sont représentées au Canada
ou aux États-Unis, un phénomène peu courant sur
la planète (Spector, 2009 ; Statistique Canada,
2013b) FIGURE 2.3.
2.4.3
Religion
Le troisième élément principal de l’héritage d’une
personne est la religion. Celle-ci renvoie à la
croyance en une puissance divine ou suprahumaine ou en des pouvoirs auxquels il faut se plier
ou qu’il faut vénérer à titre de créateur(s) et de souverain(s) de l’Univers. Un système de croyances,
de coutumes et de valeurs éthiques demeure la
principale raison du développement de l’ethnicité
(Abramson, 1980). La religion peut être vue
soit comme une expérience de spiritualité partagée, soit comme des valeurs, des croyances et des
coutumes en vertu desquelles les personnes sont
élevées ou qu’elles ont adoptées pour répondre à
leurs besoins personnels de spiritualité au moyen
d’actions communales, dont l’afliation religieuse,
l’assistance et la participation aux activités de l’institution religieuse, la prière ou la méditation et les
pratiques religieuses comme telles.
2
Par ailleurs, la spiritualité peut mettre davantage
l’accent sur le « soi » et inclure un système de
croyances autre que la religion (Skalla et McCoy,
2006). La pratique religieuse s’exprime de différentes et de nombreuses façons : cultes, sectes,
confessions et Églises. La relation entre l’ethnicité
et la religion est évidente et constitue souvent le
déterminant d’un groupe ethnique. La religion fournit un cadre de référence et une perspective qui
guident les personnes qui y adhèrent. L’enseignement
religieux à l’égard de la santé peut proposer une
philosophie et un système de coutumes dictés par
une forme de contrôle social dont les valeurs et les
normes éthiques sont précises et spéciques. Ce
contrôle est associé à la santé dans le sens où l’observance du code religieux contribue à l’harmonie
spirituelle et à la santé du corps. Ainsi, la maladie
est parfois perçue comme une punition découlant
de la violation du code religieux et moral.
La religion joue un rôle majeur dans la manière
dont les personnes considèrent et effectuent leurs
soins de santé. Trop souvent, cet aspect est ignoré ;
dans plusieurs milieux de soins, le personnel ne
pose même pas la question de l’appartenance religieuse. Pourtant, la religion fait partie de la vie,
au-delà du corps et de la pensée (Levin, 2001). Les
faits suivants démontrent l’inuence de la religion
sur les pratiques de santé :
• l’afliation et l’appartenance religieuses favorisent la santé par la promotion de comportements appropriés et de saines habitudes de vie ;
• la pratique régulière dans un groupe religieux
favorise la santé, car elle offre un soutien qui
atténue le stress et brise l’isolement ;
• la foi favorise la santé en guidant la personne
vers des sentiments d’espoir, d’optimisme et
d’attentes positives.
FIGURE 2.3
Une multitude de groupes ethniques est représentée au Canada.
Les religions encouragent la promotion de nombreux comportements favorables à la santé. Même
s’ils ne sont pas représentatifs de toutes les religions, les exemples suivants en fournissent une
illustration : méditer, faire de l’exercice et maintenir
Chapitre 2
Q
uestion de suivi
Tous les soirs, madame
Faustin boit un thé mé­
dicinal préparé avec des
plantes de son pays d’ori­
gine que sa lle lui apporte
de la maison. Comment
devriez­vous réagir ?
Compétence culturelle : les soins selon la culture
23
une bonne forme physique, dormir sufsamment,
être vacciné, accepter de faire examiner son corps,
entreprendre un pèlerinage pour des raisons de
santé, dire la vérité sur son état de santé physique
et mental, maintenir la viabilité de la famille, espérer la guérison, s’adapter au stress, se soumettre au
dépistage génétique et au counseling, être capable
de vivre avec un handicap, prendre soin des enfants
(Levin, 2001).
À titre de composante intégrale de la culture
d’une personne, les croyances religieuses inuencent
celle-ci dans l’explication des causes de sa maladie,
dans sa perception, sa gravité, son choix de guérisseurs. En période de crise, telle une maladie grave
mettant la vie en danger, la religion peut devenir une
source de consolation pour la personne et sa famille.
Les dogmes et les chefs spirituels exercent parfois
une inuence considérable sur la prise de décision
quant à l’acceptation du traitement médical ou
chirurgical, au choix des guérisseurs et à d’autres
aspects de la maladie.
Religion et spiritualité
La religion veut apporter des réponses aux mystères
de la vie et de la mort, de la souffrance, du bien et
du mal. Dans les milieux de soins, il est fréquent
de rencontrer des gens qui cherchent une signication spirituelle à leurs maladies ou à leurs incapacités. Certains professionnels de la santé trouvent
difcile d’aborder cet aspect pendant leur évaluation en raison du niveau d’abstraction et de la
nature personnelle du sujet, alors que d’autres discutent de contenu spirituel sans aucune gêne. Il est
essentiel que l’inrmière se sente à l’aise avec ses
propres croyances spirituelles pour procéder à une
évaluation efcace des besoins spirituels d’autrui
(Andrews et Boyle, 2003).
Q
uestion de suivi
Formulez une question
que vous pourriez poser
à madame Faustin pour
vérier si elle accorde une
signication spirituelle à
sa maladie.
Spiritualité : Caractéristique
inhérente à l’être humain. Elle
comprend communément les
dimensions de sens, de transcendance, de foi et de croyance,
les attitudes à l’égard de la vie
et de la mort, les valeurs, les
relations et l’élargissement
de la conscience.
24
Partie 1
Si la religion et la spiritualité sont des facteurs
qui peuvent améliorer le moral, la résilience et la
volonté de guérir chez le client, elles peuvent par
contre constituer un facteur de contrainte pour le
personnel soignant. Les religions et la spiritualité
sous-tendent des valeurs et des structures normatives qui font en sorte que les clients font face à de
véritables dilemmes moraux quant à l’acceptation
ou au refus de certains traitements ou de certains
soins. Dans cette situation, le personnel soignant
se voit également confronté à des enjeux éthiques
et bioéthiques. Parmi les exemples les plus courants
gurent le refus des transfusions sanguines chez
les Témoins de Jéhovah et l’attitude de certains
croyants à l’égard du sexe du personnel traitant.
Pour les soignants, ces contraintes renvoient à des
débats d’actualité en bioéthique.
Il est important de distinguer spiritualité et religion. La spiritualité découle de l’expérience de vie
unique de chacun et de l’effort personnel à trouver
un but et une raison de vivre. Bien que toutes les
religions du monde offrent des interprétations
Évaluation globale de la personne
variées à plusieurs des mystères de la vie, la majorité des gens en cherchent une compréhension et
une interprétation personnelles à un moment ou à
un autre de leur vie. Ultimement, cette quête pour
découvrir un être suprême (que ce soit Allah, Dieu,
Jéhovah ou Yahvé) ou une vérité unicatrice transcende vers la signication, le but et l’intégrité de
l’existence.
La religion est construite à partir d’un système
organisé de croyances relativement à la cause, à la
nature et au but de l’Univers, particulièrement
la croyance en un dieu ou en plusieurs dieux. Au
Canada, près de 7 personnes sur 10 s’identient
comme étant catholiques romaines ou protestantes,
selon les données de l’Enquête nationale auprès
des ménages de 2011 (Statistique Canada, 2013a).
Au même moment, le nombre de Canadiens déclarant des religions telles que l’islam, l’hindouisme,
le sikhisme et le bouddhisme a crû de façon
importante.
L’identication religieuse dans les différents
groupes ethniques prend toute son importance en
raison de l’interrelation entre la religion et la
culture. Selon une enquête du Washington Post,
la préoccupation religieuse chez les immigrants
récents se traduit, pour 64 % des Noirs et pour
la même proportion de Latinos-Américains, par la
perception que leur Église est un moyen de préserver leur culture, comparativement à moins du tiers
des Blancs (Broadway, 2001). Depuis les deux dernières décennies, un grand nombre d’immigrants
proviennent de l’Asie et de l’Amérique latine. Les
changements les plus marquants sur le plan religieux se situent au sein de la population asiatique,
où l’on est passé de 63 % de chrétiens en 1990 à
43 % en 2001, alors que les religions asiatiques
(p. ex., le bouddhisme, l’hindouisme, l’islam) ont
augmenté leur présence. En effet, en quelques
décennies seulement, les religions asiatiques se
sont développées pour constituer près du tiers des
religions pratiquées aux États-Unis, en passant de
15 à 28 % du total de croyants sur la population
américaine. Pendant cette même période, le nombre
d’adhérents à la religion catholique est demeuré
stable (de 26 % en 1990 à 25 % en 2002) (American
Religious Identication Survey 2001, 2001 ; Pew
Forum on religion and Public Life, 2007).
Pour plusieurs personnes, les liens entre santé,
spiritualité et religion sont manifestes. À titre
d’exemple, certains autels religieux, certains sites,
voire certains objets personnels (statuettes, icônes
religieuses) favorisent ce rapprochement entre spiritualité, santé et religion. Ces pratiques spirituelles
rapprochant santé et religion se retrouvent dans
presque toutes les traditions et tous les cultes religieux, que ce soit le bouddhisme, l’hindouisme, l’islam ou le christianisme. Au Québec notamment, la
culture du « frère André » a laissé une marque profonde dans l’imaginaire et les pratiques religieuses
des Québécois. Une visite à l’oratoire Saint-Joseph à
Montréal et la vue des différents objets de cultes et
témoignages de guérison peuvent sufre pour témoigner de l’importance de ce lieu chez certaines
personnes.
Si la tendance de l’immigration inue sur les nouveaux citoyens, aujourd’hui, l’intérêt se tourne vers
les groupes amérindiens. Le profil religieux
de ceux-ci ressemble à celui des Blancs non
latino-américains : 20 % sont baptistes, 17 % sont
catholiques, et 17 % n’afchent aucune préférence
religieuse. Seulement 3 % des Amérindiens s’identient à une religion tribale, ce qui peut être le reet
du nombre grandissant de ces personnes vivant dans
des centres urbains hors des réserves (American
Religious Identication Survey 2001, 2001).
2.4.4
Socialisation
La socialisation se dénit comme le processus
d’évolution au sein d’une culture et d’acquisition
des caractéristiques de ce groupe en particulier.
Le milieu éducationnel – primaire, secondaire,
collégial, universitaire ou professionnel – fournit
une forme de socialisation. Pour plusieurs personnes qui ont été socialisées à l’intérieur des
frontières d’une « culture traditionnelle », la culture
nord-américaine ou celle du pays d’accueil devient
une seconde identité culturelle. Toutefois, pour
les immigrants en provenance d’un pays de l’Est
ou d’un pays en voie de développement, la socialisation à la nouvelle culture est perçue comme
un processus douloureux et extrêmement difcile,
que ce soit à l’école ou dans la société. Avec le
temps, plusieurs adoptent le biculturalisme, qui
se traduit par une double identité et souvent par
une « loyauté » divisée entre la culture d’origine
et la nouvelle (LaFrombose, Coleman et Gerton,
1993). En outre, plusieurs personnes qui ont été
socialisées dans des milieux où les ressources traditionnelles de santé diffèrent de celles du pays
d’accueil préfèrent parfois utiliser ce type de
soins, même si elles ont accès à des services
modernes.
La perception du monde qu’a une personne
dépend de sa culture, de sa religion, de son ethnie
et de sa socialisation ; aucun de ces aspects ne peut
être considéré de façon isolée, car ceux-ci forment
un tout : la personne elle-même.
D’autres termes sont liés à la socialisation et à
l’héritage culturel :
• l’acculturation : c’est le processus d’adaptation
et d’acquisition d’une autre culture avec laquelle
une personne est en contact ;
• l’assimilation : il s’agit du processus par lequel
une personne acquiert une autre identité culturelle et devient en ce sens semblable aux
membres de la culture dominante ;
• le biculturalisme : c’est une situation où il y a
coexistence de deux cultures dans un même
pays impliquant le contact de deux langues.
Non seulement est-il primordial pour l’inrmière d’acquérir des habiletés à réaliser des évaluations de l’héritage d’une personne, mais il est
également important d’apprendre ces concepts et
de comprendre que ce sont les premiers pas vers
l’acquisition d’une compétence culturelle. Il
importe d’examiner les facteurs liés à l’héritage
cohérent et de répondre aux questions concernant
l’évaluation de l’héritage culturel pour la personne
et sa famille.
2.4.5
Q
uestion de suivi
Nommez des objets personnels qui peuvent laisser
croire à un rapprochement
entre spiritualité, santé et
religion dans la situation
de madame Faustin.
Orientation temporelle
L’approche des gens quant à l’orientation temporelle est inhérente à la socialisation. Cet aspect
demeure l’une des sources de conit le plus souvent invoquées entre les inrmières et les personnes d’antécédents culturels différents, surtout
si leurs perceptions temporelles ne sont pas identiques. Selon Kluckhohn (1990), il existe trois
façons différentes de percevoir le temps.
1. L’accent est mis sur le passé ; dans ce cas, les
traditions et les ancêtres jouent un rôle important dans la vie de la personne. Par exemple,
plusieurs Asiatiques, Amérindiens, Antillais
et Africains ont une grande considération pour
leurs ancêtres et valorisent les traditions
ancestrales. Dans les moments de crise, dont
la maladie, une personne orientée vers le passé
voudra consulter ses ancêtres pour leur
demander de l’aide ou pour qu’ils la guident
durant la maladie.
2. L’accent est mis sur le présent ; dans ce cas, la
personne n’accorde que peu d’attention au passé
ou à l’avenir. Elle n’est concernée que par le « ici
et maintenant », et l’avenir est perçu comme
étant vague ou imprédictible. Il sera difcile
d’encourager ce type de personne à planier
(p. ex., le congé de l’hôpital) ou à reconnaître
les futurs effets secondaires ou les réactions
néfastes des médicaments. En outre, ces personnes ne voient pas la nécessité de la vaccination infantile ou du vaccin contre la grippe,
l’hépatite ou d’autres affections auxquelles les
adultes sont exposés.
3. L’accent est mis sur l’avenir ; le progrès et le
changement prennent alors une place prépondérante dans la vie de la personne. Celle-ci
peut exprimer du mécontentement quant au
présent ou au passé. En matière de santé, elle
veut être au courant des traitements et des
équipements de pointe pour régler un problème particulier. Elle exprimera volontiers ses
préoccupations à l’égard des médecins et des
inrmières, qu’elle percevra peut-être comme
étant dépassés.
Chapitre 2
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Faustin, de quelle façon
qualieriez-vous son
niveau de socialisation
en lien avec l’héritage
culturel ?
Compétence culturelle : les soins selon la culture
25
2
2.5
Évaluation de
l’héritage culturel
Les facteurs suivants indiquent un héritage cohérent ;
les exemples qui les accompagnent peuvent servir
de guide pour déterminer l’écart entre l’héritage traditionnel et l’identité reconnue par l’inrmière et la
personne, c’est-à-dire les croyances et les coutumes
culturelles de la famille nucléaire, de la famille élargie et de la communauté ethnoreligieuse.
1. Le développement culturel durant l’enfance
s’est déroulé dans le pays d’origine ou dans un
voisinage d’immigrants du même groupe ethnique et religieux au Canada.
Où la personne est-elle née ? Où a-t-elle grandi ?
L’inrmière et la personne ont chacune grandi
dans un environnement ethnique particulier composé, par exemple, d’Italiens, de Noirs, de
Latino-Américains ou de Juifs, dans une ville ou
un quartier exposé à la culture, à la langue, aux
aliments et aux coutumes de ce groupe particulier.
2. Les membres de la famille élargie encourageaient la participation aux activités religieuses
et culturelles traditionnelles.
Les parents de la personne l’ont-ils encouragée
à participer aux activités religieuses ou ethniques de son groupe ? Devait-elle se rendre,
après les heures régulières d’école, à d’autres
cours ou activités religieuses ?
Les parents et les membres de la famille élargie
et de la communauté ethnoreligieuse encourageaient la personne à connaître son héritage
ethnoculturel, ils lui faisaient fréquenter une
école religieuse (paroissiale), et la plupart des
activités sociales étaient associées à l’Église.
3. La personne visite fréquemment son pays d’origine ou retourne dans son « ancien voisinage »
au Canada.
La personne a-t-elle visité le pays ou le voisinage d’origine de sa famille ?
Le désir de revoir le pays d’origine ou l’ancien
voisinage est exprimé par de nombreuses personnes ; cependant, plusieurs ne peuvent ou
ne veulent pas y retourner pour diverses raisons. Par exemple, les gens qui sont venus ici
pour échapper à la persécution religieuse ou
ceux dont les familles ont été tuées durant la
Seconde Guerre mondiale, pendant l’Holocauste, dans l’hécatombe du Cambodge ou au
cours d’autres massacres plus récents survenus en Afrique ne souhaitent pas retourner
dans leur pays d’origine. D’autres raisons
peuvent expliquer ce choix : les conditions
politiques dans le pays où sont nées ces personnes, l’absence d’amis ou de famille demeurée dans ce pays.
26
Partie 1
Évaluation globale de la personne
4.
La maison familiale de la personne est située
à l’intérieur de la communauté ethnique dont
elle est membre.
Qui sont les personnes vivant dans le voisinage
de la demeure actuelle ?
Comme adulte, la personne a élu domicile avec
sa famille dans le voisinage ou la communauté
où les gens partagent un héritage similaire.
5.
La personne participe aux événements ethniques
culturels, aux chants et aux danses typiques en
arborant parfois les costumes traditionnels
durant les festivals ou les fêtes nationales.
La personne participe-t-elle aux célébrations
de son héritage culturel ?
La personne est active au sein de groupes
sociaux et culturels et participe aux festivités
de sa famille. Par exemple, on fête la SaintJean-Baptiste dans l’Ouest canadien, et la fête
des Acadiens est célébrée en Louisiane.
6.
La personne a grandi au sein de la famille élargie.
Qui demeurait dans la maison avec la famille ?
Était-ce de la parenté ?
Lorsque la personne a grandi, les grandsparents, les oncles et les tantes demeuraient
dans la même maison ou étaient très rapprochés.
Le cadre de référence social de la personne
était la famille immédiate et la famille élargie.
7.
La personne maintient des contacts réguliers
avec la famille élargie.
La personne garde-t-elle des liens avec sa
famille ?
La personne conserve des liens étroits par des
visites ou par d’autres formes de communication avec les membres de la famille de la même
génération, ceux de la génération plus âgée et
les membres de la génération plus jeune. Cela
inclut les oncles, les tantes et les cousins.
8.
Le nom de la personne n’a pas été changé pour
une orthographe canadienne-française.
Le nom de famille de la personne a-t-il été
transformé à son arrivée au Canada ? Le nom
a-t-il été changé pour faciliter l’assimilation ?
Plusieurs personnes ont vu leur nom modié
par un employé de l’immigration à l’entrée au
pays ou l’ont fait par choix personnel pour le
rendre plus « canadien » an de s’intégrer plus
facilement à la culture dominante.
9.
La personne a fréquenté une école confessionnelle (non publique) dans laquelle la philosophie ethnique et religieuse était semblable à
celle de la culture familiale.
Quelle école la personne a-t-elle fréquentée ?
L’école était-elle publique ou privée ?
L’éducation de la personne joue un rôle majeur
dans la socialisation, et son but principal est
de socialiser celle-ci selon la culture dominante. À l’école publique ou privée, les enfants
apprennent entre autres le français, les coutumes et les normes de vie au Canada. Dans
certaines écoles privées ou de confession religieuse, les enfants apprennent aussi le français,
mais ils sont socialisés à la culture et aux
normes religieuses et ethniques particulières
du groupe qui subventionne l’école.
10. La personne s’engage principalement dans des
activités sociales avec d’autres individus ayant
les mêmes antécédents culturels et ethniques.
Qui sont les amis de la personne et à quelle
fréquence les voit-elle ?
Par exemple, la majeure partie du temps libre
d’une personne est passé dans la famille ou
avec des amis de sa communauté religieuse ou
ethnoculturelle.
Par exemple, la personne qui s’identie comme
ethnocanadienne a tendance à soutenir davantage les activités ethniques (Spector, 2009).
Quatre autres questions simples peuvent fournir de l’information sur les antécédents de la
personne :
11. La personne connaît la culture et la langue de
son pays d’origine.
1. Participez-vous surtout à des activités sociales
avec les membres de votre famille ?
La personne parle-t-elle ou lit-elle la langue de
ses parents ou de ses grands-parents ?
2. La majorité de vos amis a-t-elle des antécédents
ethnoculturels similaires aux vôtres ?
Par exemple, la personne a été socialisée à la
manière traditionnelle de la famille et exprime
cela comme un thème central de sa vie.
3. Mangez-vous surtout des aliments de tradition
familiale ?
12. La personne exprime de la erté à l’égard de
son héritage ethnoculturel.
La personne s’identie-t-elle comme Canadienne ou comme Canadienne immigrée
(ethnocanadienne) ?
ENCADRÉ 2.2
2
L’outil Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ENCADRÉ 2.2 présente une série de questions
qui peuvent être posées pour effectuer une évaluation de l’héritage. Il est important de poser les
questions graduellement. Si la personne devient
anxieuse, il vaut mieux s’interrompre et intégrer
les questions à une partie de l’histoire de santé.
Les réponses à ce questionnaire peuvent fournir
une cote servant à mesurer si la personne s’identie à l’héritage traditionnel ou si elle est acculturée ou assimilée à la culture canadienne moderne
dominante.
Q
4. Participez-vous surtout aux traditions religieuses
de votre famille ?
Si la personne répond positivement à deux questions ou plus parmi celles-ci, il y a une forte probabilité qu’elle ait recours à des pratiques de santé
associées à l’héritage traditionnel.
uestion de suivi
Comparez les données du
portrait clinique de madame
Faustin et les questions
de l’Échelle d’évaluation
de l’héritage culturel.
Comment qualieriez-vous
son héritage culturel ?
Échelle d’évaluation de l’héritage culturel
Les questions suivantes peuvent servir aux proches aidants pour commencer à
déterminer l’héritage ethnique, culturel et religieux d’une personne et la relation personnelle à l’égard des soins traditionnels de santé. Plus l’association
s’avère forte entre ces éléments et l’identication personnelle, plus l’héritage
est traditionnel.
1. Où êtes-vous né ?
2. Où sont nés vos parents et vos grands-parents ?
a. Mère :
b. Père :
c. Grand-mère maternelle :
d. Grand-mère paternelle :
e. Grand-père maternel :
f. Grand-père paternel :
3. Combien de frères et de sœurs avez-vous ?
4. Dans quel type de milieu avez-vous grandi ? Urbain / Rural / Banlieue. Où ?
5. Dans quel pays vos parents et vos grands-parents ont-ils grandi ?
a. Mère :
b. Père :
c. Grand-mère maternelle :
d. Grand-mère paternelle :
e. Grand-père maternel :
f. Grand-père paternel :
6. Quel âge aviez-vous à votre arrivée au Canada ?
7. Quel âge avaient vos parents et vos grands-parents à leur arrivée
au Canada ?
a. Mère :
b. Père :
c. Grand-mère maternelle :
d. Grand-mère paternelle :
e. Grand-père maternel :
f. Grand-père paternel :
8. Qui demeurait avec vous lorsque vous étiez enfant ?
9. Avez-vous gardé contact avec :
a. Vos tantes, vos oncles, vos cousins ? Oui / Non
b. Vos frères et sœurs ? Oui / Non
c. Vos parents ? Oui / Non
d. Vos propres enfants ? Oui / Non
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
27
ENCADRÉ 2.2
Échelle d’évaluation de l’héritage culturel (suite)
10. Votre famille demeure-t-elle à proximité de votre domicile ? Préciser :
11. À quelle fréquence environ visitez-vous les membres de votre famille qui
demeurent à l’extérieur de votre maison ? Tous les jours / Toutes les
semaines / Tous les mois / Moins d’une fois l’an / Jamais
12. Le nom original de votre famille a-t-il été modié ? Oui / Non
13. Quelle est votre appartenance religieuse ? Catholique / Juive / Confession
protestante / Autre / Aucune
14. Votre conjoint(e) est-il (elle) de la même religion que vous ? Oui / Non
20. À quelle fréquence fréquentez-vous votre institution ou communauté religieuse ? Plus de une fois par semaine / Une fois par semaine / Une fois
par mois / Aux fêtes spéciales seulement / Jamais
21. Pratiquez-vous votre religion ou d’autres activités spirituelles dans votre
maison ? Oui / Non
Préciser : Prière / Lecture de la Bible, du Coran, de la Torah, etc. / Régime
alimentaire / Célébration de fêtes religieuses / Méditation / Autre
Décrire :
22. Préparez-vous la nourriture selon vos antécédents ethniques ? Oui / Non
Préciser :
15. Votre conjoint(e) a-t-il (elle) les mêmes antécédents ethniques que vous ?
Oui / Non
Préciser :
Préciser :
23. Participez-vous aux activités ethniques de votre communauté ? Oui / Non
Préciser :
16. Quel type d’école avez-vous fréquenté ? Publique / Privée / Confessionnelle
Chant / Célébrations des fêtes / Danse / Costumes / Festivals / Autre
17. Vivez-vous dans un voisinage, un quartier ou une communauté où les gens
ont les mêmes origines ethniques et religieuses que vous ? Oui / Non
Décrire :
18. Êtes-vous membre d’une institution ou d’une communauté religieuse ?
Oui / Non
Préciser :
19. Vous décrivez-vous comme un membre actif de votre communauté ?
Oui / Non
24. Avez-vous des amis ayant les mêmes antécédents religieux que vous ? Oui / Non
25. Vos amis ont-ils les mêmes antécédents ethniques que vous ? Oui / Non
26. Quelle est votre langue maternelle ?
Parlez-vous cette langue ? De préférence / À l’occasion / Rarement
27. Lisez-vous votre langue maternelle ? De préférence / À l’occasion / Rarement
Source : Spector, Rachel E., Culture Care Guide, 6e éd., © 2004, pp. 321-323. Traduit avec la permission de Pearson Education, Inc., Upper Saddle River, NJ.
2.6
Croyances et coutumes
liées à la santé
Au début du chapitre, la santé a été dénie comme
un état de bien-être complet – à la fois physique,
mental et social – qui n’équivaut donc pas seulement en une absence de maladie ou de handicap.
Avant de déterminer si les pratiques culturelles sont
bénéques, nuisibles ou neutres, il faut saisir la
logique des systèmes de croyances et de coutumes
qui découlent de l’héritage d’une personne ; puis,
l’inrmière s’assure de bien comprendre la nature
et la signication des pratiques de santé selon la
perspective culturelle de la personne.
Il existe une grande variation culturelle dans
la façon dont les symptômes et les conditions de
maladies sont perçus, diagnostiqués, étiquetés
et traités. L’inrmière ne doit pas présumer que
les symptômes perçus et exprimés par les clients
correspondent aux termes reconnus et familiers pour ces maladies ou ces syndromes dans
les milieux de soins de santé (Wenger, 1993). La
même maladie peut être source d’ostracisme dans
une culture ou, à l’inverse, représenter une amélioration du statut dans une autre. À titre
d’exemple, l’épilepsie est vue comme contagieuse et non traitable chez les Ougandais, une
honte pour les familles grecques, le reet d’un
28
Partie 1
Évaluation globale de la personne
déséquilibre physique chez les Mexicains et,
dans d’autres cultures, le signe d’une faveur
envoyée par Dieu sous forme d’une épreuve à
traverser.
Les symptômes physiques sont aussi perçus et
rapportés d’une foule de façons. Par exemple, les
gens d’origine méditerranéenne ont tendance à
exprimer plus de symptômes physiques communs
– et plus souvent – que les personnes d’Europe du
Nord ou d’héritage asiatique. Dans la langue
chinoise, il n’y a pas d’équivalent au terme tristesse ; pourtant, les Chinois éprouvent ce sentiment
à un moment ou à un autre de leur vie. Pour exprimer l’émotion dans la culture chinoise, les clients
somatiseront leurs symptômes ou exprimeront
leurs expériences mentales en symptômes physiques (p. ex., des plaintes de symptômes cardiaques, car le centre de l’émotion est le cœur).
L’inrmière peut faire une évaluation exhaustive
des fonctions cardiovasculaires pour ne trouver
que des résultats négatifs aux examens paracliniques. En poursuivant l’évaluation, elle apprend
que la personne vit une perte et éprouve du chagrin
(p. ex., la mort d’un ami intime ou d’un parent, un
divorce ou une séparation). Bien que certains cliniciens biomédicaux ou scientiques considèrent
cela comme une maladie psychosomatique,
d’autres reconnaissent que ces symptômes sont
culturellement acceptables et se présentent comme
l’expression somatique d’une inharmonie émotionnelle (Wenger, 1993).
Pour les clients, l’étiquetage du symptôme et le
diagnostic dépendent de l’ampleur de la différence
entre les comportements de la personne et ceux
acceptés comme étant normaux par le groupe, des
croyances à l’égard de la cause de la maladie, du
degré de stigmatisation rattaché à un ensemble particulier de symptômes, de la prévalence de la condition pathologique et de la signication de la maladie
pour la personne et sa famille.
À travers l’histoire, les humains ont tenté de
comprendre les causes de la maladie. Des théories
causales ont été formulées sur les bases de l’identité
ethnique et religieuse, de croyances, de la classe
sociale, de perspectives philosophiques et du
niveau de connaissances. L’inrmière détermine ce
que la personne croit être la cause de sa maladie.
Plusieurs personnes qui entretiennent des croyances
traditionnelles dénissent la santé comme étant un
état d’équilibre et la maladie comme une perte de
cet équilibre.
Particularités liées au développement
La maladie durant l’enfance est une situation particulièrement difcile. Les adultes et les enfants
ont des besoins spirituels qui varient selon leur
stade de développement et le climat religieux dans
la famille. Les perceptions des parents à l’égard
de la maladie de leur enfant sont partiellement
inuencées par les croyances religieuses. Par
exemple, certains parents croient que la transgression des préceptes religieux est responsable de
l’anomalie congénitale de leur enfant. D’autres
attendent trop longtemps avant de consulter les
services médicaux, car ils croient que la prière
devrait être essayée en premier. Certains types de
traitement (p. ex., une transfusion sanguine, des
médicaments contenant de la caféine, une alimentation ou des produits défendus par la religion) et
certaines procédures sont perçus comme des
tabous culturels, c’est-à-dire des pratiques à éviter
(à la fois chez les enfants et les adultes).
Les valeurs entretenues par les cultures dominantes, tant canadienne qu’américaine, telles que
l’indépendance, les soins personnels et la productivité, ont une inuence sur les adultes vieillissants de ces sociétés. Les Nord-Américains
qualient une personne d’âgée lorsqu’elle atteint
l’âge chronologique de 65 ans et lui retirent en tout
ou en partie sa charge de travail ; en comparaison,
d’autres cultures reconnaissent d’abord la personne comme incapable de travailler, pour ensuite
la qualier de personne âgée. En adoptant l’approche culturelle pour travailler auprès de personnes vieillissantes issues de différentes cultures,
il faut prendre en compte que ces personnes
veulent atteindre une forme d’intégrité en acceptant la responsabilité de ce qu’elles ont fait de leur
vie et en acquérant un sens d’accomplissement
personnel. Les personnes qui atteignent ce sentiment d’intégrité perçoivent le vieillissement
comme une expérience positive, s’adaptent à leur
espace personnel et aux relations sociales, gardent
le sentiment d’être utiles, commencent à faire le
bilan de leur existence et préparent leur n de vie.
2
Les personnes âgées mettent parfois au point
leurs propres façons de composer avec la maladie
par des soins personnels, avec l’aide des membres
de la famille et le soutien de groupes sociaux.
Certaines cultures ont développé des attitudes et
des comportements particuliers à l’égard des personnes âgées qui incluent des soins humanistes et
la désignation de certains membres de la famille
pour prodiguer les soins. Les adultes âgés peuvent
avoir des responsabilités familiales spéciales – par
exemple, dans la culture amish, celle d’offrir l’hospitalité aux visiteurs et, dans les groupes originaires
des Philippines, de communiquer des habiletés et
de transmettre la sagesse aux plus jeunes.
Les immigrants âgés qui ont déjà eu à adapter
leurs habitudes de vie en quittant leur pays d’origine pour s’établir au Canada ou ceux qui déménagent de la campagne à la ville (ou le contraire)
ne connaissent pas toujours les soins de santé
offerts, les programmes de prévention, les bienfaits
des soins de santé et des programmes de dépistage
auxquels ils sont admissibles. Parfois, ces personnes en sont à différents stades du choc culturel,
c’est-à-dire le stade de désorientation ou d’incapacité à répondre au comportement d’un groupe
culturel nouveau en raison de l’étrangeté, de la
mauvaise connaissance ou de l’incompatibilité de
leurs perceptions et de leurs attentes.
2.7
Causes traditionnelles
de la maladie
La causalité de la maladie peut être perçue selon
trois perspectives principales : 1) biomédicale (ou
scientifique) ; 2) naturaliste (ou holistique) ;
3) magicoreligieuse.
2.7.1
Perspective biomédicale
La théorie de la causalité biomédicale ou scientique est fondée sur le postulat que les événements de la vie ont une relation de cause à effet,
que le corps humain fonctionne plus ou moins
mécaniquement (p. ex., de façon analogue à une
automobile), que tout dans la vie peut être réduit
ou divisé en parties (p. ex., réduire l’être humain
à l’aspect physique, mental ou spirituel) et que la
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
29
réalité peut être observée et mesurée (p. ex., par
des tests d’intelligence, des mesures psychométriques du comportement). Parmi les explications
biomédicales, la théorie des germes impute la
responsabilité de conditions de maladies particulières à des organismes microscopiques tels que
les bactéries et les virus. La majorité des programmes de formation des médecins, des inrmières et des autres professionnels de la santé
adhèrent aux théories biomédicales ou scientiques pour expliquer les causes physiques et psychologiques des maladies.
2.7.2
Perspective naturaliste
La deuxième façon d’expliquer la cause d’une maladie est la théorie naturaliste ou holistique, plus
fréquemment adoptée par les Amérindiens, les
Asiatiques et d’autres cultures, qui croient que la
vie des humains n’est qu’un aspect de l’ordre général du cosmos. Ces personnes peuvent être d’avis
que les forces de la nature doivent être conservées
dans un état d’équilibre et d’harmonie.
Certains Asiatiques croient à la théorie du yin et
du yang, selon laquelle la santé existe quand tous
les aspects de la personne sont en équilibre parfait.
Enracinée dans l’ancienne philosophie chinoise du
Tao, la théorie du yin et du yang énonce que tous les
organismes et objets de l’Univers sont faits des
forces énergétiques du yin et du yang. Le siège
des forces énergétiques se situe dans le système nerveux autonome, où le maintien de la santé correspond à l’équilibre entre les forces opposées. L’énergie
yin représente le féminin et les forces négatives, dont
le vide, la noirceur et le froid, alors que les forces
yang sont mâles et positives, émettant la chaleur et
la plénitude. Selon cette théorie, les aliments sont
répertoriés en chaud et en froid et sont transformés
en énergie yin et yang lorsque le corps les métabolise. Les aliments yin sont froids, et les aliments yang
sont chauds. On consomme des aliments froids dans
le cas d’une maladie chaude et des aliments chauds
pendant une maladie froide. La théorie du yin et du
yang est le fondement de la médecine orientale (ou
chinoise) adoptée par de nombreux Canadiens et
Américains d’origine asiatique.
La perspective naturaliste énonce que les lois de
la nature créent le déséquilibre, le chaos et la maladie. Les adeptes de cette vision utilisent des métaphores telles que le pouvoir de guérison de la nature
et parlent de la terre comme d’une mère. À titre
d’exemple, dans la perspective chinoise, la maladie
n’est pas perçue comme une intrusion, mais plutôt
comme un événement du cours de la vie et un signe
externe du manque d’harmonie interne.
Plusieurs groupes, notamment latino-américains,
arabes, noirs et asiatiques, adoptent la théorie de la
maladie du chaud/froid comme modèle explicatif
dont les origines remontent à la théorie des humeurs
30
Partie 1
Évaluation globale de la personne
de l’ancienne Grèce. Les quatre humeurs du corps
– le sang, le phlegme, la bile noire et la bile
jaune – régularisent les fonctions corporelles
de base et sont décrites en termes de température, de sécheresse et d’humidité. Le traitement de
la maladie consiste alors à soustraire ou à ajouter
du froid, du chaud, de la sécheresse ou de l’humidité pour restaurer l’équilibre des humeurs.
Les liquides, les aliments, les herbes, les médicaments et les maladies sont désignés comme étant
chauds ou froids selon les effets perçus par le corps
et non en fonction de leurs caractéristiques
physiques. L’otite, les douleurs, les crampes thoraciques, la paralysie, les troubles gastro-intestinaux,
le rhumatisme et la tuberculose sont des exemples
de maladies causées par le froid qui entre dans le
corps. Parmi les maladies causées par une surchauffe du corps gurent les abcès dentaires, les
maux de gorge, les éruptions cutanées et les maladies rénales.
Selon la théorie de la maladie du chaud/froid,
la personne est touchée de façon globale et non
seulement par un malaise particulier. Les adeptes
de cette théorie maintiennent que la santé consiste
en un état positif de bien-être total, incluant les
aspects physique, psychologique, spirituel et social.
Paradoxalement, le langage utilisé pour décrire
cette dissection articielle du corps en différentes
parties est lui-même un reet de la perspective biomédicale ou scientique et non de l’approche naturaliste ou holistique.
2.7.3
Perspective magicoreligieuse
La troisième théorie par laquelle les gens expliquent
la cause de la maladie est magicoreligieuse. La prémisse stipule que le monde est vu comme une
arène où dominent des forces supranaturelles.
Le sort du monde et les êtres vivants dépendent de
forces supranaturelles bonnes ou malveillantes.
Des exemples de causes magiques de la maladie
incluent la croyance au vaudou ou à la sorcellerie
observée chez certaines personnes originaires
de quelques pays des Caraïbes. Les « guérisons par
la foi » sont fondées sur les croyances religieuses
et prévalent surtout parmi les membres de certaines religions chrétiennes y compris les scientistes chrétiens, alors qu’une variété de rituels de
guérison se retrouve dans d’autres religions, dont
le catholicisme romain et la religion mormone.
Il est évidemment possible de combiner différentes visions du monde, et de nombreuses personnes ont tendance à avancer plus de une
explication quant à la cause de leur maladie. La
vaste majorité des inrmières adoptent la vision
biomédicale ou scientique, en raison de leur profession, mais d’autres aspects gagnent en popularité, dont certaines techniques de gestion de la
douleur par l’acupuncture, les thérapies par les
plantes, l’hypnose, la thérapie du toucher et le
biofeedback.
Les amulettes sont des objets ou des fétiches
portés sur une corde ou une chaîne autour du cou,
du poignet ou de la taille en guise de protection
contre l’« œil maléque » ou les « mauvais esprits »
qui pourraient être transmis d’une personne à une
autre ou provenir d’origines supranaturelles. Ces
amulettes peuvent aussi être accrochées dans la
maison, dans l’automobile ou au travail. La médecine traditionnelle utilise l’environnement naturel
– les herbes, les plantes, les minéraux et les substances animales – pour traiter les maladies. Ces
remèdes arrivent au Canada en provenance des
quatre coins du monde. Ils sont offerts en pharmacie, dans les supermarchés et dans les magasins
d’aliments naturels. D’autres objets ou substances
sont réservés à un usage externe. La FIGURE 2.4
illustre différentes amulettes. La FIGURE 2.5 présente des exemples de remèdes traditionnels.
2.7.4
Guérison et culture
Dans le cas d’un échec de son autotraitement, la personne peut se tourner vers les guérisseurs traditionnels, spirituels ou religieux ou vers la médecine
scientique. Toutes les cultures ont leurs préférences
en matière de guérisseurs ; elles reconnaissent les
symptômes d’une mauvaise santé, les comportements
acceptables du malade et les traitements. En plus de
solliciter l’aide médicale et scientique de l’inrmière,
les clients demanderont parfois celle de guérisseurs
traditionnels ou religieux. Bien que la subdivision
de la personne en différentes parties soit un concept
occidental, certaines personnes d’origine latinoaméricaine ou amérindienne ne peuvent croire en une
guérison complète, à moins que le rétablissement
corporel, mental et spirituel ne soit accompli en entier.
Par exemple, un client d’origine latino-américaine
atteint d’une infection respiratoire peut prendre à la
fois les antibiotiques prescrits par un médecin ou une
inrmière praticienne spécialisée, les tisanes recommandées par le curandero et réciter aussi les prières
suggérées par le prêtre catholique. Plusieurs personnes
de différentes croyances ont recours à la prière et
visitent des endroits de culte pour demander la guérison. Il existe un grand nombre de lieux de pèlerinage
au Canada, aux États-Unis et dans le monde : l’oratoire Saint-Joseph à Montréal, la basilique SainteAnne-de-Beaupré près de Québec, le sanctuaire
Notre-Dame-du-Cap dans la région de Trois-Rivières,
l’ermitage Saint-Antoine de Lac-Bouchette, Lourdes
en France, Fatima au Portugal et Chimayo au
Nouveau-Mexique en sont quelques-uns.
2
Q
uestion de suivi
À partir de ce que vous
venez de lire et des données contenues dans la
mise en situation, à quelle
perspective de la maladie
associez-vous madame
Faustin ?
La diversité des croyances et des coutumes
utilisées dans le processus de guérison par les
FIGURE 2.4
L’œil bleu en vitre de Turquie, montré ici, est un exemple d’amulette qui peut être accrochée dans la maison. B Une graine de semence et une corde rouge peuvent
être placées dans le berceau du bébé, selon l’héritage culturel mexicain. C Ces bracelets peuvent être portés pour protéger une personne, selon l’héritage culturel des
communautés des Caraïbes. D Ce petit paquet est placé dans le berceau ou la chambre du bébé, selon l’héritage culturel japonais.
A
FIGURE 2.5
Ce « tonique », vendu dans des boutiques d’herboristerie, est utilisé par certains pour traiter l’asthme. B Le sac de médecine traditionnelle d’un shaman amérindien
est utilisé pour transporter des médicaments. C Les feuilles contenues dans ce paquet peuvent être utilisées pour traiter l’indigestion, selon l’héritage culturel chinois.
D Cette chandelle peut être allumée par une personne d’héritage culturel mexicain pour se « purier ».
A
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
31
populations ethnoculturelles résidant au pays
dépasse les limites de ce chapitre. Il importe d’être
sensibilisé aux pratiques traditionnelles et de
reconnaître l’existence d’autres types de méthodes
complémentaires à la guérison. Bien qu’il soit
impossible d’afrmer que toutes les approches ethnoculturelles rattachées à la guérison sont inoffensives, la majorité d’entre elles ne présente pas de
danger, indépendamment de leur efficacité.
L’ENCADRÉ 2.3 présente une série de questions
et d’exemples de réponses relatifs à ce type
d’évaluation.
ENCADRÉ 2.3
En réponse à cette question, les gens qui démontrent une forte association à
l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ont tendance à voir la santé
comme étant axée sur l’holisme (considérer l’être humain dans son
ensemble) et l’équilibre, alors que les personnes qui ont été socialisées aux
moyens modernes de la culture dominante tendent à voir la santé comme une
interrelation entre la pensée et le corps, mettant l’accent sur la capacité de
se déplacer et de vaquer à leurs occupations quotidiennes.
2. Comment évaluez-vous votre santé ?
Ici, les inrmières ont tendance à évaluer la santé comme étant excellente
ou bonne, alors que les personnes profanes ou non professionnelles tendent
à mettre l’accent sur le déséquilibre et à adopter une façon holistique de
dénir la maladie.
3. Comment décrivez-vous votre maladie ?
En réponse à cette question, les gens qui démontrent une forte associa tion à l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel ont tendance à mettre
l’accent sur le déséquilibre et à adopter une façon holistique de dénir la
maladie. À l’opposé, on retrouve des personnes pour qui les explications
et le sens de la maladie sont moins (sinon aucunement) ancrés dans des
croyances traditionnelles. Ces dernières semblent plus réceptives aux
explications des sciences médicales telles qu’elles sont pratiquées dans
les institutions occidentales. Par conséquent, ces personnes dissocient la
maladie du corps des forces ou fondements spirituels et acceptent généralement plus facilement les explications de nature médicale.
4. Que croyez-vous être la cause de votre maladie ?
a. Le changement environnemental – la croyance selon laquelle la personne
passe d’un endroit où il fait chaud à un endroit où il fait froid (ou vice
versa).
b. L’œil malveillant – il s’agit d’une ancienne croyance qui persiste encore
aujourd’hui. Les gens croient que la maladie est causée par une personne
ou un esprit les regardant de façon malicieuse. Cette maladie peut être
prévenue par le port d’amulettes et guérie par divers remèdes et pratiques.
c. L’exposition aux courants d’air – cette croyance d’origine européenne
maintient que l’air froid soufflant sur le corps peut rendre malade. La
prévention est de porter un châle sur les épaules.
d. La punition de Dieu – cette approche est commune à plusieurs personnes
de croyances traditionnelles.
e. La perte et le deuil – c’est une cause de la maladie à la fois moderne et
traditionnelle.
Partie 1
Malgré la présence de nombreux soignants traditionnels, l’inrmière verra des personnes d’origine latino-américaine se tourner vers un
curandero, un espiritualista (spiritualiste), un
yerbo (herboriste) ou un sabedor (guérisseur qui
manipule les os et les muscles par massage). Des
Noirs mentionneront avoir reçu l’assistance d’un
hougan (prêtre ou prêtresse vaudou), d’un spiritualiste ou d’une old lady (vieille femme qui a
élevé sa famille avec succès et qui se spécialise
Évaluation des croyances et des pratiques en matière de santé
1. Comment dénissez-vous la santé ?
32
Guérisseurs traditionnels
Évaluation globale de la personne
f. Le sort et les sortilèges – les personnes capables de jeter un sort ou
un sortilège à une autre personne sont souvent les seules à
connaître le moyen de le retirer.
g. Les mauvaises combinaisons d’aliments – chez les Asiatiques et les
Latino-Américains d’origine traditionnelle, le mélange d’aliments particuliers est tabou ; par exemple, les aliments classés dans le yin ou le yang,
ou chauds ou froids, et non selon la température de l’aliment lui-même.
La combinaison des produits laitiers et de la viande est interdite par les
lois alimentaires juives.
h. L’envie et la jalousie – les personnes croient que d’autres peuvent leur
envoyer une maladie si elles sont trop chanceuses ou riches.
i. Le manque de travail – l’oisiveté et l’apathie peuvent toutes deux causer
la maladie.
j. L’excès de travail – plusieurs personnes pensent que l’excès de travail
peut rendre malade.
k. Les mauvaises habitudes alimentaires – chez de nombreuses personnes aux origines traditionnelles, les excès de nourriture et le déséquilibre alimentaire ont tendance à être des facteurs qui contribuent à
la maladie. On considère également qu’il s’agit d’un agent causal dans
le système de soins de santé moderne.
l. Les virus et les bactéries – cette croyance est fréquemment rejetée
par les personnes de croyances traditionnelles.
m. La sorcellerie – cette ancienne cause de maladie persiste encore là où les
gens croient qu’il y a des sorcières pratiquantes pouvant leur nuire.
5. Que faisaient vos parents pour prévenir la maladie et quels remèdes « maison » utilisaient-ils pour vous ramener à la santé ?
Les étudiantes inrmières contemporaines trouveront probablement que leur
parents avaient recours à des méthodes modernes de soins de santé ; toutefois, les immigrants et les gens de cultures traditionnelles peuvent avoir des
réponses très différentes à cette question, selon leurs croyances et leurs
coutumes.
6. Que faites-vous pour éviter d’être malade, quels remèdes « maison » utilisez-vous ?
Il est probable que l’infirmière réponde qu’elle utilise des remèdes
modernes ; les clients ayant un héritage culturel nommeront peut-être les
remèdes traditionnels qu’ils utilisent. Un problème peut découler de l’utilisation de remèdes traditionnels autant que des médicaments modernes. Il
importe, en recueillant cette information, de chercher les interactions possibles entre les remèdes traditionnels et modernes.
dans le soin des enfants et les remèdes traditionnels). Les Amérindiens peuvent demander l’aide
d’un shaman ou de la médecine traditionnelle.
Les gens d’origine asiatique mentionneront plutôt
qu’ils ont visité l’herboriste, l’acupuncteur ou le
« rebouteur » (« ramancheur ») (bone setter). Parmi
les Amish, le braucher fait allusion aux guérisseurs traditionnels qui font usage d’herbes et de
toniques à la maison ou dans la communauté.
Le brauche est un art traditionnel de guérir et
renvoie à la guérison « de sympathie », parfois
appelée powwowing en anglais. Les traitements
utilisés par le braucher sont accompagnés de massage, de pédicure, d’acupression, de réexologie
ou, moins fréquemment, d’iridologie (Andrews et
Boyle, 2003 ; Wenger, 1995).
Chaque culture possède ses propres guérisseurs ;
la plupart parlent la langue maternelle de la personne, se rendent à domicile, et leurs traitements
coûtent beaucoup moins cher que ceux des soignants de la pratique biomédicale ou scientique
du système de soins de certains pays, ce qui n’est
pas le cas au Canada. En plus des guérisseurs traditionnels, plusieurs cultures ont des sages-femmes
dans la communauté (p. ex., des parteras pour les
femmes latino-américaines) ou d’autres personnes
qui offrent des soins aux femmes enceintes.
2
Dans certaines religions, les guérisseurs spirituels se trouvent dans les rangs hiérarchiques d’ofciels religieux ordonnés et connus appelés prêtre,
évêque, sage, diacre, rabbin, frère ou sœur. Dans
d’autres religions, les guérisseurs font partie d’une
catégorie séparée – c’est le cas des « inrmières »
(elles n’ont pas de permis de pratique reconnu par
l’État), des praticiens et des scientistes chrétiens.
La spiritualité est incluse dans les perceptions, les
croyances et les coutumes quant à la santé et à la
maladie. Le TABLEAU 2.2 présente une liste
d’exemples de croyances et de coutumes en
matière de santé et de maladie selon l’héritage
culturel, de causes de maladie et de guérisseurs
traditionnels.
TABLEAU 2.2
Exemples de croyances et de coutumes en matière de santé et de maladie selon l’héritage culturel
CROYANCES
EN MATIÈRE
DE SANTÉ
CROYANCES
EN MATIÈRE
DE MALADIE
CAUSES DE
MALADIE
MAINTIEN
DE LA SANTÉ
PROTECTION
DE LA SANTÉ
RÉTABLISSEMENT
DE LA SANTÉ
GUÉRISSEURS
TRADITIONNELS
• Remèdes traditionnels, dont des
racines de
gingembre
• Acupuncture
• Moxibustion – petits
cônes d’armoise enammés et qui se
consument lentement, posés sur le
corps sur des points
d’acupuncture
• Application de
ventouses (cupping)
• Médecins chinois
• Herboristes
Héritages asiatiques : Chine, Inde, Japon, Corée, Philippines, Asie du Sud-Est (Laos, Cambodge et Vietnam)
• Équilibre du yin
et du yang
• Déséquilibre
du yin et du
yang
• Perturbation
de l’équilibre
du yin et du
yang
• Surmenage
• Position assise
prolongée
• Coucher au lit
prolongé
• Prévention
des déséquilibres du yin
et du yang et
des changements de
climat
• Port d’amulettes,
dont le jade
• Consommation
d’aliments
adéquats et
compatibles
Héritages africains : Côtes de l’Afrique de l’Ouest (Ghana, Nigeria, etc.), Haïti, Jamaïque, îles des Antilles occidentales
• Harmonie
avec la
nature
• Inharmonie
avec la
nature
• Démons
• Esprits
malveillants
• Vaudou
• Sorts
• Prévention de
l’inharmonie ;
respect de la
propreté
• Religion
• Absence de
proximité avec
les personnes
malades
• Port de bracelets
• Foi
Chapitre 2
• Asafoetida (plante),
herbes et racines
• Sorciers (travail à
partir de racines)
• Spiritualistes
• « Vieille femme »
(old lady ) ou
grand-mère
Compétence culturelle : les soins selon la culture
33
TABLEAU 2.2
Exemples de croyances et de coutumes en matière de santé et de maladie selon l’héritage culturel (suite)
CROYANCES
EN MATIÈRE
DE SANTÉ
CROYANCES
EN MATIÈRE
DE MALADIE
CAUSES DE
MALADIE
MAINTIEN
DE LA SANTÉ
PROTECTION
DE LA SANTÉ
RÉTABLISSEMENT
DE LA SANTÉ
GUÉRISSEURS
TRADITIONNELS
• Port d’amulettes
• Port de châles
• Remèdes « maison »,
dont racines de
marais et olbas
• Médecins
homéopathiques
• Brauchers
Héritages européens : Angleterre, France, Allemagne, Pologne, Russie et autres
• Bien-être
physique et
émotionnel
• Absence de
bien-être
• Œil malveillant
• Esprits
malveillants
• Sorts
• Nutrition
adéquate,
exercice,
propreté,
foi en Dieu
Héritages des Amérindiens et des peuples autochtones de l’Alaska : Amérindiens de l’Amérique du Nord et de l’Alaska
Plus de 550 nations reconnues par le gouvernement fédéral américain ou par un État, et plus de 600 nations reconnues au Canada a
• Harmonie avec
la nature
• Équilibre de la
pensée, des
émotions, du
corps et de
l’esprit
• Inharmonie
avec la
nature
• Esprits
malveillants
• Fantômes
• Comportement
qui déplaît aux
saints ou aux
ancêtres
• Respect de la
nature ; absence
de contacts
avec les
mauvais esprits
• Masques
• Utilisation des
amulettes, du
tabac et de
l’herbe tendre
• Peinture avec
du sable
• Herbes
• Médecins
traditionnels
(shaman)
Héritages de la péninsule ibérique, de l’Amérique centrale et du Sud : Espagne et Portugal, Brésil, Cuba, Mexique, Porto Rico, Colombie
• Récompense
pour de bons
comportements
• Équilibre des
humeurs
« chaudes »
et « froides »
a
• Punition pour
une mauvaise
conduite
• Déséquilibre
du « chaud »
et du « froid »
• Œil malveillant
• Envie des
autres
personnes
• Jalousie
• Régime adéquat
pour maintenir
l’équilibre du
« chaud » et
du « froid »
• Foi
• Amulettes, dont
les savons mano
negro, chandelles
• Prières
• Promesses
à des saints
• Herbes, anis et
manzanilla
• Guérisseurs traditionnels, dont
santroa, partera
ou curandero
Statistique Canada, 2013b.
2.8
Expression transculturelle
de la maladie
2.8.1
Expression transculturelle
de la douleur
La douleur est le symptôme le plus souvent utilisé
pour étudier l’expression de la maladie selon les
antécédents culturels d’une personne. Le phénomène de la douleur est universellement reconnu
et demeure un aspect important de l’évaluation
des clients, quel que soit leur âge. La douleur est
une expérience personnelle et subjective grandement influencée par l’héritage culturel. Les
attentes pour la traiter, les manifestations et la
gestion de la douleur sont imbriquées dans le
contexte culturel. À l’instar de la santé et de la
maladie, la dénition de la douleur est largement
déterminée par la culture.
Le terme douleur est dérivé d’un mot grec signiant
punition, ce qui aide à comprendre l’association
34
Partie 1
Évaluation globale de la personne
longtemps perçue entre la douleur et la punition dans
la pensée judéo-chrétienne. La signication accordée
aux stimulus douloureux, la manière dont les personnes définissent leur situation et l’expérience
personnelle déterminent la façon de vivre la douleur.
Plusieurs recherches interculturelles ont été réalisées sur la douleur. Les résultats ont démontré que
l’expérience très personnelle de la douleur est liée
à l’apprentissage culturel, à la signication accordée à la situation et à d’autres facteurs personnels.
Les chercheurs ont établi que la souffrance silencieuse est la réponse à la douleur la plus valorisée
par les professionnels de la santé. La majorité des
inrmières ont été habituées à penser que, dans
presque toutes les situations, l’autocontrôle est préférable aux fortes démonstrations de sensations ou
de sentiments.
Les résultats de recherches portant sur les attitudes des inrmières envers la douleur ont révélé
que les antécédents ethniques des clients jouent
un rôle dans l’évaluation de la douleur physique
et psychologique réalisée par les inrmières. Par
exemple, elles entretenaient l’idée préconçue que les clients d’origine juive ou latinoaméricaine souffrent plus que ceux d’origine
anglo-saxonne et allemande, alors que ce sont les
clients asiatiques qui souffrent le moins. De plus,
les infirmières s’attendaient à observer une
plus grande douleur chez les clients si ellesmêmes avaient tendance à rapporter leurs propres
expériences comme étant plus douloureuses. En
général, les inrmières ayant des antécédents de
pays d’Europe de l’Est ou du Sud ou d’un pays
africain s’attendaient généralement à une souffrance plus prononcée chez les clients que les
soignantes originaires de pays de l’Europe du
Nord. Par ailleurs, le nombre d’années d’expérience, le statut et le domaine clinique de pratique
des inrmières n’avaient pas de lien avec l’interprétation qu’elles faisaient du degré de douleur
des clients (Ludwig-Beymer, 2002).
En plus des variations attendues dans la perception de la douleur et de la tolérance à celle-ci, l’inrmière prévoit différentes façons d’exprimer la
douleur de la part des clients. Il est bien connu que
les gens se tournent vers leur environnement social
pour la validation et la comparaison de divers phénomènes. Un premier groupe de comparaison
important est la famille, qui transmet les normes
culturelles aux enfants.
2.8.2
Syndrome lié à
l’attachement culturel
Certaines personnes peuvent être atteintes d’une
condition dénie comme un syndrome lié à l’attachement culturel. Ces conditions n’ont parfois
aucune équivalence biomédicale ou scientique,
alors que d’autres, dont l’anorexie nerveuse et la
boulimie, sont des exemples de maladies culturelles nord-américaines. Le TABLEAU 2.3 présente
un sommaire de la compilation de plus de 150 syndromes liés à l’attachement culturel documentés
par des anthropologues médicaux, des travailleurs en santé mentale ainsi que des travailleurs
communautaires.
2.8.3
Culture et traitement
Après l’apparition d’un symptôme, les premiers
pas vers le traitement sont les soins personnels.
Aux États-Unis, il est estimé que de 70 à 90 %
des épisodes de maladie sont traités au préalable
ou exclusivement, souvent avec succès, par les
soins personnels (Lipson et Steiger, 1996). La
disponibilité des médicaments offerts en vente
libre, le niveau relativement élevé de littératie aux États-Unis, la croissance marquée de l’offre
en médecines dites douces à base d’herbes et
l’inuence des médias liée à l’information sur la
santé ont contribué au pourcentage élevé de
l’autotraitement.
Santé Canada (2011) a commandé une enquête
auprès de la maison de sondage Ipsos-Reid an
d’avoir un portrait de l’usage des produits de
médecine naturelle. Cette enquête a révélé que près
de 73 % des Canadiens utilisent des produits de
santé naturels et des produits homéopathiques
dans leurs pratiques d’autotraitement. Toujours
selon cette enquête, 32 % des Canadiens utilisent
certains produits homéopathiques sur une base
quotidienne à des ns de traitement ou de prévention de la maladie.
2
Les traitements maison sont attirants en raison
de leur accessibilité, comparativement aux inconvénients associés à la recherche d’un médecin,
d’une inrmière ou d’un pharmacien, particulièrement en milieu rural ou en région éloignée. Qui
plus est, les remèdes ou les traitements maison
mobilisent le réseau de soutien social, qui fournit
à la personne malade un environnement de soins
dans lequel elle peut vivre sa convalescence.
Toutefois, l’inrmière doit être sensibilisée au fait
que tous les remèdes maison ne sont pas sans coûts.
Par exemple, les populations noires urbaines du
Sud-Ouest américain utilisent parfois des potions
traditionnelles dont le coût est plus élevé que celui
d’un traitement équivalent pour une intervention
biomédicale.
Au Canada, l’autotraitement constitue également une importante composante des pratiques
de soins de la population. À la n des années
1990, Santé Canada et Statistique Canada (2001)
se sont interrogées sur la question et ont produit
une enquête an d’avoir un portrait de la situation. Parmi les faits saillants de cette étude, on a
constaté que 65 % des Canadiens avaient utilisé
au cours de l’année des médicaments analgésiques pour soulager une migraine ou des antiinammatoires en vente libre. Près de 20 % des
Canadiens avaient utilisé des médicaments contre
le rhume ou la toux.
Une plus grande variété de solutions ou de
thérapies complémentaires est de plus en plus reconnue par les professionnels de la santé. L’acupuncture,
l’acupression, le toucher thérapeutique, le massage,
la musicothérapie, le biofeedback, les techniques de
relaxation, la méditation, l’hypnose, la distraction,
l’imagerie, l’iridologie, la réexologie et les remèdes
à base d’herbes sont des exemples de traitements
utilisés par les gens, soit seuls, soit en combinaison
avec d’autres traitements.
Au Canada, l’étude sur l’autotraitement révèle
que ces traitements sont utilisés par la population
et le plus souvent en lien ou en ajout à un traitement
médical conventionnel (Statistique Canada, 2001).
Les femmes ont une plus grande propension à
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
35
Exemples de syndromes liés à l’attachement culturel
TABLEAU 2.3
SYNDROMES LIÉS À L’ATTACHEMENT CULTUREL
SYMPTÔMES PRÉSENTÉS
Héritages asiatiques : Chine, Inde, Japon, Corée, Philippines, Asie du Sud-Est (Laos, Cambodge, Vietnam)
Shenkui (Chine)
Symptômes marqués d’anxiété ou de panique avec étourdissements, douleur au dos,
faiblesse généralisée, insomnie, rêves fréquents et plaintes de troubles sexuels (éjaculation
prématurée et impotence). Croyance qu’une perte excessive de sperme en est la cause ; syndrome
redouté en raison de la signication associée à la perte d’essence vitale et à la croyance perçue
de mettre la vie en danger.
Dhat (Inde)
Syndrome de perte de sperme. Caractérisé par des préoccupations d’anxiété et d’hypocondrie
relativement à l’éjaculation de sperme. Décoloration blanchâtre de l’urine et sentiment de
faiblesse.
Héritages africains : Côtes de l’Afrique de l’Ouest (Ghana, Nigeria, etc.), Haïti, Jamaïque, îles des Antilles occidentales
Sang pauvre
Manque de sang ou pauvreté du sang, souvent traité par l’alimentation.
Sang riche
Quantité excessive de certains nutriments dans le sang, résultant de l’ingestion de trop de
viande rouge et d’aliments riches en calories.
Sang clair
Manifestations chez les femmes, les enfants et les personnes âgées susceptibles d’être malades
en général.
Héritages européens : Angleterre, France, Allemagne, Pologne, Russie et autres
Hystérie (Grèce)
Plaintes et comportements bizarres, car l’utérus quitte le petit bassin vers une autre partie
du corps.
Paraphrénie d’involution (Allemagne)
Troubles paranoïdes au mitan de la vie.
Rodina (Russie)
Malaise, dépression.
Héritages des Amérindiens et des peuples autochtones de l’Alaska : Amérindiens de l’Amérique du Nord et de l’Alaska
Plus de 550 nations reconnues par le gouvernement fédéral américain ou par un État, et plus de 600 nations reconnues au Canada a
Fantôme
Tremblements, hallucinations, sentiment d’être en danger.
Hi-Wa itck
Insomnie, dépression, perte de l’appétit. Associé à la séparation non désirée d’une personne
aimée.
Héritages de la péninsule ibérique, de l’Amérique centrale et du Sud : Espagne et Portugal, Brésil, Cuba, Mexique, Porto Rico, Colombie
a
Empacho
Crampes et douleur causées par la nourriture qui fait une boule et qui s’accroche à l’estomac
ou à l’intestin.
Mal ojo (œil malveillant)
Sommeil agité, pleurs, diarrhée chez l’enfant causés par l’attention d’un étranger ; début
soudain.
Susto
Anxiété, tremblements, phobie par peur soudaine.
Statistique Canada, 2013b.
36
Partie 1
Évaluation globale de la personne
recourir à ces traitements alternatifs. Seule la chiropractie est utilisée à proportion égale, chez les
hommes et les femmes.
Plusieurs pharmacies et magasins offrent des
produits de traitement pour une variété de
malaises communs. L’efcacité des thérapies complémentaires servant à traiter des problèmes de
santé a été étudiée de façon exhaustive aux ÉtatsUnis par le National Center for Complementary
and Alternative Medicine et font actuellement
l’objet d’études dans différents milieux de soins
et d’enseignement américains. La fréquence d’utilisation des remèdes traditionnels tels que les
herbes achetées en herboristerie et les herbes
chinoises médicinales est inconnue FIGURE 2.6.
Néanmoins, les observations dans ces milieux
indiquent une grande popularité parmi les
membres de la communauté ethnoculturelle
traditionnelle.
2.8.4
Culture et prévalence
de la maladie
Au Canada et aux États-Unis, l’état de santé de la
population s’est amélioré depuis les dernières générations. Néanmoins, une grande disparité subsiste
encore aujourd’hui au sein des diverses populations
ethniques en regard des décès et des affections. Des
variations bioculturelles anormales peuvent avoir
des sources génétiques ou acquises (CoutuWakulczyk, 2003 ; Purnell et Paulanka, 2008).
L’information relative à la prévalence de la maladie
chez des groupes ethniques est utile en raison de la
possibilité de mettre l’accent, pendant l’évaluation,
sur la probabilité de la prévalence d’une condition
particulière. Par exemple, si l’inrmière examine
un enfant noir présentant des symptômes
FIGURE 2.6
Différents produits offerts chez un herboriste
gastro-intestinaux, elle pensera à la possibilité d’une
intolérance au lactose ou à l’anémie à hématies falciformes, alors que chez l’enfant blanc, elle envisagera la brose kystique comme source du problème.
La pauvreté joue aussi un rôle dans la disparité des
maladies. Pendant l’évaluation, l’inrmière veut
s’assurer d’avoir recueilli les données adéquates
nécessaires pour soutenir ou réfuter ses hypothèses.
L’information sur les nombreuses disparités dans
l’état de santé selon l’origine ethnique se trouve
dans la section Particularités culturelles et génétiques des différents chapitres.
2.9
2
Étapes vers la
compétence culturelle
Il y a plusieurs étapes à franchir avant d’atteindre
la compétence culturelle. L’intégration des connaissances dans la pratique quotidienne demande du
temps, entre autres à cause de l’hésitation de la
part des professionnels de la santé à adhérer à de
nouvelles idées. L’acquisition de la compétence
culturelle n’est pas instantanée, et elle ne s’obtient
sûrement pas à la seule lecture de un ou de plusieurs chapitres ou ouvrages dans ce domaine spécialisé. Cet apprentissage est complexe et associé
à de multiples aspects, dont plusieurs évoluent
avec le temps et l’expérience, dans les domaines
de connaissances en anthropologie culturelle, en
démographie, en folklore, en histoire de l’immigration, en politique de la pauvreté et en sociologie. La compétence culturelle englobe aussi une
introspection à l’égard de l’héritage culturel personnel et de la santé.
Les premiers pas vers la compréhension des
besoins en soins de santé d’autres personnes commencent par celle de son propre héritage culturel,
à la lumière des valeurs, des croyances, des attitudes et des coutumes personnelles liées à la santé
et à la maladie. Parfois, cette étape demande un
investissement personnel considérable et nécessite
l’exploration de l’héritage culturel de sa famille, de
ses croyances et de ses coutumes. Les parents et les
grands-parents sont des ressources familiales que
l’inrmière pourra consulter, les mères étant traditionnellement les gardiennes de la famille et celles
qui s’occupaient des malades.
Q
uestion de suivi
Comment concevez-vous
la maladie ?
Comment vous et votre
famille réagissez-vous
auprès d’un proche malade ?
Pendant sa formation, l’inrmière apprend les
signications modernes et scientiques de la
santé et de la maladie ; parallèlement, elle
doit construire un cadre de référence pertinent à
ces concepts quant aux croyances et aux coutumes
d’autres cultures. En outre, plusieurs clients proviendront de groupes ayant des antécédents religieux et socio-économiques différents des siens ;
elle sera alors aux prises avec ses propres idées
Chapitre 2
Compétence culturelle : les soins selon la culture
37
préconçues et préjugés ethniques, religieux,
sexuels ou socio-économiques à l’égard de ces
groupes.
Q
uestion de suivi
Comment les croyances et
les valeurs culturelles de
madame Faustin peuventelles inuencer sa conception de la santé ?
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Faustin, quelles questions
pourriez-vous lui poser an
de connaître sa compréhension du système de santé
québécois ?
La seconde étape demande d’établir la signication de la santé pour l’autre personne, en gardant
en mémoire que ce concept découle de la façon
dont les membres d’un groupe culturel dénissent
la santé. Un grand nombre de recherches ont porté
sur les différentes dénitions de la santé chez
une variété de groupes. Par exemple, selon une
croyance de la tradition amérindienne, la santé
reète la vie en totale harmonie avec la nature,
alors que la maladie est le résultat d’un manque de
prévention. Certaines personnes originaires de la
Jamaïque associent la santé à un bon appétit, à un
sentiment d’être fort et énergique, en s’acquittant
des activités de la vie quotidienne sans difculté,
en étant actives sexuellement et fertiles. Pour certaines femmes d’origine italienne, la santé signie
la capacité d’interagir socialement et d’effectuer
les tâches quotidiennes telles que préparer les
repas, nettoyer la maison et prendre soin d’ellesmêmes et des autres. Par ailleurs, d’autres groupes,
dont des personnes ayant un héritage culturel
mexicain, croient que de tousser, de transpirer et
d’avoir la diarrhée sont des manifestations de la
vie normale et non des symptômes de santé chancelante – peut-être en raison de la prévalence élevée de ces conditions dans leur pays d’origine.
Ainsi, ces personnes se diront en santé ou les
autres membres du groupe la considéreront comme
étant en santé, alors que l’inrmière décèlera des
symptômes de maladie.
La troisième étape est associée à la compréhension du système de prestation des soins de santé,
c’est-à-dire de la façon dont il fonctionne, de l’effet
des soins de santé, de la signication d’une variété
d’interventions et des coûts et conséquences des
soins pour les clients et pour l’inrmière. La quatrième étape porte sur les connaissances des
ENCADRÉ 2.4
• Découvrir et comprendre son propre héritage, ses valeurs
culturelles, ses préjugés, ses croyances et ses coutumes.
• Acquérir les connaissances de base des valeurs culturelles
et de la santé ainsi que celles des croyances et coutumes
des diverses clientèles à traiter.
R.E.S.P.E.C.T.
• Réaliser qu’il faut connaître et comprendre son propre
héritage et celui du client.
• Examiner le client dans le contexte de ses pratiques
culturelles en matière de santé et de maladie.
Partie 1
Évaluation globale de la personne
La liste de références qui gure à la n de ce
manuel compte plusieurs ouvrages qui fournissent
des outils liés au contenu de ce chapitre. Il
importe de se rappeler que la compétence culturelle
est associée à un ensemble d’éléments : l’héritage,
la culture, l’ethnicité, la religion, la socialisation, la
diversité de la population, l’immigration, le changement démographique, la mondialisation, la santé
et la maladie, les croyances et les coutumes
modernes et traditionnelles, les enjeux sociopolitiques, les installations sanitaires, les logements et
les infrastructures.
2.10
Soins inrmiers culturels
Prodiguer des soins inrmiers dans un contexte de
compétence culturelle est un but en soi. Comme
mentionné au début du chapitre, le parcours pour
y arriver est long. L’ENCADRÉ 2.4 fournit des
lignes directrices à suivre tout au long de ce
cheminement.
1. À partir des nouvelles données recueillies à la suite
de la rencontre avec la lle de la cliente, complétez
l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel que
vous aviez entrepris de remplir plus tôt.
2. À la lumière de ces nouvelles données et de
celles contenues au début du chapitre, inscrivez
un problème inrmier et deux directives dans le
plan thérapeutique inrmier de madame Faustin.
Lignes directrices pour offrir des soins culturels
PRÉPARATION
38
antécédents sociaux des clients – les signications
rattachées à l’immigration, le racisme, le statut
socio-économique, la réforme des services sociaux,
le vieillissement, etc. Finalement, à la cinquième
étape, l’inrmière doit se familiariser avec la langue
parlée par la personne, savoir s’il y a des interprètes
disponibles et connaître les ressources dans la
communauté.
• Sélectionner des questions simples et ne pas les poser
trop rapidement.
• Poser les questions tout au long de l’examen physique.
• Encourager le client à discuter des signications accordées à la santé et à la maladie.
• Conrmer avec le client qu’il a bien compris les recommandations et qu’il les accepte, et tenir compte de ses
pratiques et de ses coutumes culturelles en matière de
santé.
• Toucher le client dans les limites de son héritage culturel –
les façons de faire et les comportements sont des composantes essentielles dans la relation inrmière-client.
Évaluation et jugement clinique
2
Dossier : Noélie Faustin (suite)
Un peu plus tard, vous avez rencontré la lle de
madame Faustin. Celle-ci comprend et parle couramment le français. Elle vous explique que sa
mère a fréquenté l’école jusqu’en quatrième année
du primaire et qu’elle a ensuite dû la quitter pour
aller aider ses parents sur la ferme familiale. Elle
a immigré au Canada pour rejoindre deux de ses
sœurs. Elle vit à quelques rues de celles-ci et
les voit presque tous les jours. Elle va à la messe
tous les dimanches et elle prie régulièrement.
Lorsque vous la questionnez à propos du thé
médicinal que boit sa mère, elle vous mentionne
que celle-ci a vu un hougan quelques jours
avant de se présenter au centre hospitalier, et
c’est ce dernier qui lui aurait recommandé d’en
boire au moins une tasse par jour. La lle vous
mentionne que sa mère était réticente à venir
consulter, car elle craignait que les médecins ne
trouvent pas l’origine de sa douleur et qu’elle
ne pourrait pas manger les aliments recommandés par le hougan qui seraient nécessaires à sa
guérison selon lui. Elle vous mentionne aussi
que sa mère ne comprend pas très bien le diagnostic de maladie de Crohn que le médecin a
posé et qu’elle aimerait qu’on le lui explique
davantage.
1. À partir des nouvelles données recueillies à la suite de la rencontre avec la lle de la cliente, complétez
l’Échelle d’évaluation de l’héritage culturel que vous aviez entrepris de remplir plus tôt.
2. À la lumière de ces nouvelles données et de celles contenues au début du chapitre, inscrivez un
problème inrmier et deux directives dans le plan thérapeutique inrmier de madame Faustin.
Extrait
CONSTATS DE L’ÉVALUATION
Date
Heure
2015-04-24 09:45
N°
1
Problème ou besoin prioritaire
Initiales
Maladie de Crohn
RÉSOLU / SATISFAIT
Professionnels /
Date
Heure Initiales Services concernés
M.J.O.
SUIVI CLINIQUE
Date
Heure
N°
Signature de l’inrmière
Marie-Josée Ouellet, inf.
Directive inrmière
Initiales
M.J.O.
Programme / Service
Initiales
Signature de l’inrmière
CESSÉE / RÉALISÉE
Date
Heure Initiales
Initiales
Programme / Service
Chirurgie
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Nommez la difculté principale que vous avez
éprouvée au cours de l’évaluation de madame
Faustin.
2. Pourquoi devez-vous être consciente de votre
propre héritage culturel ?
3. Quelles auraient pu être les conséquences de ne
pas tenir compte de l’héritage culturel de madame
Faustin ?
Chapitre 2
4. Pourquoi est-il important d’évaluer si la personne
est au stade d’acculturation, d’assimilation ou du
biculturalisme dans le cas de madame Faustin ?
5. An d’évaluer les croyances et les pratiques en
matière de santé de madame Faustin, quel outil
auriez-vous pu utiliser ?
Compétence culturelle : les soins selon la culture
39
Dossier : Anne-Sophie Chamberland
Anne-Sophie, âgée de 15 ans, se présente à la clinique sans rendez-vous avec sa mère ; vous devez
procéder à son évaluation avant qu’elle rencontre
le médecin. C’est la première fois que vous rencontrez cette cliente ; elle est suivie par l’un des médecins de la clinique, mais celui-ci est absent
aujourd’hui. Avant de l’appeler par l’interphone,
vous consultez rapidement son dossier. Vous
remarquez qu’elle a eu ses 15 ans la semaine dernière et qu’elle n’a pas de problèmes de santé
connus outre une allergie à la céfazoline.
Anne-Sophie entre dans le bureau et s’assoit
sans croiser votre regard. Vous la saluez en l’appelant par son prénom, et elle vous répond en
regardant le sol. Vous fermez la porte et vous
asseyez au bureau devant elle. Elle est assise, les
jambes et les bras croisés. Vous amorcez l’entrevue en lui posant la question suivante : « Qu’estce qui vous amène à venir nous consulter ce
matin ? »
Anne-Sophie se replace un peu sur la chaise
et remue sa jambe croisée pendant quelques
secondes avant de soupirer. Elle regarde sa mère
assise à côté d’elle, puis elle répond d’une voix
faible : « J’ai un problème d’acné, et ça me décourage. J’en ai plein les épaules et le dos, c’est
dégueulasse ! » Vous remarquez la présence
d’acné sur la joue droite d’Anne-Sophie. Vous
lui posez ensuite quelques questions.
Vous : « Depuis combien de temps est-ce que
cela a commencé ? »
Anne-Sophie hésite avant de ré-pondre : « Ça
fait environ une année que j’ai de l’acné, mais
c’est moins pire dans le visage depuis… que je
prends la pilule contraceptive. » Vous remarquez que sa mère semble surprise.
L’entrevue est une rencontre entre l’inrmière et
une personne qui présente un problème de santé.
Le principal objectif de l’entrevue est de constituer
l’histoire de santé de cette personne. Elle doit entre
autres inclure un portrait de ses forces (capacités)
et de ses faiblesses (problèmes). L’histoire de santé
fera ainsi le lien vers les prochaines étapes, soit la
collecte de données et l’examen physique.
Pour constituer l’histoire de santé d’une personne, l’entrevue est considérée comme l’étape la
plus importante de la collecte des données. Elle
permet de recueillir des données subjectives, soit
ce que la personne dit d’elle-même, par exemple sa
tristesse exprimée à la suite d’un diagnostic de cancer. L’entrevue est souvent la première et la meilleure occasion pour la personne d’exprimer sa
perception de son état de santé.
Vous : « Depuis combien de temps avez-vous
commencé à prendre la pilule contraceptive ? »
3
Anne-Sophie : « Il y a trois mois. »
Vous : « Lorsque vous dites que c’est moins
pire dans le visage, qu’est-ce que vous voulez
dire exactement ? »
Anne-Sophie : « J’en ai moins dans la face,
mais j’ai le dos comme un champ de fraises.
C’est rendu que j’ai honte de me mettre en maillot de bain. » Vous vous penchez vers l’avant et
faites un signe d’acquiescement. Elle ajoute : « Je
ne mets plus de camisoles ni de robes spaghetti,
je ne veux pas qu’on me trouve dégoûtante. »
Vous : « Je comprends que c’est difcile pour
vous, ça vous empêche de porter les vêtements
que vous aimez. »
Anne-Sophie : « C’est clair ! Tu peux me tutoyer en passant, ça me rend mal à l’aise que
tu me vouvoies. »
Silence.
Vous : « Pour être certaine de bien évaluer
le problème et ne rien oublier, je vais devoir
te poser encore quelques questions. Certaines
pourraient te donner l’impression qu’il n’y a
pas de rapport avec ton problème, mais elles
vont me permettre de mieux le cerner et de
t’aider plus efficacement. Il est important
de répondre de façon honnête, sans restrictions. D’accord ? »
Anne-Sophie vous regarde, puis regarde sa
mère et dit : « OK ». Elles se retournent ensuite
vers la porte puisque quelqu’un cogne. Il s’agit
de votre collègue qui veut vous emprunter le
glucomètre, car celui qui se trouve dans son
bureau est défectueux.
Le système de soins de santé peut donner l’impression aux clients de perdre une certaine liberté
d’action, mais également d’expression. L’entrevue
permet donc à la personne de s’exprimer librement,
car c’est elle-même qui détient l’information la
concernant et qui est susceptible d’inuer sur son
état de santé. L’habileté de l’inrmière à réaliser une
entrevue efcace facilitera l’établissement d’une
relation de conance et permettra de rassembler les
données nécessaires. Pour que l’entrevue soit réussie, l’inrmière doit respecter une démarche.
1. Recueillir des données complètes et exactes sur
l’état de santé de la personne, y compris la description et la chronologie des symptômes de la
maladie.
2. Établir un climat de conance permettant à la
personne de se sentir comprise par rapport à son
Q
uestion de suivi
Relevez une donnée subjective recueillie au cours de
l’entrevue.
Q
uestion de suivi
Nommez deux données
objectives que vous avez
recueillies dans la situation
d’Anne-Sophie.
Chapitre 3
Entrevue
41
état de santé. Elle aura alors la volonté de partager ses problèmes avec l’inrmière.
3. Introduire des éléments d’enseignement qui permettront à la personne de participer à la reconnaissance de ses problèmes de santé.
4. Créer une relation thérapeutique qui facilitera le
soutien moral au moment de l’annonce du diagnostic et de la planication du traitement et des soins.
5. Intégrer, si possible, les outils de promotion de
la santé et de prévention de la maladie.
Il importe de considérer l’entrevue comme étant
une sorte de contrat ou d’entente implicite entre
l’inrmière et la personne. Un contrat est constitué
de règles écrites et non écrites. Dans le cas de l’entrevue, l’entente est basée sur les notions de besoins
et d’attentes exprimés par la personne en matière
de soins de santé et sur les soins prodigués par
l’inrmière. L’objectif commun est de maintenir
une santé optimale pour la personne ou de tendre
vers celle-ci. An de réaliser une entrevue optimale, l’inrmière prend en compte plusieurs éléments, et ce, avant et pendant l’entrevue :
• déterminer le moment et le lieu de l’entrevue ;
• se présenter et préciser son rôle ;
• décrire le déroulement de l’entrevue ;
• expliquer en détail en quoi consiste une histoire
de santé ;
• établir la durée de l’entrevue ;
• permettre au client de prendre la décision de se
prêter à l’entrevue ;
• déterminer le degré de participation de chaque
personne à l’entrevue ;
• s’assurer que chacun participera activement à
l’entrevue ;
• faire intervenir les personnes accompagnatrices
ou importantes pour le client ;
• expliquer la notion de condentialité des données et dans quelle mesure elle peut être limitée ;
• préciser à quoi serviront les données recueillies.
Même si la personne a déjà été informée en partie de ces éléments (p. ex., par une réceptionniste),
certains points importants doivent être clariés dès
le départ par l’infirmière. Il faut éviter toute
mésentente concernant l’entrevue qui pourrait
entraîner du ressentiment ou de la colère.
L’inrmière doit faire preuve d’ouverture et de
conance, ce qui facilitera la rencontre.
3.1
Processus de
communication
Le processus de communication est à la base de
l’entrevue, car il conduit l’inrmière à échanger
de l’information avec la personne sur des sujets
42
Partie 1
Évaluation globale de la personne
parfois délicats. La communication est donc un
média permettant une compréhension mutuelle
entre l’inrmière et le client. Advenant une situation où l’inrmière ne serait pas en mesure de comprendre adéquatement un message transmis par le
client, ou l’inverse, la communication pourrait
alors se révéler difcile, voire impossible.
La communication peut paraître simple en apparence, mais il en est tout autrement dans la réalité.
C’est notamment à l’égard de la complexité de la
communication que l’enseignement de l’inrmière
revêt une importance particulière. En effet, la communication est plus que la simple action de savoir
parler ou celle de savoir écouter. Il s’agit plutôt
d’une compétence constituée de plusieurs autres
éléments incluant des actions conscientes, mais
aussi inconscientes.
3.1.1
Inrmière : l’aidante
L’inrmière doit être consciente de sa communication verbale ou, en d’autres termes, des mots qu’elle
utilise et du ton de sa voix. Au-delà de la communication verbale, la communication non verbale
représente également un élément majeur. Il est alors
question de langage corporel, c’est-à-dire la posture,
la gestuelle, l’expression du visage, le contact
visuel, la position des pieds, le toucher et même la
façon de placer sa chaise. Les messages transmis
de façon non verbale dépendent plus de l’inconscient que les messages verbaux ; par conséquent, ils reètent probablement mieux les vrais
sentiments de l’inrmière.
3.1.2
Client : l’aidé
L’inrmière sait que les messages qu’elle envoie ne
sont qu’une partie du processus de la communication. De fait, les paroles et les gestes doivent être
interprétés dans un contexte précis. Si l’inrmière
a sa propre idée en tête lorsqu’elle parle, l’aidé,
quant à lui, interprète le message à sa manière. Il
lui donne un sens déterminé en fonction de ses
expériences antérieures, de sa culture, de sa
conception de lui-même, de son état de santé physique, mais aussi émotionnel. Parfois, ces contextes
ne coïncident pas. Par exemple, il est frustrant
pour l’aidé de s’apercevoir qu’au moment où il
tente de communiquer une émotion à l’inrmière,
celle-ci la comprend différemment. Ainsi, le message peut être mal interprété. De là l’importance
de s’assurer d’une compréhension mutuelle
entre l’inrmière et l’aidé an d’obtenir une communication réussie.
L’inrmière n’est donc pas à l’abri des malentendus lorsqu’elle prodigue des soins, en particulier si
la personne éprouve des problèmes de santé. En
effet, dans le cadre d’une hospitalisation, ou d’un
problème de santé, le système de référence de l’aidé
peut être modifié puisque ce dernier est plus
concentré sur sa maladie. Il cherchera alors à intensier la communication avec l’inrmière an de
trouver un certain réconfort. Cette situation peut
conduire l’aidé à confondre une relation professionnelle avec une relation de proximité et ainsi à établir
une relation de dépendance envers l’inrmière.
La communication est l’une des compétences de
base qui peuvent découler des expériences vécues.
Quelle que soit son expérience, l’inrmière doit
toujours chercher à peauner cette compétence
auprès de tous les clients. Il s’agit d’un outil de
travail fondamental pour assurer la qualité des
soins de santé. Il revêt donc une importance aussi
grande que l’inspection ou la palpation. Pour optimiser la compétence de communiquer, l’inrmière
doit prendre conscience de certains facteurs
internes et externes et de leurs inuences sur la
communication.
3.1.3
Facteurs internes
Les facteurs internes se résument à ce que l’inrmière apporte comme élément pendant l’entrevue.
Il est primordial que l’inrmière développe trois
comportements associés à ces facteurs internes,
c’est-à-dire aimer l’autre, être empathique et posséder une bonne capacité d’écoute.
Amour de l’autre
Il ne s’agit pas ici du sentiment d’attachement
intense qui lie deux êtres, basé à la fois sur la
tendresse et l’attirance physique. Il est plutôt question de l’amour de son prochain, du sentiment issu
du dévouement pour une personne. Ce facteur
s’avère essentiel pour une infirmière dans un
contexte professionnel. Elle doit acquérir une habileté dans ses relations interpersonnelles. Cela signie qu’il lui faut avoir une bonne idée des forces de
la personne et être tolérante envers ses faiblesses.
Il est essentiel de réaliser une entrevue dans une
atmosphère de cordialité. Un tel climat permet à la
personne de se sentir en conance et de parler de
son état de santé à l’inrmière sans craindre son
jugement.
Il faut bien comprendre que le respect de l’autre
dépasse la considération médicale du client. Le but
n’est pas d’en faire une personne dépendante, mais
bien de l’aider à devenir de plus en plus responsable et autonome à l’égard de son état de santé et
de lui permettre de grandir dans cette expérience.
L’inrmière peut alors faire appel à d’autres professionnels de la santé qui sont en mesure d’accompagner la personne dans ce cheminement. Les
clients doivent donc décider dans quelle mesure
ils utiliseront ces ressources en fonction de leur
propre parcours.
Empathie
L’empathie est cette capacité de regarder le monde
à travers les yeux d’une autre personne, à l’intérieur
de son cadre de référence, tout en restant soi-même.
L’empathie, c’est reconnaître et accepter l’autre
avec ses sentiments et ses émotions, sans le juger.
Cela ne veut pas dire pour l’inrmière de vivre la
vie, les émotions et les sentiments du client, mais
bien de les comprendre. Dans le cas où l’inrmière
déciderait de prendre soin du client en se mettant
dans la peau de la personne et en partageant sa
douleur, cette relation serait alors qualiée de sympathique plutôt que d’empathique. Lorsque l’inrmière cesse d’être empathique pour devenir
sympathique envers la personne, elle cesse d’être
aidante. Il s’agit plutôt ici de comprendre la situation du client et la façon dont il la vit.
3
Capacité d’écoute
Dans le processus de la communication, l’écoute
ne tient pas un rôle passif ; au contraire, celui-ci est
actif et exigeant, ce qui nécessite une attention complète. L’inrmière ne peut être centrée sur ses problèmes personnels ou sur ceux d’autres clients
pendant qu’elle procède à l’écoute du client, car
elle pourrait négliger de retenir des faits importants
le concernant. À partir du moment où l’inrmière
commence une entrevue avec une personne, rien
n’est plus important : celle-ci devient sa seule
préoccupation.
L’écoute active ouvre la porte à la compréhension.
Il faut donc que l’inrmière écoute ce que la personne a à lui dire. En effet, pendant que celle-ci
parle, l’inrmière ne doit pas penser à ce qu’elle va
lui répondre ou à la question qu’elle lui posera. De
plus, elle doit s’adapter au rythme du client puisqu’il
arrive rarement qu’une personne raconte son histoire
de santé ou relate un événement de façon chronologique. Tout en restant attentive, l’inrmière note la
façon dont la personne raconte son histoire, reconnaît les difcultés de langage et les troubles de la
mémoire, porte une attention au ton de la voix et
même à ce que la personne oublie de mentionner.
L’ENCADRE 3.1 en présente un exemple.
ENCADRÉ 3.1
Q
uestion de suivi
Anne-Sophie vous semblet-elle à l’aise de communiquer avec vous ? Justiez
votre réponse à partir des
éléments de communication
non verbale évoqués dans
la situation.
Cas clinique
Sandra Bérubé, âgée de 32 ans, consulte une
inrmière pour un problème de maux de tête
dont elle souffre depuis les trois derniers mois.
L’acide acétylsalicylique ne la soulage pas, et
cette situation nuit à son rendement au travail.
L’inrmière l’a rencontrée pendant 30 minutes.
Elle remarque que madame Bérubé ne maintient pas de contact visuel durant l’entrevue et
regarde au sol la plupart du temps. Son ton de
voix est triste, et elle parle lentement. Durant
l’entrevue, la cliente n’a jamais fait mention
de son conjoint, bien qu’ils soient mariés
depuis cinq mois seulement. Enn, l’inrmière
lui dit : « Je ne vous ai pas entendu parler de
votre mari. Parlez-moi de lui. » Madame
Bérubé mentionne que celui-ci a perdu son
emploi quelques mois après leur mariage, et
ce, en raison d’un problème de consommation
d’alcool. Lorsque la cliente évoque son mari,
son ton de voix est plus tendu, elle semble
plus nerveuse, car elle se triture les doigts et
bouge constamment sur sa chaise. Bien que
madame Bérubé subisse actuellement un
stress personnel important et de la panique,
elle n’a jamais pensé que ses maux de tête
pourraient être liés à cette situation.
Chapitre 3
Entrevue
43
Conscience de soi
Pour pouvoir communiquer efcacement avec
les autres, l’infirmière doit bien se connaître.
Comprendre les partis pris, les préjugés et les stéréotypes qu’elle entretient fait partie intégrante du
perfectionnement de ses compétences à titre d’intervieweuse. Ainsi, en connaissant ses comportements et ses réactions, elle prend conscience des
répercussions négatives qu’ont certains de ses actes
involontaires sur la communication. Son opinion
est peut-être tranchée en ce qui concerne la grossesse précoce, l’orientation sexuelle ou la consommation de drogues illicites. Or, en reconnaissant
ses partis pris et ses valeurs, l’inrmière est en
mesure d’en faire abstraction lorsqu’elle sera appelée à côtoyer des personnes dont les valeurs pourraient être complètement différentes des siennes.
Une partie du travail d’intervieweuse consiste à
cerner, puis à laisser de côté ses préjugés an de
prodiguer des soins de façon efcace à divers types
de clients. Cependant, si elle se sent incapable de
faire abstraction de certaines de ses valeurs, l’inrmière pourrait se voir obligée de demander à un
collègue de la remplacer dans des situations données. Par exemple, une inrmière fervente catholique pourrait être fortement opposée à l’avortement.
Elle doit préparer un entretien avec une adolescente
de 15 ans enceinte de 8 semaines. Cette inrmière
sait pertinemment que la jeune fille a pris
rendez-vous pour discuter des choix qui s’offrent
à elle. Si l’infirmière n’est pas en mesure de
faire abstraction de sa conviction profonde selon
laquelle l’avortement est mal et qu’elle se juge incapable de bien conseiller cette adolescente, il serait
préférable qu’elle demande à un collègue de diriger
l’entretien à sa place an que la cliente puisse être
bien informée.
3.1.4
Facteurs externes
L’inrmière doit accorder de l’importance à l’aménagement des lieux. Il peut s’agir de la chambre
d’un centre hospitalier, d’une salle d’examen, d’un
bureau, d’une clinique ou du domicile de la personne, où elle a alors moins de marge de manœuvre.
Peu importe le lieu, des conditions optimales sont
nécessaires pour réaliser un bon entretien.
Respect de la vie privée
Q
uestion de suivi
Relevez les facteurs
nuisibles à la communication dans la situation
d’Anne-Sophie.
44
Partie 1
Il est important de disposer d’un espace assurant
le respect de la vie privée et de l’intimité, comme
une chambre individuelle au centre hospitalier, un
bureau dans une clinique ou le domicile du client.
L’inrmière devra peut-être demander aux personnes présentes de se retirer un moment ou trouver une pièce inoccupée afin de procéder à
l’entrevue. Si aucun de ces endroits n’est libre, il
faut assurer l’intimité psychologique du client ; à
cet effet, le rideau de partition en milieu hospitalier
peut sufre, pourvu que l’inrmière soit certaine
Évaluation globale de la personne
que l’entrevue se déroulera en privé et que personne ne viendra l’interrompre.
Dérangement minimum
Aucune interruption ne doit être tolérée, sauf en cas
d’urgence, car elle perturbe le déroulement de l’entrevue. Il faut donc informer le personnel soignant
qu’une entrevue est en cours et demander à ne pas
être dérangé pendant ce temps. Il est important de
se concentrer sur l’établissement d’un climat propice avec la personne et toujours avoir en tête qu’une
interruption peut détruire, en quelques secondes, le
climat et la relation qui ont été établis.
Environnement physique
• La température ambiante doit être réglée à un
degré confortable.
• La salle doit être sufsamment éclairée pour que
l’inrmière et la personne puissent se voir, tout
en évitant d’accentuer l’éclairage sur celle-ci.
• L’utilisation de la télévision, de la radio et de
l’ordinateur ne doit pas être permise an d’éviter
les perturbateurs pendant l’entrevue.
• Les instruments tels que l’otoscope, l’ophtalmoscope et le sphygmomanomètre, nécessaires à
l’inrmière, doivent être placés dans un endroit
de façon à éviter de distraire la personne. Il en
est de même pour les dossiers des autres clients
ou pour les effets personnels de l’inrmière. La
salle doit être libre de tout équipement superu.
• L’inrmière se place à environ un mètre ou un
mètre et demi du client, pour ne pas envahir son
espace personnel, et ainsi favoriser un climat de
conance. Par contre, si l’inrmière se trouve
trop éloignée, elle pourrait donner l’impression
de se montrer distante par rapport aux problèmes de la personne.
• L’inrmière devrait adopter une position confortable et s’assurer qu’elle et la personne sont assises
face à face et que leurs yeux se trouvent à la même
hauteur FIGURE 3.1. L’inrmière devrait également
éviter de se tenir derrière un bureau ou une table :
ces obstacles pourraient être perçus comme une
nuisance à la communication. De plus, elle ne devrait pas rester debout, car cela peut générer deux
perceptions : elle communique sa hâte de terminer
l’entrevue ou elle afche une attitude de supériorité. En d’autres termes, cette position entraîne une
relation d’autorité. Au contraire, lorsque l’inrmière est assise, la personne ressent une certaine
maîtrise de l’environnement.
• Lorsque la personne interviewée se trouve alitée,
la position face à face est recommandée. La personne ne devrait pas xer le plafond durant l’entretien, car, dans cette situation, elle perdra le
contact visuel avec l’inrmière. Cela peut perturber la communication.
• Elle peut être menaçante pour la personne, particulièrement si l’inrmière aborde des questions délicates (p. ex., la quantité d’alcool et de
drogues consommés, le nombre de partenaires
sexuels, un comportement violent). Par contre,
si la personne se sent en conance, la plupart
du temps, elle se livrera sans aucune réserve.
FIGURE 3.1
Position face à face
Habillement
• La personne doit rester habillée normalement,
sauf en cas d’urgence.
• L’inrmière adopte une tenue vestimentaire
appropriée et respecte les normes professionnelles en vigueur dans l’établissement : des vêtements classiques, un uniforme ou un sarrau
pourraient être recommandés (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2006).
Prise de notes
La prise de notes est inévitable, mais elle peut s’avérer dérangeante pour la personne interviewée. Par
ailleurs, une fois l’entrevue terminée, l’inrmière
ne peut pas se er entièrement à sa mémoire an
de documenter les hospitalisations antérieures ou
l’examen des systèmes. Mais elle doit savoir choisir
le bon moment pour écrire les notes pendant l’entrevue. Lorsque l’inrmière a recours à la prise de
notes, elle doit tenir compte du fait que cette
méthode de collecte de données peut engendrer des
inconvénients :
• Elle modie le contact visuel avec le client .
• Elle dérange l’attention de l’inrmière. Dans cette
situation, la personne pourrait avoir l’impression
que l’inrmière lui accorde moins d’importance .
• Elle peut interrompre la narration du client.
Ainsi, l’inrmière pourrait lui demander de
ralentir son débit verbal : « Veuillez parler moins
vite, car je suis incapable de suivre vos paroles. »
Le client peut alors éprouver de la frustration
ou, pour faire plaisir à l’inrmière, adapter son
rythme à la vitesse d’écriture de celle-ci. Dans
tous les cas, le client perd son mode d’expression naturel. La prise de notes ne doit donc pas
consister à écrire mot à mot le verbatim du
client, mais à en dégager les grandes lignes an
de pouvoir les synthétiser dans un résumé .
• Elle peut empêcher l’inrmière de relever des
signes non verbaux .
Étant donné les inconvénients associés à la prise
de notes au cours de l’entrevue, l’inrmière doit
plutôt concentrer son attention sur la personne en
limitant le plus possible l’écriture de renseignements. Toute prise de notes devrait être utilisée
avec parcimonie an d’éviter de freiner l’expression
spontanée de la personne. Avec l’expérience, l’inrmière maximisera sa prise de notes, en allant à
l’essentiel.
Q
uestion de suivi
Indiquez deux moyens
que vous pourriez prendre
pour contrer les facteurs
nuisibles à la communication dans la situation
d’Anne-Sophie.
3
Parfois, l’inrmière peut demander à un parent
ou à un proche aidant de fournir les renseignements
nécessaires an de compléter l’entrevue, notamment dans le cas d’un enfant ou d’une personne
atteinte d’une perte cognitive. L’inrmière peut
également consulter le dossier médical antérieur
du client.
3.2
Techniques de
communication
3.2.1
Début de l’entrevue
Lorsque la personne se présente, l’inrmière doit
être prête pour l’entrevue. Si elle est nouvellement
diplômée, elle peut se sentir nerveuse quant à la
façon d’aborder la personne. Elle doit alors se rappeler qu’il est préférable de commencer l’entrevue
par une question courte ou une question de convenance. Il faut également souligner que le client
ressent probablement de la nervosité lui aussi, et il
peut être impatient de commencer. Pendant l’entrevue, l’inrmière s’adresse à lui en l’appelant par
son nom de famille (p. ex., monsieur Jodoin ou
madame Simard) et non par son prénom, en lui
serrant la main et en lui demandant s’il est installé
confortablement. Elle se présente et précise son rôle
(si elle est une étudiante infirmière, elle doit
communiquer cette information). Elle doit, par ailleurs, indiquer la raison de cette entrevue.
« Madame Gauthier, je voudrais vous parler de
votre maladie, celle qui vous a conduite au centre
hospitalier. »
« Madame Tremblay, je tiens à vous poser
quelques questions sur votre santé, an que nous
puissions relever les éléments positifs et les problèmes liés à votre état de santé actuel. »
« Monsieur Marinelli, je tiens à vous poser
quelques questions sur votre santé et sur vos activités
quotidiennes habituelles, an que nous puissions
planier convenablement votre prestation de soins. »
Chapitre 3
Entrevue
45
Si la personne se trouve au centre hospitalier,
chacun des membres de l’équipe interdisciplinaire
aura à effectuer une histoire de santé. La personne
pourra se sentir exaspérée parce qu’elle est dans
l’obligation de répéter continuellement la même
chose. Voilà l’un des éléments qui justient de donner une raison à l’entrevue, en signiant précisément que chaque professionnel effectue l’histoire
de santé propre à sa discipline.
Après cette brève introduction, l’inrmière pose
une question ouverte pour laisser la personne s’exprimer librement. Cependant, il n’est pas opportun
de parler du temps qu’il fait. L’entrevue n’est pas
une visite sociale : la personne a certaines préoccupations concernant sa santé, et elle désire que l’on
s’y attarde. L’inrmière doit donc établir un climat
favorisant l’expression de ses préoccupations le
plus tôt possible.
3.2.2
Phase de travail
Dans une entrevue, la phase de travail représente
la collecte des données. Les échanges pendant cette
phase comprennent l’étape des questions et des
réponses. Deux types de questions peuvent être
posées : les questions ouvertes et les questions fermées. Le choix du type de questions varie en fonction de l’information à recueillir.
Q
Question ouverte
uestion de suivi
Relevez les deux types de
questions que vous avez
posées à Anne-Sophie
jusqu’à présent au cours
de l’entrevue et donnez un
exemple de chacune.
La question ouverte permet de recueillir des renseignements descriptifs. Elle indique le sujet de discussion, mais uniquement de manière générale.
L’inrmière devrait l’utiliser pour commencer l’entrevue et introduire une nouvelle catégorie de questions ou lorsque la personne aborde un nouveau sujet.
« Dites-moi comment je peux vous aider. »
« Qu’est-ce qui vous amène au centre
hospitalier ? »
« Dites-moi pourquoi vous êtes venu ici
aujourd’hui. »
« Vous avez parlé d’essoufement. J’aimerais en
savoir plus à ce sujet. »
« Quels ont été vos sentiments au cours de votre
dernier rendez-vous ? »
La question ouverte doit être impartiale, car elle
laisse la personne libre de répondre de n’importe
quelle façon. Ce type de questions amène la personne à répondre comme elle le désire, au moment
qu’elle trouve opportun. Cela lui permet également
de s’exprimer pleinement.
Que se passe-t-il, généralement, quand l’inrmière
pose une question ouverte ? La personne écoute la
question, elle y pense, y répond par une courte
expression ou une phrase, fait une pause, puis regarde
l’inrmière et attend les directives sur la manière dont
l’entrevue devrait se conduire. La façon dont l’inrmière agit par la suite est la clé de l’entrevue. Il est
46
Partie 1
Évaluation globale de la personne
important qu’elle ne pose aucune nouvelle question
ou n’aborde aucun nouveau sujet. En effet, si elle
passe à autre chose, l’inrmière pourrait négliger des
éléments importants concernant la première question.
Au contraire, elle devrait faire preuve de curiosité
intellectuelle, en utilisant une phrase ou une question
de clarication, par exemple : « Racontez-moi. » « Y
a-t-il autre chose que vous voudriez me dire à ce
sujet ? » Elle peut tout simplement se montrer intéressée en regardant attentivement la personne, qui sera
encouragée à poursuivre sa réponse.
Question fermée ou directe
La question fermée (ou directe) vise à recueillir des
données précises. Elle suscite une courte réponse
composée de un ou deux mots, d’un oui ou d’un
non, ou elle propose un choix de réponses. Alors
que la question ouverte permet au client de laisser
libre cours à ses pensées et à ses sentiments, la
question fermée, quant à elle, limite la réponse du
client TABLEAU 3.1.
L’inrmière devrait privilégier l’utilisation des
questions fermées après avoir posé les questions
ouvertes ou si la personne demeure dans une zone
grise qu’elle désire explorer particulièrement.
L’inrmière utilisera également des questions fermées lorsqu’elle aura besoin d’obtenir des faits
précis, par exemple sur des problèmes de santé
actuels ou antérieurs. De plus, elle aura recours à
ce type de questions lorsqu’elle ne dispose que de
quelques minutes pour réaliser l’entrevue. En effet,
un entretien où l’inrmière pose uniquement des
questions ouvertes peut prendre plusieurs heures.
Il faut cependant faire attention de ne pas utiliser
abusivement des questions fermées. Voici des directives que l’inrmière devrait suivre.
• Elle pose une seule question directe à la fois. Elle
évite le bombardement de questions à la manière
d’une liste d’épicerie : « Avez-vous déjà eu de la
douleur ? Une vision double ? Des rougeurs dans
les yeux ? » Elle évite aussi les questions qui
pourraient entraîner une double réponse : « Avezvous fait de l’exercice ou suivi un régime an de
maintenir votre poids ? » La personne ne saura
pas quoi répondre dans cette situation ; si elle
répond « oui », l’inrmière ne pourra savoir de
quelle question il s’agit.
• Elle utilise un langage compréhensible pour la
personne. Elle aura peut-être besoin d’employer
des expressions régionales ; par exemple, le mot
« fondement », qui signie « base » en français
normatif, peut également faire référence aux
organes génitaux pour certaines personnes.
Techniques d’entrevue permettant
de préciser l’histoire de santé
L’inrmière doit encourager la personne à formuler
et à clarier ses idées. Elle commence par une question ouverte grâce à laquelle le client pourra
s’exprimer. Son rôle est de guider celui-ci an qu’il
ne s’égare pas dans un sujet hors propos. Elle doit
donc lui poser des questions qui l’aideront à clarier son histoire de santé.
Certaines personnes visitent des établissements
de santé pour une courte période ; leur histoire de
santé est alors relativement simple. Pour ces personnes, deux types de techniques (la facilitation et
le silence) sufront an d’obtenir un portrait global
de leur situation de santé. Par contre, certaines personnes ont une histoire de santé beaucoup plus
complexe, elles présentent un long épisode de
maladie chronique ou un état émotionnel grave.
Dans ces conditions, diverses questions permettront à l’inrmière de recueillir des renseignements
supplémentaires sans diminuer la qualité des données primordiales ou sans les mettre de côté.
Il existe neuf types de techniques d’entrevue.
Les cinq premières techniques – la facilitation, le
silence, la réexion, l’empathie et la clarication –
sont souvent utilisées pour guider les réactions ou
les sen timents exprimés par la personne au
cours de l’entrevue. L’inrmière adaptera ses techniques d’entrevue en fonction de chaque client.
Dans les quatre dernières techniques – la confrontation, l’interprétation, l’explication et le résumé –,
l’inrmière commence à exprimer ses propres pensées ou sentiments. Le cadre de référence passe du
client à l’inrmière. En effet, dans les cinq premiers types de techniques, le client dirige la
conversation ; dans les quatre autres types, c’est
l’inrmière qui joue ce rôle.
Facilitation
Cette technique encourage la personne à en dire
plus à propos d’un sujet particulier, à poursuivre
son histoire (« mmm mmm, oui, continuez »).
L’inrmi ère démontre, grâce à cette technique,
qu’elle s’intéresse à la situation du client et qu’elle
désire en apprendre davantage sur lui. Il suft pour
cela qu’elle maintienne un contact visuel et qu’elle
se penche légèrement vers l’avant en prêtant attention au client, en faisant des signes, comme « oui »
de la tête, ou encore en faisant un geste de la main
signiant « oui, allez-y », pour encourager la personne à continuer de parler.
Silence
Même en entrevue, le silence est d’or. Après les
réponses aux questions ouvertes, l’attention silencieuse montre au client qu’il a le temps de penser
à ce qu’il veut dire et de l’organiser sans être interrompu. Les inrmières ont souvent tendance à briser ces périodes de silence. Or, si la personne est
continuellement interrompue dans ses moments de
silence, parce que ceux-ci génèrent un malaise chez
l’inrmière, cela peut briser le l de ses pensées et
ainsi nuire au bon déroulement de l’entrevue.
L’inrmière peut en effet interrompre ces moments
de silence parce qu’elle se sent responsable
TABLEAU 3.1
Comparaison entre question ouverte et question fermée
QUESTION OUVERTE
QUESTION FERMÉE (OU DIRECTE)
Permet d’obtenir une information narrative.
Permet d’obtenir une information précise.
Entraîne une réponse longue.
Entraîne une réponse courte en un ou
deux mots.
Suscite des sentiments, des opinions,
des idées.
Suscite l’expression des faits.
Construit et améliore le climat de
conance.
Limite les rapports et génère des interactions
neutres.
Exemple : « Parlez-moi de vos maux
de tête. »
Exemple : « Avez-vous mal à la tête d’un seul
ou des deux côtés ? »
d’entretenir un dialogue ou qu’elle éprouve un sentiment de culpabilité lorsque la discussion s’arrête.
Elle doit toutefois comprendre que ces périodes
sans paroles ont des avantages, comme celui de
laisser la personne restructurer sa pensée. De plus,
le silence permet à l’inrmière d’observer discrètement la personne, de noter des indices non verbaux
et de planier sa prochaine intervention.
3
Q
uestion de suivi
Quelles techniques
d’entrevues avez-vous
utilisées dans la situation
d’Anne-Sophie ?
Réexion
Avec cette technique, l’inrmière fait écho aux
paroles du client, en répétant ce qu’il vient de dire.
Dans cet exemple, l’inrmière concentre son attention sur une expression précise et aide la personne
à continuer l’explication à sa façon :
Client : « Je suis ici parce que j’ai toujours mal à
la tête. »
Inrmière : « Vous avez des maux de tête ? »
Client : « Oui, ils commencent le matin, puis augmentent en intensité pendant la journée. Je pense
qu’ils sont liés au stress que je vis au travail. »
La technique de la réexion peut aussi aider la
personne à approfondir sa pensée, déjà exprimée
antérieurement. L’inrmière l’encourage simplement à poursuivre son propos.
Cliente : « Il est tellement difcile d’avoir à rester
couchée sur le dos à l’hôpital avec cette grossesse.
J’ai deux enfants à la maison. Je crains qu’ils ne
reçoivent pas les soins dont ils ont besoin. »
Inrmière : « Vous êtes anxieuse et inquiète au
sujet de vos enfants ? »
L’inrmière agit comme un miroir qui reformule
dans des mots différents les sentiments que la personne exprime, ce qui permet à celle-ci de préciser
son problème.
Empathie
Un symptôme physique, un état psychologique ou
une maladie sont souvent accompagnés d’émotions.
Plusieurs personnes ont de la difculté à les exprimer,
Chapitre 3
Entrevue
47
peut-être parce qu’elles ne trouvent pas les bons mots
ou qu’elles ressentent de l’embarras. L’inrmière qui
émet une réponse empathique reconnaît un sentiment
et, par conséquent, permet à la personne de l’exprimer. Quand la technique d’empathie est utilisée, la
personne se sent acceptéeet peut parler ouvertement
de ses sentiments. L’exemple suivant illustre une
réponse empathique.
Client (sarcastique) : « Je possède ma propre
entreprise, je dirige 20 employés tous les jours et
maintenant, je suis ici, devant vous, à solliciter de
l’aide pour régler mon problème. »
Inrmière : « Il doit être difcile d’éprouver un
sentiment de dépendance lorsqu’on est habitué à
tout diriger. »
La réponse de l’inrmière n’entrave pas la relation de conance. Il faut éviter les déclarations
faussement rassurantes du type : « Oh ! Vous pourrez vous remettre au travail en un rien de temps. »
Il importe de renforcer la relation de conance, car
la personne se sent alors comprise. Cette technique
est en soi thérapeutique parce qu’elle ne conne
pas la personne à sa maladie et à ses sentiments.
Voici d’autres réponses empathiques : « Cela doit
être très dur pour vous. » « Je comprends. » Un
geste peut également être utilisé pour exprimer de
l’empathie. Par exemple, l’inrmière peut simplement placer sa main sur le bras ou l’épaule de la
personne FIGURE 3.2.
Inrmière : « Maintenant, ce que je comprends,
c’est que cette lourdeur que vous ressentez dans la
poitrine quand vous enlevez de la neige ou montez
un escalier disparaît lorsque vous arrêtez ces activités. Est-ce exact ? »
Client : « Oui, vous avez bien compris. »
Dans les quatre prochaines techniques énumérées (confrontation, interprétation, explication,
résumé), le cadre de référence se déplace du point
de vue du client à celui de l’inrmière. Ces techniques incluent maintenant les pensées, les sentiments et les impressions de l’inrmière, qui ne doit
les utiliser que lorsque la situation l’exige. Si l’inrmière y a trop souvent recours, il se peut qu’elle
prenne en charge la problématique du client.
Confrontation
Dans le cas de la confrontation, l’inrmière constate
que, dans une certaine mesure, des sentiments ou
des émotions manifestés par le client lui semblent
contradictoires. Elle formule des commentaires
honnêtes sur ce qu’elle voit ou ressent. Cela peut
être utile dans le cas d’une contradiction : « Vous
dites que vous n’avez pas de douleur, mais lorsque
je vous touche ici, vous grimacez. » L’inrmière
peut vérier les afrmations de la personne lorsqu’elle observe que certaines réponses ne correspondent pas à celles données précédemment :
« Plus tôt, vous avez dit que vous ne consommiez
jamais d’alcool et maintenant vous dites que vous
aviez pris quelques verres après le travail. »
Interprétation
Cette technique n’est pas fondée sur une observation directe comme dans le cas de la confrontation,
mais elle se base plutôt sur la compréhension. Elle
relie différents événements, fait des associations de
cause à effet entre des éléments distincts : « Il
semble que chaque fois que vous ressentez de la
douleur à l’estomac, vous avez eu une certaine
forme de stress dans votre vie. » L’interprétation
peut s’appliquer également aux sentiments et aider
la personne à mieux les comprendre.
FIGURE 3.2
Un geste empathique de l’inrmière permet à la personne
de se sentir comprise.
Client : « J’ai décidé de cesser ce traitement. Mais
je n’arrive pas à le dire à mon médecin. Chaque fois
que je la rencontre, je me referme sur moi-même et
je n’ose rien dire. »
Inrmière : « Avez-vous peur de sa réaction ? »
Clarication
L’inrmière a recours à cette technique lorsque les
mots qu’emploie la personne ne sont pas clairs
(p. ex. : « Dites-moi ce que vous entendez par “du
sang pas bon” »). La clarication est également utilisée pour résumer les paroles de la personne ou
les simplier pour les rendre plus claires. Cette
technique aide l’inrmière à vérier si elle est dans
la bonne voie. Par la suite, elle demandera à la personne si celle-ci est en accord avec son interprétation, comme ici :
48
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Dans ce genre de situation, l’inrmière peut mal
interpréter ce que la personne exprime. Si tel est le
cas, la personne va peut-être recadrer l’inrmière
dans son interprétation de la situation. Dans ce cas,
elle permettra à l’inrmière d’entamer rapidement
une discussion plus approfondie sur le sujet.
Explication
Avec cette technique, l’infirmière partage une
information – subjective ou objective – avec
le client. Cela peut aussi bien concerner l’horaire
(p. ex. : « La séance de physiothérapie aura lieu
à 10 h. ») que l’origine d’une intervention : « La raison pour laquelle vous ne pouvez pas manger ni
boire avant votre analyse de sang, c’est que la nourriture va modier les résultats du test. »
des réponses incomplètes ou inappropriées
TABLEAU 3.2.
Résumé
L’inrmière doit apprendre à écouter avec ses yeux
aussi bien qu’avec ses oreilles. Les modes de communication non verbale incluent l’apparence physique, la posture, les gestes, l’expression du visage,
l’attitude, le contact visuel, la voix, le toucher, les
odeurs, les bruits et les mouvements. Ces messages
non verbaux sont très importants dans une entrevue et précisément dans la transmission de l’information, en particulier sur le plan des émotions.
Quand les messages verbaux et non verbaux d’une
personne sont en adéquation, la communication
verbale prend le dessus. Par contre, quand les messages verbaux contredisent les messages non verbaux, ces derniers tendent à reéter davantage la
réalité, car ils sont moins conscients. La discipline
qui a pour objet l’étude de la communication non
verbale se nomme synergologie.
Il s’agit d’un compte rendu nal de ce que l’inrmière a compris du problème de santé de la personne. L’inrmière condense les faits et dresse un
portrait de sa perception de la situation. Il s’agit
d’un type de validation, dans la mesure où la personne peut conrmer ou inrmer les propos rapportés. Lorsque vient le temps du résumé, à la n
de l’entrevue, cela indique que celle-ci achève.
3.2.3
Objectifs et pièges de l’entrevue
Les compétences verbales mentionnées plus haut
sont susceptibles d’améliorer le déroulement de
l’entrevue. Toutefois, certains éléments, ou pièges,
peuvent nuire à celui-ci. Comme l’inrmière est
soucieuse d’aider la personne, elle peut facilement
tomber dans ces pièges, qui risquent d’engendrer
TABLEAU 3.2
3.2.4
Communication non verbale
3
Objectifs de l’entrevue et pièges à éviter
OBJECTIF
MOYENS
RÉSULTATS
PIÈGES À ÉVITER
Recueillir des données complètes et exactes sur l’état de
santé de la personne.
• L’inrmière a recours à des questions
ouvertes et à des questions fermées.
• Mène à l’établissement d’un
portrait de santé global du client.
• Poser des questions directives
ou tendancieuses.
• Utiliser le « pourquoi ? ».
Établir un climat de conance
permettant à la personne de
se sentir comprise.
• L’inrmière agit de façon authentique
et respectueuse.
• Favorise le partage de problèmes
avec l’inrmière.
• Recourir à l’autorité.
Favoriser l’enseignement.
• L’inrmière cherche à connaître les
préoccupations réelles du client.
• L’inrmière sera en mesure d’aider le
client dans son processus décisionnel. Ultimement, l’inrmière devrait
favoriser l’autoprise en charge chez
le client.
• Permet au client de participer à la
reconnaissance de ses problèmes
de santé.
• Encourage la participation active
du client dans le processus de
résolution de problèmes.
• Donner des conseils non désirés.
• Employer un langage détourné.
Établir une relation
thérapeutique.
• L’inrmière pose des questions
ouvertes favorisant les discussions
franches et honnêtes tout en
réalisant une écoute active.
• L’inrmière emploie des termes
précis.
• Facilite le soutien moral dans les
moments difciles.
• Favorise une meilleure planication des soins.
• Désamorce la crise et réduit
l’anxiété.
• Adopter une attitude faussement
rassurante.
• Utiliser un langage détourné.
• Employer un jargon professionnel.
• Parler abondamment et de façon
distante.
• Utiliser une terminologie
impersonnelle.
• Interrompre la conversation.
Promouvoir la santé et
prévenir la maladie.
• L’inrmière intègre les outils
de promotion de la santé
et de prévention.
• Permet au client de prendre en
charge les problèmes de santé
actuels ou potentiels.
• Encourage le client à en apprendre
plus sur lui-même et à mieux
adapter ses comportements.
• Recourir à l’autorité.
• Poser des questions directives
ou tendancieuses.
Chapitre 3
Entrevue
49
Apparence physique
Dans son ouvrage bien connu Le stress de la vie,
Hans Selye (1956) rapporte qu’il a commencé,
lorsqu’il était étudiant, à observer les rapports
qui existent entre le corps et le stress. Il a noté
que certaines personnes n’avaient pas l’air
« bien », mais ne présentaient pas les caractéristiques ou les signes pouvant mener à un diagnostic médical précis. Ces personnes se sentaient et
avaient l’air tout simplement malades. Le même
point de vue peut s’appliquer à l’inrmière dans
son travail auprès des clients. Une personne qui
néglige son apparence et son hygiène peut laisser
suggérer qu’elle est trop malade pour prendre
soin d’elle-même ou qu’elle souffre d’une dysfonction émotionnelle comme la dépression. Le
choix de vêtements envoie également un message : il projette l’image d’un rôle (étudiant, travailleur manuel ou travailleur de bureau), d’un
statut professionnel (inrmière, médecin) ou
d’une attitude (familière, charmeuse, rebelle). Il
est donc important que l’inrmière prenne en
compte cet élément dans son évaluation d’une
personne tout en validant ces hypothèses par
ailleurs.
L’apparence de l’inrmière envoie également un
message au client. Sa tenue vestimentaire peut
varier selon les règlements en vigueur dans l’établissement. L’utilisation d’un uniforme peut créer
un stéréotype positif (confort, expertise et identication professionnelle) ou un stéréotype négatif
(distanciation, autorité). Quel que soit le choix de
l’inrmière concernant le maquillage ou les vêtements, son objectif devrait être de reéter une image
irréprochable de compétence, de professionnalisme
et d’expertise.
Posture
L’inrmière observe la posture du client. Une position ouverte, représentée par des bras et des jambes
détendus, reète une volonté de partager des renseignements. Une position fermée se remarque par
des jambes et des bras croisés : la personne semble
être sur la défensive et anxieuse. L’inrmière doit
noter tout changement de posture. Une personne
qui change de position tout le temps suggère qu’elle
est inconfortable physiquement ou mal à l’aise avec
le sujet abordé.
Gestes
2
Les connaissances et les
attitudes de l’inrmière
adaptées à la culture du
client sont abordées dans
le chapitre 2, Compétence
culturelle : les soins selon
la culture.
50
Partie 1
Les gestes exprimés par la personne sont très révélateurs. Par exemple, des mains inclinées et
détendues montrent de l’acceptation, de l’attention ou de l’accord. Par contre, des mains qui se
tordent dénotent souvent de l’anxiété, tandis
qu’un doigt qui pointe avec véhémence traduit de
la colère. Aussi, les gestes de la main d’une personne peuvent préciser la description d’une
Évaluation globale de la personne
douleur. Quand une personne ressent une douleur
à la poitrine, elle montre généralement celle-ci
avec une main ou un poing fermé devant son sternum ; une douleur vive et fortement localisée peut
être montrée en pointant un doigt à l’endroit
exact : « Ça fait mal ici. »
Attitude
L’inrmière doit adopter une posture détendue
pour créer un climat chaleureux et reéter une
image de conance. Cette attitude exprime ainsi
un intérêt réel envers la personne. Par contre,
si l’inrmière remplit à la hâte un formulaire
concernant l’histoire de santé, qu’elle regarde fréquemment sa montre, qu’elle est occupée à réaliser
d’autres activités qu’elle considère comme plus
importantes que d’interroger la personne, elle n’est
ni aidante ni à l’écoute du client. Même si le temps
de l’inrmière est limité, celle-ci doit tout de
même donner l’impression d’être calme et à
l’écoute de la personne : elle prendra le temps de
s’asseoir et de regarder la personne en face, comme
si rien d’autre ne comptait à ses yeux. Il est peutêtre préférable d’aviser la personne de la durée de
l’entrevue. Ainsi, l’inrmière pourra se consacrer
pleinement à cette entrevue, et elle pourra y mettre
n le temps venu.
Expression du visage
Le visage reète une grande variété d’émotions et
de conditions. Il peut paraître crispé, détendu,
anxieux, suspicieux ou en colère. Une condition
physique telle que la douleur ou l’essoufement se
voit également dans l’expression faciale.
De son côté, l’expression du visage de l’inrmière devrait reéter une attitude professionnelle :
attentive, sincère et intéressée par la personne.
Toute expression faciale qui dénote de l’ennui, de
la distraction, du dégoût, de la critique ou de l’incrédulité est détectée par l’autre personne, et cela
peut nuire à l’établissement d’une relation de
conance.
Contact visuel
Le manque de contact avec les yeux indique que
la personne est timide, réservée, embarrassée,
ennuyée, intimidée, apathique ou déprimée. Cette
attitude prévaut également pour l’inrmière. Il
importe que celle-ci maintienne un contact visuel.
Elle ne doit pas pour autant fixer la personne puisque ce type d’attitude est susceptible de
rendre celle-ci mal à l’aise ; elle pourrait se sentir
gênée. L’inrmière regarde la personne dans les
yeux, mais en jetant des regards ailleurs de temps
en temps. Elle peut devoir faire exception à cette
règle lorsqu’elle interroge une personne issue
d’une culture où les contacts visuels directs sont
évités
2 .
Voix
Le ton de la voix, l’intensité et le rythme de la parole,
la hauteur du son et les pauses sont tout aussi importants que les mots exprimés. Par exemple, le ton de
la voix peut montrer du sarcasme, de l’incrédulité,
de la sympathie ou de l’hostilité. Ainsi, une personne anxieuse parle souvent d’une voix haute et
rapide. Une voix douce peut traduire de la timidité
ou de la peur, alors qu’une personne malentendante
peut utiliser une voix forte.
Même l’utilisation de pauses transmet un message. Quand une question est simple et directe, une
personne qui prend une longue pause inattendue
indique qu’elle est en train de penser à une réponse,
ce qui pourrait soulever des doutes quant à son
honnêteté. Des pauses inhabituelles, longues et fréquentes, associées à un débit de parole lent, monotone et à une voix faible, peuvent faire soupçonner
une dépression.
Toucher
Le sens du toucher est inuencé par l’âge de la personne, le sexe, l’origine culturelle ou l’expérience ;
il peut facilement être mal interprété. Dans la plupart des cultures occidentales, l’intervention tactile
est réservée aux expressions d’amour et d’affection
ou aux salutations. L’inrmière ne devrait pas utiliser le toucher au cours de l’entrevue, sauf si elle
connaît bien la personne et qu’elle est sûre que son
geste sera bien interprété. Il faut cependant signaler
qu’il s’agit d’un moyen de communication efcace,
par exemple un toucher de la main ou du bras pour
montrer de l’empathie.
En somme, les messages non verbaux de l’inrmière qui aident et renforcent la relation de
conance sont ceux qui démontrent une attention
envers la personne et son acceptation inconditionnelle. Les comportements non verbaux non aidants
sont ceux associés à l’inattention, à l’autorité et à
la supériorité ENCADRÉ 3.2.
3.2.5
Fin de l’entrevue
L’inrmière évite de terminer l’entrevue trop rapidement. Une fin brusque ou maladroite peut
détruire le rapport de conance et laisser à la personne une impression négative de l’entrevue. Pour
se sentir à l’aise lorsqu’elle met n à l’entrevue,
l’inrmière peut poser les questions suivantes à la
personne :
« Y a-t-il autre chose dont vous aimeriez
parler ? »
que la n de l’entrevue approche. Il est aussi possible de dire quelque chose comme ceci : « Notre
entrevue est presque terminée. » Aucun nouveau
sujet ne devrait alors être abordé. Il s’agit d’un bon
moment pour récapituler ce que l’infirmière
a appris au cours de l’entrevue. Ce résumé inclut
les aspects positifs de la santé, les problèmes relevés ainsi que tous les plans d’action ou l’explication de ce qui va suivre. C’est une sorte de bilan
nal de l’entrevue avec la personne. Enn, l’inrmière doit remercier celle-ci pour le temps passé
en sa compagnie et pour sa coopération.
3
Particularités liées au développement
Entrevue avec les parents
Lorsque le client est un enfant ou un mineur au
sens de la loi, l’inrmière doit créer un climat de
conance avec l’enfant et le ou les parents qui l’accompagnent. Elle doit s’adresser à l’enfant en premier ; toutefois, si ce dernier est âgé de un à six ans,
elle se concentrera davantage sur les parents. En
ignorant l’enfant temporairement, l’inrmière lui
permet de la jauger en gardant une certaine distance
de « sécurité ». L’enfant peut aussi observer l’interaction avec ses parents ; s’il voit que ceux-ci
acceptent et apprécient l’inrmière, il sera plus
détendu et participera ainsi plus facilement à la
rencontre. FIGURE 3.3.
ENCADRÉ 3.2
Comportements non verbaux de l’inrmière
POSITIFS
NÉGATIFS
• Apparence professionnelle appropriée
• Apparence professionnelle inacceptable
pour la personne (tatouage à la figure,
multiples piercings)
• Égalité de la hauteur des sièges
• Proximité physique de la personne
• Posture ouverte et détendue
• Position légèrement penchée vers la
personne
• Gestes facilitant l’entrevue (p. ex., se placer à la même hauteur que le client,
mettre une main sur l’épaule, effectuer
des gestes témoignant d’une écoute tels
que les hochements de tête)
• Expression du visage qui dénote de
l’intérêt
• Sourire dans des conditions appropriées
• Position debout
• Assise derrière un bureau, loin de la personne
• Posture tendue
• Position derrière la personne, position de retrait
• Gestes perturbant l’entrevue (p. ex., pointer du doigt, se tenir les poings serrés,
taper des doigts, balancer les pieds, avoir
un regard distrait)
• Visage sans expression, bâillements,
bouche serrée
• Sourcils froncés, se mordre la lèvre
« Y a-t-il des questions que vous aimeriez me
poser ? »
• Contact visuel approprié
• Regard fuyant, qui évite tout contact avec
les yeux, qui se concentre sur les notes
« Y a-t-il d’autres domaines que j’aurais dû
explorer ? »
• Ton de voix modéré
• Voix stridente, son de haute fréquence
• Débit verbal modéré
• Débit verbal trop lent ou trop rapide
• Toucher approprié
• Toucher trop fréquent ou inapproprié
Ces questions fournissent une dernière occasion à la personne de s’exprimer avant d’indiquer
Chapitre 3
Entrevue
51
que les parents se remémorent les faits ou les étapes
de l’histoire. Celle-ci peut comporter des lacunes,
particulièrement si l’enfant est plutôt accompagné par un ami de la famille ou un tuteur.
Durant la collecte des données, l’inrmière évite
de porter un jugement quant à l’âge de réalisation de certaines étapes du développement. Les
parents sont évidemment ers des réalisations de
leur enfant et deviennent également très sensibles
quand vient le temps d’évaluer les étapes de son
développement.
FIGURE 3.3
Lorsque le client est un enfant, l’inrmière doit créer un climat
de conance.
L’inrmière commence par interroger à la fois
les parents et l’enfant. Si un des sujets se révèle
délicat (p. ex., des difcultés relationnelles avec
les parents, des problèmes de l’enfant à l’école ou
avec les pairs), il faut mettre le sujet de côté et
attendre plus tard ; l’inrmière l’explorera lorsqu’elle sera seule avec les parents. Elle devrait
d’ailleurs fournir des jouets pour occuper l’enfant
an de pouvoir parler aux parents, ce qui leur permet de se concentrer sur leur histoire. Les jouets
peuvent aussi servir à indiquer le niveau d’attention ou d’indépendance de l’enfant. Grâce à l’entrevue, l’infirmière peut apprendre certains
éléments de la dynamique familiale et évaluer
l’interaction entre les parents et l’enfant.
En ce qui concerne les jeunes enfants, les
parents seront en mesure de fournir la totalité ou
la majorité des éléments de l’histoire de santé.
Ainsi, l’inrmière obtient un prol de santé de
l’enfant à partir de données provenant des parents,
dont le point de vue est habituellement able
puisque le bien-être de l’enfant constitue généralement une priorité pour eux et qu’ils désirent
l’améliorer avec l’aide de l’inrmière. Cependant,
il se peut que les parents se montrent partiaux,
surtout lorsqu’ils sont invités à décrire les réalisations de l’enfant ou lorsque leurs propres capacités
parentales semblent remises en question. Par
exemple, dans la question « Sa èvre est de 39 °C,
et vous n’avez pas pris la peine de l’amener plus
tôt ? », l’inrmière dit implicitement que les parents
manquent de compétences, ce qui les place dans
une position défensive et augmente leur anxiété.
L’inrmière devrait plutôt utiliser des questions
ouvertes qui permettent de bonier la description
du problème et de désamorcer la menace, par
exemple : « Que s’est-il passé lorsque la èvre a
augmenté ? »
Des parents qui ont plusieurs enfants doivent
retenir un grand nombre de renseignements.
L’inrmière doit donc se montrer patiente pendant
52
Partie 1
Évaluation globale de la personne
L’inrmière doit parler à l’enfant en utilisant son
prénom et non pas le nommer « bébé ». Elle
s’adresse au parent en l’appelant par son nom, et
non par « maman » ou « papa ». Aussi, elle doit bien
tracer les liens de parenté. La mère de l’enfant peut
avoir une relation avec un autre homme qui n’est
pas nécessairement le père biologique de l’enfant.
Au lieu de demander comment est la santé de
« votre mari », il est préférable de poser la question
de la manière suivante : « Le père de Mélanie est-il
en bonne santé ? »
Bien que la conversation se déroule la plupart
du temps avec les parents, l’inrmière ne doit pas
ignorer complètement l’enfant ; elle doit garder
un contact avec lui puisqu’elle aura à effectuer
plus tard son examen physique. L’inrmière peut
commencer par lui poser des questions à propos
des jouets avec lesquels il s’amuse ou qu’il a
apportés : « Ta poupée a-t-elle un nom ? » « Quelle
sorte de camion as-tu ? » L’inrmière se penche et
va à la rencontre de l’enfant, elle se place de façon
que ses yeux soient à la même hauteur que
les siens. La grande taille d’un adulte peut représenter un obstacle insurmontable pour un jeune
enfant : cette situation souligne alors son
infériorité.
La communication non verbale est encore plus
importante chez les enfants que chez les adultes.
Les enfants sont prompts à déceler des sentiments
d’anxiété, de malaise ou des indices non verbaux.
L’inrmière doit alors avoir une apparence physique soignée et éviter que son uniforme rende l’enfant distant. Ses gestes doivent être lents, posés et
étudiés, près de son corps. Les enfants sont effrayés
par des gestes rapides ou démesurés. L’inrmière
n’essaie pas de maintenir un contact visuel
constant, car l’enfant pourrait se sentir en danger
(surtout chez les enfants en bas âge). Elle utilise
une voix calme, mesurée et a recours à un vocabulaire simple et clair. Connaître le niveau de développement du langage de l’enfant est également une
donnée précieuse pour la planification de la
communication.
Stades du développement cognitif
Le processus cognitif, la perception du monde et la
réponse émotionnelle à une situation donnée sont
bien différents chez l’enfant et chez l’adulte. Pendant
l’entrevue, il s’avère donc important que l’inrmière
tienne compte du stade de développement de l’enfant lorsqu’elle souhaite discuter avec lui. La théorie
cognitive-développementale de Piaget peut aider à
mieux comprendre le stade auquel se trouve un
enfant en vue d’orienter l’approche conformément
à celui-ci TABLEAU 3.3. Piaget a examiné l’évolution
d’enfants au cours des étapes successives de leur
développement. Bien qu’il s’agisse d’un guide, il ne
faut pas oublier que les âges apparaissant dans le
tableau constituent des estimations et qu’ils varient
légèrement selon le degré de maturité de l’enfant.
Également, l’inrmière gardera à l’esprit que l’enfant
avec qui elle tente de communiquer peut être en
crise en raison d’une maladie. Or, la régression
constitue une réaction courante durant des périodes
de stress intense. Ainsi, il se peut que l’enfant régresse en ce qui a trait à sa capacité à communiquer
pendant une telle période.
Nourrissons
La communication non verbale est la principale
façon de s’exprimer des nourrissons. La plupart
d’entre eux paraissent calmes et détendus quand
tous leurs besoins sont satisfaits, mais ils pleurent
quand ils sont apeurés, affamés, fatigués ou inconfortables. Ils réagissent bien à un toucher léger, à
une manipulation douce et à une voix calme. Celleci constitue un réconfort pour les nourrissons,
TABLEAU 3.3
même s’ils ne comprennent pas les paroles. Les plus
âgés développent toutefois une anxiété envers les
étrangers, mais ils sont plus coopératifs lorsque
les parents demeurent à portée de leur vue.
Enfants d’âge préscolaire
3
Entre l’âge de deux et six ans, les enfants sont
égocentriques. La plupart d’entre eux considèrent
leur environnement selon leur propre point de vue,
et ils se voient comme le centre de leur univers. Un
enfant d’âge préscolaire peut donc pleurer s’il est
décidé à ne pas coopérer, même si l’inrmière cite
l’exemple d’un autre enfant plus collaborateur, car
cette comparaison n’a pas de signication pour lui.
Seule sa propre vision des choses compte pour lui.
Il faut donc privilégier la communication directe
et concrète. L’inrmière doit toujours parler au présent et éviter les expressions telles que « les murs
ont des oreilles » parce que les jeunes enfants
peuvent les interpréter faussement. L’inrmière
utilise des phrases simples associées à des explications concrètes : elle prend le temps de donner une
courte explication aux enfants qui connaissent
moins le matériel utilisé pour l’examen. Les enfants
d’âge préscolaire ont parfois des pensées animistes,
dotant les objets d’une âme ; ils peuvent imaginer
que des objets familiers et inanimés peuvent
prendre vie et présenter des caractéristiques
humaines (p. ex., le brassard pour mesurer la pression artérielle peut se réveiller et les mordre).
Stades du développement cognitif
ÂGE
STADE DE DÉVELOPPEMENT
SELON PIAGET
CARACTÉRISTIQUES
DÉVELOPPEMENT DU LANGAGE
De la naissance
à 2 ans
Sensorimoteur
• Apprentissage de la manipulation
d’objets par le nourrisson
• Communication réexive à la naissance,
puis évolution en six étapes jusqu’à la
réexion
• Présymbolique
• Communication principalement non verbale
• Vocabulaire qui dépasse les 4 mots à 12 mois,
puis qui est composé de plus de 200 mots et de
courtes phrases avant le 2e anniversaire
De 2 à 6 ans
Préopératoire
• Début de la pensée symbolique
• Jeux imaginatifs
• Maîtrise de la notion de réversibilité
• Symbolique
• Communication à l’aide d’une grammaire et d’un
vocabulaire structurés
• Utilisation des pronoms
• Vocabulaire moyen qui dépasse les 10 000 mots
vers l’âge de 6 ans
De 7 à 11 ans
Opératoire concret
• Pensée logique
• Maîtrise de l’utilisation des nombres
et des concepts concrets, tels le
classement et la conservation
• Maîtrise de la forme passive vers l’âge de 7 ans
et des formes grammaticales complexes vers
l’âge de 10 ans
12 ans et plus
Opératoire formel
• Pensée abstraite
• Maîtrise de la notion de futur ;
perspective plus large, plus théorique
• Aptitudes presque identiques à celles de l’adulte
Source : Adapté de Piaget J. (1972)
Chapitre 3
Entrevue
53
La progression du langage est notable à cet âge ;
en effet, passant d’environ 2 mots à l’âge de 1 an,
le vocabulaire dépasse les 200 mots à l’âge de 2 ans.
Les enfants de deux ans sont en mesure de
construire des phrases simples à partir de deux
mots (p. ex., bébé pleure, moi monter, veut lait). Il
s’agit d’un style télégraphique caractérisé par la
combinaison d’un nom et d’un verbe dont l’association donne un sens concret aux mots. L’intérêt
pour la communication orale est prépondérant à
cet âge, et les enfants de deux ans semblent être en
mesure de comprendre l’ensemble des conversations entre leurs parents. À trois ans, les enfants
sont en mesure de construire des phrases plus complexes et comprenant plusieurs éléments issus du
langage. Entre l’âge de trois et quatre ans, ils utilisent trois ou quatre mots télégraphiques an de
construire une phrase ne contenant que les éléments essentiels. Vers l’âge de cinq ou six ans,
les phrases comportent de six à huit mots, et les
notions grammaticales sont de mieux en mieux
intégrées.
Enfants d’âge scolaire
Un enfant âgé de 7 à 12 ans peut tolérer et comprendre d’autres points de vue que le sien. À cet
âge, les enfants sont plus objectifs et réalistes. Ils
désirent connaître les aspects fonctionnels des
objets et comprendre pourquoi les choses sont
faites ainsi.
Les enfants d’âge scolaire savent généralement
lire, ce qui facilite l’obtention d’information. Si ce
n’est pas le cas, les symboles ou les images peuvent
être utiles an d’obtenir des données. À cet âge,
la pensée est plus cohérente et logique. Les enfants
d’âge scolaire peuvent se décentrer pour considérer d’autres éléments d’une situation leur permettant de dégager d’autres conclusions. Ils sont
pourvus d’une capacité de raisonnement, bien que
celle-ci soit limitée lorsqu’il s’agit de prendre en
compte des notions abstraites.
Les enfants de ce groupe d’âge ont la capacité
d’apporter des commentaires importants sur leur
histoire de santé. L’inrmière peut réaliser l’entrevue simultanément avec les parents et l’enfant. Par
contre, si certains symptômes ou signes inquiètent
l’inrmière, elle doit questionner l’enfant en premier et recueillir ensuite l’information provenant
des parents. Pour obtenir le plus de données possible, l’inrmière devrait poser des questions sur les
sujets concernant l’école, les amis ou les activités
directement à l’enfant. Si elle se trouve seule avec
lui, elle peut découvrir d’autres faits intéressants.
Adolescents
L’adolescence marque le début de la puberté, caractérisée par des changements notables sur le plan
physiologique : un accroissement généralisé de la
taille, du poids, de la masse musculaire, le développement des caractéristiques sexuelles primaire
54
Partie 1
Évaluation globale de la personne
et secondaire ainsi que la maturation des organes
propres à la reproduction. L’ensemble de ces modifications physiologiques peut entraîner une
modication de l’estime de soi. Par ailleurs, les
adolescents sont aussi aux prises avec des ajustements d’ordre psychologique.
Ils veulent être considérés comme des adultes,
mais ils n’ont pas encore atteint la capacité cognitive de ce stade de développement. Ils se situent
entre deux étapes. Parfois, ils sont capables d’actions rééchies, parfois, ils retournent dans leur
modèle de réponse d’enfants, surtout en période de
stress. L’inrmière ne peut pas traiter les adolescents comme des enfants, mais elle ne peut pas non
plus considérer leur façon de communiquer, leur
capacité d’apprentissage, leur faculté d’adaptation
de même que leur motivation comme étant toujours
celles qui caractérisent l’âge adulte. Il faut souligner
qu’aucune durée précise n’est associée à l’adolescence : il s’agit d’une période de transition vers l’âge
adulte que certaines personnes mettent plusieurs
années à traverser.
Les adolescents valorisent parfois la relation
avec les pairs. Ils désirent être acceptés par les pairs
et ils s’identient à eux. Ils croient aussi que personne ne peut les comprendre. De ce fait, ils manifestent parfois une attitude de mépris à l’égard des
adultes. Ils répondent souvent aux questions par
des monosyllabes. D’autres adolescents visent plutôt à établir un contact visuel et répondent ce que
l’inrmière désire entendre et non ce qu’ils pensent
réellement. Leur regard signie : « Vous ne saurez
rien de plus à mon sujet. »
Ces caractéristiques des adolescents et leur façon
d’agir pourraient paralyser l’inrmière pendant
l’entrevue. Toutefois, une communication réussie
demeure possible et se révèle enrichissante. Les
stratégies sont simples.
La première chose à considérer est une attitude
respectueuse. Le respect représente l’élément le
plus important à communiquer à l’adolescent.
Celui-ci a besoin de valider qu’il est accepté dans
sa dignité d’être humain et qu’il a de la valeur.
Deuxièmement, la communication doit être totalement honnête. L’intuition de l’adolescent est
aiguisée à tel point qu’il peut détecter si l’inrmière
cherche à lui cacher des renseignements ou si elle
camoufle quelque chose en ayant recours aux
euphémismes. L’inrmière doit toujours lui dire la
vérité et jouer franc-jeu ; sinon, l’entrevue est vouée
à l’échec. L’adolescent sera coopératif s’il comprend
la façon de procéder de l’inrmière.
En outre, an de faciliter la communication, l’inrmière doit rester elle-même : elle n’a pas avantage
à utiliser un langage qui ne correspond pas à son
âge ou à son rôle professionnel. Il est utile de comprendre certaines expressions propres aux adolescents, mais l’inrmière ne doit pas les utiliser pour
se rapprocher d’eux. Ces termes l’aident simplement à mieux comprendre ce que les adolescents
veulent exprimer. Elle ne doit pas essayer d’être
leur amie.
Comment briser la glace avec un adolescent ?
L’inrmière devrait d’abord se concentrer sur lui et
non sur son problème. Contrairement à l’adulte, qui
veut immédiatement aborder sa préoccupation au
sujet de sa santé, l’adolescent a plutôt tendance à
répondre de manière optimale lorsque l’accent est
d’abord mis sur lui FIGURE 3.4. L’inrmière devrait
poser ouvertement et amicalement des questions
au sujet de l’école, des activités, des loisirs, des
amis : « Comment vont les choses à l’école ? »
« Pratiques-tu des sports ? » « Quel type d’activité
préfères-tu ? » Il est préférable de s’abstenir de le
questionner, dans un premier temps, sur ses parents
et sa famille, car ces sujets peuvent être chargés
d’émotions à l’adolescence. L’inrmière prend également soin de questionner les adolescents sous
l’angle des risques encourus par leurs comportements, ceux-ci pouvant avoir des conséquences
sérieuses sur leur santé. Fait notable, plusieurs de
ces comportements perdurent à l’âge adulte. Il est
donc primordial de discuter des comportements à
risque avec l’adolescent. Pour ce faire, l’inrmière
aborde le sujet directement ; donner seulement de
l’information n’est pas sufsant. Savoir écouter
dans un climat de respect et d’ouverture s’avère
essentiel. Le fait de suggérer de petits objectifs réalistes et réalisables encourage l’adolescent à revenir
et lui montre qu’un changement de comportement
est possible.
L’inrmière ne présumera pas que l’adolescent
connaît tout d’une histoire de santé ou d’un examen
physique. Elle doit en expliquer et en justier chacune des étapes. Elle l’informe également que tous
les renseignements recueillis demeurent
confidentiels. L’adolescent coopère mieux s’il
connaît le but des questions ou des actions.
L’inrmière doit d’ailleurs l’encourager à lui poser
des questions, car il craint souvent la réaction des
autres ; il peut se sentir stupide s’il pose une question
dont tout le monde, pense-t-il, connaît la réponse.
3
L’inrmière privilégie des questions courtes et
simples, par exemple : « Pourquoi êtes-vous ici ? »
Cette question peut sembler évidente pour l’inrmière, mais pas pour l’adolescent. Certains viennent
en consultation sous les recommandations de leurs
parents.
Il faut également reconsidérer les techniques
d’entrevue avec un adolescent. Les périodes de
silence sont généralement à éviter. L’inrmière doit
lui accorder un temps de réexion acceptable, mais
un silence attribuable à d’autres raisons peut se
révéler menaçant. Ainsi, l’inrmière aurait avantage à éviter la réexion comme technique de communication. Si elle l’utilise, l’adolescent répondra
probablement : « Quoi ? » Il n’a pas les compétences
cognitives pour répondre à ce mode indirect d’interrogation. Aussi, l’adolescent perçoit davantage
la communication non verbale que les adultes.
L’inrmière doit rester consciente de ses expressions et de ses gestes. L’adolescent est également
plus sensible à tout commentaire qui pourrait être
interprété comme une critique de la part de l’inrmière. Si cela se présente, il cessera de collaborer.
Plus tard au cours de l’entrevue, après avoir établi un rapport de conance avec l’adolescent, l’inrmière pourra traiter de sujets chargés d’émotions,
y compris l’usage du tabac, d’alcool et de drogues,
les comportements sexuels, les pensées suicidaires
et la dépression. De nombreux adolescents tendent
à adopter des comportements à risque pouvant
avoir des conséquences fâcheuses.
Les adolescents supposent que les professionnels de la santé ont les mêmes valeurs et adoptent
les mêmes normes de comportement que la plupart
des autres représentants de l’autorité dans leur vie,
et ils peuvent être réticents à partager ce genre d’information. L’inrmière peut leur donner l’assurance
que ses questions n’ont pas pour but de satisfaire
sa curiosité, mais bien d’explorer des sujets importants pour la plupart des adolescents et sur lesquels
elle doit recueillir des données importantes relatives à leur santé.
FIGURE 3.4
L’inrmière démontre de l’intérêt envers l’adolescente en la
questionnant sur elle et non uniquement sur son problème
de santé et en évitant avant tout les jugements de valeur
à son sujet.
Si l’inrmière découvre des données « délicates »
au cours de l’entrevue, elle devrait aviser l’adolescent que certains renseignements peuvent demeurer condentiels et que quelques-uns devront être
partagés avec d’autres professionnels de la santé.
L’inrmière spécie que ces interventions ont pour
seul but de le protéger et que les lois l’y obligent.
L’âge légal de la condentialité et du consentement
est de 14 ans au Québec et au Canada. Ainsi, si une
adolescente âgée de 14 ans ou plus consulte un
Chapitre 3
Entrevue
55
professionnel de la santé au sujet de la contraception ou pour obtenir une ordonnance dans le but
de traiter une infection transmissible sexuellement
et par le sang, ses parents n’en seront pas informés
sans son consentement. Si l’inrmière doit communiquer avec d’autres professionnels de la santé
ou d’autres personnes, comme un policier, un avocat ou le Directeur de la protection de la jeunesse,
il lui faut demander l’autorisation à l’adolescent :
« Avez-vous un problème avec cela ? » L’inrmière
doit également préciser à l’adolescent : « Vous devez
me faire conance ; je vais traiter cette information
avec professionnalisme et dans votre intérêt. »
Enn, il faut saisir toutes les occasions pour
faire du renforcement positif. L’inrmière souligne
chaque action de l’adolescent associée à un
mode de vie sain : « C’est génial que vous ne fumiez
pas. Il s’agit d’une bonne décision pour vous aider
à rester en santé. »
Pour ceux dont les habitudes de vie comportent
des risques pour la santé, il est impératif de discuter
de celles-ci dès que possible. L’inrmière peut
poser des questions ou s’exprimer à ce sujet : « Avezvous un jour tenté de cesser de fumer ? » « J’aimerais
savoir quelle est votre activité physique préférée
puisque je suis préoccupée par votre surplus de
poids, et spécialement chez une personne aussi
jeune que vous. » « Qu’est-ce que vous aimez boire
lorsque vous participez à une soirée avec des
amis ? » « Lorsque vous avez des relations sexuelles
avec une personne dont vous ignorez le passé
sexuel, utilisez-vous un condom ? » Lorsque l’inrmière pose ce type de questions, elle doit éviter de
transmettre une information dénuée de sens pour
l’adolescent. An de donner un sens aux renseignements transmis, l’inrmière doit tout d’abord
écouter l’histoire de l’adolescent, tout en évitant de
porter un jugement sur les actions posées. Par la
suite, elle pourra fournir une information propre à
la situation de l’adolescent et ainsi individualiser
son intervention auprès de lui. À la n de la rencontre, l’inrmière lui propose un objectif réaliste
à atteindre et planifie une nouvelle rencontre
quelques semaines plus tard an d’effectuer un
suivi sur le comportement en cause.
de personnes plus jeunes. Il est préférable d’éviter
les propos traduisant de l’âgisme : employer des
diminutifs (p. ex., cher, madame chose, mon petit
monsieur) ; faire un usage inapproprié des pronoms
au pluriel : « Sommes-nous prêts pour votre entrevue ? » ; poser des questions sans possibilité de refus :
« Vous ne voulez pas plutôt vous asseoir ici, il s’agit
d’un fauteuil plus confortable. » ; et avoir recours à
des phrases tronquées, à un langage infantilisant ou
adopter un débit vocal outrageusement lent.
La durée de l’entrevue est allongée chez les personnes âgées parce qu’elles ont une plus longue
histoire de santé à raconter. Pour ce faire, l’inrmière
pourrait avoir besoin de morceler l’entrevue en plusieurs rencontres, la plus importante étant celle de
la collecte des données. Certaines d’entre elles, telles
que les antécédents de santé, l’histoire familiale et
les problèmes de santé actuels, pourraient être
recueillies au moyen d’un formulaire rempli à la
maison, si l’écriture et la vision de la personne le lui
permettent. Ensuite, au cours d’une prochaine entrevue, l’inrmière pourrait prendre le temps d’examiner le document avec la personne an de valider
l’information contenue dans celui-ci.
Il est important d’adapter le rythme de l’entrevue
à celui de la personne vieillissante, puisque celle-ci
a une grande quantité de données à trier, ce qui peut
être plus long. Certaines personnes âgées ont également besoin de plus de temps an de bien comprendre les questions et d’y répondre adéquatement.
L’inrmière devrait donc éviter de se presser : une
approche brusque pourrait faire croire à la personne
âgée que les professionnels de la santé sont en général des personnes qui sont simplement intéressées
par le nombre de clients rencontrés et de formulaires à remplir dans une journée. Si l’inrmière
désire réaliser l’entrevue trop rapidement, l’aîné ne
coopérera plus, et ses besoins ne seront pas satisfaits. Il manquera alors des données précieuses à
l’inrmière FIGURE 3.5.
Personnes âgées
L’adulte vieillissant a généralement trouvé un sens à
sa vie et à son existence, tout en commençant
à accepter la nalité de la mort. L’inrmière doit être
attentive aux personnes âgées qui sont parfois désespérées quant à leur vie actuelle et future, en particulier dans le contexte où la maladie est synonyme de
limitation physique ou de menace de dépendance.
L’inrmière doit toujours faire face à la personne
et l’appeler par son nom de famille (p. ex., « Bonjour,
monsieur Tremblay » « Bonjour, madame Pelletier »).
Plusieurs personnes âgées détestent se faire appeler par leur prénom et spécialement lorsqu’il s’agit
56
Partie 1
Évaluation globale de la personne
FIGURE 3.5
L’inrmière procède à l’entrevue en s’adaptant au rythme de la
personne âgée.
Il faut aussi considérer les limitations physiques au moment de la planication de l’entrevue. En effet, une personne âgée se fatigue plus
rapidement et peut demander que les rencontres
se déroulent en plusieurs périodes de courte
durée. Pour la personne atteinte d’un décit auditif, la bouche et le visage de l’inrmière doivent
être entièrement visibles. L’inrmière évite de
crier : ce comportement ne contribue pas à une
meilleure compréhension et peut même déformer
le discours.
Parfois, le toucher est une démonstration non
verbale très importante pour les personnes âgées et
notamment si leurs autres sens sont diminués ; le
toucher reste donc essentiel pour elles. L’inrmière
ne devrait pas hésiter à l’utiliser. En effet, une main
posée sur le bras ou l’épaule transmet un message
d’empathie qui permet à l’inrmière de renforcer
la communication avec la personne, lui signiant
qu’elle désire comprendre son problème
2 .
3.3
Entrevue avec une
personne ayant des
besoins spéciaux
3.3.1
Personne malentendante
Comme la population est vieillissante, la surdité
constitue une problématique de plus en plus présente, et ce, à différents égards. Les personnes
sourdes se considèrent elles-mêmes comme une
minorité linguistique, et non comme des personnes
atteintes d’un handicap (Iezzoni, O’Day, Killeen et
collab., 2004). Elles peuvent parfois avoir le sentiment d’être ostracisées par les professionnels de la
santé, et elles sentent aussi que leur intelligence est
parfois remise en question. Comment prodiguer des
soins de qualité auprès de ces personnes dans ce
contexte ? Bien que plusieurs clients mentionnent
d’entrée de jeu qu’ils sont atteints d’un décit de
l’audition, d’autres ne le diront pas ; l’inrmière
devra donc être en mesure de reconnaître les
indices de ce décit : regarder la bouche et le visage
de l’interlocuteur, ne pas respecter les consignes à
moins que l’inrmière regarde directement la personne ou qu’elle parle d’une voix forte ou accompagnée de gestes.
Même si la personne sourde peut être familière
avec certains équipements du centre hospitalier ou
du bureau ou qu’elle a déjà eu une expérience précédente dans un établissement de santé, sans une
bonne communication, elle se sentira isolée et
anxieuse. Si elle est atteinte de surdité, l’inrmière
doit lui demander quelle est sa façon préférée de
communiquer : par les mains (langage des signes),
par la lecture labiale ou par écrit.
Pour effectuer une histoire de santé complète,
l’inrmière peut avoir recours à un interprète en
langage des signes. Elle peut essayer d’en trouver
un par l’intermédiaire d’un organisme de services
sociaux ou à l’aide de la personne elle-même et de
son réseau social. Il peut aussi s’agir de membres
de la famille, mais l’inrmière doit toutefois être
consciente qu’ils sont parfois intimement liés avec
la personne ; il se peut alors qu’ils modient ou
même censurent ses propos. L’inrmière utilise
les mêmes consignes que celles concernant l’interprète bilingue.
Si la personne préfère la lecture sur les lèvres,
l’inrmière doit s’assurer de lui faire face et que
son visage est bien éclairé. L’inrmier qui porte
une barbe ou une moustache ou les professionnels
de la santé ayant un accent étranger sont moins bien
compris de la personne sourde. L’infirmière
ne devrait pas exagérer ses mouvements de lèvres
parce que cela entraîne un mauvais décodage de
ses paroles, de la même façon que si elle crie
lorsque la personne porte un appareil auditif.
L’inrmière doit parler simplement et lentement et
compléter ce qu’elle dit avec des gestes de la main.
Les indices non verbaux sont importants parce
qu’ils complètent la lecture sur les lèvres et augmentent la compréhension de 50 %. L’inrmière
doit s’assurer que le client comprend ses questions
puisque de nombreuses personnes malentendantes
ne font que des signes d’acquiescement avec la tête
juste pour être amicales et coopératives, mais en
réalité elles n’ont rien compris.
3
2
Le chapitre 2, Compétence
culturelle : les soins selon
la culture, présente les cas
d’exception où le toucher
n’est pas approprié.
La communication écrite peut être efcace pour
connaître les antécédents de santé, l’histoire familiale ou pour faire la revue des systèmes. En ce qui
concerne l’histoire de la maladie actuelle, l’écriture
prendrait beaucoup trop de temps et serait laborieuse pour la personne. Dans cette situation, elle
va probablement pouvoir lire normalement sur les
lèvres, notamment si la surdité est apparue après
l’acquisition de la parole. Par contre, si la surdité
s’est produite avant celle-ci, la personne utilisera
probablement le langage des signes. La langue des
signes québécoise (LSQ), différente de celle utilisée
dans le reste du Canada, est le langage des signes
le plus commun au Québec.
3.3.2
Personne gravement malade
Une situation d’urgence exige des actions rapides
de la part de l’inrmière. Elle se doit de combiner
l’entrevue avec l’examen physique an de déterminer les actions à entreprendre. Même si les mesures
de soutien immédiates sont primordiales, l’inrmière doit essayer, autant que possible, d’interroger
la personne. Recueillir les données subjectives est
essentiel pour déterminer les causes et l’évolution
de la situation d’urgence. Les questions doivent être
brèves et concises. Il importe de trouver à quel
endroit se situe la douleur et quelle est l’intensité
Chapitre 3
Entrevue
57
de celle-ci. L’infirmière ne doit pas oublier la
famille ou les amis du client, qui peuvent fournir
des données importantes.
Une personne hospitalisée pour une maladie
grave ou critique est généralement trop faible, trop
essoufée ou elle éprouve trop de douleur pour
répondre à des questions. L’inrmière s’assure
d’abord que la personne est confortablement installée. Ensuite, elle établit ses priorités, c’est-à-dire
ce qu’elle doit savoir immédiatement ainsi que les
éléments les plus pertinents de l’histoire de santé.
Elle cherche la préoccupation principale de la personne concernant son état de santé. Elle commence
par poser des questions fermées et directes an de
s’assurer que les afrmations de la personne représentent vraiment ce qu’elle veut dire. Un client
gravement malade peut mal interpréter une phrase
pourtant simple : il pourra réagir à partir d’idées
préconçues de ce qu’est une maladie grave ; par
conséquent, tout ce que lui dit l’inrmière doit être
direct, précis et sans ambiguïté.
3.3.3
6
La relation thérapeutique
entre l’inrmière et le client
consommant de l’alcool ou
des drogues est abordée
dans le chapitre 6, Évalua­
tion de la consommation
de substances.
Personne sous l’inuence de
drogues de rue ou de l’alcool
Il est fréquent que les personnes se trouvant sous
l’effet de l’alcool ou d’autres drogues qui altèrent
le comportement doivent être admises en centre
hospitalier. Certaines drogues inuent sur le système nerveux central (SNC), ce qui accroît le risque
de surdose, d’accidents et de blessures, tant pour
la personne que pour les soignants. De plus, il est
à noter que l’utilisation chronique de ces substances peut engendrer des problèmes médicaux
complexes qui exigent des soins plus attentifs. De
nombreux consommateurs de substances illicites
sont polytoxicomanes ; l’inrmière peut donc se
trouver en présence d’un large éventail de comportements causés par diverses substances dont les
effets varient. L’alcool, les benzodiazépines et les
opiacés (héroïne, mépéridine, oxycodone,
VicodinMD, acide gamma-hydroxybutyrate [GHB],
morphine, kétamine) sont des dépresseurs du SNC,
alors que les stimulants de ce système (ecstasy
[MDMA], cocaïne, amphétamines, méthamphétamines, crack,) peuvent provoquer un état de stress,
d’agitation et des comportements paranoïdes.
D’autres substances psychotropes (LSD, PCP, champignons magiques) peuvent causer des hallucinations, des comportements bizarres et inappropriés,
parfois même violents. Ces substances peuvent
également entraîner une augmentation démesurée
de la force physique et une insensibilité à la
douleur.
Pendant l’entrevue avec une personne qui se
trouve sous l’inuence de l’alcool ou de drogues,
l’inrmière pose toujours des questions directes,
simples et non menaçantes an d’éviter la confrontation. Elle s’abstient également de toute
58
Partie 1
Évaluation globale de la personne
manifestation de jugement ou de dégoût, puisque
la personne peut devenir belliqueuse.
L’une des priorités est de trouver le moment où
la dernière substance a été consommée, la quantité
et le nom de celle-ci. Ces renseignements permettront de reconnaître de potentiels signes de sevrage
et de réagir promptement. Pour sa propre protection, l’inrmière doit savoir à qui elle peut faire
appel pour obtenir de l’aide : d’autres membres du
personnel, des agents de sécurité, des policiers. Elle
garde toujours une distance sécuritaire par rapport
à la personne intoxiquée. Elle doit aviser ses collègues qu’elle est en entrevue avec une personne
susceptible d’être agressive, demeurer toujours près
de la porte, la garder entrouverte au besoin et ne
jamais se placer dans une situation où elle serait
vulnérable. An de minimiser les risques d’agression, l’inrmière demande à la personne de rester
assise durant l’entrevue. Toutes ces mesures visent
essentiellement à assurer sa sécurité.
Une fois les effets des substances dissipés, le
toxicomane hospitalisé devrait être évalué an de
déterminer, d’une part, l’étendue du problème et,
d’autre part, la signication de cette consommation
pour lui-même et sa famille. Au début, l’inrmière
affrontera probablement du déni ou une attitude
défensive ; dans certaines situations, une recommandation vers une aide extérieure au centre hospitalier est nécessaire et souhaitable
6 .
3.3.4
Personne indiscrète
Occasionnellement, les clients poseront des
questions sur la vie personnelle de l’inrmière ou
ils lui demanderont son opinion, par exemple :
« Êtes-vous mariée ? » « Avez-vous des enfants ? »
« Fumez-vous ? » L’inrmière n’a pas à répondre
à ces questions. Si elle le désire, elle peut fournir
une information succincte quand elle sent que
c’est approprié, mais elle doit garder à l’esprit la
possibilité qu’il puisse y avoir un motif derrière
ces questions d’ordre personnel. Elle doit essayer
de rediriger sa réponse vers la personne et sa
situation. Elle peut dire quelque chose comme :
« Je me demande si votre question est liée à la
façon dont je peux vous aider à prendre soin
de Laurence. »
3.3.5
Personne agressive
sexuellement
Dans certains cas, des personnes adresseront des
compliments à l’inrmière, adopteront une attitude
charmeuse, séductrice, allant même jusqu’à faire
des insinuations ou des avances d’ordre sexuel. Ce
comportement est particulièrement présent chez
les personnes atteintes de graves maladies qui
menacent leur estime de soi et notamment leur
capacité sexuelle. Cela crée chez elles une anxiété
qui peut les rendre agressives dans la façon de vivre
leur rapport à la sexualité.
La réponse de l’inrmière à une telle personne
doit être sans équivoque et lui faire comprendre
qu’elle est une professionnelle de la santé et que la
meilleure façon d’obtenir des soins est de maintenir
une relation professionnelle. Par la même occasion,
elle doit lui dire qu’elle l’accepte comme personne
et qu’elle comprend sa situation actuelle, mais
qu’elle ne peut pas tolérer ses avances sexuelles.
Cela peut s’avérer difcile, compte tenu du fait que
la personne a pu dire des paroles ou fait des gestes
qui l’ont choquée, gênée ou mise en colère. Ces
sentiments sont normaux. L’inrmière doit établir
ses limites en disant : « Je suis mal à l’aise quand
vous me parlez de cette façon ; je vais vous demander de cesser immédiatement. » Une autre réponse
qui pourrait amorcer la communication est la suivante : « Je me demande si votre comportement est
attribuable à votre maladie ou au fait d’être dans
un centre hospitalier. »
3.3.6
Personne en pleurs
L’infirmière se sent généralement mal à l’aise
lorsque la personne commence à pleurer. Or, pleurer peut être d’un grand secours pour celle-ci. Les
problèmes de santé engendrent une multitude
d’émotions intenses, comme des inquiétudes relatives à la maladie, au décès ou à la perte d’un être
cher. Si l’inrmière dit quelque chose qui « fait
pleurer la personne », elle ne devrait pas penser
qu’elle est la cause directe de cette réaction ; elle
devra plutôt comprendre qu’elle a efeuré un sujet
important pour la personne. Dans cette situation,
il ne faut pas changer de sujet : il est préférable, au
contraire, de laisser la personne pleurer et exprimer
ENCADRÉ 3.3
pleinement ses sentiments. L’inrmière peut offrir
un mouchoir de papier et attendre que les pleurs
diminuent avant de recommencer à parler, au
moment où la personne aura repris la maîtrise de
ses émotions.
3
Il arrive que la personne regarde l’inrmière, au
bord des larmes, s’efforçant de les réprimer. Là
encore, au lieu de dévier la conversation, il faut
explorer davantage le sujet en disant : « Vous avez
l’air triste. Ne vous inquiétez pas, pleurer est tout
à fait normal. » La personne se sentira comprise et,
si elle pleure, elle sera soulagée ; l’inrmière aura
ainsi une idée du sujet qui la préoccupe, comme le
montre l’encadré suivant ENCADRÉ 3.3.
3.3.7
Personne en colère
Occasionnellement, l’infirmière aura à mener
une entrevue avec une personne qui éprouve de
la colère. Elle ne doit pas s’attribuer la cause
de cette colère, car elle n’en est habituellement pas
responsable. La personne fait preuve d’agressivité
pour se défendre par rapport à ses propres sentiments d’angoisse ou d’impuissance. Il faut alors lui
demander la raison de sa colère, qui doit être dissipée avant de continuer l’entretien. Une personne
en colère ne peut pas coopérer adéquatement à une
entrevue concernant sa santé.
L’infirmière peut également ressentir de la
colère, peut-être provoquée par un incident extérieur. Il est aussi possible qu’elle se soit développée
durant l’entrevue. L’inrmière doit expliquer la
cause de sa colère au client et envers qui cette
colère est dirigée. Sinon, les personnes particulièrement vulnérables et dépendantes de l’inrmière
auront l’impression qu’elle éprouve de la colère
contre elles.
Cas clinique
Alice Vigneault, âgée de 49 ans, est une femme blanche, divorcée, qui a un
problème d’alcoolisme chronique. Elle présente des signes d’ictère tégumentaire ; elle se trouve actuellement en cure de désintoxication en vue de régler
son problème de toxicomanie. Aujourd’hui, elle doit subir un examen vaginal et
un test de Papanicolaou.
Madame Vigneault : « Je n’ai pas subi d’examen gynécologique depuis cinq
ans. J’ai eu une hystérectomie il y a 18 ans. Ils ont dit que j’avais des cellules
cancéreuses en développement. » (À la n de l’entrevue, madame Vigneault a
les lèvres pincées, les yeux fermés, elle a posé une main sur sa bouche, et sa
respiration est bruyante et saccadée.)
Inrmière (se penche vers l’avant et regarde la cliente. Silence.) : « Je vois que
cela vous attriste. » (L’inrmière pose sa main sur la partie supérieure du bras de
madame Vigneault.)
Madame Vigneault (elle pleure librement maintenant) : « Qu’est-ce que je vais
faire si vous trouvez des cellules cancéreuses encore une fois ? Les médica-
ments ne font pas effet sur moi avec ma maladie du foie. Je ne survivrai
jamais à l’anesthésie. Et mon père est décédé d’un cancer. Il avait une cirrhose
aussi, ils l’ont opéré, et il était plein de cellules cancéreuses. Il ne s’est jamais
réveillé après la chirurgie et il est mort deux semaines plus tard. »
Inrmière : « Je comprends à quel point vous êtes inquiète. Je pense que vous
avez fait la bonne chose en venant en traitement. Vous êtes courageuse, et
nous allons franchir les étapes une à la fois. Aujourd’hui, nous devons faire
l’examen pelvien et le frottis vaginal. Pour l’instant, il n’y a aucune raison de
supposer que vous avez besoin d’une opération. Je ferai votre examen
aujourd’hui, et je serai ici toute la semaine. Nous allons travailler ensemble
pour vous aider à passer à travers cette étape. »
Madame Vigneault (elle respire profondément, elle est assise bien droite, les
bras ouverts, tendus vers le bas, et elle rend tous les contacts visuels) : « Ça
m’inquiète beaucoup, vous me comprenez bien. Ça me soulage d’en parler à
quelqu’un, ça fait trop longtemps que je refoule ça à l’intérieur. Je me sens
mieux maintenant. »
Chapitre 3
Entrevue
59
3.3.8
Personne potentiellement
violente
Le milieu des soins de santé n’est pas à l’abri de
comportements violents. Une personne peut manifester de la violence en entrevue, et l’inrmière
doit assurer sa sécurité personnelle. Il lui faut
reconnaître les signes annonciateurs de ce type de
comportements chez une personne, comme serrer
les poings, bouger sans arrêt, manifester des signes
de désorientation, afrmer des choses qui n’ont
pas de sens, raconter une histoire récente d’usage
de drogues (p. ex., de l’alcool, des substances hallucinogènes, des méthamphétamines, de la
cocaïne) ou une histoire récente de deuil pénible
(p. ex., le décès du conjoint, une perte d’emploi).
Dans une telle situation, l’inrmière doit se er
aux indices qu’elle décèle : si elle pressent un comportement suspect ou menaçant, elle doit agir
immédiatement an de désamorcer la situation. Si
elle suspecte que la personne qu’elle s’apprête à
rencontrer pourrait être violente, l’inrmière doit
toujours aviser une collègue avant d’entrer dans la
pièce où se trouve la personne. Elle laissera alors
la porte de la salle d’examen ouverte et s’assurera
d’être placée entre la personne et la porte. De nombreux établissements disposent également d’un
signal particulier pour qu’une collègue de travail
puisse appeler une unité d’intervention auprès de
personnes violentes (parfois nommée code blanc)
ou le service de sécurité. Si l’inrmière se sent en
danger, elle ne devrait pas élever la voix ou essayer
de discuter avec la personne. Elle doit conserver
son calme, parler à la personne d’une voix douce
tout en manifestant de l’intérêt pour les propos de
celle-ci. L’objectif premier de l’inrmière étant sa
sécurité, elle évite à tout prix de prendre des
risques.
3.3.9
communications verbale et non verbale sont
inuencées par le contexte culturel, tant chez les
inrmières que chez les clients. La communication
interculturelle, quant à elle, fait référence au processus de communication qui se déroule entre une
inrmière et une personne, chacune venant d’un
milieu culturel différent, dans lequel les deux
tentent de comprendre le point de vue de l’autre
à partir de sa propre perspective culturelle
FIGURE 3.6.
Les personnes qui ne comprennent pas bien une
langue étrangère doivent souvent recourir à un
interprète autre qu’un membre de la famille
ou un ami. L’inrmière doit s’assurer que la personne et sa famille comprennent bien la situation,
le diagnostic et ses implications, les procédures
diagnostiques et thérapeutiques (comment, pourquoi
et à quel moment) et ce qu’elles signient, les médicaments à prendre (quand et comment). Cela est
important pour évaluer le pronostic en fonction du
problème.
Considérations culturelles liées au sexe
Ne pas tenir compte des normes culturelles relatives aux relations hommes-femmes risque de
nuire à la relation professionnelle de l’inrmière
avec de nombreuses personnes. Parmi les clients
d’origine arabe, l’infirmière peut rencontrer
des hommes adultes qui ne se sont jamais trouvés
seuls en présence d’une femme (à l’exception de
leur épouse), car ils sont généralement accompagnés de un ou de plusieurs autres hommes qui
Personne anxieuse
Enn, il est normal que presque toutes les personnes ayant un problème de santé éprouvent une
certaine anxiété. Cependant, cela rend certaines
personnes agressives, alors que d’autres deviennent
dépendantes. L’inrmière doit donc garder à l’esprit que la personne n’est pas dans son état
normal.
Particularités culturelles et génétiques
Communication interculturelle
Cette section porte sur les comportements à adopter
avec des personnes de différentes cultures. Il faut
toutefois noter qu’il s’agit de généralités et qu’il est
préférable de personnaliser les soins. La probabilité
d’une mauvaise communication augmente lorsque
les personnes sont issues de milieux culturels différents. Il est également reconnu que les
60
Partie 1
Évaluation globale de la personne
FIGURE 3.6
La communication peut être plus difcile lorsque les
personnes sont issues de milieux culturels différents.
interagissent avec elle. Ce comportement est culturellement très important ; transgresser ces règles
du code culturel (soit l’ensemble des règles ou
certaines des normes utilisées par un groupe culturel) est considéré comme une faute grave. Souvent,
celui qui enfreint les règles peut être accusé d’inconduite sexuelle.
La meilleure façon de veiller à ce que les
variables culturelles soient prises en considération
est de demander à la personne de préciser son code
culturel concernant les relations hommes-femmes.
L’inrmière devra de préférence poser cette question au début de l’entrevue, avant qu’elle ait eu
l’occasion de transgresser un code culturel.
Si l’inrmière perçoit que la différence de sexe
est une notion importante pour la personne, elle
pourrait avoir recours à certaines stratégies,
comme celle d’offrir la possibilité de la présence
d’une troisième personne pendant l’entrevue. Si
un membre de la famille ou un ami accompagne
le client, l’inrmière pourrait lui demander s’il
désire et accepte que cette personne soit présente
au cours de l’histoire de santé ou pendant l’examen
physique.
Il n’est pas inhabituel pour une femme de refuser
de se faire examiner par un homme et vice-versa.
Il faut aussi s’assurer de préserver l’intimité physique de la personne en veillant à ce qu’elle
demeure couverte à tout moment, que les rideaux
soient fermés et, si possible, que la porte reste fermée. La salle doit être intime, et il faut s’assurer
que quiconque y entrera frappera d’abord à la porte
ou s’annoncera.
Les questions liées au sexe se compliquent par
certaines croyances culturelles associées à l’autorité
et aux disciplines du domaine des soins de santé.
Par exemple, dans de nombreux pays en développement, les soins inrmiers sont une avenue de
travail peu gratiante. Dans certains pays producteurs de pétrole (p. ex., l’Arabie saoudite, le
Koweït), la prise en charge des malades est assurée
par des fournisseurs de soins de santé privés recrutés à l’étranger, car soigner les malades est vu
comme une activité indigne.
Considérations culturelles
relatives à l’orientation sexuelle
Au cours de ses rencontres avec des lesbiennes, des
bisexuels ou des homosexuels, l’inrmière doit être
consciente des préjugés sociaux envers ces personnes et des effets de ceux-ci sur l’entrevue et sur
l’examen physique. Même certains formulaires
laissent transpirer ces préjugés, en laissant supposer que l’hétérosexualité est le seul choix naturel
et qu’elle constitue la norme. Par exemple, la plupart des histoires de santé incluent une question
concernant l’état matrimonial. Bien que de nombreux couples de même sexe soient engagés dans
une relation monogame à long terme, on trouve
rarement, dans un formulaire standard, la mention
d’une catégorie qui reconnaît d’autres types d’orientation sexuelle que celle de l’hétérosexualité, même
si ces autres statuts sont techniquement et juridiquement acceptés. Ces préjugés sociaux peuvent
aussi avoir des implications en matière de santé.
Des homosexuels ont déjà été soumis à des procédures diagnostiques inutiles, alors que les hétérosexuels n’ont subi aucune de ces investigations,
comme dans le cas du syndrome d’immunodécience acquise. Dans certaines situations empreintes
de préjugés tenaces, des lesbiennes ont été soumises à des procédures diagnostiques non nécessaires telles que des test de dépistage d’ITSS ou
l’utilisation de deux paires de gants lorsqu’elles ont
fait mention de leur homosexualité.
3
Perspectives culturelles quant
aux interactions professionnelles
L’interaction professionnelle de l’inrmière avec
des personnes de cultures différentes dépend,
dans une large mesure, de la perception culturelle de ces personnes quant à la prestation de soins
de santé ainsi que du degré d’accommodement jugé
approprié. Par exemple, des personnes provenant
de l’Asie du Sud-Est s’attendent à ce que ceux qui
détiennent l’autorité, tels que les inrmières, se
montrent autoritaires, directifs et détachés des personnes qu’elles soignent. De plus, pendant l’entrevue, certains clients peuvent s’attendre à ce que
l’infirmière sache intuitivement ce qui ne va
pas chez eux, et ce, quelle que soit leur origine.
Dans cette situation, l’inrmière peut perdre de la
crédibilité si elle pose une question assez générale
telle que : « Qu’est-ce qui vous amène ici ? » La personne de culture asiatique peut interpréter cette
question de la manière suivante : « Vous ne savez
pas pourquoi je suis ici ? Vous êtes censée être la
personne qui connaît toutes les réponses. »
Il faut également noter que ces considérations
culturelles peuvent varier en fonction de l’âge de
la personne et de l’expérience de celle-ci. Par
exemple, si un client d’origine asiatique demeure
au Québec depuis plus de 20 ans, il est peu probable que les caractéristiques décrites ci-dessus
s’appliqueront. En d’autres termes, l’accent doit
être mis sur l’harmonie sociale entre les personnes
de cultures différentes pour que chacune puisse
exprimer pleinement ses sentiments ou ses préoccupations au cours de l’entrevue. Un comportement
réservé de la part de la personne pourrait laisser
croire à l’inrmière qu’elle accepte et comprend les
explications. Mais cette attitude peut reéter le
souci d’entretenir une harmonie interpersonnelle,
sans pour autant que la personne soit en accord
avec l’inrmière. Ce comportement approbateur
peut également être une attitude pour « sauver la
face », lorsque la personne est censée saisir quelque
chose, mais qu’en réalité elle ne comprend pas la
question posée. L’inrmière doit donc s’assurer que
Chapitre 3
Entrevue
61
le client fait la différence entre une réponse socialement acceptable, une réponse respectant ses
convictions et une réponse franche ; elle invitera
donc la personne à répondre honnêtement et franchement à toutes les questions, par exemple en
lui donnant la « permission » d’être en désaccord
avec elle.
Étiquette
L’étiquette fait référence à l’ensemble des bonnes
manières et du savoir-être qui régit les comportements. Il faut connaître et comprendre les perceptions des personnes d’autres cultures qui, en
certaines occasions, peuvent demander à l’inrmière de participer à une conversation de nature
personnelle ou sociale avant qu’elles se sentent à
l’aise d’entreprendre un échange plus personnel
et intime portant sur certains aspects physiques.
Ces personnes accordent une grande valeur à l’établissement de relations interpersonnelles avant de
permettre à l’inrmière d’intervenir sur le plan
des soins. Il faut toutefois être conscient que des
contraintes de temps limitent souvent la durée
des rencontres ; l’inrmière devrait donc s’efforcer
d’intégrer les besoins culturels et sociaux de la
personne à l’histoire de santé. Par exemple, en utilisant une voix de type « conversation », l’inrmière peut commencer l’entrevue en s’informant
des membres de la famille de la personne et de leur
état de santé.
L’inrmière peut, en certaines occasions, rencontrer des personnes de diverses cultures qui veulent
l’interroger : ils peuvent poser des questions sur sa
famille, son état matrimonial, son adresse personnelle, son numéro de téléphone, son salaire, etc.
L’inrmière devrait déterminer, en fonction de ses
valeurs, jusqu’à quel point elle est à l’aise de répondre
aux questions du client ; il est tout de même respectueux de répondre à certaines d’entre elles. Mais
l’inrmière ne devrait pas oublier qu’elle n’est pas
obligée de répondre aux questions qu’elle juge trop
personnelles et qu’elle a toujours le droit de protéger sa vie privée ; il en va, en certaines occasions, de
sa sécurité. Par exemple, l’inrmière ne doit jamais
révéler l’adresse de son domicile, son adresse électronique ou son numéro de téléphone personnel,
accepter des amitiés sur des réseaux sociaux tels que
Facebook ou Twitter lorsqu’une personne a été ou se
trouve sous sa responsabilité. Elle devrait plutôt fournir au client le numéro de téléphone de son
employeur – centre hospitalier, clinique, etc. Si elle
désire que le client soit en mesure de la contacter
lorsqu’elle est à la maison, elle devrait demander à
une personne de l’établissement de soins de santé
de lui téléphoner si ce client désire la joindre.
L’inrmière devrait décider à l’avance des questions
sur lesquelles elle accepte de discuter et celles qu’elle
évitera poliment. Si elle refuse de répondre à certaines questions personnelles, elle doit se rappeler
que le client peut percevoir ce comportement comme
62
Partie 1
Évaluation globale de la personne
distant et insensible. Ainsi, la façon dont elle répond
aux demandes de renseignements personnels doit
tenir compte à la fois de la culture du client et de ses
propres valeurs.
Lorsque l’inrmière rencontre une personne pour
la première fois, il est préférable qu’elle le fasse avec
rigueur, respect et politesse. À moins qu’elle soit
atteinte d’un handicap physique, l’inrmière devrait
demeurer debout lorsqu’elle salue la personne et
ceux qui l’accompagnent. Un autre aspect de l’étiquette concerne l’utilisation du nom et du titre. An
de veiller à ce qu’une relation de respect mutuel soit
établie, l’inrmière se présente en indiquant à la
personne la façon dont elle préfère être appelée
(nom de famille, titre ou autre). Elle devrait obtenir
les mêmes renseignements sur la personne, car cela
lui permet de la traiter d’une manière culturellement appropriée. Cette formalité pourrait lui épargner un embarras considérable. Tout le monde aime
être appelé par son nom exact. L’inrmière doit être
certaine du nom du client, de sa prononciation et
de la façon de s’adresser à lui selon son titre ou son
statut. Elle évite de se montrer trop familière, c’està-dire qu’elle s’abstient d’utiliser systématiquement
le prénom de la personne avant d’avoir été invitée
à le faire. Les mêmes directives doivent être suivies
avec les membres de la famille ou d’autres visiteurs.
L’inrmière devrait accueillir la personne en la
saluant et en se présentant par son nom de famille :
« Bonjour, madame X ou monsieur Y. Je m’appelle… » L’utilisation de diminutifs ou d’appellations familières peut insulter les clients et les
membres de leur famille.
Chez les Chinois, les Vietnamiens et les
Asiatiques, le nom de famille est écrit en premier,
suivi du prénom, ce qui est exactement à l’opposé
de la façon nord-américaine. Puisque les
Asiatiques accordent une très grande importance
à la courtoisie et aux formalités de politesse, l’infirmière devrait s’adresser à la personne en
employant son titre de civilité exact (p. ex., monsieur, madame, docteur) suivi du nom de famille.
Il faut noter que certains Asiatiques, en particulier
ceux qui sont de religion chrétienne, peuvent avoir
des noms à consonance anglaise. Par ailleurs, la
plupart des femmes asiatiques n’emploient pas le
nom de famille du mari après leur mariage.
L’inrmière doit être particulièrement consciente
de cela si elle reçoit les enfants en entrevue en
présence des deux parents. Il est probable qu’elle
devra s’adresser au mari et à l’épouse au moyen
de noms de famille différents (p. ex., « Monsieur
Eao », « Madame Li »). Dans la plupart des cultures
asiatiques, l’enfant reçoit le nom de famille du
père. Selon le degré d’acculturation, quelques
Asiatiques canadiens inversent l’ordre de leur
nom et prénom an de se conformer à la coutume
canadienne. Si l’inrmière entretient un doute,
elle doit vérier le nom avec le client ou avec une
autre personne de son entourage si celui-ci ne peut
s’exprimer en raison de son état.
Dans les cultures traditionnelles chinoise, japonaise et asiatique, quand les gens sont présentés,
ils se manifestent une certaine forme de respect en
se saluant. Plus l’inclinaison de la tête est profonde, plus le respect est grand. Par exemple, il est
approprié d’accentuer l’inclinaison de la tête
devant un adulte plus âgé, dont la sagesse est fortement considérée, et de la réduire en présence
d’un jeune adulte ou d’un adolescent. Avec l’occidentalisation, les poignées de main sont maintenant usuelles dans presque toutes les parties de
l’Asie et chez les Asiatiques canadiens ; mais serrer
la main trop fermement ou vigoureusement est vu
comme un comportement grossier ou intrusif. La
plupart des personnes de descendance asiatique
s’attendent à ce que l’inrmière adopte un comportement conforme à sa propre culture. En
d’autres termes, il n’est pas nécessaire que l’inrmière utilise l’inclinaison de la tête pour saluer les
Asiatiques ; elle peut les accueillir comme elle le
fait pour les autres personnes.
En raison de l’importance de la famille pour les
personnes d’Amérique du Sud ou d’Amérique centrale, les deux noms de famille sont employés,
représentant le nom du père et celui de la mère. Le
nom paternel vient en premier, suivi du nom maternel. Par exemple, si le nom du client est Juan Diaz
Hernandez, le nom de famille du père est Diaz, et
celui de la mère est Hernandez. En immigrant au
Canada, certaines personnes latino-américaines
décident de laisser tomber le nom de leur mère an
d’abréger le leur. Comme l’espace disponible pour
écrire le nom d’une personne sur un formulaire
typique est limité, il devient évident que la personne doit raccourcir son nom. Malheureusement,
ces personnes perdent ainsi une partie de leur nom,
une expression importante de leur identité culturelle. Par ailleurs, plusieurs personnes originaires
d’Amérique centrale ou du Sud acceptent la poignée de main, et, si elles se connaissent très bien,
elles peuvent même s’étreindre.
Bien qu’il existe des douzaines de cultures
arabes et plusieurs sous-cultures, les coutumes concernant les noms sont semblables. Les garçons et les
lles reçoivent un prénom en bas âge. Le prénom
du père est employé comme deuxième prénom, et
le dernier nom est le nom de famille. Certains
parents préfèrent être appelés « père » (abu) ou
« mère » (um) de la part de leur fils aîné (par
exemple, abu Walid ou père de Walid). Puisque
cette formalité est présente dans la plupart des
cultures arabes, l’infirmière devrait appeler
les clients « Monsieur », « Madame » ou par le titre
de la personne, suivi de son dernier nom, à moins
qu’on l’invite à employer le prénom ou la forme
abu/um du nom. Dans la plupart des cultures
arabes, l’étiquette exige de donner un baiser sur
les joues ou une poignée de main pour les personnes du même sexe, et ce, au moment de l’arrivée
et du départ. Quand un homme arabe est présenté
à une femme, il préférera n’avoir aucun contact
physique avec elle ; ainsi, la poignée de main n’est
pas utilisée. Cette attitude est conforme à la
croyance traditionnelle au sujet de la modestie dans
les rapports hommes-femmes. Les femmes peuvent
s’éloigner des hommes étrangers et refuser d’avoir
des contacts physiques avec eux. La femme musulmane fera habituellement face à l’homme tout en
inclinant légèrement la tête et en croisant ses bras
sur sa poitrine. Ce geste, largement admis et culturellement approprié, remplace la poignée de main
quand des hommes et des femmes sont présentés
dans certaines cultures arabes.
3
Espace et distance
L’inrmière et le client doivent tous deux respecter
une distance dite de confort (leur « bulle »). Ces
repères sont importants tout au long de l’entrevue et
de l’examen clinique : en respectant des zones culturellement appropriées, la relation s’établira plus harmonieusement. Par exemple, l’inrmière pourrait se
retrouver avec une personne d’origine indienne ou
latino-américaine qui envahit son espace personnel
en se rapprochant d’elle ; mais le but de cette personne
est de créer une zone de confort dans laquelle ellemême se sent bien. Si l’inrmière n’est pas à l’aise
avec cette proximité physique, la personne pourrait
s’étonner de sa réaction et la percevoir comme étant
distante, voire désagréable. Le TABLEAU 3.4 résume
quatre zones de confort qui « entourent » une personne de même que la distance fonctionnelle à respecter pour chacune, selon la situation.
Obstacles à la communication
Les inrmières ont tendance à avoir des attentes
stéréotypées quant au comportement des personnes
durant l’entrevue et l’examen physique. En général,
l’inrmière anticipe de la part d’une personne que
celle-ci soit peu exigeante, qu’elle ait un comportement respectueux et qu’elle puisse coopérer tout
au long de l’examen. Bien que les clients soient
susceptibles de poser quelques questions à des ns
de clarication, une légère retenue devant l’autorité
médicale est reconnue et attendue. Les personnes
issues de divers milieux culturels, cependant,
peuvent avoir des perceptions très différentes quant
à leur rôle et à celui de leur famille au cours de l’entrevue. Si l’inrmière est irritée parce qu’une personne pose trop de questions, qu’elle adopte une
position défensive en raison d’un sentiment
de malaise, il serait préférable qu’elle s’accorde une
pause pour examiner le problème dans une perspective interculturelle.
Les comportements culturellement acceptables
lorsque la personne est malade peuvent varier,
Chapitre 3
Entrevue
63
TABLEAU 3.4
Utilisation fonctionnelle de l’espace
ZONE
REMARQUES
Zone d’intimité (de 0 à 0,5 m)
• Une distorsion visuelle se produit.
• C’est la meilleure position pour évaluer les bruits et les odeurs du corps.
Distance personnelle (de 0,5 à 1 m)
•
•
•
•
•
Distance sociale (de 1 à 4 m)
• Elle est utilisée pour les échanges impersonnels (commerce, affaires).
• La perception de l’information est beaucoup moins détaillée.
• Une grande partie de l’entrevue se déroule à cette distance.
Distance publique (4 m et plus)
• Elle est utilisée pour les interactions impersonnelles avec d’autres personnes.
• La voix de l’interlocuteur doit être forte et projetée.
• L’expression faciale subtile est imperceptible.
Elle est perçue comme un prolongement de soi, elle ressemble à une « bulle ».
Le timbre de voix est modéré.
Les odeurs du corps sont imperceptibles.
Il n’y a aucune distorsion visuelle.
Une grande partie de l’examen physique s’effectue à cette distance.
Source : Hall (1963)
allant de l’agressivité à la passivité silencieuse. Se
plaindre ou être exigeant est un comportement
récompensé par une augmentation de l’attention,
comme chez les Juifs et les Italiens, alors que les
Asiatiques et les peuples des Premières Nations
demeurent plutôt silencieux pendant les soins.
Durant l’entrevue, les Asiatiques peuvent offrir des
réponses qui correspondent, selon eux, à ce que
l’inrmière veut entendre, car il s’agit d’un comportement compatible avec leurs valeurs culturelles
dominantes dans le déroulement d’une relation
harmonieuse avec les autres. Ainsi, l’inrmière
devrait tenter de poser des questions qui sollicitent
le point de vue de la personne ou qui évitent une
réponse attendue. Certaines personnes peuvent
rejeter une inrmière qu’ils perçoivent comme étant
trop indiscrète ou curieuse en regard d’une éthique
culturelle qui exige d’éviter un comportement
argumentatif.
Travail avec ou sans interprète
Près de 52 millions de personnes aux États-Unis
parlent une autre langue que l’anglais à la maison
(U.S. Bureau of the Census, 2005). En 2011 au
Canada, 20,6 % des Canadiens ont déclaré une
langue maternelle autre que le français ou l’anglais,
ce qui représente près de 7 millions de personnes.
Par ailleurs, plus de 1 million de Québécois parlent une autre langue que le français ou l’anglais à
la maison, et l’anglais est la langue maternelle
de 650 000 Québécois (Statistique Canada, Recensement des populations, 2012). La communication
représente donc un grand dé au Québec, entre
autres lorsque l’inrmière et la personne parlent
des langues différentes FIGURE 3.7. Après avoir
évalué les compétences linguistiques des
64
Partie 1
Évaluation globale de la personne
FIGURE 3.7
Dans certains cas, l’inrmière peut avoir besoin d’un
interprète pour obtenir une communication efcace
avec des non-francophones.
non-francophones, l’inrmière pourrait se trouver
dans l’une des deux situations suivantes : tenter de
communiquer efcacement par l’intermédiaire d’un
interprète ou essayer d’y arriver sans interprète.
Dans certaines situations, l’inrmière aura vraiment
besoin d’un interprète pour obtenir une communication efficace avec des non-francophones
ENCADRÉ 3.4. Même si la personne d’une autre
culture ou d’un autre pays dispose d’une base en
français (celles pour qui le français est une langue
seconde), l’interprète sera utile si elle éprouve de
l’angoisse à l’égard de la situation, en particulier
lorsqu’elle doit décrire un symptôme inhabituel
ou discuter de sujets délicats tels que ceux liés
à la reproduction ou à la fonction urinaire ou
gynécologique.
Il est tentant de demander à un parent, à un ami
ou même à un autre client de traduire ce que dit
la personne, en particulier quand cette tierce personne est à proximité. Cette situation n’est pas
recommandée parce qu’elle porte atteinte à la
condentialité ; la personne peut en effet ne pas
vouloir partager des renseignements personnels
avec la famille, un ami ou un autre client. De plus,
travailler avec un interprète issu de la famille peut
avoir certaines conséquences, notamment l’augmentation du stress dans une situation déjà éprouvante. Cette situation peut même déstabiliser la
relation familiale. En effet, dans plusieurs cultures,
discuter ou même évoquer la mort ou le cancer est
ENCADRÉ 3.4
tabou, et un interprète peut alors sciemment
décider de ne pas traduire cette situation à la
famille. Il ne faut donc pas avoir recours à des
interprètes sollicités à la dernière minute tels que
les membres de la famille, des amis, des enfants
ou des personnes non qualiées. Celles-ci ne comprennent pas assez bien les termes médicaux pour
les traduire, ce qui peut en outre entraîner des
erreurs potentiellement fatales.
3
Dans une situation idéale, il est préférable de
mettre à contribution un membre de l’équipe
de soins qui possède des compétences en langues
étrangères ou un interprète compétent dans l’utilisation des termes médicaux. Cette personne
Recours à un interprète
CHOIX D’UN INTERPRÈTE
• Avant de faire appel à un interprète, l’inrmière devrait se renseigner sur la
langue que le client parle à la maison. Celle-ci peut différer de la langue
parlée en public.
• Chaque fois que la situation le permet, l’inrmière devrait avoir recours aux
services d’un interprète de formation, de préférence celui qui connaît la
terminologie médicale et qui est membre d’un ordre professionnel tel que
l’Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec
(OTTIAQ).
• L’inrmière doit éviter d’avoir recours aux services d’interprètes avec lesquels il y aurait un risque de rivalité par rapport au pays d’origine, à une
région limitrophe ou à une nation rivale (p. ex., un Palestinien hébreu n’est
peut-être pas le meilleur interprète pour une personne juive).
• L’inrmière doit tenir compte des différences de sexe entre l’interprète et
son client. En général, il est préférable qu’ils soient de même sexe.
• L’inrmière doit être consciente de la différence d’âge entre l’interprète et
son client. En général, un interprète plus âgé et plus mature est préférable à
un interprète plus jeune et moins expérimenté.
• L’inrmière doit prendre en considération les différences socioéconomiques
qui existent entre l’interprète et son client.
STRATÉGIES POUR L’UTILISATION EFFICACE D’UN INTERPRÈTE
• L’inrmière doit planier ce qu’elle veut dire. Elle rencontre l’interprète en
privé avant l’entrevue. Elle évitera d’utiliser certains termes qui pourraient
semer la confusion.
• L’inrmière demande à l’interprète de fournir une interprétation ligne par
ligne du compte rendu de la conversation. Par contre, si plusieurs échanges
ont eu lieu entre l’interprète et son client, l’inrmière demandera un résumé.
• L’inrmière doit être patiente. L’entrevue peut souvent prendre deux ou trois
fois plus de temps avec un interprète.
• Certains échanges seront plus longs que prévu, dans le cas d’explications
concernant le sens de mots tels que « stress », « dépression », « allergies »,
« prévention », « thérapie physique ». Il n’y a peut-être pas de termes comparables dans la langue du client.
• Si l’inrmière mentionne des tests et des examens paracliniques tels que la
mammographie, l’imagerie par résonance magnétique, la tomographie axiale
contrôlée par ordinateur ou ceux qui nécessitent de prélever du sang, de l’urine,
des selles, du liquide cérébrospinal, de la salive ou tout autre uide corporel,
elle n’oubliera pas de préciser la nature du test à l’interprète. Elle précisera
également le but de l’examen, en expliquant exactement ce qui va se passer
pour la personne, combien de temps prendra le test, si la procédure est effractive ou non et quelle partie du corps est testée. Il s’agit, en fait, de la même
démarche devant être réalisée pour toute personne subissant un examen.
• L’infirmière doit être consciente du fait que l’interprète peut modifier ou
adapter certains aspects de la conversation, surtout s’il pense que la personne pourrait ne pas comprendre, voire se méprendre sur le sens de ses
paroles en fonction du contexte culturel ou de la réponse du client (p. ex.,
des croyances et des pratiques liées à la guérison et inspirées des traditions
ou du folklore).
• L’inrmière évite les questions et les phrases ambiguës. Elle s’abstient d’utiliser le conditionnel dans les phrases, comme « si », « devrait » et « pourrait »,
en particulier pour certaines langues cibles telles que le khmer (Cambodge) :
cette langue manque de nuances temporelles ; elle ne fait pas de distinctions entre le futur, le passé et le présent. Dans certaines langues, le conditionnel peut être confondu avec la réalité du présent, ce qui pourrait
modier le plan d’action.
• L’inrmière évite les expressions abstraites, les idiomes, les comparaisons,
les métaphores et le jargon médical.
• An d’assurer la condentialité et la vie privée, l’inrmière n’a pas recours
à des enfants comme interprètes ou à des étrangers venus visiter d’autres clients.
• L’inrmière doit être consciente du fait que l’interprète peut demander un
salaire pour les services rendus. Elle s’assure d’obtenir les garanties nancières nécessaires auprès de l’établissement de santé ou de son supérieur
immédiat. Dans le cas d’une pratique privée, elle négocie les conditions
à l’avance.
RECOMMANDATIONS POUR LES ÉTABLISSEMENTS
• Maintenir à jour la liste des interprètes qui peuvent être contactés en fonction des besoins.
• Établir un réseau de contacts par domaines de spécialités entre les différents centres hospitaliers, les collèges, les universités et les autres organismes qui peuvent servir de ressources.
• Rendre accessibles certains services d’aide téléphonique, par exemple le
service d’interprétation téléphonique (Language Line Services) de l’anglais
vers 140 autres langues. Les services sont offerts jour et nuit, tous les jours
de l’année.
Chapitre 3
Entrevue
65
connaît les techniques d’entrevue, a une vision
des soins de santé et comprend les droits des personnes. De plus, elle s’est familiarisée avec les
diverses croyances culturelles et les pratiques de
santé selon l’origine ethnique. Cette personne peut
ainsi aider l’inrmière à réduire le fossé culturel
et donner des conseils concernant l’adaptation
culturelle des gestes et des recommandations en
matière de santé en fonction du client.
La majorité des établissements de santé au Canada
et au Québec possèdent une liste de personnes
capables d’intervenir comme interprètes dans une
situation de santé. Il est bien connu que peu d’inrmières reçoivent une préparation nécessaire à la
pratique avec des interprètes ; 23 % seulement des
hôpitaux universitaires aux États-Unis offrent cette
formation (Flores, 2006), et aucun établissement ne
le fait au Québec.
Bien que les interprètes aient une formation qui
les habitue à la neutralité, ils peuvent inuencer
à la fois le contenu des données échangées et la
nature des interactions. Beaucoup d’interprètes
professionnels sont membres de l’OTTIAQ. Bien
que cela soit positif, le recours à des interprètes a
des limites. Par exemple, les interprètes ne
connaissent pas les personnes et les détails de leur
situation avant que l’entrevue ne commence. De
plus, bien que leur code de déontologie régisse la
condentialité de l’information et les conits d’intérêts, une situation conictuelle entre l’interprète
et le client demeure toujours possible.
Il convient de noter que le fait d’être bilingue
n’est pas toujours synonyme d’une interprétation
culturelle juste et exacte de la part de l’interprète.
Par exemple, la culture hispanique est tellement
vaste que deux personnes qui parlent l’espagnol
peuvent être issues de milieux fort différents.
L’interprète peut alors éprouver de la difculté à
bien saisir les nuances culturelles, malgré leur
langue commune. L’inrmière devrait toujours
demander à l’interprète de rencontrer la personne
avant de commencer l’entrevue an qu’il puisse
évaluer l’inuence de l’âge du client, de sa profession, de son niveau d’éducation et ses attitudes
envers les soins de santé. Cela lui permettra de
mieux communiquer avec la personne.
Dans ce contexte, l’inrmière doit prévoir plus
de temps pour réaliser l’entrevue. En effet, les
interventions d’une troisième personne allongent
le temps requis pour recueillir les données. En
conséquence, l’inrmière devra toujours tenir
compte des éléments sur lesquels mettre l’accent
en fonction des données relatives à la priorité
de soins.
Il existe deux types de travail d’interprétation :
le « ligne par ligne » et le résumé. Traduire ligne
par ligne prend plus de temps, mais cela assure
l’exactitude des données. L’inrmière devrait
66
Partie 1
Évaluation globale de la personne
privilégier cette procédure pour une entrevue où
elle et la personne échangent seulement une
phrase ou deux à la fois, an de permettre à l’interprète de les traduire. L’inrmière utilise un
langage simple, sans terme médical complexe. Le
résumé permet de progresser plus rapidement et
est utile pour enseigner des techniques et des
changements de comportement. Le langage
demeure relativement simple, et les principes
sont déjà connus de l’interprète. L’inrmière doit
alors être à l’affût des indices non verbaux que la
personne pourrait fournir, qui peuvent préciser
sa compréhension des données. Un bon interprète
note aussi les messages non verbaux et les transmet par la suite à l’inrmière.
L’inrmière peut assez souvent se trouver dans
une situation où la langue de la personne n’est pas
le français. Bien que l’utilisation d’un interprète
soit l’idéal, il est possible qu’aucun ne soit disponible. L’ENCADRÉ 3.5 présente certaines suggestions pour surmonter les barrières linguistiques
dans ce cas. L’inrmière qui désire communiquer
avec des clients de langue étrangère doit s’attendre
à ce que l’exercice combine la communication verbale et non verbale.
Communication non verbale et interculturalité
Il existe cinq types de comportements non verbaux
qui transmettent de l’information sur la personne :
1) les repères vocaux tels que le débit, la tonalité et
la qualité de la voix, y compris les gémissements,
les pleurs et les lamentations ; 2) les indices d’action tels que la posture, l’expression du visage et
les mimiques ; 3) les indices d’objets tels que les
vêtements, les bijoux, la coupe de cheveux ; 4) l’utilisation fonctionnelle de l’espace et des relations
interpersonnelles dans les activités de la vie quotidienne et dans les activités de soins ; 5) le toucher,
ce qui inclut l’utilisation de l’espace personnel et
les indices d’action (Lapierre et Padgett, 1991 ;
Tate, 2003).
Si l’inrmière ne s’exerce pas à reconnaître et à
comprendre les comportements non verbaux des
clients, il lui manquera de l’information importante
comme celle véhiculée par les expressions du
visage, les silences, le contact visuel, le toucher et
d’autres expressions corporelles. Les modes
de communication sont très variables pour un
même comportement en fonction des cultures. Par
exemple, plusieurs personnes d’origine hispanique
considèrent un large sourire comme faisant partie
intégrante d’une interaction sincère ; il revêt
une importance capitale pour l’établissement d’une
relation de conance. À l’opposé, le même sourire
pourrait être interprété comme un comportement
insolent et frivole par un Russe.
Par ailleurs, les moments de silence peuvent être
interprétés de multiples façons. Certaines personnes
trouvent le silence extrêmement inconfortable et ne
ENCADRÉ 3.5
Barrières linguistiques : lorsqu’aucun interprète n’est disponible
1. L’inrmière demeure polie et rigoureuse.
8. L’inrmière donne les instructions dans le bon ordre.
2. L’inrmière prononce le nom du client correctement et utilise les titres de
civilité tels que « Monsieur », « Madame », « Docteur ». Elle accueille la personne en employant le nom de famille ou le nom et le prénom.
• Elle se présente et fait des gestes mesurés.
• Elle sourit.
Elle dit plutôt : « D’abord, brossez-vous les dents. Ensuite, lavez-vous. »
Exemple :
3. L’infirmière procède à l’entrevue sans trop de hâte. Elle prête attention à
toute tentative du client ou de membres de la famille de communiquer.
4. L’inrmière prend la parole avec une voix de faible à modérée. Elle évite de parler fort et doit garder à l’esprit que l’on a tendance à augmenter le volume et la
hauteur de la voix lorsque l’auditeur ne semble pas comprendre. Le client peut
percevoir que l’inrmière crie ou qu’elle est en colère.
5. L’inrmière tentera d’utiliser un ou des mots qu’elle connaît dans la langue
de la personne. Cela indique qu’elle est au courant de la barrière de la
langue et qu’elle respecte la culture de la personne.
6. L’inrmière utilise des mots simples, comme « douleur » au lieu de « gêne ».
Elle n’a pas recours au jargon médical, aux idiomes et à l’argot. Elle évite
d’utiliser des expressions contractées. Elle reprend les noms au lieu d’employer des pronoms personnels.
Exemple :
Elle ne dit pas : « Il a pris son médicament, n’est-ce pas ? »
Elle dit plutôt : « Juan a pris son médicament ? »
7. L’infirmière peut mimer des mots et faire des gestes simples pendant
qu’elle parle.
Le contact visuel est peut-être le comportement
non verbal le plus variable culturellement. Même si
l’inrmière a probablement eu l’occasion d’apprendre à maintenir un contact visuel en parlant
avec d’autres personnes, les clients issus de divers
milieux culturels peuvent attribuer plusieurs
3
Elle ne dit pas : « Avant de vous laver, brossez-vous les dents. »
9. L’inrmière traite d’un sujet à la fois. Elle évite d’utiliser des conjonctions
de coordination.
• Elle offre une poignée de main ou fait un signe de tête.
ménageront aucun effort pour combler les absences
de conversation. Inversement, de nombreux
Canadiens considèrent le silence comme indispensable à la compréhension et au respect de l’autre
personne. Une pause qui suit une question signie
que ce qui a été demandé est sufsamment important pour que la personne y rééchisse. Dans les
cultures traditionnelles chinoise ou japonaise, un
silence peut signier que l’orateur tient à ce que
l’auditeur examine le contenu de ce qu’il a dit avant
de poursuivre. Les Anglais et les Arabes peuvent
utiliser le silence par respect pour la vie privée,
alors que les Français, les Espagnols et les Russes
peuvent interpréter cela comme un signe d’accord.
Les cultures asiatiques utilisent souvent le silence
pour démontrer du respect envers les aînés. Parmi
certaines communautés noires, le silence est utilisé
en réponse à ce qui est perçu comme une question
ridicule.
Exemple :
Elle ne dit pas : « Avez-vous froid ou avez-vous de la douleur ? »
Elle dit plutôt : « Avez-vous froid (avec un mime) ? Avez-vous de la
douleur ? »
10. L’inrmière valide avec la personne si celle-ci a bien compris en lui demandant de répéter les instructions, la procédure ou le but de l’examen.
11. L’inrmière peut écrire plusieurs phrases courtes en français et déterminer
la capacité de la personne à lire.
12. L’infirmière peut utiliser une autre langue, car beaucoup de personnes
parlent l’anglais ou l’espagnol. Les Européens connaissent souvent deux
ou plusieurs langues. L’inrmière peut alors essayer d’utiliser des expressions ou des mots latins.
13. En situation d’urgence, l’inrmière pourrait demander à la personne qui,
dans la famille et les amis, pourrait servir d’interprète en gardant à l’esprit
toutes les limitations et les inconvénients liés au recours à un interprète
provenant de la famille immédiate.
14. L’inrmière communique avec la chef d’unité ou la coordonnatrice, le cas
échéant, an d’obtenir une liste ofcielle d’interprètes et les autorisations
nancières.
significations différentes à ce comportement.
L’Asiatique, l’Américain, l’Indochinois, l’Arabe et
les peuples des Premières Nations interprètent le
contact visuel chacun à leur façon, et ils peuvent
l’éviter s’ils l’associent à de l’impolitesse ou à une
agression. L’Américain regarde souvent au sol pendant la conversation : c’est un comportement culturellement approprié qui indique que l’auditeur est
attentif à son interlocuteur. Certains Noirs peuvent
utiliser le roulement des yeux en réponse à ce qu’ils
jugent comme une question ridicule. Chez les
Hispaniques, il est essentiel de baisser les yeux lorsqu’on s’adresse à l’inrmière. Cette caractéristique
s’exprime en fonction de certains éléments, dont
l’âge, le sexe, le statut social, la situation économique
et la position d’autorité de la personne qui parle. Par
exemple, les aînés de ces communautés s’attendent
à une certaine forme de respect de la part des personnes plus jeunes, des hommes à l’égard des
femmes, des élèves envers les enseignants,
des employés envers les employeurs. En tant que
professionnelle de la santé, l’inrmière a un statut
d’autorité pour les Hispaniques ; le contact visuel ne
sera pas nécessairement réciproque entre elle et la
personne.
Chapitre 3
Entrevue
67
Chez les peuples des Premières Nations, avoir
un contact visuel avec une personne démontre un
manque de respect, surtout avec une personne en
position d’autorité. Il faut donc éviter d’insister pour
obtenir un contact visuel et se er davantage aux
messages non verbaux an de mieux comprendre
les clients. Il faut également respecter les silences, les
écouter. S’ils traduisent de l’incompréhension, l’inrmière s’assure que tous les membres de la famille
ont bien compris. Les formules de courtoisie (merci
et s’il vous plaît) ou le vouvoiement ne sont pas
usuels. Le tutoiement est courant et ne traduit
pas nécessairement un manque de respect. La poignée de main est également plutôt inhabituelle chez
les peuples des Premières Nations.
Dans certaines cultures, y compris chez les
Arabes, les Latino-Américains et les Noirs, la
modestie entre les hommes et les femmes est étroitement liée aux contacts visuels. Pour les femmes
musulmanes arabes, la modestie est exprimée en
partie en évitant le contact visuel avec les hommes
(à l’exception du mari dans un cadre privé) et en
gardant un regard triste lorsque, en public, des
membres du sexe opposé les observent. Dans de
nombreuses cultures, une femme seule qui sourit
et établit un contact visuel avec des hommes peut
être accusée de mœurs légères. Les Juifs hassidiques
ont également des normes concernant le contact
visuel avec les femmes qui sont basées sur leur
culture. Les hommes évitent le contact visuel direct
et tournent la tête en direction opposée lorsqu’ils
croisent une femme ou parlent avec elle. Les
exemples qui précèdent sont donnés à titre illustratif ; ils sont non exhaustifs et reètent une petite
partie de ce que représente l’approche de communication interculturelle.
Toucher
Sans aucun doute, le fait de toucher une personne
est un élément indispensable d’une évaluation globale. Dans une perspective culturelle, cependant,
l’inrmière doit être très attentive aux questions
relatives au toucher. Tout en reconnaissant qu’il
existe des bénéces aux rapports tactiles avec les
personnes, le contact physique transmet diverses
signications selon les cultures. Dans certaines
d’entre elles, par exemple dans les sociétés arabe
et latino-américaine, il peut être interdit aux professionnels de la santé masculins de toucher ou
d’examiner certaines parties du corps féminin ou
celui-ci en entier. Dans de nombreuses cultures, les
femmes peuvent préférer une professionnelle de la
santé, et certaines peuvent même refuser de se faire
examiner par un homme. L’inrmière doit savoir
que la personne peut subir des pressions de la part
68
Partie 1
Évaluation globale de la personne
d’autres personnes afin de faire respecter ces
normes culturelles dans le cadre des soins de santé.
Toucher des enfants peut également avoir une
signication culturelle. Par exemple, une grande
partie de la population mondiale croit au mal ojo,
qui a été littéralement traduit par « œil du diable »
(ou « œil malveillant »). Cette pseudoaffection infantile serait causée par un regard envieux projeté sur
l’enfant. La croyance veut que le traitement immédiat soit qu’une personne soignante touche l’enfant
ayant été ainsi observé. Le mal ojo est particulièrement répandu dans les pays de culture latinoaméricaine. Beaucoup d’Asiatiques pensent que la
force réside dans la tête et que toucher celle d’une
personne équivaut à lui manquer de respect. Pour
l’inrmière, cela signie que le fait d’effectuer un
examen systématique de la tête ou de la fontanelle
d’un nourrisson est problématique pour des personnes originaires d’Asie, à moins d’obtenir la
permission des parents. En fait, elle devrait
toujours prendre en compte la culture dans le déroulement d’un examen clinique. Chaque fois que c’est
possible, l’inrmière explore d’autres façons d’exprimer son affection ou d’obtenir les renseignements
nécessaires pour l’évaluation de l’état du client
(p. ex., maintenir l’enfant asiatique sur ses genoux,
an d’observer des manifestations cliniques de
l’augmentation de la pression intracrânienne ou des
signes de fermeture prématurée des fontanelles,
placer sa main sur celle de la mère tout en demandant une description de ce que celle-ci ressent).
En conclusion de cette section, un bref commentaire à propos des relations entre des personnes de
même sexe est justié. Dans certaines cultures, il
est publiquement et culturellement accepté qu’ils
expriment leur amitié et leur affection, en se tenant
par la main ou en s’embrassant, sans qu’une connotation sexuelle y soit associée. Par exemple, l’inrmière remarquera peut-être que, même si une
Nigérienne immigrée ne peut montrer ouvertement
ses sentiments envers son mari ou d’autres membres
masculins de la famille, elle va sans problème donner la main à d’autres femmes, parents et amis tout
en marchant ou en discutant avec eux. Dans le
même ordre d’idée, chez les hommes du Bénin, il
est acceptable d’embrasser un homme en guise
de salutation. Lorsque l’inrmière rencontre des
personnes au comportement similaire, elle devrait
se sentir libre de discuter des différences et des
similitudes culturelles avec celles-ci.
La discussion devrait inclure les points de vue
de chaque personne concernant la pratique culturelle et explorer les avenues qui sont mutuellement
acceptables par rapport à celles qui le sont moins.
Évaluation et jugement clinique
Dossier : Anne-Sophie Chamberland (suite )
3
Vous avez terminé l’entrevue et vous vous apprêtez à procéder à l’examen physique d’AnneSophie. Vous lui dites : « Je vais maintenant
regarder ton dos et tes épaules. Tu peux aller t’asseoir sur la table d’examen, j’arrive dans un instant. » Vous tirez le rideau et vous dites à sa mère :
« Vous pouvez retourner à la salle d’attente, nous
avons presque terminé, et Anne-Sophie ira vous
rejoindre dès que j’aurai ni. » Sa mère sort du
bureau, et vous allez rejoindre Anne-Sophie.
Anne-Sophie, un peu embarrassée, regarde
au sol : « Oui, mais une fois je ne sais pas ce qui
s’est passé, mais il s’est brisé, et mon chum et
moi on ne s’en est pas rendu compte avant la n.
Une chance que je n’ai pas oublié de prendre
une pilule pendant cette semaine-là. »
Vous vous approchez et vous asseyez sur une
chaise devant elle. « Avant de regarder ton dos,
il me reste quelques questions que j’aimerais te
poser maintenant que ta mère est sortie, est-ce
que ça te va ? » Anne-Sophie acquiesce.
Vous : « Je t’ai posé la question, car la pilule
fait en sorte que tu ne seras pas enceinte, mais
elle ne te protège pas contre les infections transmissibles sexuellement, je voulais juste m’assurer que tu le savais. »
Vous : « Tu as mentionné tout à l’heure que
tu as commencé à prendre la pilule contraceptive depuis peu de temps ; as-tu des questions
à ce sujet ? »
Anne-Sophie : « Pas vraiment, le pharmacien
m’a expliqué ce que je devais faire si j’en oubliais
une et tout le reste, ça va bien pour le moment. »
Vous : « As-tu un chum en ce moment ? »
Anne-Sophie sourit : « Oui ça fait trois mois. »
Vous : « Êtes-vous actifs sexuellement ? »
Anne-Sophie : « Oui. »
Vous : « Utilisez-vous le condom ? »
Vous : « Ça arrive à l’occasion qu’un condom
se brise. Je te félicite de prendre la sexualité au
sérieux et de te protéger, ce n’est pas tous les
jeunes de ton âge qui font attention. »
Anne-Sophie regarde le sol en silence, l’air
un peu inquiet.
Anne-Sophie : « Oui bien je me demandais si
je devrais faire un test pour ça. Moi, c’est mon
premier partenaire, mais mon chum a déjà eu
d’autres partenaires avec qui il ne se protégeait
pas. »
Vous : « Dans ce cas, il serait préférable de
faire un test pour en être certaine. »
Anne-Sophie : « Je veux bien, mais il ne faut
pas que ma mère le sache. Est-ce que vous allez
lui dire ? »
1. Relevez deux facteurs facilitant la communication dans cette partie de l’entrevue.
2. Quel type de question utilisez-vous dans cette portion de l’entrevue ?
3. Quel est le piège à éviter lorsque ce genre de question est posé ?
4. À la n de la situation, Anne-Sophie vous pose une question ; quelle sera votre réponse ?
Que retenez-vous ?
4. Quelles techniques d’entrevue est-il préférable
d’éviter avec les adolescents ? Pourquoi ?
7. Au cours de l’entrevue, que faut-il faire si la
personne éclate en sanglots ?
2. Quelles sont les techniques d’entrevues durant
lesquelles vous prenez principalement la parole ?
5. Dans le cas d’une entrevue avec un enfant
accompagné de ses parents, à partir de quel âge
recommande-t-on de commencer par interroger
l’enfant pour ensuite compléter la collecte des
données avec le parent ?
8. Si vous avez des raisons de croire qu’une personne
pourrait être violente pendant l’entrevue, indiquez
trois moyens à utiliser pour assurer votre sécurité.
3. Nommez les éléments de la communication non
verbale d’un client que vous devez observer durant
l’entrevue.
6. Comment devez-vous questionner la personne
pendant l’entrevue si celle-ci est sous l’inuence
de l’alcool, de drogues ou d’une autre substance ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Est-il acceptable de prendre des notes pendant
l’entrevue ?
Chapitre 3
Entrevue
69
Dossier : Christine Moisan
Christine Moisan, âgée de 42 ans, demeure à
la campagne avec son mari de 45 ans et ses
5 enfants dont le plus vieux a 10 ans. Elle
est amenée à l’hôpital par son conjoint à
la suite d’une chute qu’elle a faite dans
l’étable de la ferme familiale. Elle est copropriétaire de la ferme laitière avec son conjoint,
elle travaille dans les champs et à l’étable tous
les jours.
Alors qu’elle s’affairait à terminer la traite
matinale, elle a perdu pied en descendant d’une
échelle et est tombée sur son côté gauche. « C’est
bête, j’ai manqué l’avant-dernier barreau avant
d’arriver en bas. J’ai voulu me protéger avec mon
bras, mais quand il a touché le sol, j’ai entendu
un craquement et j’ai senti une atroce douleur »,
vous raconte-t-elle. Vous regardez son avant-
4.1
Histoire de santé
L’objectif de l’histoire de santé est de recueillir des
données subjectives, c’est-à-dire ce que la personne
dit à son sujet. Cette histoire s’ajoute aux données
objectives provenant de l’examen physique et des
examens paracliniques. L’inrmière fait une analyse
des caractéristiques essentielles de la situation, organise et formule ses conclusions FIGURE 4.1. Elle
établit le portrait global de la situation pour l’élaboration d’un plan thérapeutique infirmier (PTI)
(Chapados, 2007). L’histoire de santé proposée ici
fournit un tableau complet de la santé antérieure et
actuelle de la personne. Elle décrit celle-ci comme
un tout et montre comment elle interagit avec l’environnement. L’histoire de santé relève les forces et
bras, qui est courbé en forme de « s ». Vous observez une lacération linéaire de 3 cm près du
coude et des traces de terre humide sur sa peau
près de la plaie. Madame Moisan ajoute : « Ça me
fait tellement mal quand j’essaie de bouger ma
main que je la garde immobile. »
4
Vous l’installez sur une civière et vous amorcez l’évaluation. Elle est pâle, respire rapidement, et sa peau est moite. Le médecin a ordonné
une radiographie de l’avant-bras et une consultation en orthopédie. Vous vous apprêtez à commencer l’entrevue lorsqu’elle est demandée en
radiologie. Vous nettoyez sommairement sa plaie
et la couvrez d’une compresse de gaze stérile
avant que le brancardier parte avec elle. Vous
amorcez donc l’entrevue avec son conjoint en attendant son retour.
les mécanismes d’adaptation que la personne utilise
pour se garder en santé, tout en mettant de l’avant
ce qu’elle « fait bien », c’est-à-dire les moyens qu’elle
prend pour être en santé. Chez la personne en bonne
santé, l’histoire sert à évaluer son style de vie en
incluant certains facteurs tels que l’exercice, l’alimentation, la réduction des risques et les comportements de promotion de la santé.
Chez la personne malade, l’histoire de santé
comprend une description détaillée de son problème de santé. Elle constitue un outil de dépistage
des symptômes anormaux, des préoccupations
et des problèmes de santé tout en précisant les
façons dont la personne y réagit.
Données subjectives :
Perception que le client a
de ses problèmes de santé
et de ses sensations internes.
Seul le client peut fournir ce
type d’information.
Données objectives :
Données observées ou mesu­
rées par la personne qui effec­
tue la collecte d’information et
l’examen physique.
Dans plusieurs milieux de soins, le client remplit un questionnaire de santé par écrit. Cette façon
de procéder lui permet de prendre le temps de rééchir aux questions posées et de se rappeler certains
aspects importants liés à sa santé et à ses antécédents familiaux. L’entrevue avec l’inrmière permet
ensuite de valider les données déjà inscrites et de
recueillir plus de données sur son style de vie et
sur ses problèmes actuels de santé.
Bien que les questionnaires diffèrent d’un milieu
à l’autre, la plupart des histoires de santé contiennent
des renseignements classés en catégories semblables
et présentés selon la séquence qui suit.
1. Informations sociodémographiques
2. Raisons de la consultation
3. Histoire du problème de santé actuel
4. Antécédents personnels, médicaux et chirurgicaux
FIGURE 4.1
L’inrmière rédige l’histoire de santé du client.
5. Antécédents familiaux
6. Revue des systèmes
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
71
L’histoire de santé présentée dans les sections
suivantes est conçue selon ce modèle et présente
une base de données générique pour tous les professionnels de la santé. Ceux qui pratiquent en
soins de santé primaires peuvent l’utiliser au complet ; les professionnels en milieu hospitalier pourront surtout mettre l’accent sur l’histoire du
problème de santé actuel ainsi que sur le bilan
fonctionnel ou le mode de vie de la personne et de
sa famille.
4.1.1
Note à l’inrmière
Avant de procéder à
l’histoire de santé, l’inrmière s’assure d’écrire
la date et l’heure de
l’entrevue.
Les points à considérer au moment de la rédaction des notes
d’évolution de l’inrmière sont
détaillés dans le tableau 10.2
de l’ouvrage de Potter, P.A.,
et Perry, A.G. (2010). Soins inr­
miers – Fondements généraux
(3e éd.). Montréal : Chenelière
Éducation.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Moisan, comment allezvous commencer la rédaction de la note au dossier
à partir des données dont
vous disposez actuellement ?
Informations
sociodémographiques
Les données sociodémographiques comprennent
le nom, l’adresse et le numéro de téléphone ; l’âge
et la date de naissance ; le lieu de naissance, le sexe,
l’état matrimonial et l’origine ethnique ; l’emploi
habituel et présent (une maladie ou un handicap
peut avoir provoqué un changement d’emploi ou
de métier) ; les langages utilisés et les besoins liés
à la communication de même que le nom de la
personne mandatée pour traduire les propos, au
besoin.
1. Inscrire le nom de la personne qui fournit l’information (habituellement, il s’agit de la personne elle-même, quoique la source d’information
puisse aussi être un parent ou un ami).
2. Estimer le degré de abilité de la personne
qui fournit l’information et sa motivation à la
communiquer. Une personne « able » est celle
qui s’en tient à une seule version et qui donne
les mêmes réponses quand l’interlocuteur
paraphrase les questions ou les répète plus tard
durant l’entrevue.
3. Noter les éléments qui sortent de l’ordinaire,
comme l’utilisation d’un interprète. Par
exemple : Entrevue effectuée avec la cliente
en présence de son conjoint, tient des propos
cohérents.
4.1.2
Raisons de la consultation
Cette partie de l’histoire de santé est constituée
d’un bref énoncé qui reprend les mots utilisés par
la personne pour décrire la raison de la visite.
L’inrmière inscrit alors ce que la personne lui dit
pour indiquer la raison qui sous-tend la demande
de soins, et cette raison peut apparaître entre guillemets, sous forme de synthèse, pour résumer les
propos de la personne à son sujet.
• « Douleurs à la poitrine depuis trois heures.»
• « Examen physique annuel pour le travail.»
• « Évaluation de santé avant le début d’un programme d’entraînement.»
La raison donnée pour la demande de consultation ne donne pas lieu à un constat d’évaluation.
Il est donc important d’éviter de la traduire en
termes médicaux. Par exemple, un client se
72
Partie 1
Évaluation globale de la personne
présente avec de la dyspnée, et l’inrmière se
demande si elle doit écrire « emphysème ». Même
si elle est au courant que ce client fait de l’emphysème parce qu’elle l’a déjà vu, l’inrmière sait aussi
qu’il ne vient pas en consultation à cause de cette
affection, mais bien parce qu’il y a « exacerbation
de son état respiratoire lié à l’emphysème » depuis
quelques heures.
Certaines personnes ont tendance à s’autodiagnostiquer à l’aide d’Internet ou en se basant sur
les signes et les symptômes rapportés par leurs
parents ou amis. Plutôt que d’écrire les mots d’une
cliente qui afrme avoir une « angine à streptocoque », il est préférable de lui demander quels sont
les symptômes qui lui font penser à cette maladie
et de les inscrire.
Il peut aussi arriver qu’une personne évoque
plusieurs raisons pour la consultation. Le motif
le plus important n’est pas nécessairement celui
qu’elle a nommé en premier. L’inrmière tente alors
de se centrer sur le problème qui a amené la personne à consulter à ce moment précis.
4.1.3
Histoire du problème
de santé actuel
Pour une personne en bonne santé, il suft d’écrire
un énoncé bref sur l’état de sa santé en général.
Pour une personne atteinte d’une maladie, il
convient d’écrire, dans l’ordre chronologique, la
raison de demande d’une consultation depuis l’apparition du premier symptôme jusqu’au moment
de la visite. L’inrmière procède donc à une évaluation ciblée des signes et symptômes. Il est préférable de traiter séparément chaque motif de soin
décrit par la personne et de demander, par exemple :
Pourriez-vous s’il vous plaît me décrire votre mal
de tête depuis le moment où il a commencé jusqu’à
ce que vous veniez au centre hospitalier ? Si ce problème dure depuis quelques mois ou quelques
années, il est préférable d’inscrire ce qui s’est passé
durant cette période et de préciser ce qui a conduit
la personne à consulter maintenant.
Il est important d’éviter de sauter aux conclusions lorsque la personne parle ou encore de déformer son histoire en donnant une opinion. Il faut
d’abord recueillir toutes les données FIGURE 4.2.
L’idéal est que la personne puisse raconter son histoire, sans se faire interrompre par l’inrmière.
Cette dernière résumera les symptômes énumérés
par la personne en incluant nécessairement les six
caractéristiques suivantes.
P
Provoquer/pallier/aggraver
Qu’est-ce qui provoque ou fait augmenter la douleur ? Est-elle aggravée par le climat, l’activité, la
nourriture, les médicaments, la position debout et
penchée, la fatigue, le moment de la journée, la
saison ou autres ? Qu’est-ce qui atténue la douleur
R
Région/irradiation
La précision est importante. L’infirmière peut
demander à la personne de montrer où se situe le
problème avec son doigt. S’il y a de la douleur, elle
note la région précise. « Douleur à la tête » est
une formulation vague, tandis que des descriptions
telles que « douleur derrière les yeux (rétrooculaire) », « douleur à la mâchoire » et « douleur à la
région occipitale » sont plus précises et plus signicatives pour un constat d’évaluation. L’inrmière
demande au client : À quel endroit est-ce douloureux ? La douleur est-elle limitée à ce site ou irradiet-elle ? Est-elle supercielle ou profonde ?
S
FIGURE 4.2
L’inrmière résume les symptômes énumérés par
la personne.
(p. ex., le repos, les médicaments ou l’application
d’un sac de glace) ? Comment les traitements
agissent-ils ? L’inrmière peut demander à la personne : Qu’avez-vous essayé jusqu’à présent pour
vous soulager ? Qu’est-ce qui semble vous aider
le plus ?
Q
Qualité
À quoi ce symptôme ressemble-t-il ? Que ressentez-vous ? Une description précise en utilisant des
termes tels que « sensation de brûlure », « aiguë »,
« amortie », « tenaillante », « qui élance », « lancinante », « comme un étau » est nécessaire.
L’inrmière utilise des comparaisons, par exemple :
le sang dans les selles ressemble-t-il à du goudron
collant ? Le sang dans les vomissements ressemblet-il à des grains de café ?
Quantité
L’inrmière vise à quantier un signe ou un symptôme, par exemple, « ot menstruel abondant souillant cinq serviettes en une heure ». Le symptôme
de la douleur est difcile à quantier en raison de
l’interprétation individuelle de cette douleur. Ce
qu’une personne peut évoquer comme une « douleur terrible » sera décrite par une autre comme
étant « pas trop mal ». Quand il s’agit de douleur, il
est préférable d’éviter les adjectifs et de demander
plutôt comment la douleur nuit aux activités de la
vie quotidienne (AVQ). La personne peut alors
répondre « j’étais tellement malade, j’étais pliée en
deux et je ne pouvais pas bouger » ou encore « j’ai
été capable d’aller au travail, mais je suis revenue
à la maison et je me suis couchée ». L’inrmière
peut demander à la personne : Comment décririez-vous l’intensité de ce symptôme sur une
échelle de 0 à 10 ?
Symptômes et signes associés/sévérité
Le symptôme primaire est-il associé à d’autres
symptômes, par exemple à la fréquence urinaire
ou à une sensation de brûlure associée à de la
èvre et à des frissons ? L’inrmière examine surle-champ le système corporel lié à ce symptôme
au lieu d’attendre de faire la revue complète des
systèmes.
T
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Moisan, comment qualiet-elle sa douleur ? Quel est
son impact sur ses AVQ ?
4
Une méthode mnémotechnique
peut s’avérer utile pour se rappeler la séquence des questions
et tous les points à explorer au
moment où l’inrmière évalue
le symptôme que présente son
client. Elle se base sur les
lettres suivantes : P Q R S T U.
Temps/durée
Quand le symptôme est-il apparu pour la première
fois ? L’inrmière note la date et le moment précis
de l’apparition du symptôme ou indique depuis
combien de temps dure la manifestation de ce
symptôme. « La douleur a commencé hier » peut ne
pas être aussi pertinent lorsque l’inrmière relira
le dossier ultérieurement. Le rapport doit inclure
des questions telles que : Pendant combien de
temps avez-vous ressenti ce symptôme (durée) ? ;
Était-ce une douleur constante ou une douleur qui
venait et qui disparaissait (intermittente) ?
U (Understanding) Compréhension
et signication pour le client
L’inrmière cherche à découvrir la signication que
la personne attribue à un symptôme en lui demandant
comment ce dernier inue sur ses activités quotidiennes. Elle peut demander directement : Que
pensez-vous que ce symptôme signie ? Cela est
essentiel parce que la réponse à cette question lui
indiquera si la personne perçoit ce symptôme comme
catastrophique et si elle devient ou pourrait devenir
anxieuse.
4.1.4
Antécédents personnels,
médicaux et chirurgicaux
Les situations de santé vécues dans le passé peuvent
avoir des effets résiduels sur l’état de santé actuel.
De la même façon, les expériences antérieures de
maladie peuvent fournir de bons indices quant à la
façon dont la personne réagit à la maladie et à la
signication qu’elle accorde à cette dernière. Il faut
noter tous ces éléments. Ce sont des indices qui
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
73
permettent d’envisager la façon dont le client réagit
à la maladie et d’orienter l’inrmière quant à l’état
de santé de celui-ci. Ces renseignements fournissent
à l’inrmière une évaluation détaillée lui permettant également de déterminer le degré de priorité
du patient en situation d’urgence. Ils peuvent
être recueillis à l’aide de l’outil mnémotechnique
AMPLE (Ordre des inrmières et inrmiers du
Québec [OIIQ], 2007) TABLEAU 4.1.
Maladies de l’enfance
Les maladies de l’enfance comprennent la rougeole,
les oreillons, la varicelle, la coqueluche ainsi que
l’angine à streptocoque. L’inrmière évite de noter
« maladies communes de l’enfance » puisque l’une
ou l’autre de ces maladies, pourtant commune
durant l’enfance de cette personne (p. ex., la rougeole), peut fort bien être inhabituelle aujourd’hui.
Elle s’informe plutôt des maladies sérieuses qui
auraient pu laisser des séquelles chez la personne
devenue adulte (p. ex., la èvre rhumatismale, la
scarlatine, la poliomyélite).
Accidents ou blessures
Les accidents d’automobile, les fractures, les plaies
ouvertes, les blessures à la tête (surtout si elles ont
été associées à une perte de conscience) ainsi que
les brûlures.
Questionnaire AMPLE
TABLEAU 4.1
SÉQUENCE AMPLE
QUESTIONS À POSER
A Allergies/réactions
Allergies connues du client (médicamenteuses, alimentaires et environnementales) et réactions occasionnées.
• Avez-vous des allergies connues ?
• Quelle est votre réaction à l’allergène ?
M Médicaments
• Prenez-vous des médicaments sur ordonnance ? Quel est leur nom ? Quelle est leur
dose ? À quelle fréquence les prenez-vous ? Pour quelle raison les prenez-vous ?
Quand avez-vous pris la dernière dose ?
• Consommez-vous de l’alcool ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis
quand en consommez-vous ?
• Fumez-vous ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis quand fumez-vous ?
• Consommez-vous de la caféine (café, thé, boissons énergisantes) ? En quelle quantité ? À quelle fréquence ?
• Consommez-vous de la drogue ? Si oui, laquelle ou lesquelles ?
En quelle quantité ? À quelle fréquence ? Depuis quand en consommez-vous ?
• Avez-vous reçu des vaccins ? Quels vaccins avez-vous reçus (p. ex., contre le
tétanos, l’hépatite, la grippe) ? À quelle date les avez-vous reçus ?
Médicaments déjà pris ou pris actuellement. Il s’agit des médicaments sur ordonnance ou offerts en vente libre, des vitamines et des
suppléments alimentaires (dont les interactions avec les médicaments doivent être connues du client). L’inrmière s’informe également des vaccins reçus et de la consommation de tabac, d’alcool, de
caféine ou de drogues.
P Passé
Principales maladies, blessures, hospitalisations, chirurgies et transfusions
sanguines subies au cours de l’enfance et de la vie adulte. État de santé ou
cause du décès des membres de la famille. Antécédents familiaux.
L (Last meal) Dernier repas
Quantité et qualité des aliments et des liquides ingérés au cours des dernières 24 heures. Évaluation de l’ingestion, de la digestion, de l’absorption et du métabolisme du client. Évaluation des symptômes tels que les
nausées, les gaz intestinaux ou la douleur gastrique. Signes d’allergie ou
d’intolérance alimentaire. Incidence de facteurs psychologiques tels que
la dépression, l’anxiété et le concept de soi sur l’alimentation.
E Événements/environnement
Environnement professionnel et personnel du client (situation de travail, contraintes physiques ou psychologiques associées à l’emploi,
exposition à certains agents polluants ou à des bruits excessifs, etc.)
Aménagement intérieur du domicile (présence de tapis, plantes,
poussière, animaux). Tout facteur de stress, changement à la situation du client, événement stressant au cours des mois précédents.
Source : Adapté de Gordon (2010)
74
Partie 1
Évaluation globale de la personne
• Avez-vous des problèmes de santé connus ?
• Avez-vous déjà été hospitalisé ou opéré ?
• Y a-t-il des problèmes de santé connus dans votre famille ? Quel est votre lien familial avec ces personnes ? Quel est le type de problème ? À quel âge est-il survenu ?
•
•
•
•
Quand avez-vous mangé et bu pour la dernière fois ?
Qu’avez-vous mangé ? Qu’avez-vous bu ?
Prenez-vous des suppléments ?
Suivez-vous une diète ? Pour quelle raison ? Depuis quand ? Avez-vous du mal à
respecter cette diète ?
• Y a-t-il une situation stressante ou qui vous préoccupe en ce moment ?
• Décrivez-moi le milieu où vous habitez (p. ex., à la campagne, en ville, dans une
maison ou en appartement).
• Parlez-moi de votre environnement de travail (p. ex., la présence de poussière, le
bruit, un équipement sécuritaire, le contact avec le public).
Maladies graves ou chroniques
Date du dernier examen
Le diabète, l’HTA, les problèmes cardiaques, l’anémie falciforme, le cancer ou les convulsions.
L’inrmière doit noter la date du dernier examen
physique, dentaire, ophtalmologique, audiométrique, l’électrocardiogramme (ECG) ainsi que les
radiographies (RX).
Hospitalisations
La cause, le nom du centre hospitalier, les traitement reçus, la durée de l’hospitalisation et le nom
du médecin traitant.
4.1.5
Antécédents familiaux
4
Histoire obstétricale
À l’ère de la génomique, une histoire de famille
précise mettra en évidence les maladies et les
conditions pour lesquelles un client peut être à
risque. Une personne qui se sait vulnérable à une
certaine condition pourra obtenir un dépistage,
une surveillance et être amenée à adopter un mode
de vie sain lorsqu’il est possible d’atténuer ces
risques.
Le nombre de grossesses (G), le nombre de naissances d’un fœtus à terme (T), le nombre
d’accouchements prématurés (P), le nombre de
grossesses interrompues (A) et le nombre d’enfants
vivants (V). Par exemple, ces données sont nommées comme suit : G3 ; T2 ; P1 ; A0 ; V3.
La façon la plus fructueuse d’effectuer une histoire de santé complète de la famille consiste à faire
parvenir un questionnaire détaillé à la personne
avant la rencontre. La compilation de l’information
prend du temps, et les renseignements viennent
souvent de plusieurs membres de la famille.
Pour chacune des grossesses menées à terme,
l’inrmière note : 1) le déroulement de la grossesse,
du travail et de l’accouchement ; 2) le sexe, le poids
et l’état de santé de chaque bébé ; 3) la période postpartum. Pour chaque grossesse interrompue, elle
note aussi la durée de celle-ci et précise si la grossesse s’est terminée à la suite d’un avortement spontané ou provoqué.
Ensuite, l’inrmière peut proter de la visite de
santé pour compléter le génogramme et l’écocarte.
Le génogramme est un arbre généalogique graphique qui utilise des symboles pour représenter
le sexe, la relation et l’âge des parents immédiats
d’au moins trois générations, par exemple,
les grands-parents, les parents, les frères et les
sœurs FIGURE 4.3.
Interventions chirurgicales
Les types de chirurgie, le nom du ou des chirurgiens, le nom du centre hospitalier et la façon dont
s’est déroulée la période de convalescence.
Immunisations
Les vaccins reçus : rougeole-oreillons-rubéole
(ROR), poliomyélite, diphtérie-coqueluche-tétanos
(DCT), hépatite A et B, méningite, virus du papillome humain (VPH), inuenza de type b, pneumonie. L’inrmière note la date de la dernière
immunisation contre le tétanos, le dernier test de
la tuberculine (ou test de Mantoux) et le dernier
vaccin contre la grippe.
Le Protocole d’immunisation du Québec 2013
pour la vaccination publié par la Direction des communications du ministère de la Santé et des
Services sociaux (MSSS) contient plusieurs changements (MSSS, 2013). En outre, le vaccin contre
le VPH est maintenant aussi recommandé pour les
enfants et les jeunes hommes âgés de 9 à 26 ans an
de réduire les condylomes.
Le vaccin contre la pneumonie est recommandé
aux personnes de 65 ans et plus et à celles ayant
reçu des soins médicaux pour traiter l’asthme au
cours des 12 derniers mois (Agence de la santé
publique du Canada [ASPC], 2014a).
De même, une dose de vaccin contre le zona est
recommandée aux personnes âgées de 60 ans et
plus chez qui il n’y a pas de contre-indications
(ASPC, 2014a).
L’état de santé des proches parents, tels que le
conjoint et les enfants, est tout aussi important
parce qu’il pourra mettre en lumière le contact prolongé du client avec une maladie transmissible, ou
un risque associé à l’environnement – comme la
fumée de tabac – ou l’effet de la maladie d’un
membre de la famille sur cette personne.
L’écocarte sert à décrire les liens que les membres
de la famille entretiennent avec les organismes extérieurs. Elle permet de visualiser ces liens FIGURE 4.4.
Le génogramme de la famille peut être placé dans
le grand cercle ; les autres cercles représentent les
personnes, les organismes ou les établissements qui
jouent un rôle essentiel dans le contexte de la
famille. La taille des cercles n’a pas d’importance.
Ce qui compte vraiment, ce sont les liens qu’entretiennent les membres de la famille avec le contenu
de ces cercles. Les liens très forts peuvent être
représentés par des lignes multiples ; un lien moins
fort, mais tout aussi positif, par deux lignes. En
revanche, un lien posant des difcultés peut être
représenté par des barres obliques ou par une ligne
brisée. Des èches peuvent aussi indiquer le sens du
lien. Des èches pointant dans les deux sens représentent des liens réciproques.
Q
uestion de suivi
Vous savez que madame
Moisan a cinq enfants ;
quelles sont les autres
questions que vous devrez
lui poser an de compléter
son histoire obstétricale ?
Vous voyez ceci dans
le dossier antérieur de
madame Moisan.
Grav 6
T5
P0
A1
V5
Qu’est-ce que cela signie ?
Q
uestion de suivi
Dans le cas de madame
Moisan, pour quel vaccin
est-il particulièrement
important de connaître
la date de sa dernière
administration ?
Il faut documenter la condition médicale de
chaque parent proche, mais aussi les autres données importantes sur la santé, comme l’âge et la
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
75
FIGURE 4.3
Génogramme
76
Partie 1
Évaluation globale de la personne
4
FIGURE 4.4
Écocarte
cause de la mort d’un parent proche, la grossesse
de jumeaux, l’usage du tabac et l’utilisation excessive d’alcool. Selon l’examen qu’elle fait des données de l’histoire familiale, l’inrmière peut poser
des questions plus précises pour relever une
cardiopathie coronarienne, de l’hypertension artérielle (HTA), un accident vasculaire cérébral, du diabète, de l’obésité, une hémopathie,
un cancer du sein ou des ovaires, un cancer
du côlon, une drépanocytose, de l’arthrite, des
allergies, la consommation d’alcool ou la toxicomanie, un trouble mental, un risque de suicide,
un trouble épileptique, une néphropathie et la
tuberculose.
Dessin du génogramme
Pour dessiner le génogramme, il faut :
• dresser une liste de tous les membres de la
famille ;
• utiliser l’exemple de l’arbre généalogique comme
un guide pour dessiner le propre génogramme ;
• écrire en haut de la feuille, le nom et la date à
laquelle est dessiné le génogramme ;
• remplacer les mots « père », « mère », etc., par les
noms des membres de la famille ;
• si possible, placer de gauche à droite sur la
feuille les frères et les soeurs ainsi que les frères
et les soeurs des parents, des plus âgés aux plus
jeunes ;
• si l’âge ou la date de naissance des personnes est
inconnue, en faire l’estimation, par exemple en
indiquant « cinquantaine » ou « n soixantaine »
FIGURE 4.3.
Particularités culturelles et génétiques
Il est parfois nécessaire de poser plusieurs autres
questions pour compléter l’histoire de santé lorsque
la personne examinée a immigré récemment.
Données sociodémographiques
Quand la personne est-elle entrée au Canada et de
quel pays provenait-elle ? Si la personne est réfugiée, quelles étaient les conditions prévalant dans
son pays au moment de son émigration ? A-t-elle
été torturée ? D’autres questions peuvent s’ajouter
selon le contexte.
Drépanocytose : Maladie
non contagieuse, génétique,
héréditaire, atteignant les
globules rouges (hématies) du
sang, qui présentent une forme
de croissant ou de faucille.
Adulte vieillissant
L’adulte vieillissant pourrait être une personne arrivée au pays après la Seconde Guerre mondiale, et
il pourrait même être un survivant de l’Holocauste.
Les questions portant sur la famille et le passé
peuvent évoquer des souvenirs douloureux ; elles
exigent beaucoup de délicatesse et de prudence.
Ressources spirituelles/religion
Il peut être important de préciser si certaines interventions ne devraient pas être planiées telles
qu’une transfusion sanguine chez un témoin de
Jéhovah.
Antécédents de santé
Il faut connaître les immunisations que la personne
a reçues dans son pays d’origine, par exemple le
bacille de Calmette-Guérin (BCG) ; plusieurs pays
utilisent ce vaccin pour prévenir la tuberculose.
L’ASPC (2012) indique que la plupart des provinces
ont abandonné le BCG obligatoire chez les
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
77
nouveau-nés, sauf dans quelques communautés
autochtones où la tuberculose est encore endémique. Si la personne a reçu le BCG, elle aura une
réaction positive à la tuberculine, et d’autres examens paracliniques seront nécessaires, dont un test
de crachat et une radiographie pulmonaire.
Perception de la santé
Comment la personne décrit-elle la santé et la maladie ? Comment perçoit-elle le problème dont elle
fait actuellement l’expérience ?
Alimentation
Quels sont les aliments interdits à cette personne ?
Y a-t-il des aliments qu’elle ne devrait jamais
consommer simultanément ?
4.1.6
Revue des systèmes
Cette section présente la démarche de revue des
systèmes, qui a pour but : 1) d’évaluer l’état de santé
antérieur et actuel de chacun des systèmes de la
personne ; 2) de revérier si des données concernant le problème de santé actuel ont été omises
dans l’histoire de santé ; 3) d’évaluer les habitudes
de promotion de la santé de la personne.
L’ordre selon lequel l’inrmière procède à l’examen du client doit être de la tête aux pieds. Les
éléments notés pour chacun des systèmes ne sont
pas exhaustifs, et la liste ne couvre que les symptômes les plus communs FIGURE 4.5.
Il n’est pas nécessaire de répéter ici toutes les
données déjà recueillies au sujet du problème de
santé actuel. Par exemple, si la raison de la consultation est un mal d’oreilles et que l’histoire de santé
portant sur le problème actuel décrit déjà la plupart
des symptômes propres à l’ouïe, l’inrmière n’aura
alors qu’à procéder à un examen ciblé en deman-
dant les détails qui n’ont pas déjà été couverts
jusqu’à ce moment.
La liste qui suit propose certains termes utilisés
par les professionnels de la santé ; ils devront être
adaptés pour que la personne qui consulte les comprenne. (Seuls les symptômes et les activités de
promotion de la santé sont énumérés ici. Chacun
des chapitres portant sur l’examen physique
reprend ces termes et les précise tout en suggérant
et en justiant des façons appropriées de questionner la personne.)
Lorsqu’elle consigne l’information, l’inrmière
évite d’écrire « négatif » (ou Ø) à la suite de l’en-tête
portant le nom du système qui fait l’objet de l’examen. Elle note plutôt la présence ou l’absence de
chacun des symptômes pour éviter qu’un autre
lecteur (en l’occurrence un autre professionnel
de la santé) ne sache pas à quel facteur l’inrmière
fait référence. Une autre erreur commune aux inrmières nouvellement diplômées consiste à noter
des signes physiques et objectifs tels que « peau
chaude et sèche ». L’inrmière doit se rappeler que
l’histoire de santé se limite aux énoncés de la personne subissant l’examen et, par conséquent,
qu’elle est restreinte à des données subjectives,
c’est-à-dire à des facteurs présents ou absents, selon
les réponses de la personne.
État de santé global
Poids actuel (gain ou perte de poids, période de
temps, à la suite d’un régime ou en raison d’autres
facteurs), fatigue, faiblesse ou malaise, èvre, frissons, transpiration, sueurs nocturnes.
Peau, cheveux et ongles
Histoire des problèmes de peau (eczéma, psoriasis,
urticaire), changements dans la pigmentation ou la
couleur, variation de l’aspect d’un grain de beauté
(nævus), sécheresse ou humidité excessive, prurit,
hématome, irritation ou lésion.
Perte récente de cheveux, changement dans la
texture des cheveux. Changements dans la forme
ou la couleur des ongles. Les ongles sont-ils devenus plus cassants ?
Promotion de la santé
Fréquence et durée de l’exposition au soleil, utilisation d’un écran solaire, méthode de soins personnels pour les ongles et les cheveux.
Tête
La personne se plaint-elle de céphalées fréquentes
ou intenses ? Histoire de blessures à la tête, d’étourdissements (syncopes) ou de vertiges.
Cou
FIGURE 4.5
L’inrmière procède à l’examen clinique du client.
78
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Douleur, mouvements limités, présence de masses
ou d’œdème, augmentation ou sensibilité des ganglions, goitre.
Yeux
Fonction respiratoire
La personne se plaint-elle de troubles de la vision
(vision moins précise ou embrouillée, taches
aveugles), de douleur aux yeux, de diplopie (vision
double), de rougeur ou d’œdème, de sécheresse ?
A-t-elle les yeux larmoyants ou purulents, présentet-elle un glaucome ou une cataracte ?
Antécédents de problèmes pulmonaires (asthme,
emphysème, bronchite, pneumonie, tuberculose),
douleur thoracique à l’inspiration, sifement ou
respiration bruyante, dyspnée, degré d’activité qui
provoque la dyspnée, toux, expectorations (couleur
et quantité), hémoptysie, exposition aux toxines ou
à la pollution.
Promotion de la santé
La personne porte-t-elle des lunettes ou des verres
de contact ? À quand remonte le dernier examen de
la vision ou le test pour le glaucome ? De quelle fa
çon cette personne compose-t-elle avec la perte de
sa vision, le cas échéant ?
Oreilles
Maux d’oreilles, infections, écoulement et ses
caractéristiques, acouphènes, vertiges.
Promotion de la santé
Perte de l’ouïe, utilisation d’un appareil auditif :
comment la perte de l’ouïe touche-t-elle la personne
dans sa vie quotidienne ? Est-elle exposée à un environnement bruyant ? Quelle méthode emploie-t-elle
pour se nettoyer les oreilles ?
Nez et sinus
Écoulement et ses caractéristiques, rhumes fréquents ou importants, douleur sinusale, obstruction
nasale, épistaxis (saignements de nez), allergies,
rhume des foins, changements dans l’odorat.
Bouche et gorge
Douleur buccale, maux de gorge fréquents, saignement des gencives, maux de dents, lésions dans la
bouche ou sur la langue, dysphagie, voix rauque ou
changement dans la voix, amygdalectomie, altération du goût.
Promotion de la santé
Soins dentaires quotidiens, utilisation de prothèses dentaires (dentiers ou ponts), dernier examen dentaire.
Seins
Douleur, présence de masses, écoulement des
mamelons, rougeur, antécédents de maladies des
seins, chirurgie du sein.
Aisselles
Sensibilité, présence de masses ou d’œdème,
irritation.
Promotion de la santé
La cliente procède-t-elle à l’autoexamen de ses
seins, à quelle fréquence et par quelle méthode ?
A-t-elle besoin d’enseignement pour le faire adéquatement ? Date de la dernière mammographie.
4
Promotion de la santé
Date de la dernière radiographie pulmonaire,
besoin d’enseignement sur le tabagisme.
Cœur et vaisseaux du cou (fonction
cardiovasculaire)
Douleur précordiale ou rétrosternale, dyspnée à
l’effort (spécier le type d’effort, par exemple monter un escalier, faire quelques pas ou simplement
parler), orthopnée, dyspnée nocturne paroxystique,
nycturie, œdème, antécédents de soufe cardiaque,
HTA, troubles coronariens, anémie.
Promotion de la santé
Date du dernier ECG ou d’autres épreuves cardiaques dont le cholestérol. La personne a-t-elle
besoin d’enseignement sur l’alimentation, l’exercice, la façon de se détendre ?
Système vasculaire périphérique
Froideur, engourdissements et picotements, œdème
des jambes (période de la journée, activité), décoloration des mains ou des pieds (rouge bleuâtre,
pâles, marbrés) liée à la position (spécialement
autour des pieds et des chevilles), varices ou complications, claudication intermittente, thrombophlébite, ulcères.
Promotion de la santé
Le travail de la personne exige-t-il qu’elle demeure
assise ou debout durant de longues périodes ? Port
de bas élastiques de soutien. Évite-t-elle de croiser
les jambes à la hauteur des genoux ? Exercices pour
faciliter la circulation, port de bonnes chaussures
de marche.
Abdomen (fonction gastro-intestinale)
Appétit, intolérances alimentaires, dysphagie,
brûlements d’estomac, indigestion, douleur (associée à l’ingestion d’aliments), autres douleurs
abdominales, pyrosis (sensation de brûlure à
l’œsophage et à l’estomac avec éructation aigre),
nausées, vomissements (description), présence de
sang dans les vomissements, antécédents
de troubles abdominaux (ulcères, troubles du foie
ou de la vésicule biliaire, ictère, appendicite,
colite), atulence, fréquence des selles et changements récents, caractéristiques des selles, constipation ou diarrhée, selles noirâtres, saignement
rectal, autres conditions liées au rectum (hémorroïdes, stule).
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
79
Promotion de la santé
Utilisation d’antiacides ou de laxatifs (explorer
aussi les habitudes alimentaires, les incidences de
régimes et l’utilisation d’autres produits).
Système musculosquelettique
Antécédents d’arthrite ou de goutte. Articulations :
la personne se plaint-elle de douleurs, de raideurs,
d’œdème (location, migration, difformité, mouvements limités, craquements pendant les mouvements) ? Muscles : la personne se plaint-elle de
douleurs, de crampes, de faiblesse, de problèmes
de posture ou de coordination ? Dos : la personne
se plaint-elle de douleurs (endroit et irradiation
possible aux extrémités), de raideurs, de mouvements limités, d’antécédents de maux de dos ou
d’un problème de vertèbres ?
Promotion de la santé
Quelle distance ou pendant combien de temps la
personne marche-t-elle quotidiennement ? Quel est
l’effet d’une mobilité réduite sur les AVQ telles que
procéder à ses soins d’hygiène, se nourrir, aller à la
toilette, s’habiller ? La personne utilise-t-elle des
appareils pour l’aider à se déplacer ?
Système neurologique
Antécédents de troubles convulsifs, accidents
vasculaires cérébraux ou cardiaques, pertes de
conscience ou faiblesses. Fonction motrice : faiblesse, tics ou tremblements, paralysie ou problèmes de coordination. Fonction sensorielle :
engourdissement et fourmillement paresthésie).
Fonction cognitive : troubles de mémoire de travail
(ou mémoire récente) ou à long terme, désorientation. État mental : nervosité, changements dans
l’humeur, dépression, antécédents de problèmes de
santé mentale ou d’hallucinations.
Promotion de la santé
Données au sujet des relations interpersonnelles,
des façons habituelles de composer avec les situations (mécanismes d’adaptation). Le client a-t-il
besoin d’accompagnement ou d’enseignement ?
Système génital de l’homme
Douleur pénienne ou testiculaire, plaies ou lésions,
écoulement, masse, hernie.
Polyurie : Sécrétion d’urine
en quantité abondante, entraî­
nant un volume urinaire supé­
rieur à 2 500 mL par jour.
Polydipsie : Soif excessive
avec augmentation de l’ab­
sorption de liquide liée à la
polyurie.
Polyphagie : Sensation de
faim exagérée entraînant un
appétit démesuré.
80
Partie 1
Promotion de la santé
Le client est-il capable de procéder à l’autoexamen
de ses testicules ? Si oui, à quelle fréquence le faitil ? Sinon, a-t-il besoin d’enseignement ?
Système génital de la femme
Histoire menstruelle, âge au moment des premières menstruations (ménarche), date des dernières menstruations, cycle et durée, aménorrhée
ou ménorragie, douleur prémenstruelle ou dysménorrhée, saignements entre les menstruations,
Évaluation globale de la personne
prurit vaginal, écoulement vaginal et ses caractéristiques, âge à la ménopause, signes et symptômes de la ménopause, saignements après la
ménopause.
Promotion de la santé
Dernier examen gynécologique et dernier test de
Papanicolaou. La cliente a-t-elle besoin d’enseignement ou d’accompagnement durant une grossesse ?
Est-elle renseignée sur la ménopause ?
Système urinaire
Fréquence, urgence, nycturie (nombre de fois que
la personne doit se lever pour uriner la nuit, changements récents), dysurie, polyurie, oligurie, hésitation ou effort, force ou faiblesse du débit d’urine,
couleur de l’urine (embrouillée ou présence d’hématurie), incontinence, antécédents de troubles
urinaires (maladies rénales, lithiase rénale, infections de l’appareil urinaire, problèmes de prostate),
douleur au anc, à l’aine, à la région suprapubienne
ou douleur à la région lombaire.
Promotion de la santé
Mesures prises pour éviter ou traiter les infections
de l’appareil urinaire, pratique des exercices de
Kegel après un accouchement.
Santé sexuelle
La personne vit-elle actuellement une relation
intime incluant des relations sexuelles ? Cette personne est-elle satisfaite des divers aspects de l’expression de sa sexualité ? Y a-t-il présence de
dyspareunie (douleur due aux rapports sexuels
chez la femme), de changements dans l’érection
ou l’éjaculation ? Y a-t-il utilisation d’une méthode
contraceptive ? Cette méthode est-elle satisfaisante ? La personne sait-elle si elle a pu être en
contact avec un ou une partenaire atteint d’une
infection transmissible sexuellement et par le
sang (ITSS) (gonorrhée, herpès, chlamydia, condylome acuminé ou verrue génitale, VIH, SIDA,
syphilis) ?
Fonction hématologique
Tendance de la peau et des muqueuses à saigner,
tendance excessive à faire des hématomes, gonement des nodules lymphatiques, exposition à des
agents toxiques ou à des radiations, transfusions
sanguines et réactions.
Fonction endocrinienne
Antécédents de diabète ou de symptômes diabétiques (polyurie, polydipsie, polyphagie), histoire
de troubles de la glande thyroïde, intolérance à la
chaleur et au froid, changements dans la pigmentation ou la texture de la peau, diaphorèse excessive, lien entre l’appétit et le poids, distribution
anormale des cheveux, nervosité, tremblements et
besoin d’une thérapie hormonale.
4.1.7
Évaluation fonctionnelle
L’évaluation fonctionnelle mesure la capacité de
la personne à prendre soin d’elle-même dans un
contexte de santé physique ou d’absence de maladie. Cela inclut les activités de la vie quotidienne
(AVQ) et les activités de la vie domestique (AVD).
L’évaluation fonctionnelle peut signier d’organiser toute l’évaluation selon les modes de fonctionnement tels qu’enseignés par Gordon (2010).
Les outils d’évaluation qui mettent l’accent sur les
catégories fonctionnelles peuvent aboutir à un
constat d’évaluation.
L’évaluation fonctionnelle peut aussi inclure
l’utilisation d’un instrument standardisé d’évaluation fonctionnelle qui s’ajoute à l’histoire de santé.
Un tel instrument mesure objectivement la capacité
actuelle de la personne et montre les changements
qui surviennent avec le temps
30 . Que l’inrmière utilise ou non ces outils, il lui faut tout de
même inclure, dans l’histoire de santé, des questions semblables à celles présentées dans ce qui suit
ou inspirées des éléments énumérés. Ces questions
fournissent des données sur le style de vie de la
personne et sur le genre d’environnement dans
lequel elle est habituée à vivre. Puisque certaines
de ces données peuvent sembler strictement privées, il est important de prendre d’abord le temps
d’établir un bon rapport avec la personne. Voilà
pourquoi ces questions se trouvent plutôt vers la
n de l’entrevue.
Sommeil/repos
Les habitudes de sommeil, les siestes durant la journée, l’utilisation de somnifères, de produits offerts
en vente libre ou de produits naturels.
Alimentation/élimination
L’inrmière prend note de tout ce que la personne
peut lui dire au sujet de la nourriture et des boissons qu’elle a consommées durant les 24 dernières
heures
11 . L’infirmière peut demander au
client : Est-ce là un menu typique de la plupart de
vos journées ? Elle décrit les habitudes alimentaires
et l’appétit du client. L’inrmière demande aussi :
Qui achète et prépare la nourriture ? Votre revenu
vous permet-il d’acheter la nourriture que vous
voulez ? Qui mange à table avec vous ? Elle indique
aussi les allergies ou les intolérances alimentaires
et s’informe de l’ingestion quotidienne de caféine
(café, thé, cola) du client.
L’inrmière s’informe de la routine d’élimination
urinaire et fécale du client en incluant l’incontinence
et l’utilisation de laxatifs, les problèmes possibles
de mobilité ou de transfert sur le siège de toilette.
Relations interpersonnelles/ressources
Le niveau d’instruction (dernière année d’études
complétée et autre formation), la situation nancière (revenu sufsant pour maintenir le style
de vie et satisfaire les besoins en matière de
santé), le système de valeurs et de croyances
(la pratique religieuse et la perception des forces
personnelles).
Les rôles sociaux : Comment décririez-vous votre
rôle dans la famille ? Comment vous entendez-vous
avec les membres de votre famille, vos amis et vos
collègues de travail ? L’inrmière demande au client
de lui décrire son système de soutien dans sa
famille et avec ses proches : Vers qui iriez-vous si
vous aviez besoin de soutien pour affronter des
difcultés au travail, un problème de santé ou un
problème personnel ? Elle explore aussi la qualité
des contacts que la personne entretient avec son
conjoint, ses parents, ses enfants, ses amis, les organisations locales ou le milieu de travail : Le temps
que vous passez seul est-il agréable et propice à la
détente ou est-ce, au contraire, un moment où vous
vous sentez isolé ?
Activités/exercice
Ressources spirituelles
L’inrmière établit un prol du client qui reète
ses activités quotidiennes habituelles. Elle peut
lui demander : Décrivez-moi comment se déroule
une journée ordinaire. Elle note le degré d’habileté avec lequel la personne effectue ses AVQ :
indépendance ou besoin d’aide pour manger,
pour prendre un bain, pour procéder aux soins
d’hygiène, pour s’habiller, aller à la toilette, pour
le transfert du lit à une chaise, pour marcher, se
tenir debout ou monter un escalier. La personne
utilise-t-elle un fauteuil roulant, des prothèses
ou des appareils pour se déplacer ? L’inrmière
inscrit aussi les loisirs que la personne apprécie
et son mode d’exercice (genre, quantité par jour
ou par semaine, méthode de réchauffement,
méthode de surveillance de la réponse corporelle
à l’exercice).
Dans un milieu traditionnel de soins, plusieurs personnes croient qu’il existe une relation entre la spiritualité et la santé, et elles peuvent désirer parler de
questions spirituelles. L’inrmière utilise des questions portant sur la foi, l’inuence, la communauté
et l’abord (FICA) pour intégrer les valeurs spirituelles
de la personne dans son histoire de santé (Post,
Puchalski, Larson et collab., 2000). La foi : Quel rôle
joue la foi religieuse ou la spiritualité dans votre vie ?
Vous considérez-vous comme une personne religieuse ou dotée d’une spiritualité ? L’inuence :
Comment la foi ou la spiritualité inue-t-elle sur la
façon dont vous considérez votre santé ou la manière
dont vous prenez soin de vous-même ? La communauté : Faites-vous partie d’un groupe religieux,
d’une communauté spirituelle ou d’une congrégation ? L’abord : Aimeriez-vous que nous abordions
Estime de soi/concept de soi
Chapitre 4
Activités de la vie
quotidienne (AVQ) :
Activités actuellement
accomplies au cours d’une
journée pour satisfaire les
besoins fondamentaux (se
déplacer, manger, s’habiller,
procéder aux soins d’hygiène,
éliminer).
Activités de la vie
domestique (AVD) :
Activités associées à l’exer­
cice des rôles sociaux et à la
réalisation de tâches comme
faire l’épicerie, le ménage, la
cuisine, etc. L’inrmière doit
s’assurer que le client peut
assumer ces rôles ou qu’il
obtient le soutien de son
entourage.
11
Le questionnaire de rappel
des 24 heures est présenté
dans le chapitre 11, Évaluation nutritionnelle.
30
L’évaluation fonctionnelle
de la personne âgée est
décrite dans le chapitre 30,
portant le même nom.
Regard global sur l’histoire de santé
81
4
ensemble des questions spirituelles ou des préoccupations que vous pourriez avoir à ce sujet ?
Adaptation au stress/gestion du stress
L’inrmière s’enquiert des stresseurs dans la vie de
la personne, surtout durant la dernière année,
des changements dans son style de vie ou des facteurs actuels de stress. Elle note également les
méthodes employées pour soulager le stress et l’efcacité de celles-ci.
Habitudes personnelles
Tabac
L’inrmière note les habitudes de tabagisme passées
ou présentes de la personne : Fumez-vous la cigarette, la pipe ou utilisez-vous du tabac à chiquer ?
À quel âge avez-vous commencé à fumer ? Combien
de cigarettes fumez-vous par jour ? Elle demande
ensuite : Avez-vous déjà essayé d’arrêter de fumer ?
Comment cela s’est-il passé ? Le but est de proposer,
s’il y a lieu, un plan de cessation du tabagisme.
Alcool
6
Le questionnaire AUDIT
(Alcohol Use Disorders
Identication Test) pour le
dépistage d’une consom ­
mation abusive d’alcool est
présenté dans le chapitre 6,
Évaluation de la consom­
mation de substances.
6
Les quatre questions liées
au questionnaire CAGE sont
abordées dans le chapitre 6,
Évaluation de la consom­
mation de substances.
Des outils de dépistage permettant d’évaluer la dépendance à l’alcool, aux drogues,
aux médicaments et au jeu
sont proposés sur le site Internet www.toxquebec.com. Le
test ADS (Alcohol Dependence
Scale) élaboré par le Centre for
Addiction and Mental Health
y est notamment accessible.
82
Partie 1
Les professionnels de la santé oublient souvent de
vérier la consommation d’alcool à moins qu’un
problème ne soit évident. L’alcool interagit toutefois
d’une manière nuisible avec les médicaments ; il
engendre plusieurs problèmes sociaux tels que les
agressions, les viols, les conduites sexuelles à
risque élevé et les sévices envers les enfants.
L’alcool pris en grande quantité contribue d’une
façon importante aux accidents mortels de la route
et est l’une des deux principales causes d’accidents
au Québec (Société de l’assurance automobile du
Québec [SAAQ], 2014).
L’inrmière se doit d’être assez alerte pour détecter l’usage problématique de l’alcool. Elle demande
d’abord à la personne si celle-ci consomme de l’alcool. Si la réponse est positive, elle posera alors des
questions précises sur la quantité et la fréquence
de la consommation d’alcool : À quand remonte
votre dernier verre ? Quelle quantité d’alcool avezvous consommée cette fois-là ? Combien y a-t-il de
jours où vous avez consommé de l’alcool durant
le dernier mois ? Avez-vous déjà eu un problème de
consommation d’alcool
6 ?
Enn, l’inrmière peut également avoir recours
au questionnaire CAGE (Cutdown, Annoyed, Guilty,
Eye-opener) (Ewing, 1984), bien connu dans les
milieux de prévention et de traitement des toxicomanies
6 .
Drogues illicites ou drogues de rue
L’inrmière pose aussi des questions précises sur la
consommation de drogues incluant la marijuana,
la cocaïne, le crack, les amphétamines et les barbituriques. Elle note la fréquence de l’utilisation de
ces drogues et la façon dont leur usage a inué sur
le travail de la personne et sur sa famille.
Évaluation globale de la personne
Environnement/risques
Le logement et le voisinage (vivre seul, connaître
les voisins), la sécurité du quartier, la qualité du
chauffage et des autres services (eau, électricité,
téléphone), l’accès aux transports en commun et
l’engagement dans les services communautaires.
L’inrmière note les facteurs de santé liés à l’environnement en incluant les risques associés au
milieu de travail et à la maison ; l’utilisation d’une
ceinture de sécurité dans un véhicule ; l’exposition
à des risques associés au lieu géographique ou à
l’emploi, les voyages ou les périodes de résidence
à l’étranger, incluant celles exigées par le service
militaire, s’il y a lieu.
Violence conjugale et familiale
L’inrmière devrait amorcer cette partie par des
questions ouvertes telles que : Comment cela se
passe-t-il à la maison ? Vous sentez-vous en sécurité
chez vous ? Les réponses à ces questions sont précieuses pour dépister la violence parce que certaines personnes peuvent très bien ne pas réaliser
qu’on abuse d’elles ou peuvent hésiter à se coner
à cause de la culpabilité qu’elles ressentent, de la
peur, de la honte ou parce qu’elles en sont encore
à l’étape du déni. Si la personne avoue se sentir
menacée, il est bon de poursuivre l’histoire avec
quelques questions fermées : Avez-vous déjà été
maltraitée ou violentée, physiquement ou psychologiquement, par votre partenaire ou par une personne proche de vous ? Vous est-il arrivé, durant
la dernière année, d’être frappée, giée, poussée,
bousculée, de recevoir un coup de pied ou d’être
blessée par votre conjoint ou un ex-partenaire ? Si
oui : Par qui ? Combien de fois ? Votre partenaire
vous impose-t-il parfois d’avoir une relation
sexuelle que vous ne désirez pas ? Avez-vous peur
de votre partenaire ou de votre ex-partenaire ?
Santé au travail
L’inrmière demande au client de décrire son
emploi. A-t-il déjà travaillé dans un milieu où il
était exposé à des contaminants tels que l’amiante,
à des inhalations de gaz, à des produits chimiques
ou a-t-il occupé un emploi où il devait constamment répéter les mêmes gestes ? Porte-t-il un équipement protecteur ? Existe-t-il, dans son milieu, des
programmes de surveillance des risques pour la
santé ? Le client est-il conscient des problèmes de
santé et de sécurité au travail ?
L’inrmière note le moment de la demande de
consultation et précise si cette dernière est liée au
travail ou à la maison, aux responsabilités inhérentes à l’emploi ou au fait d’être exposé ou d’avoir
été exposé à des contaminants. Elle recueille aussi
de l’information sur les habitudes de tabagisme qui
peuvent contribuer aux risques associés au travail.
Elle demande nalement au client ce qu’il aime ou
n’aime pas dans son travail.
4.1.8
Perception de la santé
Pour connaître la perception que le client a de sa
santé, l’inrmière lui pose des questions telles que :
Comment dénissez-vous la santé ? Comment percevez-vous votre situation actuelle de santé ? Quelles
sont vos préoccupations à cet égard ? Comment envisagez-vous l’avenir quant à votre santé ? Quels sont
vos objectifs de santé ? Qu’attendez-vous des inrmières, des médecins ou d’autres professionnels de
la santé ?
Particularités liées au développement
Enfants
L’histoire de santé d’un enfant doit être adaptée de
façon à y inclure les renseignements propres à son
âge et à l’étape de son développement (p. ex., la
santé de la mère pendant la grossesse, le travail,
l’accouchement et la période postnatale). L’histoire
du développement de l’enfant et les données portant sur l’alimentation sont traitées séparément à
cause de leur importance pour la situation actuelle
de santé.
Données sociodémographiques
L’inrmière doit indiquer le nom de l’enfant, le
prénom et le surnom, son adresse et son numéro
de téléphone, les noms des parents, leur numéro de
téléphone au travail, l’âge de l’enfant et sa date
de naissance, l’endroit de sa naissance, son sexe,
son origine ethnique de même que toute information pertinente sur les autres enfants ou les
membres de la famille qui vivent dans la même
maison. Elle inscrit également les sources de l’histoire de santé et certains éléments associés :
• la personne qui fournit les renseignements et sa
relation avec l’enfant ;
• ses impressions quant à la abilité de l’information fournie ;
• les circonstances entourant la collecte des données, par exemple l’utilisation d’un interprète.
Raisons de la consultation
L’inrmière prend note de ce que les parents lui
disent spontanément. Comme ceux-ci consultent
régulièrement lorsque les enfants sont en bonne
santé, par exemple pour un examen de routine,
l’inrmière entend plus souvent des raisons comme
celles-ci : « C’est le temps de son examen de routine. » « C’est le temps de ses vaccins. » Les raisons
de consulter pour un problème de santé chez un
enfant peuvent être fournies par celui-ci, par ses
parents ou par une autre personne, comme un
enseignant ou un travailleur social.
Les raisons énoncées peuvent parfois différer des
motifs réels de la consultation. Un parent peut avoir
des intentions inavouées, par exemple une mère
qui amène sa lle de quatre ans parce qu’elle « a
l’air pâle ». Quelques questions pertinentes font vite
ressortir que la mère a récemment renoué avec une
de ses anciennes amies dont la lle de quatre ans
vient de recevoir un diagnostic de leucémie.
Histoire du problème de santé actuel
Si le parent ou l’enfant consulte pour des soins de
routine, l’inrmière prend en considération l’état
de santé habituel de l’enfant, tout en notant les problèmes courants et les inquiétudes majeures que
son état pourrait soulever. Elle décrit tous les symptômes et les signes, comme elle le ferait pour un
adulte. Voici toutefois quelques considérations
additionnelles.
4
Intensité de la douleur L’inrmière demande aux
parents : Comment savez-vous que votre enfant
ressent de la douleur ? (Par exemple, l’enfant qui
tire sur ses lobes d’oreille alerte ses parents quant à
la possibilité d’une affection aux oreilles.)
L’inrmière prend note des effets de la douleur sur
les comportements habituels de l’enfant (p. ex., s’il
a cessé de jouer).
• Facteurs associés. Activité, alimentation ou position du corps.
• Intuition. Un parent peut deviner un problème.
En assurant une présence constante auprès de
l’enfant, le parent a souvent des intuitions qui
se révèlent très justes. Même si le contraire peut
aussi se produire, ce facteur permet de reconnaître les préoccupations du parent.
• Capacité des parents. L’inrmière évalue comment les parents ou les autres membres de la
famille réagissent aux symptômes manifestés par
l’enfant ou à sa maladie.
Antécédents personnels, médicaux
et chirurgicaux
L’inrmière commence cette partie de l’entrevue
avec une question ouverte : « Parlez-moi de votre
grossesse. » Si la mère hésite à répondre, l’inrmière peut lui préciser que ces questions sont
importantes parce qu’elles lui permettent de mieux
évaluer la santé de l’enfant.
Histoire prénatale Période de gestation et déroulement de la grossesse. Était-elle planiée ? Quelle
était l’attitude de la mère quant à cette grossesse ?
Quelle était l’attitude du père ? La mère était-elle
sous surveillance médicale ? À quel mois de grossesse la mère a-t-elle commencé à consulter ? Quel
était l’état de santé de la mère pendant la grossesse ? A-t-elle vécu des complications au cours
de cette période (saignements, nausées excessives
et vomissements, gain de poids inhabituel, HTA,
œdème des mains et des pieds, infections – rubéole
ou ITSS – chutes) ? À quel mois de grossesse la
mère a-t-elle reçu une prescription pour une diète
ou une ordonnance de médicaments et quand at-elle commencé à prendre des médicaments
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
83
(posologie et durée) ? L’inrmière note également
si la mère consommait de l’alcool, des drogues de
rue ou du tabac de même que toute radiographie
subie durant la grossesse.
Travail/accouchement Nombre de naissances antérieures, durée de chaque grossesse, nom du centre
hospitalier, déroulement et durée du travail, utilisation d’anesthésie, type d’accouchement (tête,
siège, césarienne), poids à la naissance, score
APGAR, première respiration, présence de cyanose,
besoin de réanimation et utilisation d’équipement
ou de procédures spéciales, s’il y a lieu.
Histoire postnatale Problèmes à la pouponnière,
durée du séjour au centre hospitalier, jaunisse néonatale, congé pour le bébé (en même temps que
celui de la mère ?). Le bébé était-il nourri au sein
ou au biberon ? Gain de poids, problèmes d’alimentation, coliques, diarrhée, habitudes de pleurs et de
sommeil, santé postnatale de la mère, réaction de la
mère envers son nourrisson ou présence de dépression postnatale.
Maladies de l’enfance Âge de l’enfant au moment de
la maladie et complications possibles de la rougeole, des oreillons, de la rubéole, de la varicelle,
de la coqueluche, de l’angine à streptocoque et des
otites fréquentes. L’enfant a-t-il récemment été
exposé à une maladie ?
ou à l’entrée à l’école, selon les politiques en
vigueur dans les provinces ou les territoires.
Allergies Médicaments, aliments, allergènes de
contact, éléments de l’environnement auxquels
l’enfant est allergique et sa réaction à l’allergène.
L’inrmière s’informe des réactions allergiques qui
sont particulièrement communes durant l’enfance
telles que les rhinites allergiques, l’hypersensibilité
aux piqûres d’insectes, l’eczéma et l’urticaire.
Médicaments Médicaments prescrits et ceux achetés
en vente libre à la pharmacie (ou vitamines) que
prend l’enfant, incluant la posologie, l’horaire quotidien, la raison pour laquelle l’enfant prend le
médicament et les problèmes associés aux effets
secondaires possibles de celui-ci.
Croissance Taille et poids à la naissance et à 1 an,
2 ans, 5 ans et 10 ans, périodes marquées par un
gain ou une perte rapide de poids et développement
de la dentition (âge des premières dents et perte de
la première dentition) FIGURE 4.6.
Étapes de développement Âge où l’enfant a pu tenir sa
tête droite, se retourner, s’asseoir seul, marcher seul,
a eu sa première dent, a dit ses premiers mots en leur
accordant un sens, a parlé en utilisant des phrases,
a été entraîné à la propreté, a attaché ses souliers,
Accidents graves ou blessures À quel âge ces incidents se sont-ils produits ? Comment l’enfant a-t-il
été traité ? Complications d’accidents d’automobile,
de chutes, de blessures à la tête, de fractures, de
brûlures ou d’empoisonnements.
Maladies chroniques ou graves Âge de l’enfant au
début de la maladie, modes de traitement et complications de la méningite ou de l’encéphalite ; de
troubles convulsifs ; de l’asthme, de la pneumonie
et d’autres problèmes pulmonaires chroniques ; de
la èvre rhumatismale ; de la scarlatine ; du diabète ;
de problèmes rénaux ; d’anémie à hématies falciformes ; d’HTA ; d’allergies.
Interventions chirurgicales ou hospitalisations Raison
pour les soins, âge à l’admission, nom du chirurgien
ou du médecin traitant, nom du centre hospitalier,
durée du séjour, réactions de l’enfant à l’hospitalisation et complications possibles (si l’enfant a mal
réagi, il peut avoir peur et nécessiter une préparation spéciale pour l’examen qui suivra).
Il est possible de consulter le
calendrier de vaccination pour
les nourrissons et les enfants
sur le site Web de l’ASPC à
l’adresse suivante : www.
phac-aspc.gc.ca.
84
Partie 1
Immunisations Âge de l’enfant au moment de l’administration des vaccins, date des vaccins, réactions à la suite des immunisations. À cause des
épidémies, l’ASPC (2014b) recommande de donner
deux doses du vaccin combiné ROR. La première
dose ne doit pas être donnée avant l’âge de 12 mois,
tandis que la deuxième peut être administrée n’importe quand à partir de 1 mois suivant la première
immunisation. La deuxième dose de ce vaccin est
toutefois donnée le plus souvent à l’âge de 18 mois
Évaluation globale de la personne
FIGURE 4.6
Les mesures de la taille et du poids de l’enfant sont comparées à celles des courbes de croissance normalisées.
s’est habillé sans aide. Les parents perçoivent-ils le
développement de l’enfant comme normal ?
De quelle façon le développement de cet enfant se
compare-t-il avec celui des autres enfants de la
famille ou de l’entourage ?
La tenue d’un journal alimentaire durant 7 jours
peut fournir une information plus exacte qu’un
simple rappel de 24 heures. Il faut aussi tenir
compte des pratiques culturelles au moment de
l’évaluation nutritionnelle de l’enfant
11 .
Développement actuel (chez les enfants de un mois jusqu’à
l’âge préscolaire) Motricité grossière (se retourne,
s’assoit seul, marche seul), motricité ne (examine
ses mains, porte ses mains à sa bouche, saisit les
objets ou autres en faisant une pince avec le pouce
et l’index, empile des blocs, se nourrit, utilise un
crayon pour dessiner, utilise des ciseaux), langage
(vocalises, premiers mots empreints de sens,
phrases, persistance du langage de bébé, troubles
de langage) et habiletés d’interactions sociales (sourit, suit les mouvements avec ses yeux, regarde de
côté, tourne sa tête vers les sons, reconnaît son
nom). Si l’enfant est en période d’entraînement à
la propreté, indiquer la méthode utilisée, l’âge
auquel l’enfant a appris à contrôler sa vessie et ses
intestins, l’attitude des parents envers l’entraînement à la propreté et les mots utilisés pour le faire.
Antécédents familiaux
Enfant d’âge scolaire Motricité grossière (court, saute,
grimpe, roule à bicyclette, a des gestes généralement coordonnés), motricité ne (attache ses lacets
de souliers, utilise des ciseaux, écrit des noms et
des chiffres, dessine) et langage (étendue du vocabulaire, habiletés verbales, capacité de dire l’heure
et niveau de lecture).
Histoire nutritionnelle
La quantité d’information requise dépend de l’âge
de l’enfant ; plus il est jeune, plus les données
doivent être précises et spéciques. Pour le nourrisson, l’inrmière demande s’il est alimenté au
sein ou au biberon. Si l’enfant est allaité, elle prend
en note la fréquence des tétées et leur durée, l’ajout
de suppléments (vitamines, fer, uor, préparation de
lait commerciale pour nourrisson), le soutien familial pour l’allaitement ainsi que l’âge et la méthode
du sevrage. Si l’enfant est nourri au biberon, elle
retient la sorte de lait utilisé, la fréquence et la
quantité, la présence de problèmes (régurgitations,
coliques, diarrhée), les suppléments offerts et les
moments où l’enfant est laissé seul avec son biberon. Elle s’informe aussi au sujet de l’introduction
d’aliments solides (âge auquel l’enfant a commencé
à manger, aliments, mode de préparation – maison
ou commerciale –, quantité, réactions de l’enfant
aux nouveaux aliments, réactions des parents aux
moments passés à nourrir l’enfant).
Lorsque l’enfant est d’âge préscolaire ou scolaire,
l’inrmière s’informe de son appétit ; elle s’enquiert
des aliments consommés durant les 24 dernières
heures (repas, collations, quantités) et des vitamines que prend l’enfant, des aliments qu’il aime
ou n’aime pas et de la perception des parents quant
à l’alimentation de l’enfant.
11
Les particularités culturelles
liées à la nutrition sont présentées dans le chapitre 11,
Évaluation nutritionnelle.
Tout comme pour l’adulte, l’inrmière trace un
génogramme de la famille de l’enfant en incluant
la fratrie, les parents et les grands-parents. Elle
indique l’âge et l’état de santé ou l’âge et la cause
de décès de chacun. Elle porte une attention particulière aux antécédents familiaux de problèmes
cardiaques, d’HTA, de diabète, de troubles hématologiques, de cancer, d’anémie falciforme,
d’arthrite, d’allergies, d’obésité, de brose kystique, d’alcoolisme, de troubles mentaux, de
troubles convulsifs, de problèmes rénaux, de retard
mental, de troubles d’apprentissage, de malformations congénitales et de syndrome de mort subite
du nourrisson. (En interrogeant la mère, l’inrmière s’assure d’utiliser l’expression « père de
l’enfant » plutôt que « votre conjoint », au cas où
les parents biologiques de l’enfant seraient
séparés.)
4
Revue des systèmes (enfants et adolescents)
État de santé global Gains ou pertes de poids importants, retard de croissance, rhumes fréquents, otites,
maladies, degré d’énergie, fatigue, hyperactivité et
changements de comportement (irritabilité, augmentation des pleurs, nervosité).
Peau, cheveux et ongles Marques de naissance, maladies de la peau, changement de coloration ou de
pigmentation, peau marbrée, variation de l’aspect
d’un grain de beauté, prurit, urticaire, lésions, acné,
hématomes ou pétéchies, saignements fréquents et
changements dans la texture des cheveux ou des
ongles.
Tête, visage et cou Céphalées, blessures à la tête,
étourdissements. Glandes ou ganglions enés ou
sensibles, mouvements limités du cou ou raideur.
Yeux Strabisme, diplopie, douleur, rougeur, écoulements, cataractes, changements de la vision,
problèmes de lecture. À l’école, l’enfant voit-il clairement au tableau ? Est-il porté à s’asseoir trop près
de la télévision ?
Promotion de la santé : utilisation de lunettes, date
du dernier test d’acuité visuelle.
Oreilles Otalgies, fréquence des infections, myringotomie (insertion de tubes dans les oreilles par
chirurgie), écoulement (caractéristiques), cérumen,
tintements ou craquements et perception par les
parents d’un problème d’audition.
Promotion de la santé : comment les oreilles de l’enfant sont-elles nettoyées ?
Nez et sinus Écoulement et ses caractéristiques, fréquence des rhumes, congestion nasale, saignements
et allergies.
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
85
26
Le chapitre 26, Système
génito-urinaire féminin,
présente des questions
d’évaluation spéciques
permettant de recueillir
l’histoire de santé chez
les enfants, les préadoles­
centes et les adolescentes.
17
Le chapitre 17, Seins et
ganglions lymphatiques
régionaux, présente des
suggestions de questions
à poser sur l’autoexamen
des seins.
Bouche et gorge Histoire de fente labiale ou palatine,
fréquence des infections de la gorge, maux de dents,
caries, plaies de la bouche et de la langue, présence
des amygdales, respiration par la bouche, difcultés
à la mastication, difcultés à avaler, voix rauque ou
changeante.
Promotion de la santé : hygiène dentaire de l’enfant
et date du dernier examen dentaire.
Seins et ganglions lymphatiques régionaux Moment où
la préadolescente ou l’adolescente s’est aperçue que
ses seins subissaient des changements. Comment
l’adolescente se perçoit-elle à ce stade de son développement ? Pratique-t-elle l’autoexamen des seins
17 ?
Thorax et poumons (fonction respiratoire) Croup ou
asthme, respiration sifante ou bruyante, dyspnée,
toux chronique.
Cœur et vaisseaux du cou (fonction cardiovasculaire) Problèmes cardiaques congénitaux, histoire
d’un soufe cardiaque et de cyanose (à quoi cette
condition est-elle associée ?). L’enfant doit-il limiter
ses activités ou peut-il suivre ses pairs ? Existe-t-il
de la dyspnée d’effort, des palpitations, de l’HTA
ou de la froideur aux extrémités ?
Abdomen (fonction gastro-intestinale) Douleurs abdominales, nausées et vomissements, antécédents
d’ulcère, fréquence des selles, couleur et caractéristiques, diarrhée, constipation ou rétention des
selles, saignement rectal et prurit anal, histoire
d’oxyures ou de vers intestinaux et utilisation de
laxatifs.
Système musculosquelettique Articulations : arthrite,
douleur dans les articulations, raideur, œdème,
mouvements limités, force et coordination de la
démarche. Muscles : douleur, spasmes et faiblesse.
Dos : douleur, posture, courbure de la colonne vertébrale, tout traitement reçu.
Système neurologique Engourdissements et picotements. (Les questions de comportement et de cognition ont été traitées dans la section sur le développement, et les relations interpersonnelles
seront discutées dans la section sur l’évaluation
fonctionnelle et les AVQ.)
Système génito-urinaire masculin Douleur au pénis
ou aux testicules, descente des testicules, plaies
ou lésions, écoulement, hernie ou hydrocèle,
œdème du scrotum lorsque l’enfant pleure. Le
préadolescent ou l’adolescent a-t-il remarqué des
changements à son pénis ou à son scrotum ? Est-il
familiarisé avec l’évolution normale de son appareil génital, les émissions nocturnes et l’éducation
sexuelle ? Dépistage de tout signe de sévices
sexuels.
Système génito-urinaire féminin La jeune lle souffret-elle de démangeaisons ou d’urticaire ou a-t-elle
remarqué un écoulement vaginal ? À quel âge les
menstruations ont-elles commencé ? Y était-elle
86
Partie 1
Évaluation globale de la personne
préparée ? Dépistage de tout signe de sévices
sexuels
26 .
Fonction urinaire Dysurie, polyurie/oligurie, jet restreint, couleur de l’urine (brouillée ou foncée), antécédents d’infections de l’appareil urinaire. À quel
âge l’enfant a-t-il été entraîné à la propreté ou quand
cela est-il prévu ? Problème de nycturie (quand cela
a commencé, fréquence, association avec le stress,
réaction de l’enfant à ce sujet).
Santé sexuelle Quelle est l’attitude de l’enfant
envers le sexe opposé ? Qui fait son éducation
sexuelle ? Comment la famille compose-t-elle avec
l’éducation sexuelle, la masturbation, les fréquentations ? L’adolescent est-il engagé dans une relation
incluant des relations sexuelles ? A-t-il reçu de l’information sur la contraception et les ITSS ?
Fonction hématologique Ecchymoses fréquentes,
œdème des ganglions lymphatiques et exposition
à des agents toxiques ou à des radiations.
Fonction endocrinienne Antécédents de diabète ou
de troubles de la glande thyroïde ; polyurie, polydipsie et polyphagie ; distribution pileuse anormale
et puberté précoce ou retardée.
Évaluation fonctionnelle et activités
de la vie quotidienne
Relations interpersonnelles L’inrmière s’informe du
rang de l’enfant à l’intérieur de la famille ; Qui s’occupe prioritairement de l’enfant ? Qui prend
soin de l’enfant si les deux parents travaillent à
l’extérieur de la maison ? Soutien familial ou soutien du voisinage et des amis ; milieu culturel et
ethnique.
L’inrmière souligne le degré de cohésion de la
famille. Les membres de la famille partagent-ils des
activités communes ? Y a-t-il eu un changement
récent ou une crise (décès, divorce, déménagement)
dans la famille ?
Elle note aussi des éléments d’information sur
l’image que l’enfant a de lui-même et sur son degré
d’indépendance. L’enfant utilise-t-il une « doudou »
(couverture de « sécurité ») ou un jouet ? Démontret-il un comportement répétitif (se bercer dans son
lit, se frapper la tête), de pica (absorption compulsive de substances qui ne sont pas des aliments),
suce-t-il son pouce ou se ronge-t-il les ongles ?
Quelle est la méthode de discipline utilisée avec
l’enfant ? Le type de discipline utilisé à la maison
est-il efcace ? Qui s’occupe de discipliner l’enfant ?
L’enfant a-t-il parfois recours au négativisme, à des
crises de colère, au retrait ou manifeste-t-il des comportements agressifs ?
L’inrmière s’enquiert au sujet des amis de l’enfant : se fait-il facilement des amis ? Comment
s’accorde-t-il avec ses amis ? Ses compagnons de
jeu sont-ils du même âge, plus vieux ou plus jeunes
que lui ?
Activité/repos Il est pertinent de noter les activités
de jeu de l’enfant. L’inrmière indique la proportion de jeux actifs et de jeux plus calmes, de jeux à
l’extérieur, du temps passé à regarder la télévision ;
elle note les loisirs ou les activités. Elle tient compte
aussi du sommeil et du repos en indiquant les habitudes de sommeil et le nombre d’heures de sommeil
durant la nuit et durant le jour. L’enfant fait-il des
siestes durant la journée ? Quelle est la routine de
l’enfant au moment d’aller au lit ? L’enfant dort-il
profondément ou, au contraire, s’éveille-t-il facilement ? A-t-il des cauchemars, des moments de
panique durant la nuit ou est-il somnambule ?
Quelle est la réaction des parents ?
Présence à l’école
Demander quelle est la fréquentation scolaire.
Aborder toute expérience avec la garderie en milieu
scolaire ou l’école maternelle. En quelle année l’enfant est-il à l’école ? A-t-il déjà sauté une année ou
échoué ? L’enfant semble-t-il aimer l’école ? Quel
est son rendement scolaire ? Les parents et l’enfant
sont-ils satisfaits du rendement ? L’enfant manquet-il des jours d’école ? Demander une raison de l’absence. (Les réponses à ces questions donnent un
indice important du fonctionnement de l’enfant à
l’extérieur de la maison.)
Situation matérielle L’inrmière recueille de l’information sur les emplois du père et de la mère. Elle
indique le nombre d’heures durant lesquelles
chaque parent est absent de la maison. Quelle est
la perception des parents quant à leur revenu d’emploi ? Comment la maladie peut-elle inuer sur la
situation nancière de la famille ?
Risques associés à l’environnement L’inrmière se renseigne sur la sécurité à la maison : les précautions
prises pour ranger les poisons, les médicaments et
les produits ménagers hors d’atteinte ; la présence
de barrières pour les escaliers et des équipements
sécuritaires dans la cour.
Elle pose aussi des questions sur les installations
du domicile et le milieu de vie (chauffage adéquat,
ventilation, salle de bains) ainsi que sur le type de
quartier (résidentiel ou industriel, sécurité, voisinage, compagnons de jeu disponibles, distance de
l’école, circulation automobile). Le domicile est-il
situé dans un quartier retiré ou congestionné et
TABLEAU 4.2
surpeuplé ? La criminalité est-elle un problème
dans le quartier ? Y a-t-il présence de pollution de
l’air ou l’eau dans l’environnement ? Quelles sont
les mesures de sécurité adoptées pour les déplacements en automobile (siège auto, ceintures de
sécurité) ?
Adaptation au stress/gestion du stress L’enfant est-il
capable de s’adapter aux nouvelles situations ?
Expériences stressantes récentes (décès, divorce,
déménagement, perte d’un ami important).
Comment l’enfant fait-il face au stress ? Les parents
ont-ils noté des changements récents dans le comportement ou l’humeur de l’enfant ? A-t-il déjà été
nécessaire de recourir à un service professionnel
de counseling ?
4
Habitudes de consommation L’enfant a-t-il déjà essayé
de fumer la cigarette ? Quelle quantité a-t-il fumée ?
A-t-il déjà goûté à l’alcool ? Quelle est la quantité d’alcool consommée durant la journée ou la semaine ?
A-t-il déjà consommé d’autres drogues (marijuana,
cocaïne, amphétamines, barbituriques) ?
Promotion de la santé : qui est le principal fournisseur des soins de santé, incluant les soins dentaires ? À quand remonte le dernier examen de santé
et dentaire de l’enfant ? Il est important de noter la
date et le résultat du dernier examen de la vision
et de l’audition, du dernier test d’urine, de phénylcétonurie, d’hématocrite, du test à la tuberculine,
d’anémie falciforme, de plombémie et d’autres tests
spéciques des populations à risque élevé.
Adolescents
Cette section présente un examen psychosocial des
symptômes créé en vue de maximiser la communication avec les jeunes. Il s’agit de la méthode d’entrevue HEEADSSS TABLEAU 4.2. Elle met l’accent sur
l’évaluation du domicile, de l’instruction et de l’emploi, de l’alimentation, des activités avec les pairs,
de l’usage de drogues, de la sexualité, du suicide et de
la dépression ainsi que de la sécurité quant aux blessures et à la violence. Le but de cet outil est de diminuer le stress de l’adolescent en posant d’abord des
questions usuelles et moins menaçantes pour ensuite
aborder des sujets d’ordre plus personnel.
Il est recommandé d’avoir un entretien privé
avec l’adolescent pendant que le parent attend dans
Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents
CATÉGORIE
QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ
QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU
SI LA SITUATION LE REQUIERT
Domicile (Home)
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Où vis-tu ? Quelles sont les personnes qui vivent avec toi ?
Comment sont les relations à la maison ?
À qui peux-tu te coner à la maison ?
Y a-t-il une ou des nouvelles personnes à la maison ?
Y a-t-il eu un ou des départs récemment ?
As-tu déménagé récemment ?
As-tu déjà vécu loin de la maison ? (Si oui, pour quels motifs ?)
As-tu déjà fugué de la maison ? Si oui, pour quelle(s) raison(s) ?
Y a-t-il de la violence physique à la maison ?
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
87
Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents (suite)
TABLEAU 4.2
CATÉGORIE
QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ
QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU
SI LA SITUATION LE REQUIERT
Éducation et emploi
(Education and
employment)
• Parle-moi de l’école.
• Vois-tu ton école comme un endroit sécuritaire ?
(Pourquoi ?)
• As-tu déjà été victime d’intimidation ?
• Quels sont tes liens avec l’école ?
• As-tu l’impression que tu appartiens à ce milieu ?
• À l’école, y a-t-il des adultes avec qui tu pourrais
discuter de ce qui est important pour toi ?
• Qui sont ces personnes ?
• Quels sont tes résultats à l’école ?
• Ces résultats ont-ils changé récemment ?
• Quelle sorte d’études voudrais-tu faire dans l’avenir ?
• Quels sont tes plans et tes objectifs d’emploi ?
• As-tu un emploi en ce moment ? Où ?
• Combien d’heures travailles-tu par semaine ?
• As-tu changé d’école durant les dernières années ?
• Parle-moi de tes amis à l’école.
• Dans le passé, as-tu déjà remarqué un changement important
dans tes résultats scolaires ?
• As-tu déjà eu à reprendre un cours ou une année ?
• As-tu déjà été suspendu de l’école ou renvoyé ?
• As-tu déjà pensé à abandonner tes études ?
• Quelle sorte de relation as-tu avec les autres personnes à
l’école ? Comment sont tes relations au travail ?
• Tes responsabilités ont-elles augmenté au travail ?
• Quelles sont tes matières favorites à l’école ?
• Laquelle aimes-tu le moins ?
Alimentation (Eating)
•
•
•
•
•
• Dis-moi ce que tu aimes et ce que tu n’aimes pas à propos
de ton corps.
• Qu’as-tu fait d’autre pour essayer de gérer ton poids ?
• Combien de temps consacres-tu à l’exercice en moyenne dans
une journée ? Et dans une semaine ?
• En quoi consisterait une alimentation saine d’après toi ?
• Comment cette alimentation se compare-t-elle avec la tienne
actuellement ?
• Que se passerait-il si tu prenais environ 4,5 kg ?
• As-tu l’impression de ne pas pouvoir contrôler ton alimentation ?
• As-tu déjà pris des médicaments pour maigrir ?
Activités (Activities)
• Que faites-vous, tes amis et toi, pour avoir du plaisir ?
(Avec qui, où et quand ?)
• Que faites-vous, ta famille et toi, pour avoir du plaisir ?
(Avec qui, où et quand ?)
• Certains adolescents disent qu’ils passent beaucoup
de leur temps en ligne. À quelles ns utilises-tu
Internet ?
• Combien d’heures par jour passes-tu devant un écran
(ordinateur, télévision, téléphone cellulaire) ?
• Souhaiterais-tu parfois y passer moins de temps ?
• Participes-tu à des sports d’équipe ou à d’autres activités ?
• Fais-tu partie d’un groupe de jeunes dans ta communauté,
dans un club ou dans d’autres activités organisées ?
• Combien d’heures passes-tu devant la télévision durant
une semaine ?
• T’est-il déjà arrivé de transmettre des photos ou des messages
texte que tu as ensuite regretté d’avoir envoyés ?
• Combien d’heures par semaine passes-tu à regarder de la
pornographie (ou des images et vidéos à caractère sexuel)
sur Internet ?
• T’arrive-t-il de lire uniquement par plaisir ? Quelle sorte de lecture
préfères-tu ?
• Joues-tu à des jeux vidéo ? Quel type de jeu aimes-tu ?
• Quelle sorte de musique préfères-tu ?
Drogues (Drugs)
• Dans ta famille, est-ce que quelqu’un fume, prend
de l’alcool ou consomme des drogues ?
• Quel usage fais-tu du tabac, de la cigarette électronique, de l’alcool ou des drogues ?
• Prends-tu des boissons énergisantes, des
stéroïdes ou des médicaments (avec ou sans
ordonnance) ?
• Y a-t-il déjà eu des problèmes d’alcool ou de drogues dans
ta famille ?
• T’arrive-t-il de boire de l’alcool ou de consommer de la drogue
quand tu es seul ?
(L’inrmière évalue la fréquence, l’intensité et les habitudes
d’utilisation ou d’abus et comment l’adolescent obtient la
drogue, l’alcool ou le tabac et en paye les coûts.)
88
Partie 1
Es-tu inquiet au sujet de ton poids ?
As-tu remarqué un changement récent dans ton poids ?
As-tu suivi un régime durant la dernière année ?
Quelle sorte de régime était-ce ?
Combien de fois ou pendant combien de temps
l’as-tu suivi ?
Évaluation globale de la personne
TABLEAU 4.2
Examen psychosocial HEEADSSS pour les adolescents (suite)
CATÉGORIE
QUESTIONS À POSER EN PRIORITÉ
QUESTIONS À DEMANDER SI LE TEMPS LE PERMET OU
SI LA SITUATION LE REQUIERT
Sexualité (Sexuality)
• As-tu déjà vécu une relation amoureuse ? Parle-moi
des personnes avec qui tu es sorti.
• Certaines des relations que tu as vécues ont-elles
inclus des relations sexuelles ?
• Es-tu attiré par quelqu’un en ce moment ?
• Parle-moi de ta vie sexuelle.
• Qui t’intéresse le plus, les garçons, les lles ou les
personnes des deux sexes ?
• Tes relations sexuelles sont-elles agréables ?
• Que signie pour toi le terme « relations sexuelles protégées » ?
• T’es-tu déjà senti obligé ou contraint d’accomplir des actes
sexuels que tu ne voulais pas faire ?
• Est-ce qu’on t’a déjà touché sexuellement d’une manière dont tu
ne voulais pas ?
• As-tu déjà été violé à l’occasion d’un rendez-vous ou en d’autres
circonstances ?
• Combien de partenaires sexuels as-tu eus ?
• (Fille) As-tu déjà été enceinte ou inquiète de l’être ?
• (Garçon) Une lle a-t-elle déjà été enceinte de toi ou as-tu déjà
été inquiet que cela ait pu se produire ?
• Qu’utilisez-vous comme méthode contraceptive ?
• Cette méthode est-elle satisfaisante ?
• Utilises-tu un condom chaque fois que tu as une relation sexuelle ?
• T’arrive-t-il parfois de ne pas pouvoir utiliser un condom ?
• As-tu déjà été atteint d’une ITSS ou as-tu déjà été inquiet d’être
atteint d’une ITSS ?
Suicide et dépression
(Suicide and
depression)
• T’arrive-t-il d’être triste ou plus abattu que
d’habitude ?
• T’arrive-t-il de pleurer plus que d’habitude ?
• T’arrive-t-il de trouver que tout est monotone
ou ennuyeux tout le temps ?
• As-tu de la difculté à t’endormir quand tu
te couches ?
• As-tu déjà pensé à te faire du mal ou à en faire
à quelqu’un d’autre ?
• Est-il déjà arrivé que quelqu’un se moque de toi
sur Internet ?
• Est-il déjà arrivé que tu te sentes triste en utilisant des réseaux
sociaux tels que Facebook ?
• As-tu l’impression d’avoir perdu tout intérêt pour ce que tu aimais
auparavant ?
• As-tu l’impression de passer de moins en moins de temps avec
tes amis ?
• Préfères-tu être seul la plupart du temps ?
• As-tu déjà fait une tentative de suicide ?
• T’est-il déjà arrivé de te blesser volontairement (en te coupant,
par exemple) pour te calmer ou te sentir mieux ?
• As-tu commencé à consommer de l’alcool ou des drogues pour
t’aider à te détendre, à te calmer ou à te sentir mieux ?
Sécurité (Safety)
• As-tu déjà été blessé sérieusement ? (Comment ?)
• Des personnes que tu connais ont-elles déjà été
blessées sérieusement ?
• Attaches-tu toujours ta ceinture de sécurité en auto ?
• As-tu déjà rencontré (ou planié une rencontre) avec une
personne que tu as connue sur Internet pour la première fois ?
• À quand remonte la dernière fois où tu as envoyé un
message texte en conduisant ?
• As-tu déjà voyagé en auto avec un conducteur ivre ou
drogué ? Quand ? Combien de fois ?
• Y a-t-il de la violence à la maison ? Cette violence
devient-elle physique parfois ?
• Y a-t-il de la violence à l’école ? Y en a-t-il dans le
voisinage ou dans ton groupe d’amis ?
• As-tu déjà été victime de violence physique ou de
sévices sexuels ? As-tu déjà été violé, à l’occasion
d’un rendez-vous ou en d’autres circonstances ? (Si
cette question n’a pas déjà été posée.)
• Utilises-tu un équipement de protection pour pratiquer des sports
ou d’autres activités physiques, par exemple un casque pour le
vélo ou la planche à roulettes ?
• As-tu déjà été impliqué dans un accident d’automobile ou de
motocyclette ? (Qu’est-il arrivé ?)
• As-tu déjà été harcelé ou battu ?
• Est-ce encore un problème ?
• T’es-tu déjà battu à l’école ou dans ton voisinage ?
• T’arrive-t-il encore de te battre ?
• As-tu déjà eu l’impression qu’il te fallait posséder un couteau, un
fusil ou une autre arme pour te protéger ? Est-ce encore le cas ?
• As-tu déjà été incarcéré ?
4
Source : Adapté de Klein, Goldering et Adelman (2014). Adapté et reproduit avec la permission de Contemporary Pediatrics, janvier 2014, p. 16-28. Contemporary Pediatrics est une publication de
Advanstar Communications Inc. protégée par un droit d’auteur. Tous droits réservés.
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
89
une autre pièce et qu’il remplit le questionnaire sur
l’histoire de santé. Une mise à jour de la dernière
version de l’outil HEEADSSS, effectuée en 2014,
comporte certaines modications ; des questions
portant sur l’utilisation des nouveaux médias ont
été ajoutées surtout dans le contexte de l’utilisation
massive d’Internet, des médias sociaux et du téléphone cellulaire par les adolescents. De plus, cette
mise à jour met l’accent sur une approche centrée
sur les forces de l’adolescent an de favoriser le
rapport inrmière-adolescent (Goldenring et Rosen,
2004).
L’inrmière met l’accent sur les forces de l’adolescent, car elles sont directement liées à sa capacité
d’adaptation et à une image positive de soi
(Ginsburg, 2007).
Adultes vieillissants
Cette histoire de santé suit le même modèle que celui
décrit pour l’adulte plus jeune et comprend quelques
questions additionnelles. Celles-ci portent sur la
manière dont le vieillissement normal, les atteintes
chroniques à la santé ou un handicap inuent sur
les AVQ de la personne. Il n’y a pas vraiment d’âge
précis pour poser ces questions. L’inrmière les pose
lorsqu’elles lui semblent appropriées.
Tonométrie : Mesure de la
pression oculaire permettant
de détecter un glaucome.
Il est important de savoir reconnaître toutes les
mesures positives que prend la personne pour
maintenir ou promouvoir sa santé et vivre plus
longtemps. Les personnes âgées ont connu une
façon plus traditionnelle d’envisager la santé,
davantage axée sur la recherche de la pathologie et
sur les problèmes de santé évidents. La personne
pourrait être agréablement surprise et encouragée
de se faire conrmer que ses actions pour maintenir
sa santé sont pertinentes et reconnues.
Dans cette section, seules les questions additionnelles propres aux personnes âgées ou celles liées
à des préoccupations les concernant sont indiquées.
L’histoire de santé applicable à l’adulte plus jeune
reste toutefois valable dans sa globalité.
Raisons de la consultation
Il sera peut-être nécessaire de prendre un peu plus
de temps pour comprendre les motifs qui ont
amené la personne âgée à consulter. Un adulte vieillissant peut croire qu’un symptôme fait tout simplement partie du processus d’avancée en âge et
ne pas être certaine qu’il vaille la peine d’être
mentionné. Il faut aussi souligner que certaines
personnes âgées ont une philosophie plutôt
« conservatrice » vis-à-vis de leur état de santé :
« N’essaie pas de réparer ce qui n’est pas brisé. »
Ces personnes ne rechercheront des soins que pour
les problèmes les plus évidents.
Une personne âgée peut éprouver plusieurs problèmes chroniques tels que le diabète, l’HTA ou la
constipation. Être capable de découvrir ce qui la
motive à consulter peut représenter un défi.
90
Partie 1
Évaluation globale de la personne
L’inrmière devra indiquer la raison pour laquelle
la personne consulte et non une hypothèse relative
au problème réel.
Antécédents personnels, médicaux
et chirurgicaux
Santé générale État de santé durant les cinq dernières années.
• Accidents et blessures, maladies graves ou chroniques, hospitalisations, chirurgies. Les questions peuvent donner lieu à des réponses plutôt
longues, et il est fort possible que la personne ne
réponde pas selon un ordre chronologique. De
préférence, l’inrmière laisse la personne s’exprimer librement ; elle remet les événements en
ordre plus tard lorsqu’elle inscrit les notes au
dossier. La quantité de données fournies par la
personne peut indiquer l’importance du stress
ou des stresseurs avec lesquels elle a dû composer durant sa vie. Cette partie de l’histoire de
santé peut être préparée à la maison ou avant
l’entretien si la personne est en mesure de lire
et d’écrire adéquatement. L’inrmière pourra
ensuite consacrer la rencontre à revoir les données pertinentes et à explorer l’état de santé
actuel de la personne.
• Dernier examen. À quand remonte la dernière
mammographie, coloscopie ou tonométrie?
L’Association canadienne du cancer colorectal
(ACCC) recommande que tous les Canadiens
(hommes et femmes) âgés de 50 ans ou plus se soumettent au moins tous les 2 ans à une recherche de
sang occulte dans les selles ou à un test immunochimique de recherche de sang occulte dans les
selles (ACCC, s.d.). En cas de résultat positif, il faut
toujours faire une coloscopie an de déterminer la
cause du saignement.
Les personnes qui présentent plus de risques
d’avoir un cancer colorectal devraient en parler à
leur médecin an de commencer plus tôt le dépistage et de passer des tests plus fréquemment ; le
médecin peut alors déterminer la méthode de
dépistage qui convient le mieux dans leur cas.
• Histoire obstétricale. Il n’est pas nécessaire de
recueillir des données sur chaque grossesse et
accouchement si la femme est postménopausée et ne présente aucun symptôme gynécologique. L’inrmière prend simplement note du
nombre de grossesses et de la santé de chacun
des nouveau-nés.
• Médicaments actuels. Pour chacun des médicaments, l’inrmière inscrit le nom, le but et
la posologie. La personne a-t-elle établi un système qui lui permet de se souvenir de prendre
ses médicaments ? Les médicaments semblentils être efcaces ? Quels sont leurs effets secondaires ? Si les médicaments entraînent des
effets secondaires, la personne évite-t-elle de
les prendre à cause de ces effets ? Il est important de considérer aussi les éléments suivants.
– Certaines personnes âgées prennent une
grande quantité de médicaments prescrits par
différents médecins.
– La personne peut ignorer le nom d’un médicament ou le but de ce dernier. Lorsque cela
se produit, l’inrmière lui demande d’apporter ses médicaments pour qu’elle puisse les
identier.
– Le coût des médicaments cause-t-il un problème ? Si elle éprouve des difcultés à payer
le coût d’un médicament, la personne peut
décider d’en diminuer la dose, de prendre un
comprimé au lieu des deux prescrits ou de ne
pas faire renouveler son ordonnance en temps
voulu.
– La personne âgée a-t-elle de la difculté à
se rendre à la pharmacie pour obtenir des
médicaments ?
– La personne prend-elle des médicaments
offerts en vente libre ? Certaines personnes
utilisent la pharmacie du voisinage pour s’automédicamenter.
– La personne a-t-elle déjà partagé ses médicaments avec des voisins ou des amis ? Certaines
personnes établissent un réseau informel « de
consultation » en comparant leurs symptômes
et leurs médicaments.
Antécédents familiaux
Cette histoire est moins pertinente lorsqu’il s’agit de
prédire les maladies familiales que la personne pourrait contracter, la plupart de celles-ci étant déjà survenues lorsqu’elle était plus jeune. Ces données
demeurent toutefois utiles pour connaître les maladies
ou les causes de décès de ses parents. Elles servent
aussi à décrire le réseau social de la personne.
Revue des systèmes
Il est bon ici de rappeler que les éléments qui
suivent s’ajoutent au questionnaire de santé utilisé
pour l’adulte plus jeune, qui fournit la liste des
questions de base.
État de santé global Poids actuel de la personne et
poids qu’elle souhaite conserver (donne un aperçu
de l’image corporelle).
Peau La personne a-t-elle noté un changement dans
sa manière de ressentir la douleur, la chaleur ou
le froid ?
Yeux La personne porte-t-elle des lunettes à doubles
foyers, a-t-elle de la difculté à voir de loin (problème avec les escaliers) ?
Oreilles La personne est-elle plus sensible aux
bruits de l’environnement ? Perçoit-elle clairement
les conversations ou celles-ci sont-elles confuses ?
Bouche La personne a-t-elle des prothèses dentaires ? Quand les porte-t-elle (toujours, toute la
journée, seulement pour les repas, seulement en
public ou jamais) ? Comment les nettoie-t-elle ? Les
prothèses créent-elles des difcultés (mauvais ajustement, douleur, bruit sifant ou claquant, ssures
aux coins de la bouche) ?
Thorax et poumons (fonction respiratoire) Dyspnée et
degré d’activité provoquant la dyspnée. La dyspnée
est souvent un signe de dysfonctionnement cardiaque, mais plusieurs personnes âgées en attribuent la cause à un simple rhume ou croient
« manquer de soufe » à cause de leur âge.
4
Cœur et vaisseau du cou (fonction cardiovasculaire) Si
elle présente des douleurs thoraciques, la personne
peut ne pas les ressentir aussi intensément qu’un
adulte plus jeune. La personne âgée ressentira plutôt de la dyspnée d’effort.
Système vasculaire périphérique Port de vêtements
serrés, de jarretières ou de bas roulés au genou. Y
a-t-il un changement de coloration aux pieds ou
aux chevilles ?
Système génito-urinaire Rétention urinaire, vidange
incomplète de la vessie, effort à la miction, changement dans la force du jet. Les hommes peuvent
ressentir le besoin de se tenir plus près des toilettes
si le jet d’urine faiblit. Les femmes peuvent se
plaindre d’incontinence lorsqu’elles toussent, rient
ou éternuent.
Santé sexuelle L’inrmière demande si la personne
a noté des changements dans ses relations sexuelles.
Elle tient compte que, pour les hommes, il est normal que l’érection se produise plus lentement. Chez
les femmes, il peut y avoir de la sécheresse vaginale
et de la douleur à la pénétration. L’infirmière
explore aussi les aspects des relations sexuelles qui
sont satisfaisants et demande si la personne a sufsamment d’intimité pour se permettre d’avoir des
relations sexuelles.
Système musculosquelettique Changement dans la
posture (équilibre, faiblesse, difculté à marcher,
peur de tomber), utilisation d’appareils de locomotion : canne, quadripode réglable, déambulateur.
Les articulations sont-elles raides ? À quel moment
de la journée cette raideur apparaît-elle ? La douleur
ou la raideur survient-elle durant une période d’activité ou au repos ?
Système neurologique Troubles de la mémoire de
travail ou à long terme), désorientation (dans le
temps et dans l’espace).
Évaluation fonctionnelle et activités
de la vie quotidienne
L’évaluation fonctionnelle mesure la façon dont
une personne gère ses AVQ. Pour les personnes
âgées, la santé se mesure d’abord dans la capacité
ou non d’accomplir les activités habituelles. Dans
la population âgée, l’impact de la maladie sur les
AVQ et sur la qualité de vie (appelé fardeau de
la maladie) est plus important encore que le
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
91
diagnostic ou la pathologie elle-même. Il va sans
dire que l’évaluation fonctionnelle – puisqu’elle
met l’accent sur le fonctionnement de la personne –
occupe une place très importante dans celle des
personnes âgées.
30
Des outils d'évaluation
sont présentés dans le
chapitre 30, Évaluation
fonctionnelle de la
personne âgée.
Il existe plusieurs outils d’évaluation fonctionnelle qui peuvent mesurer objectivement le fonctionnement actuel d’une personne et en détecter
les changements dans le temps
30 . La plupart
de ces outils mesurent la performance dans l’accomplissement de tâches précises telles que les
AVQ et les AVD. L’évaluation complète de la personne âgée est particulièrement utile parce qu’elle
permet d’apprécier les AVQ et les AVD de base et
les préoccupations physiques, sociales, psychologiques, démographiques, nancières et légales
qu'elle pourrait avoir TABLEAU 4.3.
Que l’inrmière utilise ou non un outil standardisé, les questions d’évaluation fonctionnelle qui
suivent ajoutent à l’histoire de santé de la personne
âgée de façon importante.
Estime de soi/concept de soi Les personnes âgées
n’ont pas eu accès à toutes les possibilités de s’instruire qui sont offertes aujourd’hui aux jeunes, et
cela est encore plus vrai dans le cas des femmes. Il
se peut qu'elle se sente diminuée parce qu’elle n’a
pu dépasser le niveau d’études primaires ou parce
qu’elle a très peu fréquenté l’école.
Occupations Les emplois antérieurs, les activités de
bénévolat et communautaires. Plusieurs personnes
continuent à travailler après avoir atteint l’âge de
65 ans ; elles ont évolué avec un sens très prononcé
de l’éthique du travail et elles sont ères de continuer à travailler. Si la personne est retraitée, comment s’est-elle adaptée à ce changement de statut ?
La retraite peut entraîner la perte d’un rôle ou d’un
statut social, de relations interpersonnelles créées
au travail et celle d’un revenu.
Activités/exercice Comment la personne vit-elle
une journée sur les plans du travail, des loisirs et
du repos ? Cette routine change-t-elle certaines
journées, par exemple le dimanche lorsque sa
famille lui rend visite ? La personne atteinte d’une
maladie chronique ou d’une décience physique
peut afcher un manque de soins personnels, présenter des changements musculosquelettiques tels
que l’arthrite ou encore de la confusion. Il est indiqué de dresser une liste des moments de détente,
des activités de loisirs, de sport ou communautaires de la personne. La personne âgée a-t-elle
accès à un centre où elle peut prendre des repas,
proter d’un réseau social et être évaluée au point
de vue de sa santé ? Quelle sorte d’exercices la
personne fait-elle (intensité, durée, fréquence) ?
Sommeil/repos Le mode habituel de sommeil : la
personne se sent-elle reposée durant le jour ? At-elle sufsamment d’énergie pour accomplir ses
activités quotidiennes ? Doit-elle faire des siestes ?
92
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Se réveille-t-elle durant la nuit au point que cela
lui cause un problème (nycturie, dyspnée, sommeil
léger, insomnie, difculté à s’endormir, réveil très
tôt le matin) ? Si elle n’a pas établi de routine dans
sa journée, est-elle portée à dormir tout l’aprèsmidi ? L’insomnie devient-elle plus prononcée
quand elle n’a pas d’horaire journalier ?
Alimentation/élimination L’inrmière encourage la
personne âgée à se remémorer ce qu’elle a mangé
au cours des 24 dernières heures et prend en note
ce rappel. La réponse est-elle représentative de
l’alimentation habituelle (elle peut varier considérablement d’une journée à l’autre) ? Elle
demande à la personne de tenir un journal hebdomadaire et de l’apporter à une prochaine consultation. À quoi ressemblent les repas ? La personne
prend-elle trois repas consistants ou plutôt cinq
ou six petits repas par jour ? Combien de plats préparés et de nourriture molle la personne
consomme-t-elle ? Qui prépare les repas ? La personne est-elle seule pour manger ? Qui fait le marché ? Qui transporte les emplettes à la maison ? La
personne a-t-elle suffisamment d’argent pour
payer le marché ? Un problème quelconque
empêche-t-il la personne de préparer les repas
(vision, motricité ou énergie) ? Les appareils électroménagers, l’eau et les services (mazout, gaz ou
électricité) sont-ils adéquats pour la préparation
des repas ? La personne a-t-elle des difcultés à
mastiquer les aliments ou à les avaler ? Quelles
sont ses préférences alimentaires (les personnes
âgées mangent souvent une plus grande quantité
de féculents parce que ces aliments coûtent moins
cher, qu’ils sont plus faciles à préparer et qu’ils se
mastiquent plus facilement) ?
Relations interpersonnelles/ressources Qui d’autre vit
à la maison avec la personne âgée ? Vit-elle seule ?
Est-ce satisfaisant pour elle ? Vit-elle avec un
membre de la famille tel qu’un conjoint, des enfants,
un frère ou une sœur ? Cet arrangement est-il satisfaisant pour elle ? La personne a-t-elle un animal de
compagnie ? Sa famille et ses amis habitent-ils près
d’elle ? À quelle fréquence les voit-elle ? Si les visites
ne sont pas fréquentes, la personne âgée perçoit-elle
cela comme une perte ? Quel rôle joue la famille
dans la préparation des repas, l’entretien ménager
et d’autres activités ? Sur qui la personne âgée peutelle compter pour un soutien affectif et pour de
l’aide lorsque survient un problème ? Avec qui peutelle combler son besoin d’affection ? Existe-t-il des
conits ? Des gestes ou une absence de geste dans
les relations de conance lui causent-ils du tort ou
de la détresse ? La personne est-elle victime d’un
manque intentionnel de soins ou d’une administration abusive ou insufsante de médicaments ? Estelle victime de violence verbale comprenant des
injures, du chantage ou des paroles dégradantes ? Il
est important que l’inrmière soit attentive aux
risques d’abus envers la personne âgée.
TABLEAU 4.3
Évaluation complète de la personne âgée
Nom : (en caractères d’imprimerie) _________________________________________________ Date de la visite : _____________________________
Raisons de la consultation : _________________________________________________________________________________________________
J’aimerais aujourd’hui vous poser quelques questions sur votre état de santé
en général et sur votre fonctionnement au quotidien. Je vais utiliser un questionnaire pour m’aider à obtenir ces renseignements. Les premières questions
vont d’abord vérier votre mémoire.
Questionnaire préliminaire : dimension cognitive. Inscrire (+) pour une bonne
réponse et (–) si la réponse est incorrecte. Inscrire aussi le nombre total
d’erreurs.
(+, –)
1) Quelle est la date aujourd’hui ?
______
2) Quel jour de la semaine sommes-nous ?
______
3) Où sommes-nous en ce moment ?
______
4) Quel est votre numéro de téléphone
ou votre numéro de chambre ?
______
Si la personne n’a pas le téléphone, lui demander :
Quelle est votre adresse ?
5) Quel âge avez-vous ?
______
6) Quelle est votre date de naissance ?
(Inscrire la réponse à partir du dossier si
la personne ne peut répondre à la question.)
______
7) Qui est le premier ministre du Canada actuellement ?
______
8) Qui était premier ministre avant lui ?
______
9) Quel était le nom de lle de votre mère ?
______
10) Soustrayez 3 de 20 et continuez à soustraire 3
de chaque nouvelle réponse que vous obtenez.
______
Nombre total d’erreurs
______
Si la personne fait plus de quatre erreurs, passer à la question n° 11. Si elle fait
plus de six erreurs, remplir le questionnaire avec une personne capable de donner
l’information.
11) Croyez-vous qu’il vous serait utile de nommer une personne mandataire
pour s’occuper de vos affaires légales et financières ? a) Oui b) Non
Avez-vous fait un testament ? Aimeriez-vous en faire un ?
a) Non
b) À une personne mandatée spéciquement pour s’occuper de gérer ses
nances.
(Décrire : ____________________________________________)
c) À un curateur.
d) Oui
Données démographiques
1) Race ou groupe ethnique : __________________________________
2) Sexe Homme Femme
3) À quel niveau avez-vous terminé vos études ?
a) Études de 2e ou de 3e cycle (maîtrise, doctorat)
b) Études de 1er cycle (baccalauréat)
c) Collège ou école technique
d) Secondaire terminé
e) Secondaire non terminé
f) Primaire
Soutien social : J’ai maintenant quelques questions à vous poser au sujet de
votre famille et de vos amis.
4) Êtes-vous marié(e), veuf ou veuve, séparé(e), divorcé(e) ou avez-vous déjà
été marié(e) ?
a) Actuellement marié(e)
b) Veuf ou veuve
c) Séparé(e)
d) Divorcé(e)
e) Jamais marié(e)
5) Avec qui vivez-vous ? (Encercler les réponses données.)
a) Conjoint
b) Autre membre de la famille ou ami(e) (Préciser : ______________)
c) Avec un groupe (non lié à la santé)
d) Seul(e)
e) Dans une maison de soins inrmiers
(Depuis combien d’années ? ____________________________)
6) Avez-vous parlé au téléphone à des amis ou à des membres de
votre famille durant la dernière semaine ?
a) Oui
b) Non
7) Êtes-vous satisfait de la fréquence à laquelle vous rencontrez votre
famille et vos amis ?
a) Satisfait (Aller au n° 8.)
b) Non satisfait (Aller à A)
A. Aimeriez-vous fréquenter un centre pour les personnes âgées,
soit pour participer à des activités sociales, soit pour prendre
des repas ?
1) Non
2) Fréquente déjà un centre (Décrire : ___________________)
3) Oui
8) Si vous étiez malade ou handicapé, quelqu’un pourrait-il prendre soin
de vous aussi longtemps que vous en auriez besoin ?
a) Oui (Aller à C )
b) Non (Aller à A)
A. Est-ce que quelqu’un pourrait prendre soin de vous durant une
brève période de temps ?
1) Oui (Aller à C)
2) Non (Aller à B )
B. Est-ce que quelqu’un pourrait vous aider à l’occasion ?
1) Oui (Aller à C)
2) Non (Aller à C )
C. Qui devrions-nous appeler en cas d’urgence ? (Inscrire le nom et
le numéro de téléphone : ____________________________
______________________________________________)
Finances
9) Possédez-vous ou êtes-vous en train d’acheter votre propre maison ?
a) Oui (Aller au n° 10 )
b) Non (Aller à A)
A. Croyez-vous avoir besoin d’aide pour vous loger ?
1) Non
2) A déjà de l’aide pour un logement.
3) Oui (Décrire : __________________________________)
B. Quelle sorte de maison ou de logement aviez-vous avant de venir
habiter ici ?
10) Avez-vous une assurance médicale privée, un régime de santé d’une
autre province ou une assurance-invalidité ?
a) Assurance médicale privée (Spécier et aller au n° 11 : _________)
b) Régime d’une autre province
c) Assurance-invalidité (Spécier et aller à A : _________________)
d) Aucune assurance
e) Autre (Spécier : ____________________________________)
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
93
4
TABLEAU 4.3
Évaluation complète de la personne âgée (suite)
A. Croyez-vous avoir besoin d’aide pour défrayer le coût de vos soins ?
1) Non
2) Oui
11) Lequel des énoncés suivants décrit le mieux votre situation nancière ?
a) Je n’ai pas de problème à payer mes comptes.
(Aller au n° 12 )
b) J’ai de la difculté à payer mes comptes en raison de mes dépenses.
(Aller à A)
c) J’ai des dépenses si élevées que je n’arrive pas à payer mes comptes.
(Aller à A)
A. Croyez-vous avoir besoin de recevoir :
Oui
Non
1) une aide pour acheter
de la nourriture ?
_____
_____
2) une pension d’invalidité
ou de l’aide sociale ?
_____
_____
3) une aide pour payer le chauffage
et l’électricité ?
_____
_____
4) une aide pour payer d’autres
dépenses ? (Décrire : _________________________________)
Santé psychologique : Les prochaines questions portent sur la façon dont vous
vous sentez dans votre vie en général. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise
réponse, mais seulement des réponses qui s’appliquent à votre situation.
Oui
Non
12) Votre vie quotidienne est-elle remplie
de choses qui vous intéressent ?
_____
_____
13) Avez-vous déjà vivement souhaité
partir de la maison ?
_____
_____
14) Avez-vous parfois l’impression que personne
ne vous comprend ?
_____
_____
15) Êtes-vous une personne heureuse la plupart
du temps ?
_____
_____
16) Vous arrive-t-il parfois de vous sentir
dans un état de faiblesse générale ?
_____
_____
17) Votre sommeil est-il troublé ou agité ?
_____
_____
18) En considérant tout ce dont nous avons parlé, comment décririez-vous
votre satisfaction envers votre vie en général à ce moment-ci : je suis une
personne satisfaite, plus ou moins satisfaite ou peu satisfaite ?
a) Satisfaite
b) Plus ou moins satisfaite
c) Peu satisfaite
19) Croyez-vous avoir besoin d’aide en ce moment pour ce qui est de
votre santé mentale, par exemple un conseiller, un psychologue ou un
psychiatre ?
a) Non
b) J’ai déjà de l’aide. (Spécier : _____________________________)
c) Oui
Santé physique : Les prochaines questions concernent votre santé physique.
20) Durant le dernier mois (30 jours), combien de jours avez-vous été malade
au point de ne pas pouvoir faire vos activités habituelles comme travailler
autour de la maison ou visiter vos amis ?
21) Si vous vous comparez à d’autres personnes de votre âge, comment décririez-vous
votre santé en général à ce moment-ci ?
a) Excellente (Aller au n° 22 )
b) Très bonne (Aller au n° 22 )
c) Bonne (Aller à A )
d) Passable (Aller à A )
e) Mauvaise (Aller à A)
A. Croyez-vous avoir besoin de bénécier de plus de services médicaux tels que ceux d’un médecin, d’une inrmière (ou inrmière
visiteuse) ou d’un physiothérapeute ? (Encercler les réponses
données.)
1) Médecin
2) Inrmière
3) Inrmière visiteuse
4) Physiothérapeute
5) Aucun
22) Avez-vous besoin d’assistance pour vous déplacer, par exemple un fauteuil roulant, une marchette (déambulateur), une canne ou autre ?
(Encercler la forme d’assistance utilisée habituellement.)
a) Fauteuil roulant
b) Inrmière visiteuse
c) Marchette (déambulateur)
d) Autre (Spécier : _____________________________________)
e) Aucune
23) Comment vos problèmes de santé vous empêchent-ils de faire les activités que vous souhaitez réaliser : pas du tout, un peu ou beaucoup ?
a) Pas du tout (Aller au n° 24)
b) Un peu (Aller à A)
c) Beaucoup (Aller à A)
A. Croyez-vous avoir besoin d’assistance pour faire vos activités de
tous les jours ? Par exemple, auriez-vous besoin qu’une personne
vive avec vous ou d’un employé qui accomplirait les tâches
ménagères ?
1) Une personne qui vivrait au domicile
2) Une aide ménagère
3) J’ai de l’aide ménagère ou une autre forme d’assistance.
(Décrire : ______________________________________)
4) Je n’ai pas besoin d’aide.
24) Avez-vous déjà eu ou avez-vous maintenant l’un ou l’autre des problèmes de santé suivants ? (Si oui, placer un « X » dans la case appropriée et décrire le problème ; certains renseignements tirés du dossier
médical peuvent aussi servir pour compléter cette section.)
PROBLÈME DE SANTÉ
a) Arthrite ou rhumatisme
b) Troubles respiratoires/
pulmonaires
c) Hypertension
d) Problèmes cardiaques
e) Phlébite ou trouble circulatoire
dans les bras ou les jambes
f) Diabète ou hypoglycémie
g) Ulcère gastrique
h) Autres problèmes digestifs
i) Cancer
j) Anémie
94
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Antécédents
Actuel
Décrire
TABLEAU 4.3
Évaluation complète de la personne âgée (suite)
PROBLÈME DE SANTÉ
Antécé- Actuel Décrire
dents
k) Effets d’un accident vasculaire cérébral
l) Autres troubles neurologiques
(Spécier :___________________)
m) Troubles de la thyroïde ou glandulaires
(Spécier :___________________)
n) Troubles de la peau tels qu’ulcères de
décubitus, ulcères aux jambes, brûlures
o) Troubles du langage
p) Troubles de l’ouïe
q) Troubles de la vision ou troubles
oculaires
r) Maladie rénale, troubles vésicaux
ou incontinence
s) Troubles de l’équilibre/chutes
t) Problèmes d’alimentation ou de poids
(Spécier :____________________)
u) Trouble dépressif ou nerveux
(Spécier :____________________)
v) Problèmes de comportement
(Spécier :____________________)
w) Problèmes liés aux activités sexuelles
x) Problèmes liés à la consommation
d’alcool
y) Problèmes liés à la douleur
z) Autres problèmes de santé
(Spécier :____________________)
l)
m)
n)
o)
p)
q)
r)
Pour l’arthrite
Contre la douleur
Pour la pression artérielle
Pour l’élimination de liquides
Pour le coeur
Pour les poumons
Pour éclaircir le sang
Pour la circulation
Insuline ou médicaments pour
le diabète
j) Contre les convulsions
k) Pour la glande thyroïde
Stéroïdes
Hormones
Antibiotiques
Pour les nerfs ou la dépression
Pour dormir
Autres médicaments prescrits
Autres médicaments sans
ordonnance
4
OUI
25) Quels sont les médicaments que vous prenez actuellement ou que vous
avez pris au cours du dernier mois ? Puis-je voir les contenants de vos
médicaments ? (Si la personne ne réussit pas à nommer ses médicaments,
demander à quelle catégorie ils appartiennent et noter la posologie et
l’horaire ou obtenir l’information à partir du dossier médical ou pharma­
ceutique et en vérier l’exactitude avec la personne.)
a)
b)
c)
d)
e)
f)
g)
h)
i)
TYPE DE MÉDICAMENTS :
POSOLOGIE ET HORAIRE
26) Plusieurs personnes ont de la difficulté à se souvenir de l’heure à
laquelle elles doivent prendre leurs médicaments, tout spécialement
pour ceux qu’elles consomment sur une base régulière. À quelle fréquence oubliez-vous de prendre vos médicaments ? Diriez-vous que
vous oubliez souvent, parfois, rarement ou jamais ?
a) Souvent
c) Rarement
b) Parfois
d) Jamais
Activités de la vie quotidienne : Les prochaines questions concernent
votre besoin d’aide pour accomplir les activités suivantes.
27) Dites-moi si vous avez besoin d’aide ou non pour faire ces activités.
(Si oui, décrire les besoins de la personne.)
Immunisations :_______________________________________________
_________________________________________________________
Allergies :
Allergies :
TYPE DE MÉDICAMENTS :
POSOLOGIE ET HORAIRE
NON
DÉCRIRE
(en incluant
les besoins)
a) Utiliser le téléphone.
b) Aller à des endroits situés trop
loin pour marcher (utiliser un
moyen de transport).
c) Magasiner pour acheter des
vêtements et de la nourriture .
d) Accomplir les tâches ménagères.
e) Gérer vos nances.
f) Manger.
g) Vous habiller et vous déshabiller.
h) Prendre soin de votre apparence.
i) Vous mettre au lit ou vous relever.
j) Prendre un bain ou une douche.
k) Préparer vos repas.
l) Avez-vous de la difculté à vous
rendre à la toilette à temps ?
28) Avez-vous eu de l’aide au cours des six derniers mois pour faire des
activités telles que le magasinage, les tâches ménagères, prendre un
bain, vous habiller et sortir de la maison ?
a) Oui (Spécier : _______________________________________)
b) Non
Signature de la personne qui remplit le formulaire :
_____________________________________________________ __
Source : Adapté de Pearlman (1987). Development of a functional assessment questionnaire for geriatric patients : the comprehensive older person’s evaluation (COPED). J Chronic Dis,
40, 85S-94S. Reproduit avec permission.
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
95
30
L'évaluation fonctionnelle
de la personne âgée est
décrite dans le chapitre 30,
portant le même nom.
Le gouvernement du Québec
a mis sur pied un plan d’action
et plusieurs ressources visant
à comprendre la maltraitance
envers les aînés, à la recon­
naître et à agir. Le site peut
être consulté au http ://
maltraitanceaines.gouv.qc.ca/.
Les problèmes de maltraitance chez les aînés
sont une réalité à explorer. Il y a maltraitance
quand un geste singulier ou répétitif ou quand une
absence d’action appropriée se produit dans
une relation où il devrait y avoir de la conance ;
cela cause alors du tort ou de la détresse chez une
personne aînée
30 .
Adaptation au stress/gestion du stress Changement
récent dans le style de vie de la personne : perte
d’un emploi, d’un conjoint, d’amis, déménagement ;
maladie chez la personne elle-même ou chez un
autre membre de la famille ; baisse de son revenu.
Comment compose-t-elle avec le stress ? Si la personne a perdu un être cher, comment vit-elle son
deuil ? Comment se sent-elle en étant seule et
devant faire face à de nouvelles responsabilités ?
Environnement/risques Sécurité dans la maison : le
domicile comprend-il un seul étage, un ou plusieurs escaliers ? Dans quel état sont les murs, les
planchers ou les escaliers ? La personne a-t-elle
sufsamment d’argent pour entretenir la maison ?
Les sorties d’urgence, le chauffage et les services
sont-ils adéquats ? Depuis combien de temps la
personne vit-elle dans sa maison ? Transport :
la personne possède-t-elle une automobile ? À
quand remonte son dernier examen de conduite
automobile ? Se considère-t-elle comme une
conductrice prudente ? Ses revenus sont-ils sufsants pour assurer l’entretien de sa voiture ? La personne peut-elle accéder facilement aux transports
en commun ? Peut-elle compter sur des amis ou sur
des ressources communautaires pour la conduire ?
Voisinage : le voisinage est-il sécuritaire le jour et
la nuit ? Existe-t-il un danger pour la personne de
se faire voler ou soutirer des biens ?
L’environnement de la personne est-il bruyant
et pollué ? La personne âgée a-t-elle accès à sa
famille, à ses amis, à l’épicerie, à la pharmacie, à la
buanderie, à l’église, au temple, à la mosquée, aux
services de santé ?
En ce qui concerne les immunisations, il est
recommandé de recevoir le vaccin contre la pneunomie (pneumocoque) après l’âge de 65 ans. Il faut
que les personnes considérées comme non protégées
soient vaccinées. De plus, à compter de 50 ans, il
est préférable d’administrer le vaccin contre le zona.
Évaluation et jugement clinique
Dossier : Christine Moisan (suite)
À son retour de radiologie, vous questionnez
madame Moisan à propos de sa famille et vous
dessinez ensuite le génogramme. Les résultats
sont présentés à la page suivante.
1. Compte tenu de ce que vous apprend le génogramme de madame Moisan, déterminez les maladies
aiguës et chroniques pour lesquelles elle est à risque. Expliquez votre réponse.
(suite)
Le RX du bras a démontré une double fracture
du radius et du cubitus. Madame Moisan devra
être opérée pour réduire et consolider ses
fractures. Vous effectuez la RVS avec elle en
attendant l’arrivée de l’orthopédiste.
2. Formulez deux questions que vous allez lui poser pour évaluer son état de santé global.
3. Madame Moisan vous dit qu’il lui est arrivé de ressentir des vertiges à l’occasion lorsqu’elle passe de
la position couchée à assise ou l’inverse dans les deux dernières semaines. Sous quelle rubrique de
l’histoire de santé allez-vous noter cette information ?
4. En ce qui concerne l’évaluation du système cardiovasculaire de madame Moisan, indiquez deux
questions pertinentes à lui poser compte tenu des données dont vous disposez jusqu’à présent.
5. Concernant l’aide pour les AVQ et l’évaluation fonctionnelle en vue du retour à domicile, que
pouvez-vous déduire à partir des données recueillies par le génogramme ?
6. Il est toujours important de poser des questions sur les habitudes de consommation de tabac, d’alcool
ou d’autres substances. Dans le cas de madame Moisan, indiquez une raison pour laquelle il est
nécessaire de vérier ces éléments.
96
Partie 1
Évaluation globale de la personne
4
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Quel acronyme peut vous aider à recueillir des
données pertinentes lorsqu’une personne présente
de la douleur ? Quelle est la signication de
chacune des lettres ?
2. Dans le cas d’une personne chez qui vous suspectez
un problème de consommation d’alcool, indiquez
un outil que vous pourriez utiliser pour faciliter
l’évaluation.
3. Dans le cas du test ADS, jusqu’où faut-il remonter
dans le temps an de bien évaluer les habitudes
de consommation d’alcool de la personne ?
6. Quel est l’avantage de cette méthode d’entrevue ?
4. Quelle est la conduite à adopter si vous rencontrez
un adolescent accompagné par un parent ou par
ses deux parents ?
8. Lorsque vous procédez à l’évaluation d’une
personne âgée, outre le problème actuel, indiquez
deux éléments sur lesquels vous allez la questionner
plus en profondeur. Justiez votre réponse.
5. Sur quels éléments la méthode d’entrevue
HEEADSSS, recommandée auprès des adolescents,
met-elle l’accent ?
7. Est-il nécessaire d’obtenir toutes les données
obstétricales chez une femme âgée ?
Chapitre 4
Regard global sur l’histoire de santé
97
Dossier : Bernard Gamache
Bernard Gamache, âgé de 34 ans, est admis à
l’unité de psychiatrie pour trouble psychotique
non spécié. Il se trouve sans travail depuis qu’il
a été congédié voilà deux semaines en raison de
son manque de productivité. Vous le rencontrez
pour la première fois ce matin an d’effectuer la
collecte de données d’admission et d’évaluer son
état mental. Il est couché en boule dans son lit,
les couvertures relevées par-dessus la tête. Vous
cognez à la porte avant d’entrer, et il ne se
retourne pas. Vous vous approchez de lui et vous
le saluez avant de vous présenter. Il déplace les
couvertures et vous regarde. Vous lui demandez
de vous accompagner à la salle d’entrevue, mais
il refuse en vous disant qu’il préfère demeurer
dans la chambre. Vous y êtes seuls, alors vous
commencez l’entrevue.
5.1
Dénition de l’état mental
À l’instar de l’Organisation mondiale de la Santé
(OMS) et de l’Agence de la santé publique du
Canada (ASPC), plusieurs auteurs de la discipline
inrmière associent le concept de « santé » à celui
du « bien-être » humain. Selon Patricia Benner
(Benner, 1985 ; Benner et Wrubel, 1989), la notion
de « bien-être » s’inscrit dans le contexte culturel,
historique et temporel de l’être humain. Ainsi, cette
notion est comprise comme étant l’expérience holistique de la santé, impliquant des façons distinctes
d’être dans le monde et prenant un sens dans le
vécu expérientiel de chaque humain. Par ailleurs,
dans une perspective positiviste-cartésienne, l’OMS
(World Health Organization [WHO], 2008) reconnaît
au « bien-être » humain des aspects physique, mental et social. Ainsi, la santé mentale est une partie
constituante de la notion de santé globale de l’OMS.
Pour l’ASPC (2014), la santé mentale est considérée
ainsi : « … la capacité qu’a chacun d’entre nous de
ressentir, de penser et d’agir de manière à améliorer
notre aptitude à jouir de la vie et à relever les dés
auxquels nous sommes confrontés. Il s’agit d’un
sentiment positif de bien-être émotionnel et spirituel qui respecte l’importance de la culture, de
l’équité, de la justice sociale, des interactions et
de la dignité personnelle. »
Dans sa Politique de la santé mentale, le ministère
de la Santé et des Services sociaux (MSSS) (1989)
mentionne que la santé mentale d’une personne est
« [la] capacité d’utiliser ses émotions de façon appropriée […] (affectif), d’établir des raisonnements qui
lui permettent d’adapter ses gestes aux circonstances
(cognitif) et de composer de façon signicative avec
son environnement (relationnel) » (p. 21).
Monsieur Gamache s’assoit au bord du lit, les
pieds pendants, et il relève les couvertures sur
ses épaules et sa tête. Il porte une chemise d’hôpital, il est dépeigné, et ses cheveux sont gras.
Vous remarquez une odeur de transpiration
importante, et ses ongles sont sales. Vous commencez par lui demander comment il se sent ce
matin. Il vous regarde brièvement, puis observe
les alentours avant de xer le sol. Il vous dit
d’une voix faible : « Comme d’habitude. » Vous
lui demandez ce qui l’a amené au centre hospitalier, et il vous xe un moment avant de dire :
« Police ! C’est eux, c’est eux qui m’ont amené...
J’ai pas d’affaire ici… » Vous avez lu plus tôt qu’il
a été accompagné par les policiers après qu’un
voisin s’est plaint du bruit provenant de son
appartement au beau milieu de la nuit.
5
Ainsi, l’état mental correspond généralement au
fonctionnement situationnel d’une personne, relativement aux aspects émotif, cognitif, somatique et
relationnel, et révélant sa qualité de vie au travail,
dans ses relations humaines et avec elle-même.
Le stress lié aux événements de la vie (p. ex.,
le décès d’un être cher, un déménagement, un
problème de santé) peut occasionner un dérèglement transitoire du fonctionnement situationnel,
si l’événement s’avère traumatisant. L’évaluation
de l’état mental d’une personne à l’occasion d’un
événement anxiogène permet de découvrir chez
elle des forces qui peuvent l’aider à mobiliser
ses ressources et à utiliser ses habiletés pour
composer avec la situation.
Le trouble mental se manifeste lorsque le comportement d’une personne soumise à un événement
traumatisant est très différent de celui attendu dans
une culture donnée. Un trouble mental se dénit
comme un mode de fonctionnement comportemental ou psychologique associé à de la détresse
(symptôme douloureux) ou à de l’incapacité (fonctionnement diminué) et qui comporte un risque
important de douleur et d’incapacité accrues ou la
mort ou la perte de liberté (American Psychiatric
Association [APA], 2013). Les troubles mentaux
comprennent les troubles organiques (trouble du
cerveau de cause organique connue, par exemple
délirium, troubles neurocognitifs [démence],
intoxication à l’alcool et aux drogues, repli sur soimême) et le trouble psychiatrique (pour laquelle
l’étiologie organique n’est pas encore établie,
comme pour les problèmes d’anxiété ou de schizophrénie). L’évaluation de l’état mental documente
le dysfonctionnement en établissant la façon dont
celui-ci inue sur les soins personnels de la vie
quotidienne.
Chapitre 5
Q
uestion de suivi
En vous basant sur cette
dénition et sur les données
contenues dans la situation
de monsieur Gamache, quels
sont les aspects du fonction­
nement de ce client qui vous
semblent perturbés ?
Q
uestion de suivi
Indiquez à quelle catégorie
de troubles mentaux s’ap­
parente le cas de monsieur
Gamache.
Évaluation de l’état mental
99
L’état mental ne peut être examiné directement
comme l’inrmière le fait pour la peau ou encore
pour les bruits du cœur. Aussi, le fonctionnement
ENCADRÉ 5.1
Dénitions comportementales
Attention : pouvoir de concentration, habileté à se centrer
sur un objet précis sans être distrait par les multiples stimulus environnementaux.
Conscience : faculté mentale qui perçoit sa propre existence, ses sentiments, ses pensées et son sens moral, en
lien avec son environnement. Elle est la plus élémentaire
des caractéristiques de l’état mental.
Contenu de la pensée : idées particulières de la personne,
ses croyances, son usage des mots – ce que pense la
personne.
Humeur et affect : aspects qui traduisent les sentiments
dominants ; l’humeur est un état émotionnel prolongé et
envahissant des sentiments qui colore toute la vie émotive,
tandis que l’affect est une expression temporaire de cet état
ou de ces sentiments par des manifestations externes, des
comportements. L’humeur est subjective, alors que l’affect
est objectif.
Particularités liées au développement
Nourrissons et enfants
Q
uestion de suivi
Si monsieur Gamache
avait 78 ans, quel type
de mémoire devriez-vous
évaluer dans le cadre de
l’examen de l’état mental
du client ?
100
Partie 1
Le fonctionnement émotionnel et cognitif se développe de façon progressive, à partir d’un simple
réexe comportemental jusqu’à devenir une pensée complexe, logique et abstraite. Il est difcile
d’isoler et de retracer le développement d’un seul
aspect de l’état mental. Tous les aspects sont interdépendants. Par exemple, la conscience est rudimentaire à la naissance parce que le cortex cérébral
n’est pas encore développé ; le nourrisson ne peut
pas distinguer son moi de celui de sa mère. La
conscience se développe graduellement avec le
langage. C’est ainsi que, vers l’âge de 18 à 24 mois,
le nourrisson apprend qu’il est distinct des objets
de son environnement, et il a les mots pour l’exprimer. Il est aussi possible de suivre l’acquisition
du langage : par les différents pleurs à quatre
semaines, par les balbutiements à six semaines,
dans les phrases composées de un mot à un an et
dans celles de plusieurs mots à deux ans. Le
concept du langage est reconnu comme instrument
social de communication aux alentours de l’âge
de quatre ou cinq ans, et il coïncide avec la préparation de l’enfant à jouer de façon coopérative avec
d’autres enfants.
L’attention s’accroît graduellement de façon
importante pendant les années préscolaires, de telle
sorte qu’à l’âge scolaire, les enfants sont capables
de s’asseoir et de se concentrer sur leur travail
Évaluation globale de la personne
de l’état mental est-il déduit par l’évaluation des
comportements individuels qui sont dénis dans
l’ENCADRÉ 5.1.
Langage : expression vocale de la pensée et du sentiment.
Instrument fondamental de communication de l’humain. Sa
perte a un impact social important pour la personne atteinte.
Mémoire : habileté à xer des expériences et des perceptions et à s’en souvenir pour utilisation ultérieure. La mémoire de travail (à court terme) évoque des événements
quotidiens ; la mémoire à long terme rappelle des années
d’expérience.
Orientation : faculté mentale qui perçoit objectivement le
monde en relation avec soi-même.
Perception : prise de connaissance des objets par les cinq
sens et transformation de l’information obtenue en représentations mentales.
Processus de la pensée : façon dont pense une personne, la
logique de sa ligne de pensée.
Raisonnement abstrait : capacité de l’esprit à considérer
un sens plus profond qui va au-delà du concret et du littéral.
pendant un certain temps. Certains accusent du
retard dans le développement de leur concentration. Vers l’âge de sept ans, alors que l’enfant a déjà
commencé à fréquenter l’école, le processus de la
pensée évolue ; celle-ci devient plus logique et systématique, et l’enfant est capable de raisonner et de
comprendre des notions. La pensée abstraite, cette
capacité à considérer une situation hypothétique,
survient habituellement entre l’âge de 12 et 15 ans,
bien que certains adolescents ne parviennent pas à
l’atteindre.
Adultes vieillissants
Le processus du vieillissement laisse les paramètres
de l’état mental presque intacts. Il n’y a pas de diminution des connaissances générales et peu ou pas
de perte de vocabulaire. Le temps de réponse est
toutefois plus lent que celui des jeunes personnes ;
le cerveau vieillissant traite l’information et y réagit
moins rapidement. Aussi, le rendement aux tests
d’intelligence, lié au temps de performance, peut
être plus faible chez une personne vieillissante –
non pas parce que son intelligence faiblit, mais
parce qu’il lui faut plus de temps pour répondre
aux questions. Un temps de réponse plus long nuit
à l’apprentissage ; si de nouvelles connaissances
sont présentées à un rythme rapide, la personne
âgée n’a pas le temps de réagir à celles-ci (Birren et
Schaie, 2006).
La mémoire de travail, qui fait appel à un certain
processus (p. ex., retenir les instructions pour la
prise de médicaments, se rappeler les noms de
nouvelles connaissances ou une diète de
24 heures), est quelque peu diminuée avec l’âge.
La mémoire à long terme demeure intacte.
Les changements liés à l’âge, sur le plan de la
perception sensorielle, peuvent inuer sur l’état
mental. Par exemple, la perte de la vision peut
conduire à l’apathie, à l’isolement social et à la
dépression. Les changements de l’audition sont
courants chez l’adulte vieillissant
15 . La perte
auditive associée à l’âge est liée aux sons de haute
fréquence. Ainsi, les personnes âgées qui ont de la
difculté à entendre les consonances associées
à des sons de haute fréquence éprouvent des
problèmes à entretenir une conversation normale.
Cela peut occasionner de la frustration, de la
méance et de l’isolement social. En outre, l’entou­
rage peut avoir l’impression que la personne est
désorientée.
La période de l’âge adulte avancé comporte un
potentiel de pertes plus important que les étapes
antérieures de la vie : la perte des êtres aimés, celle
du statut de travailleur et du prestige associé,
celle d’un corps énergique et résistant. De plus,
l’expérience de la maladie chronique (insufsance
cardiaque, cancer, diabète, ostéoporose) s’accom­
pagne souvent de la crainte de la perte de la vie. Le
deuil et le désespoir liés à ces événements peuvent
nuire à l’état mental. Ces pertes peuvent aussi se
solder par la désorientation, l’invalidité ou la
dépression.
5.2
Composantes de l’examen
de l’état mental
L’examen complet de l’état mental est une vérica­
tion systématique du fonctionnement émotionnel
et cognitif. Cependant, les étapes décrites ont ra­
rement besoin d’être suivies intégralement.
Habituellement, l’inrmière peut évaluer l’état
mental au moyen de l’entrevue sur l’histoire de
santé. Durant celle­ci, il lui suft de garder en tête
les quatre principaux éléments de l’évaluation
de l’état mental :
apparence, comportement, fonctions cognitives
et processus de la pensée
(A-C-C-P).
L’intégration de l’examen de l’état mental dans
l’entrevue portant sur l’histoire de santé est suf­
sante pour la plupart des gens. L’inrmière peut
recueillir sufsamment de données pour évaluer
les forces et les habiletés d’adaptation de la per­
sonne quant à sa santé mentale et dépister tout
problème lié à celle­ci.
Il est nécessaire d’effectuer un examen complet
de l’état mental lorsque l’inrmière découvre des
troubles de l’affect ou du comportement et dans les
situations suivantes.
• Lorsqu’un bref dépistage initial indique la
possibilité d’un trouble anxieux ou d’une
dépression.
• Lorsque des membres de la famille s’inquiètent
des changements dans le comportement d’un des
leurs, comme la perte de mémoire ou des inter­
actions sociales inappropriées.
• Dans le cas de lésions au cerveau (traumatisme,
tumeur ou accident vasculaire cérébral [AVC]).
Une évaluation de l’état mental documente tout
changement émotionnel ou cognitif associé à la
lésion. Ne pas reconnaître ces changements
entrave la planication des soins et engendre
des problèmes sur le plan du réajustement
social.
• Dans le cas d’aphasie. L’examen de l’état men­
tal évalue le problème de langage aussi bien
que tous les problèmes émotionnels qui
lui sont associés, comme la dépression ou
l’agitation.
• Lorsqu’il y a présence de symptômes d’un
trouble mental psychiatrique, spécialement dans
le cas d’une crise aiguë.
15
Le chapitre 15, Oreilles,
décrit les changements
liés à l’audition et la
presbyacousie.
5
Q
uestion de suivi
Monsieur Gamache devraitil subir un examen complet
de l’état mental ? Justiez
votre réponse.
Aphasie : Difculté ou incapacité à s’exprimer (aphasie
motrice) ou incapacité à comprendre le langage (aphasie
de compréhension du langage
ou de Wernicke).
Dans tout examen de l’état mental, il faut noter
les facteurs associés à l’histoire de santé qui peuvent
inuer sur l’interprétation des résultats :
• tous les problèmes de santé connus, comme les
troubles liés à la consommation d’alcool ou une
maladie rénale chronique ;
• la prise actuelle de médicaments dont les effets
secondaires peuvent causer de la confusion ou
de la dépression ;
• le niveau d’instruction et le comportement de la
personne – l’inrmière note cela en tant que don­
née de base, sans espérer, au moment de l’exa­
men de l’état mental, un résultat supérieur à
celle­ci ;
• les réponses aux questions sur l’histoire person­
nelle indiquant le degré actuel de stress, le genre
d’interactions sociales, les habitudes de som­
meil, l’usage de drogues et d’alcool.
La séquence des étapes à parcourir, présentée
dans la section suivante, forme une hiérarchie
dans laquelle les fonctions les plus fondamen­
tales (conscience, langage) sont évaluées en pre­
mier. La première étape doit être effectuée
adéquatement afin d’assurer la validité des
étapes suivantes. Cela veut dire que si la
conscience est perturbée, l’inrmière ne peut pas
s’attendre à une attention complète de la per­
sonne et à sa coopération pour de nouveaux
apprentissages. Si le langage est altéré, toute
évaluation subséquente de nouveaux apprentis­
sages ou du raisonnement abstrait peut donner
des conclusions erronées.
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
101
5.3 Données objectives
Schéma séquentiel résumant
les étapes de l’examen clinique.
5.3.1
Préambule
Matériel nécessaire
(Occasionnellement)
Crayon, papier, matériel de lecture
5.3.2
Examen physique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
ÉVALUATION DE L’APPARENCE
Un aide-mémoire complet
pour réaliser l’examen de
l’état mental est présenté
dans le tableau 4.3 du manuel de Fortinash, K.M., et
HolodayWorret, P.A. (2012),
Santé mentale et psychiatrie.
Montréal : Chenelière
Éducation.
Posture
Posture droite et attitude décontractée.
• S’asseoir sur le bout de la
chaise, se recroqueviller dans
le lit, muscles tendus, froncer
les sourcils, avoir un regard de
déance, être agité : dans le cas
d’anxiété et d’hyperthyroïdie.
• S’effondrer sur une chaise,
avoir une démarche lente, se
traîner les pieds : dans le cas de
dépression et de certaines maladies organiques du cerveau.
Mouvements du corps
Hyperkinésie :
Augmentation anormale de la
rapidité et de l’amplitude des
mouvements.
Mouvements du corps volontaires, délibérés, coordonnés, uniformes et réguliers.
• Apparence agitée, mouvements
d’impatience ou hyperkinésie
dans le cas d’anxiété.
• Apathie et ralentissement psychomoteur : dans le cas de
dépression et d’un trouble
neurocognitif.
• Gestes bizarres et posture
anormale : associés à la
schizophrénie.
• Grimaces.
Habillement
Habillement approprié pour la circonstance, la saison, l’âge, le
sexe et le groupe social. Les vêtements font bien à la personne et
sont portés de façon adéquate.
• Habillement inapproprié : peut
être associé à un syndrome
organique cérébral.
• Vêtements excentriques et
maquillage bizarre : parfois
associés à la schizophrénie ou
au syndrome maniaque.
Soins personnels et hygiène
La personne est propre et bien soignée ; les cheveux sont lavés ;
les femmes n’ont pas de maquillage ou celui-ci est discret ; les
hommes sont rasés ou leur barbe ou leur moustache sont bien
taillées. Les ongles sont propres (toutefois, certains emplois
laissent les ongles chroniquement sales).
102
Partie 1
Évaluation globale de la personne
• Négligence unilatérale (inattention totale quant à un côté du
corps) : peut se produire à la
suite d’un AVC.
OBSERVATIONS NORMALES
Note à l’inrmière
Une apparence échevelée chez une personne antérieurement bien soignée est significative. Il faut faire preuve
de prudence avant d’interpréter la signification d’un
habillement négligé, bizarre ou en mauvaise condition,
des piercings et des tatouages, car ceux-ci peuvent
refléter la situation économique ou une volonté de
suivre une tendance mode.
ANOMALIES
• Habillement inapproprié,
hygiène déciente et manque
d’intérêt pour son apparence :
se manifestent dans le cas de
dépression, par exemple.
• Habillement recherché et apparence soignée associés à des
façons d’agir exagérées : manifestations possibles de troubles
obsessifs compulsifs.
5
ÉVALUATION DU COMPORTEMENT
Niveau de conscience
La personne est éveillée, alerte et à l’affût des stimulus de l’environnement et de son moi intérieur, et elle répond de façon
appropriée aux stimulus.
• Perd le l de la conversation et
s’endort.
• Personne léthargique (somnolente), affaiblie (confusion)
TABLEAU 5.1.
Expression faciale
L’expression faciale est appropriée à la situation et change adéquatement selon le sujet abordé. Le contact des yeux est adéquat,
sauf s’il est interdit culturellement (p. ex., dans la culture
amérindienne).
• Personne hypervigilante et
facilement distractible.
• Visage sans expression qui ressemble à un masque : dans le
cas de la maladie de Parkinson
et de la dépression.
Langage
Juger la qualité du langage en notant si les sons laryngiens sont
émis sans effort par la personne et si elle prend part à la conversation de façon appropriée.
• Dysphonie: volume anormal de
la voix, son aigu TABLEAU 5.2.
• Monopolise l’entrevue. Personne silencieuse, secrète ou
qui ne communique pas.
• Tics, contractions ou spasmes
involontaires du visage pouvant être le résultat d’effets
secondaires de la médication
neuroleptique fréquemment
utilisée en santé mentale.
Le rythme de la conversation est modéré, et son déroulement
évolue normalement.
• Langage lent et monotone :
dans le cas de la maladie de
Parkinson et de la dépression.
• Langage précipité, tendu et
fort : dans le cas du syndrome
maniaque.
L’articulation (capacité de faire entendre distinctement les mots
et les sons d’une langue) est claire et compréhensible.
• Dysarthrie : discours déformé
TABLEAU 5.2.
• Mauvais usage des mots ; omission des lettres, des syllabes ou
des mots ; transposition des
mots : accompagne l’aphasie.
• Circonlocution ou mode répétitif anormal : néologisme,
écholalie TABLEAU 5.4.
Chapitre 5
Circonlocution : Périphrase
qu’une personne utilise pour
éviter de dire franchement,
directement ce qu’elle pense.
Écholalie : Tendance à
répéter de façon spontanée,
involontaire et systématique
les derniers mots prononcés
par un interlocuteur.
Évaluation de l’état mental
103
OBSERVATIONS NORMALES
Le choix des mots se fait sans effort, et ils sont appropriés au
niveau d’éducation de la personne. Celle-ci complète ses phrases
et, occasionnellement, prend une pause pour rééchir.
ANOMALIES
Recherche de mots indûment
longue ou échec à trouver les
mots : dans le cas de l’aphasie.
Humeur et affect
Juger ces aspects par le langage corporel et l’expression faciale
et en demandant directement à la personne : « Comment vous
sentez-vous ? » ou « Comment vous sentez-vous habituellement ? »
L’humeur devrait être appropriée à la situation et à la condition
de la personne et changer de façon adéquate selon les sujets discutés. La personne collabore volontiers avec l’inrmière.
Variations importantes de l’humeur : associées au syndrome maniaque. Humeur étrange : présente
dans le cas de schizophrénie
TABLEAU 5.8.
ÉVALUATION DES FONCTIONS COGNITIVES
Orientation
Vérier l’orientation temporelle et spatiale au cours de l’entrevue en posant des questions concernant l’adresse, le numéro de
téléphone et l’histoire de santé de la personne ou en demandant
directement, mais avec tact : « Certaines personnes ont de la
difculté à se souvenir des dates lorsqu’elles sont hospitalisées.
Savez-vous quelle est la date d’aujourd’hui ? » Évaluer les trois
sphères suivantes :
1. temps : jour de la semaine, date, année, saison ;
2. lieu : endroit où vit la personne, localisation actuelle, type
d’établissement, nom de la ville et nom de la province ;
3. personne : nom de famille, prénom, âge, identication de l’inrmière, type d’emploi.
Plusieurs personnes hospitalisées ont de la difculté à indiquer la date du jour, mais elles répondent adéquatement aux
autres questions.
Désorientation : dans le cas du
délirium et d’un trouble neurocognitif. L’orientation se perd habituellement dans l’ordre suivant : le
temps, puis le lieu et, rarement,
la personne.
Période d’attention
Vérier l’habileté de la personne à se concentrer en notant si elle
complète sa pensée, sans errer et sans se perdre dans ses réexions.
Noter aussi sa distraction ou sa difculté à suivre ce que dit ou
fait l’inrmière. Ou encore, lui donner une série de consignes à
suivre et noter les séquences des comportements réalisés, comme :
« S’il vous plaît, prenez ce verre d’eau avec votre main gauche,
buvez, changez le verre de main et placez-le sur la table. » La
période d’attention est généralement diminuée chez les gens
anxieux, fatigués ou intoxiqués par les médicaments.
• Digression de la pensée initiale. Réponses inappropriées
aux questions. Personne facilement distraite, « stimulus dépendante », c’est-à-dire que tout
nouveau stimulus attire rapidement son attention.
• Confusion, négativisme.
Mémoire de travail
Syndrome de Korsakoff :
Affection neurologique caracté­
risée par une amnésie antéro­
grade avec fabulations, souvent
associée à une polynévrite des
membres inférieurs. Sa cause la
plus fréquente est une carence
en vitamine B1 secondaire à un
alcoolisme chronique.
Évaluer la mémoire de travail pendant l’entrevue par le rappel
de la diète des 24 dernières heures ou en demandant l’heure d’arrivée au lieu d’examen. Poser des questions dont les réponses
peuvent être vériées. Cela permet de reconnaître la personne
qui fabule ou qui compose des réponses an de camouer sa
perte de mémoire.
Mémoire à long terme
Demander à la personne de parler d’événements passés vériables ; par exemple, lui demander de parler de son état de santé
antérieur, de son premier emploi, de sa date de naissance ainsi
que des dates d’anniversaire et d’événements historiques qui la
concernent.
104
Partie 1
Décit de la mémoire de travail :
manifestation de troubles organiques (p. ex., le délirium, le
trouble neurocognitif, le syndrome amnésique ou le syndrome
de Korsakoff dans le cas d’alcoolisme chronique).
Évaluation globale de la personne
Perte de la mémoire à long terme :
quand la région corticale d’emmagasinage est endommagée comme
dans la maladie d’Alzheimer.
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Nouvel apprentissage
Test des quatre mots (non reliés entre eux). Ce test vérie l’habileté de la personne à se rappeler les apprentissages nouveaux. Il
est hautement adéquat et valide. Il requiert plus d’effort que le
rappel d’événements personnels ou historiques. Il évite aussi
le danger de faits non vériables, par exemple si l’inrmière
demande à la personne de parler de ses nouveaux apprentissages.
Celle-ci peut répondre ce qu’elle veut sans que l’inrmière puisse
en vérier la véracité.
Dire à la personne : « Je vais vous dire quatre mots. Je veux que
vous vous en souveniez. Dans quelques minutes, je vais vous
demander de les répéter. » Répéter les mots, an de s’assurer que
la personne les a bien compris. Choisir quatre mots différents sur
les plans sémantique et phonétique :
1.
2.
3.
4.
Brun
Honnêteté
Tulipe
Onguent
1.
2.
3.
4.
5
Plaisir
Carotte
Cheville
Loyauté
Après cinq minutes, demander à la personne de répéter les
quatre mots. Pour vérier la durée de mémorisation, lui demander de les répéter dans les 10 et 30 minutes suivantes. La réponse
normale pour les personnes âgées de moins de 60 ans est un rappel adéquat de 3 ou 4 mots, après un délai de 10 et 30 minutes
(Strub et Black, 2000).
Les personnes atteintes de la
maladie d’Alzheimer ne se rappellent aucun mot ou se souviennent d’un seul. L’habileté
affaiblie à faire de nouveaux
apprentissages est associée à l’anxiété (causée par le manque d’attention et la vulnérabilité à la
distraction) et à la dépression
(due au manque d’effort consenti
pour évoquer des souvenirs).
Tests complémentaires pour des personnes
atteintes d’aphasie
Compréhension des mots
Demander à la personne de montrer, par exemple, le lit, la lampe,
le cadre, son nez, son genou, ses pieds ou ses clés.
L’aphasie est une perte de l’habileté à parler ou à écrire de fa
çon cohérente ou à comprendre des
paroles ou un texte, causée par une
atteinte au cerveau TABLEAU 5.2.
Lecture
Demander à la personne de lire quelques phrases à voix haute,
à partir de documents imprimés. Se rappeler que la lecture est
liée au niveau d’instruction et que l’inrmière ne vérie pas seulement la compréhension du texte par la personne.
La lecture et l’écriture sont importantes pour planier l’enseignement de la promotion d’une bonne
santé et pour la réadaptation.
Écriture
Demander à la personne d’inventer et d’écrire une phrase. Noter
la cohérence, l’orthographe et les composantes de la phrase (celleci doit avoir un sujet et un verbe).
Fonction intellectuelle supérieure
Les tests mesurent les habiletés à résoudre les problèmes et à raisonner. Les résultats sont étroitement liés au niveau d’intelligence
de la personne, et il faut les évaluer en considérant son prol éducatif et culturel. Les tests du fonctionnement intellectuel supérieur ont été utilisés pour distinguer les troubles organiques
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
105
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
du cerveau des troubles psychiatriques ; les erreurs obtenues dans
les tests indiquent un dysfonctionnement organique. Même s’ils
ont été grandement utilisés, leur validité pour diagnostiquer un
trouble organique du cerveau n’est pas évidente. De plus, la plupart d’entre eux sont peu pertinents pour le soin clinique quotidien. Bien qu’ils soient reconnus, les tests standards de la fonction
intellectuelle supérieure ne sont pas discutés ici, comme ceux
de l’ensemble des connaissances générales, de la distance digitale répétitive, du calcul, de l’interprétation des proverbes et
des similitudes pour vérier le raisonnement abstrait ou celui des
situations hypothétiques, qui évalue le jugement.
Jugement
Une personne fait preuve de jugement lorsqu’elle compare et évalue les possibilités dans une situation donnée et qu’elle entreprend les actions appropriées. Plutôt que de vérier la réponse
d’une personne à une situation hypothétique (p. ex. : « Que feriezvous si vous trouviez sur le trottoir une enveloppe affranchie et
adressée ? »), s’intéresser davantage à ses objectifs quotidiens
ou à ceux de sa vie à long terme, à la possibilité qu’elle agisse
en fonction de ses illusions ou hallucinations et à sa propension
à la violence ou à des actes suicidaires.
An d’évaluer le jugement au cours de l’entrevue, noter ce
que la personne dit au sujet de ses projets d’emploi et d’avenir
ou de ses obligations sociales ou familiales. Les projets doivent
être réalistes et compatibles avec sa situation de santé. Aussi,
demander à la personne quels sont les motifs qui l’ont amenée
à consulter pour ses soins personnels de santé et vérier si elle
accepte ou non de se soumettre au traitement prescrit. Les décisions et les actions de la personne devraient être réalistes.
Jugement affaibli (décisions irréalisables ou impulsives, pensée
magique) : dans le cas de retard
mental, de troubles émotionnels,
de schizophrénie et de troubles
organiques du cerveau.
PROCESSUS DE LA PENSÉE ET PERCEPTIONS
Processus de la pensée
Se demander : « Les propos de cette personne ont-ils du sens ?
Est-ce que je peux suivre ce qu’elle dit ? » La façon de penser de
la personne devrait être logique, cohérente, pertinente et guidée
par des objectifs. La personne devrait compléter sa pensée.
Un processus de la pensée illogique,
irréel, une digression de la pensée
initiale, le fait d’avoir plusieurs
idées en même temps et une évidence de blocage (la personne cesse
de parler au milieu de sa phrase)
sont tous des troubles du processus
de la pensée TABLEAU 5.4.
Contenu de la pensée
Ce que la personne dit doit être sensé et logique.
Obsessions, compulsions
TABLEAU 5.5.
Perceptions
La personne devrait être constamment dans la réalité. Ses perceptions devraient concorder avec celles de l’inrmière. Pour
vérier ses perceptions, lui poser les questions suivantes.
• Comment les gens vous traitent-ils ?
• Les autres personnes parlent-elles de vous ?
• Vous sentez-vous épié, suivi, contrôlé ?
• Votre imagination est-elle très active ?
• Avez-vous déjà entendu prononcer votre nom alors que vous
étiez seul ?
106
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Illusions, hallucinations
TABLEAU 5.6. Hallucinations auditives et visuelles : associées aux
troubles psychiatriques et organiques du cerveau et à la consommation de drogues psychédéliques.
Hallucinations tactiles : au cours
du sevrage de l’alcool.
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Dépistage de l’anxiété
Les troubles anxieux et la dépression sont parmi les problèmes de
santé mentale les plus couramment observés dans les milieux de
soins de santé généraux. Les troubles anxieux sont communs, débilitants et souvent non traités. Toutefois, il est possible de faire un
dépistage rapide des principaux symptômes en posant les deux premières questions du questionnaire GAD-7 (Kroenke, Spitzer, Williams
et collab., 2007) FIGURE 5.1. Les résultats pouvant être obtenus pour
les deux premières questions varient de 0 à 6 ; un résultat de 0 suggère que la personne n’est pas atteinte de trouble anxieux. Si la personne répond aux deux premières questions par l’afrmative, il
est recommandé de poursuivre avec les cinq autres questions.
Cet outil permet de reconnaître les personnes atteintes d’un trouble
anxieux et de mesurer la gravité des symptômes présents.
Les quatre troubles anxieux les
plus souvent rencontrés sont :
1) le trouble d’anxiété généralisée;
2) le trouble panique ; 3) le trouble
d’anxiété sociale ; 4) le trouble
de stress post-traumatique
TABLEAU 5.10.
Q
uestion de suivi
Monsieur Gamache vous
semble anxieux ; quel outil
pourriez-vous utiliser an
d’objectiver davantage
votre évaluation ?
• Un résultat de 10
au GAD-7 traduit
la présence du
trouble d’anxiété
généralisé ; des
résultats de 5, 10 et
15 représentent
respectivement
des degrés léger,
modéré et grave
d’anxiété.
• Les symptômes
communs de la
dépression doivent
faire l’objet d’une
évaluation plus
poussée : insomnie, perte d’énergie,
perte du plaisir (anhédonie) et pensées suicidaires
TABLEAU 5.9.
FIGURE 5.1
GAD-7 – Dépistage de la dépression
Mis au point par les Drs Robert L. Spitzer, Janet B.W. Williams, Kurt Kroenke
et collègues, grâce à une bourse de Pzer Inc.
Selon une revue systématique effectuée par le Canadian Task
Force on Preventive Health Care (2013), les résultats probants
sur les risques et les bénéces du dépistage de la dépression ne
permettent pas de justier un dépistage de routine de celle-ci
dans les milieux de soins de santé primaires. Toutefois, rester
attentif aux symptômes de la dépression.
Dépistage des pensées suicidaires
Lorsque la personne exprime des sentiments de tristesse, de
désespoir, de détresse ou de deuil, il est important d’évaluer la
possibilité du risque d’automutilation. Commencer par poser des
questions d’ordre général. Si les réponses sont afrmatives, continuer avec des questions plus précises.
• Vous êtes-vous senti désespéré au point de vous faire du mal ?
• Le suicide est un problème de
santé mentale évitable. Il s’est
classé au 9e rang comme principale cause de décès au Canada
et au 2e rang chez les jeunes âgés
de 15 à 34 ans (Statistique Canada,
2012).
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
107
5
OBSERVATIONS NORMALES
• Sentez-vous que vous pourriez vous faire du mal maintenant ?
• Avez-vous établi un plan pour vous faire du mal ?
– Comment le feriez-vous ?
• Qu’arriverait-il à votre entourage (parents, amis) si vous étiez
mort ?
• Comment ces personnes réagiraient-elles si elles apprenaient
que vous étiez mort ?
Il est très difcile de questionner les gens sur leurs idées
suicidaires, spécialement pour les inrmières nouvellement
diplômées. Elles craignent d’être indiscrètes et peuvent éprouver un déni personnel à l’égard de la mort et du suicide. Cependant,
le risque augmente si l’inrmière évite de poser ces questions et
si elle a le moindre doute que celles-ci sont appropriées. L’inrmière
peut être la seule professionnelle de la santé à recueillir ces
indices de risque suicidaire. Elle doit encourager la personne à
parler de ses pensées suicidaires. Parfois, le suicide d’une personne vraiment décidée ne peut être empêché. Cependant, il est
possible d’aider les personnes ambivalentes – la majorité des
gens – à trouver une autre solution quant à leur situation. Il est
essentiel que l’inrmière partage ses préoccupations, concernant
l’idéation suicidaire d’une personne, avec d’autres professionnels de la santé mentale.
ANOMALIES
• Un plan précis devant mener
à un suicide dans les 24 à
48 heures, utilisant une méthode
létale, témoigne d’un très grand
risque. Voici quelques indices
et signes d’avertissement importants d’un suicide :
– tentatives antérieures de
suicide ;
– dépression, désespoir ;
– présence d’armes à feu dans
la maison ;
– antécédent familial de
suicide ;
– incarcération ;
– violence familiale incluant
sévices physiques ou sexuels ;
– retrait social, fuite ;
– automutilation ;
– hypersomnie ou insomnie ;
– activité psychomotrice lente ;
– anorexie ;
– messages verbaux de suicide
(défaite, échec, dévalorisation, perte, abandon, désir de
se suicider) ;
– thèmes de la mort exprimés
à travers les arts, les plaisanteries, les écrits, les
comportements ;
6
– messages d’adieu (en donnant
ses possessions de valeur).
Les signes cliniques qui
révèlent un trouble lié à la
consommation d’alcool ou
de drogues sont présentés
dans le tableau 6.5 du chapitre 6, Évaluation de la
consommation de
substances.
La Faculté de médecine de
l’Université Laval propose un
outil permettant de faire passer
le test de Folstein, le test MoCA
et le test de l’horloge. Il peut
être consulté au www.fmed.
ulaval.ca. Une version PDF de
l’examen de Folstein sur l’état
mental peut être consultée au
http:msssa4.msss.gouv.qc.ca.
108
Partie 1
• Extraits des nouveaux critères
du DSM-5 sur les problèmes
mentaux : délirium, troubles neurocognitifs et troubles amnésiques TABLEAU 5.7 ; problèmes
associés à la consommation de
drogues
6 ; schizophrénie
TABLEAU 5.8 ; troubles de l’humeur TABLEAU 5.9 ; troubles
anxieux TABLEAU 5.10.
EXAMENS SUPPLÉMENTAIRES DE L’ÉTAT MENTAL
Il existe plusieurs outils d’évaluation de l’état mental permettant
d’estimer les fonctions mentales et cognitives tels que le MiniMental State Examination (MMSE ou Test de Folstein), le Montreal
Cognitive Assessment (MoCA) ou le test de l’horloge.
Le test MoCA est un outil d’évaluation de la fonction cognitive qui permet de déceler des déciences cognitives légères
(Nasreddine, Phillips, Bédirian et collab., 2005) FIGURE 5.2. Le
test évalue plusieurs fonctions : la concentration, l’attention, les
Évaluation globale de la personne
Un résultat inférieur à 26 exige
une évaluation approfondie de la
fonction cognitive, car il est probable que la personne soit atteinte
d’une décience cognitive légère
ou modérée (signe précoce de la
démence).
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
fonctions exécutives, les capacités visuoconstructives, la mémoire,
le langage, les capacités d’abstraction, le calcul et l’orientation. Le
MoCA est un test de 1 page et ne prend que 10 minutes à faire passer. Le nombre maximum de points pouvant être obtenus est de 30 ;
un résultat supérieur ou égal à 26 est considéré comme normal.
5
FIGURE 5.2
Test MoCA
Droit d’auteur Z. Nasreddine MD.
Reproduit avec permission. Copies
disponibles au www.mocatest.
org/pdf_les/test/MoCA-TestFrench_7_1.pdf
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
109
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT
Nourrissons et enfants
L’évaluation de l’état mental des nourrissons et des enfants
comporte le développement comportemental, cognitif et psychosocial et examine comment l’enfant compose avec son environnement. Essentiellement, il faut suivre la même démarche
que celle associée aux aspects de l’adulte (apparence, comportement, fonctions cognitives et processus de la pensée [A-CC-P]), avec une considération spéciale pour les étapes de
développement. Les troubles relèvent souvent de problèmes
d’omission ; l’enfant n’arrive pas à atteindre l’étape de développement anticipée.
L’histoire de santé des parents, spécialement les sections portant sur l’histoire du développement et l’histoire personnelle,
contient la plupart des données sur l’état mental de l’enfant.
De plus, le test de dépistage de Denver II permet d’interagir directement avec un jeune enfant pour évaluer son état mental. En outre,
il sert à déceler, chez l’enfant âgé de zéro à six ans, les retards de
développement du comportement, du langage, de la cognition et
du volet psychosocial. L’examen de dépistage de l’articulation de
Denver est un test complémentaire portant sur le langage.
Pour les enfants d’âge scolaire, de 7 à 11 ans, qui ont grandi
au-delà de l’âge (ou qui sont plus matures que leur âge) où les
étapes de développement sont très utiles, la « liste de contrôle
des comportements » est un outil complémentaire qui peut
être donné aux parents avec celui de l’histoire de santé
ENCADRÉ 5.2.
ENCADRÉ 5.2
Liste de contrôle des comportements pour les enfants de 7 à 11 ans
1. Préfère jouer seul.
2. Se blesse dans des accidents majeurs.
3. Joue-t-il avec le feu ?
4. A des difcultés avec les enseignants.
5. Obtient de faibles notes à l’école.
6. S’absente de l’école.
7. Se fâche facilement.
8. S’adonne à des rêveries.
9. Se sent malheureux.
10. A un comportement plus jeune que celui
des autres enfants de son âge.
11. N’écoute pas ses parents.
12. Ne dit pas la vérité.
13. N’est pas sûr de lui.
14. A de la difculté à dormir.
15. Semble avoir peur de quelqu’un ou de quelque chose.
16. Est nerveux ou agité.
17. A une habitude nerveuse.
18. Ne montre pas ses émotions.
19. Se bat avec les autres enfants.
20. Est compréhensif à l’égard des sentiments des autres.
21. Refuse de partager.
22. Manifeste de la jalousie.
23. Prend des choses qui ne sont pas les siennes.
24. Accuse les autres pour les problèmes qu’il a pu causer.
25. Préfère jouer avec des enfants qui ne sont pas
de son âge.
26. S’entend bien avec les adultes.
27. Taquine les autres.
Le système de points correspond à : 0 – jamais ; 1 – quelquefois ; 2 – souvent. Le pointage est inversé pour les éléments 20 et 26 (jamais = 2 et
souvent = 0). Un résultat se situant entre 15 et 22 exige un suivi de près ; un pointage au-dessus de 22 justie une évaluation psychiatrique.
Source : Adapté de Jellinek, Evans et Knight (1979)
110
Partie 1
Évaluation globale de la personne
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Il couvre cinq aspects majeurs : 1) l’humeur ; 2) le jeu ; 3) l’école ;
4) les amis ; 5) les relations familiales. Il est facile à faire passer
et dure environ cinq minutes.
Pour les adolescents, suivre les mêmes directives des éléments
de l’A-C-C-P décrites pour l’adulte.
Adultes vieillissants
Il est important d’effectuer un examen, même bref, auprès de toutes
les personnes âgées admises au centre hospitalier. Il est facile de
mal diagnostiquer la confusion, courante chez les personnes vieillissantes. Entre le tiers et la moitié des adultes plus âgés admis
dans les services médicaux et chirurgicaux, pour des soins aigus,
manifestent des degrés variés de confusion, déjà présente (Inouye,
2006). Il est estimé qu’environ 750 000 Canadiens sont atteints de
la maladie d’Alzheimer et de maladies apparentées, ce qui représente 14,9 % des Canadiens âgés de 65 ans et plus (Société d’Alzheimer du Canada, 2012).
5
• Le délirium est un état de confusion aiguë ou une perturbation
de la conscience et de la perception. Il peut accompagner
une maladie aiguë (p. ex., une
pneumonie), la consommation
d’alcool ou de médicaments et
il se résorbe habituellement
quand la cause sous-jacente
est traitée.
• Au contraire, le trouble neurocognitif est un processus
graduel qui provoque une détérioration progressive et irréversible du fonctionnement cognitif
de la personne, bien que celle-ci
soit pleinement consciente et
éveillée. La maladie d’Alzheimer
représente environ les deux tiers
des cas de trouble neurocognitif chez les adultes vieillissants
TABLEAU 5.7 . Le trouble neurocognitif ne fait pas partie du
vieillissement normal.
Q
uestion de suivi
Vérier l’état sensoriel avant d’évaluer tout autre aspect de l’état
mental. La vision et l’audition changent avec l’âge, ce qui peut
altérer la vigilance et donner l’impression que la personne
n’est pas alerte. Lorsque les gens âgés n’entendent pas clairement
les questions de l’inrmière, leurs résultats aux tests peuvent être
inférieurs à ceux attendus et ne pas reéter la réalité. Les personnes âgées ayant un trouble psychiatrique obtiennent des résultats signicativement supérieurs lorsqu’elles portent un appareil
auditif. Il faut suivre ici les mêmes directives relatives aux aspects
de l’A-C-C-P décrites pour l’adulte plus jeune, en tenant compte
des considérations additionnelles suivantes.
Si monsieur Gamache avait
78 ans, que devriez-vous
évaluer avant de commencer
l’évaluation de l’état mental
an de vous assurer de la
abilité de celle-ci ?
Comportement
Niveau de conscience Dans un centre hospitalier ou un établissement de soins de longue durée, l’échelle de coma de Glasgow
est un instrument de mesure quantitative utile pour vérier la
conscience des adultes vieillissants, chez qui la confusion est
fréquente. Il accorde une valeur numérique aux réponses de la
personne, selon trois catégories : 1) les yeux ouverts ; 2) la meilleure réponse verbale ; 3) la meilleure réponse motrice. Ce système évite l’ambiguïté lorsque plusieurs inrmières prennent
soin de la même personne.
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
111
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Fonctions cognitives
Orientation Plusieurs adultes vieillissants expérimentent l’isolement social : par la perte d’un cadre de vie – sans emploi à
l’extérieur –, par un changement de lieu de résidence ou par
certaines pertes de mémoire, de courte durée. Ces facteurs nuisent
à l’orientation, et la personne peut ne pas être en mesure de
fournir la date précise ou le nom complet de l’établissement où
elle se trouve. On considère que les adultes vieillissants sont
orientés lorsqu’ils savent généralement où ils se trouvent et reconnaissent le moment présent. Ainsi, ils sont orientés dans le temps
s’ils nomment l’année et le mois courants correctement et orientés dans le lieu s’ils reconnaissent le milieu (p. ex., le centre
hospitalier) et le nom de la ville où ils sont.
Nouvel apprentissage Chez les personnes ayant un fonctionnement cognitif normal, un déclin, lié à l’âge, survient
dans l’exécution du test des quatre mots (non reliés entre
eux). En moyenne, les personnes âgées d’environ 80 ans se
souviennent de 2 mots sur 4 après 5 minutes. Elles accroissent leur performance après 10 et 30 mi nutes avec l’aide
d’un rappel d’indices verbaux (p. ex. : « Un des mots était
une couleur ; l’autre représente une fleur commune en
Hollande. »).
Les personnes atteintes de la
maladie d’Alzheimer n’améliorent pas leur performance dans les
essais subséquents.
Examen supplémentaire de l’état mental
Mini-Cog Le Mini-Cog est un outil de dépistage des troubles
cognitifs qui est rapide, efcace et facilement accessible (Borson,
Scanlan Watanabe et collab., 2006 ; Brodaty, Low, Gibson et
collab., 2006). Il peut être utilisé avec une variété de niveaux
d’alphabétisation, et ce, dans plusieurs langues et cultures.
De plus, il ne prend que trois à cinq minutes à faire passer. Le
Mini-Cog comporte un test de rappel de trois mots et le test
de l’horloge.
Demander à la personne âgée d’écouter attentivement et de se
souvenir des trois mots que l’inrmière lui dira an de pouvoir
les répéter. S’assurer qu’il n’y a pas de sources de distraction et
que la personne peut bien l’entendre. Les mots doivent être courts
et non reliés.
Dire à la personne : « Écoutez-moi attentivement. Je vais prononcer trois mots. Répétez ces mots quand j’arrêterai. Êtes-vous
prêt ? Tasse (pause), train (pause), bleu. Maintenant, répétez ces
mots. » Ensuite, donner une feuille de papier vierge à la personne et lui dire : « Maintenant, je veux que vous dessiniez une
horloge et que vous y inscriviez tous les chiffres. Ensuite, je veux
que vous y dessiniez les aiguilles pour que l’horloge indique
qu’il est 11 h 10. » Puis : « Vous souvenez-vous des trois mots
que vous avez répétés ? Je veux que vous me les répétiez
maintenant. »
Le Mini-Cog permet d’évaluer le fonctionnement exécutif de
la personne, y compris sa capacité de planication, de gestion
du temps et d’organisation d’activités (Doerflinger, 2007).
Une personne qui n’a pas d’atteinte à la fonction cognitive est
capable de se rappeler les trois mots et de dessiner une horloge
complète et ronde avec tous les chiffres au bon endroit et les
aiguilles indiquant l’heure demandée.
112
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Être capable de se souvenir de un
ou de deux mots indique un
trouble neurocognitif potentiel ; se
souvenir d’aucun mot traduit la
présence d’un trouble neurocognitif . Dessiner une horloge anormale
(chiffres au mauvais endroit, entassés ou dans un mauvais ordre ;
aiguilles au mauvais endroit)
révèle un trouble cognitif.
5.4 Anomalies
Les TABLEAUX 5.1 à 5.3 présentent la terminologie associée aux niveaux de conscience, aux troubles du langage, ainsi qu’aux
anomalies de l’humeur et de l’affect.
TABLEAU 5.1
Niveaux de conscience
Les termes expliqués ci-dessous sont couramment utilisés en pratique clinique. Ils s’appliquent à un continuum de niveaux de conscience allant du plein éveil au
coma profond
23 . Les termes sont qualitatifs, et, par conséquent, ils ne sont pas toujours ables. Ces termes sont largement acceptés, mais ils ne s’avèrent
utiles que si tous les intervenants s’entendent sur leur dénition et sont conséquents dans leur application. An d’être plus clair dans l’utilisation de ces termes,
noter aussi les éléments suivants.
1. Le niveau de stimulus utilisé, selon la progression suivante :
2. La réponse de la personne :
a. Appel du nom de la personne en utilisant un ton de voix normal
a. Quantité et qualité du mouvement
b. Appel du nom à voix haute
b. Présence et cohérence du langage
c. Contact délicat sur le bras de la personne
d. Secousse vigoureuse sur l’épaule
c. Ouverture et contact des yeux
3. Que fait la personne lorsqu’il y a arrêt du stimulus ?
e. Application d’un stimulus douloureux
(1) Alerte
La personne est éveillée ou aisément réveillée, orientée, pleinement consciente des stimulus internes et externes et y répond adéquatement, elle entretient des
interactions interpersonnelles signicatives.
(2) Léthargique (ou somnolente)
La personne n’est pas complètement alerte, portée à dormir lorsqu’elle n’est pas stimulée, peut être réveillée lorsqu’on dit son nom avec une voix normale, mais
semble somnolente. Elle répond convenablement aux questions ou aux ordres, mais la pensée est lente et confuse ; elle est inattentive avec perte du l des idées
et diminution des mouvements spontanés.
(3) Obnubilée
État de transition entre la léthargie et la stupeur ; certaines sources omettent ce niveau. La personne dort la plupart du temps, est difcile à réveiller (a besoin
d’entendre un cri fort ou d’être secouée vigoureusement), agit confusément lorsqu’elle est éveillée, converse par monosyllabes ; le langage peut être marmonné et
incohérent ; elle requiert une stimulation constante, même pour une coopération minimale.
(4) Stupeur ou semi-coma
La personne est spontanément inconsciente, répond seulement à une secousse persistante et vigoureuse ou par de la douleur ; elle a des réponses motrices appropriées (p. ex., elle retire la main pour éviter la douleur) ; autrement, elle ne peut que gémir, marmonner ou bouger nerveusement ; persistance d’activités de réexe.
(5) Coma
La personne est complètement inconsciente, ne répond pas à la douleur ou aux stimulus externes ou internes (p. ex., elle ne cherche pas à repousser le cathéter
pendant une succion). Dans un coma léger, certaines activités de réexe sont notées, mais il n’y a aucun mouvement intentionné, planié. Dans le coma profond,
il n’y a aucune réponse motrice.
État de confusion aiguë (délirium)
Obscurcissement de la conscience (affaiblissement de la connaissance et de la vigilance) ; la personne est inattentive, sa conv ersation est incohérente, sa
mémoire de travail se trouve affaiblie, et elle fabule sur les événements récents. Elle est souvent agitée et a des hallucinations visuelles ; elle est désorientée
avec de la confusion, laquelle est pire la nuit alors que les stimulus environnementaux sont diminués.
Source : Adapté de Strub et Black (2000). Reproduit avec permission.
23
L’échelle du coma de Glasgow, présentée
dans la gure 23.59 du chapitre 23,
Système neurologique, est un outil
quantitatif qui sert à mesurer le niveau
de conscience et qui élimine l’ambiguïté.
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
113
5
Troubles du langage
TABLEAU 5.2
CONDITION
TROUBLE
DESCRIPTION
Aphasie
Atteinte de l’émission ou de la compréhension du langage secondaire à un dommage
au cerveau
Véritable trouble du langage, défaut dans le choix des mots et de la
grammaire ou défaut dans la compréhension ; le problème se situe
dans le processus du langage intégratif supérieur.
Dysarthrie
De l’articulation
Les sons du langage sont altérés ; le discours peut apparaître inintelli gible ; le langage de base (choix des mots, grammaire, compréhension)
est intact.
Dysphonie
De la voix
Difculté ou inconfort à parler, le ton ou le volume est anormal en raison d’un problème laryngien. La voix semble enrouée ou basse, mais
l’articulation et le langage sont intacts.
Types d’aphasie
Une dichotomie antérieure classiait les aphasies comme étant expressives (difculté à produire le langage) ou réceptives (dif culté à comprendre le langage).
Les personnes atteintes d’aphasie éprouvent quelques difcultés d’expression, d’où une tendance à toutes les classier comme étant expressives. Pour aider les
inrmières moins expérimentées, le système qui suit présente une description plus détaillée de diverses conditions.
CONDITION
DESCRIPTION
Aphasie motrice du langage
(ou a phasie de Broca)
Aphasie expressive. La personne peut comprendre le langage, mais ne peut s’exprimer par celui-ci. Son discours est difcile, dysarthrique et requiert beaucoup d’efforts. Il est principalement constitué de noms et de verbes (mots riches en
contenu) avec peu de prépositions ou il est « télégraphique ». La répétition et la lecture, à voix haute, sont gravement
atteintes. La compréhension auditive et celle de la lecture sont étonnamment intactes. La lésion se situe dans l’aire
antérieure du langage, appelée aire motrice du langage (ou aire de Broca).
Aphasie de compréhension du langage (ou aphasie de Wernicke)
Aphasie réceptive. Celle-ci est l’opposé linguistique de l’aphasie motrice du langage. La personne peut entendre des
sons et des mots, mais elle ne peut les relier à des expériences antérieures. Le discours est facile, sans effort et bien
articulé, mais il présente plusieurs paraphasies (substitution de mots qui sont difformes ou incorrects), des néologismes
(invention de mots) et souvent un manque de mots substantifs. Le discours peut aussi être totalement incompréhensible.
Souvent, il y a une grande impulsion à parler. La répétition, la lecture et l’écriture sont aussi altérées. La lésion se situe
dans l’aire postérieure du langage, appelée aire de compréhension du langage (ou aire de Wernicke).
Aphasie globale
Dans la forme la plus commune et majeure, le langage spontané est absent ou réduit à quelques mots ou il est stéréotypé.
La compréhension est absente ou réduite seulement au nom propre de la personne et à la sélection de quelques mots. La
répétition, la lecture et l’écriture sont gravement affaiblies. Le pronostic pour le recouvrement du langage est pauvre, à
cause d’une lésion importante qui endommage la plupart des aires combinées antérieures et postérieures du langage.
Anomalies de l’humeur et de l’affect
TABLEAU 5.3
TYPE D’HUMEUR OU D’AFFECT
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Affect émoussé
Manque de réponses émotives ; aucune expression de
sentiment ; voix monotone et visage immobile.
Les sujets de conversation varient sans que l’expression du
visage change.
Affect inapproprié
Affect clairement discordant avec le contenu du discours
de la personne.
La personne rit alors qu’elle discute de son admission pour
une biopsie du foie.
Ambivalence
Présence d’émotions opposées envers une idée, un
objet, une personne.
La personne éprouve, en même temps, de l’amour et de la
haine envers une autre personne.
Anxiété
Inquiétude, la personne est troublée, craintive par anticipation d’un danger dont la source est inconnue.
« Je me sens nerveuse et très tendue. » « Je m’inquiète tout
le temps. » « Je n’arrive pas à prendre une décision. »
Dépersonnalisation (manque
de délimitation de l’ego)
Perte de l’identité ; la personne se sent aliénée, perplexe
concernant sa propre identité et le sens de l’existence.
« Je ne me sens pas réelle. » « Je me sens comme n’étant
pas vraiment ici. »
114
Partie 1
Évaluation globale de la personne
TABLEAU 5.3
Anomalies de l’humeur et de l’affect (suite)
TYPE D’HUMEUR OU D’AFFECT
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Dépression
Tristesse, mélancolie, abattement ; les symptômes
peuvent apparaître quand le temps est pluvieux, après
une fête ou en cas de problème de santé ; si la situation
est temporaire, les symptômes disparaissent rapidement.
« J’ai les bleus. » « Je suis down. » « Je n’éprouve plus de
plaisir à faire des choses que j’aime habituellement. »
Euphorie
Bien-être excessif ; la personne est exceptionnellement
gaie ou exaltée, ce qui est peu approprié, considérant la
condition physique et mentale associée à un problème
de l’humeur.
« Je suis high. » « Je me sens comme si je volais. » « Je me
sens au-dessus du monde. »
Exaltation
Joie et optimisme, conance aveugle, activités motrices
accrues qui ne constituent pas nécessairement un problème de santé.
« Je me sens heureuse à la folie. »
Irritabilité
Sentiment de contrariété, la personne est facilement
provoquée, impatiente.
La personne intériorise un sentiment de tension, et il suft
d’un faible stimulus pour qu’elle l’extériorise.
Labilité
Changement rapide des émotions.
La personne exprime de l’euphorie, du larmoiement et de la
colère, lesquels se succèdent rapidement.
Peur
Inquiétude, la personne est troublée, craintive ; le danger
externe est connu et reconnu.
La personne a peur de prendre l’avion.
Rage
Perte de contrôle ; la personne est furieuse.
La personne présente un comportement violent envers ellemême ou les autres.
5.5 Anomalies pour une pratique avancée
Les TABLEAUX 5.4 à 5.10 présentent les troubles du processus de la pensée et les troubles de la pensée, les troubles de la perception,
le délirium, les troubles cognitifs et les troubles amnésiques, ainsi que la schizophrénie, les troubles de l’humeur et les troubles
anxieux.
TABLEAU 5.4
Troubles du processus de la pensée
TYPE DE PROCESSUS
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Associations lâches
Passage d’un sujet à un autre sans qu’ils soient liés ; la personne ne
semble pas consciente que les sujets sont sans rapport entre eux.
« Mon patron est fâché contre moi, et ce n’était même pas ma
faute. (pause) J’ai aussi vu le lm de Piaf. Je me suis sentie
vraiment mal à ce sujet. Mais elle continuait à essayer de faire
atterrir l’avion, et elle n’a jamais su ce qui se passait. »
Association sonore
Choix de mots basés sur le son, non sur le sens, incluant des
rimes et des calembours de non-sens.
« Mes pieds sont froids. Froid, droit, loi. La cloche a sonné pour
moi. »
Blocage
Interruption soudaine du l de la pensée ; la personne est incapable de compléter ses phrases, ce qui semble lié à une forte
émotion.
« J’ai oublié ce que je voulais dire. »
Circonlocution
Expression indirecte de la pensée, substitution d’une phrase
lorsque la personne ne peut se souvenir du nom d’un objet.
Elle dit « la chose avec laquelle vous ouvrez la porte » au lieu
de « clé ».
Écholalie
Imitation, répétition des mots ou des phrases d’autres per sonnes, souvent en marmonnant, d’un ton moqueur ou d’une
façon mécanique.
L’inrmière : « Je veux que vous preniez votre pilule. » La personne (moqueuse) : « Prenez votre pilule. Prenez votre pilule. »
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
115
5
Troubles du processus de la pensée (suite)
TABLEAU 5.4
TYPE DE PROCESSUS
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Fabulation
Façonnement des événements pour remplir les trous de
mémoire.
La personne donne une description détaillée de sa longue promenade autour du centre hospitalier alors que son entourage
sait qu’elle est demeurée dans sa chambre tout l’après-midi.
Fuite des idées
Changement brusque de sujet. La personne saute rapidement
d’un sujet à l’autre, et son discours est presque un ot accéléré
et continu de paroles ; ses propos sont ordinairement constitués
d’associations reconnaissables ou de jeux de mots.
« Prendre cette pilule ? La pilule est bleue. J’ai “les bleus” (elle
chante). Elle portait du velours bleu. »
Logorrhée
Loquacité excessive, surabondance démesurée du discours avec
une vitesse accélérée.
La personne tient un discours fragmenté et dénué de sens. Elle
saute du coq à l’âne. Son rythme est rapide et difcile à suivre.
Néologisme
Création d’un mot nouveau ; celui-ci peut être un condensé
de plusieurs mots ; le mot inventé n’a pas de véritable sens,
excepté pour la personne qui l’a émis.
« J’ai à mettre en marche mon “penséelateur”. »
Persévération
Persistance de répétition d’une même réponse verbale ou
motrice même avec des stimulus variés.
« Je vais fermer la porte à clé, la porte à clé. Je marche
chaque jour et je ferme la porte à clé. Je prends ordinairement
le chien avec moi et je ferme la porte à clé. »
Proxilité circonlocutoire
Utilisation de détails de façon excessive et inutile, la personne
tarde à conclure ; ses phrases ont un rapport de sens, mais elles
sont sans importance (cela survient chez certaines personnes
normales).
« Quand a eu lieu ma chirurgie ? Bien, j’avais 28 ans, je vivais
avec ma tante qui a du psoriasis, elle l’a eu gravement, cette
année, avec la chaleur, qui a été pire que celle de l’été
1992… »
Salade de mots
Mélange incohérent de mots, de phrases et de jugements ;
discours illogiques, décousus, incluant des néologismes.
« Beauté, base rouge cinq, pigeon, le coin de la rue, en quelque
sorte. »
Tangentialité
Incapacité à produire des associations de pensée orientées vers
un but. La personne s’éloigne de plus en plus du but à un tel point
qu’elle n’y répond jamais.
« Je n’ai pas de nom, j’ai tous les âges, le fluide éternel qui
coule dans mes veines ; de l’or ; je vois ce que vous pensez, j’ai
un troisième œil qui tourne dans mon cerveau. Je sais que vous
voulez m’appauvrir, mais vous ne m’aurez pas. »
Troubles de la pensée
TABLEAU 5.5
TYPE DE PENSÉE
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Compulsion
Acte intentionnel, répétitif, non désiré ; la personne se sent
contrainte à agir ; le comportement est perçu comme pouvant
neutraliser ou prévenir l’inconfort ou un événement redouté.
Lavage répété des mains ; compter et recompter ; vérifier et
revérier ; toucher.
Obsession
Pensées ou impulsions persistantes non désirées ; la logique ne
les éliminera pas de la conscience ; elles sont vécues comme
étant inopportunes et insensées.
Violence (le parent ayant une impulsion répétée de tuer son
enfant bien-aimé) ; contamination (la personne craint de devenir infectée en serrant la main des gens).
Hypocondrie
Morbide inquiétude concernant sa propre santé. La personne se
sent malade, mais sans fondement.
Peur d’avoir le cancer ; n’importe quel symptôme est associé
au cancer.
Idées délirantes
Croyances fausses, fermes, arrêtées et fixes ; irrationalité ; la
personne s’accroche à l’illusion, en dépit de l’évidence objective
du contraire.
Idées de grandeur : la personne croit qu’elle est Dieu, un personnage célèbre ou historique, une gure sportive reconnue ou
toute autre personne bien connue ; idée de persécution : « Ils
sont là pour m’avoir. »
Phobie
Peur intense, persistante, irrationnelle d’un objet ou d’une situation ; la personne se sent contrainte d’éviter l’objet ou la situation.
Chats, chiens, hauteurs, espaces clos.
116
Partie 1
Évaluation globale de la personne
TABLEAU 5.6
Troubles de la perception
TYPE DE PERCEPTION
DÉFINITION
EXEMPLE CLINIQUE
Hallucinations
Perceptions sensorielles pour lesquelles il n’y a pas de
stimulus externes ; elles peuvent toucher n’importe
quel sens : visuel, auditif, tactile, olfactif, gustatif.
Visuel : voir une image (fantôme) d’une personne qui n’est pas là ;
auditif : entendre des voix ou de la musique ; tactile : ressentir une
brûlure au toucher ; olfactif : sentir des odeurs absentes ; gustatif :
avoir un goût anormal et souvent désagréable des aliments.
Illusion
Perception inappropriée d’un stimulus existant réellement, par n’importe quel sens.
Les plis, dans les draps du lit, semblent animés.
TABLEAU 5.7
5
Délirium, troubles neurocognitifs et troubles amnésiques
TROUBLE
CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
État confusionnel (délirium)
A. Une perturbation de l’attention (c.-à-d. une diminution de la capacité à diriger, focaliser, soutenir et déplacer son attention)
et de la conscience (diminution de l’orientation dans l’environnement).
B. Un changement dans la connaissance (décit de la mémoire, désorientation, trouble du langage) ou le développement d’un
trouble de la perception.
C. Le problème se développe sur une courte période de temps (ordinairement de quelques heures à quelques jours) et tend à
uctuer au cours de la journée.
Le délirium peut être lié à une condition médicale générale : infections systémiques, dérèglement métabolique (p. ex., l’hypoxi e,
l’hypercapnie, l’hypoglycémie), déséquilibres électrolytiques ou liquidiens, maladies hépatiques ou rénales, carence en thiamine, états postopératoires, encéphalopathie hypertensive ou à la suite de convulsions ou d’un trauma crânien.
Le délirium peut aussi survenir à la suite d’une intoxication par une substance (abus de drogues, de médicaments ou exposition
à des toxines) ou par le sevrage d’une substance.
Trouble neurocognitif
léger et majeur
A. Il y a présence d’une détérioration par rapport à un meilleur fonctionnement antérieur dans un domaine cognitif ou plus
(attention, fonctionnement exécutif, apprentissage et mémoire, langage, perception et motricité ou cognition sociale).
B. Les décits cognitifs doivent être sufsamment importants pour perturber l’indépendance dans les activités quotidiennes.
Il y a différents sous-types de troubles neurocognitifs légers ou majeurs selon leur étiologie : trouble dû à la maladie d’Alzheimer, à une lésion cérébrale traumatique, à la maladie de Parkinson, à une infection par le virus de l’immunodécience humaine
(VIH), à une maladie vasculaire, à l’usage d’un médicament ou d’une substance, etc.
Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre.
TABLEAU 5.8
Symptômes
caractéristiques
Schizophréniea
Deux des symptômes suivants ou plus doivent être présents pour une période importante à l’intérieur de un mois (au moins un de
ces symptômes doit être parmi les trois premiers) :
1. Illusions, soit l’interprétation erronée de la perception sensorielle de faits ou d’objets réels, telles que la radiodiffusion de la
pensée, être sous l’emprise d’une personne décédée.
2. Hallucinations (les hallucinations auditives sont les plus communes), par exemple des voix parlent directement à la personne ou
font des commentaires sur les comportements de celle-ci.
3. Discours désorganisé, par exemple un déraillement fréquent ou de l’incohérence.
4. Comportement désorganisé ou catatonique.
5. Symptômes négatifs, soit affaissement affectif, mutisme (incapacité à parler) ou absence de volonté.
a
Dysfonctionnement
professionnel et social
Un domaine majeur de fonctionnement ou plus comme celui du travail, des relations interpersonnelles et des soins personnels se
situent nettement sous le niveau atteint avant le début du problème de santé.
Durée
Les signes persistent pendant au moins six mois, dont au moins un mois où se manifestent des symptômes du critère A ci-dessus
(phase active) et qui peuvent inclure des périodes de symptômes prémonitoires ou résiduels (persistants).
Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour la description
d’autres catégories et des sous-types de schizophrénie tels que le type paranoïde, catatonique ou désorganisé.
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
117
TABLEAU 5.9
Troubles de l’humeur a
TROUBLE
CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
Épisode dépressif
majeur
A. Au moins cinq des symptômes suivants ont été présents pendant une même période de deux semaines et ont représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est : 1) une humeur dépressive ou 2) une perte d’intérêt ou
de plaisir.
Note : ne pas inclure les symptômes qui découlent manifestement d’une condition médicale générale, d’illusions ou d’hallucinations.
1. Humeur dépressive presque toute la journée et presque chaque jour telle qu’indiquée par un rapport subjectif (p. ex., la personne se
sent triste ou vide) ou par les observations d’autres personnes (p. ex., la personne semble larmoyante).
Note : les enfants et les adolescents peuvent présenter une humeur irritable.
2. Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir dans toutes ou presque toutes les activités, presque toute la journée et prati quement
chaque jour (signalée par la personne ou observée par les autres).
3. Perte importante de poids, sans être au régime, ou gain de poids (p. ex., un changement de poids > 5 % pendant 1 mois), ou diminution ou augmentation de l’appétit, presque chaque jour.
Note : chez les enfants, il faut considérer la non-atteinte du gain de poids attendu.
4. Insomnie ou hypersomnie, presque chaque jour.
5. Agitation psychomotrice ou retard psychomoteur, presque chaque jour.
6. Fatigue ou perte d’énergie, presque chaque jour.
7. Sentiments de dévalorisation ou culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante), presque chaque jour.
8. Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision, presque chaque jour.
9. Pensées récurrentes sur la mort (pas seulement la peur de mourir), idées suicidaires récurrentes, sans plan précis, ou tentative de
suicide ou plan précis pour se suicider.
B. Les symptômes causent de la détresse clinique importante ou la détérioration du fonctionnement social, professionnel ou ils touchent
d’autres aspects importants du fonctionnement.
C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex., l’abus de drogues, un médicament) ou à une
condition médicale générale (p. ex., l’hypothyroïdisme) ni causés par un deuil, comme celui de la perte d’un être cher (à moinsqu’ils ne
persistent plus de deux mois ou qu’ils ne soient caractérisés par une détérioration fonctionnelle, une préoccupation morbide av ec dévalorisation, une idée suicidaire, des symptômes psychotiques ou un retard psychomoteur).
Épisode
maniaque
A. Une période distincte d’une humeur persistante et anormalement élevée, expansive ou irritable pendant au moins une semaine (ou de
toute autre durée si l’hospitalisation est nécessaire).
B. Durant cette période de perturbation de l’humeur, trois (ou plus) des symptômes suivants ont persisté (quatre si l’humeur est seulement irritable).
1. Estime de soi exagérée ou emphatique.
2. Besoin de sommeil diminué (p. ex., la personne se sent reposée après seulement trois heures de sommeil).
3. Personne plus bavarde que d’habitude ou pressée à continuer à parler.
4. Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées se précipitent.
5. Distractibilité (p. ex., l’attention est trop facilement attirée vers des stimulus externes sans importance ou non pertinents).
6. Augmentation des activités dirigées vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice.
7. Engagement excessif dans des activités agréables qui ont un haut potentiel de conséquences douloureuses (p. ex., s’engager d ans
des achats sans restriction, s’adonner à des activités sexuelles non protégées ou faire des investissements nanciers insensés).
C. Le problème d’humeur est sufsamment grave pour causer une détérioration marquée dans le fonctionnement professionnel, dans les
activités sociales habituelles ou dans les relations interpersonnelles, ou il nécessite une hospitalisation pour prévenir des blessures à
soi-même ou à d’autres, ou la personne présente des traits psychotiques.
D. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex., un abus de drogues, de médicament) ou à une
condition médicale générale (p. ex., l’hyperthyroïdisme).
Le trouble dépressif majeur se caractérise par un épisode de dépression majeur ou plus (au moins deux semaines d’humeur dépressive ou
de perte d’intérêt accompagnée par au moins quatre symptômes supplémentaires de dépression) ; le trouble dépressif persistant (dysthymie) se caractérise par au moins deux ans d’humeur dépressive, où les jours de dépression sont plus nombreux que les jours où l’humeur
est normale, accompagnée de symptômes dépressifs supplémentaires ; les troubles bipolaires se caractérisent par un épisode maniaque
ou hypomaniaque ou plus accompagné d’épisodes de dépression majeurs.
a
Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour la description
d’autres catégories, comme ceux des problèmes de personnalité ou ceux de forme somatique.
Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre.
118
Partie 1
Évaluation globale de la personne
TABLEAU 5.10
Troubles anxieuxa
TROUBLE
CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
Agoraphobie
A. Une anxiété causée par le fait de se trouver dans des endroits ou de vivre des situations où la fuite peut être difcile (ou embarrassante), où l’aide ne peut pas être disponible au moment d’une attaque de panique ou en présence de symptômes similaires à la
panique ; l’agoraphobie regroupe, typiquement, la peur d’être seul, en dehors de la maison ; d’être dans une foule ou debout en ligne ; de
se trouver sur un pont ; de voyager en autobus, en train ou en automobile.
B. Les situations sont évitées (p. ex., des voyages restreints) ou sont endurées avec beaucoup de détresse ou vécues avec l’anxiété d’avoir
une attaque de panique ou des symptômes similaires de panique ; ou elles requièrent la présence d’une autre personne.
Attaque
de panique
Une période discrète de peur intense ou d’inconfort, dans laquelle quatre (ou plus) des symptômes suivants se développent abruptement,
et qui atteint un sommet à l’intérieur de 10 minutes.
1. Palpitations, battements frénétiques du cœur ou fréquence cardiaque accélérée
2. Transpiration
3. Tremblement ou agitation
4. Sensations de soufe court ou de suffocation
5. Sentiment d’étranglement
6. Douleur à la poitrine ou inconfort
7. Nausées ou douleur abdominale
8. Sensations de vertige, d’instabilité, d’étourdissement, d’évanouissement
9. Sentiment déréalisant (fait perdre le caractère du réel) ou dépersonnalisation (être détaché de soi-même)
10. Peur de perdre le contrôle ou de devenir fou
11. Peur de mourir
12. Paresthésie (sensation d’engourdissement ou de picotement)
13. Sueurs froides ou bouffées de chaleur
Phobie spécique
A. Une peur marquée et persistante de nature excessive ou déraisonnable provoquée par un objet ou une situation (p. ex., prendre l’avion,
craindre les hauteurs ou les animaux, recevoir une injection, voir du sang).
B. L’exposition au stimulus phobique provoque invariablement une réponse immédiate d’anxiété, laquelle peut être une crise de panique.
Note : chez les enfants, l’anxiété peut s’extérioriser par des pleurs, des crises de colère, par l’immobilité (« geler » sur place) ou en se
cramponnant à quelqu’un ou à quelque chose.
C. La personne reconnaît que la peur est excessive ou déraisonnable.
D. La situation phobique est évitée ou est endurée avec une anxiété intense ou avec détresse.
E. Cela entrave considérablement la routine normale de la personne, dans son fonctionnement professionnel (ou scolaire) ou dans ses
activités sociales ou relationnelles.
Trouble d’anxiété
généralisé
A. Une anxiété excessive et une inquiétude survenant la plupart du temps pendant au moins six mois, concernant un certain nombre d’événements ou d’activités (comme la performance au travail ou à l’école).
B. La personne trouve difcile de maîtriser son inquiétude.
C. L’anxiété et l’inquiétude sont associées à trois (ou plus) des éléments suivants.
1. Nervosité ou surexcitation
2. Fatigue rapide
3. Concentration difcile ou trou de mémoire
4. Irritabilité
5. Tension musculaire
D. Sommeil perturbé
Trouble d’anxiété
sociale (phobie
sociale)
A. Une peur marquée ou persistante à l’égard d’une situation sociale ou de performance ou plus. La personne est exposée à des gens
qu’elle ne connaît pas vraiment et qui peuvent l’observer minutieusement ; la personne craint d’agir de façon humiliante ou emb arrassante (ou de montrer ses symptômes d’anxiété).
B.–E. Identique à la phobie spécique.
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
119
5
TABLEAU 5.10
Troubles anxieuxa (suite)
TROUBLE
CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
Trouble de stress
post-traumatique
A. La personne a été exposée à des événements durant lesquels sa vie ou son intégrité physique a été menacée, l’exposant à desblessures
graves ou à la violence sexuelle de une façon ou plus.
1. Expérience personnelle de l’événement traumatique
2. Témoignage, en personne, de l’événement impliquant une autre personne
3. Prise de connaissance d’un événement traumatique subi par une personne de sa famille ou un ami
4. Exposition répétitive à des événements de nature semblable (p. ex., les ambulanciers, les policiers)
Elle a subi une menace de mort, a été témoin ou a été confrontée à la mort ou à une menace de mort, ou elle a risqué d’être sérieusement blessée.
La réponse de la personne implique une peur intense, de l’impuissance ou de l’horreur.
B. L’événement traumatique est réexpérimenté de façon persistante par la présence de un des symptômes intrusifs suivants ou plus.
1. Des souvenirs pénibles, importuns et récurrents de l’événement ; ils intègrent des pensées, des images ou des perceptions.
2. Des rêves pénibles et récurrents de l’événement.
3. Des réactions de dissociation (ashback ) pendant lesquelles la personne revit l’événement traumatique.
4. Une détresse psychologique intense ou prolongée en réponse à un signal interne ou externe lui rappelant l’événement traumatique.
C. La personne évite de façon persistante le stimulus associé au traumatisme et présente un « engourdissement » de ses réactions
générales (p. ex., un sentiment de détachement ou d’éloignement des autres, une incapacité à éprouver de l’affection, le sentiment d’un
avenir abrégé).
D. Symptômes persistants d’excitation accrue
1. Difculté à s’endormir ou à demeurer endormi
2. Irritabilité ou crise de colère
3. Difculté de concentration
4. Hypervigilance
5. Réponse exagérée de sursaut
Trouble
obsessionnelcompulsif
A. La personne a des obsessions :
1. Les pensées, les impulsions ou les idées récurrentes et persistantes sont vécues comme étant indésirables et inappropriées, et elles
causent une anxiété marquée ou de la détresse.
2. La personne cherche à ignorer ou à supprimer ses pensées, ses impulsions ou ses idées ou à les neutraliser avec une autre pensée
ou une action (p. ex., avec une compulsion).
ou des compulsions :
1. Des comportements répétitifs (p. ex., se laver les mains, ranger, vérier) ou des actes intellectuels (p. ex., prier, compter, répéter des
mots silencieusement) que la personne se sent forcée d’accomplir en réponse à une obsession ou conformément à des règles devant
être appliquées de façon rigide.
2. Les comportements ou les actes intellectuels ont pour objectifs de prévenir ou de réduire la détresse ou de prévenir une sit uation ou
un événement redouté.
B. Les obsessions ou les compulsions causent une grande détresse ; elles constituent une perte de temps ou une interférence considérable
dans la routine normale de la personne, dans son fonctionnement professionnel (ou scolaire) ou dans ses activités sociales ou relationnelles habituelles.
Trouble panique
A. Les deux symptômes suivants se manifestent.
1. Crises de panique inattendues et récurrentes (voir ci-dessus).
2. Un des éléments suivants ou plus perdurent pendant plus d’un mois à la suite des premières attaques de panique.
a. Inquiétude persistante d’avoir d’autres crises.
b. Inquiétude entourant les conséquences d’une crise (p. ex., perdre le contrôle, avoir une crise cardiaque, « devenir fou »).
c. Changement important dans le comportement associé aux crises.
B. L’agoraphobie peut être présente ou absente.
a
Ces catégories de diagnostics ont été prévues pour illustration et non pour être utilisées intégralement. Se référer à la source originale ou à un manuel de psychiatrie pour obtenir d’autres
détails et pour la description d’autres catégories de troubles anxieux.
Source : Adapté de American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA. Traduction libre.
120
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Évaluation et jugement clinique
Exemple de notes au dossier
Données objectives
• Apparence : posture de la personne droite, sans mouvements
involontaires du corps. Habillement et toilette appropriés pour
la saison et le contexte.
• Comportement : personne alerte, avec une expression faciale
appropriée et agréable et tient un langage compréhensible.
Affect et réponses verbales appropriés.
• Fonctions cognitives : personne orientée dans le temps, vers les
personnes et le lieu. Capable d’attention coopérative avec
les inrmières. Mémoire de travail et à long terme intacte. Peut
se rappeler les 4 mots (non reliés entre eux) aux intervalles de 5,
de 10 et de 30 minutes du test. Plans d’avenir comprennent le
retour à la maison et à l’université locale après établissement
de la thérapie individuelle et ajustement de la médication.
• Processus de la pensée et perceptions : processus de la pensée
et perceptions logiques et cohérents. Aucune idée suicidaire.
• Pointage du mini-examen de l’état mental de 28.
Exemple d’évaluation ciblée
Lorette P. est une femme de 79 ans, mariée et de race blanche,
hospitalisée récemment pour l’évaluation d’une augmentation de
pertes de mémoire, de confusion et de comportements sociaux
inappropriés. La famille rapporte qu’elle a diminué ses soins de
toilette et son hygiène ; elle mange très peu et a perdu du poids,
elle ne dort pas toute la nuit, a des sautes d’humeur empreintes
de colère qui sont peu conformes à sa conduite antérieure ; elle
ne reconnaît pas la plus jeune de ses petits-enfants. Son mari
raconte qu’elle s’est éloignée de la cuisinière alors qu’elle faisait
de la cuisson, laissant brûler la nourriture sur la plaque chauffante.
Il l’a aussi trouvée errant dans la maison, au milieu de la nuit,
incertaine du lieu où elle était. Elle avait l’habitude de « parler au
téléphone plusieurs heures », mais maintenant il doit l’inciter à
converser. Pendant la présente hospitalisation, elle a passé une
série de tests médicaux incluant un test négatif de ponction lombaire, un électroencéphalogramme normal et une tomographie
assistée par ordinateur de la tête. Son médecin suggère maintenant
un diagnostic de démence sénile de type Alzheimer.
Données objectives
• Apparence : assise calmement, quelque peu affaissée, tirant sur
les ls décousus de sa robe. Porte une veste munie d’une fermeture éclair et d’un capuchon par-dessus sa robe. Cheveux
négligemment attachés en queue de cheval. Aucun maquillage.
• Comportement : éveillée et regarde ses mains et ses genoux.
Affect émoussé, peu mobilisable. Établit un contact avec les
yeux lorsqu’on l’appelle par son nom, bien que le regard se xe
rapidement et retourne vite aux genoux. Discours un peu lent,
mais articulé ; quelques difcultés avec le choix des mots.
• Fonctions cognitives : orientée vers la personne et le lieu. Peut
nommer la saison, mais pas la journée de la semaine ou l’année.
Est incapable de répéter la séquence correcte de directives complexes, soit celle de soulever un verre d’eau et de le transférer
d’une main à l’autre. Enregistre un mot de rappel dans le test
des quatre mots (non reliés entre eux). Ne peut dire aux inrmières comment elle planierait un achat à l’épicerie.
• Processus de la pensée et perceptions : a des blocages dans le
déroulement de sa pensée. Contenu de la pensée logique. Agit
impatiemment et avec suspicion envers les membres de sa
famille. Pas d’idée suicidaire.
• Pointage du mini-examen de l’état mental de 17 ; montre que
la capacité de rappel est affaiblie et qu’une difculté majeure
existe avec la série de 7.
Évaluation
• Confusion chronique.
• Interaction sociale affaiblie.
• Mémoire affaiblie.
• Errance.
Dossier : Bernard Gamache (suite)
Vous amorcez l’entrevue en demandant à monsieur Gamache ce qui s’est passé pour que les
policiers l’amènent à l’urgence. Il vous dit : « Ils
me surveillent, me suivent… Ils veulent m’enlever ma liberté… Ils sont dans le complot ! »
Vous lui demandez ce qu’il entend par complot,
et il répond : « Codes secrets dans radio… télé
aussi, je dois prévenir… prévenir les hommes. »
Durant l’entrevue, vous remarquez que monsieur Gamache est sur ses gardes, il demeure à
l’affût du moindre bruit et il surveille régulièrement la porte de sa chambre. Après un moment,
il se lève du lit lentement et place le fauteuil de
façon à voir la porte avant de s’y asseoir en se
couvrant toujours la tête avec les couvertures.
Vous lui demandez s’il place les couvertures sur
sa tête parce qu’il a froid. Il vous répond que
vous êtes bien naïve et que c’est pour bloquer
les ondes de la police qui essaie de l’écouter à
distance.
Monsieur Gamache semble analyser ce que
vous dites et prend en moyenne de 20 à 30 secondes avant de vous répondre. Il vous paraît
anxieux, son visage afche peu d’expression,
mais il plisse les yeux et ne maintient pas le
contact visuel avec vous. À un moment durant
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
121
5
(suite)
l’entrevue, il se retourne sur sa droite et fait non
de la tête en xant le lit où il était assis quelques
minutes auparavant.
Tout au long de l’entrevue, il est orienté dans
les trois sphères, sa mémoire, autant de travail
qu’à long terme, semble intacte. Il est attentif à ce
que vous dites et suit bien la conversation, mais
son discours sur la police qui le piste et qui lui
veut du mal revient régulièrement. Il croit que
son voisin d’appartement est un informateur pour
les policiers. Il a refusé de participer au test
MoCA.
1. Vous souhaitez évaluer le jugement de monsieur Gamache ; formulez une question que vous pourriez
lui poser.
2. À partir des données dont vous disposez jusqu’à présent, comment évaluez-vous le jugement de
monsieur Gamache ?
3. Comment qualiez-vous la pensée de monsieur Gamache ?
4. Comment qualiez-vous le contenu de sa pensée ?
5. Le client présente-t-il un trouble de la perception ? Expliquez votre réponse.
6. Indiquez deux questions que vous pourriez lui poser an d’évaluer si monsieur Gamache a des
hallucinations.
7. Vous observez le visage de monsieur Gamache tout au long de l’entrevue ; il est peu expressif. Il ne
manifeste aucun signe de joie ou de tristesse. Il a froncé les sourcils lorsqu’il parlait de la police qui
le persécute, mais c’est tout. Il conserve le même ton de voix tout au long de l’entrevue et parle de
ce qu’il a vécu dans les dernières semaines avec un certain détachement. Comment qualieriez-vous
l’affect et l’humeur de monsieur Gamache ?
(suite)
L’entrevue avec monsieur Gamache est difcile.
Voici un exemple de phrase qu’il vous a dite
lorsque vous lui avez demandé s’il avait de la
famille proche que vous pourriez contacter : « Ma
sœur, c’est ma famille. La famille Desmarais est
milliardaire. Comme les étoiles dans le ciel. Les
étoiles me surveillent et volent mes idées. Idéx,
c’est un chien. Hot dog, c’est le nom d’un lm. »
8. Comment qualieriez-vous le cours de la pensée et le discours de monsieur Gamache ? Expliquez
votre réponse.
9. Rédigez la note au dossier à la suite de l’évaluation de l’état mental de monsieur Gamache.
10. Indiquez un constat prioritaire et trois directives au plan thérapeutique inrmier (PTI) de monsieur Gamache.
Extrait
CONSTATS DE L’ÉVALUATION
Date
Heure
2015-05-08 10:15
N°
Problème ou besoin prioritaire
Initiales
1
RÉSOLU / SATISFAIT
Professionnels /
Date
Heure Initiales Services concernés
J.L.
SUIVI CLINIQUE
Date
Heure
N°
Directive inrmière
Initiales
CESSÉE / RÉALISÉE
Date
Heure Initiales
J.L.
J.L.
J.L.
J.L.
Signature de l’inrmière
Judith Lefebvre
122
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Initiales
J.L.
Programme / Service
Unité de psychiatrie
Signature de l’inrmière
Initiales
Programme / Service
Que retenez-vous ?
1. Quelles sont les quatre principaux éléments de
l’état mental qu’il faut évaluer ?
3. Au cours de l’examen de l’état mental, pourquoi
est-il important de questionner la personne sur ses
habitudes de consommation de médicaments
(prescrits ou offerts en vente libre), d’alcool et de
drogues ?
5. Vers quel âge l’enfant développe-t-il un processus
de la pensée plus logique et systématique et qu’il
devient capable de raisonner et de comprendre des
notions ?
2. Indiquez les facteurs associés à l’histoire de santé
qui peuvent inuer sur l’interprétation des résultats
d’évaluation.
4. Lorsque vous évaluez l’apparence d’une personne
dans le cadre de l’évaluation de l’état mental, que
devez-vous observer ?
7. Chez une personne âgée, que devez-vous évaluer
avant de procéder à l’examen de l’état mental et
pourquoi ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
6. Qu’en est-il de la pensée abstraite chez l’enfant ?
Chapitre 5
Évaluation de l’état mental
123
5
Dossier : Michel St-Hilaire
Michel St-Hilaire, âgé de 57 ans, est électricien
depuis 25 ans. Chaque jour, il travaille sur les
chantiers. Sa journée de travail commence à 7 h
et se termine vers 16 h. Ensuite, il aime bien aller
prendre quelques bières « avec les gars ». « C’est
notre façon de décompresser après une bonne
journée d’ouvrage. C’est mieux que de rentrer
chez moi dans une maison vide depuis que ma
femme est partie. En plus, mes ls de 20 et
22 ans ont quitté la maison pour l’université il
y a 3 mois, c’est décourageant de manger seul
tous les soirs, j’aimerais mieux avoir d’autres
occasions de voir mes amis que d’aller au bar,
mais c’est tout ce qui me reste », dit-il.
Aujourd’hui, il est hospitalisé en raison d’un
essoufement apparu soudainement après être
monté dans une échelle sur un chantier. « Je ne
sais pas trop comment expliquer ce qui s’est
produit. Je suis monté dans l’échelle pour aller
installer des ls sur le chantier comme je le fais
tous les jours, mais une fois en haut, je me suis
senti très essoufé. Je sentais mon cœur battre
très fort et très vite dans ma poitrine. J’étais
étourdi, j’ai été obligé de m’asseoir et d’attendre
6.1
Consommation d’alcool
En 2012, 92,8 % des Québécois âgés de 15 ans et
plus ont déclaré avoir consommé de l’alcool au
moins une fois au cours de leur vie (Santé Canada,
2012b). L’Institut national de santé publique du
Québec (INSPQ) rapporte qu’en 2005, 29,5 % des
hommes et 11,9 % des femmes reconnaissaient
avoir consommé de l’alcool de façon excessive
(5 consommations ou plus par occasion) (INSPQ,
2010). Chez les Canadiens âgés de 15 à 24 ans,
35 % ont déclaré avoir consommé de l’alcool de
façon excessive au moins 1 fois par mois au cours
de la dernière année (Santé Canada, 2012b).
Certains groupes sont disproportionnellement
affectés par les troubles liés à la consommation de
substances. À titre d’exemple, une enquête nationale menée auprès des communautés des Premières
Nations a révélé que la consommation problématique
d’alcool et de drogues dans les réserves amérindiennes était perçue comme étant le problème social
le plus important par 82,6 % des répondants
(Centre de gouvernance de l’information des
Premières Nations [CGIPN], 2012). L’alcool constitue la drogue psychoactive la plus consommée,
mais aussi la plus fréquemment prise de façon
problématique. Étant donné le taux de consommation d’alcool dans la population, il n’est pas surprenant que bon nombre de clients hospitalisés ou
que mes amis m’aident à redescendre », vous
explique-t-il.
Vous mesurez ses signes vitaux, dont voici les
valeurs : PA : 154/92 mm Hg ; P : 104 bpm, irrégulier. Au cours de l’entrevue, lorsque vous lui avez
posé la question sur les habitudes de consommation de tabac, d’alcool et de drogue, monsieur
St-Hilaire vous a dit ne pas fumer ni consommer
de drogue. Il a admis prendre deux ou trois
bières par jour les soirs de semaine.
6
Un peu plus tard dans la journée, l’exconjointe de monsieur St-Hilaire vient le visiter.
Elle se rend ensuite au poste des inrmières et
demande à vous parler. « Je suis inquiète pour
Michel. Je suis partie il y a deux mois, car j’en
avais assez de ses sautes d’humeur et de sa
consommation. Il arrivait de travailler vers 19 h
et il sentait l’alcool. Il se fâchait pour rien et il
était imprévisible. Il ne faisait plus rien dans la
maison et nous nous disputions presque chaque
jour, c’était pire si je lui disais qu’il buvait trop.
Cela a commencé depuis qu’il a eu des problèmes avec un contremaître au travail il y a six
mois », vous raconte-t-elle.
se présentant en consultation externe soient aux
prises avec des troubles liés à ce type de
consommation.
La morbidité ainsi que la mortalité associées à
la consommation excessive d’alcool reètent les
conséquences négatives d’un tel comportement.
En 2010, plus du tiers des décès (33,6 %, soit environ 1 000 décès) causés par des accidents de la route
étaient liés à l’alcool (Fondation de recherches sur
les blessures de la route au Canada, 2013). L’étude
complète la plus récente, menée en 2002, estime
que le coût total des méfaits liés à l’alcool pour l’ensemble du Canada est de 14,6 G$ par année, dont
3,3 G$ en coûts directs de soins de santé. De plus,
cette même étude estime que le nombre total de
décès annuels attribuables à l’alcool est d’environ
8 100 (Rehm, Baliunas, Brochu et collab., 2006).
Dans la population générale, la consommation
d’alcool à raison d’au moins 4 verres standards par
jour (chacun contenant 12 g d’alcool) est associée
à une augmentation du taux de mortalité due à une
cirrhose et à un trouble liés à l’utilisation de l’alcool ; de cancers de la bouche, de l’œsophage, du
pharynx et du foie combinés ; de blessures et
d’autres accidents de causes externes chez l’homme
(Thun, Peto, Lopez et collab., 1997) ENCADRÉ 6.1.
Chez la femme, la consommation d’alcool accroît
le risque de cancer du sein dans un rapport dose/
effet à partir d’une consommation de 24 g d’alcool
Chapitre 6
Morbidité : Caractère de ce
qui est propre à une maladie ou,
en épidémiologie, nombre de
personnes souffrant d’une
maladie donnée pendant un
temps donné, en général une
année, dans une population.
Elle comprend l’incidence
(nouveaux cas) ou la prévalence
(la somme de tous les cas) qui
sont deux façons d’exprimer la
morbidité d’une maladie.
Q
uestion de suivi
Monsieur St-Hilaire afrme
consommer trois pintes de
bière au bar chaque soir ;
calculez sa consommation et
dites s’il dépasse les recommandations d’Éduc’Alcool.
Évaluation de la consommation de substances
125
ENCADRÉ 6.1
Qu’est-ce qu’une consommation standard ?
Au Canada, une consommation standard contient environ 14 g d’alcool pur. Le
tableau présenté ci-dessous illustre les équivalences entre les diverses
consommations. Il s’agit de quantités approximatives, car la teneur en alcool
diffère selon le type de boisson et la marque choisis.
Bon nombre de gens ignorent ce que constitue une consommation standard. Ils
ne savent donc pas combien de verres standards sont contenus dans les bouteilles qu’ils achètent. En voici quelques exemples.
Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de
bière, selon le volume :
Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de vin
de table, selon le volume :
• 340 mL = 1
• Une boisson mélangée = au moins de 1 à 3
• 650 mL = 2
• 475 mL = 1,3
• 1 200 mL = 3,3
Nombre approximatif de consommations standards dans une bouteille de bière
forte, selon le volume :
• 340 mL = 1,5
• 650 mL = 2,5
• 475 mL = 12
• 1 200 mL = 4,5
• Bouteille normale de 750 mL = 5
Nombre approximatif de consommations standards de spiritueux à 40 % d’alcool (ou « alcool fort ») dans :
• Une chopine = 11
• Un setier = 17
• 1,75 L = 39
a
Il peut s’avérer difcile d’estimer le nombre de consommations standards contenues dans une boisson mélangée contenant un spiritueux. Selon divers facteurs tels que le type d’alcool et la
recette employés, une boisson mélangée peut contenir de une à trois consommations standards et plus.
Source : Adapté de Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) et Éduc’alcool (2012)
Arythmogène : Qui est
susceptible de générer un
trouble du rythme cardiaque.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de monsieur
St-Hilaire, quels sont les
signes ou les symptômes
qui pourraient vous laisser
croire qu’il est atteint
d’arythmie ?
126
Partie 1
par jour (environ 2 verres) (Longnecker, Berlin,
Orza et collab., 1988). De plus, le lien entre la
consommation chronique d’alcool et la maladie
hépatique alcoolique est bien connu. Les effets de
l’alcool sur la fonction cardiaque sont nombreux.
Une consommation d’alcool excessive et chronique
accroît le risque de cardiomyopathie alcoolique
accompagnée d’une augmentation de la masse
ventriculaire gauche, d’une dilatation des ventricules et d’un amincissement de la paroi cardiaque
(Urbano-Marquez, Estruch, Fernandez-Sola et
collab., 1995). L’hypertension constitue également
un effet nocif courant de la consommation d’alcool.
Évaluation globale de la personne
Il y aurait d’ailleurs une association causale entre
la prise de 30 à 60 g d’alcool par jour (de 3 à
5 verres standards) et l’élévation de la pression
artérielle (PA) chez l’homme et la femme (Keil,
Liese, Filipiak et collab., 1998). Finalement, l’alcool et les drogues illicites sont arythmogènes
en plus d’être liés à la fréquence cardiaque (FC)
accélérée propre à la fibrillation auriculaire
(Krishnamoorthy, Lip et Kane, 2009), et ce, même
dans le cas d’une consommation modérée chez
une personne âgée de plus de 55 ans atteinte d’une
maladie cardiovasculaire ou du diabète (Liang,
Mente, Yusuf et collab., 2012).
Étant donné la morbidité associée à la consommation d’alcool, de nombreux clients que rencontrent les professionnels de la santé en milieux
hospitalier et de soins de santé primaires (centres
de santé et de services sociaux, groupes de médecine de famille, unités de médecine familiale) présentent des habitudes de consommation d’alcool
plutôt tenaces. Les clients qui consultent dans un
contexte de soins de santé primaires ont en effet un
risque nettement plus élevé de trouble lié à l’utilisation de l’alcool (23 %) que la population en général (9 %) (Manwell, Fleming, Johnson et collab.,
1998 ; National Institute on Alcool Abuse and
Alcholism, 2003). Des enquêtes menées auprès du
service de l’admission aux soins intensifs ont révélé
une prévalence de la dépendance à l’alcool
de l’ordre de 12 à 21 % chez les clients de cette
unité (Marik et Mohedin, 1996 ; O’Brien, Lu, Ali et
collab., 2007). De plus, la consommation excessive
d’alcool accroît le risque d’admission aux soins
intensifs attribuable à un trauma, à une hypothermie ou à une pancréatite. Une fois qu’il se trouve
au centre hospitalier, la forte consommation d’alcool d’un client peut donner lieu à une insufsance
respiratoire en raison d’une intoxication alcoolique
aiguë ou d’un syndrome de sevrage d’alcool. Par
ailleurs, la dépendance à l’alcool accroît le risque
de septicémie, de choc septique et de mortalité hospitalière chez les clients qui séjournent aux soins
intensifs (O’Brien et collab., 2007).
6.2
Consommation
de drogues illicites
En 2012, environ 10,6 % des Canadiens âgés de
15 ans et plus ont admis avoir consommé des drogues illicites au cours des 12 derniers mois (Santé
Canada, 2012b). Parmi celles-ci gurent notamment
le cannabis, la cocaïne et le crack, l’héroïne, les
substances hallucinogènes, l’ecstasy et les amphétamines. Le cannabis s’est avéré la drogue illicite
la plus couramment consommée. En effet, 10,2 %
des personnes âgées de 15 ans et plus ont afrmé
en avoir consommé au cours des 12 derniers mois
(Santé Canada, 2012b).
Entre 2004 et 2012, parmi les jeunes âgés de
15 à 24 ans, le taux de consommation de drogues
illicites en général a diminué de manière considérable (de 37,9 à 21,3 %) (Santé Canada, 2012b).
Néanmoins, cela signie qu’environ un adolescent sur cinq consomme des drogues illicites.
Cela mérite qu’on y porte une grande attention
et que des interventions ciblées soient mises en
place. En effet, toute consommation de drogues
illicites entraîne de graves répercussions légales
de même que des conséquences sur la santé, les relations, l’emploi, l’éducation et la carrière de la
personne.
En outre, la consommation abusive de médicaments d’ordonnance a été reconnue comme
un domaine prioritaire d’intervention au cours
d’un processus de consultation entrepris par
Santé Canada et le Centre canadien de lutte
contre les toxicomanies (CCLT) (CCLT, 2013a).
Entre 2005 et 2011, le nombre de consultations à
l’urgence attribuable à la consommation non médicale d’analgésiques opioïdes en Ontario a augmenté
de près de 250 % (Groupe de travail d’experts sur
la dépendance aux stupéants et substances contrôlées, 2012). Par ailleurs, l’utilisation abusive de
médicaments d’ordonnance entraîne non seulement de graves répercussions sur la santé et la sécurité du client, mais constitue également un fardeau
que doivent assumer les urgences. Les médicaments
ayant des propriétés psychoactives, dont les analgésiques opioïdes, les sédatifs hypnotiques et les
stimulants, sont fortement susceptibles d’être
consommés de façon abusive (Groupe de travail
d’experts sur la dépendance aux stupéants et substances contrôlées, 2012).
6.3
6
Diagnostic des troubles
liés à la consommation
de substances
Au cours de leur vie, environ 21,6 % des Canadiens
âgés de 15 ans et plus seront atteints d’un trouble
lié à la consommation d’alcool ou d’autres substances (Santé Canada, 2012a). Le trouble lié à la
prise d’alcool touche environ 18,6 % des personnes
de ce groupe (au cours de leur vie), alors que le
trouble lié à la consommation du cannabis en
atteint environ 6,8 %, alors que celui associé à l’utilisation d’autres drogues illicites en touche environ 4 % (Santé Canada, 2012a). Selon les résultats
d’une enquête canadienne, 4,4 % des Canadiens
satisfaisaient aux critères d’un trouble lié à l’utilisation d’une substance en 2012 (Pirie, Jesseman, Di
Giacchino et collab., 2014). Par ailleurs, il existe
un continuum relativement à la consommation
d’alcool et de drogues. Celui-ci s’amorce par une
consommation au cours d’occasions spéciales, puis
la personne passe d’une consommation modérée à
une consommation nocive TABLEAU 6.1. Les
troubles liés à l’utilisation de l’alcool ou d’autres
substances constituent un problème de santé chronique avec risque de rechutes pour plusieurs personnes. En fait, des études antérieures ont démontré
qu’environ 40 à 60 % des clients traités pour un
trouble lié à la consommation d’une substance
recommencent à consommer moins de un an après
la n de leur traitement (Finney & Moos, 1992 ;
Hubbard, Craddock, Flynn et collab., 1997). Ainsi,
une évaluation globale s’impose an d’établir un
plan de soin individualisé et adapté aux besoins et
aux objectifs du client.
Chapitre 6
Septicémie : Propagation de
microorganismes pathogènes
dans la circulation sanguine.
Évaluation de la consommation de substances
127
TABLEAU 6.1
Catégories et dénition des habitudes de consommation d’alcool
CATÉGORIE
ORGANISME
DÉFINITION
Consommation modérée
Éduc’alcool, Québec
• Hommes : ≤ 3 consommations/jour ; maximum 15 consommations/sem.
• Femmes : ≤ 2 consommations/jour ; maximum 10 consommations/sem.
Consommation à risque
Éduc’alcool (s.d.)
• Hommes : > 15 consommations/sem. ou > 4 consommations/occasion
• Femmes : > 10 consommations/sem. ou > 3 consommations/occasion
Consommation
dangereuse
Organisation mondiale
de la Santé (2006)
• Risque d’apparition des effets négatifs de l’alcool
Consommation nocive
Organisation mondiale
de la Santé (2006)
• Présence de dommages physiques ou psychologiques causés par l’alcool
Trouble lié à l’utilisation
de l’alcool
American Psychiatric
Association (2013)
• ≥ 2 des événements suivants au cours d’une même année : consommation accrue ou prolon gée au-delà du seuil prévu ; désir persistant ou tentative infructueuse de réduire ou de gérer
sa consommation d’alcool ; beaucoup de temps passé à se procurer de l’alcool, à en
consommer ou à récupérer des effets de l’alcool ; désir impérieux de consommer ( craving) ;
consommation répétée conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures ; per sistance de la consommation malgré des problèmes sociaux ou interpersonnels causés ou
accentués par l’alcool ; abandon ou diminution des activités importantes pour la personne en
raison de l’alcool ; consommation répétée dans des situations physiquement dangereuses
pour la personne (p. ex., la conduite en état d’ébriété) ; poursuite de la consommation même
si la personne est consciente des problèmes psychologiques que l’alcool provoque ou accentue chez elle ; tolérance (besoin de consommer davantage pour ressentir les effets de
l’alcool) ; sevrage
Les risques associés aux
substances psychoactives
autres que l’alcool pour la
grossesse, le fœtus et le
développement de l’enfant
sont présentés de manière
détaillée dans le tableau 16.4
du manuel de Fortinash, K.M.,
et Holoday-Worret, P.A. (2012).
Santé mentale et psychiatrie.
Montréal : Chenelière
Éducation.
128
Partie 1
Les options thérapeutiques pour les troubles liés
à la consommation de substances sont nombreuses :
la désintoxication (gestion du sevrage), le traitement en établissement (durée variant de quelques
jours à plus de un an), la thérapie de groupe (p. ex.,
une formation comportementale en compétences
sociales), la thérapie individuelle (p. ex., en entrevue motivationnelle), les groupes d’entraide (p. ex.,
les Alcooliques Anonymes [AA], les Narcotiques
Anonymes [NA]), le traitement autodirigé, le traitement par substitution aux opioïdes (p. ex., la
méthadone, le suboxone), la réduction des méfaits
(p. ex., les échanges de seringue, des sites d’injection supervisée) (Association des inrmières et
inrmiers du Canada [AIIC], 2011 ; CCLT, 2013b).
L’inrmière devrait favoriser les modalités de traitements fondés sur des résultats probants. Notons
qu’en 2011, seul 0,4 % de la population a eu accès à
des services publics de traitement de la toxicomanie au Canada (Pirie et collab., 2014). Toutefois,
cette statistique ne tient pas compte des services
offerts dans les centres privés, dans les centres
hospitaliers et par les programmes de soutien
communautaires.
Le diagnostic est bien déni par l’American
Psychiatic Association (APA) dans la cinquième
édition de son Diagnostic ans Statistical Manual of
Mental Disorders, DSM 5. L’ENCADRÉ 6.2 énonce
les critères de ces diagnostics.
Évaluation globale de la personne
Malheureusement, les problèmes liés à l’alcool
sont sous-diagnostiqués tant dans les milieux de
soins primaires que dans les centres hospitaliers.
En effet, la consommation excessive d’alcool n’est
souvent reconnue que lorsque de graves complications apparaissent chez le client.
Particularités liées au développement
Femmes enceintes
Près de 10,5 % des femmes canadiennes enceintes
âgées de 15 ans et plus afrment consommer
de l’alcool ; de ce nombre, 9,7 % en prennent de
manière sporadique, et 0,7 %, de manière abusive
(Society of Obstetricians and Gynaecologists of
Canada [SOGC], 2010). Ces chiffres sont bien
moins élevés que ceux notés chez les femmes non
enceintes appartenant au même groupe d’âge
(74,4 %) (Santé Canada, 2012b). Toutefois, chez la
femme enceinte, il n’existe pas de quantité d’alcool jugée sécuritaire. Les conséquences néfastes
possibles de l’alcool sur le fœtus sont bien connues
TABLEAU 6.2. Ainsi, la consommation d’alcool de
toutes les femmes qui songent à devenir enceintes
devrait être évaluée, et l’abstinence alcoolique est
recommandée.
ENCADRÉ 6.2
Critères du trouble d’utilisation de substance
Un mode d’utilisation inadéquat d’une substance conduisant à au moins deux
des manifestations suivantes au cours d’une année.
8. Abandon ou réduction d’activités sociales, professionnelles ou de loisirs
importants à cause de l’utilisation de la substance.
1. Utilisation répétée d’une substance conduisant à l’incapacité de remplir
des obligations majeures, au travail, à l’école, ou à la maison (p. ex., des
absences répétées ou de mauvaises performances au travail du fait de
l’utilisation de la substance ; des absences, des exclusions temporaires
ou dénitives de l’école attribuables à la consommation ; la négligence
des enfants ou des tâches ménagères).
9. Désir impérieux de consommer (p. ex., le client a fréquemment des
cravings qu’il doit satisfaire en consommant la substance).
2. Utilisation répétée d’une substance dans des situations où cela peut être physiquement dangereux (p. ex., pendant la conduite d’une voiture ou en faisant fonctionner une machine alors que la personne est sous l’inuence d’une substance).
3. Problèmes judiciaires répétés liés à l’utilisation d’une substance (p. ex., une
arrestation pour comportement anormal associé à l’utilisation de la substance).
4. Utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou
sociaux, persistants ou récurrents, causés ou exacerbés par les effets de la
substance (p. ex., des conits avec le conjoint à propos des conséquences
de l’intoxication, des bagarres).
5. Prise de la substance en quantité plus importante ou pendant une période
plus prolongée que prévu.
6. Désir persistant ou tentatives infructueuses de diminuer ou de gérer l’utilisation de la substance.
10. Poursuite de l’utilisation de la substance bien que la personne sache qu’elle a
un problème psychologique ou physique persistant ou récurrent susceptible
d’avoir été causé ou exacerbé par la substance (p. ex., la poursuite de la prise
de cocaïne bien que la personne admette une dépression liée à la cocaïne ou la
poursuite de la prise de boissons alcoolisées bien que le sujet reconnaisse
l’aggravation d’un ulcère du fait de sa consommation d’alcool).
11. Tolérance :
a. besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obte nir une intoxication ou l’effet désiré ; ou
b. effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même
quantité de la substance.
12. Sevrage :
a. syndrome de sevrage caractéristique de la substance ; ou
b. prise de la même substance (ou d’une substance très proche) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage.
La sévérité du trouble est déterminée par la quantité de symptômes
présents :
7. Beaucoup de temps passé à des activités nécessaires à l’obtention de la
substance (p. ex., la consultation de nombreux médecins ou un déplacement
sur de longues distances), à la consommation du produit (p. ex., fumer sans
arrêt) ou à la récupération des effets de celui-ci.
• Trouble léger : deux ou trois symptômes
• Trouble modéré : quatre ou cinq symptômes
• Trouble sévère : six symptômes ou plus
Source : Adapté de American Psychiatic Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders, DSM-5 (5e éd.). Washington, DC : APA.
TABLEAU 6.2
Symptômes cliniques du syndrome d’alcoolisation fœtale
RÉGION/SYSTÈME
SIGNES
Faciale
• Faciès plat, écrasement de la racine du nez avec retroussement de l’extrémité, philtrum indistinct et convexe (aucun relief de la peau
entre le nez et la lèvre supérieure), lèvre supérieure amincie, mâchoire inférieure réduite et rétrécissement des fentes palpébrales
(yeux bridés)
Optique
• Strabisme, anomalie de la rétine et globes oculaires réduits
• Correction visuelle nécessaire
Squelettique
• Retard de croissance, poids et taille réduits, périmètre crânien réduit, petits doigts courts, ongles hypoplasiques (formation incomplète), syndrome de Klippel-Feil (fusion des vertèbres cervicales) et scoliose (incurvation latérale anormale de la colonne vertébrale)
Cérébrale
• Microcéphalie (circonférence crânienne sous la normale), hydrocéphalie, anomalies diverses dans la structure du cerveau ainsi que
taille réduite des zones cérébrales, bulbe olfactif non développé, retard mental de léger à grave, surdité d’origine neurologique ou
physiologique, décit de l’attention et altération des capacités d’apprentissage, désordres de légers à graves de la coordination
motrice et de l’équilibre
Cardiaque
• Malformations diverses des compartiments du cœur et des vaisseaux sanguins
Autres
• Malformations congénitales diverses (p. ex., des voies biliaires, des organes génitaux externes) d’origine inconnue, dans le cas
d’abus d’alcool en période de gestation (documentées)
• Naissance prématurée
• Mortalité de l’enfant à la naissance
Sources : Adapté de Ben Amar et Léonard (2009) ; Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) (2009) ; Richard, Senon et Valleur (2009)
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
129
6
Adultes vieillissants
De façon générale, la prévalence de la consommation d’alcool à raison de une à trois consommations
par semaine diminue avec l’âge ; elle passe de
47,0 % chez les hommes et de 23,4 % chez les
femmes âgés de 25 à 34 ans à 40,5 % chez
les hommes et à 29,1 % chez les femmes de 55 à
64 ans, puis à 30,9 % chez les hommes et à 21,9 %
chez les femmes de 65 ans et plus (Santé Canada,
2008). Par contre, les personnes âgées présentent
nombre de facteurs qui peuvent faire grimper le
risque associé à la consommation d’alcool. Par
exemple, le métabolisme hépatique et la fonction
rénale ralentissent avec l’âge, ce qui accroît la biodisponibilité de l’alcool dans le sang, et ce, pour
une période prolongée. De plus, la masse musculaire des personnes âgées diminue. Ainsi, le moins
grand volume de tissus dans lequel l’alcool peut
être distribué fait en sorte que la concentration
sanguine de la substance est accrue. En outre, certaines personnes âgées prennent plusieurs médicaments, lesquels peuvent entraîner des
interactions néfastes avec l’alcool (p. ex., les benzodiazépines, les antidépresseurs, les antihypertenseurs et l’acide acétylsalicylique). Par
ailleurs, la consommation d’alcool augmente les
risques de chute, de dépression et de troubles
d’ordre gastro-intestinal. Finalement, il arrive que
la détection d’un problème associé à l’alcool
prenne plus de temps chez la personne âgée. Par
exemple, cette dernière peut éviter certaines conséquences liées à la consommation d’alcool comme
la conduite en état d’ébriété uniquement parce
qu’elle ne conduit plus ou les problèmes vécus au
travail parce qu’elle est retraitée.
6.4 Données subjectives
6.4.1
4
Les outils mnémotechni­
ques AMPLE et PQRSTU
sont présentés dans le
chapitre 4, Regard global
sur l’histoire de santé.
Histoire de santé
Le fait de recueillir les données subjectives permet
de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces éléments d’information sont ensuite combinés aux
données objectives provenant de l’examen physique
et des examens paracliniques. L’ensemble des données sert à poser un jugement clinique sur l’état de
santé du client et à formuler un constat d’évaluation.
An de reconstituer l’histoire de santé, l’inrmière
peut utiliser l’outil mnémotechnique AMPLE.
Lorsque le client présente des symptômes particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue ceux-ci à
l’aide de l’outil PQRSTU
4 .
Si le client se présente en état d’ébriété ou s’il
est en sevrage, il pourrait s’avérer difcile de
recueillir de l’information sur ses antécédents
de santé ou alors les données recueillies pourraient se révéler peu ables. Cependant, une fois
à jeun, la plupart des clients sont prêts et aptes
à fournir de l’information able à condition que
le contexte soit privé, confidentiel et non
conictuel.
Il est également important de reconnaître que les
personnes qui consomment des drogues ont souvent
vécu des expériences désagréables à l’occasion de
contacts antérieurs avec des professionnels de la
santé, et elles craignent beaucoup la stigmatisation
et la discrimination à leur égard (Ahern, Stuber et
Galea, 2007). L’inrmière représente souvent le premier point de contact des personnes qui consomment des drogues : il est donc primordial qu’elle
aborde ce sujet sans porter de jugement et de façon
respectueuse. Une bonne relation thérapeutique
s’avère essentielle pour favoriser un climat de
conance propice à la collaboration entre l’inrmière et le client qui consomme des drogues
illicites.
Séquence d’évaluation
QUESTIONS
• Buvez-vous du café ? Combien de cafés par jour ? Fumez-vous ?
Combien de cigarettes par jour ?
130
Partie 1
Évaluation globale de la personne
JUSTIFICATIONS
Le fait de commencer l’évaluation
en demandant au client s’il consomme des substances qui sont
socialement acceptables permet
d’établir un climat de conance.
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
• Vous arrive-t-il de boire de la bière, du vin ou toute autre boisson alcoolisée ?
Si la réponse est « oui », poser la question suivante relativement à la consommation abusive d’alcool : Au cours de la dernière année, combien de fois vous est-il arrivé de boire au moins
cinq consommations par jour (si le client est un homme) ou quatre
consommations par jour (s’il s’agit d’une femme) ?
• En moyenne, combien de jours par semaine vous arrive-t-il
de boire de l’alcool ? De façon générale, combien de verres
consommez-vous pendant ces journées ?
Recommander au client de maintenir des habitudes de consommation modérée, soit trois consommations ou moins chez l’homme,
deux consommations ou moins chez la femme et une consommation ou moins chez la personne âgée (National Institute on Alcool
Abuse and Alcoholism, 2005). Recommander une diminution de
la consommation d’alcool ou l’abstinence complète chez les clients
qui prennent des médicaments qui interagissent avec l’alcool, chez
ceux qui sont atteints d’une affection accentuée par l’alcool ou
chez la femme enceinte (dans ce cas, recommander l’abstinence).
Employer des méthodes diagnostiques rapides an de déceler un
problème de consommation d’alcool et de reconnaître les clients
qui nécessitent une évaluation plus poussée. Demander au client
de répondre aux questions du test AUDIT (Alcohol Use Disorders
Identification Test) présentées dans le TABLEAU 6.3
ENCADRÉ 6.3. La démarche quantitative offre l’avantage d’associer un chiffre à chaque réponse an d’éviter qu’il y ait place
à une interprétation subjective. Le questionnaire AUDIT permet
de déceler les problèmes d’alcool moins graves (consommation
dangereuse et consommation nocive), de même que le trouble lié
à la consommation d’alcool. Ce test s’avère utile auprès des clients
du service d’urgence ou de traumatologie, car il cerne les problèmes d’alcool actuels et non passés. Il se révèle également utile
en soins primaires, notamment auprès des adolescents et des personnes âgées. Finalement, ce questionnaire est relativement exempt
de biais lié au sexe ou à la culture du client.
TABLEAU 6.3
• À partir d’au moins une occurrence de consommation abusive, le client est qualié de
consommateur « à risque ».
• Comportement à risque :
– chez l’homme, 15 consommations ou plus par semaine
ou 5 consommations ou plus
par occasion ;
6
– chez la femme, 10 consommations ou plus par semaine
ou 3 consommations ou plus
par occasion.
Q
uestion de suivi
Complétez le test AUDIT de
monsieur St-Hilaire à l’aide
des données disponibles
dans la situation et estimez
le niveau de risque selon le
résultat obtenu.
Les habitudes de consommation
dangereuse entraînent un risque
élevé d’atteinte éventuelle à la
santé physique et mentale du et
l’client. Quant à la consommation
nocive, elle a déjà donné lieu à
des problèmes chez le client.
Une version intégrale des
questionnaires DÉBA-Alcool et
DÉBA-Drogues permettant de
déterminer le type de service
adapté aux besoins du client
peut être consultée au https://
oraprdnt.uqtr.uquebec.ca.
Test AUDIT a (Alcohol Use Disorders Identication Test )
QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE
INTERPRÉTATION
Questions
0
1
2
1. À quelle fréquence consommezvous de l’alcool ?
Jamais
1 fois par mois
ou moins
De 2 à 4 fois par mois
2 ou 3 fois par
semaine
Au moins 4 fois
par semaine
2. Combien de verres standards
buvez-vous au cours d’une journée
normale où vous buvez de l’alcool ?
1 ou 2
3 ou 4
5 ou 6
De 7 à 9
10 ou plus
3. À quelle fréquence buvez-vous
au moins cinq consommations au
cours d’une même occasion ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
4. Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous constaté que
vous n’étiez plus capable de vous arrêter de boire après avoir commencé ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
Chapitre 6
3
4
Évaluation de la consommation de substances
131
QUESTIONS
TABLEAU 6.3
JUSTIFICATIONS
Test AUDIT a (Alcohol Use Disorders Identication Test ) (suite)
QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE
INTERPRÉTATION
Questions
0
1
2
3
4
5. Au cours de la dernière année,
combien de fois votre consommation d’alcool vous a-t-elle empêché
de faire ce qui était normalement
attendu de vous ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
6. Au cours de la dernière année,
combien de fois avez-vous eu
besoin d’un premier verre, après
une période de forte consommation, pour pouvoir vous remettre en
forme ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
7. Au cours de la dernière année,
combien de fois avez-vous eu un
sentiment de culpabilité ou des
remords après avoir bu ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
8. Au cours de la dernière année,
combien de fois avez-vous été
incapable de vous rappeler ce qui
s’était passé la soirée précédente
parce que vous aviez bu ?
Jamais
Moins de une fois
par mois
Une fois par mois
Une fois par semaine
Tous les jours
ou presque
9. Avez-vous été blessé ou quelqu’un
d’autre a-t-il été blessé parce que
vous aviez bu ?
Non
Oui, mais pas au
cours de la dernière
année
Oui, au cours de
la dernière année
10. Un parent, un ami, un médecin ou
un autre professionnel de la santé
s’est-il inquiété de votre consommation d’alcool ou a-t-il suggéré
que vous la réduisiez ?
Non
Oui, mais pas au
cours de la dernière
année
Oui, au cours de
la dernière année
Total
a
An de reéter le verre standard américain, le nombre de verres énoncé à la question 3 est passé de 6 à 5.
Source : Reproduit avec l’autorisation de l’éditeur. Tiré de : Organisation mondiale de la Santé. (2001). AUDIT The Alcohol Use Disorders Identication Test : Guidelines for Use in Primary Care,
2e éd. Repéré à : whqlibdoc.who.int/hq/2001/WHO_MSD_MSB_01.6a.pdf?ua=1
ENCADRÉ 6.3
Fonctionnement du test AUDIT
Le questionnaire AUDIT aborde trois thèmes : 1) la consommation d’alcool
(questions 1 à 3) ; 2) les habitudes de consommation ainsi que la dépendance (ques tions 4 à 6) ; 3) les conséquences néfastes de la consommation d’alcool (questions 7
à 10). Il suft d’attribuer une note de 0 à 4 à chaque réponse obtenue, puis d’additionner le tout. La note maximale possible est de 40 points.
Le questionnaire AUDIT-C constitue une forme abrégée du test. Il s’avère
utile dans un contexte de soins aigus ou critiques. Il s’agit d’un test de dépistage valide de la consommation abusive d’alcool et de l’alcoolisme (Bush,
Kivlahan, McDonell et collab., 1998). Ce test comprend trois questions portant
sur la consommation d’alcool (questions 1 à 3), dont la question 3 qui, en ellemême, constitue un court test de dépistage de la consommation abusive. Cet
132
Partie 1
Évaluation globale de la personne
outil permet, en très peu de temps (moins de deux minutes), de faire la différence entre une consommation excessive, une consommation à risque et une
consommation à faible risque. La note totale peut être de 0 à 12. Une note de
2 points ou moins représente un faible risque.
La valeur seuil de 8 points ou plus chez l’homme et de 4 points ou plus chez
la femme, les adolescents et les personnes âgées de plus de 60 ans révèle une
consommation dangereuse.
De plus, la valeur seuil de 3 points ou plus indique une consommation abusive ou à risque. Finalement, si le client répond qu’il lui est déjà arrivé de boire
six consommations ou plus au cours d’une même occasion pendant la dernière
année, il s’avère nécessaire de procéder à une évaluation approfondie.
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Le questionnaire CAGE (Cutdown, Annoyed, Guilty, Eyeopener), convient aux milieux de soins primaires achalan ‑
dés, car il ne prend qu’une minute à remplir, et il est facile
pour les professionnels de la santé de se rappeler ses quatre
questions directes auxquelles il suft de réponde par oui ou
non. Ce questionnaire permet de déceler les problèmes de
consommation abusive d’alcool au cours de la vie du client,
mais il ne peut aider à distinguer un problème passé d’un
problème actuel de consommation (Bush et collab., 1998). De
plus, il arrive qu’il ne permette pas aux intervenants de recon‑
naître une faible consommation qui constitue toutefois un
comportement à risque, et il s’avère moins efcace auprès
des femmes et des minorités (Steinbauer, Cantor, Holzer et col‑
lab., 1998).
Une réponse « oui » à deux ques‑
tions ou plus du questionnaire
CAGE indique une consommation
d’alcool possiblement abusive et
la nécessité de procéder à une
évaluation approfondie.
Évaluer la présence de troubles liés à l’utilisation de l’alcool à
l’aide des critères diagnostiques cliniques standards. Déterminer
si une habitude de consommation inadaptée donne lieu à une
altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement
signicative (APA, 1994 ; National Institute on Alcohol Abuse
and Alcoholism, 2005). Poser la question suivante au client :
Au cours des 12 derniers mois, votre consommation d’alcool
a‑t‑elle causé l’une des situations suivantes ou a‑t‑elle contri‑
bué à ces dernières ?
• Si le client répond « oui » à au
moins une question, cela signi‑
e qu’il satisfait aux critères
diagnostiques de consomma‑
tion abusive. Cela nécessite des
conseils et une brève interven‑
tion auprès du client.
• Si le client répond « oui » à
deux questions ou plus, c’est
qu’il satisfait aux critères dia‑
gnostiques du trouble lié à
l’utilisation de l’alcool.
• Si le client répond « non », il
risque tout de même d’être aux
prises avec des problèmes liés
à sa consommation d’alcool.
Cela nécessite des conseils et
une brève intervention auprès
du client.
• Risque de blessure physique (conduite d’une automobile
ou fonctionnement d’une machine en état d’ébriété).
• Problèmes interpersonnels (famille et amis).
• Incapacité à remplir ses obligations (négligence du travail, des
études ou des tâches domestiques).
• Désir impérieux de consommer (avoir des cravings).
• Ne pas être en mesure de respecter la limite xée (limite de
consommation dépassée).
• Ne pas être en mesure de réduire sa consommation d’al‑
cool ou d’arrêter de boire (nombreuses tentatives infruc‑
tueuses).
Q
uestion de suivi
Remplissez le questionnaire
CAGE à l’aide des données
contenues dans l’histoire de
monsieur St-Hilaire.
Que vous indique le résultat
obtenu au questionnaire
CAGE ?
6
• Présenter une tolérance à l’alcool (besoin de bien plus grandes
quantités pour obtenir les mêmes effets).
• Présenter des signes de sevrage (tremblements, transpiration,
nausées ou insomnie en période d’abstinence ou de diminu‑
tion de la consommation).
• Continuer à consommer de l’alcool malgré son problème de
consommation (problèmes récurrents d’ordre physique ou
psychologique).
• Passer beaucoup de temps à boire (ou à se préparer à boire ou
à se remettre des effets de l’alcool).
• Passer moins de temps à faire autre chose (activités autrefois
jugées importantes et agréables).
Le questionnaire TWEAK (Russel, Materier et Sokol, 1994)
constitue une combinaison des éléments de deux autres ques‑
tionnaires ; il permet de déceler la consommation à risque chez
la femme et plus particulièrement chez la femme enceinte. La
question relative au sentiment de culpabilité du questionnaire
CAGE a été remplacée par une question visant à mesurer la
tolérance.
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
133
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
• (T) Tolérance : combien de verres tolérez-vous ou combien
devez-vous en boire avant de ressentir les effets de l’alcool ?
• (W) (Worry) Inquiétude : au cours de la dernière année, vos
amis ou des membres de votre famille se sont-ils déjà inquiétés ou plaints de votre consommation d’alcool ?
• (E) (Eye-opener) Réveil : vous arrive-t-il de boire dès votre réveil ?
• (A) Amnésie : quelqu’un vous a-t-il déjà rapporté des choses
que vous avez dites ou faites alors que vous aviez bu, mais
dont vous êtes incapable de vous souvenir ?
• Le fait de devoir prendre trois
consommations ou plus avant
de ressentir les effets de l’alcool indique une tolérance.
• Un pointage de 2 points ou
plus révèle un problème lié à
la consommation d’alcool.
• (K) (Kut down) Diminution : avez-vous parfois l’impression
que vous devriez diminuer votre consommation d’alcool ?
Une note de 2 points est accordée à chaque réponse positive aux
questions portant sur la tolérance et sur l’inquiétude. Pour ce qui
est des autres questions, une réponse positive vaut 1 point. Un pointage de 1 point ou moins révèle un comportement à faible risque.
Employer le questionnaire SMAST-G (Short Michigan Alcoholism
Screening Test-Geriatric) auprès des personnes âgées qui se qualient de buveurs mondains ou qui consomment de l’alcool sur
une base régulière, quelle que soit la quantité (Naegle, 2008).
Les personnes âgées présentent des réactions émotionnelles et
physiques particulières à l’alcool, et les 10 questions de ce test
abordent ces réactions. Un pointage de 0 ou de 1 point indique
un comportement à faible risque TABLEAU 6.4.
TABLEAU 6.4
Un pointage de 2 points ou plus
révèle un problème lié à l’alcool
et nécessite une évaluation
approfondie.
SMAST-G (Short Michigan Alcoholism Screening Test-Geriatric)
QUESTIONS DE L’INFIRMIÈRE
1. Vous arrive-t-il de sous-estimer votre consommation d’alcool lorsque vous en
parlez avec d’autres ?
2. Vous arrive-t-il de ne pas manger ou d’être capable de sauter un repas parce que
vous avez pris quelques verres et n’avez pas faim ?
3. Le fait de boire quelques verres atténue-t-il vos tremblements ?
4. Vous arrive-t-il d’avoir de la difculté à vous rappeler une partie de la journée ou
de la soirée lorsque vous consommez de l’alcool ?
5. Avez-vous pris l’habitude de boire un verre pour vous détendre ou vous calmer ?
6. Vous arrive-t-il de consommer de l’alcool pour oublier vos problèmes ?
7. Vous est-il déjà arrivé d’augmenter votre consommation d’alcool après avoir subi
une perte dans votre vie ?
8. Un médecin ou une inrmière vous a-t-il déjà dit qu’il s’inquiétait de votre consommation d’alcool ?
9. Avez-vous déjà établi des règles en vue de maîtriser votre consommation d’alcool ?
10. Lorsque vous souffrez de solitude, le fait de boire un verre vous aide-t-il à mieux
vous sentir ?
Pointage total au SMAST-G (de 0 à 10 points)
POINTAGE : deux réponses afrmatives ou plus révèlent un problème lié à l’alcool.
Source : Tiré de © The Regents of the University of Michigan, 1991
134
Partie 1
Évaluation globale de la personne
OUI
(1 POINT)
NON
(0 POINT)
QUESTIONS
• Utilisez-vous des médicaments d’ordonnance tels que des
analgésiques opioïdes, des sédatifs et des stimulants ?
Exemples : médicaments pour le traitement du trouble du décit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
• Vous arrive-t-il de prendre plus de médicaments que la dose
prescrite ?
• Consommez-vous d’autres drogues telles que le cannabis, la
cocaïne, l’héroïne, les amphétamines, les hallucinogènes et
les inhalants ? Si le client dit consommer une ou plusieurs
substances, obtenir les informations suivantes pour chacune
d’entre elles.
– Quelle quantité de substance consommez-vous (nombre
de verres, nombre de joints, poids en grammes, nombre de
comprimés) ?
– Combien d’argent dépensez-vous (par jour/semaine/mois) ?
– À quelle fréquence consommez-vous ?
– Depuis quand consommez-vous ?
– À quand remonte votre dernière consommation ?
– Quelle est la voie d’administration utilisée (orale, nasale,
par inhalation, sous-cutanée, intraveineuse [IV]) ?
JUSTIFICATIONS
Plusieurs médicaments d’ordonnance sont susceptibles d’être
consommés de façon problématique en raison de leur effet
physiologique agréable (p. ex., le
soulagement de l’insomnie avec
la prise d’un sédatif).
L’évaluation de la consommation
de substances psychoactives doit
être complète et doit permette de
déterminer si la consommation du
client augmente ou diminue au
cours des entretiens subséquents.
– En cas d’inhalation ou d’utilisation de la voie IV, y a-t-il
parfois partage du matériel avec d’autres personnes ? Avezvous accès à du matériel stérile ?
Le partage de pipes à crack et du
matériel d’injection (p. ex., une
seringue, un ltre, un contenant de
dilution et de chauffage, un garrot)
présente un risque de transmission
du virus de l’immunodécience
humaine (VIH) et de l’hépatite C.
La rubrique « Promotion de saines
habitudes de vie » traite des programmes d’échange de seringues.
• Explorer les raisons pour lesquelles le client consomme ces
substances. Qu’est-ce qui motive votre consommation ?
Consommez-vous seul ou entre amis ? Quels sont les aspects
positifs de votre consommation ? Comment vous sentez-vous
après avoir consommé ? Votre consommation a-t-elle eu
des conséquences négatives sur votre vie ?
Il est fréquent qu’une personne ait
recours à la consommation de substances psychoactives pour composer avec le stress, l’anxiété, un
événement traumatique (p. ex.,
un abus physique ou sexuel) ou
encore pour soulager les symptômes
d’un trouble de santé mentale
concomitant (CCLT, 2009). L’inrmière évalue également les déterminants sociaux de la santé :
plusieurs études ont démontré, entre
autres, qu’un logement instable, un
revenu insufsant et l’absence d’un
réseau de soutien social sont des
facteurs de risque importants des
troubles liés à l’utilisation de substances (Galea & Vlahov, 2002).
• Avez-vous déjà essayé de réduire ou de cesser votre consommation de substances ? Exemples : participation antérieure
dans un programme d’entraide (AA, NA), de désintoxication
ou dans un traitement pharmacologique.
Les réponses à ces questions
peuvent être utiles à la planication
ultérieure d’une intervention.
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
6
135
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
• Avez-vous atteint vos objectifs personnels ? Pendant combien
de temps ? Qu’est-ce qui a été utile dans le passé ? Qu’est-ce
qui n’a pas fonctionné pour vous ? Quelle était la raison de
votre rechute ?
Il est important de discuter
de moyens de prévention de
rechute avec un client qui désire
réduire ou cesser sa consommation. Une rechute dans la consommation de narcotiques après une
période d’abstinence ou de réduction importante de consommation
peut causer la mort du client (la
diminution de sa tolérance physiologique peut mener à une surdose) (Binswanger, Nowels, Corsi
et collab., 2012). Il est primordial
d’informer le client de ce risque
et de lui recommander de consommer une plus petite quantité de
drogues en cas de rechute future
(ce risque s’applique également
aux personnes incarcérées retournant dans la communauté).
• Quel est votre objectif personnel par rapport à votre consommation de substances psychoactives ?
Exemples : maintien du niveau actuel de consommation, réduction des méfaits associés à sa consommation, réduction de la
consommation, abstinence.
L’inrmière doit reconnaître que
la consommation de substances
psychoactives se retrouve sur un
continuum (de l’abstinence à la
consommation nocive) et que le
client peut ne pas vouloir devenir
abstinent pour le moment.
L’approche utilisée doit être individualisée et centrée sur les
besoins et les objectifs du client.
6.5 Données objectives
OBSERVATIONS NORMALES
136
Partie 1
ANOMALIES
Les résultats d’analyses de laboratoire fournissent des données
objectives relatives à une consommation problématique d’alcool.
Ces données s’avèrent moins sensibles et précises que les questionnaires d’autoévaluation, mais elles sont utiles en vue de corroborer les données subjectives. La gamma-glutamyl-transférase
(GGT), une protéine sérique, constitue le marqueur biochimique
de la consommation d’alcool le plus couramment utilisé. La
consommation occasionnelle n’entraîne pas d’augmentation de
la concentration de cette protéine, mais la consommation excessive le fait. Cependant, il est important de savoir qu’une maladie
hépatique non alcoolique peut également provoquer une augmentation de la concentration de GGT, même en l’absence d’alcool dans l’organisme.
La consommation chronique d’alcool à raison de quatre verres par
jour ou plus pendant quatre à huit
semaines accroît la concentration
de GGT de façon considérable. Par
ailleurs, quatre ou cinq semaines
d’abstinence sont nécessaires pour
que la GGT retrouve une valeur normale (National Institute on Alcohol
Abuse and Alcoholism, 2002).
L’aspartate aminotransférase (AST) est une enzyme présente en
forte concentration dans le cœur et le foie.
Plusieurs mois de consommation
chronique donnent lieu à une augmentation de l’AST.
Évaluation globale de la personne
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Issu de l’hémogramme, le volume globulaire moyen (VGM)
constitue un indice de la taille des érythrocytes. Le VGM ne
représente pas une valeur sufsamment sensible pour servir
de biomarqueur, mais il permet toutefois de déceler plus tôt
la consommation d’alcool après une longue période d’abstinence que le font les autres valeurs (National Institutes of
Health, 2006).
Une forte consommation d’alcool
pendant quatre à huit semaines entraîne une augmentation du VGM.
L’éthylométrie détecte toute quantité d’alcool présente dans l’air
expiré à la suite d’une profonde inspiration, et ce, jusqu’à ce que
l’ensemble de l’alcool ingéré ait été métabolisé par l’organisme.
Cette mesure peut-être corrélée avec le taux d’alcoolémie et constitue la base de l’interprétation juridique de la consommation d’alcool. La valeur normale révélant l’absence d’alcool dans l’organisme
est de 0,00.
Une éthylométrie ≥ 0,08 % indique une intoxication sur le plan
légal dans la plupart des provinces
(trois verres standards) et se manifeste par une perte d’équilibre et
de coordination.
6
Promotion de saines habitudes de vie
Consommation abusive de médicaments d’ordonnance contre le trouble du décit de l’attention avec ou sans hyperactivité
Les médicaments d’ordonnance pour traiter le trouble du décit de l’attention
avec ou sans hyperactivité (TDAH) gurent parmi les substances les plus couramment consommées de façon abusive. Dans le cadre d’un récent sondage
canadien, les jeunes âgés de 15 à 24 ans affichaient le taux le plus élevé
de consommation de stimulants d’ordonnance, soit une prévalence de 2,4 % au
cours des 12 derniers mois (Centre canadien de lutte contre les toxicomanies
[CCLT], 2013). En 2010-2011, 2,2 % des élèves canadiens du secondaire ont
afrmé avoir consommé des stimulants d’ordonnance à des ns récréatives, et
non thérapeutiques, dans les 12 mois précédant l’enquête (CCLT, 2013).
La consommation abusive de ces médicaments survient lorsqu’une personne
prend les médicaments prescrits pour quelqu’un d’autre ou lorsqu’elle prend
ses propres médicaments, mais d’une manière qui ne respecte pas la posologie. Les médicaments prescrits pour traiter le TDAH sont connus des professionnels de la santé sous leur nom générique (dexamphétamine et
méthylphénidate) ou commercial (Dexedrine md ou Adderall md et Ritalin md ou
Concerta md). Chez les adolescents et les jeunes adultes, ces médicaments sont
également appelés par leur nom anglais dans la langue de la rue, dont les suivants : Skippy, Vitamine R, Cramming Drug (littéralement, la « drogue du bourrage de crâne »), R-Ball, The Smart Drug (la « drogue de l’intelligence »),
Bennies, Black Beauties, Roses, Speed ou Uppers. Le méthylphénidate et
les amphétamines sont des stimulants fréquemment prescrits pour traiter
le TDAH. L’action thérapeutique de ces stimulants consiste à augmenter lentement et progressivement la dopamine, un neurotransmetteur qui intervient
dans l’attention. La dose prescrite est généralement faible au départ, puis elle
augmente graduellement jusqu’à l’obtention des effets thérapeutiques recherchés, soit atteindre une concentration de dopamine dans le cerveau semblable
à celle d’une personne qui n’est pas atteinte du TDAH. La personne qui souffre
d’un TDAH est alors capable de se concentrer. Or, lorsque ces médicaments
sont pris de façon inadéquate (dose ou voie d’administration différente de celle
prescrite), soit en écrasant le comprimé avant de l’inhaler ou de se l’injecter,
par exemple, la concentration de dopamine connaît une augmentation rapide et
fulgurante. Ce faisant, la neurotransmission normale est perturbée, et il s’ensuit fréquemment un état d’euphorie. Par voie orale, si une personne prend le
médicament contre le TDAH à plus forte dose que ne l’indique la posologie, ou
si une personne qui n’est pas atteinte du TDAH prend ce type de médicaments,
il lui devient possible de rester éveillée et de maintenir un niveau de concentration anormalement élevé (Setlik, Bond et Ho, 2009). Toutefois, une consommation abusive continue ou une surdose de stimulants peut provoquer une
anxiété, une panique, des tremblements, une arythmie, une élévation dangereuse de la température corporelle et même une crise cardiaque. De plus, les
adolescents et les jeunes adultes qui cessent de prendre ces stimulants
peuvent souffrir de fatigue et de dépression, un état qui risque d’ouvrir la voie
à la consommation d’autres médicaments, à plus d’abus et à la dépendance.
La principale mission du CCLT consiste à mettre le pouvoir de la science au service de la nation de manière à réduire les méfaits de l’alcool et des drogues sur
la société. À cet effet, le document Sommaire canadien sur la drogue. Stimulants d’ordonnance présente un survol des dernières données scientiques portant sur ces médicaments d’ordonnance, notamment en ce qui a trait à leur
consommation et aux problèmes liés à celle-ci.
L’Ordre des pharmaciens du Québec a récemment créé un site Internet dans le
cadre d’une campagne de sensibilisation qui porte sur la consommation abusive de médicaments d’ordonnance chez les adolescents, en plus d’afcher des
liens vers des ressources utiles à ce sujet. Ce site comprend des renseignements qui s’adressent tant aux adolescents qu’à leurs parents.
RÉFÉRENCES
Centre canadien de lutte contre les toxicomanies (CCLT) (2013). Sommaire
canadien sur la drogue. Stimulants d’ordonnance . Repéré à www.ccsa.ca/
Resource%20Library/CCSA-Prescription-Stimulants-2013-fr.pdf
Setlik, J., Bond, G. R., et Ho, M. (2009). Adolescent Prescription ADHD Medication abuse is rising along with prescriptions for these medications. Paediatrics,
124 (3), 875-880.
RESSOURCE
Ordre des pharmaciens du Québec. Votre ordonnance. Sa dépendance ?
Repéré à www.monordonnance.ca
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
137
6.6 Anomalies
L’ENCADRÉ 6.4 et le TABLEAU 6.5 présentent les constats et les signes cliniques d’un trouble lié à la
consommation d’alcool ou de drogues.
ENCADRÉ 6.4
Constats liés à la consommation d’alcool ou de drogues
Le terme « substance » renvoie aux agents consommés à des
fins non médicales en vue de modifier son humeur ou son
comportement.
• Intoxication : comportement mésadapté produit à la suite
de l’ingestion d’une substance qui agit sur le système nerveux central.
• Dépendance : assujettissement à une drogue, à une substance toxicomanogène, se manifestant au moment de la
suppression de cette dernière par un ensemble de
troubles physiques ou psychiques.
TABLEAU 6.5
• Consommation abusive : consommation quotidienne
nécessaire pour pouvoir fonctionner, incapacité d’arrêter
de consommer, perturbation du fonctionnement social et
professionnel, consommation récurrente malgré la présence d’un danger physique, problèmes d’ordre juridique
liés à la consommation.
• Tolérance : augmentation nécessaire de la quantité
consommée an d’obtenir les effets recherchés.
• Sevrage : ensemble de symptômes physiologiques produit
par l’arrêt de la consommation d’une substance.
Signes cliniques révélant un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues
SUBSTANCE
INTOXICATION
SEVRAGE
Alcool
• Apparence : démarche mal assurée, manque de coordination, nystagmus, rougeur du visage
• Comportement : sédation, soulagement de l’anxiété,
détachement, manque de jugement, comportement
exubérant et désinhibé, verbomanie, troubles d’élocution, troubles de mémoire, irritabilité, dépression,
labilité émotionnelle
• Sans complications. (Survient rapidement après l’arrêt de
la consommation, atteint un sommet au deuxième jour, puis
s’améliore au quatrième ou au cinquième jour.) Forts
tremblements des mains, de la langue et des paupières,
anorexie, nausées et vomissements, malaise, hyperactivité
de la fonction autonome (tachycardie, transpiration, ↑ PA),
céphalée, insomnie, anxiété, dépression ou irritabilité,
hallucinations ou illusions temporaires
• Sevrage de l’alcool ou délire alcoolique (delirium tremens).
(Bien moins courant que le sevrage sans complications ;
survient au cours de la première semaine suivant l’arrêt de
la consommation.) Tremblements forts et irréguliers, hyperactivité marquée de la fonction autonome (tachycardie,
transpiration), vives hallucinations, délire, agitation, èvre
Sédatif et hypnotiques
(benzodiazépines)
• Semblable à l’alcool
• Apparence : démarche mal assurée, manque de coordination
• Comportement : verbomanie, troubles d’élocution,
inattention, troubles de mémoire, irritabilité, labilité
émotionnelle, agressivité sexuelle, manque de jugement,
perturbation du fonctionnement social ou professionnel
• Anxiété ou irritabilité, nausées ou vomissements, malaise,
hyperactivité de la fonction autonome (tachycardie, transpiration), hypotension orthostatique, forts tremblements
des mains, de la langue et des paupières, insomnie marquée, convulsions
Nicotine
• Apparence : ↑ vigilance, ↑ PA systolique, ↑ FC,
vasoconstriction
• Comportement : nausées, vomissements, indigestion
(première fois) ; perte d’appétit, vertiges, étourdissements, sensation d’agitation, stimulation modérée
• Vasodilatation, maux de tête, colère, irritabilité, frustration,
anxiété, nervosité, réveil au cours de la nuit, difcultés de
concentration, dépression, faim, impatience ou agitation,
désir de fumer
Cannabis (marijuana)
• Apparence : rougeur des yeux, tachycardie, sécheresse
buccale, ↑ appétit, goût particulier pour la malbouffe,
manque de coordination et d’équilibre
• Aucun symptôme de sevrage si la consommation est
occasionnelle. Sevrage léger en présence d’une forte
consommation chronique : irritabilité, perturbation du
sommeil, perte de poids, perte d’appétit, transpiration
138
Partie 1
Évaluation globale de la personne
TABLEAU 6.5
Signes cliniques révélant un trouble lié à la consommation d’alcool ou de drogues (suite)
SUBSTANCE
INTOXICATION
SEVRAGE
• Comportement : euphorie, sensation agréable de détente et
de tranquillité, perception temporelle ralentie, ↑ perceptions sensorielles, manque de jugement, retrait social,
anxiété, soupçons ou paranoïa
Cocaïne (y compris
le crack)
• Apparence : dilatation des pupilles, tachycardie ou bradycardie, ↑ ou ↓ PA, transpiration, frissons, nausées
et vomissements, perte de poids, nombreuses marques
d’aiguille (si utilisation par voie IV)
• Comportement : euphorie, verbomanie, hypervigilance,
agitation (« fait les cent pas »), agitation psychomotrice,
perturbation du fonctionnement social ou professionnel,
tendance à vouloir se battre, idées de grandeur, hallucinations visuelles ou tactiles
• Humeur dysphorique (anxiété, dépression, irritabilité),
fatigue, insomnie ou hypersomnie, agitation psychomotrice
Amphétamines
• Semblable à la cocaïne
• Apparence : dilatation des pupilles, tachycardie ou bradycardie, ↑ ou ↓ PA, transpiration ou frissons, nausées et
vomissements, perte de poids
• Comportement : exaltation, verbomanie, hypervigilance,
agitation psychomotrice, tendance à vouloir se battre,
idées de grandeur, manque de jugement, perturbation
du fonctionnement social et professionnel
• Humeur dysphorique (anxiété, dépression, irritabilité),
fatigue, insomnie ou hypersomnie, agitation psychomotrice
Opioïdes (morphine,
héroïne, hydromorphone,
mépéridine)
• Apparence : contraction des pupilles, ↓ PA ↓ pouls,
↓ fréquence respiratoire et ↓ température corporelle,
marques d’aiguille (si utilisation par voie IV)
Note : si la fréquence respiratoire du client est < 12 Resp./min
et qu’il y a une altération importante du niveau de
conscience, il est possible qu’il s’agisse d’une surdose
(overdose). Cette situation urgente nécessite une
intervention (p. ex., l’administration d’oxygène ou de
naloxone, un antidote des opioïdes)
• Comportement : léthargie, somnolence, troubles d’élocution, euphorie initiale suivie d’une apathie, d’une dysphorie et d’un retard psychomoteur, inattention, troubles de
la mémoire, manque de jugement, perturbation du fonctionnement social et professionnel
• Dilatation des pupilles, larmoiement, écoulement nasal,
tachycardie, èvre, ↑ PA, horripilation, transpiration,
diarrhée, bâillements, insomnie, agitation, irritabilité,
dépression, nausées, vomissements, malaise, tremblements, douleurs musculaires et articulaires ; symptômes
s’apparentant beaucoup à ceux du tableau clinique de
la grippe
Promotion de saines habitudes de vie
Évaluation de la consommation de drogue du client
En évaluant la consommation de drogue du client, l’inrmière lui
pose des questions quant aux voies d’administration utilisées.
Si le client indique qu’il consomme des drogues par voie IV, l’infirmière doit s’assurer qu’il a accès à de l’équipement propre
(p. ex., des seringues, de l’eau stérile, des tampons d’alcool, un
garrot, des filtres) et qu’il possède une bonne connaissance
des techniques d’injection sécuritaires. Plusieurs villes canadiennes ont des programmes d’échange de seringues où les
personnes qui consomment des drogues peuvent se procurer
l’équipement nécessaire. Ces programmes s’inscrivent dans une
approche appelée réduction des méfaits ; elle vise à minimiser
les conséquences négatives de comportements à risque (p. ex.,
le VIH, les hépatites virales, une cellulite, un abcès dans le cas
de la consommation de drogues injectables) sans nécessairement exiger que le client devienne abstinent (AIIC, 2011). L’inrmière devrait être en mesure d’orienter le client vers le
programme d’échange de seringues et de lui fournir de l’information quant aux techniques d’injection plus sécuritaires.
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
139
6
Évaluation de la consommation de drogue du client (suite)
CATIE est un organisme canadien qui rend accessible l’information à jour et impartiale sur le VIH et l’hépatite C. Il offre
entre autres des ressources quant à la réduction des méfaits
chez les utilisateurs de drogues injectables. L’inrmière peut
utiliser les nombreuses ressources an de donner un enseignement approprié au client. Ces ressources sont disponibles au www.catie.ca/fr/prevention/utilisation-drogues.
RÉFÉRENCE
Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC)
(2011). La réduction des méfaits et les drogues actuellement
illicites : Implications pour les politiques, la pratique, la
formation et la recherche en soins infirmiers. Repéré à
http://cna-aiic.ca/~/media/cna/page-content/pdf-fr/harm_
reduction_2011_f.pdf
Évaluation et jugement clinique
Dossier : Michel St-Hilaire (suite)
Monsieur St-Hilaire est hospitalisé depuis deux
jours. Vous remarquez qu’il parle peu et qu’il
n’a pas adressé la parole à son voisin de
chambre une seule fois depuis son arrivée. Vous
lisez dans les notes au dossier qu’il dort en
moyenne de deux à quatre heures par nuit et
que son sommeil est agité. Vous observez monsieur St-Hilaire alors qu’il est alité et vous
remarquez qu’il est très maigre (1,85 m, 62 kg).
Il n’a presque rien mangé au déjeuner, seulement une demi-rôtie, et il a bu deux cafés.
Après s’être mouché, il a saigné du nez. Il dit
ne pas avoir d’appétit : « Je n’ai plus faim depuis
un bout de temps. Je n’ai plus d’énergie et je
n’ai plus de plaisir à faire mon travail non
plus. » Vous observez des tremblements aux
mains. Vous le questionnez de nouveau sur sa
consommation d’alcool, et il vous cone que
dans les dernières semaines, il buvait régulièrement de six à neuf bières chaque jour.
Vous croisez son ex-conjointe dans le corridor. « Je suis passée chez lui pour récupérer
des effets personnels. Je crois que son problème
d’alcool est pire qu’avant. Dans les dernières
semaines où j’étais encore avec lui, il lui arrivait assez souvent de ne pas manger au souper,
il s’installait plutôt devant la télé avec une bière
jusqu’à ce qu’il aille se coucher vers minuit.
Selon moi, il devait en boire trois ou quatre
chaque soir. Par contre, j’ai regardé tantôt dans
le frigo, et il était presque vide si l’on exclut la
bière qui s’y trouvait. La maison est sale comme
jamais, et il y a des bouteilles vides partout
dans le salon », vous rapporte-t-elle.
1. Considérant que monsieur St-Hilaire est aux prises avec un problème de consommation d’alcool
depuis plus de six mois, dites ce que vous devriez observer relativement aux examens paracliniques
suivants : GGT, AST, volume globulaire moyen, éthylométrie.
2. Monsieur St-Hilaire présente-t-il des signes de sevrage ? Si oui, lesquels ?
3. Que pourrait-il se produire si aucune action n’est entreprise pour traiter le sevrage de monsieur
St-Hilaire ?
4. De quel trouble mental souvent associé au problème de consommation d’alcool monsieur St-Hilaire
est-il susceptible d’être atteint ?
5. Relevez les critères du trouble lié à l’utilisation de l’alcool que présente monsieur St-Hilaire selon
le DSM-5.
140
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Pourquoi est-il important de questionner systématiquement les clients par rapport à leurs
habitudes de consommation ?
2. Quels sont les outils à votre disposition pour évaluer
la consommation d’alcool chez un adulte et que
permettent-ils d’évaluer ?
3. Pourquoi est-il important d’évaluer les habitudes
de consommation d’alcool et d’autres substances
chez une femme enceinte ou qui désire l’être ?
6. Expliquez pourquoi les personnes âgées présentent
un risque accru si elles consomment de l’alcool de
façon abusive.
4. Que risque-t-il de se produire si une femme enceinte
consomme de l’alcool pendant sa grossesse ?
7. Quel outil pouvez-vous utiliser pour évaluer la
consommation d’alcool chez une personne âgée ?
5. Que risque-t-il de se produire si une femme enceinte
consomme des drogues illicites durant sa
grossesse ?
Chapitre 6
Évaluation de la consommation de substances
6
141
Dossier : Korina Beauregard
Les parents Beauregard se présentent à l’urgence
avec la petite Korina, leur llette âgée de trois ans.
La mère, Sandrine, vous raconte que Korina est
tombée alors qu’elle courait dans la maison avec
son trotteur plus tôt cet après-midi. Depuis, elle
est pleurnicharde et elle n’a pas dormi pendant
sa sieste. Vous questionnez la mère sur les circonstances de l’accident, et Michel, son conjoint,
vous répond que Korina est tombée sur le coude
gauche sur le plancher de la cuisine après qu’elle
a heurté un obstacle avec son trotteur.
Vous procédez à l’examen physique de
Korina. Lorsque vous vous approchez d’elle, la
fillette adopte une position défensive et de
retrait. Elle vous regarde d’un air méant, elle
vous semble triste et anxieuse. Vous retirez son
chandail et vous observez son coude gauche.
Celui-ci est œdématié, et vous constatez des
éraures sur la face externe. Il est impossible de
mobiliser son bras en raison de la douleur.
Vous poursuivez l’examen physique et vous
constatez que Korina présente quelques
anciennes ecchymoses jaunâtres sur les jambes.
Sa mère vous explique nerveusement que sa lle
La violence conjugale et la maltraitance envers les
enfants et les aînés constituent d’importants problèmes sociaux que les professionnels de la santé
doivent pouvoir reconnaître et évaluer. Au Québec,
la Loi sur la protection de la jeunesse (c. P-34.1)
et la Politique d’intervention en matière de violence conjugale (ministère de la Santé et des
Services sociaux [MSSS], 1995) assurent un certain cadre de protection pour les jeunes et les enfants. Aussi, à l’instar de la Nouvelle-Écosse,
du Nouveau-Brunswick, de l’Ontario, de l’Île-duPrince-Édouard et de l’Alberta (Gnaedinger, 1989),
le Québec s’est doté d’outils et de stratégies an
de disposer de ressources adaptées pour l’intervention contre la maltraitance envers les aînés. Au
cours des dernières années, ces outils se sont multipliés dans la province. En particulier, le ministère de la Famille et des Aînés (2010) a mis sur
pied une panoplie d’actions regroupées dans un
plan (pour 2010-2015) destiné à contrer la maltraitance envers les personnes aînées. En outre, les
conseils, tables de concertation et groupes de
recherche ont proliféré an de produire de nouvelles analyses et de mieux appuyer la création de
politiques publiques et de plans d’intervention
adaptés à la réalité des aînés. Parallèlement à ce
regain d’intérêt pour la question des personnes
âgées, il faut rappeler que, comme tout autre
citoyen québécois, celles-ci sont protégées par la
Charte des droits et libertés de la personne, le Code
est tombée de son lit il y a environ une semaine.
Puisque celle-ci ne s’est pas plainte par la suite,
elle n’avait pas jugé bon de consulter à ce
moment.
La taille et le poids de Korina sont normaux
pour son groupe d’âge, son développement langagier vous apparaît toutefois inférieur à la
moyenne, et elle vous semble peu curieuse et
renfermée, contrairement aux autres enfants de
cet âge que vous voyez habituellement.
7
La mère, âgée de 23 ans, vous semble attentionnée envers sa lle, et elle se sent responsable
de ces accidents. Michel, 24 ans, n’est pas le père
biologique de Korina, il est le nouveau conjoint
de la mère depuis environ 8 mois, à la suite du
divorce de celle-ci. À la n de l’entrevue, vous
les informez que le médecin viendra évaluer
Korina sous peu. Vous remarquez à ce moment
que la mère a de la difculté à se lever, elle
semble courbaturée. Vous remarquez aussi la
présence de près d’une dizaine de petites
marques circulaires sur son avant-bras droit.
Lorsque vous la questionnez à ce sujet, elle vous
mentionne qu’elle s’est brûlée en fumant.
civil du Québec et le Code criminel. Les principaux organismes de soins inrmiers et médicaux
tels que l’Ordre des inrmières et inrmiers du
Québec et le Collège des médecins du Québec ont
mis sur pied des politiques relatives à cette question et reconnaissent la nécessité pour les professionnels de la santé d’évaluer la violence familiale.
En somme, la violence et la maltraitance à l’égard
des enfants et des aînés constituent des formes de
violence qui incitent les intervenants à concevoir
des stratégies et des plans d’intervention adaptés
à ces populations plus vulnérables.
7.1
Dénition de la violence
conjugale
Il existe plusieurs dénitions de la violence
conjugale ; certaines sont de nature scolaire (voir
notamment Saltzman, Fanslow, McMahon et collab., 1999), d’autres proviennent d’instances gouvernementales. Dans le cadre de ce chapitre, la
dénition retenue s’inspire de celle du MSSS :
la violence conjugale est la violence faite au sein
du couple. Il s’agit d’une forme de pouvoir exercée par un conjoint pour dominer l’autre, et elle
peut prendre diverses formes : psychologique,
verbale, physique, économique, émotionnelle et
même sexuelle.
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
143
En somme, cette violence conjugale revêt plusieurs dimensions selon le MSSS.
• Une violence psychologique qui se traduit par
l’humiliation de l’autre, la dévalorisation, le
dénigrement, le mépris, le chantage et l’isolement de la personne violentée.
• Une violence verbale qui se manifeste dans les
insultes, les hurlements, les propos dégradants
et les menaces du partenaire violent (la violence verbale est le corollaire de la violence
psychologique).
• Une violence physique qui se manifeste par des
sévices de toutes sortes (bousculade, morsure,
brûlure, fracture, voire homicide) et qui
démontre la domination de l’agresseur.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Korina,
quel type de violence
suspectez-vous ?
• Une violence sexuelle qui se manifeste par des
agressions sexuelles, du harcèlement, de l’intimidation, de l’humiliation et de la brutalité dans
une relation sexuelle non consentie.
• Une violence économique qui se traduit par la
construction d’une situation de dépendance
du conjoint engendrée par le contrôle, voire la
privation des ressources nancières nécessaires aux soins et au fonctionnement de la vie
familiale.
7.2
Dénition de la maltraitance
et de la négligence envers
les enfants
Au Québec, un instrument légal encadre la protection des enfants mineurs. Ainsi, la Loi sur la protection de la jeunesse fournit de l’information aux
intervenants et aux professionnels de la santé quant
aux procédures et aux recours légaux existants pour
garantir l’intégrité physique et mentale de l’enfant.
Aux termes de cette loi, la maltraitance et la négligence renvoient plus spéciquement aux actes qui
compromettent sa sécurité et son développement,
voire au risque que le milieu familial (parent,
tuteur, adulte responsable) lui porte préjudice.
Q
uestion de suivi
Quels éléments évoqués
dans la situation de Korina
pourraient vous laisser
croire à de la maltraitance
envers cette enfant ?
L’article 38 de cette loi stipule d’ailleurs ceci :
« Pour l’application de la présente loi, la sécurité
ou le développement d’un enfant est considéré
comme compromis lorsqu’il se retrouve dans
une situation d’abandon, de négligence, de mauvais
traitements psychologiques, d’abus sexuels ou
d’abus physiques ou lorsqu’il présente des troubles
de comportement sérieux. »
Plus concrètement, la négligence et les mauvais
traitements peuvent revêtir plusieurs facettes :
• la négligence renvoie au défaut de combler les
besoins de base de l’enfant, sur les plans physique, éducatif, médical et émotionnel ;
• la violence physique correspond aux blessures corporelles consécutives au fait de donner des coups
144
Partie 1
Évaluation globale de la personne
de poing ou des coups de pied à l’enfant, de le
mordre, de le brûler, de le secouer ou à tout autre
préjudice qui lui est inigé. Même si le parent ou la
personne qui a la garde de l’enfant n’a pas l’intention
de lui nuire, ces actes sont considérés comme de
mauvais traitements ;
• la violence sexuelle inclut les caresses aux
organes génitaux de l’enfant, l’inceste, la pénétration, le viol, la sodomie, la grossière indécence et l’exploitation commerciale au moyen
de la prostitution ou de la production de matériel pornographique ;
• la violence psychologique est un mode de comportement qui nuit à l’enfant dans son développement affectif ou dans son estime de soi. Elle
comprend souvent l’humiliation, le rejet, les
menaces et les privations affectives (manque de
soutien ou d’amour).
7.3
Dénition de la maltraitance
et de la négligence envers
les personnes âgées
Les codes de déontologie, les procédures et les protocoles d’intervention indiquent la marche à suivre
si un professionnel de la santé reconnaît les signes
de mauvais traitements chez une personne. Comme
il est obligatoire de rapporter les cas de sévices, il
faut seulement avoir des raisons de penser que la
maltraitance ou la négligence envers une personne
âgée ont eu lieu an de faire appel aux autorités.
Le personnel inrmier, les médecins et les travailleurs sociaux ont tort de croire qu’ils doivent avoir
la preuve du mauvais traitement avant de le signaler
aux autorités compétentes.
Il est important que les professionnels inrmiers
ainsi que les intervenants sociaux œuvrant dans
les communautés frontalières (Canada/ÉtatsUnis, Québec/Ontario, Québec/ Nouveau-Brunswick,
Québec/Terre-Neuve-et-Labrador) rapportent les cas
de sévices aux autorités compétentes an que la victime soit prise en charge par son réseau de santé et de
services sociaux le plus tôt possible. Les inrmières
travaillant dans ces milieux particuliers ont tout intérêt à connaître leurs homologues des communautés
voisines an de s’assurer que le cas est reconnu et que
la personne est prise en charge rapidement.
Bien que les dénitions précises de la maltraitance et de la négligence envers les personnes âgées
varient selon les pays, les provinces, les professions
et les protocoles propres aux différents établissements, l’American Medical Association (AMA) a mis
au point une liste de dénitions cliniquement utile
TABLEAU 7.1 (Aravanis, Adelman, Breckman et
collab., 1992). Aux États-Unis, le National Research
Council (Bonnie et Wallace, 2003) suggère ces dénitions de la violence contre les aînés :
TABLEAU 7.1
Maltraitance et négligence envers les personnes âgées
selon l’American Medical Association
TYPE DE MALTRAITANCE
DÉFINITION
Sévices physiques
Actes violents qui se traduisent ou qui pourraient se traduire par des blessures, des douleurs,
des déciences ou des maladies.
Négligence physique
Carence en matière de soins, de médicaments, d’hygiène, de nourriture ou d’un abri décent
engendrée par l’inattention involontaire ou délibérée d’un membre de la famille ou d’un soignant.
Violence psychologique
Comportements qui provoquent de l’angoisse chez la personne âgée.
Négligence psychologique
Inattention involontaire ou délibérée menant à une carence de stimulation sociale de base.
Abus nancier
Mauvaise utilisation délibérée des ressources nancières ou matérielles de la personne âgée
sans son consentement éclairé.
Négligence nancière
Non-utilisation des capitaux de la personne âgée pour lui fournir les services requis.
7
Source : Adapté d’Arvanis et collab. (1992)
• des actions intentionnelles qui causent des blessures ou qui constituent des risques importants
pour la sécurité d’un aîné vulnérable (que ces
gestes soient posés dans l’intention ou non de le
blesser). Ces gestes sont normalement commis
par un aidant ou par une personne qui bénécie
de la conance de cet aîné.
• l’incapacité par une personne aidante ou par
toute personne qui est responsable d’un aîné et
qui bénécie de sa conance de lui fournir des
soins satisfaisants, de répondre à ses besoins
minimaux ou de le protéger.
Au Québec, le Plan d’action gouvernemental
pour contrer la maltraitance à l’égard des personnes aînées 2010-2015 propose une autre dénition admise de la maltraitance des aînés :
« Il y a maltraitance quand un geste singulier ou
répétitif, ou une absence d’action appropriée, se
produit dans une relation où il devrait y avoir
de la conance et que cela cause du tort ou de
la détresse chez une personne aînée. » (ministère
de la Famille et des Aînés, 2010, p. 17)
Cette dénition est une traduction libre et une reformulation des esquisses de dénition proposées par
l’Organisation mondiale de la Santé qui se penchait
sur la question dès 2002.
7.4
Effets physiques
de la violence
Selon les études américaines de Tjaden et Thoennes
(2000), un peu plus de 1 000 000 de femmes aux
États-Unis seraient physiquement ou sexuellement
agressées par leur conjoint. Ces chercheurs afrment que de 5 à 51 % des femmes américaines
seront victimes de violence conjugale au moins une
fois dans leur vie, le taux moyen se situant entre
25 et 35 %. Aussi élevés que soient ces chiffres, ils
représentent une sous-estimation de la véritable
fréquence de la violence conjugale, notamment en
ce qui concerne les données liées aux crimes.
Les femmes sont beaucoup plus susceptibles
d’être agressées physiquement ou sexuellement
par un partenaire intime actuel ou antérieur
que par une connaissance, un membre de la famille,
un ami ou un étranger (Rennison, 2003 ; Tjaden et
Thoennes, 2000).
Au Québec, 19 371 personnes ont subi de la violence dans un contexte conjugal en 2012 (ministère
de la Sécurité publique, 2012). Ces chiffres représentent non pas des statistiques, mais bien des actes
rapportés aux services policiers. Dans un portrait statistique, l’Institut de la statistique du Québec (2011)
indique que 121 900 Québécoises ont connu une forme
mineure ou majeure de violence au sein d’une relation
conjugale. La violence conjugale représentait près du
quart des actes criminels rapportés aux corps policiers
du Québec. Depuis 2008, ces actes de violence augmentent considérablement, alors que les crimes
contre la personne ont tendance à diminuer de près
de 5 % par an. La violence conjugale est également
une réalité qui s’exprime de manière différente selon
la situation géographique. En 2012, la Côte-Nord,
l’Abitibi-Témiscamingue et l’Outaouais gurent au
sommet du palmarès des taux les plus élevés de violence conjugale par 100 000 habitants. Pour la même
année, les taux de violence conjugale de ces régions
sont en fait au-delà de deux fois plus élevés que ceux
des régions comme le Bas-Saint-Laurent, l’Estrie ou
Chaudière-Appalaches (ministère de la Sécurité
publique, 2012).
Chapitre 7
Q
uestion de suivi
À la lumière de ces données, qui serait le premier
suspect qui vous viendrait
en tête concernant les petites marques circulaires sur
l’avant-bras de la mère de
Korina, madame Beauregard ?
Quel est votre rôle comme
inrmière dans ce cas-ci ?
Évaluation de la violence familiale
145
Q
uestion de suivi
En tant qu’inrmière, quel
est votre devoir dans la
situation de Korina ?
En 2007, aux États-Unis, les services de protection
de l’enfance ont dépisté 794 000 enfants victimes de
maltraitance. Parmi ces enfants, une proportion
d’environ 59 % ont été négligés, 11 % ont subi des
violences physiques, 8 % ont été victimes de sévices
sexuels, 8 % ont été émotionnellement ou psychologiquement maltraités, et environ 1 % étaient médicalement négligés (U.S. Department of Health
and Human Services, 2009). Le décès d’environ
1 760 enfants pour cause de mauvais traitements a
été conrmé. Les jeunes enfants constituent la majorité de ces décès : plus de 80 % des enfants décédés
des suites de maltraitance étaient âgés de moins de
4 ans. Bien qu’un certain nombre d’enfants soient
blessés par des personnes extérieures à la famille et
qui en ont la garde, environ 70 % des enfants blessés
l’ont été par un ou par les deux parents. Au Québec,
selon le bilan des directeurs de la protection de la
jeunesse, en 2013-2014, les centres jeunesse du
Québec ont reçu 82 919 signalements. De ce nombre,
32 661, soit 42,3 % des signalements, ont été retenus : 7 550 enfants ont été suivis pour négligence,
119 pour abandon, 1 822 pour sévices sexuels,
6 889 pour mauvais traitements physiques et les
autres pour troubles de comportement ou autres difcultés (Association des centres jeunesse du Québec,
2014). Comme dans les cas de violence envers les
personnes âgées, des motifs raisonnables de croire
qu’un enfant a été maltraité sont sufsants pour
faire un rapport aux autorités compétentes. Attendre
qu’un diagnostic de maltraitance soit établi peut
mettre les enfants en danger de subir d’autres formes
de violence et de blessures.
Une somme considérable de travaux réalisés au
cours de la dernière décennie a permis d’établir que
la violence conjugale a un effet indéniable sur la
santé à long terme des femmes (Sheridan, Nash,
Poulos et collab., 2009). Les blessures constituent
de toute évidence le risque de première importance
pour leur santé. Les blessures cutanées sont causées
par des coups, des pressions ou encore par des
objets tranchants. Les blessures par coups sont
les plus fréquentes chez les victimes de violence
conjugale (Sheridan et Nash, 2007). On parle de
lacérations lorsque ces coups nissent par déchirer
les tissus de la peau. Lorsqu’un instrument tranchant est utilisé (p. ex., un couteau, un rasoir, un
scalpel, du verre), il s’agit plutôt de coupure ou
d’incision. La strangulation est également une forme
physique de l’expression de la violence conjugale
dont les signes sont reconnaissables sur le corps des
victimes (Sheridan, 2007 ; Sheridan et collab., 2009 ;
Taliaferro, Hawley, McClane et collab., 2009).
Selon plusieurs études, les femmes victimes de
violence sont plus sujettes aux problèmes de santé
chroniques, y compris les troubles neurologiques,
gastro-entérologiques et gynécologiques ainsi que
la douleur chronique (Campbell, 2002 ; Nicholaidis
et Liebschutz, 2009). Il a aussi été démontré que
146
Partie 1
Évaluation globale de la personne
les femmes victimes de violence visitent plus souvent les professionnels de la santé que les autres
femmes, ce qui a des conséquences à la hausse sur
les coûts des soins de santé. Sur le plan de la santé
mentale, les femmes violentées ont plus de tendances suicidaires et souffrent également davantage de dépression, de symptômes liés à l’état de
stress post-traumatique (ESPT), ainsi que de problèmes de toxicomanie (Warsaw, Brashler et Gill,
2009). Les relations sexuelles forcées qui accompagnent les violences physiques dans 40 à 45 %
des cas contribuent à une foule de problèmes de
santé associés à la fonction de reproduction : les
douleurs pelviennes chroniques, les grossesses
non désirées, les infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), dont le virus de l’immunodécience humaine (VIH), et les infections
urinaires (Campbell et Soeken, 1999a). Les sévices
subis au cours de la grossesse représentent également un risque important pour la santé, car ils ont
de graves conséquences à la fois pour la femme
enceinte (p. ex., la dépression, la toxicomanie) et
pour l’enfant (p. ex., une insufsance pondérale à
la naissance, un risque accru d’être victime de
violence) (Goodman, 2009 ; Murphy, Schei, Myhr
et collab., 2001).
Bien que plus de la moitié des femmes maltraitées disent avoir été blessées, de 25 à 30 % d’entre
elles seulement déclarent avoir effectivement cherché à obtenir des soins de santé pour l’une des
blessures subies (Saltzman et Houry, 2009).
Toutefois, la majorité des femmes victimes de violence (80 %) disent avoir consulté des professionnels de la santé pour une raison quelconque, que
ce soit pour subir des examens ou pour l’un des
problèmes de santé décrits précédemment. Parce
que de nombreuses femmes maltraitées ne sont pas
encore prêtes à chercher de l’aide auprès d’un
centre d’hébergement ou du système de justice, le
réseau de la santé peut devenir un point de contact
extrêmement important pour les sortir du cycle de
la violence. En reconnaissant les sévices inigés
le plus tôt possible, les intervenants peuvent espérer atténuer ou éviter la violence et, à long terme,
minimiser ou enrayer les problèmes de santé qui
y sont associés.
Les effets sur la santé de la maltraitance inigée
aux personnes âgées ne sont pas aussi bien documentés que ceux liés à la violence conjugale ou aux
mauvais traitements envers les enfants. Les complications découlant de blessures intentionnelles
peuvent aller d’une légère douleur et de l’inconfort
à des traumatismes causant la mort (Dyer, Connolly
et McFeely, 2003). Les saignements consécutifs à
des blessures intentionnelles peuvent entraîner des
changements majeurs dans l’homéostasie circulatoire, ce qui conduit à d’importantes uctuations
de la pression artérielle et du pouls, à un état de
choc, voire au décès. Les infections localisées
peuvent évoluer vers une septicémie généralisée et
causer la mort, dans le cas de personnes vieillissantes immunodéprimées. Une agression et le stress
qui s’ensuit peuvent entraîner des complications
cardiaques. Toutes les ITSS et les problèmes associés aux violences sexuelles ont les mêmes incidences chez les femmes âgées que chez les plus
jeunes. En outre, les femmes ménopausées ont les
muqueuses vaginales plus fragiles, un effet secondaire de la diminution de la production d’œstrogènes (Poulos et Sheridan, 2008).
Les sévices physiques que subissent les personnes âgées sont souvent jumelés avec de la négligence. Celle-ci, intentionnelle ou non, peut se
manifester par des symptômes de déshydratation
et de malnutrition. Ainsi, il arrive que plusieurs
membres de la famille ou d’autres personnes s’occupant de la personne âgée la privent de façon
consciente et malveillante de nourriture, d’eau, de
médicaments et des nécessités de base ; ils peuvent
même voler les avoirs nanciers de gens âgés
dépendants. Ce type de négligence est souvent de
nature criminelle.
Des membres de la famille ou des personnes qui
travaillent avec une personne âgée peuvent aussi
être aux prises avec leurs propres problèmes de
santé, sur le plan physique ou cognitif. Malgré leurs
bonnes intentions, ils font parfois preuve de négligence non intentionnelle envers l’aîné. Même si
elle n’est généralement pas considérée comme un
crime, la négligence involontaire doit être signalée
à des organismes de protection des adultes. Par
exemple, les centres locaux de services communautaires (CLSC) peuvent fournir de l’aide. Par ailleurs,
l’autonégligence suscite des questions au sujet du
droit de la personne âgée à vivre de manière autonome ; ces questions demeurent souvent sans
réponse, car il est difcile de statuer entre l’obligation sociale de s’occuper d’une personne soi-disant
incapable de prendre soin d’elle-même et le droit
de celle-ci à demeurer autonome. Toutefois, les
soupçons d’autonégligence doivent aussi être rapportés aux services de protection des adultes.
Il existe de nombreux effets possibles à long
terme sur les plans physique et psychologique de la
maltraitance envers les enfants. Les conséquences
immédiates peuvent inclure un éventail de blessures physiques telles que les ecchymoses, les fractures et les lacérations, et cela peut aussi comprendre
des sévices importants comme le syndrome du bébé
secoué. De plus, des formes graves de mauvais traitements peuvent causer le décès ou entraîner des
incapacités de longue durée telles que l’arriération
mentale, la cécité et l’invalidité physique.
La maltraitance à l’égard de l’enfant peut avoir
des effets sur son développement en brisant le lien
d’attachement entre celui-ci et la personne qui en
prend soin (Arnow, 2004 ; Corso, Edwards, Fang et
collab., 2008). La maltraitance à répétition peut
conduire à des changements dans la structure et la
chimie du cerveau, ce qui peut mener à long terme
à des problèmes physiques, psychologiques, affectifs et sociaux, puis à un dysfonctionnement cognitif à l’âge adulte (Hagele, 2005). Les enfants victimes
de violence sont 11 fois plus susceptibles d’être
arrêtés pour des crimes violents quand ils sont
mineurs et 2,7 fois plus susceptibles d’être appréhendés pour avoir commis des crimes violents au
cours de leur vie d’adulte (English, Widom et
Brandford, 2004). Environ un tiers des enfants maltraités feront subir des sévices physiques à leurs
propres enfants. Aux États-Unis, deux personnes
sur trois inscrites aux programmes de traitement
de la toxicomanie rapportent avoir été victimes de
sévices au cours de leur enfance.
7
Voici des exemples de facteurs de risque qui
peuvent contribuer à la maltraitance envers les
enfants (Child Welfare Information Gateway, 2007) :
• une décience ou des retards mentaux chez l’enfant qui risquent d’augmenter le fardeau de la
personne qui en prend soin ;
• l’isolement social des familles ;
• le manque de compréhension des parents quant
au développement de l’enfant et de ses besoins ;
• une histoire de violence familiale des parents ;
• la pauvreté et les autres problèmes socioéconomiques tels que le chômage ;
• la désorganisation familiale, son éclatement et
la violence, notamment conjugale ;
• le manque de cohésion familiale ;
• l’abus de consommation de substances dans
la famille ;
• de jeunes parents, un parent non biologique ;
• une mauvaise relation parent-enfant et des interactions négatives ;
• les pensées et les émotions des parents entraînant des comportements de maltraitance ;
• le stress et la détresse des parents, comme
la dépression ou d’autres problèmes de santé
mentale ;
• la violence dans la communauté.
Q
uestion de suivi
Quels sont les facteurs de
risque de maltraitance ou
de violence envers les en‑
fants dans la situation de
Korina ?
Malgré le fait que certains facteurs de risque
soient reconnus pour entraîner la maltraitance
envers les enfants, une étude portant sur des cas non
dépistés de traumatismes crâniens a relevé plusieurs
facteurs signicatifs liés à la non-reconnaissance
de ces blessures (Jenny, Hymel, Ritzen et collab.,
1999). Ces chercheurs ont ainsi constaté que les cas
non dépistés de violence physique ayant causé
des blessures à la tête surviennent plus souvent chez
les enfants blancs que chez les enfants des minorités
culturelles, de même que chez les enfants vivant
avec les deux parents, ainsi que chez les jeunes
enfants et chez ceux présentant des symptômes
moins apparents.
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
147
7.5
Dépistage de la
violence conjugale
son contenu an de l’adapter à son milieu de soins
de santé ENCADRÉ 7.1.
Le dépistage systématique et généralisé de la violence conjugale consiste à demander à toute
femme, chaque fois qu’elle se présente dans un
milieu de soins de santé, si elle a été maltraitée
par son mari, un petit ami, un autre partenaire ou
un ex-partenaire. La majorité d’entre elles, maltraitées ou non, disent être favorables à un dépistage systématique et croient que cela aiderait les
femmes à obtenir de l’aide pour régler les problèmes de violence conjugale (Anglin, 2009 ;
Glass, Dearwater, Campbell, 2001). Le dépistage
systématique et généralisé de la violence conjugale a été demandé par l’OIIQ, comme cela se fait
aux États-Unis ; par exemple, par l’American
Nurse Association, l’American College of Nurse
Midwives, l’Association of Women’s Health and
Obstetrics and Neonatal Nursing, l’Emergency
Nurses Association, l’International Association
of Forensic Nurses, le Nursing Network on
Violence Against Women International (Mitchell
et James, 2009).
7.5.1
Le site du gouvernement du
Québec consacré à la violence
conjugale est accessible au
www.violenceconjugale.
gouv.qc.ca.
ENCADRÉ 7.1
Outils de dépistage
Un test de dépistage des sévices est largement utilisé dans de nombreux établissements de soins de
santé. Il s’agit du Test de dépistage des abus (Abuse
Assessment Screen: AAS), traduit dans au moins
sept langues et apprécié pour sa validité et sa abilité (Soeken, McFarlane, Parker et collab., 1998).
Le test a été soustrait aux droits d’auteurs an que
le personnel inrmier puisse revoir et restructurer
1. Lorsque vous vous disputez avec votre partenaire, avez-vous peur de lui
(ou d’elle) ?
2. Lorsque vous vous disputez avec votre partenaire, croyez-vous qu’il (ou elle)
tente de vous blesser émotionnellement ?
3. Votre partenaire essaie-t-il (ou elle) de vous contrôler ? de savoir où vous
allez ? de savoir qui vous rencontrez ? Détermine-t-il (ou elle) la somme
d’argent dont vous devez disposer ?
4. Votre partenaire (ou quiconque) vous a-t-il (ou elle) déjà gié(e), poussé(e),
frappé(e) ou a-t-il (ou elle) utilisé une autre forme de violence physique an
de vous blesser ?
Source : Nursing Research Consortium on Violence and Abuse (NRCVA) (1988)
Partie 1
Le Family Violence Prevention Fund (1999)
a mis au point un protocole concernant la fréquence recommandée du dépistage des sévices
ENCADRÉ 7.2. Au Québec, il existe une banque de
ressources adaptées aux familles, aux proches et
aux intervenants qui côtoient des personnes victimes de violence conjugale. Cette plate-forme
informationnelle rappelle notamment à quel point
il est nécessaire de briser les tabous en matière
de violence conjugale, et elle évoque ou mentionne aussi que ce type de violence peut se produire dans tous les milieux de vie.
7.5.2
Évaluation
Si une femme répond par l’afrmative à l’une des
questions de l’AAS, le personnel inrmier doit
tenter d’évaluer la nouveauté et la gravité des
sévices. Un bon point de départ est de demander
Test de dépistage des abus
La violence, commune dans le monde d’aujourd’hui, peut même survenir dans
nos foyers. Parce que la violence touche beaucoup de gens, je demande maintenant systématiquement à toutes mes clientes (ou clients) de répondre aux
questions concernant la violence dans leur vie.
Tous les couples se disputent à l’occasion, même les plus harmonieux.
148
De nombreux professionnels de la santé présentent le test à l’aide d’un bref énoncé d’introduction, par exemple : « Parce que la violence
conjugale est très répandue dans notre société, il
est demandé à toutes les femmes de répondre aux
questions suivantes. » Ou encore : « Parce que la
violence conjugale a de graves conséquences sur
la santé, nous demandons à toutes nos clientes
de répondre aux questions suivantes. » Cette
entrée en matière a pour but de rassurer la femme,
d’une part, en annonçant la teneur du questionnaire et, d’autre part, en lui assurant qu’elle n’est
pas personnellement ciblée par ce test de
dépistage.
Évaluation globale de la personne
5. Depuis que vous avez été enceinte (ou quand vous étiez enceinte), votre partenaire vous a-t-il déjà mordue, giée, poussée, frappée ou a-t-il fait usage
de violence physique an de vous blesser ?
6. Votre partenaire vous a-t-il (ou elle) déjà forcé(e) à participer à des activités
sexuelles contre votre gré ?
Si vous obtenez une réponse positive à l’une des questions, dites à la
personne : « Merci de m’avoir fait part de ces éléments d’information. Pourriez-vous me parler un peu plus de la dernière fois où une telle situation
s’est produite ? »
Le Nursing Research Consortium on Violence and Abuse (1988) encourage la
reproduction, la modication et/ou l’usage de ce questionnaire de dépistage
dans les examens de routine ou dans les cas de violence conjugale.
ENCADRÉ 7.2
Résumé du protocole de dépistage pour les femmes âgées de 14 ans et plus
MILIEU
OBSTÉTRIQUE/GYNÉCOLOGIE
Fréquence du dépistage de la violence conjugale.
À chaque visite prénatale et postnatale, à chaque nouvelle
relation intime, à toutes les visites de routine gynécologique
(périodiques et basées sur des symptômes), à toutes les
visites de planication familiale et à toutes les visites dans
les cliniques d’avortement et d’ITSS.
SOINS PRIMAIRES
À chaque première visite à la suite d’une nouvelle plainte, à
chaque nouvelle rencontre intime que fait la personne,
à chaque nouvelle relation intime et à tous les examens
périodiques.
SERVICE D’URGENCE ET DE SOINS D’URGENCE
Toutes les femmes, à toutes les visites.
SANTÉ MENTALE
À chaque évaluation initiale, à chaque nouvelle relation intime
et à chaque année d’un traitement continu ou périodique.
7
HOSPITALISATION
Pour toutes les admissions et tous les congés du centre hospitalier.
Source : Adapté de Family Violence Prevention Fund (1999)
à la femme de s’exprimer : « Parlez-moi de ces
mauvais traitements dans votre relation. » Même
si la femme ne répond « oui » qu’à la première
question et qualie le mauvais traitement comme
étant « seulement émotionnel », ou si elle décrit
les sévices comme « pas si mal », ou si elle dit
« c’est seulement que nous nous disputons souvent », l’inrmière pourra peu à peu en savoir plus
sur les réels sévices dont elle est victime au cours
de l’évaluation de la situation. Ce type d’évaluation par étape rappelle le geste de peler un oignon ;
ainsi, tout au long de l’évaluation, l’inrmière
pourra découvrir une situation plus violente que
le laisse sous-entendre la personne. Ce n’est pas
un déni que fait la femme de la violence qu’elle
subit, mais plutôt une minimisation normale causée par les traumatismes qui accompagnent souvent la violence.
Il faut que le personnel inrmier montre qu’il
se sent concerné et même qu’il est bouleversé et
peiné par le degré de violence que la cliente subit.
Un message important à transmettre au cours de
l’évaluation, et ce, à plusieurs reprises, est que la
victime n’est pas coupable de cette violence. Un
autre message primordial à faire passer est que
l’inrmière s’intéresse à la situation de la personne et qu’il existe des ressources pour lui venir
en aide. De plus, la victime doit savoir que plusieurs problèmes de santé peuvent survenir à
cause de la violence dans la famille et qu’il est
nécessaire de procéder à une évaluation approfondie. En fait, dans une étude américaine menée
auprès de 265 femmes maltraitées qui ont accepté
d’être dirigées vers un travailleur social, 59 % ont
dit qu’elles avaient consenti à cette aide parce
qu’un professionnel de la santé a exprimé sa
crainte que leur problème de santé soit associé à
une situation de violence conjugale (McCaw,
Bauer, Berman et collab., 2002).
7.6
Dépistage de la maltraitance
et de la négligence chez
les aînés et les personnes
vulnérables
Le dépistage systématique d’une possible négligence
ou maltraitance envers les aînés peut serévéler plus
compliqué que l’évaluation de la violence conjugale.
Le dépistage de la violence conjugale chez les
femmes aînées est très similaire à celui destiné aux
femmes plus jeunes si la personne âgée ne présente
pas de troubles cognitifs (Koin, 2009). Le test de
dépistage AAS peut être utile pour évaluer la violence conjugale chez les femmes âgées. Il est possible
de modier ainsi la phrase d’introduction : « Parce
que la violence conjugale a de graves conséquences
sur la santé, nous demandons aux femmes de tous
âges de répondre aux questions suivantes. »
Alors que certaines femmes âgées vivent une
relation violente depuis des décennies, d’autres
connaissent pour la première fois les sévices physiques et sexuels de la part de partenaires normalement non violents, mais qui sont atteints de
maladies neurologiques modiant leur comportement (p. ex., la maladie d’Alzheimer, le syndrome
cérébral organique). Une femme âgée maltraitée
depuis longtemps espérera peut-être survivre à son
partenaire violent, mais une femme âgée qui subit
des sévices depuis peu hésitera peut-être à révéler
sa condition en raison de l’embarras, de la honte
et des peurs engendrés par le placement en maison
d’hébergement de son partenaire.
Un document de l’Institut
national de santé publique
du Québec concernant
une recherche de cas de
maltraitance envers les
aînées peut être consulté au
www.inspq.qc.ca ; une mise
à jour des connaissance en
matière de maltraitance
envers les aînés peut aussi
être consultée au Centre
québécois de ressources en
promotion de la sécurité et
en prévention de la criminalité :
www.crpspc.qc.ca.
Les aînés sont vulnérables aux sévices que
peuvent leur iniger des membres de leur famille
et du personnel soignant. Les neuf questions formulées par l’AMA sont cliniquement efcaces et
peuvent être utilisées auprès de personnes âgées qui
sont saines sur le plan cognitif ENCADRÉ 7.3.
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
149
ENCADRÉ 7.3
Questions de dépistage de sévices chez les aînés de l’American
Medical Association
1. Quelqu’un vous a-t-il déjà touché(e) de façon inappropriée,
sans votre consentement ?
6. Avez-vous déjà signé des documents que vous ne compreniez pas ?
2. Quelqu’un vous a-t-il déjà fait faire des choses que vous
n’aviez pas envie de faire ?
7. Avez-vous peur de qui que ce soit à votre domicile ou qui
entre dans votre maison ?
3. Quelqu’un vous a-t-il déjà pris des choses sans d’abord
vous le demander ?
8. Êtes-vous souvent seul(e) ?
4. Quelqu’un vous a-t-il déjà blessé(e) physiquement ?
5. Quelqu’un vous a-t-il déjà grondé(e) ou menacé(e) ?
9. Quelqu’un a-t-il déjà refusé de vous offrir son aide afin
que vous puissiez obtenir des soins alors que vous en
aviez grandement besoin ?
Source : Adapté d’Arvanis et collab. (1992)
5
Le chapitre 5, Évaluation de
l’état mental, fournit des
orientations pour la con­
duite de cette partie de
l’histoire de la situation.
7.7
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Korina, pourquoi est-il crucial que vous
questionniez la mère à propos
de la violence conjugale ?
150
L’évaluation de la violence physique ou de la négligence envers une personne atteinte d’un décit cognitif s’avère beaucoup plus complexe. Des preuves
physiques qui ne correspondent pas à l’histoire fournie par la personne, les membres de sa famille ou le
personnel soignant sont des signes potentiels révélateurs de sévices ou de négligence. Presque tous les
établissements de santé utilisent certains formulaires
de déclaration obligatoire en cas de soupçons concernant des sévices envers les personnes âgées de 65 ans
et plus. Comme il a déjà été mentionné dans ce chapitre, pour signaler ces cas, il n’est pas nécessaire
d’avoir la preuve des mauvais traitements ou de la
négligence ; des motifs raisonnables de soupçonner
que de mauvais traitements ou de la négligence ont
eu lieu envers la personne sont sufsants.
Partie 1
Historique de la situation
Il est aussi important d’évaluer et de documenter
les sévices antérieurs, y compris l’histoire de violence familiale, la violence physique et sexuelle
subie dans l’enfance et l’histoire de viols de toutes
sortes (par des étrangers, des partenaires occasionnels ou intimes). L’accumulation de traumatismes s’est révélée associée à l’augmentation des
problèmes de santé physique et mentale (Warsaw
et collab., 2009). Il faut également déterminer
l’histoire de ces traumatismes, car ils peuvent
avoir un impact sur l’état de santé actuel. Par
exemple, une femme ayant subi des épisodes
antérieurs de trauma craniocérébral et de strangulation peut présenter des symptômes qui s’apparentent à ceux d’une maladie chronique. Un
autre aspect très important de l’histoire et de
l’évaluation des cas de maltraitance des aînés ou
de violence conjugale est une évaluation de l’état
mental, à la fois en vue de détecter un éventuel
traumatisme crânien et des symptômes neurologiques, mais aussi pour déceler des problèmes de
santé mentale. Toutes les personnes ayant subi
de la violence devraient être soumises à une
Évaluation globale de la personne
évaluation de l’état mental, en portant une attention particulière aux problèmes de santé mentale
les plus fréquemment associés à la violence : la
dépression, les tendances suicidaires, l’ESPT,
la toxicomanie et l’anxiété
5 .
7.8
Dépistage de la maltraitance
et de la négligence
chez les enfants
L’American Academy of Pediatrics (1998) recommande le dépistage de la violence conjugale comme
un moyen efcace de prévenir la maltraitance chez
les enfants. On observe une cooccurrence signicative de la violence chez les enfants et de la violence conjugale ; dans tous les cas, des effets à long
terme sur leur santé peuvent être envisagés
(Herrenkohl, Sousa, Tajima et collab., 2008).
La maltraitance envers les enfants est signalée
dans 33 à 77 % des foyers où il y a sévices envers
un adulte (American Academy of Pediatrics, 1998).
Une évaluation qui révèle de la violence conjugale
devrait inciter l’inrmière à impliquer d’autres
membres de l’équipe de soins de santé (p. ex., des
médecins, des travailleurs sociaux).
Une partie importante de l’évaluation d’un
enfant quant à des soupçons de sévices est de
déterminer son âge et son niveau de développement. L’enfant pourrait-il avoir subi une blessure
liée à ce dernier ? Par exemple, le cas d’un enfant
âgé de trois semaines dont les parents se présentent
en consultation pour une blessure consécutive à
une chute de son lit n’est pas une histoire très plausible étant donné le niveau de développement du
nourrisson. Parce que l’inrmière n’est pas toujours en mesure d’observer les capacités motrices
et cognitives de l’enfant, il est important qu’elle
pose certaines questions directement aux parents
ou à la personne qui a la garde de l’enfant : Votre
enfant rampe-t-il, tente-t-il de se lever ou de marcher ? Quels autres problèmes de développement
éprouvez-vous actuellement à la maison : crises de
colère, entraînement à la propreté, etc. ?
• Une ecchymose est liée au purpura sénile.
Si l’enfant est capable de parler, il serait important d’avoir une discussion avec lui à l’écart des
adultes qui s’en occupent, et ce, en tentant de
poser des questions ouvertes ou tout simplement
en recueillant ses propos spontanés. Il est nécessaire de rappeler que les enfants qui ont subi des
traumatismes répondent difcilement aux questions ouvertes (Myers, Berliner, Briere et collab.,
2002). L’inrmière peut enrichir la collecte d’information auprès de l’enfant en lui posant des
questions courtes, en utilisant un langage approprié à son âge et des mots qu’il connaît bien. Les
enfants âgés de plus de 11 ans sont en mesure de
raconter leur histoire comme le font la plupart des
adultes (Myers et collab., 2002).
• Une brûlure par frottement est plus précisément
décrite comme une abrasion par frottement.
L’histoire médicale représente aussi une partie
importante de l’évaluation. L’enfant a-t-il déjà été
hospitalisé, blessé ou est-il atteint d’une maladie
chronique ? Prend-il des médicaments qui peuvent
favoriser l’apparition d’ecchymoses ? L’enfant a-t-il
fait des visites répétées au centre hospitalier ? Pour
les blessures qu’il aurait subies, autres que mineures, s’est-il écoulé une longue période de temps
avant qu’il soit conduit chez un professionnel de
la santé ?
7.9
Examen physique
L’examen physique complet, c’est-à-dire de la tête
aux pieds, constitue une partie essentielle de
l’évaluation d’une personne victime de violence
conjugale ou d’une personne âgée victime de maltraitance ; cet examen revêt une importance toute
particulière surtout si la personne a une histoire
connue de sévices. Une connaissance de la terminologie de la médecine légale est importante pour
la communication des résultats d’un examen
physique. Le TABLEAU 7.2 énumère et dénit
la plupart des termes les plus courants de ce
domaine. Parmi ceux-ci, les termes ecchymose et
lacération sont souvent mal utilisés. Les ecchymoses ne sont pas nécessairement associées à une
blessure causée par l’usage d’un objet contondant.
Par ailleurs, ce ne sont pas toutes les blessures
ouvertes qui peuvent être qualiées de lacérations,
mais seulement les blessures ouvertes produites
par un instrument ayant causé une coupure ou une
déchirure du tissu.
Il faut garder à l’esprit les indications terminologiques suivantes au moment de documenter l’examen physique (Sheridan, 2007 ; Sheridan et collab.,
2009).
• Le terme ecchymose peut être utilisé de façon
interchangeable avec contusion.
• Une lacération est liée à une déchirure.
Q
uestion de suivi
• Une pétéchie est liée à un purpura.
• Le terme incision peut être utilisé de façon interchangeable avec coupure ou avec blessure par
objet coupant.
• Le terme coupure peut être utilisé de façon interchangeable avec incision ou avec blessure par
objet coupant.
• La plaie par arme blanche est une perforation,
une coupure pénétrante plus profonde que large.
• L’hématome est un amas de sang souvent, mais
pas toujours causé par un trauma de force brutale.
Beaucoup de praticiens tentent de dater une
blessure par la couleur de l’ecchymose ; cependant,
il n’y a pas de preuves scientiques qui appuient
cette stratégie (Langlois et Greshman, 2001 ; Nash
et Sheridan, 2009). En conséquence, tenter de déterminer avec précision la date à laquelle la blessure
a eu lieu s’avère futile du point de vue de la médecine légale. Quelques lignes directrices peuvent
cependant aider à déterminer si la date approximative de la blessure concorde avec l’histoire rapportée par la personne blessée ou par celle qui en
prend soin.
Pourquoi vous êtes-vous
attardée au niveau de
développement de Korina
dans cette situation ?
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Korina, comment allez-vous faire pour
valider vos soupçons ?
Q
uestion de suivi
Dans la situation de
Korina, comment le dossier
antérieur peut vous aider
à valider vos soupçons en
matière de maltraitance ou
de violence?
Une blessure causée par un objet contondant est
habituellement rouge et prend une couleur violacée
ou bleu violacé dans les 12 à 36 heures. Pour ce qui
est des contusions, leur couleur progresse la plupart
du temps en passant d’un bleu violacé à un bleu
verdâtre, puis à un brun verdâtre, pour ensuite passer à un brun jaunâtre avant de s’estomper (Nash
et Sheridan, 2009).
Ce processus est le même pour toutes les personnes, mais selon la couleur de la peau, les changements peuvent être plus ou moins visibles et
difciles à photographier. En général, les blessures
les plus récentes seront rouge violacé, tandis que les
ecchymoses qui commencent à vieillir seront plutôt
brun verdâtre ou brun jaunâtre.
Plusieurs facteurs expliquent que les aînés sont
plus sujets aux meurtrissures et aux contusions
que ne le sont les personnes plus jeunes. Les médicaments (et leurs effets secondaires) ainsi que leurs
impacts sur la composition des uides secondaires
peuvent entraîner un désordre hématologique susceptible de favoriser la formation de meurtrissures
ou d’ecchymoses. Plusieurs médicaments couramment utilisés en médecine peuvent accroître les
risques de meurtrissures ou de saignements :
l’acide acétylsalicylique, l’ibuprofène, les antiinflammatoires non stéroïdiens, la warfarine,
l’héparine, l’acide valproïque, la prednisone et le
clopidogrel. Les suppléments vitaminés peuvent
également contribuer aux désordres hématologiques, et ces risques augmentent si la personne
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
151
7
consomme une médication anticoagulante ou des
médicaments qui altèrent le taux de plaquettes
sanguines. Les myrtilles, l’ail, le gingembre ou le
ginkgo sont parmi les plus communs parmi les
suppléments associés à un risque accru de meurtrissures ou de complications hémorragiques
(Doyle, Harold et Johnson, 2001).
Terminologie médicolégale
TABLEAU 7.2
TERME
DÉFINITION
Abrasion
Blessure causée par le frottement de la peau ou des muqueuses.
Alopécie traumatique
Perte de cheveux causée par l’action de les tirer ou de les arracher brusquement ou par d’autres moyens traumatisants.
Avulsion
Arrachement d’une structure ou d’une partie de celle-ci.
Blessure
Terme général se rapportant à une atteinte corporelle provoquée
par des moyens matériels (balle, couteau).
Blessure avec marques
Blessure causée par un objet qui laisse une marque distincte sur la
peau ou sur un organe (p. ex., être battu avec un fouet) ou préjudice
causé par un mécanisme unique de blessure (p. ex., des brûlures
par immersion aux mains [gants] ou aux pieds [chaussettes]).
Cicatrices de blessures
Blessures, généralement des contusions et des fractures, à
diverses étapes de la guérison.
Contusion
Meurtrissure ; blessure aux tissus sans rupture de la peau, où du
sang s’accumule à cause de la rupture de vaisseaux sanguins ;
occasionne de la douleur, de l’enure et de la sensibilité.
Coup de poignard
Blessure pénétrante faite par un couteau tranchant ; la coupure
est plus profonde que large.
Coupure ou incision
Coupure ou blessure faite par un instrument tranchant ; le fait
de couper.
Ecchymose
Tache hémorragique bleue ou violacée, plus grande qu’une
pétéchie, dans la peau ou sur les muqueuses, souvent ronde ou
de forme régulière, sans surélévation.
Hématome
Accumulation de sang hors des vaisseaux, généralement coagulée dans un organe, un espace ou un tissu. Hémorragie : fuite de
sang d’un vaisseau rompu, qui peut être externe, interne, dans la
peau ou dans tout autre organe.
Lacération
Plaie produite par la déchirure ou la séparation de tissu, le plus
souvent causée par un impact brutal sur une surface osseuse ;
acte de déchirer ou de séparer.
Lésion
Terme communément utilisé pour faire référence à n’importe
quelle pathologie ou traumatisme d’un tissu ou à la perte d’usage
d’une partie du corps.
Pétéchie
Lésion parfaitement ronde, non surélevée, rouge violacé, causée par
une hémorragie intradermique qui devient plus tard bleue ou jaune.
Ponction
Acte de percer ou de pénétrer une partie du corps avec un objet
pointu ou un instrument.
Sources : Adapté de Miller, Keane et O’Toole (2005) ; Sheridan (2001) ; Taber et Thomas (1997)
152
Partie 1
Évaluation globale de la personne
Toute évaluation d’une personne âgée victime
ou présumée victime de sévices ou de négligence
devrait inclure des analyses de laboratoire de base,
y compris, au minimum, un hémogramme avec
taux de plaquettes, les éléments chimiques du sang
(incluant l’azote uréique sanguin, la créatinine, les
protéines et l’albumine), le test des sérums et des
fonctions hépatiques, des tests de coagulation et
une analyse d’urine (Geroff et Olshaker, 2001).
7.9.1
Examen physique de l’enfant
La terminologie de la médecine légale utilisée pour
documenter la violence conjugale et la maltraitance envers les aînés s’applique également à l’enfant. Une inspection visuelle de celui-ci, de la tête
aux pieds, est importante dans tout examen physique. Des blessures importantes peuvent être dissimulées sous des vêtements, des couches, des
chaussettes ou sous les cheveux longs. L’American
Academy of Pediatrics (2002) dénit un traumatisme
majeur comme une blessure qui va au-delà des rougeurs temporaires de la peau. Malheureusement, il
n’est pas rare que ces signes ne soient pas détectés
par le personnel soignant, limitant du coup la possibilité de déployer un plan d’intervention rapide
auprès de l’enfant. Selon une étude américaine, les
meurtrissures et les premiers signes de violence
faite aux enfants n’ont pas été adéquatement rapportés et détectés, et ce, dans 44 % des cas de décès
et de sévices majeurs survenus chez des enfants
en bas âge (Pierce, Kaczoe, Aldridge et collab.,
2010). Certes, les blessures accidentelles chez les
enfants actifs sont chose commune ; toutefois,
les blessures et les meurtrissures chez les nourrissons et les enfants en bas âge doivent être abordées
avec beaucoup de soin compte tenu du fait
qu’elles peuvent être le signe de maltraitance
potentielle. Les enfants qui ne marchent pas
encore sans aide ne devraient pas présenter de
telles blessures (Sugar, Taylor et Feldman, 1999).
Des blessures observées chez les nourrissons qui
n’en sont pas encore à leurs premières tentatives
de marcher – notamment chez les enfants âgés de
moins de neuf mois – devraient alerter l’inrmière
quant à des sévices potentiels ou relativement à
une condition médicale qui nécessite un suivi.
Une fois que les enfants commencent à marcher, des contusions, en particulier sur les proéminences osseuses, sont courantes (Sugar et
collab., 1999). Reece et Ludwig (2001) ont constaté que de 40 à 50 % des enfants qui marchent
afchent des meurtrissures sur les proéminences
osseuses à l’avant du corps. Les contusions atypiques observées sur les fesses, les mains, les
pieds et l’abdomen sont extrêmement rares et
devraient susciter l’inquiétude (Sugar et collab.,
1999). À l’instar de ces travaux, les recherches
de Pierce et de ses collaborateurs (2010) semblent
aller dans ce sens et suggèrent également qu’il
existe une forte corrélation entre la présence de
certaines blessures (au torse, aux oreilles et au
cou) et une situation de violence et d’abus
notamment pour les enfants âgés de moins de
quatre ans et en particulier pour les nourrissons.
En l’absence d’une justication crédible pour ces
marques et blessures, notamment chez les enfants
qui ne se déplacent pas seuls, celles-ci devraient
être examinées avec une attention toute particulière. De même, Mosqueda, Burnight et Liao
(2005) ont étudié les adultes qui présentaient des
meurtrissures accidentelles et ont révélé que près
de 90 % de celles-ci se situaient sur les extrémités, tandis que les meurtrissures non accidentelles ont été trouvées sur le cou, les oreilles, les
organes génitaux, les fesses ou la plante des
pieds. En outre, toute meurtrissure qui révèle la
forme d’un objet doit être considérée comme très
suspecte. La détection de meurtrissures sur un
enfant non mobile devrait soulever l’inquiétude
et pousser à la recherche d’autres blessures, y compris les fractures et les lésions intracrâniennes.
Les professionnels de la santé se font souvent
demander d’estimer la date des contusions. Cette
tâche est difcile, car il ne s’agit pas d’une science
exacte. Puisque certaines recherches laissent
entendre aujourd’hui qu’il est trop difcile de
dater des blessures à partir de leur couleur ou
d’une seule photographie, les professionnels de la
santé devraient s’abstenir de le faire ; il faut donc
reconsidérer cette pratique autrefois admise
(Maguire, Mann, Sibert et collab., 2005).
En plus de certaines blessures inigées par des
coups, d’autres meurtrissures comme des lacérations, des abrasions, des morsures et des brûlures
sont communément observées chez les enfants victimes de maltraitance. Plusieurs facteurs peuvent
contribuer à aider à déterminer si un enfant est
victime de sévices, ainsi que la gravité de ceux-ci.
Par conséquent, il est nécessaire de remettre en
contexte ces blessures, leur fréquence et leur
endroit sur le corps de l’enfant avec son niveau de
développement et l’histoire sociale qui caractérisent sa situation.
7.10
La documentation écrite des cas de violence
conjugale et de maltraitance des aînés doit être
réalisée à partir du verbatim de la personne qui a
subi les sévices, mais dans des limites raisonnables. Sur le plan clinique, il est irréaliste de faire
la transcription de tous les faits énoncés par une
personne maltraitée. Cependant, il est important
de documenter les déclarations les plus signicatives de la victime, notamment celles qui permettent d’identier l’agresseur et de révéler les
menaces qu’il a proférées. Par ailleurs, la documentation du cas de maltraitance peut inclure des
déclarations de la personne portant sur des incidents de sévices antérieurs.
7
Quand il faut citer ou paraphraser l’historique
de la situation, il convient de ne pas tenter d’épurer
les mots que rapporte la victime. La documentation
FIGURE 7.1
Abrasion de forme latérale sur le côté droit du cou résultant
d’une éraure à la suite d’une strangulation
Notes au dossier
Les notes au dossier des victimes de violence conjugale et des aînés victimes de maltraitance doivent
inclure une documentation détaillée basée sur des
écrits non falsiés de la situation, sur des représentations graphiques de la disposition des blessures
sur le corps et sur des documents photographiques.
Les FIGURES 7.1 à 7.7 présentent des exemples de
documents photographiques pris auprès des clients
d’un des auteurs. Plusieurs de ces photos ont été
publiées pour la première fois dans Sheridan
(2001). Elles sont reproduites avec permission.
FIGURE 7.2
Abrasion résultant d’un coup de poing asséné au milieu
du visage par un assaillant portant une bague sertie d’une
pierre ; lacération suturée au sourcil droit ; déchirure
partielle au nez (suturée), contusion sclérotique à l’œil droit
provoquée par un coup de poing et abrasion au cou à la suite
d’une strangulation
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
153
FIGURE 7.6
Blessure (contusions) de type défensif à l’avant-bras droit
FIGURE 7.3
Contusion récente en boucle au haut de l’épaule postérieure
droite et en bas de l’épaule postérieure gauche ; motif de boucle
et cicatrice du côté droit du milieu du dos ; dos de l’épaule
droite, abrasion cicatrisée à la suite d’une agellation par un
l électrique au milieu du dos ; contusion et motif de coup de
pied avec apparence de talon à gauche du milieu du dos ; motif
de coup de pied, de coup de talon et d’empreinte de semelle
au haut de la partie postérieure de l’épaule gauche
154
Partie 1
par verbatim des menaces de l’agresseur, y compris
ses injures, peut se révéler d’une extrême importance pour un éventuel procès. Aussi, il faut être
attentif et reprendre les mêmes termes que ceux
utilisés par la personne violentée pour décrire ses
organes génitaux ou les comportements traduisant
des actes sexuellement agressifs.
FIGURE 7.4
Contusions multiples causées par des coups à la partie
supérieure du bras droit
La documentation photographique dans le dossier médical peut être d’une importance inestimable. Auprès des adultes lucides, il faut obtenir
un consentement écrit préalablement à touteprise
de photographies. La plupart des établissements
de santé possèdent des formulaires de consentement standardisés. Si la personne est inconsciente
ou qu’elle manifeste des troubles cognitifs, la
prise de photographies sans l’obtention du
consentement ne pose pas de problèmes éthiques
puisqu’il s’agit d’une pratique non effractive,
indolore et qui offre un important potentiel d’aide
pour la personne que l’on soupçonne être victime
de sévices. Chaque type d’appareils photographiques les plus courants présente des avantages
et des inconvénients (35 mm et appareil numérique) (Besant-Matthews et Smock, 2001 ;
Sheridan, 2007). En fait, il vaut mieux avoir une
photographie claire d’une blessure, peu importe
l’appareil utilisé, que pas de photo du tout.
FIGURE 7.5
Contusions multiples (cachées) au haut de l’abdomen et au bas
du thorax avant
Quand l’inrmière documente un cas et qu’elle
commente les résultats des examens physiques
d’un enfant maltraité ou négligé, il lui faut utiliser
les mots que l’enfant emploie pour décrire comment ses blessures se sont produites. Il est probable que l’enfant soit accompagné de la personne
qui le maltraite. Si l’enfant ne parle pas, demander une déclaration du parent ou de la personne
qui en a la garde. Par ailleurs, il est important
de connaître le protocole de son établissement de
santé en matière de documentation et de suivi
des enfants soupçonnés d’être victimes de maltraitance. Certains protocoles peuvent reporter
une entrevue complète jusqu’à ce qu’un intervieweur compétent en médecine légale soit
disponible.
Évaluation globale de la personne
7
FIGURE 7.7
Série de deux photographies permettant d’illustrer comment les clichés peuvent être révélateurs de la mécanique des blessures.
A La victime présente une blessure grave à la paupière gauche, une blessure latérale au côté gauche du nez et de la bouche. La
contusion latérale au côté gauche du nez a été provoquée par l’enfoncement des coussinets de ses lunettes à la suite d’un coup de
poing porté à l’oeil gauche. Les lunettes de la victime ont absorbé l’essentiel de la force de frappe et se sont brisées (non illustré).
Un deuxième coup de poing a engendré le traumatisme à la bouche. B La force du coup de poing asséné à la bouche a laissé des
marques de dents à la lèvre supérieure, provoquant ainsi des contusions, des abrasions et une lacération mineure à la muqueuse
orale de la lèvre supérieure.
7.11
Évaluation des risques
d’homicide
Au Canada, comme aux États-Unis, les femmes
sont plus souvent tuées par leur conjoint, leur petit
ami ou par leur ex-conjoint que par toute autre
personne ; en outre, environ 75 % de ces femmes
ont été violentées par l’homme qui les aura subséquemment tuées (Campbell, Sharps et Glass, 2001).
« En 2000, environ 80 femmes canadiennes ont été
assassinées par leur partenaire masculin ; 55 % des
femmes assassinées le sont par quelqu’un de très
proche. » (Chamberland, 2003, p. 40). Une étude
américaine portant sur le meurtre conjugal des
femmes rapporte que 42 % des femmes tuées ont
été en contact avec un service de soins de santé
(urgence, médecine générale, clinique, soins prénataux) dans l’année qui a précédé leur décès
(Sharps, Koziol-McLaine, Campbell et collab.,
2001). Ces contacts avec les services et les professionnels de la santé ont constitué autant d’occasions manquées pour le dépistage de la violence
ENCADRÉ 7.4
conjugale et pour établir un plan d’intervention
an d’en réduire les risques. La même étude a révélé la abilité et la validité de la grille d’évaluation
du danger (Danger Assessment), un questionnaire
en 19 points (oui/non) utilisé par les inrmières et
les intervenants en violence conjugale (Campbell
et collab., 2001) . Cet instrument d’évaluation comprend d’abord un calendrier des événements pour
que les femmes puissent établir de manière précise
la fréquence et l’intensité des épisodes de violence
qu’elles ont subis au cours des dernières années.
Cet outil s’avère également un excellent moyen de
comptabiliser la fréquence et la gravité des agressions en vue d’établir des statistiques institutionnelles ENCADRÉ 7.4. Bien qu’il ne soit pas des plus
précis, cet instrument indique que plus le nombre
de réponses positives (oui) aux questions augmente, plus le potentiel de danger s’accroît. À titre
d’exemple, dans l’étude américaine mentionnée
précédemment, les femmes victimes de sévices et
subséquemment d’homicide afchaient un score
moyen de 7,1 dans le test initial qui comptait alors
15 questions.
Q
uestion de suivi
Compte tenu de ce que
vous avez pu observer chez
la mère de Korina au cours
de l’entrevue, à quel niveau
situeriez-vous le dernier
épisode violent dont elle
a été victime ?
Évaluation du danger (Danger Assessment )
Des recherches effectuées à la suite d’homicides touchant à la fois des
femmes violentées et leur agresseur ont associé plusieurs facteurs de risque à
ces situations. Nous ne pouvons pas prévoir ce qui va se passer dans votre
situation, mais nous aimerions que vous soyez consciente du danger d’homicide associé aux cas de violence ; ainsi, nous tentons de déterminer combien
de facteurs de risque s’appliquent à votre situation.
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
155
ENCADRÉ 7.4
Évaluation du danger (Danger Assessment ) (suite)
À l’aide d’un calendrier, veuillez indiquer les dates approximatives, au cours
de la dernière année, où vous avez été violentée par votre conjoint ou votre
partenaire. Pour chaque date, précisez, selon l’échelle qui suit, la gravité de
l’incident.
1. Gies, bousculades, pas de blessures et/ou de douleurs qui perdurent
2. Coups de poing, coups de pied ; contusions, coupures et/ou douleur continue
3. Volées de coups (« raclées ») ; importantes contusions, brûlures, fractures
4. Menace d’utilisation d’armes ; blessures à la tête, blessures internes,
blessures permanentes
5. Usage d’une arme ; blessure par arme
(Si, pour l’une des descriptions, un chiffre plus élevé s’applique, veuillez l’ins crire sur votre calendrier.)
Indiquez Oui ou Non pour chacune des questions suivantes. (« Il » fait référence à votre conjoint, partenaire, ex-conjoint, ex-partenaire ou à la personne
qui vous violente.)
1. La violence physique a-t-elle augmenté en gravité ou en fréquence au cours
de la dernière année ?
2. A-t-il déjà utilisé une arme contre vous ou vous a-t-il menacée avec
une arme ?
3. A-t-il déjà essayé de vous étouffer ?
4. Est-il propriétaire d’armes à feu ?
5. Vous a-t-il déjà forcée à avoir des relations sexuelles quand vous ne le souhaitiez pas ?
6. Fait-il usage de drogues (amphétamines, phencyclidine [psychotrope PCP],
cocaïne, crystal meth, crack, héroïne, mélange de drogues) ?
7. A-t-il menacé de vous tuer et/ou croyez-vous qu’il soit capable de vous tuer ?
8. Est-il ivre (saoul) tous les jours ou presque tous les jours ? (En quantité d’alcool)
9. Contrôle-t-il la plupart ou la totalité de vos activités quotidiennes ? Par
exemple, vous dicte-t-il avec qui vous devez être amie ou non, les moments
où vous pouvez voir votre famille, la somme d’argent que vous pouvez
dépenser ou les occasions d’utiliser la voiture ? (S’il tente d’agir ainsi, mais
que vous ne le laissez pas faire, cochez ici : _______.)
10. Vous a-t-il déjà battue alors que vous étiez enceinte ? (Si vous n’avez
jamais été enceinte de lui, cochez ici : _______.)
11. Est-il intensément et constamment jaloux ? (Par exemple, dit-il : « Si je ne
peux pas t’avoir, personne ne le pourra » ?)
12. Avez-vous déjà menacé ou tenté de vous suicider ?
13. A-t-il déjà menacé ou tenté de se suicider ?
14. Menace-t-il de faire du tort à vos enfants ?
15. Avez-vous un enfant qui n’est pas le sien ?
16. Est-il chômeur ?
17. L’avez-vous déjà laissé durant la dernière année ? (Si vous n’avez jamais
vécu avec lui, cochez ici : _______.)
18. Avez-vous actuellement un autre (différent) partenaire intime ?
19. Vous suit-il ou vous espionne-t-il, vous laisse-t-il des notes de menaces,
détruit-il vos biens et/ou votre maison ou vous appelle-t-il lorsque vous ne
voulez pas lui parler ?
Nombre total de « Oui » : ___
Merci. S’il vous plaît, parlez à votre inrmière, avocat ou conseiller
sur ce que signient les résultats de ce questionnaire « Évaluation du
danger » en fonction de votre situation.
Note : le document américain connu sous le nom de Danger Assesment est soumis à la
loi sur les droits d’auteur ; ainsi, ses utilisateurs ne peuvent pas le modier et doivent
communiquer avec l’auteur s’ils ont l’intention de l’utiliser à des ns de recherche. Ce
document peut par ailleurs être téléchargé au www.son.jhmi.edu.
Source : Adapté de Jacquelyn C. Campbell, Ph.D., RN. © 1985, 1988, 2001
7.12
Q
uestion de suivi
Pourquoi serait-il important
qu’une évaluation de l’état
mental de la mère de Korina
soit effectuée ?
156
Partie 1
Autres indices de
violence conjugale
à considérer malgré
une réponse négative
En plus d’avoir recours à la grille d’évaluation du
danger, et si la personne a répondu par la négative
au test ASS, les professionnels de la santé doivent
faire preuve de vigilance quant aux problèmes de
santé particulièrement associés à la violence conjugale, y compris les problèmes gynécologiques (surtout les ITSS, les douleurs pelviennes ainsi que les
plaintes de dysfonction sexuelle), le syndrome du
côlon irritable, les maux de dos, la dépression et
les symptômes de l’ESPT (en particulier les
troubles du sommeil, les crises de panique ou
les problèmes nerveux). Lorsque ces problèmes se
produisent et surtout s’ils persistent, une
Évaluation globale de la personne
évaluation approfondie et répétée de la violence
familiale est nécessaire. Dans ce cas, un instrument
tel que l’échelle WEB (Women’s Experience With
Battering Scale) (Coker, Smith, McKeown et collab., 2000) pourrait être utilisé en plus de la grille
d’évaluation du danger ; le professionnel peut aussi
mener une enquête discrète en demandant, par
exemple : Je suis inquiet au sujet de votre santé ; y
a-t-il un risque que le stress que vous vivez à domicile contribue à ces problèmes ?
Particularités culturelles et génétiques
La violence familiale est un phénomène qui se produit dans toutes les cultures. Elle peut toutefois être
plus difcile à reconnaître dans de nombreux
groupes culturels. Par exemple, les coups et les
blessures peuvent être cachés, couverts par les
vêtements et le maquillage excessif du visage chez
de nombreuses femmes chinoises victimes de violence. Les indices que la violence familiale peut
être un problème incluent des taux élevés d’alcoolisme, de suicide et d’homicide, ce qui se vit chez
certaines communautés amérindiennes ou autres.
La violence familiale a des répercussions profondes sur la personne, la famille et la communauté ; ses causes ou ses conséquences sont
manifestes dans les exemples américains suivants
(National Center for Health Statistics, 2006).
• La déclaration de graves troubles psychologiques
chez les personnes âgées de 18 ans et plus était
de 3,0 % pour la population en général, de 3,0 %
pour les Blancs, de 7,1 % pour les Amérindiens
et de 3,0 % pour les Noirs.
• L’utilisation massive d’alcool par les personnes
âgées de 12 ans et plus était de 7,5 % chez la
population blanche, de 4,4 % chez la population
noire et de 8,7 % chez les Amérindiens.
• Les taux de mortalité par suicide dans l’ensemble de la population masculine étaient
de 10,9 pour 100 000 habitants, de 16,4 pour
100 000 Amérindiens de sexe masculin et
de 9,8 pour 100 000 hommes noirs.
• Les taux de mortalité globale par homicide dans
la population de sexe masculin étaient de 9,4
pour 100 000 habitants. Après ventilation, ce
taux est de 11,6 pour 100 000 Amérindiens de
sexe masculin et de 36,4 pour 100 000 Noirs.
7
Évaluation et jugement clinique
Dossier : Korina Beauregard (suite)
À son retour de la radiologie, Korina est seule
avec sa mère puisque le conjoint de celle-ci a dû
se rendre à son travail. Vous en protez pour
questionner la mère de nouveau au sujet des
circonstances de l’accident de sa lle. Elle vous
raconte la même histoire que lors de votre première entrevue. À ce moment, la petite Korina,
qui jouait près de sa mère, dit : « Papa fait mal à
maman et à moi. » La mère réprimande sa lle
et éclate ensuite en sanglots.
Vous souhaitez lui venir en aide et préserver
la relation thérapeutique avec celle-ci, tout en
lui reétant vos doutes sur les circonstances
entourant les marques de brûlures sur son
avant-bras.
Vous discutez une vingtaine de minutes avec
la mère, puis vous lui demandez de remplir la
grille d’évaluation du danger présentée dans
l’ENCADRÉ 7.4. Elle répond « oui » à 12 des
19 questions. Madame Beauregard vous mentionne
que les gestes violents de son conjoint sont plus
fréquents depuis quelques semaines. Celui-ci vit
des difcultés à son travail, et il consomme de cinq
à huit bières tous les soirs. Elle se sent responsable
de ce qui lui arrive et dit qu’elle mérite bien cette
punition puisqu’elle n’est pas une bonne conjointe.
1. Quelle sera votre approche pour intervenir auprès de madame Beauregard ?
2. Quelle sera votre intervention auprès de madame Beauregard ?
3. Quelle sera votre intervention prioritaire maintenant que vos soupçons de violence conjugale
et de maltraitance envers Korina sont conrmés ?
4. Comment allez-vous consigner l’information au dossier ?
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Dans le cas de madame Beauregard, comment avezvous été en mesure de détecter un risque d’abus ?
2. Dans la situation d’un enfant comme Korina,
comment pouvez-vous détecter un risque de
maltraitance ?
3. Dans un cas de violence conjugale comme celui de
madame Beauregard, nommez un élément sur
lequel vous devez insister à plusieurs reprises
durant la relation thérapeutique.
preuves irréfutables des mauvais traitements pour
effectuer un signalement ?
5. Dans des cas comme celui de madame Beauregard
et sa lle, que devez-vous consigner au dossier ?
4. Dans un cas de violence conjugale, de maltraitance
envers un enfant ou d’abus envers une personne
âgée, est-il nécessaire que vous obteniez des
Chapitre 7
Évaluation de la violence familiale
157
Dossier : Matisse Comtois
Matisse est âgé de six ans. Il se présente au
Centre de santé et de services sociaux (CSSS)
avec sa mère pour son rendez-vous annuel de
contrôle puisqu’il commencera sa première
année du primaire dans quelques semaines. En
tant qu’inrmière, vous devez procéder à l’évaluation de santé de Matisse an de vous assurer
que son développement est normal et qu’il
n’éprouve pas de problèmes susceptibles de lui
causer des difcultés à l’école.
Dans le dossier de Matisse, vous constatez
que son poids et sa taille ont toujours été
L’examen physique exige que l’inrmière acquière
des compétences techniques et une base de
connaissances. Les compétences techniques sont
les outils de collecte de données. L’inrmière doit
relier ces données à ses connaissances et à son
expérience antérieure. Une solide base de connaissances lui permet d’effectuer une recherche plutôt
qu’une simple observation.
Une citation du poète allemand Goethe
(1749/1832), datant du xviiie siècle, reprend cette
idée : « Nous ne voyons que ce que nous connaissons. » Pour reconnaître un élément signicatif,
l’inrmière doit savoir ce qu’elle cherche, ce qu’il
lui faut trouver.
8.1
Développer ses sens
Les sens – la vue, l’odorat, le toucher et l’ouïe –
serviront pour recueillir des données au cours de
l’examen physique. Normalement sollicités pour
percevoir l’environnement, ils seront orientés
autrement ici. L’utilisation des sens pour évaluer
l’état de santé de chaque personne peut sembler
difcile ou intimidante au début, mais cela s’améliorera avec la répétition et des cours pratiques
dirigés. Les techniques requises pour effectuer
l’examen physique sont l’inspection, la palpation,
la percussion et l’auscultation. Les techniques sont
habituellement exécutées une à la fois et dans cet
ordre, excepté pour l’abdomen
21 . L’examen
physique comprend aussi la prise de mesures
(indice de masse corporelle, circonférence de la
tête, mesure du tissu adipeux, etc.).
8.1.1
Inspection
L’inspection consiste en une observation visuelle
attentive. C’est un examen minutieux, effectué de
près, d’abord de la personne dans son ensemble,
puis de chaque système. L’inspection commence
normaux depuis sa naissance. Outre quelques
épisodes d’infections des voies respiratoires
supérieures (IVRS) et d’otites moyennes, il n’a
jamais éprouvé de problèmes de santé majeurs.
Matisse est venu à la clinique sans
rendez-vous il y a trois jours à la suite d’une
chute en vélo. Le médecin avait constaté des
abrasions aux genoux, aux coudes et à la joue
droite. En chutant, Matisse s’était aussi cogné
la tête, mais son casque lui avait évité une
commotion cérébrale.
au moment de la première rencontre avec la personne, où le questionnaire général est effectué
9 . Au cours de l’évaluation physique, commencer l’évaluation de chaque système par
l’inspection.
L’inspection constitue toujours la première
technique à employer. Au début, il est possible
de ressentir un certain malaise à prendre le temps
d’observer ainsi la personne. Mais il ne faut pas
être trop pressé de la toucher. Une inspection
complète et ciblée prend du temps, mais elle procure une étonnante quantité de données. Il faut
s’habituer à ne pas précipiter l’inspection ; au
début, le fait garder les mains derrière le dos
durant celle-ci peut faciliter les choses.
Chaque personne peut représenter en elle-même
un outil personnel d’examen ; il faut apprendre à
comparer les côtés droit et gauche de son corps.
En général, les deux côtés sont à peu près symétriques. L’inspection nécessite un bon éclairage de
même qu’une exposition et un positionnement
adéquats du corps. L’utilisation occasionnelle de
certains instruments (otoscope, ophtalmoscope,
lampe de poche, spéculum nasal ou vaginal) peut
s’avérer utile pour approfondir l’examen visuel.
8.1.2
Au moment de mettre
sous presse, la loi 10, Loi
modiant l’organisation et la
gouvernance du réseau de la
santé et des services sociaux
notamment par l’abolition des
agences régionales (Québec),
remplaçait les Centres de
santé et de services sociaux
(CSSS) par les Centres intégrés de santé et de services
sociaux (CISSS).
9
Les données précises à
recueillir pour l’inspection
de l’aspect général sont
décrites dans le chapitre 9,
Questionnaire général,
mesure des signes vitaux.
Q
uestion de suivi
Quelle technique devrezvous utiliser en premier
pour commencer l’évaluation de Matisse ?
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Matisse,
avant même de vous
attarder à un système en
particulier, vous devriez
évaluer ou observer trois
éléments. Nommez-les.
Palpation
La palpation constitue l’étape suivante, et elle
conrme souvent des points observés au cours de
l’inspection. La palpation s’effectue avec le sens
du toucher pour évaluer les éléments suivants : la
texture, la température, la moiteur, l’emplacement
et la taille des organes, un gonement, une vibration ou une pulsation, la rigidité ou la spasticité
musculaire, la crépitation, la présence de protubérances ou de masses, la présence d’inconfort ou de
douleur. Certaines parties de la main sont mieux
adaptées pour évaluer les différents facteurs :
21
Le chapitre 21, Abdomen,
détaille l’examen physique
de celui-ci.
Spasticité : Contractions
musculaires involontaires
ou exagération de la tonicité
musculaire se manifestant
par des spasmes.
• Pulpe des doigts : la meilleure partie pour la discrimination tactile ne, comme pour la texture
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
159
8
de la peau, les gonements, la recherche d’une
pulsation ou de protubérances.
• Doigts et pouce : pour saisir (comme une pince)
an de détecter la position, la forme et la consistance d’un organe ou d’une masse.
Q
uestion de suivi
Durant l’examen, vous allez
vérier le pouls de Matisse
et tenter de palper son foie ;
quelles parties de la main
utiliserez-vous alors ?
• Dos (face externe) des mains et des doigts : la
meilleure partie pour déterminer la température
de la peau, car celle-ci est plus ne à cet endroit
que dans la paume, et elle perçoit mieux les sensations de chaleur et de froid.
• Base des doigts (articulations métacarpophalangiennes) ou surface ulnaire de la main : pour
mieux percevoir les vibrations.
La palpation doit être lente et systématique. La
personne aura tendance à se raidir sous un toucher
brusque, ce qui rendra la palpation plus difcile.
Rester calme, utiliser une approche douce. Se
réchauffer préalablement les mains en les frottant
l’une contre l’autre ou en les tenant sous l’eau
chaude. Repérer les zones tendues et les palper
en dernier.
Commencer par une palpation légère an de
détecter les caractéristiques de surface et de permettre à la personne de s’habituer à se laisser toucher. Ensuite, procéder à une palpation plus
profonde ; peut-être faudra-t-il aider la personne
à se détendre en utilisant des techniques de
relaxation telles que la visualisation ou des respirations profondes. Le sens du toucher perd de
l’acuité lorsque la pression exercée est trop forte
ou continue. Lorsque la palpation profonde est
nécessaire (comme pour le système abdominal),
une pression intermittente se révèle préférable à
une palpation plus longue et continue. Éviter
toute situation dans laquelle la palpation profonde pourrait causer des blessures internes ou
de la douleur.
21 et 26
La palpation bimanuelle est
particulièrement illustrée
dans les chapitres 21,
Abdomen, et 26, Système
génito-urinaire féminin.
La palpation bimanuelle nécessite l’utilisation
des deux mains pour envelopper ou « saisir » certaines parties du corps ou des organes tels que
les reins, l’utérus ou les ovaires an d’en établir les
délimitations avec plus de précision
21 et 26 .
8.1.3
Percussion
La percussion est la technique qui consiste à
cogner sur la peau de la personne avec de petites
frappes précises pour évaluer les structures sousjacentes. Les frappes créent des vibrations et un
bruit caractéristique qui dépeignent l’emplacement, la taille et la densité de l’organe sous-jacent.
Pourquoi apprendre la percussion alors qu’une
radiographie ou une échographie est tellement
plus précise ? Parce que les mains, pour percuter,
sont toujours disponibles et accessibles, et elles
fournissent une rétroaction instantanée. La percussion est employée dans les situations
suivantes :
160
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
• détermination de l’emplacement et de la taille
d’un organe : en explorant les changements de
tonalité pendant la percussion, déterminer où
se situe la limite d’un organe par rapport aux
organes avoisinants ;
• distinction de la densité (gaz, liquide ou solide)
d’une structure par un son caractéristique ;
• détection d’une masse anormale si elle est assez
supercielle : les vibrations causées par la percussion pénètrent à environ 5 cm de profondeur
– une masse située plus profondément ne serait
pas révélée ;
• mise en évidence d’une douleur qui serait causée
par une structure sous-jacente inflammée,
comme dans la région des sinus ou sur les reins ;
• sollicitation d’un réexe ostéotendineux en
utilisant le marteau réexe.
Deux méthodes de percussion peuvent être
utilisées : directe (parfois appelée immédiate)
et indirecte (ou de médiation). Dans la percussion
directe, la main qui percute entre directement en
contact avec la surface corporelle de la personne,
ce qui produit un son. Cette méthode est utilisée
pour la percussion du thorax du nourrisson ou de la
région sinusale chez l’adulte. La percussion indirecte est plus fréquente et nécessite l’utilisation des
deux mains. La main qui percute frappe l’autre
main qui, elle, est appuyée sur la peau de la personne examinée. Cela produit un son et une vibration subtile. La procédure est décrite ci-après.
Main stationnaire
Placer le majeur (parfois appelé plessimètre) en
hyperextension et appuyer fermement la phalange
distale et l’articulation interphalangienne distale
sur la peau de la personne. Éviter d’appuyer sur
une côte ou sur les omoplates puisque la percussion d’un os ne donne pas d’indication, car le son
produit est toujours mat. Soulever les autres parties de la main pour qu’elles n’appuient pas sur la
peau de la personne, sinon elles assourdissent les
sons et les vibrations, à l’image du batteur qui
arrête un roulement de tambour en utilisant sa
main FIGURE 8.1.
Main qui percute
Utiliser le majeur de la main dominante comme
doigt percuteur FIGURE 8.2. Tenir l’avant-bras à
proximité de la surface de la peau, en gardant
les bras et les épaules stables. S’assurer d’avoir les
muscles stables, mais non tendus. Toute l’action
se fait dans le poignet, et il doit être souple.
Répartir les doigts, balancer vigoureusement le
poignet et faire rebondir le majeur (main dominante) sur celui appuyé (majeur de l’autre main)
sur la peau. Viser juste derrière le lit unguéal ou à
l’articulation interphalangienne distale ; le but est
de frapper la partie du doigt qui appuie le plus
8
FIGURE 8.1
Position des mains pendant la percussion
fermement sur la surface de la peau. Fléchir le
doigt de façon qu’il frappe avec le bout et non avec
la pulpe. Le majeur doit frapper l’autre majeur de
façon perpendiculaire.
Percuter deux fois au même endroit par coups
staccatos. Lever le doigt percuteur rapidement, car
un rebond trop lent arrêtera les vibrations et le son.
Déplacer ensuite les mains vers un nouvel emplacement sur le corps et répéter la technique de façon
égale. La force du coup détermine le volume sonore
de la note. Il n’est pas nécessaire d’obtenir un son
très fort ; utiliser juste assez de force pour obtenir
un son clair. L’épaisseur des tissus de la personne
est un facteur dont il faut tenir compte. Il faudra
percuter plus fortement pour les personnes obèses
ou très musclées.
Il arrive que des inrmières ayant peu d’expérience utilisent la percussion de façon maladroite ;
elles se sentent alors surprises ou embarrassées si
le doigt percuteur passe littéralement à côté de sa
cible. Elles peuvent également grimacer si l’ongle
de leur doigt percuteur est trop long et qu’il provoque de la douleur en frappant le doigt stationnaire. Comme pour toutes les habiletés techniques
à acquérir, le perfectionnement vient avec la pratique. Après quelques semaines d’utilisation de la
technique, les doigts deviennent plus habiles et précis, les mouvements sont naturels, et les oreilles
apprennent à percevoir les différences subtiles
entre les divers sons produits par la percussion.
FIGURE 8.2
Mouvement du poignet pendant la percussion
caractéristiques entendues comme des « notes »
TABLEAU 8.1. Chacune des cinq notes de percussion se distingue par les éléments suivants.
1. Amplitude (ou intensité) – un son intense ou
faible. Plus le son est fort, plus l’amplitude est
grande. La force du son dépend de la vigueur de
la percussion et de la capacité de la structure
percutée à vibrer.
2. Son (ou fréquence) – le nombre de vibrations par
seconde. Plus les vibrations sont rapides, plus
les sons produits sont aigus ; des vibrations
plus lentes produisent des sons de faible tonalité,
donc graves.
3. Qualité (timbre) – la différence subjective de son
en raison des tonalités harmoniques distinctes.
Une tonalité pure est un son d’une seule et
même fréquence. Les variations au sein d’une
onde sonore produisent des harmoniques. Elles
permettent de distinguer la note do sur un piano
d’un do sur un violon.
4. Durée – le temps écoulé jusqu’à la n de l’audition de la note.
Le son suit un principe fondamental : une structure contenant relativement plus d’air (comme les
poumons) produit un son plus fort, plus profond
Production d’un son
Tous les sons résultent de la vibration d’une structure FIGURE 8.3. Percuter une structure corporelle
provoque des vibrations qui produisent des ondes
FIGURE 8.3
Onde sonore
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
161
et plus long, car elle vibre librement ; une structure
dense, plus solide (comme le foie) donne un son
plus doux, plus haut et plus court, car elle ne vibre
pas aussi facilement. Bien que le TABLEAU 8.1
détaille cinq « normalités » de notes de percussion,
il existe des variations dans la pratique clinique.
La note entendue dépend de la nature de la structure sous-jacente, ainsi que de l’épaisseur de la
paroi du corps et de la technique de percussion. Il
ne faut pas apprendre ces différentes notes uniquement de la façon dont elles sont décrites. Il convient
de se pratiquer sur un partenaire consentant.
L’auscultation est l’écoute de sons produits par
le corps ; il peut s’agir du cœur, des vaisseaux sanguins, des poumons ou encore de l’abdomen,
par exemple.
L’ajustement et la qualité du stéthoscope sont
importants. Un instrument de mauvaise qualité ne
transmettra pas les sons permettant une évaluation
précise. L’angle des embouts doit pointer vers
l’avant, en direction du nez. Cela correspond à
l’angle naturel du canal auditif, et cette position
bloque plus efcacement les sons de l’environnement. Si nécessaire, tordre légèrement les embouts
pour qu’ils deviennent parallèles à l’angle des
canaux auditifs. Les embouts devraient être bien
ajustés ; s’ils causent de la douleur, c’est qu’ils sont
insérés trop loin. Ajuster la tension des branches
et essayer différents embouts en caoutchouc ou en
plastique rigide pour atteindre le maximum de
confort. Le tube devrait être fait d’un matériau
épais, d’un diamètre intérieur de 4 mm et d’environ 36 à 46 cm de long. Un tube plus long peut déformer les sons entendus.
Certains sons peuvent être perceptibles avec les
oreilles – par exemple, la rudesse du gargouillement d’une respiration très embarrassée. Toutefois,
la plupart des sons du corps demeurent très faibles
et doivent être acheminés à l’oreille par l’intermédiaire d’un stéthoscope pour que l’inrmière puisse
les évaluer. Le stéthoscope n’amplie pas le son du
corps, mais il bloque les sons extérieurs. De tout
l’équipement qui sera utilisé, le stéthoscope deviendra rapidement un instrument indispensable. Il faut
apprendre ses caractéristiques et prendre le temps
de l’ajuster pour soi-même.
Choisir un stéthoscope avec une double tête – un
diaphragme et une cloche (ou cupule) FIGURE 8.4.
Le plus souvent, l’inrmière utilise le diaphragme
parce qu’il est conçu pour mieux entendre les sons
aigus de la respiration et du côlon, ainsi que les
bruits normaux du cœur. (Puisque le stéthoscope
touche de nombreuses personnes, en nettoyer la
tête et la tubulure avec un tampon d’alcool an
d’éliminer une éventuelle transmission d’infection.)
Tenir le diaphragme fermement contre la peau de
la personne – assez fermement pour laisser,
quelques secondes, une empreinte du diaphragme
8.1.4
Q
uestion de suivi
Vous souhaitez ausculter
l’abdomen de Matisse ;
dans quelle position
devriez-vous l’installer ?
Q
uestion de suivi
Lorsque vous auscultez le
thorax de Matisse, quelle
partie de la tête du stéthoscope devez-vous utiliser ?
Auscultation
TABLEAU 8.1
162
Partie 2
Caractéristiques des notes de percussion
CARACTÉRISTIQUE
AMPLITUDE
TONALITÉ
QUALITÉ
DURÉE
EXEMPLE
Matité
Très faible
Haute
Sourde, sèche,
matité absolue
Très
courte
Lorsqu’il n’y a pas d’air dans
la structure, muscles fermes,
os, au-dessus d’une tumeur
Submatité
Faible
Moyenne
Sourde,
étouffée
Courte
Organes relativement denses
tels que le foie et la rate
Sonorité
Forte
Basse
Non musicale
Modérée
Au-dessus du tissu pulmonaire normal
Hypersonorité
Très forte
Très
basse
Profonde et
résonante
Longue
Normale au-dessus des poumons des enfants, anormale
chez l’adulte ; poumons avec
volume alvéolaire augmenté
comme chez les personnes
atteintes d’emphysème
Tympanisme
Forte
Haute
Musicale,
comme le son
d’un tambour
(caisse claire)
Longue et
soutenue
Au-dessus des viscères
contenant de l’air tels que
l’estomac et les intestins
Connaissances préalables à l’examen clinique
• Ne jamais écouter par-dessus les vêtements. Le
fait d’écouter par-dessus les vêtements peut
modier les bruits cardiaques et pulmonaires.
Atteindre la région à ausculter en passant le
stéthoscope sous les vêtements, mais veiller à
ce que ceux-ci ne frottent pas sur la tête du
stéthoscope.
• Éviter l’interférence avec les bruits que l’in rmière produit elle-même tels que la respiration sur le tube ou le thump des tubes qui
se heurtent.
FIGURE 8.4
Stéthoscope : diaphragme (dessous) et cloche (dessus)
après l’auscultation. La cloche a un creux profond
en forme de cône ; il est préférable d’utiliser ce côté
de la tête pour l’écoute des sons doux et aigus de
faible intensité tels que les bruits cardiaques surajoutés et les murmures. Tenir la cloche en appliquant une légère pression contre la peau – juste
assez pour obtenir une parfaite étanchéité. Toute
pression supplémentaire créera l’effet d’un diaphragme en raison de la peau tendue, faisant ainsi
disparaître les sons aigus faibles.
Certains stéthoscopes plus récents ont un diaphragme ottant en guise de tête. Cela permet
d’écouter à la fois les basses et les hautes fréquences des sons sans devoir tourner la tête du
stéthoscope. Pour écouter les sons de basse fréquence (en mode cloche traditionnelle), il faut
tenir très légèrement la tête sur la peau ; pour
entendre les sons de haute fréquence (en mode
diaphragme traditionnel), il faut appuyer le stéthoscope fermement sur la peau.
Avant de pouvoir évaluer les sons corporels, il
faut éliminer toute confusion avec les bruits
environnants.
• Garder la salle d’examen dans le calme.
Tout bruit supplémentaire en provenance de
l’environnement peut produire un grondement
dans le stéthoscope.
• Garder la salle d’examen chaude. Si la personne
commence à trembler, les contractions musculaires involontaires pourraient étouffer les
autres sons.
• Nettoyer la tête du stéthoscope avec un tampon
d’alcool, puis la réchauffer par des frottements
dans la paume de la main. Cela permet d’éviter
le « signe du chandelier » suscité lorsqu’un objet
froid entre en contact avec le thorax chaud.
• Minimiser le frottement de la tête du
stéthoscope sur une poitrine velue – cela provoque un crépitement qui imite des bruits respiratoires anormaux appelés crépitants – en
mouillant les poils du torse avant l’auscultation
de cette région.
L’auscultation est une compétence que les inrmières moins expérimentées doivent apprendre,
mais qui est difcile à maîtriser. Il faut d’abord
connaître la large gamme des sons normaux. Une
fois que l’inrmière les reconnaît, elle peut distinguer les sons anormaux et surajoutés. Dans
certaines parties du corps, il arrive d’entendre
plusieurs sons différents, et cela peut être source
de confusion. Il est possible d’écouter, de façon
sélective, et d’essayer d’isoler un seul bruit à la
fois pour bien l’entendre. En écoutant, il faut se
demander : Qu’est-ce que j’écoute en ce moment ?
Que devrais-je entendre à cet endroit ?
8.2
8
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Matisse,
que devriez-vous entendre
au cours de l’auscultation
pulmonaire ?
Préparation
La salle d’examen devrait être chaude et confortable,
tranquille, privée et bien éclairée. Dans la mesure
du possible, éliminer tout bruit distrayant (appareils
bruyants, radio, télévision, personnes qui parlent),
sinon, il sera difcile d’entendre les sons corporels.
L’examen de la personne ne devrait pas être interrompu par d’autres membres de l’équipe soignante.
L’éclairage par la lumière du jour reste le meilleur,
même s’il est rarement disponible ; une lumière articielle provenant de deux sources sufra et empêchera l’ombre. Une lampe murale ou en col de cygne
est nécessaire pour procurer un éclairage de haute
intensité. Cela permet un éclairage tangentiel (à
angle) qui favorise le visionnement des pulsations
et des contours corporels, mieux que ne le fait
l’éclairage perpendiculaire.
Positionner la table d’examen an que les deux
côtés de la personne soient facilement accessibles
FIGURE 8.5. La table doit être à une hauteur sufsante
pour que l’inrmière se tienne droite, sans se pencher. Elle doit également permettre d’élever la tête de
la personne jusqu’à un angle de 45°. Un siège rotatif
est utilisé pour les parties de l’examen où il faut être
assis. Une table de chevet ou une table sur roulettes
est nécessaire pour installer tout le matériel.
8.2.1
Préparation et matériel
Pendant l’examen, éviter de chercher de l’équipement ou de quitter la salle pour trouver un article.
Tout le matériel doit être à la portée de la main et
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
163
• échelle de Snellen de poche (pour évaluer la vision) ;
• papier et crayon pour prendre des notes ;
• stylo pour écrire sur la peau ;
• ruban à mesurer souple et règle, marqués en
centimètres ;
• marteau à réexes ;
• objet pointu (s’il y a aucune aiguille, fendre un
abaisse-langue sur la longueur) ;
• saturomètre (en milieu hospitalier) ou oxymètre ;
• boules de ouate ;
• spéculum vaginal ;
• gants non stériles ;
• nécessaire à prélèvement cytologique ;
• lubriant ;
• matériel pour le dépistage de sang occulte dans
les selles ;
• adipomètre.
FIGURE 8.5
Disposition optimale d’une table d’examen
15
La technique d’utilisation
de l’otoscope est présentée
dans le chapitre 15, Oreilles.
placé d’une façon organisée FIGURE 8.6. Les articles ou les instruments suivants sont généralement
nécessaires pour effectuer l’examen physique :
• balance avec toise pour prendre le poids et la
taille de la personne ;
• étriers amovibles ;
• sphygmomanomètre ;
• stéthoscope avec cloche et diaphragme ;
• thermomètre (tympanique ou électronique) ;
• saturomètre (en milieu hospitalier) ou oxymètre
de pouls ;
La plupart des instruments sont décrits à leur
première mention dans le texte qui suit. Toutefois,
il est conseillé de lire cette introduction portant sur
l’otoscope et l’ophtalmoscope.
L’otoscope projette la lumière dans le canal de
l’oreille et sur la membrane tympanique
15 . La
base sert de poignée et contient l’alimentation électrique par une pile. Pour attacher la tête de l’otoscope, l’appuyer délicatement sur la portion mâle
de la base et tourner vers la droite jusqu’à ce qu’un
arrêt se fasse sentir. Pour allumer l’ampoule,
appuyer sur le bouton rouge (ou noir ou vert) du
rhéostat vers le bas et vers la droite. (Toujours
l’éteindre après l’avoir utilisé pour augmenter la
durée de vie de l’ampoule et de la pile.) Cinq spéculums, chacun ayant une taille différente, peuvent
être xés à la tête FIGURE 8.7. (Le spéculum court
• lampe de poche ;
• otoscope/ophtalmoscope ;
• diapason ;
• spéculum nasal (s’il n’y a pas de spéculum court
et large avec l’otoscope) ;
• abaisse-langue ;
FIGURE 8.6
Matériel nécessaire à l’examen
164
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
FIGURE 8.7
Otoscope et spéculums
et large est conçu pour l’examen des narines.)
Choisir le spéculum le plus large qui pourra s’insérer aisément dans le canal auditif.
L’ophtalmoscope éclaire l’intérieur des structures
de l’œil. Son système de lentilles et de miroirs permet de regarder au fond de l’œil (arrière-plan) par
la pupille, un peu comme le fond d’une pièce peut
être vu par le trou de la serrure. La tête de l’ophtalmoscope se xe sur la base de l’instrument, comme
pour l’otoscope FIGURE 8.8.
La tête comporte cinq parties :
1. fenêtre d’ouverture, avec cinq ouvertures ;
2. disque de sélection des ouvertures sur la face
avant ;
3. miroir de renvoi à l’avant ;
FIGURE 8.9
Ouvertures de l’ophtalmoscope
8
4. disque de sélection des lentilles ;
5. indicateur de lentilles (dioptries).
Sélectionner l’ouverture à utiliser FIGURE 8.9.
La rotation du sélecteur de lentilles permet de
faire la mise au point sur la partie examinée.
L’indicateur de lentilles montre un nombre, ou
dioptrie, qui indique la valeur de la lentille utilisée. Les chiffres noirs (ou verts) indiquent une
lentille positive, de 0 à +40. Les chiffres rouges
indiquent une lentille négative, de 0 à –20.
L’ophtalmoscope peut compenser la myopie ou
l’hypermétropie, mais il ne corrige pas l’astigmatisme
14 .
Le matériel suivant sera utilisé occasionnellement, selon les besoins : goniomètre pour mesurer
l’amplitude des mouvements communs, sonomètre doppler pour augmenter l’écoute du pouls
ou la mesure de la pression artérielle (PA),
FIGURE 8.8
Ophtalmoscope
fœtoscope pour ausculter le cœur fœtal et pelvimètre pour mesurer la largeur du bassin.
Pour un enfant, utiliser des embouts pédiatriques pour le stéthoscope et l’otoscope, du matériel pour faire l’évaluation de son développement,
ainsi que des jouets adaptés à son âge ; pour un
nourrisson, se servir également d’une tétine ou
d’une sucette.
8.2.2
Propreté
Il ne faut pas laisser le stéthoscope devenir un
« staph-oscope » couvert de bactéries ! Les stéthoscopes et tout le matériel fréquemment utilisé sur
plusieurs clients peuvent devenir des véhicules
de transmission des infections. Le nettoyage des
instruments avec un tampon d’alcool avant et
après l’examen de chaque client est un moyen
efcace de prévention et de contrôle des infections (PCI).
Pour la manipulation de l’équipement, il est
important de désigner une surface « propre » et
une surface « souillée ». Dans un environnement
hospitalier, il est pratique d’utiliser la table de
chevet comme surface propre et la table d’appoint
pour y déposer le matériel souillé. En clinique,
déterminer deux aires de travail différentes sur la
table d’appoint ajustable. Délimiter l’emplacement de la surface propre par une ou deux serviettes en papier jetables. Sur les serviettes,
disposer le nouvel équipement, récemment nettoyé ou désinfecté, qui sera utilisé avec le client.
Employer des lingettes désinfectantes pour nettoyer tout matériel ayant servi pour chacun des
clients (p. ex., la tête du stéthoscope, le marteau
à réexes, la règle). Tout au long de l’examen physique, choisir chaque instrument sur la surface
propre et, après s’en être servi auprès du client,
le placer sur la surface souillée ou, dans le cas des
abaisse-langue ou des gants, les jeter directement
dans la poubelle.
Chapitre 8
14
Le chapitre 14, Yeux, donne
plus de détails sur la façon
de tenir l’instrument et sur
ce qu’il faut inspecter pen­
dant l’examen.
Q
uestion de suivi
Nommez une précaution
que vous devriez prendre
avant de procéder à l’auscultation de Matisse.
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
165
8.3
Environnement sain
et sécuritaire
En plus de surveiller étroitement la propreté de
l’équipement, il est nécessaire de prendre toutes
les mesures possibles pour éviter une éventuelle
transmission d’infections entre les clients ou encore
entre le client et l’infirmière ENCADRÉ 8.1 .
Contracter une infection nosocomiale (une infection acquise au cours d’une hospitalisation) représente un danger réel. Environ 10 % des clients
admis dans un centre hospitalier québécois contracteraient une infection nosocomiale, ce qui représente annuellement de 80 000 à 90 000 personnes
(Ordre des inrmières et inrmiers du Québec
[OIIQ], 2008). Certains endroits dans les centres
hospitaliers peuvent constituer des réservoirs pour
des microorganismes virulents, dont certains sont
devenus résistants aux antibiotiques tels que le staphylocoque doré résistant à la méticilline, l’entérocoque résistant à la vancomycine ou la tuberculose
multirésistante. Pour certains autres microorganismes, il n’existe encore aucun traitement connu,
par exemple pour le virus de l’immunodécience
humaine (VIH).
Q
uestion de suivi
Devriez-vous porter des
gants pendant l’évaluation
de Matisse ?
ENCADRÉ 8.1
Puisqu’environ le tiers de ces infections seraient
évitables, il est important de mettre en place un
programme structuré de PCI comportant notamment la désinfection de l’appareillage utilisé pour
l’examen physique, mais surtout en mettant l’accent sur une hygiène des mains exemplaire (OIIQ,
2008). Ainsi, le meilleur moyen de réduire le risque
de transmission des microorganismes pathogènes
est de procéder à l’hygiène des mains à fond pendant 10 à 15 sec. (ou plus longtemps si les mains
paraissent souillées) FIGURE 8.10 et ENCADRÉ 8.1.
Dans les centres hospitaliers, des distributeurs sont
maintenant installés à l’extérieur des chambres des
clients. Ils contiennent une solution antiseptique
sans eau, à séchage rapide, pour le lavage des mains
avant d’entrer dans une chambre et en sortant de
FIGURE 8.10
Procéder à une hygiène adéquate des mains permet de réduire
le risque de transmission de microorganismes pathogènes.
celle-ci. Cette solution antiseptique à base d’alcool
nécessite moins de temps qu’une hygiène des
mains, permet de tuer les germes plus rapidement
et est moins dommageable pour la peau puisqu’elle
contient généralement un émollient. Les solutions
à base d’alcool sont particulièrement efcaces
contre les bactéries à Gram positif et à Gram négatif,
le Mycobacterium tuberculosis de même que contre
la plupart des virus, notamment les virus de l’hépatite B et C, le VIH et les entérovirus (Boyce et Pittet,
2002). Procéder à l’hygiène des mains avec de l’eau
et du savon en les frottant bien lorsque les mains
sont visiblement souillées ou à l’occasion de
contacts avec des clients qui sont infectés par des
microorganismes à spores tels que le Clostridium
difcile ou le Bacillus anthracis.
Porter des gants lorsqu’il existe un risque potentiel de contact avec n’importe quel liquide corporel
(p. ex., le sang, les muqueuses, le liquide de drainage,
les lésions cutanées). Le port de gants ne remplace
toutefois pas l’hygiène des mains, puisque les gants
peuvent comporter des trous indétectables ou se
déchirer pendant leur utilisation ; en outre, les
mains pourraient être contaminées au moment de
retirer les gants.
Normes de précaution à appliquer à tous les clients
Les normes de précaution de base s’appuient sur le principe que le sang, les
liquides corporels – sécrétions et excrétions (sauf la sueur), – la peau présen tant des lésions, ainsi que les membranes muqueuses peuvent contenir des
agents infectieux transmissibles. Ces normes sont conçues pour être appliquées auprès de toutes les personnes, nonobstant leur risque ou leur statut
infectieux conrmé ou présumé, en tout temps lorsque des soins sont prodigués. Ces normes de précaution sont les suivantes.
• avant de procéder à une intervention aseptique ;
• après un risque de contact avec du liquide organique et après avoir enlevé
les gants ;
• après un contact avec la personne ou son environnement.
HYGIÈNE DES MAINS
L’usage d’un désinfectant pour les mains à base d’alcool est la méthode privilégiée d’hygiène des mains dans tous les milieux de soins à moins que ne s’appliquent les situations suivantes, pour lesquelles il faudrait préférer l’hygiène
des mains avec de l’eau et du savon :
Cette mesure, qui permet de prévenir la transmission d’infections nosoco miales, devrait être appliquée :
• lorsqu’une accumulation de désinfectant pour les mains à base d’alcool
engendre un inconfort après de multiples utilisations ;
• avant de toucher à une personne ou à son environnement ;
• pour retirer la saleté ou les matières organiques visibles ;
166
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
ENCADRÉ 8.1
Normes de précaution à appliquer à tous les clients (suite)
• au point de service, après avoir soigné un client atteint d’une infection à
norovirus ou à Clostridium difcile ;
une protection oculaire ou faciale durant des interventions susceptibles d’entraîner des éclaboussures de liquide organique.
• durant les éclosions ou dans les établissements où le degré de transmission
des norovirus ou des infections à C. difcile est élevé ;
TECHNIQUES SÉCURITAIRES D’INJECTIONS
• en cas d’exposition soupçonnée ou avérée à des articles contaminés au
bacille du charbon ;
• immédiatement après avoir utilisé les toilettes.
PORT DE GANTS, DE BLOUSE, DE MASQUE, DE PROTECTION OCULAIRE
OU FACIALE
1) Employer une technique aseptique pour prévenir la contamination du maté riel stérile utilisé pour faire des injections. 2) Les aiguilles, les canules et les
seringues sont du matériel stérile et à usage unique ; ne pas les réutiliser pour
d’autres clients.
HYGIÈNE RESPIRATOIRE/CIVISME
Le port de gants ne remplace pas l’hygiène des mains. Ils devraient être portés
au cours des tâches impliquant un contact réel ou potentiel avec des liquides
organiques, les muqueuses, la peau non intacte d’une personne ou des surfaces contaminées par ces substances. Si les mains du soignant ne sont pas
intactes, le port des gants s’impose également. Le port de la blouse est recommandé pendant les soins présentant un risque pour le soignant de contact avec
le sang et les liquides organiques du client par des éclaboussures ou des pro jections de gouttelettes, de soins comportant un risque de transmission d’un
agent pathogène venant d’un client et de son environnement et au cours de
soins prodigués à une personne immunodéprimée. Il faut utiliser un masque et
Cette norme s’adresse aux clients et aux personnes qui les accompagnent et
qui sont porteurs d’infections respiratoires transmissibles, mais non diagnostiquées. Il faut inclure : 1) l’éducation du personnel hospitalier, des clients et des
visiteurs ; 2) la pose d’afches lisibles dans les différentes langues utilisées
par la population ; 3) des mesures de contrôle (p. ex., se couvrir le nez et la
bouche avec un mouchoir lorsque la personne tousse ou éternue, jeter rapidement les mouchoirs utilisés, utiliser des masques chirurgicaux pour les per sonnes qui toussent) ; 4) l’hygiène des mains après avoir eu un contact avec
des sécrétions respiratoires ; 5) des espaces de plus de un mètre entre les personnes atteintes d’infections respiratoires et celles qui se trouvent dans les
aires d’attente communes.
Sources : Adapté de Agence de la santé publique du Canada (ASPC) (2012a, 2012b) ; Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS) (s.d.)
8.4
Contexte clinique
8.4.1
Approche générale
L’inrmière tient compte de son propre état émotionnel et de celui de la personne à être examinée.
Celle-ci est habituellement anxieuse (nerveuse) en
raison de l’appréhension qu’elle éprouve à se faire
examiner par une personne étrangère et à cause du
résultat inconnu de l’examen physique. Si cette
anxiété peut être réduite, la personne se sentira plus
à l’aise, et les données recueillies reéteront son
état naturel plus fidèlement. Une infirmière
conante, sûre d’elle, attentionnée et paisible peut
aider à diminuer cette anxiété.
Les inrmières moins expérimentées peuvent
éprouver une certaine appréhension. La plupart
d’entre elles s’inquiètent au sujet de leurs compétences techniques, ont peur de ne pas remarquer
quelque chose d’important ou d’oublier une étape.
Plusieurs sont gênées elles-mêmes à l’idée de rencontrer une autre personne partiellement vêtue.
Toutes ces peurs sont naturelles et fréquentes. Le
meilleur moyen de les réduire est d’effectuer beaucoup de séances pratiques dirigées sur un sujet
volontaire et en santé, habituellement une collègue
étudiante. L’inrmière doit avoir conance en ses
capacités motrices avant d’être en mesure de réellement déterminer ce qu’elle voit ou entend chez
un « vrai » client. Cette conance se développera à
l’aide d’une pratique supervisée par un tuteur expérimenté, dans une atmosphère où il est acceptable
de commettre des erreurs et de poser des questions.
La collègue-sujet devra agir comme un client, permettant ainsi à l’inrmière d’expérimenter une
situation « réelle » tout en demeurant dans un
contexte sécuritaire. Une fois qu’elle se sent à l’aise,
elle accompagne son tuteur pour l’examen physique d’un client réel et elle observe comment se
comporte une inrmière expérimentée.
8.4.2
Déroulement de l’examen
À l’aide de cette préparation, l’inrmière pourra
interagir avec son propre client d’une manière
conante. Commencer par prendre les mesures de
la personne : taille, poids, PA, température, pouls
et respiration
9 . Si cela est jugé nécessaire à
cette étape, mesurer aussi l’acuité visuelle de la
personne à l’aide de l’échelle de Snellen. Toutes
ces actions semblent coutumières et sont relativement peu menaçantes ; elles permettront à la personne de s’habituer graduellement à l’examen
physique. Par la suite, demander à la personne de
se dévêtir et de mettre une chemise d’examen, tout
en conservant sa culotte ou son caleçon. La personne se sentira plus à l’aise, et le sous-vêtement
pourra être facilement retiré juste avant l’examen
des organes génitaux.
Chapitre 8
9
Le chapitre 9, Questionnaire
général, mesure des signes
vitaux, explique la façon
de prendre les mesures
du client.
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
167
8
À moins que son aide ne soit requise, l’inrmière
quitte la pièce pendant que la personne se dévêt.
Lorsqu’elle revient dans la pièce, l’inrmière
procède à l’hygiène des mains en présence de la
personne. Cela démontre qu’elle est soucieuse de
la protection de celle-ci et qu’elle reprend l’examen
à neuf pour elle. Expliquer à la personne chaque
étape de l’examen physique et la façon dont elle
peut y collaborer. L’encourager à poser des questions. S’assurer que ses propres mouvements
demeurent lents, méthodiques et délibérés.
12 et 22
Le chapitre 12, Peau, cheveux
et ongles, décrit l’examen de
ces éléments. Le chapitre 22,
Système musculosquelettique,
décrit les étapes de l’examen
de ce système.
Commencer par toucher les mains de la personne, en vériant la coloration de la peau, les
ongles et les jointures
12 et 22 . Encore une fois,
il s’agit d’une manière moins menaçante d’habituer
la personne à se faire toucher, la rendant ainsi plus
à l’aise. La plupart des gens sont habitués à se faire
toucher les mains par des personnes plus ou moins
étrangères.
Tout au long du déroulement de l’examen physique, il est essentiel d’éviter les distractions et de
se concentrer sur une étape à la fois. La séquence
des étapes peut changer en fonction de l’âge de la
personne et de la préférence de l’infirmière.
Toutefois, il faudrait que celle-ci adopte une
méthode qui lui convient et qu’elle s’y tienne an
d’éviter toute omission. Organiser les étapes de
manière à éviter à la personne de changer de position trop souvent. Même si une exposition adéquate
de la personne est nécessaire, utiliser des couvertures supplémentaires au besoin pour conserver son
intimité et éviter qu’elle prenne froid.
27
Pour la séquence des étapes
d’un examen complet, con­
sulter le chapitre 27, Évalua­
tion complète de la santé.
Ne pas hésiter à mettre sur papier la séquence
de l’examen et s’y référer tout au long de son déroulement. En lui expliquant que ces notes assurent
l’exactitude de l’information, l’inrmière rassure la
personne, et celle-ci acceptera tout naturellement
cette démarche. Plusieurs établissements proposent
l’utilisation d’un formulaire imprimé. Avec l’expérience, le recours à ces formulaires devient moins
fréquent. Toutefois, même avec un formulaire, il
arrive parfois de manquer une étape de l’examen.
Lorsqu’elle s’en rend compte, l’inrmière effectue
la manœuvre au cours de la séquence ultérieure qui
lui apparaît la plus logique
27 .
Pendant l’examen physique, il est possible, à l’occasion, d’offrir de brefs enseignements à la personne
examinée. Par exemple, l’inrmière peut lui dire :
« Ce tapotement dans votre dos (percussion) est un
peu comme de jouer sur différents tambours. Les
différentes notes que j’entends m’indiquent où commence et où nit chaque organe. Vous entendez probablement ces différences vous-même à l’intérieur
de votre corps. » Ou encore : « Tout le monde émet
deux sons pour chaque battement cardiaque, un peu
comme “lub-dup”. Le vôtre semble normal. »
L’infirmière n’agit pas ainsi à chaque étape
de l’examen, autrement il lui faudra fournir un
168
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
commentaire même si elle découvre une anomalie.
Mais un certain partage d’information bâtit une
relation et fait s’accroître la conance que la personne éprouve envers l’inrmière. Cela permet
aussi à la personne d’avoir un petit peu plus de
maîtrise sur une situation où, autrement, elle pourrait se sentir complètement désemparée.
À un certain moment, l’inrmière voudra s’attarder sur une partie du corps de la personne an
de se concentrer pour y rechercher quelque chose
de complexe. Pour éviter que la personne devienne
anxieuse, lui dire : « Je choisis toujours plusieurs
endroits différents de la poitrine pour écouter les
bruits du cœur. Ce n’est pas nécessairement parce
que je prends beaucoup de temps que cela indique
une anormalité chez vous. » Mais il peut arriver
que l’inrmière trouve effectivement quelque chose
d’anormal, et elle voudra alors qu’un autre professionnel de la santé valide son opinion. Il faudra en
informer la personne, mais se garder de l’alarmer
inutilement. Dire quelque chose comme : « Je n’ai
pas pu obtenir une évaluation complète des bruits
de votre cœur. J’aimerais que ma collègue vienne
les écouter, elle aussi. »
À la n de l’examen physique, résumer les éléments d’information recueillis et faire part de ce
qui est nécessaire à la personne. La remercier pour
ce temps passé avec elle. Dans un contexte hospitalier, l’informer de ce qui est prévu par la suite.
Avant de quitter une personne hospitalisée, rebaisser le lit, rendre la cloche d’appel accessible,
s’assurer que la personne est confortablement installée et en sécurité et replacer dans leur position
initiale la table de chevet, la télévision ou tout autre
équipement déplacé pour l’examen.
Particularités liées au développement
Les enfants sont différents des adultes. Leur différence de taille est évidente. Leur corps croît d’après
une courbe prévisible qui est évaluée au cours de
l’examen physique. Cependant, leur comportement
diffère aussi, et il se modie selon des stades
prédénis, tout comme le corps. Toute inrmière
se doit de connaître les caractéristiques émotionnelles et cognitives liées à chacun de ces stades, et
elle effectue un examen physique en fonction de
ces principes de développement (Berk, 2007 ;
Hockenberry et Wilson, 2006).
Avec les enfants, le but recherché dans ce
contexte est d’augmenter leur confort. Cette
approche révèle le plus possible leur état naturel
et leur laisse un bien meilleur souvenir des professionnels de la santé. Il faut se souvenir qu’un examen de routine ne sera jamais que de la routine
pour les enfants. L’inrmière peut contribuer à
augmenter leur confort en appliquant ces quelques
approches et principes développementaux. L’ordre
des stades du développement est bien plus signicatif que l’âge chronologique exact. Chaque enfant
est une personne unique et ne cadre pas exactement
dans une catégorie en particulier. Par exemple, si
les efforts pour « jouer à un jeu » avec un enfant
d’âge préscolaire sont repoussés, il faut modier
l’approche en se référant aux mesures de sécurité,
comme avec un trottineur.
Préparation
Nourrissons
• Un nourrisson ne s’opposera pas à être nu. Faire
retirer les vêtements par le parent, mais laisser
la couche à un garçon pour éviter un jet d’urine
vers le haut.
Selon le psychanalyste américain Erik Erikson
(1902-1994) la principale tâche de la petite enfance
est de bâtir la conance. Un nourrisson est complètement dépendant de ses parents pour ses besoins
fondamentaux. Si ces derniers sont comblés
constamment et rapidement, le nourrisson se sent
en sécurité et apprend à faire conance aux autres.
Position
• Le parent devrait toujours être présent pendant
l’examen afin de comprendre comment se
déroulent une croissance et un développement
normaux et aussi pour assurer un sentiment de
sécurité à l’enfant.
• Déposer le nouveau-né ou le nourrisson à plat
sur une table d’examen matelassée FIGURE 8.11.
Le nourrisson peut aussi être maintenu contre
la poitrine de son parent au cours de certaines
étapes de l’examen physique.
• Quand le nourrisson peut se tenir assis sans
appui (vers l’âge de six mois), la plus grande
partie possible de l’examen devrait se dérouler
lorsqu’il est assis sur les genoux de son parent.
• Vers l’âge de 9 à 12 mois, le nourrisson est pleinement conscient de son entourage. Pour lui,
tout ce qui se trouve à l’extérieur de son champ
de vision est perdu ; donc, pour cette raison, son
parent doit demeurer bien en vue.
• L’examen physique devrait avoir lieu une ou
deux heures après que le bébé a été nourri, lorsqu’il n’est ni trop somnolent ni trop affamé.
• Maintenir un environnement chaud. Au besoin,
utiliser un système de chauffage d’appoint pour
un nouveau-né.
• Un nourrisson se laissera volontiers toucher,
mais l’inrmière doit s’assurer que ses mains et
la tête de son stéthoscope sont assez chaudes.
8
• L’inrmière utilise une voix douce et mélodieuse
au cours de l’examen ; un bébé réagit davantage
au timbre de voix qu’aux paroles.
• Un nourrisson apprécie le contact visuel ; il
aimera être xé dans les yeux de temps en temps.
• Un nourrisson préfère un visage souriant à un
visage renfrogné. (Il arrive souvent que les inrmières peu expérimentées soient tellement
absorbées par leur technique qu’elles afchent
un air sérieux ou sévère.) Sourire et prendre le
temps de jouer avec l’enfant.
• Garder les mouvements souples et délibérés,
non saccadés.
• Avoir recours à une sucette lorsque le nourrisson
pleure ou au cours des étapes plus effractives.
• Offrir des jouets aux couleurs vives pour distraire le nourrisson ou lorsqu’il est incommodé.
• Laisser un nourrisson plus âgé toucher au stéthoscope ou à un abaisse-langue.
Séquence
• Si le nourrisson dort, en proter pour écouter le
cœur, les poumons et les sons abdominaux en
premier.
• Effectuer les étapes les moins incommodantes en
premier
27 . Garder les étapes effractives de
l’examen pour la n : yeux, oreilles, nez et gorge.
• Susciter le réexe de Moro (ou réexe des bras
en croix) seulement à la n de l’examen étant
donné qu’il peut faire pleurer le nourrisson.
Trottineurs
FIGURE 8.11
L’inrmière maintient un contact visuel et physique avec le
nourrisson pendant l’examen.
27
Le chapitre 27, Évaluation
complète de la santé, décrit
la séquence des étapes de
l’examen physique occasionnant le moins d’inconfort pour le client.
Il s’agit du stade de développement de l’autonomie, comme vu par Erikson. Cependant, le besoin
de découvrir le monde et d’être indépendant entre
en conit avec la dépendance envers les parents.
Cela occasionne souvent de la frustration et du
négativisme. Il peut être difcile d’effectuer l’examen physique chez un trottineur ; il ne faut pas
prendre cela personnellement. Comme il est pleinement conscient de ce nouvel environnement,
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
169
le trottineur peut avoir peur et s’accrocher à
son parent. De plus, il craint en général les procédures effractives et n’aime pas être contraint dans
ses mouvements.
Position
15
Dans le chapitre 15, Oreilles,
la gure 15.15 montre de
quelle façon faire collaborer
un enfant à l’examen.
16
La gure 16.21 du cha­
pitre 16, Nez, bouche et
gorge, montre comment
le parent doit maintenir
l’enfant pour l’examen.
• Le trottineur devrait être assis sur les genoux de
son parent pour toute la durée de l’examen. Lorsqu’il doit être allongé sur le dos (comme pour
l’examen de l’abdomen), déplacer les chaises de
façon que les genoux de l’inrmière soient accolés à ceux du parent. Faire s’étendre le trottineur
sur les genoux de son parent et déposer ses
jambes sur ceux de l’inrmière.
• Demander l’aide d’un parent coopératif pour
maintenir l’enfant en place au cours des procédures effractives. Les jambes de l’enfant
peuvent être coincées entre celles du parent.
Un des bras du parent peut entourer la tête de
l’enfant et la maintenir contre la poitrine du
parent, et l’autre bras peut immobiliser les bras
de l’enfant
16 .
• Féliciter l’enfant lorsqu’il collabore.
Séquence
• Recueillir des données objectives au cours de
l’histoire de santé, qui est une période moins
stressante. Pendant que l’attention est portée sur
le parent, noter les capacités motrices et
la motricité fine de l’enfant ainsi que sa
démarche.
• Débuter avec des « jeux », par exemple le test
Denver II ou l’évaluation neurologique des
nerfs crâniens.
• Commencer par les endroits non menaçants.
Garder pour la n les procédures pénibles telles
que l’évaluation de la tête, des oreilles, du nez
ou de la gorge.
Enfants d’âge préscolaire
• Les enfants âgés de un ou deux ans peuvent comprendre les symboles ; donc un objet familier et
sécurisant, comme une couverture ou un toutou,
peut être utile.
À ce stade, l’initiative de l’enfant est en cours d’acquisition. L’enfant d’âge préscolaire entrevoit
les tâches indépendamment les unes des autres,
il planifie chacune et la mène à terme. Il est
souvent coopératif, serviable et facile à impliquer. Toutefois, les enfants de cet âge ont beaucoup d’imagination et peuvent percevoir
la maladie comme étant une punition pour
avoir été « méchants ». Le concept de l’image
corporelle est limité. L’enfant craint toute blessure
ou mutilation corporelle ; il peut donc être
réticent devant une procédure effractive (p. ex.,
l’utilisation d’un abaisse-langue, la prise de température rectale, une injection ou une ponction
veineuse).
• Un enfant de deux ans n’aime pas se dévêtir ;
laisser le parent lui enlever ses vêtements, un
à la fois.
• Les enfants âgés de un ou deux ans aiment dire
« non ». Ne pas offrir la possibilité de choisir
lorsqu’il n’y a pas de choix à faire. Éviter de dire :
« Est-ce que je peux écouter ton cœur maintenant ? » Lorsqu’un enfant de un ou deux ans dit
« non », mais que l’inrmière effectue quand
même ce qu’elle a à faire, elle perd sa conance.
Énoncer plutôt une directive claire et ferme,
d’un ton qui recommande la collaboration : « J’aimerais que tu te couches, car j’ai besoin de regarder ton ventre. »
• Les enfants âgés de un ou deux ans aiment faire
des choix. Lorsque c’est possible, favoriser
Partie 2
• Faire la démonstration de la procédure d’examen
sur le parent
15 .
Préparation
• Commencer par accueillir l’enfant et le parent
en les nommant, mais avec un enfant âgé de un
à six ans, mettre l’accent sur le parent. Faire
mine d’ignorer l’enfant au début permet à celuici de s’adapter graduellement et à distance à
l’inrmière. Porter ensuite graduellement l’attention sur l’enfant, en s’attardant d’abord à un
jouet ou à un objet qu’il tient ou encore en le
complimentant au sujet de ses vêtements, de ses
cheveux ou à quel point il est un grand garçon
ou elle est une grande lle. Si l’enfant se sent
prêt, des signes se manifesteront : contact visuel
avec l’inrmière, sourire, conversation avec lui
ou encore jouet ou pièce d’équipement qu’il
accepte de prendre.
170
l’autonomie en offrant des options limitées :
« Tu fais bien cela. Maintenant, je dois écouter
ton coeur. »
Connaissances préalables à l’examen clinique
Position
• Avec un enfant âgé de trois ans, le parent devrait
être présent, et il pourrait le tenir assis sur ses
genoux FIGURE 8.12.
• Un enfant de quatre ou cinq ans se sent habituellement à l’aise sur la table d’examen « de grand
garçon » ou « de grande lle », avec le parent près
de lui.
Préparation
• Un enfant d’âge préscolaire peut parler. La
communication verbale devient maintenant
utile, mais il ne faut pas oublier que la capacité de compréhension de l’enfant demeure
limitée. Donner des explications courtes
et simples.
• L’enfant d’âge préscolaire accepte habituellement de se dévêtir. Lui laisser ses sousvêtements jusqu’à l’examen des organes
génitaux.
d’écouter ceux de l’enfant. Une technique qui
permet de garder l’attention de l’enfant d’âge
préscolaire est de tracer sa silhouette sur
le papier de la table d’examen. Commenter la
grandeur de l’enfant et, par la suite, dessiner un
cœur et un estomac et écouter les sons de cette
poupée de papier avant d’écouter ceux de l’enfant. Après l’examen, l’enfant peut rapporter
cette poupée de papier à la maison en guise de
souvenir.
• Avoir une approche lente, patiente et délibérée.
Ne pas se presser.
• Au cours de l’examen, rassurer l’enfant d’âge
préscolaire et lui fournir la rétroaction dont il a
besoin : « Ton bedon va très bien. »
8
• Complimenter l’enfant pour sa collaboration.
FIGURE 8.12
Enfant d’âge préscolaire assis sur sa mère durant l’examen
• Parler à l’enfant et lui expliquer exactement les
étapes de l’examen physique.
• Ne pas offrir la possibilité de choisir lorsqu’il
n’y a pas de choix à faire.
• Comme pour le trottineur, favoriser l’autonomie
de l’enfant d’âge préscolaire en lui proposant de
choisir lorsque c’est possible.
• Permettre à l’enfant de jouer avec l’équipement
dans le but de réduire ses peurs FIGURE 8.13.
• Un enfant d’âge préscolaire aime aider ; lui laisser tenir le stéthoscope.
• Avoir recours aux jeux. Demander à l’enfant
« d’éteindre » la lumière de la lampe de poche
en soufant dessus pendant l’écoute des sons
respiratoires. Ou encore, faire semblant d’écouter les sons cardiaques de son toutou avant
Séquence
• Examiner d’abord le thorax, l’abdomen, les extrémités et les organes génitaux. Même si l’enfant
d’âge préscolaire est habituellement coopératif,
continuer d’évaluer seulement à la n la tête, les
yeux, le nez et la gorge.
Enfants d’âge scolaire
Au cours de la période de l’âge scolaire, la principale occupation de l’enfant est de développer sa
compétence. Il acquiert des compétences de base
à l’école et dans son réseau social et il cherche
l’approbation de ses parents et enseignants.
Lorsqu’il réussit quelque chose, l’enfant éprouve
un sentiment d’accomplissement. Au cours de
l’examen, il se montre coopératif et souhaite en
apprendre plus au sujet de son corps. Même si le
langage est maintenant plus sophistiqué, il ne faut
pas surestimer l’enfant d’âge scolaire et ne pas le
traiter comme un petit adulte. Le degré de compréhension de l’enfant ne correspond pas à celui
de son discours.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Matisse,
allez-vous lui permettre de
manipuler le matériel et
lui donner des explications
tout au long de l’examen ?
Position
• L’enfant d’âge scolaire devrait s’asseoir sur la
table d’examen.
• Un enfant âgé de cinq ans a de la pudeur. Pour
préserver son intimité, laisser un enfant plus âgé
(de 11 ou 12 ans) décider si ses parents ou ses
frères et sœurs doivent être présents.
Préparation
• Briser la glace en discutant brièvement de sa
famille, de l’école, des amis, de la musique ou
des sports.
• L’enfant devrait se dévêtir seul, garder sa culotte
ou son caleçon et utiliser une chemise d’examen
et une couverture.
FIGURE 8.13
Laisser l’enfant d’âge préscolaire jouer avec le matériel.
• Faire la démonstration de l’équipement ; un
enfant d’âge scolaire est curieux de comprendre
comment fonctionne le matériel.
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
171
17, 24 et 26
Pour connaître l’estimation
de la maturité sexuelle chez
l’homme et la femme selon
Tanner, voir les tableaux 17.1,
24.1 et 26.1 des chapitres 17,
Seins et ganglions lymphati­
ques régionaux, 24, Système
génito­urinaire masculin,
et 26, Système génito­
urinaire féminin.
• Émettre des commentaires au sujet de certains
bruits du corps et de son fonctionnement. Un
enfant âgé de huit ou neuf ans a déjà une certaine
compréhension du corps et désire en apprendre
davantage. Il est gratiant de voir s’illuminer les
yeux de l’enfant lorsqu’il entend les bruits cardiaques, par exemple.
Séquence
• Comme pour l’adulte, progresser de la tête aux
pieds.
Adolescents
L’adolescence est la période du développement
d’une identité propre. Celle-ci se forme à partir de
différentes valeurs et de rôles sociaux variés (ls ou
lle, frère ou sœur, étudiant). Ultimement, chaque
personne doit se sentir bien et satisfaite d’elle-même.
Au cours de ce processus, l’adolescent est introspectif et de plus en plus conscient de lui-même. Les
valeurs de son groupe de pairs de même que l’acceptation et l’image corporelle sont importantes.
Position
• L’adolescent devrait s’asseoir sur la table
d’examen FIGURE 8.14.
• Effectuer l’examen de l’adolescent seul, sans
parent ni frère ou sœur présent.
Préparation
• Le corps se modie rapidement à ce stade. Au
cours de l’examen physique, l’adolescent a
besoin d’une rétroaction qui l’informe que son
corps est en santé et se développe normalement.
• L’adolescent a une conscience aiguë de son
image corporelle, se comparant souvent à ses
pairs. L’informer des très grandes variations que
l’on observe chez les adolescents en ce qui a trait
aux courbes de croissance et de développement
17, 24 et 26 .
• Communiquer avec précaution. Établir un climat
de conance et mettre l’adolescent à l’aise. Ne
pas le traiter comme un enfant, mais ne pas le
surestimer non plus en le considérant comme
un adulte.
• L’adolescent a assez de maturité pour accueillir des enseignements sur la santé. Des attitudes positives acquises dès maintenant
peuvent durer toute la vie adulte. Concentrer
les enseignements sur les moyens que l’adolescent peut utiliser pour accroître son propre
bien-être.
Séquence
• Comme pour l’adulte, une approche de la tête
aux pieds est appropriée. Il faut terminer
l’examen par des questions plus sensibles
et embarrassantes. Procéder à l’examen
des organes génitaux en dernier et avec
professionnalisme.
Adultes vieillissants
Au cours du processus de vieillissement, la personne plus âgée doit donner une signication à
la vie et à son existence propre et s’adapter aux
changements qui inuent sur sa force physique
et sa santé.
Position
• La personne âgée devrait s’asseoir sur la table
d’examen ; un adulte plus âgé, fragile, pourrait
avoir besoin d’être couché.
• Minimiser le plus possible les changements de
position en organisant la séquence de l’examen
de façon adéquate.
• Permettre des périodes de repos si nécessaire.
Préparation
• Adapter le rythme de l’examen à celui probablement ralenti de la personne âgée. Il est préférable
de répartir un examen complet sur plusieurs
visites que de se précipiter et de fatiguer la personne outre mesure.
• Avoir recours au toucher (à moins d’une
contre-indication culturelle). Cela est particulièrement important avec l’adulte vieillissant, car
les autres sens, comme la vue et l’ouïe, peuvent
être diminués.
5
Les étapes de l’examen
complet de l’état mental
de la personne âgée sont
présentées dans le chapitre 5,
Évaluation de l’état mental.
172
Partie 2
FIGURE 8.14
Auscultation d’une adolescente assise sur la table d’examen
Connaissances préalables à l’examen clinique
• Ne pas prendre une baisse de la vision ou de
l’audition pour de la confusion. L’apparition
soudaine de confusion peut signier un état
maladif. Cela se perçoit par des pertes de la
mémoire de travail, une diminution du processus de la pensée, une réduction de la période
d’attention et une labilité
5 .
• Être conscient que les années de vieillissement
sont marquées par de grands stress. La perte est
inévitable, et elle inclut les changements dans
l’apparence physique du visage et du corps, un
niveau d’énergie qui décline, la n d’un emploi
à cause de la retraite, l’insécurité nancière, la
perte de la demeure où s’est déroulée une
grande partie de la vie ainsi que la mort des
amis ou du conjoint. La manière dont la personne s’adapte à toutes ces pertes a un impact
important sur l’évaluation de son état de santé.
Séquence
• Utiliser l’approche de la tête aux pieds, comme
pour l’adulte plus jeune.
Personnes malades
Pour la personne souffrante ou éprouvant des difcultés respiratoires, adapter les positions au cours
de l’examen. Par exemple, une personne ayant le
soufe court ou souffrant d’une douleur à l’oreille
pourrait vouloir être assise, contrairement à
une personne très faible ou très fatiguée, qui pourrait vouloir être couchée. Initialement, il pourrait
s’avérer nécessaire d’examiner seulement les parties du corps touchées par le problème, ce qui permet d’établir une base de données préalable. Il sera
par la suite possible de compléter l’évaluation une
fois le malaise résorbé.
8
Évaluation et jugement clinique
Dossier : Matisse Comtois (suite)
Matisse vous semble en bonne santé, son poids
et sa taille se trouvent dans les normales pour
son groupe d’âge, et sa mère le décrit comme
un enfant enjoué et énergique. Sa tenue vestimentaire est adéquate, et vous n’observez aucun
signe de négligence ou de mauvais traitement
au cours de l’inspection.
Vous observez que Matisse montre encore
des signes de sa chute à vélo, à savoir des abra-
sions aux deux genoux et aux coudes, et elles
sont en voie de guérison. Il ne présente aucune
marque de blessure récente ou ancienne à la
tête. Pen dant l’examen, Matisse est curieux,
et il vous pose plusieurs questions. Il vous demande à quelques reprises s’il peut écouter dans
votre stéthoscope et regarder dans les oreilles
de sa mère.
1. Comment allez-vous procéder pour observer ses plaies aux genoux et aux coudes ?
2. À la suite de l’évaluation de ses plaies, quelle information allez-vous consigner au dossier ?
3. Nommez deux systèmes qu’il est primordial d’évaluer étant donné que Matisse commencera l’école
sous peu. Expliquez votre réponse.
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Au cours de l’évaluation de santé de Matisse,
quelle technique devez-vous utiliser en premier ?
2. Avant de procéder à l’auscultation de Matisse,
quelles mesures devez-vous prendre an de bien
entendre les sons corporels ?
4. Pendant la percussion de l’abdomen de Matisse,
que devriez-vous entendre dans la région où se
trouve le côlon ?
3. Quelle partie de la main devrez-vous utiliser pour
évaluer la température de la peau ?
5. Était-il nécessaire de procéder à un examen de tous
les systèmes dans le cas de Matisse ?
Chapitre 8
Techniques d’évaluation et préparation de l’environnement clinique
173
Dossier : Éric Chabot
Vous êtes inrmière dans un groupe de médecine familiale, et votre tâche consiste à rencontrer tous les clients qui se présentent à la clinique
sans rendez-vous pour commencer l’examen
physique avant de les diriger vers le médecin
qui fait les consultations. Vous vous rendez à la
salle d’attente pour appeler le prochain client,
Éric Chabot, qui est âgé de 32 ans selon les renseignements inscrits au dossier.
Vous mentionnez son nom à voix haute ; un
homme assis au milieu de la salle vous fait signe.
Il se lève lentement et péniblement de sa chaise,
se redresse et marche en boitant jusqu’à vous.
Vous remarquez qu’il n’effectue pas de mise en
charge sur son pied gauche et qu’il sautille sur
son pied droit pour vous suivre. À son entrée
dans le bureau, vous observez que son visage est
rouge, qu’il a l’air tendu et qu’il a le front couvert
de sueur. Il s’assoit devant vous et dit, en se massant la cheville gauche : « C’est pas facile de marcher sur une seule jambe. »
Vous lui demandez ce qui lui est arrivé, et il
vous raconte qu’il jouait au soccer, qu’il a couru
vers le ballon pour aller en échappée et lorsqu’il
a changé de direction pour semer le défenseur
de l’autre équipe, son pied a glissé. Il a senti sa
cheville se tordre vers l’intérieur, puis a entendu un « crac ». Il est ensuite tombé au sol, car il
était incapable de s’appuyer sur sa jambe en
raison de la douleur. « Je me suis rendu au banc
de joueurs et j’ai mis de la glace. Ça n’a rien
donné, j’ai été obligé d’arrêter de jouer et de
venir ici. »
9
Monsieur Chabot ne prend aucun médicament, il préfère contrôler la douleur de façon
non pharmacologique.
9.1 Données objectives
9.1.1
Préambule
Le questionnaire général est une étude de la personne en entier, comprenant l’état de santé global et
toute autre caractéristique physique évidente. Il s’agit
d’une introduction à l’examen physique qui suivra ;
il devrait en ressortir une impression d’ensemble,
une compréhension des interactions entre les divers
systèmes de la personne. Les paramètres objectifs
sont utilisés pour former le questionnaire général,
mais ils s’appliquent aussi à toute la personne, pas
seulement à un seul de ses systèmes corporels.
L’inrmière entreprend un questionnaire général
dès la première rencontre avec la personne. Quelle
est l’impression immédiate que dégage la personne ?
Se lève-t-elle promptement lorsqu’on l’appelle et se
9.1.2
dirige-t-elle volontiers vers l’inrmière ? Ou la personne semble-t-elle malade, se redresse-t-elle lentement ou avec des efforts, a-t-elle les épaules affaissées,
ses yeux sont-ils sans éclat ou son regard est-il baissé
vers le sol ? La personne hospitalisée converse-t-elle
avec ses visiteurs, s’intéresse-t-elle à la lecture ou à
la télévision ou reste-t-elle étendue, parfaitement
immobile ? Même une simple poignée de main fournit des renseignements. La personne étend-elle complètement son bras, secoue-t-elle la main fermement,
établit-elle un contact visuel ou sourit-elle ? Les
paumes de ses mains sont-elles sèches ou moites ?
Tout en effectuant l’histoire de santé, la prise des
mesures anthropométriques et des signes vitaux (SV),
l’inrmière note les aspects suivants qui devront
s’ajouter au questionnaire général et en tenir compte :
l’apparence physique, la structure du corps, la mobilité et le comportement de la personne.
Schéma séquentiel résumant
les étapes de l’examen clinique.
Examen physique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
QUESTIONNAIRE GÉNÉRAL
Apparence physique
Âge
L’apparence de la personne est conforme à son âge.
La personne semble plus vieille
que son âge, comme dans les cas
de maladies chroniques et d’alcoolisme chronique.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
175
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Sexe
5
Le développement sexuel est approprié au sexe et à l’âge.
Dans le tableau 5.1 du chapitre 5, Évaluation de l’état
mental, sont décrits les différents niveaux de conscience.
État de conscience
Q
uestion de suivi
À partir des données contenues dans la situation jusqu’à
présent, comment qualieriezvous l’état de conscience de
monsieur Chabot ?
La personne est alerte et orientée, prête attention aux questions
posées et y répond adéquatement.
Q
Confusion, somnolence, léthargie
5 .
Couleur de la peau
Le teint est uniforme, la pigmentation variant en fonction des
antécédents génétiques ; la peau est intacte, sans lésion
évidente.
Pâleur, cyanose, jaunisse, érythème, toute lésion
12 .
Traits du visage
Les traits du visage sont en symétrie avec les mouvements.
Traits immobiles, ayant l’apparence d’un masque, asymétriques,
affaissés.
La personne ne présente aucun signe de détresse ou de douleur
aiguë.
• Signes respiratoires ou cardiaques – diaphorèse, serrement à la poitrine – respiration
courte, respiration sifante.
• Douleur, exprimée par une
grimace faciale, la personne
se tenant la partie douloureuse du corps.
12
Les lésions de la peau sont
traitées dans le chapitre 12,
Peau, cheveux et ongles.
Puberté retardée ou précoce.
uestion de suivi
Quels signes vous laissent
croire que monsieur Chabot
éprouve de la douleur ?
Structure du corps
Stature
La taille semble normale pour l’âge et selon l’hérédité (voir
Mesures anthropométriques).
Taille excessivement petite ou
grande TABLEAU 9.6.
Nutrition
Le poids semble normal pour la taille et la musculature. La
distribution adipeuse est uniforme.
• Apparence cachectique,
émaciée.
• Obésité simple avec distribution
uniforme du tissu adipeux.
• Obésité centripète (troncale).
Le gras est concentré au visage,
au cou et au tronc, avec les
extrémités minces comme dans
le syndrome de Cushing (hyperadrénalisme) TABLEAU 9.6.
Symétrie
Les parties du corps semblent égales bilatéralement et sont proportionnelles les unes aux autres.
176
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
• Atrophie ou hypertrophie
unilatérale.
• Position asymétrique d’une
partie du corps.
OBSERVATIONS NORMALES
Posture
La personne se tient confortablement dans une position appropriée pour son âge. Noter la ligne verticale de référence qui passe
par l’avant de l’oreille, l’épaule, la hanche, la rotule et la cheville. Exception pour les trottineurs debout, qui ont un abdomen
protubérant (lordose du trottineur) et pour la personne vieillissante, qui peut avoir le dos voûté par une cyphose.
Position
La personne est assise confortablement sur la chaise, le lit ou la
table d’examen, les bras pendant de chaque côté, la tête tournée
vers l’inrmière.
ANOMALIES
• Colonne vertébrale et cou rigides ; bougent en bloc (p. ex.,
dans le cas d’arthrite).
• Posture raide, tendue, prête à
bondir de sa chaise, mouvements agités.
• Épaules affaissées, semblent
« dégonées » (p. ex., dans le
cas de dépression).
• Position en tripode – se tenant
penchée vers l’avant, se soutenant avec les bras appuyés sur
les bras de la chaise (p. ex., dans
le cas de maladies pulmonaires
chroniques).
• Assise bien droite et résiste à se
coucher (p. ex., dans le cas d’insufsance cardiaque congestive).
• Recroquevillée en position
fœtale (p. ex., dans le cas de
douleur abdominale).
9
Structure corporelle, prol
Les proportions sont les suivantes.
• L’envergure des bras (du bout des doigts d’une main à l’autre)
est égale à la hauteur de la personne.
• La distance tête-pubis est sensiblement la même que la distance pubis-sol. Difformités physiques évidentes – noter toute
malformation congénitale ou acquise.
• Envergure des bras allongée,
plus grande que la hauteur
(p. ex., dans le cas du syndrome de Marfan, d’hypogonadisme TABLEAU 9.6).
• Extrémités ou doigts manquants, doigts palmés, membres raccourcis.
Mobilité
Démarche
Normalement, la largeur de la base équivaut à celle des
épaules, la position du pied est correcte ; la marche se fait en
douceur, d’une manière régulière et bien équilibrée, et des
mouvements associés sont présents tels qu’un balancement
symétrique des bras.
• Base exceptionnellement large.
• Chancellement, trébuchement.
• Pieds qui traînent, jambe non
fonctionnelle.
• Boiterie avec blessure.
• Propulsion – difculté à arrêter
23 .
23
Dans le chapitre 23, Système
neurologique, le tableau 23.7
présente différents types de
démarches anormales.
Amplitude des mouvements
Observer la mobilité totale pour chacune des articulations et
noter si le mouvement est volontaire, précis, souple et coordonné
22 . Il y absence de mouvements involontaires.
• Amplitude limitée des
articulations.
• Paralysie – absence de
mouvement.
• Mouvements saccadés, non
coordonnés.
• Tics, tremblements, crises ou
contractures
23 .
Chapitre 9
22 et 23
L’amplitude des mouvements
est décrite dans le chapitre 22,
Système musculosquelettique,
alors que les tics et les tremblements sont détaillés dans
le tableau 23.5 du chapitre 23,
Système neurologique.
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
177
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Comportement
Expression faciale
La personne maintient un contact visuel (excepté en présence
d’un tabou culturel), les expressions sont appropriées à la situation (p. ex., pensive, sérieuse, souriante). (Observer les expressions du visage lorsque la personne est au repos et lorsqu’elle
parle.)
Épuisée, déprimée, fâchée, triste,
anxieuse. Cependant, prendre en
compte que l’anxiété est fréquente
chez les personnes malades.
Aussi, certaines personnes sourient lorsqu’elles sont anxieuses.
Humeur et affect
La personne se sent à l’aise et coopère. Elle interagit de façon
agréable.
Hostile, méfiante, suspicieuse,
en pleurs.
Discours
5
Les différents troubles du
langage sont décrits dans
le tableau 5.2 du chapitre 5,
Évaluation de l’état mental.
L’articulation (l’habileté à former des mots) est claire et
compréhensible.
• Le débit de parole est uide et bien cadencé.
• La personne communique clairement ses idées.
• Le choix des mots est approprié à sa culture et à son éducation.
• Dysarthrie et dysphagie.
Défauts de langage, monotonie,
confusion du discours
5 .
• Ne parle presque pas ou parle
constamment.
• La personne communique facilement par elle-même dans un
langage courant ou avec l’aide d’un interprète.
Habillement
Les vêtements sont appropriés au climat, semblent propres et
sont ajustés à la personne, ils sont conformes à sa culture et à son
groupe d’âge ; par exemple, les femmes amish portent normalement des vêtements du XIXe siècle, et les femmes indiennes
peuvent porter le sari. L’habillement qui est dicté par la culture
ne devrait pas être étiqueté comme étant bizarre en fonction des
critères occidentaux ou selon les façons de penser des adultes.
• Des pantalons trop grands et
soutenus par une ceinture suggèrent généralement une perte
de poids, au même titre qu’un
ajout de trous dans la ceinture.
Si la ceinture est ajustée à une
taille plus grande, cela peut indiquer de l’obésité ou de l’ascite.
• Le port constant de certains vêtements ou accessoires peut fournir certains indices : des manches
longues peuvent camouer des
marques d’aiguilles liées aux
abus de drogue ou cacher les
bras maigres des personnes anorexiques ; des attaches en velcro
au lieu des boutons peuvent
indiquer une dysfonction
motrice chronique.
Hygiène personnelle
178
Partie 2
La personne semble propre et soignée d’une manière appropriée
pour son âge, son emploi, ses occupations et son groupe socioéconomique. Prendre en compte qu’une grande variation dans
l’habillement et l’hygiène est considérée comme « normale ». Par
exemple, dans plusieurs cultures, les personnes n’utilisent pas
de déodorant, et le rasage des jambes chez les femmes n’est
pas une pratique courante.
Odeur corporelle, odeur d’alcool.
Les cheveux sont propres, peignés. Le maquillage de la femme
est approprié pour son âge et sa culture.
Chez une femme habituellement
bien soignée, des cheveux mal
coiffés peuvent indiquer un
malaise ou une maladie.
Connaissances préalables à l’examen clinique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
MESURES ANTHROPOMÉTRIQUES
Poids
Utiliser une balance mécanique calibrée ou une balance électronique. Demander à la personne d’enlever ses chaussures et ses
autres vêtements lourds avant de se tenir debout sur la balance.
Lorsque des mesures de poids répétitives sont nécessaires, tenter de les prendre au même moment de la journée, la personne
portant le même type de vêtements chaque fois. Inscrire le poids
(en kilogrammes et en livres) FIGURE 9.1.
Une perte de poids inexpliquée
peut être le signe d’une maladie de
courte durée (p. ex., de la èvre,
une maladie de la bouche ou de la
gorge) ou d’une maladie chronique
(p. ex., une maladie endocrinienne,
une tumeur maligne ou un trouble
de l’état mental tel que la dépression, l’anorexie, la boulimie).
9
FIGURE 9.1
Balance mécanique à colonne
Montrer à la personne où se situe son propre poids par rapport au tableau des recommandations selon la taille TABLEAU 9.1.
Lui indiquer également où elle se situe dans le tableau des indices
de masse corporelle (IMC) FIGURE 9.2. Comparer le poids actuel
de la personne avec celui noté à la visite médicale précédente.
Une perte de poids récente peut être expliquée par un régime
réussi. Un gain de poids reète habituellement un apport calorique excessif, de mauvaises habitudes alimentaires et un style
de vie sédentaire. Il est à noter que l’IMC tend à sous-estimer le
gras total chez les personnes plus âgées qui ont perdu de la masse
musculaire.
Taille
Utiliser une toise murale ou la toise de la balance. Aligner la rallonge supérieure de la toise étroite avec le dessus de la tête. La
personne doit enlever ses chaussures, se tenir droite et élever
légèrement le menton pour regarder droit devant elle. Les pieds,
les épaules et les fesses doivent être en contact avec la toise.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
179
OBSERVATIONS NORMALES
TABLEAU 9.1
ZONE DE POIDS
180
ANOMALIES
Taille et poids normaux pour les adultes âgés de 18 ans et plus
POIDS
INSUFFISANT
(MAIGREUR)
POIDS SANTÉ
(POIDS NORMAL)
EXCÈS DE POIDS
(EMBONPOINT)
OBÉSITÉ GRADE 1
(OBÉSITÉ MODÉRÉE)
OBÉSITÉ GRADE 2
(OBÉSITÉ SÉVÈRE)
OBÉSITÉ GRADE 3
(OBÉSITÉ MORBIDE)
Taille
IMC : < 18,5
IMC : 18,5-24,9
IMC : 25-29,9
IMC : 30-34,9
IMC : 35-39,9
IMC : 40
cm
kg (moins de)
kg
kg
kg
kg
kg (plus de)
155
44
44-60
60-72
72-84
84-96
96
156
45
45-61
61-73
73-85
85-97
97
157
46
46-61
62-74
74-86
86-98
99
158
46
46-62
62-75
75-87
87-100
100
159
47
47-63
63-76
76-88
89-101
101
160
47
47-64
64-77
77-89
90-102
102
161
48
48-65
65-78
78-90
91-103
104
162
49
49-65
66-79
79-92
92-105
105
163
49
49-66
66-79
80-93
93-106
106
164
50
50-67
67-80
81-94
94-107
108
165
50
50-68
68-81
82-95
95-109
109
166
51
51-69
69-82
83-96
96-110
110
167
52
52-69
70-83
84-97
98-111
112
168
52
52-70
71-84
85-99
99-113
113
169
53
53-71
71-85
86-100
100-114
114
170
54
54-72
72-86
87-101
101-115
116
171
54
54-73
73-87
88-102
102-117
117
172
55
55-74
74-88
89-103
104-118
118
173
55
55-75
75-90
90-104
105-119
120
174
56
56-75
76-91
91-106
106-121
121
175
57
57-76
77-92
92-107
107-122
123
176
57
57-77
77-93
93-108
108-124
124
177
58
58-78
78-94
94-109
110-125
125
178
59
59-79
79-95
95-111
111-126
127
179
59
59-80
80-96
96-112
112-128
128
180
60
60-81
81-97
97-113
113-129
130
181
61
61-82
82-98
98-114
115-131
131
182
61
61-82
83-99
99-116
116-132
132
183
62
62-83
84-100
100-117
117-134
134
184
63
63-84
85-101
102-118
118-135
135
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
OBSERVATIONS NORMALES
TABLEAU 9.1
ZONE DE POIDS
ANOMALIES
Taille et poids normaux pour les adultes âgés de 18 ans et plus (suite)
POIDS
INSUFFISANT
(MAIGREUR)
POIDS SANTÉ
(POIDS NORMAL)
EXCÈS DE POIDS
(EMBONPOINT)
OBÉSITÉ GRADE 1
(OBÉSITÉ MODÉRÉE)
OBÉSITÉ GRADE 2
(OBÉSITÉ SÉVÈRE)
OBÉSITÉ GRADE 3
(OBÉSITÉ MORBIDE)
Taille
IMC : < 18,5
IMC : 18,5-24,9
IMC : 25-29,9
IMC : 30-34,9
IMC : 35-39,9
IMC : 40
cm
kg (moins de)
kg
kg
kg
kg
kg (plus de)
185
63
63-85
86-102
103-119
120-137
137
186
64
64-86
86-103
104-121
121-138
138
187
65
65-87
87-105
105-122
122-140
140
188
65
65-88
88-106
106-123
124-141
141
189
66
66-89
89-107
107-125
125-143
143
190
67
67-90
90-108
108-126
126-144
144
9
Source : Adapté de Direction régionale de santé publique de la Capitale-Nationale, 2004.
FIGURE 9.2
Nomogramme de l’indice de masse corporelle (IMC). Santé Canada, 2012. Reproduit avec la permission du Ministre de la santé, 201 5.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
181
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Indice de masse corporelle
Q
uestion de suivi
Monsieur Chabot mesure
1,78 m, et il pèse 80 kg.
Calculez son IMC et indi­
quez dans quelle zone il
se situe.
L’indice de masse corporelle (IMC) est un indicateur pratique du
poids santé en fonction de la taille et est révélateur de l’obésité ou
d’une malnutrition dans le rapport protéines/calories. Il est cal­
culé ainsi :
Poids (en kilogrammes)
IMC =
Taille (en mètres)2
Poids (en livres)
ou
Taille (en pouces)2
× 703
Des données probantes indiquent que l’utilisation de l’IMC
pour l’évaluation du risque d’obésité procure des données plus
précises du gras total comparé à la simple mesure du poids de
la personne (NIH, 2000). Un IMC optimal se situe entre 19 et 25.
Q
uestion de suivi
Le tour de taille de
monsieur Chabot est
de 88,7 cm. Quel est
son niveau de risque
d’être atteint de mala­
dies cardiovasculaires ?
Circonférence de la taille
L’excès de gras abdominal est un facteur de risque important dans
certaines affections, encore plus que l’IMC (NIH, 2000). Pour le
mesurer, demander à la personne de se tenir debout, localiser
l’os de la hanche puis le dessus de la crête iliaque droite. À cet
endroit, prendre une mesure à l’aide d’un ruban à mesurer en
s’assurant que le ruban ne serre pas la peau. Noter la mesure en
n d’expiration FIGURE 9.3.
FIGURE 9.3
Position du ruban à mesurer pour la mesure
de la circonférence de la taille
182
Partie 2
• Un gain de poids est habituel­
lement causé par un apport
calorique excessif ; parfois, il
peut être le résultat d’un pro­
blème endocrinien, d’un traite­
ment médicamenteux (p. ex., la
prise de corticostéroïdes) ou
d’une dépression.
• Interprétation de l’IMC chez
l’adulte, en kg/m 2 (National
Institutes of Health [NIH],
2000) :
– < 18,5 : poids insufsant
– 18,5 – 24,9 : poids normal
– 25,0 – 29,9 : surpoids
– 30,0 – 34,9: obésité (classe 1)
– 35,0 – 39,9 : obésité (classe 2)
– ≥ 40 : obésité morbide
(classe 3)
• Interprétation de l’IMC chez
l’enfant âgé de 2 à 20 ans
(Centers for Disease Control
and Prevention [CDC], 2000) :
85e au 95e centile = risque de
surcharge pondérale
Connaissances préalables à l’examen clinique
Une circonférence du tour de
taille ≥ 89 cm chez la femme et
≥ 102 cm chez l’homme augmente
le risque de diabète de type 2,
d’hyperlipidémie, d’hypertension
artérielle (HTA) et de maladies
cardiovasculaires, particulière­
ment chez les personnes dont
l’IMC est de 25 à 35.
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
SIGNES VITAUX
Température
Le métabolisme cellulaire requiert une température interne stable,
ou température basale, à une moyenne de 37,2 °C. Le corps maintient une température stable en utilisant un thermostat, ou mécanisme de rétroaction, régulé par l’hypothalamus du cerveau. Le
thermostat équilibre la production de chaleur (en provenance du
métabolisme, de l’exercice, de la digestion de nourriture, de facteurs externes) avec la perte de chaleur (par la radiation, l’évaporation de la sueur, la convection et la conduction).
Plusieurs voies de mesure de température reètent la température interne du corps. La température buccale normale d’une personne au repos est de 37 °C ; elle peut s’étaler de 35,8 à 37,3 °C.
La température rectale est de 0,4 à 0,5 °C plus élevée.
La fonction thermostatique de
l’hypothalamus peut fortement
varier au cours d’une maladie ou
d’un trouble du système nerveux
central.
La température normale est inuencée par les facteurs suivants.
• L’hyperthermie, ou èvre, est
causée par des pyrogènes sécrétés par des bactéries toxiques
durant un processus infectieux
ou une rupture tissulaire tels
qu’un infarctus du myocarde
(IDM), un trauma, une chirurgie, une tumeur maligne ou un
cancer. Un trouble neurologique (p. ex., un accident vasculaire cérébral (AVC), un
œdème cérébral, un traumatisme au cerveau, une tumeur
ou une chirurgie) peut aussi
réinitialiser le thermostat cérébral à un niveau plus élevé,
ayant pour effet une production
de chaleur et sa conservation.
• L’hypothermie est habituellement causée par une exposition
accidentelle prolongée au froid.
Elle peut également être induite
délibérément pour diminuer les
besoins en oxygène du corps au
cours d’une chirurgie cardiaque
ou vasculaire périphérique,
d’une neurochirurgie, d’une amputation ou d’une hémorragie
gastro-intestinale.
• Un cycle diurne de 0,5 à 2,5 °C, avec un creux à l’aube et dans
les quelques heures qui suivent et un pic survenant en n
d’après-midi jusqu’en début de soirée.
• Le cycle menstruel de la femme ; la sécrétion de progestérone,
survenant au milieu du cycle ovulatoire, cause une augmentation de la température de 0,28 à 0,50 °C qui se poursuit
jusqu’aux menstruations.
• L’exercice ; un exercice, de modéré à intense, augmente la température corporelle.
• L’âge ; des variations normales plus grandes surviennent chez
le nourrisson et le jeune enfant en raison de leur mécanisme
moins efcace de régulation de la température. Chez la personne âgée, la température est habituellement plus basse que
celle observée dans les autres groupes d’âge, avec une moyenne
de 36,2 ° C.
La température buccale est commode et est la plus précise. Le
site sublingual est riche en apport sanguin par les artères carotides, qui réagissent rapidement aux changements de température interne.
En raison des considérations environnementales relatives à la
pollution par le mercure en provenance des incinérateurs de
déchets médicaux, les thermomètres et les sphygmomanomètres
au mercure ont été remplacés par des appareils électroniques.
Secouer le thermomètre en verre sans mercure jusqu’à ce qu’il
indique 35,5 °C et le placer à la base de la langue dans un des
sacs sublinguaux postérieurs – pas en avant de la langue. Dire à
la personne de garder les lèvres fermées l’une contre l’autre.
Laisser le thermomètre en place trois ou quatre minutes si la personne est afébrile et jusqu’à huit minutes si la personne est fébrile.
(Prendre les autres SV durant ce temps.) Attendre 15 minutes
si la personne vient tout juste de consommer des liquides chauds
ou glacés et 2 minutes si elle vient tout juste de fumer.
Le thermomètre électronique a l’avantage de fournir une mesure
rapide et précise (habituellement en 20 à 30 sec.) de même que
celui d’offrir des couvre-sondes sécuritaires, incassables et jetables.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
9
183
OBSERVATIONS NORMALES
Diaphorèse : Transpiration
abondante.
L’instrument doit être complètement rechargé et correctement
calibré. La plupart des enfants aiment regarder les chiffres de
leur température progresser sur l’écran du thermomètre.
Prendre la température rectale seulement dans les cas où
aucune autre voie n’est disponible – par exemple, en cas de coma
ou lorsque les personnes sont désorientées, en état de choc,
pour celles qui ne peuvent garder la bouche fermée à cause de
leur respiration ou de la présence de tubes d’oxygène, dans
le cas de mâchoires brochées ou d’autre dysfonction faciale ou
encore s’il n’y a pas de thermomètre tympanique disponible.
Porter des gants jetables et insérer la sonde du thermomètre
électronique recouverte d’un couvre-sonde lubrié dans le rectum de l’adulte en la dirigeant vers l’ombilic à une profondeur
de 2-3 cm. (Avec un thermomètre en verre, le laisser en place
durant 2 ½ min). Les inconvénients de la voie rectale sont l’inconfort du client et la nature perturbatrice et considérablement
longue de cette prise de température.
Le thermomètre de membrane tympanique perçoit les émissions infrarouges de la membrane tympanique (tympan). Cette
dernière partage le même réseau sanguin que celui qui perfuse
l’hypothalamus (les artères carotides internes) ; il s’agit donc
d’une mesure précise de la température interne.
Le thermomètre de membrane tympanique est un appareil non
effractif et non traumatique extrêmement rapide et efcace. La
sonde a la même forme que celle d’un otoscope, l’instrument utilisé pour inspecter l’oreille. Placer délicatement la sonde (recouverte d’un couvre-sonde) dans le canal auditif de la personne
FIGURE 9.16. Ne pas forcer et ne pas obstruer complètement
le canal auditif. Activer l’appareil, et la température sera afchée
en deux ou trois secondes.
Il y a un risque minimal de contamination croisée avec l’utilisation du thermomètre tympanique, puisque le canal auditif
est recouvert de peau et non de membrane muqueuse. Ce thermomètre peut être utilisé chez des personnes inconscientes ou
qui sont incapables de coopérer aux techniques traditionnelles
ou qui les refusent (p. ex., des clients aux soins intensifs, à l’urgence, dans les salles de réveil ou d’accouchement).
Certaines études (Fountain, Goins, Hartman et collab., 2008 ;
Frommelt, Ott et Hays, 2008 ; Lawson, Bridges, Ballou et collab.,
2007) suggèrent de ne pas utiliser le thermomètre tympanique
chez les personnes atteintes de maladie chronique. Ces chercheurs ont basé leurs observations initiales de ces personnes
alors qu’elles étaient afébriles. Les situations de soins aigus chez
celles-ci nécessiteraient de plus amples recherches à ce sujet.
Une innovation médicale permet une prise non effractive de
la température par la mesure des émissions infrarouges de l’artère temporale. Les données recueillies sont presque les mêmes
que celles de la température basale (Lawson et collab., 2007),
mais l’exactitude pourrait être perturbée par la diaphorèse.
Inscrire la température en degrés Celsius, à moins que l’établissement n’utilise les degrés Fahrenheit. Au besoin, utiliser
cette formule de conversion :
Degrés C = 5 9 (°F – 32)
Degrés F = (9 5 °C) + 32
184
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
ANOMALIES
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Se familiariser avec les deux échelles de température. Il est
beaucoup plus facile d’apprendre à penser avec l’échelle Celsius
que de devoir effectuer les conversions. Voici des équivalences
pratiques à mémoriser :
104,0 °F = 40,0 °C
98,6 °F = 37,0 °C
95,0 °F = 35,0 °C
Pouls
À chaque battement, le cœur propulse une quantité de sang – le
volume d’éjection – dans l’aorte. Cela représente environ 70 mL
chez l’adulte. La force du pouls dilate les parois artérielles et
génère une vague de pression, laquelle est ressentie en tant que
pouls à la périphérie. La palpation du pouls périphérique fournit la fréquence et le rythme du pouls de même que des données locales sur l’état de l’artère. En utilisant la pulpe des trois
premiers doigts, palper le pouls radial au pli du poignet, latéralement le long du radius FIGURE 9.4. Appuyer jusqu’à ce que
soit ressentie la pulsation la plus forte. Si le rythme est régulier,
compter le nombre de battements pendant 30 secondes et multiplier ce nombre par 2. Quoique la prise de pouls sur un intervalle de 15 secondes soit fréquente, une erreur de comptage d’un
seul battement se répercute en une inscription d’erreur de 4 battements par minute (bpm). L’intervalle de 30 secondes est le
plus précis et le plus efcace lorsque la fréquence cardiaque
(FC) est normale ou rapide et que le rythme est régulier. Cependant,
si le rythme est irrégulier, compter pendant une minute complète. En commençant à compter, le premier battement ressenti
est « zéro ». Le second battement est « un » et ainsi de suite.
Évaluez le pouls en incluant : 1) sa fréquence ; 2) son rythme ;
3) sa force.
9
FIGURE 9.4
Prise du pouls radial
Fréquence
Chez l’adulte au repos, des données probantes indiquent que
la FC normale varie de 50 à 90 bpm (Spodick, 1996). Ces données diffèrent des fréquences normales de 60 à 100 bpm établies
par consensus dans les années 1950 et qui n’ont jamais été formellement documentées.
La FC varie habituellement selon l’âge, étant plus rapide chez
le nourrisson et durant l’enfance et ralentissant à l’âge adulte et
avec le vieillissement. Elle diffère également selon le sexe ; après
la puberté, les femmes ont une FC légèrement plus élevée que
celle des hommes TABLEAU 9.2.
Chez l’adulte, une FC < 50 bpm se nomme bradycardie. Cela survient habituellement chez les athlètes bien entraînés, dont le
muscle cardiaque se développe en même temps que les muscles
squelettiques. Un muscle cardiaque plus fort et plus efcace propulse un volume d’éjection plus grand à chaque battement, nécessitant ainsi moins de bpm pour conserver un débit cardiaque
stable.
Anomalies liées à la fréquence et
au rythme cardiaques
20 .
Une FC > 90 bpm est appelée tachycardie. Elle survient normalement lorsque la personne est anxieuse ou au cours d’exercices
intenses afin de soutenir la demande du métabolisme qui a
augmenté.
La tachycardie survient en cas de
èvre, de septicémie, de pneumonie, de pancréatite et après un IDM.
Chapitre 9
20
Le tableau 20.1, dans le chapitre 20, Système vasculaire
périphérique et système
lymphatique, décrit les variations du pouls artériel.
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
185
OBSERVATIONS NORMALES
TABLEAU 9.2
ÂGE/SEXE
ANOMALIES
Fréquences normales du pouls au repos selon le groupe d’âge
MOYENNE (bpm)
LIMITES NORMALES
ÂGE/SEXE
MOYENNE (bpm)
LIMITES NORMALES
Nouveau-né
120
70-190
1 an
120
80-160
Femme
80
60-100
2 ans
110
80-130
Homme
75
55-95
4 ans
100
80-120
6 ans
100
75-115
Femme
75
55-95
8 ans
90
70-110
Homme
70
50-90
10 ans
90
70-110
Peut être de 50 à 60
50-100
Adulte
74-76
50-100
Personne âgée
74-76
50-100
12 ans
Femme
90
70-110
Homme
85
65-105
Femme
85
65-105
Homme
80
60-100
16 ans
18 ans
Athlète bien entraîné
14 ans
Rythme
19
Les arythmies sinusales sont
discutées dans le chapitre 19,
Cœur et vaisseaux du cou.
Le rythme du pouls est habituellement régulier. Cependant,
l’arythmie sinusale est une irrégularité qui survient fréquemment
chez l’enfant et le jeune adulte. Dans ce cas, la FC varie en fonction du cycle respiratoire, accélérant au pic de l’inspiration et
revenant à la normale avec l’expiration. L’inspiration cause
momentanément une diminution du volume d’éjection du côté
gauche du cœur ; pour compenser, la FC augmente. Si d’autres
formes d’irrégularités sont ressenties, ausculter les bruits cardiaques pour une évaluation plus complète
19 .
Force
La force du pouls représente la puissance du volume d’éjection.
Un pouls bondissant dénote un volume d’éjection augmenté,
comme cela se produit à cause de l’anxiété, de l’exercice et dans
certaines conditions anormales. Inscrire le pouls en utilisant une
échelle à trois niveaux :
• 3+ : bondissant
• 2+ : normal
• 1+ : faible, lant
• 0 : absent
Certains établissements utilisent une échelle en quatre points.
S’assurer de la concordance de son système avec celui du reste du
personnel. Le choix de l’une ou l’autre des échelles demeure subjective. L’expérience améliorera le jugement clinique de
l’inrmière.
186
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Un pouls faible et lant reète un
volume d’éjection diminué, par
exemple dans le cas d’un choc
hémorragique.
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Respiration
Normalement, la respiration d’une personne est régulière,
automatique et silencieuse. Puisque la majorité des clients
sont peu conscients de leur respiration, ne pas mentionner
à la personne que sa respiration sera calculée parce qu’une
prise de conscience soudaine pourrait en modier le rythme
normal. Conserver plutôt la même position que celle adoptée pendant le calcul de la fréquence du pouls radial et compter discrètement les respirations. Compter pendant 30 secondes
ou pendant 1 minute complète si une anomalie est suspec tée. Ne pas utiliser l’intervalle de 15 secondes. Le résultat
pourrait varier de +4 ou −4, ce qui est considérable avec un
si petit nombre.
Noter certaines données objectives supplémentaires (p. ex., la
dyspnée, la respiration superficielle ou profonde, le tirage
chez les enfants et l’utilisation
des muscles accessoires chez
l’adulte).
Observer que les fréquences respiratoires (FR) présentées dans
le TABLEAU 9.3 sont normalement plus élevées chez les nourrissons et les enfants. De plus, il existe un ratio assez constant entre
la fréquence du pouls et la FR, soit environ 4:1. Normalement, le
pouls et la respiration augmentent en réponse à l’anxiété et à
l’exercice
18 .
TABLEAU 9.3
Fréquence respiratoire
normale selon l’âge
ÂGE
RESPIRATIONS PAR MINUTE
Nouveau-né
30-40
1 an
20-40
2 ans
25-32
8-10 ans
20-26
12-14 ans
18-22
16 ans
12-20
Adulte
12-20
18
9
Une évaluation plus détaillée
de l’état respiratoire est présentée dans le chapitre 18,
Thorax et poumons.
Pression artérielle
La pression artérielle (PA) est la force avec laquelle le sang pousse
sur les côtés de son contenant, la paroi des vaisseaux. La force de
la poussée change selon la phase du cycle cardiaque. La pression
systolique est la pression maximale ressentie sur l’artère pendant
la contraction ventriculaire gauche (ou systole). La pression diastolique (ou de repos) correspond à la détente de la paroi des vaisseaux due à leur élasticité, soit la pression que le sang exerce
constamment entre chaque contraction cardiaque. La pression du
pouls est la différence entre la pression systolique et la pression
diastolique FIGURE 9.5. La pression artérielle moyenne (PAM) est
la pression forçant le sang dans les tissus, dont la moyenne est calculée sur l’ensemble du cycle cardiaque. Ce n’est pas une moyenne
arithmétique des pressions systolique et diastolique, puisque la
diastole dure plus longtemps. Il s’agit plutôt d’une valeur se rapprochant de la pression diastolique à laquelle a été ajouté un tiers
de la pression du pouls.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
187
OBSERVATIONS NORMALES
FIGURE 9.5
Graphique de la pression artérielle
La PAM chez le jeune adulte varie normalement en fonction de
plusieurs facteurs.
• L’âge. Normalement, une augmentation graduelle se produit
de l’enfance à l’âge adulte FIGURE 9.18.
• Le sexe. Avant la puberté, il n’existe pas de différence entre
les garçons et les lles. Après la puberté, les femmes présentent habituellement une PA inférieure à celle des hommes.
Après la ménopause, la PA des femmes est plus élevée que
celle des hommes.
• L’origine ethnique. Aux États-Unis, les adultes afro-américains
ont habituellement une PA plus élevée que les personnes
blanches du même âge. L’incidence de l’HTA est deux fois
plus élevée chez les Afro-Américains que chez les Blancs.
Les raisons expliquant cette différence ne sont pas totalement
comprises, mais elles seraient liées à l’hérédité et aux facteurs
environnementaux.
• Le rythme diurne. La PA suit un cycle quotidien au cours
duquel surviennent un pic et un creux : la pression augmente pour parvenir à un sommet en n d’après-midi ou
au début de la soirée et redescend pour atteindre son minimum vers l’aube.
• Le poids. La PA est plus élevée chez les personnes obèses
que chez les personnes de poids normal pour le même âge
(incluant les adolescents).
• L’exercice. L’augmentation de l’activité physique engendre
une hausse proportionnelle de la PA. Habituellement, elle
revient à son niveau de base dans les cinq minutes suivant la
n de l’exercice.
• Les émotions. La PA augmente momentanément à cause de la
peur, de la colère ou de la douleur en raison de la stimulation
du système nerveux sympathique.
188
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
ANOMALIES
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
• Le stress. La PA est élevée chez les personnes qui ressentent
une tension constante en raison de leur style de vie, de leur
degré de stress au travail ou de leurs problèmes personnels.
Le niveau de PA est déterminé par cinq facteurs FIGURE 9.6.
1. Le débit cardiaque. Si le cœur pompe plus de sang dans le
contenant (réseau sanguin), la pression sur les parois de celuici augmente.
2. La résistance vasculaire périphérique. Elle est l’opposition au
ux sanguin dans les artères. Lorsque le contenant rétrécit
(p. ex., en présence de vaisseaux constrictés), la pression nécessaire pour pousser le contenu (le sang) augmente.
Plusieurs médicaments utilisés
dans le traitement de personnes gravement malades affectent la résistance vasculaire périphérique.
3. Le volume sanguin circulant. Il fait référence à la « densité »
avec laquelle le sang est entassé dans les artères. L’ajout
de contenu dans le contenant fait augmenter la pression.
Le volume sanguin est augmenté
par des transfusions de sang ou
de succédanés du volume et diminué par une hémorragie.
4. La viscosité. La densité du sang est déterminée par ses éléments constitutifs : les cellules sanguines. Lorsque le sang est
plus épais, la pression augmente.
9
5. L’élasticité des parois des vaisseaux. Lorsque les parois du
contenant sont raides et rigides, la pression nécessaire pour
pousser le contenu augmente.
FIGURE 9.6
Facteurs déterminant la pression artérielle
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
189
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Mesurer la PA avec un stéthoscope et un sphygmomanomètre
anéroïde. Le sphygmomanomètre anéroïde est sujet au mouvement ; il faut le recalibrer au moins chaque année, et il doit être
à zéro lorsque le brassard est complètement dégoné.
Le brassard est une poche (ballon plat) de caoutchouc gonable recouverte de tissu. La largeur de la poche doit équivaloir
à 40 % de la circonférence du bras de la personne. Sa longueur
doit correspondre à 80 % de cette circonférence.
Les brassards sont offerts en six tailles pour convenir tant à l’adulte
ayant un très gros bras qu’au nouveau-né ; des brassards fuselés
peuvent s’ajuster au bras conique de la personne obèse, et il existe
aussi des brassards pour les cuisses. Choisir la taille de brassard
appropriée en fonction du format du bras de la personne et non
selon son âge FIGURE 9.7.
FIGURE 9.7
Types de brassard –
pour adulte
A
Brassard pour cuisse ou gros bras
B
La taille du brassard est importante : utiliser un brassard trop
étroit conduit à un résultat faussement élevé de la PA, parce qu’une
pression supplémentaire est nécessaire pour comprimer l’artère.
Brassard standard
Pression du bras
Une personne installée confortablement et reposée fournit une
mesure valide de la PA. Plusieurs personnes sont anxieuses au
début d’un examen médical ; permettre à la personne de se
reposer au moins cinq minutes avant de mesurer sa PA. Par la
suite, prendre deux mesures ou plus de celle-ci, à intervalles
de deux minutes.
Pour chaque personne, vérier la PA aux deux bras, au moins
une fois, soit à son arrivée ou au cours du premier examen physique complet. Il n’est pas nécessaire de continuer à vérier la
pression aux deux bras pour le dépistage et la surveillance.
Occasionnellement, une différence de 5 à 10 mm Hg peut survenir dans la mesure de la PA entre les deux bras (si les données sont différentes, utiliser les valeurs les plus élevées).
La personne peut être assise ou couchée, avec le bras dénudé
et supporté au même niveau que le cœur. (Si un sphygmomanomètre au mercure est utilisé, s’assurer qu’il est à la verticale et
au niveau des yeux de l’inrmière.) Si la personne est assise, ses
pieds doivent être à plat sur le sol, étant donné que la PA est faussement élevée lorsque les jambes sont croisées plutôt que décroisées (Keele-Smith et Price-Daniel, 2001).
Palper l’artère brachiale, qui se situe juste au-dessus de la fosse
antécubitale (pli du coude), au milieu du tendon du biceps.
Centrer le brassard dégoné à environ 2,5 cm au-dessus de l’artère brachiale et l’envelopper uniformément autour du bras.
190
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Une différence de plus de 10 à
15 mm Hg de pression entre les
deux bras peut indiquer une obstruction artérielle du côté de la lecture la plus basse.
OBSERVATIONS NORMALES
Palper ensuite l’artère brachiale ou radiale FIGURE 9.8. Goner
le brassard jusqu’à ce que la pulsation artérielle cesse d’être perçue, puis le goner de 20 à 30 mm Hg supplémentaires. Cela
permet d’éviter de manquer un trou auscultatoire, un moment
où les bruits de Korotkoff disparaissent durant l’auscultation.
Dégoner le brassard rapidement et complètement ; par la
suite, attendre de 15 à 30 secondes avant de le regoner an de
laisser le sang se disperser dans les veines. Placer la cupule du
stéthoscope sur le site de l’artère brachiale, en créant un sceau
léger, mais étanche. Le diaphragme s’avère habituellement adéquat,
mais la cupule est conçue pour capter les sons de basse tonalité,
comme ceux de la PA. Il est recommandé de l’utiliser.
Goner rapidement le brassard au niveau prédéterminé.
Ensuite, dégoner le brassard lentement et graduellement, d’environ 2 mm Hg par battement cardiaque. Noter la lecture du
premier bruit entendu, l’assourdissement du bruit et sa disparition. Ce sont les phases I, IV et V des bruits de Korotkoff, lesquelles correspondent aux composantes de la lecture de la PA
telles que décrites initialement par un chirurgien russe en 1905
TABLEAU 9.4.
Pour tous les groupes d’âge, le cinquième bruit de Korotkoff est
maintenant utilisé pour marquer la pression diastolique (Chobanian
et collab., 2003). Cependant, lorsqu’il existe un écart supérieur
à 10-12 mm Hg entre les phases IV et V, il faut inscrire les lectures de ces deux phases en plus de la mesure de la pression
systolique (p. ex., 142/98/80). Une communication claire entre
les professionnels de la santé est importante puisque les résultats inuent considérablement sur le diagnostic et la planication des soins. Le TABLEAU 9.5 présente une liste des erreurs
fréquentes commises pendant la mesure de la PA.
ANOMALIES
Un trou auscultatoire survient
chez environ 5 % des personnes,
la plupart du temps dans les cas
d’HTA causée par un système
artériel non conforme.
Trou auscultatoire :
Abolition transitoire des bruits
de Korotkoff observée au
moment de la décompression
du brassard chez certaines
personnes atteintes de
rétrécissement aortique ou
d’hypertension artérielle.
9
FIGURE 9.8
Palpation de l’artère brachiale
• Hypotension – PA anormalement basse.
• Hypertension – PA anormalement élevée TABLEAU 9.7.
Signes vitaux en orthostatisme (ou posturaux)
Prendre une série de mesures du pouls et de la PA si l’on suspecte : 1) une diminution du volume circulatoire ; 2) lorsque la
personne a reçu un diagnostic d’HTA ou qu’elle prend des médicaments antihypertenseurs ; ou 3) si la personne rapporte des
épisodes de faiblesse ou de syncope. Demander à la personne de
rester couchée pendant deux ou trois minutes, prendre son pouls
de base et sa PA. Reprendre ces mesures une fois la personne
assise, puis debout. Si la personne est trop faible ou étourdie
pour se tenir debout, faire l’évaluation en position couchée, et
ensuite assise, les jambes pendantes. Lorsque la position change
de couchée à debout, il est normal que se produise une légère
diminution (moins de 10 mm Hg) de la pression systolique.
Indiquer les mesures de la PA en utilisant des nombres pairs.
Noter également la position de la personne, le bras utilisé et la
grandeur du brassard si elle diffère de la grandeur standard pour
adulte. Écrire la fréquence et le rythme du pouls en remarquant
si celui-ci est régulier.
Hypotension orthostatique : une
diminution de la pression systolique de plus de 20 mm Hg ou une
augmentation du pouls de 20 bpm
ou plus apparaît au moment d’un
changement rapide en position
debout. Ces changements sont
causés par une vasodilatation
périphérique rapide sans compensation du volume d’éjection. Les
changements orthostatiques
peuvent aussi survenir en raison
du repos prolongé, du vieillissement, de l’hypovolémie et de l’effet de certains médicaments.
Pression à la cuisse
Lorsque la pression mesurée au bras est excessivement élevée, particulièrement chez les adolescents et les jeunes adultes, il faut la
comparer avec la pression à la cuisse pour vérier une coarctation
de l’aorte (une forme congénitale de rétrécissement). Normalement,
la pression à la cuisse est supérieure à celle du bras. Lorsque cela
est possible, coucher la personne sur le ventre. (Si la personne doit
rester couchée sur le dos, lui plier légèrement les genoux.)
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
191
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
TABLEAU 9.4
Bruits de Korotkoff
PHASE
BRUIT
Brassard goné
adéquatement
Aucun son
I
Bien frappé
Son frappé bien clair,
augmentant en intensité
Pression systolique. Alors que la pression du brassard diminue pour atteindre la
même que celle de l’artère brachiale, l’artère s’ouvre et laisse passer une première
poussée de sang. Le sang a une très grande vélocité en raison de la petite ouverture
de l’artère et de la grande différence de pression de chaque côté de l’ouverture. Cela
crée une turbulence du ux, lequel est audible.
Trou
auscultatoire
Aucun son
Silence durant 30-40 mm Hg
au moment du dégonage
du brassard : résultat anormal
Les bruits disparaissent temporairement à la n de la phase I et réapparaissent au début
de la phase II. Fréquent avec l’HTA. S’il n’est pas détecté, il peut conduire à sous-estimer
la pression systolique ou à surestimer la pression diastolique.
II
Glissement
Doux murmure suivant le
bruit frappé
Passage du ux sanguin en turbulence par ouverture partielle de l’artère.
III
Frappé
Craquement, haute tonalité
Longue durée du ux sanguin à travers l’artère. L’artère reste fermée brièvement durant
la télédiastole.
IV
Assourdissement rapide
Son qui s’assourdit, basse
tonalité, murmure coussiné,
comme un son de soufe
L’artère n’est plus obstruée à aucune phase du cycle cardiaque. Le changement du bruit
est entendu en qualité et non en intensité.
V
Silence
192
Partie 2
DESCRIPTION
JUSTIFICATION
Le gonement du brassard comprime l’artère brachiale. La pression du brassard
excède celle de la pression systolique ventriculaire, obstruant le ux sanguin de
l’artère brachiale.
Connaissances préalables à l’examen clinique
Diminution de la vélocité du ux sanguin. Celui-ci est silencieux. Le dernier bruit audible
(marquant la disparition des bruits) est la pression diastolique. Le cinquième bruit de
Korotkoff est maintenant utilisé pour déterminer la pression diastolique pour tous les
groupes d’âge (Chobanian, Bakris, Black et collab., 2003).
OBSERVATIONS NORMALES
TABLEAU 9.5
ANOMALIES
Principales erreurs dans la mesure de la pression artérielle
ERREURS FRÉQUENTES
RÉSULTAT
JUSTIFICATION
La prise de la mesure de la PA est faite alors que la
personne est anxieuse, fâchée ou qu’elle vient tout
juste d’être active.
• Faussement élevée
• Stimulation du système nerveux sympathique
• Faussement diminuée
• Faussement élevée
• Élimination des effets de la pression hydrostatique
• Force de gravité supplémentaire ajoutée à la pression
de l’artère brachiale
• Pression diastolique faussement
élevée
• Contraction musculaire isométrique soutenue
Les jambes de la personne sont dans une mauvaise
position (p. ex., les jambes croisées).
• Pressions systolique et diastolique
faussement élevées
• Isolement du volume sanguin des jambes de la région
thoracique
Les yeux de l’inrmière ne sont pas au même niveau
que le ménisque du sphygmomanomètre au
mercure :
• regarde le ménisque vers le haut ;
• regarde le ménisque vers le bas.
• Faussement élevée
• Faussement diminuée
• Parallaxe des yeux
• Parallaxe des yeux
Le brassard est de grandeur inappropriée (erreur la
plus fréquente) :
• le brassard est trop étroit ;
• Faussement élevée
• Pression excessive nécessitée pour comprimer entièrement
l’artère
• Pression excessive nécessité pour comprimer entièrement
l’artère
Le bras de la personne est mal positionné :
• au-dessus du niveau du cœur ;
• au-dessous du niveau du cœur.
La personne supporte son propre bras.
• l’enveloppement du bras par le brassard n’est
pas sufsamment tendu ou inégal, la poche du
brassard sort de son emplacement.
L’inrmière omet de palper l’artère radiale pendant le
gonage du brassard :
• gonage insufsant ;
• Faussement élevée
9
• gonage excessif.
• Pression systolique faussement
diminuée
• Douleur
• Bruit systolique initial non entendu ou reprise de l’écoute
durant le trou auscultatoire (les bruits bien frappés disparaissent durant 10 à 40 mm Hg, puis réapparaissent ;
commun dans les cas d’HTA)
Le stéthoscope est appuyé trop fortement sur l’artère
brachiale.
• Pression diastolique faussement
diminuée
• Déformation de l’artère par la pression excessive,
poursuite du bruit
• Pression systolique faussement
diminuée ou pression diastolique
faussement élevée
• Pression diastolique faussement
élevée
• Temps insufsant pour entendre les bruits bien frappés
• Pression diastolique faussement
élevée
• Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse
dans l’avant-bras
• Pression diastolique faussement
élevée
• Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse
dans l’avant-bras
Le dégonement du brassard est :
• trop rapide ;
• trop lent.
Il y a arrêt du dégonage durant la prise de mesure et
regonage immédiat pour reprendre la lecture de la
pression systolique.
L’inrmière omet d’attendre 1-2 min avant de
reprendre une lecture complète.
Chapitre 9
• Bruits moins audibles à cause de la congestion veineuse
dans l’avant-bras
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
193
OBSERVATIONS NORMALES
TABLEAU 9.5
ANOMALIES
Principales erreurs dans la mesure de la pression artérielle (suite)
ERREURS FRÉQUENTES
RÉSULTAT
Erreurs liées à l’inrmière :
• a priori subjectif de l’inrmière : idée préconçue de
ce que le résultat devrait être en fonction de l’âge,
de l’ethnie, du sexe, du poids, de l’histoire de
santé ou de la condition physique de la personne ;
• précipitation de l’inrmière ;
• technique incorrecte ;
• préférence de l’inrmière pour les nombres
arrondis : « entend » plus de résultats se
terminant par zéro qu’il n’en survient en
réalité (p. ex., 130/80 plutôt que 132/78) ;
• diminution de l’audition de l’inrmière ;
• matériel défectueux ou sphygmomanomètre
mal calibré.
• Possibilité de multiples erreurs
JUSTIFICATION
Installer un brassard large, de 18-20 cm, autour du tiers inférieur
de la cuisse, centré sur l’artère poplitée à l’arrière du genou.
Ausculter l’artère poplitée pour prendre la mesure de la pression
FIGURE 9.9. Normalement, la pression systolique est de 10 à
40 mm Hg plus élevée dans la cuisse que dans le bras, alors que
la pression diastolique demeure la même.
FIGURE 9.9
Auscultation de l’artère poplitée
PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT
Nourrissons et enfants
Questionnaire général
• Apparence physique, structure du corps et mobilité. Noter les
mêmes éléments de base que chez l’adulte, en prenant en
considération l’âge et le développement.
• Comportement. Noter la réponse aux stimulus et le degré de
vivacité approprié à l’âge.
194
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Dans les cas de coarctation de
l’aorte, la PA est élevée au bras. La
pression à la cuisse est plus basse
puisque le sang amené à la cuisse
est en deçà du rétrécissement
aortique.
OBSERVATIONS NORMALES
• Lien parental. Noter les interactions entre l’enfant et son parent,
s’ils afchent un échange mutuel. Les contacts devraient être
chaleureux et affectueux, avec une attitude adaptée à l’état de
l’enfant. Le parent procure des soins physiques appropriés et
favorise les nouveaux apprentissages.
ANOMALIES
• Certains signes de la maltraitance de l’enfant se traduisent
par le fait que celui-ci évite
tout contact visuel ; l’enfant
ne manifeste pas l’angoisse de
séparation attendue à son âge ;
le parent est dégoûté par
l’odeur de l’enfant, par ses
sons, sa salive ou ses selles.
• Privation de soins physiques
ou émotionnels
7 .
7
Les signes de maltraitance
chez l’enfant sont discutés
dans le chapitre 7, Évaluation
de la violence familiale.
Mesures anthropométriques
Poids
Peser un nourrisson sur une balance à plateau FIGURE 9.10. Pour
vérier la calibration, placer le poids à zéro et observer le éau.
Surveiller le bébé an qu’il ne tombe pas. Peser les nourrissons
aux 10 g près et les trottineurs aux 100 g près.
9
FIGURE 9.10
Pesée du nourrisson
Pour l’enfant âgé de deux ou trois ans, utiliser la balance à éau.
L’enfant doit garder son caleçon. Certains jeunes enfants sont
parfois apeurés par la plateforme mobile et peuvent préférer s’asseoir sur la balance pour nourrissons. Utiliser la balance à éau
avec les enfants d’âge préscolaire et scolaire, en préservant leur
pudeur par le port de vêtements légers FIGURE 9.11.
FIGURE 9.11
Pesée d’enfants d’âge préscolaire et scolaire
Taille
Jusqu’à l’âge de deux ans, mesurer le nourrisson couché sur le
dos en utilisant une toise horizontale FIGURE 9.12. Maintenir la
tête du nourrisson appuyée sur la plaque de tête de la toise. Étant
donné que le nourrisson garde normalement ses jambes échies,
étirer ses jambes momentanément en tenant ses genoux ensemble
et en les appuyant sur la plaque de pieds de la toise. Il se peut
que l’inrmière doive répéter la mesure pour plus de précision.
Éviter d’utiliser un ruban à mesurer placé à côté du nourrisson
puisque cette méthode est imprécise.
Mesurer la taille des enfants âgés de deux ou trois ans à l’aide
de la toise de la balance à éau ou encore le dos appuyé sur une
FIGURE 9.12
Mesure du nourrisson
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
195
OBSERVATIONS NORMALES
toise xée au mur FIGURE 9.13. (Parfois, un enfant peut se tenir
plus droit en étant appuyé contre le mur plutôt que contre l’étroite
toise de la balance.) Encourager l’enfant à se tenir bien droit et à
regarder droit devant lui sans incliner la tête. Les épaules, les
fesses et les talons doivent toucher le mur. Tenir un niveau sur la
tête de l’enfant de façon perpendiculaire au mur. Faire une marque
juste sous le niveau, en notant la mesure au millimètre près.
La croissance est peut-être le meilleur indicateur de la santé
générale d’un enfant. La taille et le poids de l’enfant sont inscrits
au dossier à chacune des visites médicales pour déterminer si sa
courbe de croissance est normale. Les résultats sont inscrits sur
les courbes de croissance normale.
La croissance normale de l’enfant est continue, mais inégale,
avec des poussées de croissance rapide se produisant au cours
de l’enfance et de l’adolescence. Les résultats sont plus ables
lorsque de nombreuses mesures sont comparées sur une longue
période de temps. Ces courbes de croissance comparent aussi
les mesures de l’enfant avec celles de la population en général.
Les limites de la normalité varient du 5e au 95e centile des courbes
normalisées.
Utiliser son jugement et tenir compte de l’hérédité de l’enfant
qui peut sembler petit pour son âge. Explorer les courbes de croissance des parents et de la fratrie. Les différences de taille et de
poids chez les différents groupes ethniques aux États-Unis et au
Canada semblent minimes (CDC, 2000). Les courbes de croissances publiées par l’OMS sont utilisables sans discrimination
ethnique. L’OMS dénote que les principaux facteurs de croissance semblent être d’ordre économique, nutritionnel et environnemental (OMS, 2014).
Circonférence de la tête
Mesurer la circonférence de la tête du nourrisson à la naissance
et à chaque visite médicale d’un enfant en santé, jusqu’à l’âge de
deux ans et, par la suite, chaque année jusqu’à l’âge de six ans.
Utiliser un ruban à mesurer en plastique plutôt qu’en papier.
Entourer la tête avec le ruban à mesurer au sommet des os frontaux (à la hauteur des sourcils) et occipitaux ; la mesure la plus
large est la bonne FIGURE 9.14. Transcrire la mesure sur les courbes
de croissance normalisées. Comparer la dimension de la tête du
nourrisson avec celle attendue pour son âge. Une série de mesures
est plus valable qu’une seule donnée pour démontrer le rythme
de croissance de la tête.
La tête du nouveau-né mesure de 32 à 38 cm (moyenne autour
de 34 cm), soit environ 2 cm de plus que la circonférence du thorax. Le thorax grandit plus rapidement que le crâne ; à certains
moments, entre six mois et deux ans, les deux mesures sont sensiblement les mêmes, mais après l’âge de deux ans, la circonférence thoracique est plus grande que celle de la tête.
196
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
ANOMALIES
FIGURE 9.13
Mesure de la taille d’un enfant à l’aide
d’une toise
Pousser plus loin l’exploration
chez les enfants dont les mesures
de croissance :
• se situent en deçà du 5e centile ou
au-dessus du 95e centile, sans
explication génétique ;
• montrent un écart important
entre les centiles de taille et
de poids – par exemple, une
taille dans le 10e centile et un
poids dans le 95e centile ;
• démontrent que la croissance
s’est subitement arrêtée alors
qu’elle était stable ;
• n’ont pas pu démontrer des
poussées de croissance normales durant la petite enfance
et l’adolescence.
FIGURE 9.14
Mesure de la circonférence de la tête
du nourrisson
OBSERVATIONS NORMALES
La mesure de la circonférence thoracique est utile dans la comparaison avec celle de la tête, mais n’a pas vraiment de valeur en
elle-même. Entourer le thorax avec le ruban à mesurer au niveau
de la ligne des mamelons FIGURE 9.15. Le ruban doit être tendu,
mais pas sufsamment serré pour laisser une marque.
ANOMALIES
Une circonférence de tête augmentée survient à cause d’une hypertension intracrânienne
13 .
Signes vitaux
13
Les manifestations de l’hyper­
tension intracrânienne sont
décrites dans le chapitre 13,
Tête, visage et cou, englobant
le drainage lymphatique.
Mesurer les SV de l’enfant pour les mêmes raisons et avec la
même fréquence que pour un adulte.
• Avec un nourrisson, inverser l’ordre de la prise des SV, soit :
respiration, pouls et température. La prise de température rectale peut faire pleurer le nourrisson et ainsi augmenter sa FR et
son pouls, modiant donc les résultats normaux au repos.
• Chez l’enfant d’âge préscolaire, la peur d’être mutilé est normale et augmentée par toute procédure effractive. Lorsque cela
est possible, éviter de prendre la température rectale, par
exemple. Utiliser plutôt la voie tympanique. Si cela s’avère
impossible, utiliser l’ordre inversé de la prise des SV et prendre
la température rectale en dernier.
• Chez l’enfant d’âge scolaire, favoriser la coopération en lui
expliquant complètement la procédure et en l’encourageant à
manipuler le matériel.
9
FIGURE 9.15
Mesure de la circonférence thoracique
du nourrisson
• Pour l’adolescent, l’approche pour mesurer les SV ressemble
plus à celle utilisée chez l’adulte.
Température
Tympanique
La mesure de la température tympanique est utile chez les trottineurs, qui se tortillent pour tenter d’échapper à la contrainte que
nécessite la prise de la température rectale, et avec les enfants d’âge
préscolaire, qui ne sont pas encore capables de coopérer pour une
prise de température orale et qui, en plus, craignent de se dévêtir
et redoutent le caractère effractif de la prise de la température rectale. La mesure de la température tympanique, très rapide, est habituellement déjà prise avant que l’enfant ne le réalise FIGURE 9.16.
Axillaire
La voie axillaire est plus sécuritaire et plus accessible que la
voie rectale. Cependant, son exactitude et sa abilité ont été
remises en question (Cusson, Madonia et Taekmen, 1997). Lorsque
les thermorécepteurs de froid sont stimulés, le tissu adipeux
brun de cette région libère de la chaleur par une réaction chimique
qui élève articiellement la température de la peau. Dans le cas
où la température axillaire est utilisée, placer l’ampoule du thermomètre correctement sous l’aisselle et maintenir le bras de l’enfant en adduction. (Avec un thermomètre en verre, la température
inscrite sera stable en cinq minutes et demie.)
FIGURE 9.16
Prise de la température tympanique
chez le nourrisson
Orale
Utiliser la voie orale lorsque l’enfant est sufsamment âgé pour
garder la bouche fermée, soit habituellement vers l’âge de cinq
ou six ans, mais il arrive parfois que certains enfants de quatre
ans puissent collaborer. Lorsque cela s’avère possible, utiliser un
thermomètre électronique puisqu’il est incassable et qu’il fournit rapidement un résultat.
Rectale
Utiliser la voie rectale chez les nourrissons ou les enfants plus
âgés lorsque les autres voies sont impraticables, comme avec les
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
197
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
enfants qui ne peuvent pas collaborer, qui sont agités, inconscients,
gravement malades ou qui sont enclins à faire des crises. Un
nourrisson peut être couché sur le dos ou sur le côté, et avec une
main, lui tenir les genoux appuyés sur l’abdomen. (Lorsque
le bébé garçon est couché sur le dos, recouvrir son pénis avec
une couche pour éviter un jet d’urine vers le haut.) Un nourrisson peut aussi être étendu sur le ventre, en travers des cuisses
d’un adulte.
Écarter les fesses d’une main et insérer la sonde lubriée du
thermomètre électronique tout au plus à 2,5 cm de profondeur.
Toute insertion plus profonde pourrait causer une perforation
rectale en raison de la courbe postérieure du sigmoïde à 3 cm.
(Avec un thermomètre en verre, la température inscrite sera stable
en trois minutes.)
Normalement, la température rectale est plus élevée chez les
nourrissons et les jeunes enfants que chez les adultes, avec une
moyenne de 37,8 °C (100 °F) à 18 mois. En outre, il est normal
que la température soit plus élevée en n d’après-midi, après
que l’enfant a joué vigoureusement ou a mangé.
Pouls
19
La palpation et l’auscultation
du pouls apical sont décrites
dans le chapitre 19, Cœur et
vaisseaux du cou.
Palper ou ausculter le pouls apical chez les nourrissons et les
trottineurs
19 . Chez les enfants âgés de plus de deux ans,
évaluer le pouls radial. Prendre le pouls pendant une minute
complète an de tenir compte des irrégularités normales, comme
les arythmies sinusales. La FC varie davantage chez les nourrissons et les enfants que chez l’adulte en réponse aux exercices,
aux émotions et à la maladie.
Jusqu’à l’âge de six à huit ans,
lorsque les enfants sont malades,
leur èvre peut monter à un degré
plus élevé que chez les adultes.
Même en présence d’une infection
mineure, la èvre peut s’élever
de 39,5 à 40,5 °C (103 à 105 °F).
Respiration
Observer l’abdomen du nourrisson à la recherche de mouvements
puisque sa respiration est plus diaphragmatique que thoracique
FIGURE 9.17. La FR durant le sommeil est la plus précise. Calculer
la FR pendant une minute complète puisque celle-ci varie considérablement, allant de respirations rapides à de courtes périodes
d’apnée. Se reporter aux fréquences normales inscrites dans le
TABLEAU 9.3.
Il est possible qu’une tachypnée,
ou une respiration rapide dont la
fréquence > 60 Resp./min chez
le nouveau-né jusqu’à l’âge de
2 mois et > 50 Resp./min chez l’enfant de 2 à 12 mois soit présente.
Cela peut survenir avec la èvre et
peut indiquer une infection. Une
tachypnée et une difculté respiratoire peuvent faire suspecter une
pneumonie.
FIGURE 9.17
Observation des mouvements respiratoires du nourrisson
Pression artérielle
Chez les enfants âgés de trois ans et plus, de même que chez les
enfants plus jeunes à risque, mesurer la PA au moins annuellement. An d’obtenir des mesures précises auprès des enfants, il
faut faire certains ajustements quant au choix du matériel et de
la technique. L’erreur la plus fréquente est l’utilisation d’un
198
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Des données probantes indiquent
qu’une HTA primaire est décelable
chez les enfants et se produit couramment (National High Blood
Pressure Education Program
OBSERVATIONS NORMALES
brassard de taille inappropriée. La largeur du brassard doit couvrir les deux tiers supérieurs du bras, et la poche gonable du
brassard doit l’encercler entièrement.
Utiliser un stéthoscope pédiatrique pour localiser les bruits. Si
possible, tranquilliser un nourrisson qui pleure durant 5 à 10 minutes
avant de mesurer sa PA ; les pleurs peuvent faire augmenter la pression systolique de 30 à 50 mm Hg. Se servir de la disparition des
bruits (phase V des bruits de Korotkoff) pour la lecture de la pression diastolique chez l’enfant comme pour l’adulte.
Les enfants âgés de moins de trois ans ont les artères brachiales
si petites qu’il est difcile d’entendre les bruits de Korotkoff avec
un stéthoscope. Utiliser plutôt un sphygmomanomètre électronique, lequel fonctionne par oscillométrie tel que le DinamapMD.
Celui-ci fournit une lecture numérique des pressions systolique,
diastolique et moyenne de même que le pouls. Ou encore, employer
un sonomètre Doppler pour amplier les bruits. Cet appareil est
facile d’utilisation et il peut être manipulé par une seule personne. (Voir la technique d’utilisation de l’appareil Doppler.)
ANOMALIES
[NHBPEP], 2004). Une PA se
situant entre les 90e et 95e centiles
est considérée comme de la préhypertension chez l’adolescent, une
PA ≥ 120/80 mm Hg traduit également une préhypertension
même si elle est sous le 90e centile.
Une PA qui se situe au-delà du
95e centile peut être de l’HTA et
devrait être mesurée à l’occasion
de deux autres visites. Si la PA
excède le 99e centile, l’adolescent
devrait obtenir une ordonnance
médicale pour une évaluation
plus poussée et un traitement
éventuel.
9
Adultes vieillissants
Questionnaire général
• Apparence physique. Vers la 8e ou la 9e décennie, le contour
du corps se découpe plus nettement, avec davantage d’angles
dans les traits du visage, et les proportions corporelles sont
redistribuées (voir Mesure du poids et de la taille).
• Posture. Une exion générale survient vers la 8 e ou la 9 e
décennie.
• Démarche. Les personnes âgées ont souvent recours à une base
plus large pour compenser la diminution de l’équilibre, les
bras peuvent être étendus pour aider à garder celle-ci, et les
pas sont parfois plus courts ou inégaux.
Mesures anthropométriques
Poids
La personne vieillissante paraît avoir un contour corporel plus
net avec davantage de proéminences osseuses que l’adulte plus
jeune. Le poids décroît durant les 80es et 90es années. Cet élément est plus évident chez les hommes, peut-être en raison du
rétrécissement musculaire plus important. La distribution adipeuse change aussi durant ces années. Malgré une saine alimentation, le tissu adipeux sous-cutané disparaît du visage et de la
périphérie (particulièrement aux avant-bras), tandis que du tissu
adipeux additionnel s’accumule sur l’abdomen et les hanches.
Ce changement dans la répartition adipeuse et dans la perte
de masse musculaire peut inuencer l’interprétation de l’IMC
d’une personne vieillissante. À IMC égal, cette dernière possède
plus de tissus adipeux qu’un jeune adulte. Comme la personne
âgée a tendance à devenir plus petite en taille, l’IMC pourrait
surestimer le volume de gras corporel. Toutefois, ces facteurs ne
nuisent pas à la validité de l’IMC en tant que méthode pour surveiller le poids d’une personne (NIH, 2000).
Taille
Vers les 80es et 90es années, plusieurs personnes sont plus petites
qu’elles ne l’étaient durant leurs 70es années. Ce phénomène provient d’un raccourcissement de la colonne vertébrale causé par
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
199
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
l’amincissement des disques intervertébraux, le raccourcissement des vertèbres de même que les changements posturaux liés
à une cyphose et à une légère exion des genoux et des hanches.
Parce que les os longs ne rétrécissent pas avec l’âge, les proportions corporelles d’ensemble paraissent différentes – un tronc
plus court avec des extrémités relativement longues.
Signes vitaux
Température
Les changements dans le mécanisme de régulation de la température corporelle rendent la personne vieillissante moins susceptible de faire de la èvre, mais le risque d’hypothermie est plus
élevé. Donc, la température est un indice moins able du véritable état de santé de la personne âgée. L’activité des glandes
sudoripares est également diminuée.
Pouls
L’étendue normale de la FC est de 50 à 100 bpm, mais le rythme
peut être légèrement irrégulier. L’artère radiale peut sembler raide,
rigide et tortueuse chez la personne âgée. Malgré ces caractéristiques, cela ne signie pas nécessairement la présence d’une
affection vasculaire cardiaque ou cérébrale. La rigidité croissante
de la paroi artérielle nécessite un apport sanguin accéléré ; le
pouls devient donc plus facile à palper.
Respiration
Le vieillissement cause une diminution de la capacité vitale et
une réduction du volume de réserve inspiratoire. Il est possible
de noter une phase inspiratoire plus supercielle et une FR accrue.
Pression artérielle
L’aorte et les artères majeures ont tendance à durcir avec l’âge.
Comme le cœur pompe le sang contre une artère plus dure, la pression systolique augmente, conduisant ainsi à une plus grande
pression du pouls FIGURE 9.18. Chez plusieurs personnes âgées,
FIGURE 9.18
Moyenne des pressions artérielles chez des personnes apparemment en bonne santé, de la naissance à l’âge avancé
200
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
tant les pressions systolique et diastolique sont augmentées, rendant difcile la distinction entre les valeurs normales de ces personnes et l’HTA anormale.
TECHNIQUES COMPLÉMENTAIRES
Mesure de la saturation en oxygène
L’oxymétrie pulsée (saturométrie) est une méthode non effractive qui permet d’évaluer la saturation du sang en oxygène (SpO2)
au moyen d’un sphygmooxymètre. Un capteur, attaché au doigt
ou au lobe d’oreille de la personne, est muni d’une diode qui
émet un rayon lumineux et d’un détecteur qui mesure la quantité de lumière absorbée par l’oxyhémoglobine et l’hémoglobine
non oxygénée (réduite). Le sphygmooxymètre compare le ratio
de lumière émise par rapport à celle absorbée et convertit ce ratio
en pourcentage de SpO2. Puisque cela ne mesure que l’absorption
de lumière du ux sanguin pulsatile, le résultat obtenu est la SpO2
du sang artériel. Une personne en bonne santé, sans maladie pulmonaire ni anémie, a normalement une SpO2 de 95 à 100 %.
Choisir le capteur du sphygmooxymètre approprié. Le capteur pour le doigt possède un ressort et fait l’effet d’une pince à
linge attachée au doigt, mais ne cause pas de douleur FIGURE 9.19.
Dans les cas de faible SpO2 (p. ex., l’hypoxie, la tachypnée, la
cyanose, etc.), le capteur attaché au lobe de l’oreille est plus précis et moins inuencé par la vasoconstriction périphérique.
9
FIGURE 9.19
Oxymètres de pouls
(sphygmooxymètres)
Moniteur électronique de signes vitaux
Un appareil électronique de monitorage des SV est fréquemment
utilisé dans les centres hospitaliers et les cliniques, particulièrement lorsque des mesures répétées de la PA sont nécessaires.
La pulsation artérielle crée une vibration qui est détectée par un
capteur électronique. Cet appareil non effractif et rapide permet
de prendre automatiquement des mesures à intervalles réguliers
et de lire les résultats sur un écran numérique. Comme pour la
mesure de la PA manuelle, l’exactitude dépend de l’installation
correcte d’un brassard de grandeur appropriée. Le moniteur électronique ne peut percevoir les vibrations d’une PA basse ; il ne
faut donc pas l’utiliser chez des personnes dont la PA se situe
en deçà de 90 mm Hg ni chez celles ayant un pouls irrégulier,
des frissons, des tremblements ou des convulsions. Si le résultat afché est incohérent avec les autres données cliniques
recueillies, vérier de nouveau la PA avec un sphygmomanomètre anéroïde et le stéthoscope. Certains moniteurs de PA
intègrent également un thermomètre et un sphygmooxymètre
FIGURE 9.20.
FIGURE 9.20
Appareil électronique de monitorage de la
pression artérielle avec sphygmooxymètre
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
201
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
Technique Doppler
20
Pour en savoir plus sur la
technique Doppler, consul­
ter le chapitre 20, Système
vasculaire périphérique et
système lymphatique.
Dans plusieurs situations, le pouls et la mesure de la PA sont
enrichis par l’utilisation d’un appareil électronique : le débitmètre ultrasonique Doppler. La technique Doppler fonctionne
selon un principe découvert au xix e siècle par un physicien
autrichien, Johannes Doppler. Le son varie en tonalité en fonction de la distance entre la source sonore et l’auditeur. La tonalité est plus aiguë lorsque la distance est petite, et elle diminue
lorsque la distance augmente. Une comparaison peut être faite
avec un train roulant à grande vitesse : le son du sifet devient
plus aigu quand le train s’approche, et il baisse lorsque le train
s’éloigne.
Dans ce cas-ci, la source sonore est le sang circulant dans les
artères d’une manière rythmée. Un transducteur de poche saisit
les changements dans les fréquences sonores causées par le ux
et le reux sanguins et les amplie. L’auditeur entend un son de
glissement au rythme des battements pulsatiles.
La technique Doppler est utilisée pour localiser les sites des
pouls périphériques
20 FIGURE 9.21. Pour la mesure de la
PA, elle amplie les bruits de Korotkoff. À l’aide de cette technique, il est possible d’évaluer les sons qui sont difficiles à
entendre avec un stéthoscope, comme ceux des personnes gravement malades ayant une PA basse, ceux des nourrissons ayant
de petits bras et ceux des personnes obèses pour qui les bruits
sont assourdis par les couches de gras. De plus, l’installation du
brassard sur une personne obèse s’avère difcile en raison de la
forme conique de son bras. Dans cette situation, il faut placer le
brassard sur une partie plus plate de l’avant-bras et tenir la sonde
Doppler au-dessus de l’artère radiale. À chaque site, utiliser la
technique suivante.
• Appliquer du gel conducteur sur la sonde du transducteur.
• Mettre en marche le débitmètre Doppler.
• Toucher la peau à l’aide de la sonde en la tenant perpendiculairement à l’artère.
• Un son de glissement pulsatile indique qu’il s’agit bien de l’artère. Faire tourner la sonde tout en maintenant le contact avec
la peau. Ne pas appuyer trop fort sur la sonde an de ne pas
perdre le pouls.
• Goner le brassard jusqu’à ce que les bruits disparaissent, puis
le goner jusqu’à 20 ou 30 mm Hg supplémentaires.
• Dégoner lentement le brassard jusqu’au moment d’entendre
le premier bruit de glissement et noter cette valeur. C’est la
pression systolique.
• Il est difcile d’entendre l’assourdissement ou la disparition
certaine des bruits qui indiquent la pression diastolique
(phases IV et V des bruits de Korotkoff). Cependant, la pression systolique fournit, à elle seule, une donnée valable de
la perfusion des tissus et du ux sanguin dans les artères
du client.
202
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
FIGURE 9.21
Technique Doppler
Particularités culturelles et génétiques
Apparence générale
Certaines différences liées à l’origine ethnique
sont observées dans les proportions corporelles.
En général, les hommes blancs mesurent 1,27 cm
de plus que les hommes afro-américains, alors que
les femmes blanches et afro-américaines sont, en
moyenne, de la même grandeur. Le ratio de grandeur assis/debout révèle que les afro-américains,
hommes ou femmes, ont les jambes plus longues
et le tronc plus court que les blancs. Parce qu’ils
ont proportionnellement plus de poids au niveau
du tronc, les hommes blancs semblent plus obèses
que les Afro-Américains. Les Asiatiques sont nettement plus petits, plus légers et ont une ossature
plus petite (Gilsanz, Skaggs, Kovanlikaya et
collab., 1998).
Malgré tout, la génétique n’est pas garante de
l’avenir… Au xxe siècle, les personnes habitant
dans les pays développés ont connu une plus
grande croissance que celles provenant de pays en
voie de développement, principalement en raison
de l’inuence de l’environnement (Beard et Blaser,
2002). Cela est encore plus apparent chez les
enfants d’immigrants.
Les hommes d’origine japonaise vivant au Japon
sont plus petits que ceux qui habitent à Hawaii,
et encore plus petits que ceux qui vivent en
Californie. De même, les enfants hawaïens d’immigrés nés au Japon sont signicativement plus
grands que leurs parents. En outre, les enfants
réfugiés du Guatemala ou du Mexique nés aux
États-Unis sont notablement plus grands que
leurs homologues nés au Guatemala ou au
Mexique et immigrant aux États-Unis. Au total,
les enfants mayas qui ont grandi aux États-Unis
sont en moyenne 5,5 cm plus grands que leurs
homologues demeurant au Guatemala. En général, les générations ultérieures d’enfants d’immigrants ont tendance à augmenter en taille
jusqu’à ce qu’ils atteignent celle de la population d’accueil (Beard et Blaser, 2002).
La longueur des os, telle que révélée par la stature,
démontre des différences bioculturelles précises : les
Afro-Américains ont les jambes et les bras plus longs
que les Blancs. Les Asiatiques et les personnes des
Premières Nations ont en moyenne le tronc proportionnellement plus long et les membres plus courts
que les Blancs. Les Afro-Américains ont tendance à
avoir les épaules plus larges et les hanches plus
nes, alors que les Asiatiques tendent à avoir les
hanches plus larges et les épaules plus étroites. La
largeur des épaules est grandement déterminée par
la longueur de la clavicule. Puisque celle-ci est un
os long, les personnes plus grandes ont tendance à
avoir les épaules plus larges, alors que les petites
personnes ont les épaules plus étroites.
Obésité
En 2012, au Canada, les mesures autodéclarées rapportent que 18,4 % des adultes canadiens ont dit
avoir une taille et un poids qui les classaient dans
la catégorie des personnes obèses. Ces mesures précisent que 41,3 % des hommes et 26,9 % des
femmes ont une taille et un poids qui les classaient
dans la catégorie des personnes faisant de l’embonpoint. Ces taux sont stables depuis 2003.
9
Lorsqu’on combine les personnes obèses et
les personnes faisant de l’embonpoint, 59,9 % des
hommes (7,7 millions) et 45,0 % des femmes
(5,8 millions) faisaient face à un risque accru pour
la santé en raison d’un excédent de poids. Les taux
d’embonpoint et d’obésité combinés des femmes et
des hommes sont demeurés stables depuis 2009
(Statistique Canada, 2012).
Les données de la plus récente étude du National
Health and Nutrition Examination Survey (NHANES)
montrent que 32,2 % des adultes américains sont
obèses (Ogden, Ogden, Curtin et collab., 2006). Les
taux d’obésité par groupes ethniques indiquent de
l’obésité chez 30 % des adultes non hispaniques
blancs ; chez 45 % des non hispaniques noirs ; et chez
37 % des Américains mexicains. Aucune différence
de poids n’est observée entre les groupes ethniques
masculins. Cependant, les femmes mexicaines américaines et les Noires non hispaniques sont plus
susceptibles d’être obèses que les femmes blanches
non hispaniques, et ce, de façon notable. La tendance
des 30 dernières années montre que les enfants
afro-américains ont afché de plus grandes augmentations de l’IMC, du poids et de la taille que les
enfants blancs. Les augmentations notées chez
les enfants américains mexicains se situent entre
celles observées pour ces deux groupes (Ogden et
collab., 2006). Quelles sont les causes de l’augmentation de l’obésité ? Probablement une interaction de
facteurs biologiques et sociaux, mais notamment un
environnement qui offre peu de possibilités d’activité physique et une surabondance de nourriture
riche en calories (Ogden et collab., 2006).
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
203
9.2 Anomalies
Les TABLEAUX 9.6 et 9.7 présentent des anomalies dans la taille et les proportions corporelles, ainsi que de la pression artérielle.
TABLEAU 9.6
Anomalies dans la taille et les proportions corporelles
SYNDROME DE MARFAN
Abraham Lincoln,
Paganini ainsi que
Rachmaninoff
auraient hérité de
ce trouble du tissu
conjonctif caractérisé
par une stature grande
et mince (au-delà du
95e centile), une arachnodactylie (doigts
longs et eflés), des
articulations hyperextens ibles , une
envergure des bras
plus grande que la
taille, une distance
pubis/sol dépassant
la distance tête/pubis,
une déformation sternale, un palais étroit
et arqué, et des pieds
plats. Une morbidité et une mortalité surviennent tôt en raison d’une complication cardiovasculaire telle qu’une régurgitation mitrale ou une dissection de l’aorte.
ANOREXIE NERVEUSE
Trouble psychologique sérieux caractérisé par une perte
de poids grave et
menaçante pour la
vie et même une
aménorrhée chez
l’adolescente et la
jeune femme autrement en santé. Le
comportement est
caractérisé par une
obsession au sujet de
son poids, une aversion pour la nourriture, une image
corporelle déformée
(la personne se perçoit comme grasse malgré une apparence squelettique), un
régime de privation, des séances frénétiques d’exercices et
une quête de la perfection.
204
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
NANISME HYPOPITUITAIRE
Un décit en hormone
de croissance durant
l’enfance conduit à un
retard de croissance
sous le 3e centile, à une
puberté retardée, à
l’hypothyroïdie et à une
insufsance surrénale.
La lle de neuf ans, à
gauche, semble plus
jeune que son âge réel,
avec un visage infantile
et potelé. La lle de neuf
ans à droite paraît son
âge et montre une taille
accrue, un faciès mature
et la perte du gras
infantile.
ACROMÉGALIE (HYPERPITUITARISME)
Une hypersécrétion de l’hormone de croissance à l’âge adulte,
une fois la croissance normale terminée, cause une surcroissance des os du visage, de la tête, des mains et des pieds,
mais ne change pas la taille de la personne. Les organes
internes sont également hypertrophiés (p. ex., une cardiomégalie et des troubles métaboliques tels que le diabète de
type 2).
TABLEAU 9.6
Anomalies dans la taille et les proportions corporelles (suite)
OBÉSITÉ ENDOGÈNE – SYNDROME DE CUSHING
L’administration de corticotrophine (ACTH) ou la production excessive d’ACTH par la glande pituitaire va
stimuler les corticosurrénales à sécréter un excès de
cortisol. Cela entraîne le syndrome de Cushing, caractérisé par un gain de poids et de l’œdème avec de l’obésité au tronc et à la région cervicale (bosse de bison) de
même qu’un visage pléthorique rond (faciès lunaire).
Le catabolisme excessif cause une atrophie musculaire,
de la faiblesse, des membres amincis, une taille réduite
et une peau mince et fragile avec des stries abdominales
violacées, des meurtrissures et de l’acné. Noter que
l’obésité est nettement différente ici de l’obésité exogène causée par un apport calorique excessif, dans
laquelle le tissu adipeux est réparti également et où la
masse musculaire demeure intacte.
GIGANTISME
Une sécrétion excessive d’hormone de croissance par la
glande pituitaire antérieure entraîne une surcroissance de
tout le corps. Lorsque cela survient durant l’enfance, avant
la fermeture des épiphyses osseuses à la puberté, cela cause
une augmentation de la taille (ici, 2,09 m) et du poids de
même qu’un retard du développement sexuel.
9
NANISME ACHONDROPLASIQUE
Trouble génétique qui transforme le cartilage en os. Caractérisé
par une tête relativement large, avec une bosse frontale et
hypoplasie centrée, une petite stature, des membres courts
et souvent une cyphose thoracique, une lordose lombaire
marquée et l’abdomen en saillie. La taille moyenne de
l’homme adulte est de 131,5 cm et celle de la femme adulte
est d’environ 125 cm.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
205
Anomalies de la pression artérielle
TABLEAU 9.7
Hypotension
• Chez les adultes normotendus : < 95/60 mm Hg
• Chez les adultes hypertendus : < moyenne des lectures de la personne, mais > 95/60 mm Hg
• Chez l’enfant : < valeurs attendues pour son âge
Survient dans le cas
Justication
•
•
•
•
•
•
•
•
•
D’infarctus aigu du myocarde (IADM)
De choc
D’hémorragie
De vasodilatation
De maladie d’Addison (fonctionnement diminué des glandes surrénales)
↓ débit cardiaque
↓ débit cardiaque
↓ volume sanguin total
↓ résistance vasculaire périphérique
Signes et symptômes associés
Dans les cas de diminution du débit cardiaque, une PA basse est accompagnée d’un pouls augmenté, d’étourdissements, de diaphorèse, de confusion et
de vision trouble. La peau semble froide et moite en raison de la constriction des vaisseaux sanguins superciels pour détourner le sang vers les organes
vitaux. Une personne ayant un IADM peut aussi se plaindre de douleur d’écrasement rétrosternal, de douleur épigastrique forte et de douleur à l’épaule
ou à la mâchoire.
Hypertension
Hypertension primaire
Cela se produit sans cause connue, mais est responsable de 95 % des cas l’HTA chez l’adulte.
Classication et suivi de la PA chez les adultes âgés de 18 ans et plus a
Thérapie médicamenteuse initiale
Classication de la PA
Pression
systolique
(mm Hg)
Pression
diastolique
(mm Hg)
Modication
du style de vie
Normale
< 120
< 80
Encourager
Préhypertension
120-139
80-89
Stade I
Hypertension
140-159
Stade II
Hypertension
≤ 160
206
Partie 2
Sans indication
d’obligation de
traitement
Avec indication d’obligation
de traitement
Oui
Aucun médicament
antihypertenseur indiqué.
Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c.
90-99
Oui
Diurétiques de type thiazide pour la plupart.
Considérer aussi IECA,
BRA, BB et BCC.
Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c.
Autres médicaments antihypertenseurs
(diurétiques, IECA, BRA, BB, BCC) au
besoin.
≥ 100
Oui
Combinaison de deux
médicaments pour la plupart b, habituellement un
diurétique de type thiazide et IECA, BRA, BB
ou BCC.
Médication pour les clients dont l’indication de traitement est obligatoire c.
Autres médi caments antihypertenseurs (diurétiques, IECA, BRA, BB,
BCC) au besoin.
Connaissances préalables à l’examen clinique
TABLEAU 9.7
Anomalies de la pression artérielle (suite)
Stratication du risque cardiovasculaire chez les clients hypertendus
Facteurs de risque majeurs
• Tabagisme
• Dyslipidémie
• Diabète de type 2
Dommages à l’organe cible/maladie cardiovasculaire
• Maladies cardiaques
• Atrophie ventriculaire gauche
• Angine, infarctus myocardique antérieur
• Âge > 60 ans
• Sexe (hommes et femmes postménopausées)
• Antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire :
femmes < 65 ans ou hommes < 55 ans
•
•
•
•
•
•
Revascularisation coronarienne antérieure
Crise cardiaque
AVC ou ischémie cérébrale transitoire
Néphropathie
Maladie artérielle périphérique
Rétinopathie
9
Modication des habitudes de vie pour la prévention et la gestion de l’hypertension
• Perdre du poids dans le cas de surcharge pondérale.
• Limiter l’ingestion d’alcool à 30 mL d’éthanol (soit 720 mL [24 oz] de bière, 300 mL [10 oz] de vin ou 60 mL [2 oz] de spiritueux) par jour pour les hommes
et à 15 mL (0,5 oz) d’éthanol par jour pour les femmes ou les personnes de petit poids.
• Augmenter l’activité physique aérobique (30-45 min presque tous les jours de la semaine).
• Diminuer l’apport en sodium à moins de 100 mmol/jour (moins de 2,4 g de sodium ou 6 g de chlorure de sodium).
• Maintenir un apport sufsant en potassium (environ 90 mmol/jour).
• Maintenir un apport sufsant en calcium et en magnésium pour garder une bonne santé en général.
• Cesser de fumer et diminuer l’apport en gras saturés et en cholestérol pour favoriser une santé cardiovasculaire globale.
BB : bêtabloquant ; BCC : bloqueur des canaux calciques ; BRA : bloqueur des récepteurs de l’angiotensine ; IECA : inhibiteur d e l’enzyme de conversion de l’angiotensine
a Traitement déterminé par la catégorie d’hypertension la plus élevée.
b Une thérapie combinée initiale doit être utilisée avec précaution chez les personnes à risque d’hypotension orthostatique.
c Traiter obligatoirement les clients atteints de maladies rénales chroniques ou de diabète avec une PA cible < 130/80 mm Hg.
Source : Adapté de Chobanian, Bakris, Black et collab. ; National Committee on Prevention, Detection, Evaluation and Treatment of High Blood Pressure ; National High Blood Pressure Education
Program Coordinating Committee, 2003
Évaluation et jugement clinique
Exemple de notes au dossier
Femme noire âgée de 47 ans. Directrice d’école secondaire. Bonne
santé apparente. Paraît son âge. Alerte, orientée et coopérative.
Sans signe de détresse aiguë. Taille : 163 cm ; poids : 57 kg ;
T° buccale : 36,8° C ; FC : 76 bpm ; FR : 14 Resp./min ; PA, assise :
146/84 mm Hg au bras droit.
Exemple d’évaluation ciblée
Grazia S. est une femme d’origine hispanique âgée de 76 ans,
secrétaire retraitée, antérieurement en bonne santé, qui est amenée
à l’urgence par son mari de 83 ans. Ils ont été malades tous les
deux durant la nuit : nausées, vomissements, douleur abdominale
et diarrhée, ce qu’ils attribuent à de la « mauvaise » nourriture
qu’ils ont consommée au restaurant le soir précédent. L’état du
mari s’est amélioré durant la journée qui a suivi, alors que celui
de Grazia S. s’est aggravé avec des vomissements intenses, de la
diarrhée, de la faiblesse, des étourdissements et une douleur
abdominale.
Données subjectives
Fatigue extrême. Faiblesse et étourdissements survenant chaque
fois que la cliente essaie de s’asseoir ou de se lever : « Je me sens
comme si j’allais perdre connaissance. » Nausées et vomissements
intenses, a soif, mais ne garde rien, chaque gorgée d’eau se transforme en « haut-le-cœur ». La douleur abdominale est modérée et intermittente. Les diarrhées sont sous forme de selles
brunes liquides, abondantes durant la nuit, mais diminuées
maintenant.
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
207
Données objectives
Signes vitaux (couchée) : T° : 36,8 °C ; PA 102/64 mm Hg au bras
gauche ; FC : 70 bpm régulier ; FR : 18 Resp./min.
Aidée pour s’asseoir, jambes pendantes : PA : 74/52 mm Hg au
bras gauche ; FC : 138 bpm régulier ; FR : 20 Resp./min. Peau pâle
et moite (diaphorèse). Rapporte voir des étoiles et avoir des étourdissements en position assise. Recouchée.
Système neurologique : état de conscience : alerte et orientée,
pupilles égales, rondes, réactives à la lumière et à l’accommodation (PERRLA). État sensitif normal. Légère faiblesse des bras et
des jambes. Démarche et posture debout non vériées en raison
de son incapacité à se tenir debout. Réexes ostéotendineux 2+
et égaux bilatéralement. Réexe de Babinski négatif.
Évaluation
Respiration : bruits respiratoires clairs dans toutes les plages
pulmonaires. Aucun bruit adventice.
Hypotension orthostatique, augmentation du pouls en orthostatisme et symptômes de syncope, liés à l’hypovolémie.
Système cardiovasculaire : FC régulière à 70 bpm lorsque couchée. B1 et B2 ne sont pas accentués ni diminués, aucun bruit
surajouté. Tous les pouls sont présents à intensité 2+ et égaux
bilatéralement. Carotides 2+ sans bruits carotidiens.
Diarrhée possiblement liée à l’ingestion de nourriture
contaminée.
Abdomen : hyperactivité des bruits intestinaux, peau pâle et
moite, abdomen légèrement souple à la palpation. Pas d’augmentation du volume du foie ni de la rate.
Risque d’hyperthermie lié à la déshydratation et au vieillissement.
Décit du volume liquidien.
Dossier : Éric Chabot (suite)
Après avoir pris les mesures anthropométriques de monsieur Chabot, vous poursuivez l’entrevue.
1. Formulez deux questions pertinentes que vous pourriez poser à monsieur Chabot relativement aux
données obtenues au moment de la mesure de son poids et de son tour de taille.
2. En consultant le dossier de monsieur Chabot, vous voyez que ses SV à l’occasion de sa dernière visite
il y a 13 mois étaient les suivants : PA : 134/84 mm Hg ; P : 78 bpm ; FR : 16 Resp./min ; T° : 37,3 °C.
Quelles sont les données manquantes relativement aux SV ?
3. Voici les SV actuels de monsieur Chabot : PA bras gauche, assis : 128/72 mm Hg ; P : 54 bpm régulier, 2+ ; FR : 16 Resp./min, régulier, amplitude normale ; T° : 37,2 °C buccale. Quelles questions allezvous lui poser à la lumière des différences que vous observez ?
4. Serait-il pertinent de vérier la PA à la cuisse dans le cas de monsieur Chabot ?
(suite)
Monsieur Chabot vous dit qu’il a perdu près de
14 kg dans la dernière année. « Il fallait que je
me prenne en main, j’étais rendu obèse. J’ai
réduit mes portions aux repas et je me suis mis
au vélo de route. Je me suis payé un programme
personnalisé en vélo avec un entraîneur. Je m’entraîne quatre ou cinq fois par semaine et je me
sens beaucoup mieux maintenant. »
5. Sachant que le questionnaire général et la mesure des SV sont des moments privilégiés an d’encourager la personne à adopter de bonnes habitudes de vie, quelles autres questions pourriez-vous poser
à monsieur Chabot an d’évaluer celles-ci et déterminer si de l’enseignement serait pertinent dans
son cas ?
208
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Dans quel ordre devez-vous mesurer les SV d’un
nourrisson ? Justiez votre réponse.
2. Quelle est l’erreur la plus fréquente au moment de
la mesure de la PA chez les nourrissons et les
enfants ? Expliquez comment l’éviter.
3. Si vous deviez mesurer la pression artérielle d’un
bébé, quel serait le moment idéal pour vous assurer
d’obtenir le résultat le plus able possible ?
4. Dans le cas d’une personne âgée, l’IMC est-il
able ? Expliquez votre réponse.
5. Chez une personne âgée, la température est-elle
aussi able que chez l’adulte plus jeune ? Expliquez
votre réponse.
9
Chapitre 9
Questionnaire général, mesure des signes vitaux
209
Dossier : Mikael Pinsonneault
Mikael Pinsonneault, âgé de 16 ans, se présente
à la clinique sans rendez-vous du groupe de
médecine de famille en raison d’une douleur à
un genou. Il se présente à votre bureau en sautillant sur sa jambe gauche. Vous remarquez qu’il
porte un bandage élastique au genou droit, sous
lequel est placé un sac de glace. Vous amorcez
l’entrevue en lui demandant ce qui est arrivé à
son genou.
Mikael vous mentionne qu’il joue comme
demi-défensif pour l’équipe de football de son
école secondaire. Lors d’un match hier soir, il a
plaqué le porteur de ballon de l’équipe adverse
avec l’aide d’un de ses coéquipiers. Il est alors
tombé, avec les deux autres joueurs, et ses crampons sont demeurés ancrés dans le sol ; les deux
joueurs sont tombés par-dessus lui. Il a senti sa
jambe se plier latéralement au niveau du genou.
Mikael a alors ressenti une importante douleur
sous forme de brûlure au genou droit. Il a dû
arrêter de jouer et mettre de la glace. La douleur
était moins vive hier que ce matin. Il vous mentionne qu’il ressent plus de raideur en ce
moment ainsi qu’une sensation de brûlure. Il se
dit déçu, car son équipe a gagné le match, et il
devait jouer la nale vendredi soir prochain au
stade de son école. Il vous dit : « Avec ma chance
habituelle, je suis certain que je ne serai pas en
état de jouer la nale. »
10
10.1 Anatomie et physiologie
10.1.1
Dénition du concept
de douleur
La douleur se dénit comme une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire actuel ou potentiel ou décrite en de
tels termes (International Association for the Study
of Pain [IASP], 1979). Cette dénition, reconnue de
façon universelle, souligne la nature subjective et
multidimensionnelle de ce phénomène. McCaffery
(1979) a d’ailleurs indiqué que seule la personne qui
expérimente la douleur est en mesure de la décrire.
Outre les dimensions sensorielle et émotionnelle de
la douleur, McGuire (1992) en a aussi précisé les
composantes cognitive, comportementale et physiologique. Ces composantes sont d’ailleurs bien illustrées dans le modèle circulaire de la douleur de
Marchand (2009), qui comporte une composante
nociceptive, une composante sensoridiscriminative,
une composante motivoaffective et une composante
cognitivocomportementale FIGURE 10.1. La composante nociceptive renvoie à la nociception, à savoir
l’activité de composantes nerveuses, qui sera discutée
ultérieurement. La composante sensoridiscriminative
constitue la perception de la personne quant aux
caractéristiques de la douleur expérimentée, soit son
intensité, sa localisation et sa qualité (sensation
de douleur). La composante motivoaffective représente les émotions négatives liées à la douleur telles
que l’anxiété et la peur. Cette composante est souvent associée à l’aspect désagréable de la douleur.
L’interprétation ou la signication que la personne
attribue à son expérience de douleur ainsi que les
comportements et les stratégies qu’elle utilise pour
exprimer, éviter ou maîtriser la douleur renvoient à
la dimension cognitivocomportementale. La douleur
constitue ainsi un phénomène complexe à évaluer
et à traiter.
Une telle dénition présente une limite importante. En effet, en reconnaissant que la douleur est
essentiellement subjective, son autoévaluation
constitue la seule méthode de mesure valide. Et
pourtant, celle-ci n’est pas réalisable pour toutes
les personnes. Plusieurs clientèles, comme les
nourrissons, les personnes inconscientes et les personnes vieillissantes atteintes de décits cognitifs
majeurs, ne peuvent exprimer verbalement leur
douleur. Des experts (Anand et Craig, 1996) se sont
penchés sur cette problématique et ont proposé une
FIGURE 10.1
Modèle circulaire de la douleur
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
211
Nociception : Activité
de récepteurs et de bres
nerveuses provoquée par une
stimulation potentiellement
dangereuse pour l’organisme.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Mikael,
relevez un indicateur comportemental de la douleur
qu’il éprouve.
dénition autre de la douleur pour les nourrissons,
mais celle-ci s’applique aussi à toute clientèle incapable de communiquer verbalement. Ils mentionnent que les manifestations comportementales
causées par la douleur doivent être considérées
dans l’évaluation de celle-ci pour ces clientèles, et
ce, au même titre que l’autoévaluation. L’utilisation
d’indicateurs comportementaux (p. ex., les expressions faciales, les mouvements corporels) pour
l’évaluation de la douleur est d’ailleurs reconnue
et fortement recommandée auprès de ces clientèles
vulnérables dans les lignes directrices de l’American Society for Pain Management Nursing (Herr,
Coyne, Key et collab., 2006).
FIGURE 10.2
Étapes du processus de la nociception
Na+ : ions sodium ; K+ : ions potassium
212
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
10.1.2
De la nociception à la douleur
La nociception représente l’activité chimioélectrique de récepteurs et de bres nerveuses provoquée par un stimulus potentiellement dangereux
pour l’organisme (Marchand, 2009). La nociception
consiste en un processus purement physiologique.
La douleur, quant à elle, constitue l’expérience
consciente résultant de l’activité cérébrale impliquée dans la nociception (Charlton, 2005). Celle-ci
comporte quatre étapes : 1) la transduction ; 2) la
transmission ; 3) la perception ; 4) la modulation
(Carr et Goudas, 1999 ; McCaffery et Pasero, 1999)
FIGURE 10.2.
Transduction
Transmission
La première phase, la transduction, est déclenchée
lorsqu’un stimulus d’origine mécanique (p. ex., une
incision chirurgicale, un trauma), thermique (p. ex.,
une engelure, une brûlure) ou chimique (impliquant
des substances nocives ou toxiques) entraîne un
dommage tissulaire dans l’organisme. Les tissus
lésés libèrent alors différentes substances chimiques,
appelées neurotransmetteurs, incluant la substance P,
l’histamine, les prostaglandines, la sérotonine et la
bradykinine. Ces neurotransmetteurs stimulent les
récepteurs nociceptifs (ou nocicepteurs), des terminaisons nerveuses spécialisées qui permettent de
détecter les stimulus nociceptifs, puis un potentiel
d’action est créé an d’amorcer la transmission du
message nociceptif. Les nocicepteurs se trouvent à
différents endroits du corps, notamment dans la
peau, les articulations, les tendons, les viscères et
les muscles (Marchand, 2009).
Le message nociceptif est alors transmis par des
bres nerveuses de la périphérie jusqu’à la corne
dorsale de la moelle épinière, puis de celle-ci
jusqu’au cerveau. Cette seconde phase correspond
à la transmission. Deux types de bres nerveuses
afférentes servent à transmettre le message nociceptif de la périphérie jusqu’à la moelle épinière : les
bres A-δ et les bres C FIGURE 10.3. Ces bres
atteignent les cordons postérieurs de la corne dorsale de la moelle épinière dans la zone marginale
de Lissauer. Les bres A- sont myélinisées et de
diamètre intermédiaire. Elles permettent de transmettre rapidement le signal nociceptif de première
douleur. Ce type de bres intervient dans la transmission de sensations de douleur aiguë bien localisée. Quant aux bres C, elles sont amyélinisées et
de faible diamètre. Elles transmettent le signal nociceptif plus lentement, à savoir celui de seconde
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Mikael, quel
type de stimulus a déclen­
ché la première étape du
processus de nociception ?
Fibre A- (A-delta) :
Fibre myélinisée, de calibre
intermédiaire, ayant un rôle
important dans la localisation
de la stimulation nociceptive.
Fibre C: Petite bre amyélinisée
responsable des afférences noci­
ceptives qui joue principalement
un rôle dans la sensation de la
douleur lente et diffuse.
FIGURE 10.3
Trajet du message nociceptif
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
213
10
douleur. Ce type de bres est davantage impliqué
dans la transmission de sensations de douleur diffuse, sourde et persistante.
Q
uestion de suivi
Dans la situation de Mikael,
quelles bres nerveuses
ont été utilisées pour la
transmission des inux
nerveux ?
An que le message nociceptif atteigne le cerveau, les bres nerveuses font synapse avec des
interneurones localisés dans une région précise de
la corne dorsale de la moelle épinière, appelée substance gélatineuse de Rolando. Celle-ci est divisée
en plusieurs couches de cellules nerveuses et reçoit
les messages nociceptifs provenant de différentes
régions de l’organisme. Pour que les bres nerveuses
fassent synapse, des neurotransmetteurs, dont la
substance P, le glutamate et l’adénosine triphosphate, sont libérés. Cela permet au message nociceptif d’emprunter le faisceau spinothalamique
ascendant jusqu’au cerveau.
Perception de la douleur
Le message nociceptif passe par le thalamus pour
atteindre les régions corticales du cerveau où il est
perçu comme une expérience de douleur. Cela correspond à la phase de perception, pendant laquelle
la personne a conscience de la sensation douloureuse. Plusieurs structures corticales interviennent
dans ce processus. Le système limbique et le cortex
frontal sont associés à la dimension émotionnelle
de la douleur (aspect désagréable), alors que le cortex somesthésique, situé dans le lobe pariétal, permet à la personne de décrire les caractéristiques de
la douleur expérimentée (dimension sensorielle).
Le cortex moteur, situé dans le lobe frontal, est
impliqué dans l’expression des indicateurs comportementaux associés à la présence de douleur.
D’autres structures du cortex cérébral interviennent
dans l’interprétation de la douleur, notamment dans
la dimension cognitive.
Modulation
Q
uestion de suivi
La douleur de Mikael est­
elle aiguë ou chronique ?
Fibre A (A-bêta) :
Fibre myélinisée à large
diamètre responsable de
la conduction des affé­
rences non nociceptives.
214
Partie 2
Enn, la modulation correspond au mécanisme de
contrôle du message nociceptif. Heureusement, le
corps possède des mécanismes qui lui permettent
d’atténuer la douleur en inhibant son processus à
différents endroits. L’information douloureuse ne
circule pas de façon linéaire, mais est plutôt modulée à plusieurs niveaux du système nerveux central
(SNC). Il est possible de classier les différents
mécanismes endogènes de contrôle de la douleur
selon trois niveaux du SNC. Il s’agit des mécanismes spinaux, qui créent une analgésie localisée, des contrôles inhibiteurs descendants, qui
entraînent des effets diffus, et des mécanismes des
centres supérieurs pouvant produire des effets
locaux ou diffus selon les conditions. Les mécanismes spinaux sont associés à la théorie du portillon et reposent sur le fait que la stimulation de
larges bres non nociceptives (bres A ), pendant
un massage léger ou l’application d’une pression
par exemple, permet le recrutement des interneurones inhibiteurs situés dans la corne dorsale de la
Connaissances préalables à l’examen clinique
moelle épinière. Ceux-ci atténuent l’activité des
bres nociceptives (A-δ et C) et permettent ainsi de
diminuer la sensation de douleur. Les contrôles
inhibiteurs descendants – ou modulation conditionnée de la douleur – expliquent comment une
stimulation douloureuse localisée peut entraîner
une inhibition de la douleur diffuse. Ces mécanismes impliquent des structures du tronc cérébral,
dont la substance grise périaqueducale et les
noyaux du raphé, qui vont à leur tour envoyer des
efférences inhibitrices dans la moelle. Des neurotransmetteurs, aussi appelés opioïdes endogènes
(p. ex., les bêtaendorphines, les enképhalines, les
dynorphines), sont alors libérés dans la moelle épinière. Ces neurotransmetteurs se xent aux récepteurs opioïdergiques localisés sur les fibres
nociceptives, bloquant ainsi la libération de neurotransmetteurs excitateurs, dont la substance P. Cela
ralentit ou inhibe le message nociceptif et produit
un effet analgésique. Quant aux mécanismes des
centres supérieurs, ils font référence aux diverses
techniques cognitives telles que la relaxation
et l’hypnose. Ces techniques inuent sur la perception de la douleur, entre autres en modiant l’activité cérébrale et en potentialisant la libération
d’opioïdes endogènes, d’où leur effet analgésique.
10.1.3
Types de douleur
La douleur est classiée en fonction de sa durée ou
de son origine (Marchand, 2009 ; McCaffery et
Pasero, 1999). Selon sa durée, la douleur sera aiguë
ou chronique. Généralement, une douleur aiguë peut durer jusqu’à 30 jours, une période qui
correspond au processus de guérison normal d’une
blessure ou d’une chirurgie, par exemple. La douleur aiguë constitue un mécanisme d’autoprotection de l’organisme et envoie un signal d’alarme à
la personne quant à un dommage tissulaire actuel
ou potentiel. Une douleur aiguë non soulagée peut
évoluer vers un syndrome de douleur chronique
(Katz, Jackson, Kavanagh et collab., 1996).
Quant à la douleur chronique, il en existe plusieurs dénitions. Selon la Société canadienne de la
douleur, la douleur devient chronique lorsqu’elle
perdure au-delà d’une période de six mois (Jovey,
Ennis, Gardner-Nix et collab., 2002). En d’autres
termes, elle persiste au-delà de la période de guérison normale et peut être associée à un dommage
permanent du système nerveux (central ou périphérique) ou encore à un processus anormal du SNC,
comme une suractivation des mécanismes excitateurs ou une sous-activation des mécanismes inhibiteurs. Une douleur qui se situe entre la douleur
aiguë et la douleur chronique est habituellement
qualiée de douleur subaiguë (Marchand, 2009). La
douleur chronique peut être catégorisée en douleur
cancéreuse ou non cancéreuse. La douleur cancéreuse, découlant de la pathologie elle-même, est
souvent induite par la compression d’un organe par
la tumeur cancéreuse, par le développement de tissu
nécrosant ou elle est associée aux traitements reçus.
La douleur peut ainsi uctuer selon l’évolution de
la maladie. La douleur non cancéreuse est généralement liée à des pathologies musculosquelettiques
(p. ex., l’arthrite, une douleur lombaire), à des neuropathies ou à des troubles fonctionnels (p. ex., la
bromyalgie, le syndrome du côlon irritable, la cystite interstitielle).
En fonction de son origine, la douleur est classée
en deux grandes catégories : nociceptive et neurogène. Le TABLEAU 10.1 présente un résumé de ces
différents types de douleur. La douleur nociceptive,
associée au processus de nociception, est d’origine
somatique ou viscérale. La douleur somatique
touche la peau, les muscles, les articulations et les
os. Ce type de douleur peut être lié à un trauma, à
une pression ou à une ischémie. Une incision cutanée, l’arthrite et une fracture osseuse sont des
exemples de douleur somatique. Quant à la douleur
viscérale, elle est associée aux différents organes
internes (p. ex., l’estomac, le cœur, le foie, le pancréas,
les intestins, les reins). Ce type de douleur peut
provenir d’une blessure directe, de la présence
d’une tumeur, d’une ischémie, d’une distension
ou d’une contraction majeure de l’organe. La
colique néphrétique, l’appendicite aiguë, un ulcère
gastrique et une cholécystite sont des exemples
de douleur viscérale. On la décrit souvent comme
étant sourde, profonde, constrictive ou crampoïde.
Alors que la douleur somatique demeure habituellement bien localisée, la douleur viscérale est plus
TABLEAU 10.1
souvent diffuse et irradiante (d’où le concept de
douleur irradiée). La douleur somatique profonde
est souvent décrite comme étant une douleur persistante ou pulsatile, tandis que la douleur cutanée
est une douleur supercielle, vive ou cuisante. Il
arrive que les douleurs somatiques, comme les douleurs viscérales, s’accompagnent de nausées, de
transpiration, de tachycardie et d’hypertension
provoquées par la réponse du système nerveux
autonome (SNA).
Q
uestion de suivi
À partir des données dont
vous disposez, diriez-vous
que la douleur de Mikael est
nociceptive ou neurogène ?
Il est question de douleur irradiée, qui peut également être qualiée de douleur référée, lorsque la
personne ressent celle-ci à un site différent de celui
de sa blessure ou de sa maladie. Généralement, ce
site référé est innervé par le même nerf spinal que
le site de l’atteinte tissulaire, et le cerveau peut
difcilement reconnaître le point d’origine de la
douleur. Plusieurs structures conservent leur innervation embryonnaire. Par exemple, une personne
atteinte d’une inammation de l’appendice, situé
dans le quadrant inférieur droit de l’abdomen, peut
avoir une douleur irradiée dans la région périombilicale. Il est ainsi utile de connaître les différents
sites de douleur irradiée
21 .
21
10
Les sites fréquents de la
douleur référée sont décrits dans le tableau 21.4
du chapitre 21, Abdomen.
La douleur neurogène peut être d’origine centrale (moelle épinière, cerveau, nerfs crâniens) ou
périphérique (nerfs périphériques). Différentes
causes sont à l’origine de la douleur neurogène. Elle
peut se produire à la suite d’une lésion résultant
d’une blessure, d’une chirurgie ou elle est consécutive à une maladie. Des céphalées secondaires à
un accident vasculaire cérébral, la paralysie de Bell,
Description sommaire des types de douleur
TYPE DE DOULEUR
ÉTIOLOGIE
DESCRIPTEURS DE DOULEUR
PROBLÈMES ASSOCIÉS
TRAITEMENTS SUGGÉRÉS
Nociceptive
(somatique
ou viscérale)
• Activité des nocicepteurs des tissus cutanés
et musculosquelettiques
profonds à la suite d’une
stimulation causant des
dommages tissulaires
• Inammation
• Somatique : supercielle
ou profonde, bien localisée,
nocturne
• Viscérale : profonde,
crampiforme, mal
localisée (irradiée)
• Somatique : douleur postopératoire, métastases osseuses,
arthrite, blessures sportives,
douleur lombaire (mécanique)
• Viscérale : métastases au foie,
cancer du pancréas
• Traitement de la cause
sous-jacente
• Anti-inammatoires
non stéroïdiens
• Analgésiques opioïdes
• Relaxants musculaires
• Corticostéroïdes
Neurogène
• Lésion primaire ou dysfonction du système
nerveux périphérique
ou central
• Constante : brûlure,
décharge électrique,
coup de couteau, allodynie, hyperalgésie
• Neuropathies (diabètes,
virus de l’immunodécience
humaine (VIH)), zona postherpétique, névralgie du
trijumeau, douleur lombaire
neuropathique, syndrome de
douleur régionale complexe
•
•
•
•
•
Cancéreuse
• Inltration ou lésion
• Blessure d’un nerf de
provenance centrale
ou périphérique
• Selon la pathologie
sous-jacente
• Métastases osseuses
• Neuropathie
• Contrôle des symptômes
à l’aide des traitements
précédemment mentionnés
Anticonvulsivants
Antidépresseurs
Anesthésiques locaux
Analgésiques opioïdes
Interventions techniques
Source : Miller-Saultz, D. (2008). Identifying chronic pain: awareness important. The Nurse Practionner, 33 (9), 7.
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
215
Hypoesthésie : Diminution
de la sensibilité de l’ensemble
des fonctions sensorielles sous
ses diverses formes.
la sclérose en plaques, la neuropathie diabétique et
les compressions nerveuses causées par une hernie
discale sont des exemples de douleur neurogène.
Elle se présente généralement sous forme de
brûlure, de décharge électrique ou d’engourdissement et est habituellement localisée, mais parfois
irradiante. La douleur neurogène peut également
se produire à la suite d’un processus anormal de
transmission du message nociceptif qui diffère du
processus de nociception. Bien que le mécanisme
exact demeure inconnu, il est proposé que la douleur neurogène périphérique soit le résultat de la
production d’inux nerveux anormaux spontanés
et répétitifs similaires à ceux qui surviennent au
moment de convulsions. Melzack (1999) a proposé
la théorie de la neuromatrice, soit la création d’une
mémoire somatosensorielle dans le cerveau qui
permettrait d’expliquer, entre autres, la douleur
neurogène centrale telle que la douleur fantôme
postamputation. Un bref questionnaire d’aide au
diagnostic des douleurs neurogènes, appelé DN4,
a été validé an de détecter rapidement la présence
de ce type de douleur (Bouhassira, Attal, Alchaar
et collab., 2005) TABLEAU 10.2. Le score obtenu
Questionnaire DN4
TABLEAU 10.2
Répondez aux quatre questions suivantes en cochant une seule case pour chaque élément de réponse.
INTERROGATOIRE DE LA PERSONNE
Question 1 : La douleur présente-t-elle une ou plusieurs des caractéristiques suivantes ?
oui
non
oui
non
1. Brûlure
2. Sensation de froid douloureux
pour ce questionnaire peut varier de 0 à 10 ; un
résultat égal ou supérieur à 4 indique que le test est
positif, donc que la personne souffre de douleur
neurogène. Bien que ce questionnaire facilite la
détection de ce type de douleur, le traitement de
celle-ci demeure un dé clinique important.
Particularités liées au développement
Nourrissons et enfants
Le nourrisson possède la même capacité que
l’adulte à ressentir la douleur. Après 20 semaines
de gestation, les bres nerveuses ascendantes, les
neurotransmetteurs et le cortex cérébral sont déjà
développés et fonctionnels, de sorte que le fœtus
est en mesure de ressentir la douleur (Anand,
1993). Cependant, les neurotransmetteurs inhibiteurs (les opioïdes endogènes) sont produits en
quantité insufsante jusqu’à ce que la gestation soit
à terme. Ainsi, le nourrisson prématuré ressent plus
la douleur, et son système nerveux ne peut adéquatement l’inhiber ; il est donc plus sensible aux stimulus douloureux que le bébé né à terme.
L’enfant au stade préverbal est à risque élevé de
sous-traitement de la douleur en raison des mythes
et des croyances, entre autres celle qu’il ne garde
pas de souvenir de la douleur. Dans les faits, la
recherche indique qu’une douleur répétée et mal
soulagée chez le nourrisson (p. ex., des ponctions
veineuses) peut entraîner une hypersensibilité à la
douleur plus tard dans la vie. Cette situation suggère l’administration d’analgésiques pendant les
interventions douloureuses courantes (Knaepen,
Patjin, van Kleef et collab., 2013 ; Morin, Marchand,
Couturier et collab., 2014).
3. Décharges électriques
Question 2 : La douleur est-elle associée dans la même région à un
ou à plusieurs des symptômes suivants ?
4. Fourmillements
5. Picotements
6. Engourdissements
7. Démangeaisons
EXAMEN DE LA PERSONNE
Question 3 : La douleur est-elle localisée dans une région où l’examen
la met en évidence ?
oui
non
oui
non
8. Hypoesthésie au toucher
9. Hypoesthésie à la piqûre
Question 4 : La douleur est-elle provoquée ou augmentée par :
10. Frottement
Source : Adapté de Bouhassira et collab. (2005)
216
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Adultes vieillissants
Bien qu’elle soit une expérience commune chez les
personnes âgées de 65 ans et plus, la douleur ne
constitue pas un phénomène normal du vieillissement. En effet, la douleur signale la présence d’une
blessure ou d’une pathologie. Malheureusement,
des professionnels de la santé et des personnes
âgées croient à tort que la douleur est normale au
cours du vieillissement, ce qui mène à des traitements moins rigoureux. Les personnes âgées
éprouvent également la crainte de devenir dépendantes au traitement, de devoir subir des procédures
effractives ou d’être hospitalisées. Les pathologies
comme l’arthrite, l’arthrose, l’ostéoporose, les maladies cardiovasculaires et vasculaires périphériques,
le cancer, les neuropathies périphériques, l’angine
et la constipation chronique constituent des sources
courantes de douleur chez l’adulte vieillissant.
Par ailleurs, des changements quant à la
nociception seraient observés chez la personne
vieillissante (Gibson et Farrell, 2004). À titre
d’exemple, une diminution de la production de la
substance P et de la densité des bres nociceptives
modierait les processus de transduction et de
transmission, alors qu’une réduction de l’efcacité de la réponse des opioïdes endogènes altérerait le processus de modulation. Ces changements
permettraient d’expliquer les seuils de douleur
plus élevés, la sensibilité diminuée à des stimulus
nociceptifs de faible intensité et une réponse
plus marquée à des stimulus nociceptifs plus
intenses chez la personne vieillissante (Gibson et
Helme, 2001). Ainsi, la présence de douleur que
rapporte une personne âgée peut indiquer une pathologie plus grave que chez l’adulte plus jeune
et devrait alerter les professionnels de la santé.
un impact important sur la sensibilité des femmes
à la douleur. En effet, ces dernières seraient deux
ou trois fois plus à risque de souffrir de migraines
pendant l’enfance et de six à neuf fois plus à risque
d’être atteintes de bromyalgie (McNally, Matheson
et Bakovsky, 2006). Les résultats du Human
Genome Project mettraient en lumière l’existence
de différences génétiques entre les deux sexes et
que celles-ci permettraient d’expliquer les écarts
quant à la perception de la douleur (Mogil, 2002).
La maladie d’Alzheimer ne touche généralement
pas le cortex somesthésique. La discrimination sensorielle est aussi préservée chez la personne aux
prises avec un décit cognitif (Vreeling, Houx,
Jolles et collab., 1995). Cependant, le système limbique serait perturbé chez la personne atteinte de
la maladie d’Alzheimer, et des chercheurs se
penchent actuellement sur la façon dont ces personnes interprètent et décrivent les messages douloureux (Jensen-Dahm, Werner, Dahl et collab.,
2014 ; Horgas, Elliott et Marsiske, 2009 ; Cole,
Gavrilescu, Johnston et collab., 2011). Comme il est
difcile d’évaluer ce que ressentent ces personnes
à l’égard de la douleur, il importe de considérer
leurs comportements comme des indicateurs de la
présence de celle-ci.
Les professionnels de la santé doivent éviter de
stéréotyper les réactions à la douleur en les associant à la culture
3 . Chaque personne est différente et a une façon personnelle d’exprimer la
douleur et d’y réagir.
Différences selon le sexe
Les différences liées au sexe sont inuencées par
les attentes sociales, les hormones et le bagage
génétique. De manière traditionnelle, les hommes
ont tendance à demeurer stoïques devant la douleur, alors que les femmes expriment plus leurs
émotions. Les changements hormonaux auraient
Particularités culturelles et génétiques
Certains travaux de recherche portant sur les
différences ethniques et la douleur ont révélé des
variations dans le soulagement de celle-ci. Il a été
montré que les personnes noires et les Hispaniques
se voient prescrire et administrer moins de traitements analgésiques que les personnes blanches
(Ezenwa, Ameringer, Ward et collab., 2006).
3
Les particularités intercultu­
relles sont présentées en
détail dans le chapitre 3,
Entrevue.
L’expérience de la douleur comporte plus de
facettes que la seule souffrance physique. La douleur et l’expression de la douleur sont inuencées
par des questions d’ordre social, culturel, émotionnel et spirituel. Le praticien compétent sur le plan
culturel intègre un aspect de l’évaluation culturelle
dans son évaluation de la douleur pour dresser un
portrait plus complet de l’expérience personnelle
de cette douleur (Bhui et Dinos, 2008 ; Narayan,
2010 ; Spencer et Burke, 2011).
10.2 Données subjectives
10.2.1
Histoire de santé
Le fait de recueillir les données subjectives permet de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces
éléments d’information sont ensuite combinés
aux données objectives provenant de l’examen
physique et des examens paracliniques.
L’ensemble des données sert à poser un jugement
clinique sur l’état de santé du client et à formuler
un constat d’évaluation. An de reconstituer l’histoire de santé, l’inrmière peut utiliser l’outil
mnémotechnique AMPLE. Lorsque le client présente des symptômes particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue ceux-ci à l’aide de l’outil
PQRSTU
4 .
Comme la douleur se dénit d’abord comme un
concept subjectif, l’autoévaluation de la personne
souffrante constitue la méthode la plus valide de la
mesurer. Il faut la privilégier et obtenir la collaboration de la personne, autant que possible. Les
autres méthodes d’évaluation (p. ex., les indicateurs
comportementaux) peuvent être utiles, mais elles
ne doivent pas prévaloir sur l’autoévaluation.
Une évaluation initiale (ou globale, suivant
l’acronyme PQRSTU) de la douleur doit être faite
pour toute personne qui se présente en consultation
et au moment de son admission dans un établissement, à l’apparition d’une douleur non liée au
site de la maladie ou de la chirurgie ou à la
Chapitre 10
4
Les outils mnémotechni­
ques AMPLE et PQRSTU
sont présentés dans le
chapitre 4, Regard global
sur l’histoire de santé.
Évaluation de la douleur : autre signe vital
217
10
Q
uestion de suivi
Effectuez l’évaluation de
la douleur de Mikael à l’aide
de l’acronyme PQRSTU et
des données de la situation.
manifestation d’une douleur inattendue et importante. L’évaluation de la douleur se fait également
chaque fois que les signes vitaux sont vériés. Une
fois l’évaluation initiale complétée, un suivi de
l’intensité de la douleur est assuré à l’aide d’échelles
validées auprès de la clientèle cible.
Séquence d’évaluation
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Douleur
Aide-mémoire : PQRSTU
P Provoquer
Qu’est-ce qui a provoqué votre douleur ? Que faisiez-vous
lorsque votre douleur est apparue ? Qu’est-ce qui aggrave
votre douleur ?
Permet d’établir la cause de la douleur ainsi
que les facteurs aggravants et palliatifs.
Pallier
Qu’est-ce qui aide à soulager (ou à diminuer) votre
douleur ?
Permet d’évaluer l’efcacité de l’intervention effectuée (p. ex., l’administration d’un
analgésique).
Q Qualité
Décrivez votre douleur. Que ressentez-vous ?
Exemples : élancement, brûlure, crampe, pression, coup
de couteau, engourdissement, etc.
La description de la sensation de douleur
aide à différencier la douleur nociceptive
de la douleur neurogène. La douleur
nociceptive d’origine somatique se présente
généralement sous forme d’élancement,
alors que celle d’origine viscérale est généralement sourde ou crampiforme. Quant à
la douleur neurogène, elle peut être décrite
sous forme de brûlure, d’engourdissement
ou de décharge électrique.
Quantité
À combien évaluez-vous votre douleur sur une échelle
de 0 (aucune douleur) à 10 (pire douleur imaginable) ?
Note : bien qu’il soit préférable de faire l’utilisation standardisée d’un seul type d’échelle dans un même établissement, il peut parfois être nécessaire de recourir à
d’autres types d’échelles selon les capacités cognitives
de la personne.
Permet de déterminer la gravité ou l’intensité de la douleur.
R Région
À quel endroit
ressentez-vous de la
douleur ?
Permet de distinguer une douleur localisée
d’une douleur irradiée.
Irradiation
Ressentez-vous une
douleur ailleurs ?
Montrez la ou les
régions douloureuses
avec votre doigt
FIGURE 10.4.
FIGURE 10.4
Localisation de la douleur
218
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
S Symptômes et signes associés/sévérité
Ressentez-vous d’autres malaises en plus de cette
douleur ?
Prendre les signes vitaux et observer la personne
pour documenter les signes associés (p. ex., l’expression faciale, la position du corps). À noter que les signes
vitaux présentent des limites importantes dans le cadre
de l’évaluation de la douleur ; celles-ci sont discutées
plus loin dans le chapitre.
Permet de découvrir d’autres signes et
symptômes accompagnant la douleur
et d’obtenir de l’information additionnelle
sur la gravité de la situation.
T Temps
Depuis quand éprouvez-vous de la douleur ?
Durée
Votre douleur est-elle constante ou intermittente ?
Si elle est intermittente, à quel(s) moment(s) de la journée la ressentez-vous ?
U (Understanding) Compréhension et signication pour
Permet de décrire le moment d’apparition
et la durée de la douleur. La douleur aiguë
est présente en cours de guérison et ne dure
généralement pas plus de trois mois, alors
que la douleur chronique persiste au-delà
de cette période.
• De quel problème croyez-vous qu’il s’agit ?
Une personne qui a vécu une expérience similaire dans le passé ou qui souffre d’un problème de santé chronique se connaît très bien.
• Que signifie cette douleur pour vous ? Pourquoi
pensez-vous avoir de la douleur ?
Permet de déceler des mythes et des croyances
associés à la douleur.
• Quel est l’effet de la douleur sur votre fonctionnement au quotidien et sur votre famille ?
Permet de vérier l’effet qu’a la douleur sur
le degré de fonctionnement de la personne
et sur sa qualité de vie.
• Comment réagissez-vous habituellement lorsque
vous avez de la douleur ? Comment vos proches
savent-ils que vous éprouvez de la douleur ? Quelles
stratégies (ou méthodes) utilisez-vous pour soulager
votre douleur ?
Les comportements associés à la douleur
varient d’une personne à l’autre, plus particulièrement dans le cas des syndromes de
douleur chronique. Cette information aide
à la détection et à l’évaluation de la douleur. Il est également pertinent de connaître
les méthodes utilisées par la personne pour
gérer sa douleur an de les intégrer au plan
de traitement.
le client
10.2.2
Outils d’évaluation
de la douleur
En plus d’être subjective, la douleur est une expérience multidimensionnelle, comprenant des
dimensions physique, affective et fonctionnelle.
Plusieurs outils ont été mis au point pour soutenir
l’autoévaluation de la personne. Certains de ces
outils sont unidimensionnels et mesurent spéciquement l’intensité de la douleur, alors que d’autres
permettent d’en évaluer plusieurs dimensions. Le
choix de l’outil à utiliser dépendra de plusieurs facteurs, dont le but recherché, le temps disponible et
surtout la capacité de la personne à l’utiliser ou à le
remplir (questionnaire). Chaque personne devrait
10
recevoir l’enseignement approprié quant à l’échelle
utilisée. Les caractères de l’échelle devraient être
adaptés pour les clients ayant une vision altérée.
L’outil devrait être disponible dans leur langue d’origine. Une traduction de l’échelle peut s’avérer nécessaire et doit être validée avant son utilisation.
Plusieurs milieux cliniques ont conçu des questionnaires inspirés de la méthode PQRSTU pour
documenter et assurer le suivi de l’évaluation de
la douleur. D’autres questionnaires d’évaluation
de la douleur ont été élaborés et validés auprès de
clientèles variées, tels que le Brief Pain Inventory
(BPI) (Daut et Cleeland, 1982) et le Short-Form
McGill Pain Questionnaire (SF-MPQ) (Melzack,
1987). Dans le BPI, l’infirmière demande à la
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
219
personne d’évaluer sa douleur au cours des 24 dernières heures en utilisant une échelle de 0 (aucune
douleur) à 10 (pire douleur imaginable) en regard
de son effet sur l’humeur, la capacité à se mobiliser
et à dormir FIGURE 10.5. Dans le SF-MPQ, la personne doit évaluer l’aspect sensoriel de sa douleur,
soit l’intensité et la qualité, ainsi que l’aspect affectif de son expérience de douleur FIGURE 10.6. Ces
deux questionnaires sont offerts en français
(Poundja, Fikretoglu, Guay et collab., 2007).
Différents types d’échelles d’intensité de douleur sont disponibles (Agency for Health Care
Policy and Research [AHCPR], 1992). Ces échelles
permettent d’assurer un suivi quant à l’intensité de
la douleur, de noter les changements et d’évaluer
l’efcacité des interventions choisies pour son
soulagement. Par exemple, la personne utilisant
l’échelle numérique indiquera un chiffre de 0
(aucune douleur) à 10 (pire douleur imaginable)
pour indiquer son degré de douleur. Un tel type
d’échelle (de 0 à 10) peut être laissé au chevet de
la personne, accessible sous la forme d’un outil
portatif, ou être utilisé verbalement par l’inrmière.
La plupart de ces échelles sont offertes en format
horizontal et vertical FIGURE 10.7.
FIGURE 10.5
Questionnaire concis sur les douleurs (Brief Pain Inventory [BPI]) (format réduit)
Source : © 1991, Charles S. Cleeland, PhD, Pain Research Group. Tous droits réservés.
220
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Le thermomètre d’intensité de douleur constitue
une échelle récente qui a été validée auprès d’une
clientèle adulte et âgée en phase postopératoire
(Gélinas, 2007). Il possède des qualités psychométriques (délité et validité) satisfaisantes et a été
évalué positivement par les personnes l’ayant utilisé. Différents milieux cliniques du Québec ont
recours à cette échelle.
Il faut demeurer prudent quant à l’interprétation
des scores numériques (de 0 à 10) d’intensité de la
douleur. À titre d’exemple, les auteurs du BPI (Daut,
Cleeland et Flanery, 1983) proposent la catégorisation suivante, largement utilisée dans les milieux
cliniques : douleur légère (1 à 3), modérée (4 à 6) et
importante (7 à 10). D’autres études ont mené à des
catégorisations différentes. En effet, des chercheurs
en oncologie s’étant intéressés à la catégorisation de
l’intensité de la douleur à partir de l’échelle numérique ont obtenu des résultats différents. Serlin,
Mendoza, Nakamura et leurs collaborateurs (1995)
ont déni la douleur légère comme étant de 1 à 4,
modérée de 5 ou 6 et importante de 7 à 10, alors que
d’autres chercheurs ont obtenu qu’une douleur
légère correspond à des scores de 1 à 4, modérée
de 5 à 7 et importante de 8 à 10 (Paul, Zelman,
Smith et collab., 2005). Une constatation s’ensuit :
il est très difcile d’interpréter les scores d’intensité
de douleur fournis par l’échelle numérique
(Hodgins, 2002). L’utilisation d’échelles numériques
de douleur pose ainsi tout un dé aux personnes
qui doivent mesurer leur expérience subjective de
douleur. Des experts suggèrent même qu’aucun
standard absolu ne soit établi quant à l’interprétation des scores. Lorsque l’évaluation de la douleur
est effectuée à plusieurs reprises auprès d’une personne, il est recommandé d’utiliser le même outil
d’évaluation an de favoriser une meilleure compréhension pour cette personne et de permettre des
comparaisons entre les différents temps de mesure.
Particularités liées au développement
Nourrissons et enfants
10
Les nourrissons et les enfants au stade préverbal ne
peuvent fournir leur autoévaluation de la douleur.
Malgré cette réalité, il est important de se rappeler
qu’ils peuvent ressentir la douleur et que l’inrmière peut la détecter par l’observation d’indices
comportementaux et physiologiques. Une description détaillée de ces indicateurs est fournie plus
loin dans la section des données objectives.
Bien qu’à l’âge de deux ans certains enfants soient
capables de rapporter la présence de douleur et d’en
montrer le site, ils ont plus de difculté à en évaluer
le degré (intensité). Il peut alors être utile de demander au parent le type de mot(s) utilisé par l’enfant
pour signier la présence de douleur (p. ex., bobo,
« ouch »). Attention, certains enfants peuvent se montrer braves et nier la présence de douleur devant un
étranger ou par crainte de recevoir une injection.
Les échelles d’intensité de douleur peuvent être
utilisées chez l’enfant vers l’âge de quatre ans (Di
Maggio, 2002). Une version révisée d’une échelle
présentant des visages neutres et plus représentatifs
de l’intensité de la douleur a été conçue et validée
auprès de la clientèle pédiatrique (Hicks, von Baeyer,
Spafford et collab., 2001). Cette échelle évite l’utilisation du sourire et des larmes an que l’enfant ne
confonde pas l’intensité de la douleur à d’autres
émotions comme la joie ou la tristesse. Elle utilise
six visages présentant différentes intensités de douleur, allant de « pas mal du tout » à « très très mal ».
Cette échelle peut également être convertie en
échelle numérique de 0 à 10, mais les chiffres ne
sont pas montrés aux enfants. L’inrmière s’adresse
ainsi à l’enfant : « Ces visages montrent combien on
peut avoir mal. Ce visage montre quelqu’un qui n’a
pas mal du tout. Ces visages montrent quelqu’un qui
a de plus en plus mal, jusqu’à celui-ci, qui montre
quelqu’un qui a très très mal. Indique-moi le visage
qui montre combien tu as mal en ce moment. » Les
scores sont, de gauche à droite, 0, 2, 4, 6, 8, 10. Le
score 0 correspond donc à « pas mal du tout » et le
FIGURE 10.6
Questionnaire McGill sur la douleur (Short-Form McGill Pain Questionnaire) (SF-MPQ) :
version courte
Source : © R. Melzack (1987)
score 10 correspond à « très très mal ». Il faut exprimer clairement les limites extrêmes : « pas mal du
tout » et « très très mal ». Les mots « triste » ou « heureux » ne doivent pas être utilisés. L’inrmière précise bien qu’il s’agit de la sensation intérieure, et non
de l’aspect afché du visage.
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
221
Adultes vieillissants
De façon générale, les personnes âgées peuvent
éprouver de la difculté à utiliser une échelle
numérique de douleur, et ce, particulièrement si
celle-ci uctue dans le temps. Quel que soit le
FIGURE 10.7
Échelles d’intensité de douleur – A Échelle numérique B Échelle descriptive
visuelle analogique D Thermomètre d’intensité de douleur
C
Échelle
type d’échelle envisagé, il est recommandé d’utiliser un format vertical plutôt qu’horizontal chez
la clientèle âgée. En effet, le format vertical rappelle le thermomètre, qui représente un concept
connu chez ces personnes, et il facilite ainsi son
interprétation (Herr et Mobily, 1991). L’utilisation
de termes simples tels que absence de douleur, douleur légère, douleur modérée et douleur
importante peut aussi être facilitante. Alors que
l’utilisation des échelles numérique et descriptive
d’intensité de douleur FIGURE 10.7A et B est recommandée auprès de la clientèle âgée n’ayant pas de
décit cognitif (Aubin, Giguère, Hadjistavropoulos
et collab., 2007 ; Hadjistavropoulos, Herr, Turk et
collab., 2007), d’autres études ont montré que
cette clientèle préfère l’échelle des visages aux
autres types d’échelles (Carey, Turpin, Smith et
collab., 1997 ; Gélinas, 2007 ; Stuppy, 1998). Quant
aux personnes âgées atteintes d’un décit cognitif,
plusieurs d’entre elles (dont certaines aux prises
avec un décit cognitif important) sont capables
d’utiliser une échelle d’intensité de douleur
(Aubin et collab., 2007 ; Bjoro et Herr, 2008 ;
Hadjistavropoulos et collab., 2007). La majorité
des échelles (numérique, descriptive, visages) ont
montré une délité et une validité acceptables
auprès de la clientèle âgée atteinte de décit
cognitif. Cependant, l’EVA FIGURE 10.7C est la
plus difcile à utiliser pour cette clientèle, et elle
afche le plus haut taux d’échec comparativement
aux autres types d’échelles (Aubin et collab.,
2007 ; Hadjistavropoulos et collab., 2007 ; Herr,
Spratt, Garabd et collab., 2007 ; Wynne, Ling et
Remsbourg, 2000). Il demeure essentiel de s’assurer de la préférence de la personne quant au
type d’échelle à utiliser, de faire l’enseignement
approprié et de conserver la même échelle pour
un même client.
Source : © Gélinas (2007)
10.3 Données objectives
Schéma séquentiel résumant
les étapes de l’examen clinique.
Q
uestion de suivi
Dans le cas de Mikael,
quelle évaluation allez-vous
effectuer en plus de celle
de la douleur ?
222
Partie 2
10.3.1
Préambule
L’examen physique peut aider à comprendre la problématique de douleur aiguë ou chronique que
présente une personne. Cependant, il est important
de se rappeler que les résultats obtenus à cet examen ne correspondent pas nécessairement aux
plaintes de la personne, particulièrement dans le
cas de pathologies de douleur chronique. La présence de douleur doit être considérée même en
l’absence de signes physiques. Le professionnel de
la santé doit toujours tenir compte de l’autoévaluation de la personne et prendre les mesures
Connaissances préalables à l’examen clinique
nécessaires an de diminuer sa douleur à l’aide
d’interventions appropriées à sa condition. Selon
l’American Pain Society (APS) (1992), l’établissement d’un diagnostic en présence d’une douleur
aiguë est primordial, mais un traitement visant à
diminuer celle-ci devrait être mis en œuvre dès que
possible. En effet, une personne ayant atteint un
seuil de confort acceptable coopère plus facilement
aux procédures diagnostiques et thérapeutiques.
Matériel nécessaire
• Ruban à mesurer
• Abaisse-langue
10.3.2
Examen physique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
ARTICULATIONS
Évaluer la taille et le contour de l’articulation. Mesurer la circonférence de l’articulation atteinte et la comparer avec l’articulation saine. Vérier les mouvements actifs et passifs. Normalement,
la mobilisation de l’articulation ne devrait pas causer de sensibilité, de douleur ou de crépitements
22 .
• Œdème, inammation, blessure,
déformation, diminu tion de
l’amplitude du mouve ment,
douleur augmentée à la
palpation.
• Les crépitements sont des
bruits de craquements audibles
pendant les mouvements.
22
Le chapitre 22, Système
musculosquelettique,
décrit les mouvements
articulatoires.
PEAU ET MUSCLES
Observer la peau et noter sa coloration, la présence d’œdème, de
masse(s) ou de déformation.
Contusions, lésions, blessures
ouvertes, dommage tissulaire, atrophie, protubérance, changement
dans la distribution des poils.
An d’évaluer les changements quant à la sensation, demander
à la personne de fermer ses yeux. Évaluer sa capacité à percevoir
les sensations en utilisant un abaisse-langue ayant une extrémité pointue et l’autre arrondie. Appuyer légèrement chacune
des extrémités de l’abaisse-langue sur la peau de la personne et
lui demander d’indiquer si l’extrémité est pointue ou arrondie
23 . Ce test peut aider à déterminer la localisation et l’étendue de l’altération de sensation.
Absence de sensation à la douleur
(analgésie), augmentation de la
sensation de douleur (hyperalgésie) ou présence d’une douleur
intense à l’application d’un stimulus non douloureux (allodynie).
10
23
Dans le chapitre 23, Système
neurologique, la gure 23.23
montre comment procéder
à l’évaluation de la douleur
chez une personne.
ABDOMEN
Observer la symétrie et le contour de l’abdomen. Palper l’abdomen et observer la présence de résistance involontaire
21 .
Noter tout site douloureux (localisé ou irradié).
10.3.3
Indicateurs comportementaux
de la douleur
Lorsque l’autoévaluation s’avère impossible à obtenir, le recours à l’observation d’indicateurs comportementaux est fortement recommandé (Anand
et Craig, 1996 ; Herr et collab., 2006). Il est important de savoir que les réactions consécutives à la
douleur varient d’une personne à l’autre. En effet,
les comportements associés à la douleur peuvent
être inuencés par différents facteurs tels que la
nature de la douleur (aiguë ou chronique), l’âge de
la personne, le sexe et la culture.
Indicateurs comportementaux
de la douleur aiguë
La douleur aiguë agit comme un signal d’alarme et
a une fonction de protection pour l’organisme. Elle
peut être accompagnée de comportements tels
que les expressions faciales (p. ex., un front plissé,
une grimace), les mouvements de protection (p. ex.,
21
Œdème, protubérance, hernie, inammation, hypertrophie d’un organe.
Le tableau 21.4 du cha­
pitre 21, Abdomen, décrit
les sites fréquents de la
douleur référée.
toucher ou frotter le site de douleur), l’agitation, la
rigidité musculaire ou l’émission de sons (p. ex.,
des gémissements, des cris). À noter que certaines
personnes peuvent ne pas manifester de comportements particuliers en présence de douleur. Bien
que ces comportements puissent aider à détecter
celle-ci, leur absence n’indique pas nécessairement
qu’il n’y a pas de douleur (Gélinas, Viens, Fortier
et collab., 2005).
Une grille d’observation comportementale
de la douleur aiguë, appelée Critical Care Pain
Observation Tool (CPOT), a été développée et validée auprès d’une clientèle adulte et âgée de soins
intensifs ne pouvant s’exprimer verbalement
(Gélinas, Fillion, Puntillo et collab., 2006 ; Gélinas
et Johnston, 2007) TABLEAU 10.3. Les résultats de
sa validation, en versions française et anglaise, ont
montré que cet outil était pertinent pour détecter
la présence de douleur au cours de procédures
nociceptives et était positivement associé à l’autoévaluation des clients. Même s’il existe une
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
223
Critical-Care Pain Observation Tool (CPOT)
TABLEAU 10.3
SCORE (DE 0 À 8)
DESCRIPTION
Expression faciale
Détendue, neutre
0
• Aucune tension musculaire observable au visage
Tendue
1
•
•
•
•
•
Front plissé
Sourcils abaissés
Légers plis nasolabiaux
Yeux serrés
Ou tout autre changement de l’expression faciale (p. ex., ouvre soudainement les yeux, présente des
larmes pendant la mobilisation)
Grimace
2
•
•
•
•
Front plissé, sourcils abaissés, plis nasolabiaux
Yeux serrés
Bouche peut être ouverte
Peut mordre le tube endotrachéal
Absence de mouvements
ou position normale
0
• Immobile, ne bouge pas (ne signie pas nécessairement une absence de douleur)
• Position normale (mouvements non dirigés vers la douleur ou non réalisés dans le but de se
protéger de la douleur)
Mouvements de protection
1
•
•
•
•
•
•
Mouvements lents, prudents
Touche ou frotte le site de douleur
Se dirige vers le site de douleur, les tubes
Touche à ses tubes
Attire l’attention en tapant du pied ou des mains
Décortication, décérébration
Agitation
2
•
•
•
•
•
•
Tire sur ses tubes
Essaie de s’asseoir dans son lit
Bouge constamment
Ne collabore pas
Repousse le personnel
Tente de passer les ridelles du lit
Mouvements corporels
Tension musculaire (évaluation par exion et extension passives des membres supérieurs au repos ou évaluation pendant la mobilisation)
Détendue
0
• Absence de résistance aux mouvements, tonus normal
Tendue, rigide ou crispée
1
• Résistance aux mouvements
Très tendue, rigide ou crispée
2
• Difculté ou incapacité à réaliser les mouvements Serre les poings
Interactions avec le respirateur (personne sous ventilation mécanique)
Tolère la ventilation ou les mouvements
0
• Alarmes non actives, se laisse ventiler
Tousse, mais tolère la ventilation
1
• Tousse, mais se laisse ventiler ; alarmes peuvent s’activer, mais cessent spontanément
Combat la ventilation
2
• Asynchronie : bloque sa respiration, déclenche constamment les alarmes
Émissions de sons (personne sans ventilation mécanique)
S’exprime normalement ou demeure silencieuse
0
• S’exprime normalement ou demeure silencieuse
Gémit, soupire
1
• Gémit, soupire
Crie, pleure
2
• Crie, pleure
Source : Traduit et adapté de Gélinas, Fillion, Puntillo et collab. (2006). Validation de Critical-Care Pain Observation Tool in adult patients. Am J Crit Care,
15 (4), 420-427.
224
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
relation entre l’intensité des comportements et
l’autoévaluation du degré de douleur, il faut interpréter les scores de comportements avec prudence.
Par exemple, un score de 6 sur 8 à l’aide du CPOT
ne correspond pas nécessairement à un résultat de
7,5 sur 10 à l’aide d’une échelle numérique graduée
de 0 à 10. De plus, il est important que l’inrmière
connaisse les comportements de la personne lorsqu’elle est au repos et lorsqu’elle se trouve exposée
à des procédures nociceptives ou douloureuses
an de détecter tout changement de comportements pouvant indiquer la présence de douleur
(Herr et collab., 2006). Des instructions concernant
l’utilisation du CPOT sont données dans
l’ENCADRÉ 10.1.
Indicateurs physiologiques
de la douleur aiguë
La douleur aiguë représente une source de stress
pouvant déclencher la réponse biologique qui y est
associée (McCance et Huether, 2006). En présence
de douleur aiguë, le système nerveux sympathique
est généralement activé. La noradrénaline et l’adrénaline sont alors libérées, ce qui a pour effet d’agir
sur les signes vitaux et de faire augmenter la pression artérielle, la fréquence cardiaque et la fréquence respiratoire. La diaphorèse et la dilatation
pupillaire sont d’autres signes que l’inrmière peut
observer au moment de l’activation du système
nerveux sympathique. Lorsque la douleur persiste
ou si elle se situe à la vessie ou aux intestins, par
exemple, il est possible que le système nerveux
parasympathique soit activé. Les valeurs des signes
vitaux vont alors diminuer plutôt qu’augmenter.
ENCADRÉ 10.1
Ainsi, l’absence de signes découlant de l’activation
du système nerveux sympathique ne signie pas
nécessairement la non-présence de douleur (Gélinas
et collab., 2005). Par ailleurs, la validité de tels indicateurs relativement à la douleur n’a pas été établie
chez la clientèle adulte, d’où l’incitation à la prudence quant à leur utilisation dans un contexte
d’évaluation de la douleur (Tousignant-Laamme,
Rainville, et Marchand, 2005). Les experts soutiennent que les indicateurs physiologiques, soit
les signes vitaux, devraient être considérés uniquement à titre d’indices de douleur aiguë puisque de
nombreux autres facteurs peuvent les inuencer
(Herr et collab., 2006).
Indicateurs comportementaux
de la douleur chronique
Les personnes atteintes de douleur chronique
peuvent vivre avec ce problème pendant des mois,
des années, voire toute leur vie. Dans un contexte
de douleur chronique, la personne développe des
mécanismes d’adaptation, ce qui fait en sorte que
les comportements de douleur aiguë décrits précédemment font place à d’autres types de manifestations. Parmi celles-ci gurent la fatigue, les
troubles du sommeil, l’anxiété, les changements
d’humeur, la dépression, les troubles de l’appétit,
une mobilisation restreinte, une limitation dans
les activités de la vie quotidienne, des difcultés
de couple, une diminution des contacts sociaux et
des loisirs (Gélinas et Bourgault, 2007). Ces modications de comportement doivent être détectées,
car elles peuvent nuire à l’autonomie et à la qualité
de vie.
10
Instructions concernant l’utilisation du Critical-Care Pain Observation
Tool (CPOT)
1. Observer la personne au repos pendant une minute an
d’obtenir une valeur de référence sur le CPOT.
2. Observer ensuite la personne au cours de procédures
nociceptives ou douloureuses (p. ex., la mobilisation, un
changement de pansement) an de détecter tout changement de comportement pouvant indiquer la présence de
douleur.
3. Observer la personne à la suite de l’administration d’un
agent analgésique (avant son administration et au pic
d’action) an d’évaluer l’efcacité du traitement pour le
soulagement de la douleur.
4. Attribuer à la personne le score le plus élevé observé sur
le CPOT pendant la période d’observation. À titre
d’exemple, pour l’expression faciale, une personne qui
grimace seulement quelques secondes durant la période
d’observation se verra attribuer le score de 2 pour cet
indicateur.
5. Attribuer un score à la personne pour chacun des indicateurs de la grille. Au cours de l’évaluation au repos, évaluer la tension musculaire en dernier lieu, car la simple
stimulation des mouvements passifs (exion et extension
du membre supérieur) peut déclencher des réactions.
Cependant, à l’évaluation de la personne pendant la
mobilisation, l’inrmière participant à la manœuvre peut
facilement détecter la tension musculaire lorsqu’elle
tourne la personne sur le côté et lui attribuer le score
approprié.
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
225
Particularités liées au développement
Nourrissons et enfants
Antalgique : Propre à
diminuer la douleur.
Figure 10.1W, EVENDOL
Encadré 10.1W, Instructions
concernant l’utilisation de
l’EVENDOL.
L’échelle EVENDOL est pré­
sentée au www.pediadol.org.
De nombreux outils efcaces
de l’évaluation de la douleur
chez l’enfant s’y retrouvent
également.
30
Dans le chapitre 30, Évaluation fonctionnelle de la personne âgée, le tableau 30.4
présente une codication
de l’Échelle comportemen­
tale de la douleur de la
personne âgée.
Tableau 10.1W, Face Legs
Activity Cry Consolability
(FLACC)
226
Partie 2
La recherche portant sur la douleur chez les nourrissons a surtout été orientée vers la douleur aiguë au
cours de procédures nociceptives. Plus de 35 instruments d’évaluation de la douleur chez le nourrisson,
la majorité de nature multidimensionnelle (indicateurs comportementaux et physiologiques), ont été
relevés dans la littérature (Duhn et Medves, 2004).
Bien que la mise au point d’instruments multidimensionnels soit répandue dans le cadre de l’évaluation
de la douleur chez le nourrisson, les signes physiologiques ne peuvent être utilisés de façon exclusive
pour conclure à la présence ou à l’absence de douleur puisqu’ils peuvent être inuencés par d’autres
facteurs tels que le stress, certains médicaments et
des changements de l’équilibre hydrique (Herr et
collab., 2006). Ainsi, les variations dans les signes
physiologiques doivent constituer des signaux
d’alarme pour mener à une évaluation plus approfondie de la douleur (Foster, 2001). Parmi les indicateurs comportementaux de la douleur, les
changements de l’expression faciale (p. ex., un froncement des sourcils, des yeux fermés serrés, la présence du sillon nasolabial) constituent les indices
les plus ables et révélateurs de la présence de douleur (Stevens, McGrath, Gibbins et collab., 2007). Le
type de pleurs, des changements dans le tempérament et le niveau d’activité du nourrisson sont
d’autres indices pouvant indiquer la présence de
douleur.
Le Premature Infant Pain Profile (PIPP)
(Stevens, Johnson, Petryshen et collab., 1996) est
un instrument d’évaluation de la douleur dont les
qualités psychométriques ont été les plus documentées auprès des nourrissons prématurés et à
terme (Duhn et Medves, 2004). Le PIPP comprend
des indicateurs comportementaux et physiologiques. L’inrmière documente d’abord les valeurs
de base de la fréquence cardiaque et de la saturation en oxygène du nourrisson ; elle observe celuici pendant les 30 secondes suivant la procédure
douloureuse. Elle attribue ensuite un score correspondant aux changements physiologiques et à
l’expression du visage de l’enfant.
Le Face Legs Activity Cry Consolability (FLACC)
(Merkel, Voepel-Lewis, Shayevitz, et collab., 1997 ;
Nilsson, Finnström et Kokinsky, 2008) est une
échelle reconnue internationalement et validée
pour mesurer la douleur postopératoire chez l’enfant âgé de 2 mois à 7 ans et la douleur associée
aux soins chez les enfants de 5 à 16 ans. Le FLACC
inclut cinq éléments comportementaux simples
concernant le visage, les jambes, l’activité, les cris
et la consolabilité, dont le score total varie de 0
à 10
. Les auteurs de cette échelle n’ont pas
Connaissances préalables à l’examen clinique
déni de seuil de prescription (celui où un analgésique est recommandé), mais le seuil de 3/10
utilisé pour les échelles de 0 à 10 est généralement
appliqué.
L’EVENDOL, une récente échelle conçue et validée en français, est de plus en plus utilisée pour
évaluer la douleur de l’enfant âgé de moins de sept
ans aux urgences et dans les services de pédiatrie
médicale ou chirurgicale francophones (FournierCharrière, Tourniaire, Carbajal et collab., 2012). Il
s’agit d’une échelle composée de cinq éléments
comportementaux simples qui permettent d’évaluer : 1) l’expression vocale ou verbale (pleurs, cris,
gémissements) ; 2) la mimique de douleur (front
plissé, sourcils froncés, bouche crispée) ; 3) les
mouvements (agitation, raideur) ; 4) les positions
(attitude inhabituelle ou antalgique, protection,
immobilité) ; 5) la relation avec l’environnement
(possibilité de consolation, intérêt pour les jeux,
communication avec l’entourage)
. Pour remplir
cette échelle, deux temps d’observation sont nécessaires : en dehors de tout soin ou approche anxiogène et au cours de l’examen ou de la mobilisation
de la zone présumée douloureuse. La cotation de
ces éléments permet l’obtention d’un score variant
de 0 à 15, où le seuil de prescription d’un analgésique est établi à 4/15
.
Adultes vieillissants
Plusieurs conditions associées à la douleur (p. ex.,
l’arthrose, l’ostéoporose, le cancer, l’angine) sont
présentes chez les aînés. Il n’est donc pas surprenant de constater que plus de 50 % des personnes
âgées résidant en milieu d’hébergement et en centre
hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) ressentent de la douleur sur une base hebdomadaire,
dont 25 % quotidiennement (Proctor et Hirdes,
2001). Cette douleur chronique se répercute sur le
fonctionnement et sur la qualité de vie de ces personnes (p. ex., une dépression, l’isolement social,
des troubles du sommeil, une perte d’autonomie)
(American Geriatrics Society, 2002).
Puisque près des deux tiers des personnes âgées
résidant en CHSLD ont un diagnostic de démence,
et que près de la moitié présente une perte d’autonomie fonctionnelle ou des décits cognitifs, la
communication verbale devient difcile (Fox, Raina
et Jadad, 1999). Cette réalité fait en sorte que l’évaluation de la douleur représente un dé clinique
important. De plus, peu d’outils valides sont disponibles pour utilisation auprès des personnes âgées
atteintes de démence ou de déficits cognitifs
majeurs. Cela contribue, entre autres, à la sous-détection et au traitement inadéquat de la douleur
chez cette clientèle
30 .
Bien qu’il existe des instruments d’évaluation
de la douleur, la plupart de nature comportementale, pour les aînés atteints de démence et
incapables d’exprimer verbalement la douleur, leur
processus de validation demeure incomplet. Une
évaluation systématique des instruments disponibles a été réalisée (Aubin et collab., 2007). Un
total de 24 instruments ont été analysés quant à leur
abilité (test-retest, interjuges) et à leur validité
(contenu, construit). Seulement six de ces instruments sont offerts en français. Les instruments
recommandés par les experts et ayant présenté les
résultats de validation les plus avancés sont le Pain
Assessment Checklist for Seniors with Limited
Ability to Communicate (PACSLAC) (Fuchs-Lacelle
et Hadjistavropoulos, 2004), le Abbey Pain
Scale (Abbey, Piller, De Bellis et collab., 2004) et le
DOLOPLUS 2 (Wary et Serbouti, 2001).
La version française du PACSLAC a été validée
il y a quelques années (Aubin, Verreault, Savoie et
collab., 2008) FIGURE 10.8. Cet instrument comprend quatre composantes (expressions faciales,
activités et mouvements corporels, comportement/
personnalité/humeur, autres) pour un total de 60
énoncés. Des scores peuvent être calculés pour
10
FIGURE 10.8
Grille d’observation de la douleur pour les personnes âgées non communicantes (Pain Assessment Checklist for Seniors with
Limited Ability to Communicate) (PACSLAC)
Source : Aubin, Verreault, Savoie et collab. (2008)
Les droits d’auteur du PACSLAC-F sont détenus par Sylvie LeMay, Maryse Savoie, Shannon Fuchs-Lacelle, Thomas Hadjistavropoulos
et Michèle Aubin. Le PACSLAC-F est reproduit ici avec leur permission. Pour obtenir la permission d’utiliser le PACSLAC-F, veuillez
joindre Michèle Aubin (michele.aubin@mfa.ulaval.ca) ou Thomas Hadjistavropoulos (thomas.hadjistavropoulos@uregina.ca).
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
227
chacune des composantes, et un score global peut
aussi être obtenu. L’utilisation répétée et systématique du PACSLAC permet de déterminer les indicateurs propres à chaque personne et de reconnaître
les épisodes d’exacerbation de la douleur. En effet,
le PACSLAC permettrait de distinguer les situations de douleur, de détresse psychologique et de
calme chez les sujets (Fuchs-Lacelle et collab.,
2004).
10.4 Anomalies pour une pratique avancée
L’ENCADRÉ 10.2 traite un trouble qui touche les nerfs périphériques.
ENCADRÉ 10.2
Neuropathie périphérique
La neuropathie périphérique est une atteinte des nerfs périphériques (des pieds
ou des mains) provoquant de la douleur sans stimulation préalable des nerfs. Il
s’agit d’une douleur neuropathique fréquente caractérisée par des engourdissements et des fourmillements, entremêlés de douleurs fulgurantes ou lancinantes
non attribuables à une source nociceptive précise (Hannersla et Kapustin, 2012).
La neuropathie diabétique est une complication fréquente du diabète, et elle
peut être liée à une démyélinisation de gros nerfs périphériques, accompagnée
d’une augmentation des petits nerfs myélinisés. L’atteinte ischémique des nerfs
ou l’hyperglycémie sont d’autres étiologies qui entraînent des modications du
microenvironnement des nerfs (Copstead et Banasik, 2013). Le client ressent une
douleur cuisante dans les deux pieds, qui s’intensie souvent pendant la nuit.
10.4.1
La neuropathie périphérique induite par la chimiothérapie apparaît à la suite
d’une chimiothérapie anticancéreuse. Les risques augmentent avec le
nombre d’agents utilisés pendant la série de traitements, les doses cumulatives plus élevées d’agents neurotoxiques, la présence d’une neuropathie
causée par le diabète ou d’autres causes, ainsi qu’avec l’âge (Davies, 2013 ;
Hannersla et Kapustin, 2012). L’un des symptômes est un engourdissement
ou une douleur fulgurante et cuisante dans les extrémités. Il faut noter que
dans le cas de tout survivant du cancer, l’inrmière doit agir rapidement s’il y
a une nouvelle apparition de la douleur pour écarter la possibilité d’une réci dive pathologique du cancer, car c’est ce que les survivants craignent le plus
(Davies, 2013).
Syndrome de douleur
régionale complexe
L’appellation de syndrome de douleur régionale
complexe (SDRC) est utilisée pour décrire une variété de troubles caractérisés par une douleur disproportionnée en durée et en intensité par rapport
à l’événement déclencheur. D’autres signes et symptômes tels que de l’œdème, de la sudation, de la
rougeur ou une diminution de la fonction motrice
du membre peuvent être observés. Ce syndrome
touche davantage les personnes âgées entre 40 et
60 ans, et les femmes en sont plus fréquemment
atteintes. Il existe deux types de SDRC (type I et
type II) où la physiopathologie peut être diversiée
(p. ex., une inammation, un dérèglement du système nerveux sympathique, une modication du
SNC). Dans environ 90 % des cas, ce syndrome se
caractérise par une douleur de type neurogène invalidante qui ne se limite pas à un dermatome et qui
apparaît généralement à la suite d’un traumatisme
physique mineur ou modéré (type I). Les autres cas
seraient attribuables à une lésion nerveuse (type II)
(Maihofner, Seifert et Markovic, 2010 ; Marinus,
Moseley, Birklein, et collab., 2011).
Ce syndrome peut occasionner de l’allodynie,
c’est-à-dire qu’un stimulus non nociceptif tel que
le simple efeurement d’un coton-tige ou le contact
de la peau avec les vêtements déclenche une douleur. À l’examen physique, l’inrmière peut observer la présence d’œdème, une rougeur, des
phlyctènes, une décoloration, un assèchement et
une température froide de la peau, des ongles se
cassant facilement et une atrophie musculaire. Le
traitement n’est pas discuté en détail dans ce chapitre. Celui-ci inclut initialement la prise de médicaments pour diminuer les symptômes ; de la
physiothérapie peut être ajoutée an de récupérer
une certaine force musculaire des membres.
Évaluation et jugement clinique
Exemple de notes au dossier
Données subjectives
Indique que la douleur a débuté au cours des deux dernières
semaines. Afrme que sa douleur est épigastrique et qu’elle est
apparue environ 30 minutes après avoir mangé un repas riche
228
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
en gras saturés. Précise que la douleur prend la forme de coups
de couteau et de serrement, et qu’elle irradie à l’épaule droite.
Évalue son degré de douleur sur une échelle à 10/10. A également
des nausées et précise avoir pris des antiacides, ce qui lui a
procuré un soulagement minimal. Dit que la douleur diminue
lorsque immobile et que les genoux sont pliés contre sa
poitrine.
Données objectives
• Diaphorèse, faciès grimaçant et difculté à se
concentrer.
• Dyspnée pendant l’entrevue.
• Bras maintenus sur la région supérieure de l’abdomen. Celui-ci est distendu et présente une
sensibilité importante dans la région épigastrique
et dans le quadrant supérieur gauche à la palpation légère. Bruits intestinaux hyperactifs dans
les quatre quadrants abdominaux.
Évaluation
Événement épisodique de douleur aiguë.
au genou droit. Douleur constante, intensité 10/10.
Difficulté à marcher et à monter les escaliers.
Ibuprofène 400 mg q.4 h et application de glace :
aucun soulagement. Rapporte une indigestion avec
vomissements et diarrhée une semaine avant l’apparition de sa douleur.
Données objectives
• Aide pour s’asseoir sur la table d’examen,
aucune mise en charge sur sa jambe droite.
Grimace et serre la mâchoire aux changements
de position.
• Sensibilité à la palpation des articulations des
coudes, des poignets, des doigts et des genoux.
Exemple d’évaluation ciblée
Raoul M. est un homme d’origine africaine âgé de
20 ans aux prises avec un épisode aigu de drépanocytose (crise drépanocytaire). Il vient d’être
admis à l’urgence d’un centre hospitalier.
Données subjectives
Douleur articulaire aux membres supérieurs et inférieurs qui augmente depuis 48 heures avec œdème
• Amplitude des mouvements diminuée aux poignets et aux genoux.
• Genou droit chaud au toucher et œdème observé.
Circonférence articulaire genou gauche : 39 cm
et genou droit : 42 cm.
10
Évaluation
Douleur aiguë.
Dossier : Mikael Pinsonneault (suite)
Vous observez le genou droit de Mikael. En défaisant le bandage, vous enlevez le sac de glace et
vous examinez la peau dans la région où se trouvait celui-ci. Elle est rouge, froide et présente un
cercle blanc d’environ 1 cm de diamètre sur la face
interne. Mikael vous dit qu’il a laissé le sac de
glace en place pendant environ 45 minutes dans
la salle d’attente. Il dit ressentir une sensation de
fourmillement où était la glace. La douleur est
stable au repos, mais augmentée lorsque vous bougez sa jambe ou qu’il la remue lui-même. Il est
incapable de marcher en raison de la douleur.
1. Quelle recommandation allez-vous lui faire concernant l’application de glace ?
2. Étant donné que Mikael a fait une chute à la suite de sa collision avec deux autres joueurs, formulez
deux autres questions pertinentes à lui poser.
(suite)
Vous observez le genou de Mikael ; voici ce que vous voyez.
Vous remarquez une diminution de la mobilité de l’articulation et vous n’entendez pas de craquements à la mobilisation passive.
3. Consignez vos observations au dossier (données objectives).
Que retenez-vous ?
Pour en savoir davantage, consultez
.
1. Dans l’évaluation de la douleur, que signie
chacune des lettres de l’acronyme PQRSTU ?
2. Pourquoi l’évaluation de la douleur devrait-elle
toujours être suivie de l’évaluation de un ou de
plusieurs autres systèmes du corps ?
4. Dans le cas de personnes âgées non communicantes,
quels outils pouvez-vous utiliser an d’évaluer la
douleur ?
3. Auprès d’un nourrisson et de jeunes enfants, quels
moyens pouvez-vous utiliser pour évaluer la douleur ?
Chapitre 10
Évaluation de la douleur : autre signe vital
229
Dossier : Antoine Savard
Antoine Savard, âgé de 84 ans, vit dans une
résidence pour personnes retraitées semiautonomes. Il est veuf depuis deux ans. En temps
normal, il se déplace de façon autonome avec
un déambulateur ; il pouvait effectuer ses activités de la vie quotidienne jusqu’à ce qu’il se présente au centre hospitalier en raison d’une
douleur dorsale importante qui l’empêche de se
déplacer depuis deux jours.
Il compte quelques antécédents médicaux,
dont un infarctus du myocarde survenu il y a
10 ans. À la suite de son infarctus, il a subi
l’implantation d’un cardiostimulateur débrillateur en raison d’accès de tachycardie ventriculaire et d’une brillation auriculaire avec
réponse ventriculaire rapide.
Il y a sept ans, il a été victime d’un AVC dont
il n’a gardé aucune séquelle ; il présente aussi
une hyperplasie bénigne de la prostate diagnostiquée il y a quatre ans en même temps qu’une
leucémie lymphoïde chronique.
Lorsque vous lui demandez à quel endroit
précisément il ressent de la douleur, il place sa
main à la hauteur de la dernière côte ottante.
Les examens radiologiques et la résonnance
magnétique ont démontré que monsieur Savard
est atteint d’arthrose importante au niveau
cervical et lombaire. Il mesure 180 cm et il pèse
59 kg actuellement, alors que son poids habituel
est de 65 kg. Vous remarquez qu’il est amaigri
et frêle.
11
11.1
Dénition de l’état
nutritionnel
L’état nutritionnel de la personne fait référence au
degré d’équilibre entre l’apport en nutriments dans
l’organisme et les besoins en nutriments de celui-ci,
ainsi qu’à la capacité de l’organisme à les digérer,
à les absorber et à les utiliser dans une situation de
santé normale ou en présence d’une maladie aiguë
ou chronique. Les facteurs physiologiques, psychologiques, développementaux, socioculturels et économiques peuvent inuer sur le maintien optimal
de l’état nutritionnel.
L’état nutritionnel optimal est atteint lorsque
sufsamment de nutriments sont consommés an
de répondre aux différents besoins quotidiens de
l’organisme, autant dans les périodes de croissance
que pendant la grossesse ou la maladie. Il est toutefois possible que l’état de santé de la personne
nuise à l’absorption des éléments nutritifs ou à leur
utilisation par l’organisme, malgré un apport optimal. Par exemple, une personne dont tous les
besoins quotidiens en macronutriments et en
micronutriments sont satisfaits peut se trouver dans
un état nutritionnel décient si elle souffre d’une
maladie inammatoire chronique ou si une condition médicale particulière nuit à leur absorption ou
à leur utilisation par l’organisme. Un état nutritionnel optimal représente un signe de bonne santé. Il
est question de malnutrition lorsque l’apport en
éléments nutritifs est insufsant pour répondre aux
besoins alimentaires quotidiens ou aux demandes
métaboliques supplémentaires.
En 2010, l’International Consensus Guideline
Commitee a proposé des lignes directrices pour
établir une nouvelle terminologie internationale
an de classier les types de malnutrition selon
l’étiologie de cette dernière, et non à partir de
la présentation clinique. Jensen et ses collaborateurs ont suggéré trois types de malnutrition
à partir de ces lignes directrices (Jensen,
Compher, Sullivan et collab., 2013 ; Jensen, Hsiao
et Wheeler, 2012 ; Jensen, Mirtallo, Compher et
collab., 2010) :
1) la malnutrition dans un contexte de maladie
aiguë (p. ex., un trauma craniocérébral, une situation de soins critiques, une pancréatite, une
sepsie, une chirurgie abdominale importante) ;
2) la malnutrition dans un contexte de maladie
chronique (p. ex., une maladie cardiovasculaire,
la brose kystique, des troubles neurocognitifs,
le diabète, des lésions de pression, une maladie
pulmonaire obstructive chronique, une insufsance cardiaque) ;
3) la malnutrition dans un contexte d’apports
insufsants.
Plusieurs étapes doivent être franchies avant
d’établir un diagnostic de malnutrition. Une fois
le dépistage du risque de malnutrition effectué
par l’inrmière (qui indiquera, par exemple, que
le client a perdu du poids ou que ses apports
alimentaires sont à la baisse), la nutritionniste
clinicienne ou le médecin traitant doit d’abord
statuer sur le degré d’inammation dont la personne est atteinte : inammation marquée (maladie aiguë), inflammation modérée (maladie
Chapitre 11
Q
uestion de suivi
À partir des données dont
vous disposez dans la situation de monsieur Savard, de
quel type de malnutrition
pourrait-il souffrir ?
Macronutriments :
Regroupent les glucides
(ou sucres), les lipides (ou
graisses) et les protéines
(ou protides). Ce sont des
nutriments qui apportent
de l’énergie.
Micronutriments:
Regroupent les vitamines,
les minéraux et les oligoéléments. Ils sont actifs
à de très faibles doses.
Malnutrition : Apport
insufsant, excessif ou
déséquilibré en calories,
en protéines et en d’autres
nutriments.
Évaluation nutritionnelle
231
chronique) ou absence d’inammation (apports
insufsants) (Malone et Hamilton, 2010). Par
la suite, six critères sont à considérer an d’évaluer la sévérité de la malnutrition : 1) un apport
en énergie insufsant ; 2) une perte pondérale ;
3) la perte de masse adipeuse sous-cutanée ; 4) la
perte de masse musculaire ; 5) l’accumulation
de uides ; 6) le statut fonctionnel réduit (White,
Guenter, Jensen et collab., 2012). La présence
de deux de ces six critères est recommandée pour
le diagnostic de malnutrition TABLEAU 11.1. Le
rôle de l’inrmière s’avère primordial puisque
c’est souvent elle qui effectue le dépistage des
personnes à risque de malnutrition.
Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition)
TABLEAU 11.1
MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE
DE MALADIE AIGUË
MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE
DE MALADIE CHRONIQUEa
MALNUTRITION DANS UN CONTEXTE
D’APPORTS INSUFFISANTS
Inammation
Marquée
Légère à modérée
Absente
Caractéristiques
cliniques
Non grave
(modérée)
Grave
Non grave
(modérée)
Grave
Non grave
(modérée)
Grave
Apport
énergétique
< 75 % des besoins
pour > 7 jours
≤ 50 % des besoins
pour ≥ 5 jours
< 75 % des besoins
pour ≥ 1 mois
≤ 75 % des besoins
pour ≥ 1 mois
< 75 % des besoins
pour ≥ 3 mois
≤ 50 % des besoins
pour ≥ 1 mois
Perte de poids
• 1-2 % en 1 sem.
• > 2 % en 1 sem.
• 5 % en 1 mois
• > 5 % en 1 mois
• 7,5 % en 3 mois
• > 7,5 % en 3 mois
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Fonte de masse
adipeuse souscutanée
Légère
Modérée
Légère
Sévère
Légère
Sévère
Fonte de masse
musculaire
Légère
Modérée
Légère
Sévère
Légère
Sévère
Accumulation de
uide (généralisée
ou localisée :
extrémités [MI,
MS]b, vulvaire,
scrotal, ascite
Légère
Modérée à sévère
Légère
Sévère
Légère
Sévère
Force de
préhension
N/A
Réduite
signicativement
N/A
Réduite
signicativement
N/A
Réduite
signicativement
5 % en 1 mois
7,5 % en 3 mois
10 % en 6 mois
20 % en 1 an
> 5 % en 1 mois
> 7,5 % en ≈ 3 mois
> 10 % en 6 mois
> 20 % en 1 an
5 % en 1 mois
7,5 % en 3 mois
10 % en 6 mois
20 % en 1 an
> 5 % en 1 mois
> 7,5 % en 3 mois
> 10 % en 6 mois
> 20 % en 1 an
• Les protéines sériques, comme l’albumine et la transthyrétine, ne sont pas incluses dans les caractéristiques qui dénissent la malnutrition parce que les
données récentes démontrent que les taux sériques de ces protéines ne varient pas en réponse aux changements dans l’apport en nutriments.
• Un minimum de deux des six caractéristiques est recommandé pour diagnostiquer la malnutrition.
232
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
TABLEAU 11.1
Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition) (suite)
ÉVALUATION NUTRITIONNELLE - EXAMEN DES RÉSERVES ADIPEUSES ET MUSCULAIRES, AINSI QUE DE L’ŒDÈME
Régions à évaluer
Conseils pratiques
Malnutrition grave
Malnutrition non grave
Client bien nourri
Région orbitale –
entourant l’œil
Observer le client en se tenant
directement devant lui au-dessus
de l’os de la joue.
Apparence creuse, dépressions, cernes foncés, peau
lâche
Cernes foncés légers,
apparence légèrement
creusée
Coussinets adipeux
légèrement bombés.
Attention : la rétention
liquidienne pourrait
masquer la fonte
adipeuse.
Région supérieure du bras –
triceps/biceps
Rouler la peau entre les doigts,
sans pincer le muscle. Le bras
du client doit être légèrement
plié.
Peu d’espace entre les
plis, les doigts se touchent
Certaine épaisseur du pli, les
doigts ne se touchent pas
Tissu adipeux évident
entre les plis de la peau
Région thoracique et
lombaire – côtes, bas du
dos, ligne axillaire médiane
Demander au client de peser
avec force sur un objet solide.
Dépression entre les côtes
très apparente ; crête iliaque
très proéminente
Côtes apparentes, mais
dépression moins prononcée ;
crête iliaque légèrement
proéminente
La poitrine est remplie,
les côtes ne sont pas
apparentes ; saillie très
légère à absente de la
crête iliaque.
Région temporale – muscle
temporal
Observer le client en se tenant
directement devant lui. Lui
demander de tourner la tête d’un
côté et de l’autre au besoin.
Apparence creuse,
dépression.
Dépression légère
Muscle bien défini,
visible, palpable
Région claviculaire – grand
pectoral, deltoïdes,
trapèzes
Vérifier la présence d’os
proéminents. S’assurer que le
client n’est pas courbé vers
l’avant.
Os (clavicule) proéminent,
en saillie ; dépression
importante du deltoïde
Clavicule visible chez l’homme,
saillie légère chez la femme ;
dépression légère du deltoïde.
Clavicule non visible chez
l’homme, visible mais
non proéminente chez
la femme
Région claviculaire et
acromiale – muscles
deltoïdes
Observer la forme des épaules
alors que les bras du client sont
de chaque côté du corps.
Allure carrée des épaules,
os proéminents ; saillie
importante de l’acromion
Acromion peut être légèrement en saillie
Épaule arrondie,
jonction cou-épaules et
épaules-bras arrondie
Région scapulaire –
trapèzes, muscles infraet sus-épineux
Demander au client d’étendre les
bras vers l’avant et de pousser
contre le mur ou un objet solide.
Os visibles et proéminents,
dépression entre les côtes
et l’omoplate ou entre
l’épaule et la colonne
vertébrale
Dépression légère ou os
légèrement visibles
Os non proéminents,
absence de dépression
signicative
Région dorsale de la main –
muscles interosseux
Regarder la main du côté du
pouce en demandant au client
de joindre l’extrémité du pouce
et de l’index.
Région creuse entre le
pouce et l’index
Dépression légère entre le
pouce et l’index
Muscle bombé, mais
pourrait être plat chez
certaines personnes
bien nourries
Région patellaire –
quadriceps
Demander au client de s’asseoir
avec la jambe pliée et légèrement surélevée sur un meuble
bas.
Os proéminents, peu de
signes de muscle autour
du genou
Rotule moins proéminente,
plus ronde
Muscles en saillie, os
non proéminents
Réserves adipeuses
Réserves musculaires
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
233
11
Caractéristiques recommandées pour reconnaître et documenter la malnutrition (dénutrition) (suite)
TABLEAU 11.1
Régions à évaluer
Conseils pratiques
Malnutrition grave
Malnutrition non grave
Client bien nourri
Région antérieure de la
cuisse – quadriceps
Demander au client de s’asseoir
avec la jambe pliée et surélevée
sur un meuble bas ; palper le
quadriceps pour différencier la
masse musculaire de la masse
adipeuse.
Dépression/ligne sur la
cuisse, allure franchement
amaigrie ; cuisse parfois
plus étroite que le genou
Dépression légère de la partie interne de la cuisse
Cuisse bien arrondie,
bien développée
Région du mollet postérieur
– muscles jumeaux
Palper les muscles jumeaux pour
déterminer la quantité de tissus.
Mollet mince, muscle très
peu ou pas déni
Muscle peu développé
Muscle bien développé,
arrondi (bulbe)
Œdème
1+
Dépression de 2 mm, difcilement détectable. Rebond immédiat.
2+
Dépression de 4 mm. Rebond de quelques secondes.
3+
Dépression de 6 mm. Rebond de 10-12 secondes.
4+
Dépression de 8 mm, très profonde. Rebond > 20 secondes.
Note : Les trouvailles à l’examen physique doivent être bilatérales pour être causées par la malnutrition. De plus, il faut exclure les fontes musculaires liées à des
décits neurologiques, à des handicaps physiques ou à l’alitement. Attention aux conditions qui peuvent inuencer des résultats de l’examen physique (p. ex., une
scoliose peut faire ressortir la clavicule malgré l’absence de fonte musculaire).
a
The National Center for Health dénit « chronique » comme une maladie ou une condition qui dure trois mois et plus.
MI : membres inférieurs ; MS : membres supérieurs.
Source : Adapté de Academy of Nutrition and Dietetics and American Society for Parenteral and Enteral Nutrition (2012). Characteristics Recommended for identication and Documentation
of Adult Malnutrition (Undernutrition) © 2012 American Society for Parental and Enteral Nutrition and the Academy of Nutrition and Dietetics. Publié par Elsevier Inc. Tous droits réservés.
b
La malnutrition englobe la dénutrition, à savoir
un apport insufsant en énergie, en protéines et en
d’autres nutriments. La dénutrition a des conséquences sur les tissus de l’organisme, sur les capacités fonctionnelles de la personne atteinte et sur
sa santé en général. Chez les clients hospitalisés,
elle s’accompagne souvent d’affections, d’infections
et de maladies aiguës qui causent de l’inammation. Ces complications aggravent l’état de dénutrition et peuvent rendre plus difcile la gestion du
problème ; en outre, une diminution de l’appétit
entraîne des changements physiologiques importants et une augmentation des besoins nutritionnels
(Groupe de travail canadien sur la malnutrition
[GTCM], 2013).
Les groupes de personnes suivants sont plus à
risque de malnutrition : les nourrissons, les enfants,
les femmes enceintes, les nouveaux immigrants, les
personnes à faible revenu, les personnes hospitalisées et les personnes âgées. Ces groupes de personnes sont exposés à différents risques, comme
des problèmes de croissance et de développement,
une baisse de la résistance aux infections et à la
maladie, une mauvaise cicatrisation ou un retard
de celle-ci, une hospitalisation plus longue et des
frais accrus liés aux soins de santé.
Lorsque la consommation en nutriments d’une
personne dépasse les besoins de son organisme,
234
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
le risque de souffrir d’embonpoint ou d’obésité est
accru. L’obésité demeure un important facteur de
risque pour les cardiopathies, l’hypertension artérielle (HTA), le diabète de type 2, les AVC, les
lithiases biliaires, l’apnée du sommeil, certains
cancers et l’ostéoarthrite (National Heart, Lung,
and Blood Institute [NHLBI], 2006). Les dernières
données populationnelles portant sur l’obésité
au Canada datent de 2004, lorsqu’a été effectuée
l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. Santé Canada estime que 18 % des adolescents âgés de 12 à 17 ans (soit environ
1,1 million de jeunes) souffrent d’embonpoint et
que 8 % de ces adolescents (soit environ un demimillion de jeunes) et 23,1 % des adultes sont
obèses au Canada (Statistique Canada, 2014). Pour
l’enfant, un surplus pondéral se dénit comme un
indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur
au 95e centile en fonction de l’âge et du sexe. Il
est important de prendre en considération un
excès pondéral pendant l’enfance ou l’adolescence, car il est associé à un risque accru d’obésité
à l’âge adulte (NHLBI, 2006). Pour les adultes, un
surplus pondéral se dénit comme un IMC égal
ou supérieur à 25, et l’obésité se dénit comme un
IMC égal ou supérieur à 30 (Centers for Disease
Control and Prevention, 2006). Plus de 1 adulte
canadien sur 4 (les estimations varient de 24,3 %
à 25,4 %) est obèse, selon les données de la taille
et du poids mesurés recueillies de 2007 à 2009
(Agence canadienne de la santé publique [ASPC),
2011) ; ces données sont particulièrement
préoccupantes.
Particularités liées au développement
Nourrissons et enfants
La période de la naissance à l’âge de quatre mois
constitue sans aucun doute celle où la croissance
est la plus rapide dans le cycle de la vie. Bien que
le nourrisson perde du poids au cours des premiers
jours de sa vie, son poids revient à celui de sa naissance vers le septième ou le dixième jour. Vers le
quatrième mois, son poids double, et il triple à l’âge
de un an. L’allaitement exclusif, sans autres liquides
ou aliments, est recommandé pendant les six premiers mois de vie du nourrisson, car le lait maternel
contient des nutriments nécessaires à sa croissance
et à son développement, tout en lui procurant une immunité naturelle. L’allaitement peut ensuite se
poursuivre au moment de l’introduction des solides,
jusqu’à ce que la mère le désire et en soit capable
(Ordre professionnel des diététistes du Québec
[OPDQ], 2012). Les autres avantages de l’allaitement
maternel sont : 1) un risque moins élevé d’allergies
et d’intolérances alimentaires ; 2) une probabilité
réduite de suralimentation ; 3) un coût moins élevé
que les formules commerciales ; 4) une augmentation du temps d’interaction entre la mère et l’enfant.
Il existe peu de contre-indications à l’allaitement
maternel ; cependant, les femmes atteintes du virus
de l’immunodécience humaine ne devraient pas
allaiter, car la femme séropositive peut transmettre
le virus à son enfant par le lait maternel. Pendant
la deuxième année de vie, le gain pondéral du nourrisson devrait égaler le poids de sa naissance.
Le nourrisson grandit d’environ 50 % au cours
de sa première année, et sa taille double à l’âge de
4 ans. Son cerveau se développe également très
rapidement : à l’âge de 2 ans, il atteint 50 % de sa
taille adulte, 75 % à 4 ans et 100 % à 8 ans. Pour
cette raison, les nourrissons et les enfants âgés de
moins de deux ans ne devraient jamais boire de lait
écrémé ou à faible teneur en gras ou encore être
soumis à un régime alimentaire pauvre en gras
puisque les calories et les acides gras sont essentiels au développement du système nerveux
central.
Adolescents
Faisant suite à une période de croissance un peu
plus lente à la n de l’enfance, l’adolescence se
caractérise par une croissance physique rapide. Le
développement endocrinien et les changements
hormonaux s’effectuent. Les besoins caloriques et
protéiques augmentent en raison des demandes
associées à la croissance osseuse et à l’augmentation
de la masse musculaire et, chez la lle, au début des
cycles menstruels. Les exigences en zinc, en fer et
en calcium s’accroissent également, tout comme
celles en vitamines A, D, C et B9 (acide folique)
(Shatenstein et Ghadirian, 1996). Évidemment, avec
une demande de cet ordre, la prise de trois repas
par jour peut être insufsante ; l’ajout de collations
joue donc un rôle important dans l’apport supplémentaire de nutriments nécessaires à l’organisme
de l’adolescent en croissance.
Q
uestion de suivi
Calculez l’IMC de monsieur
Savard. Que signie le
résultat ?
En général, les garçons sont plus grands et plus
minces que les lles. Au cours de l’adolescence, le
gain de masse maigre chez les garçons est de 35 kg,
comparativement à 12 kg pour les lles. Chez elles,
la masse grasse augmentera, puisqu’il faut un minimum de 20 % de graisse pour déclencher la
ménarche. Après la puberté, les femmes auront en
moyenne un pourcentage de masse grasse de 22 à
26 % (Shatenstein et Ghadirian, 1996). Il est à noter
que les lles doublent leur poids entre l’âge de 8 et
14 ans, alors que les garçons doublent le leur entre
l’âge de 10 et 17 ans.
11
Femmes enceintes ou qui allaitent
La femme enceinte requiert un apport nutritif
supplémentaire en calories, en protéines, en vitamines et en minéraux – comme l’acide folique, le
calcium, le fer et la vitamine D – an de faciliter
son adaptation aux changements physiologiques
liés à la grossesse et au développement du fœtus.
Santé Canada recommande un gain pondéral de
12,5 à 18 kg pour les femmes ayant un IMC prégrossesse inférieur à 20, de 11,5 à 16 kg pour celles
ayant un IMC prégrossesse de 20 à 27 et de 7 à
11,5 kg pour les femmes souffrant d’embonpoint
ou d’obésité, dont l’IMC avant la grossesse était
supérieur à 27 (Santé Canada, 2013). La femme
enceinte doit également prendre des précautions
importantes sur le plan de l’hygiène et de la salubrité dans la préparation des repas ainsi que pour
la prise alimentaire. Sa réponse immunitaire étant
modiée, elle est plus à risque de contracter des
toxi-infections alimentaires (Santé Canada, 2015) ;
la toxoplasmose et la listériose sont particulièrement dangereuses pour la femme enceinte (Santé
Canada, 2013).
Adultes
Chez l’adulte en santé, la croissance et les besoins
nutritionnels se stabilisent. Toutefois, le mode de
vie et les facteurs de risque tels que le tabagisme, le
stress, le manque d’exercice, la consommation
excessive d’alcool ainsi que les régimes riches en
gras saturés et en gras trans, en sodium, en sucres
concentrés et pauvres en bres favorisent le développement de l’HTA, de l’obésité, de l’athérosclérose, de néoplasies, de l’ostéoporose et du diabète
de type 2. L’âge adulte est donc une période de la vie
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
235
où l’éducation et la promotion de saines habitudes de vie aident à préserver la santé et à prévenir
ou à retarder l’apparition de maladies chroniques.
Adultes vieillissants
Q
uestion de suivi
Quels sont les facteurs
de risque potentiels de
malnutrition chez monsieur
Savard ?
Ostéomalacie : Défaut de
minéralisation de la matrice
protéique de l’os.
Au l des années, un certain nombre de changements physiologiques se produisent et rendent la
personne âgée susceptible de souffrir de malnutrition. Une santé mentale ou physique déciente,
l’isolement social, l’alcoolisme ou la toxicomanie,
certaines limitations fonctionnelles, la pauvreté et
la polypharmacie sont les principaux facteurs de
risque de malnutrition chez la personne âgée
(Furman, 2006).
Le vieillissement entraîne certains changements
physiologiques qui ont une inuence directe sur
l’état nutritionnel : une diminution de l’appétit, une
satiété précoce, une mauvaise dentition, une baisse
de l’acuité visuelle, une diminution de la production salivaire, un ralentissement de la motilité
intestinale, une réduction de l’absorption de certains micronutriments en raison de l’atrophie
gastrique ainsi qu’une diminution de l’odorat et de
la perception des saveurs. Chez la personne âgée,
une baisse des besoins énergétiques causée par une
perte de masse maigre (de 35 à 45 % de masse musculaire et de 15 à 30 % de masse osseuse), le ralentissement du métabolisme basal et l’augmentation
de la masse adipeuse de 30 % avec redistribution
(Ferland, 1998) sont aussi remarqués.
Les conditions socioéconomiques peuvent aussi
avoir un effet sur l’état nutritionnel de la personne
âgée. La diminution du nombre de membres dans la
famille ou du cercle d’amis et l’augmentation de
la mobilité des familles contribuent à restreindre les
ressources de soutien disponibles. La préparation des
repas, le transport vers les marchés d’alimentation,
les contraintes physiques, le revenu et l’isolement
social sont des sources de difcultés fréquemment
éprouvées qui peuvent de toute évidence nuire à une
saine alimentation. La consommation de médicaments doit aussi être prise en considération, car les
personnes âgées prennent souvent plusieurs médicaments ayant un potentiel d’interaction à la fois
entre eux et avec les nutriments absorbés.
Particularités culturelles et génétiques
Toutes les cultures ont des habitudes alimentaires
différentes qui leur sont propres ; ainsi, chaque personne possède un héritage culturel unique pouvant
inuer sur son état nutritionnel. Les immigrants ont
tendance à maintenir plus longtemps leurs coutumes
alimentaires traditionnelles, même après avoir
adopté la langue, les usages et les habitudes vestimentaires de leur pays d’adoption. La profession, la
236
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
classe sociale, la religion, le sexe et le degré de sensibilisation à de saines habitudes de vie ont une
inuence sur la nutrition des immigrants. Au cours
des dernières décennies, des centaines de milliers
de personnes en provenance de tous les continents
ont émigré vers le Canada et le Québec. Ces personnes adaptent leurs habitudes alimentaires pour
tenir compte de leur nouvelle culture, mais ces
habitudes influencent aussi celles de leur
pays d’adoption. La popularité des tortillas, de la
salsa, des bananes, du riz, du tofu, du pain pita, de
l’humus et du curry est un exemple de cette
influence sur les habitudes alimentaires des
Nord-Américains.
Les nouveaux immigrants peuvent être à risque
de souffrir de problèmes nutritionnels pour plusieurs raisons. Ils peuvent être originaires de pays
pauvres où l’approvisionnement alimentaire s’avère
faible et où l’assainissement de l’eau est absent, ou
de pays en guerre ou aux prises avec des problèmes
d’ordre politique. La malnutrition, l’HTA, l’anémie
ferriprive, les problèmes gastro-intestinaux, l’intolérance au lactose, l’ostéoporose, l’ostéomalacie et
les problèmes de santé buccodentaire font partie
des problématiques les plus communes liées à la
nutrition des nouveaux immigrants.
D’autres facteurs contribuent à augmenter
leurs problèmes nutritionnels. Les immigrants
résident désormais dans un pays où l’on parle
une autre langue, ils doivent s’adapter à une culture différente de la leur et à une nouvelle société.
Ils découvrent des plats qu’ils ne connaissaient
pas. Le mode de conservation, la préparation des
aliments et les habitudes d’achat diffèrent aussi.
De nombreux aliments qu’ils utilisaient sont difciles ou impossibles à obtenir. Leur faible re venu peut aussi en limiter l’accès. La perturbation
des habitudes alimentaires traditionnelles dans
une nouvelle culture peut entraîner des altérations de l’état nutritionnel qui ont des conséquences néfastes sur la santé de la personne. Les
valeurs culturelles peuvent aussi entrer en conit
avec la notion de nutrition optimale ; par exemple,
de nombreuses cultures considèrent l’obésité
comme un indice de beauté, de richesse et de
bien-être.
Il est important de garder à l’esprit que certains
groupes d’immigrants récents, comme ceux en provenance de l’Asie, sont souvent moins grands et de
poids inférieur à leurs homologues occidentaux.
Les normes standardisées canadiennes du poids
selon l’âge, de la taille selon l’âge et du poids selon
la taille peuvent ne pas être appropriées pour évaluer la croissance et le développement d’enfants
immigrants. Les normes nutritionnelles sont généralement fondées sur les régimes alimentaires occidentaux. Actuellement, il n’existe aucune norme
able permettant l’évaluation de chaque groupe
d’immigrants.
Chez certains groupes ethniques, des groupes
alimentaires sont sous-représentés, ce qui peut
laisser supposer une apparence de déciences
nutritionnelles. Par exemple, la majorité des
Autochtones du Canada ainsi que beaucoup d’immigrants provenant de l’Asie, de l’Afrique, de
l’Inde du Sud, du Mexique et d’Haïti souffrent
d’intolérance au lactose, et le lait est très peu
consommé dans ces populations. Or, leur apport
en soya, en légumes, en noix et graines, en yogourt
et en fromage leur permettent souvent de satisfaire
leurs besoins nutritionnels en calcium (Szilagyi,
Nathwani et Vinokuroff, 2006). L’intolérance au
lactose est moins fréquente chez les personnes
d’origine nord-européenne, nord-américaine
(Canada et États-Unis) et australienne.
Coutumes alimentaires et groupes culturels
Il faut éviter les stéréotypes culturels qui
considèrent les membres d’une même culture
comme étant identiques et ne pas entretenir d’idées
préconçues sur la façon dont ils « devraient » se
comporter. Toutefois, certains grands principes
régissent l’alimentation de populations provenant
de différentes régions du globe (p. ex., les Grecs et
les Italiens ont une alimentation de type méditerranéenne, à base de fruits, de légumes, de grains
entiers, de noix et d’huile d’olive, de poisson, et
contenant peu de lait, de viande rouge et d’aliments transformés). Les préférences alimentaires
peuvent aussi être liées à des croyances et à des
pratiques religieuses. De nombreuses religions utilisent des aliments comme symboles dans leurs
célébrations et leurs rituels. La connaissance des
pratiques religieuses de la personne liées à son
alimentation permet de proposer des améliorations
ou des modications qui n’entrent pas en conit
avec les règles d’une saine alimentation. Le
TABLEAU 11.2 résume certaines coutumes alimentaires religieuses.
11
TABLEAU 11.2
Coutumes alimentaires et religion
GROUPE RELIGIEUX
RESTRICTIONS ALIMENTAIRES
Bouddhistes
• Viande chez les fervents pratiquants (maintenant, elle est consommée en petite
quantité)
• Oignon et ail parfois évités
Catholiques
• Viande et boissons alcoolisées évitées pendant le mercredi des Cendres, les vendredis
du carême et le Vendredi saint
Hindous
• Bœuf, porc, certaines volailles
• Alcool permis, mais peu consommé
• Jeûne fréquent
Musulmans
•
•
•
•
•
Mormons
• Boissons alcoolisées
• Boissons contenant de la caféine (p. ex., le café, le thé, les boissons gazeuses) et
médicaments contenant de la caféine, des stimulants ou de l’alcool (p. ex., Sudafed MD,
NyquilMD, certains comprimés d’acétaminophène)
• Aliments et liquides le premier dimanche de chaque mois
Juifs orthodoxes
•
•
•
•
•
•
Adventistes du
septième jour
• Boissons alcoolisées, thé et café
• Régime ovo-lacto-végétarien recommandé
Viande de porc et ses dérivés
Sang (la viande doit être bien cuite)
Viande provenant d’animaux n’ayant pas été abattus selon le rite musulman (halal)
Boissons alcoolisées et produits de l’alcool
Aliments et liquides du lever au coucher du soleil pendant le ramadan
Viande de porc et ses dérivés
Viande provenant d’animaux n’ayant pas été abattus selon le rituel juif
Crustacés (p. ex., le crabe, le homard, les crevettes, les huîtres) et mollusques
Produits laitiers et viande dans un même repas
Pains ou gâteaux contenant du levain pendant les fêtes de Pâques
Aliments ou liquides pendant le Yom Kippour
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
237
D’autres situations peuvent limiter l’alimentation d’une personne ou sa consommation de liquide
pendant un certain temps. Par exemple, beaucoup
de catholiques s’abstiennent de manger de la
viande le mercredi des Cendres, les vendredis pendant le carême et le Vendredi saint. Les musulmans
ne prennent aucune nourriture ni aucun liquide du
lever au coucher du soleil pendant le mois du ramadan dans le calendrier islamique et s’alimentent
deux fois par jour, soit avant l’aube et après le coucher du soleil. Les juifs observent 24 heures de
jeûne à l’occasion du Yom Kippour, une célébration
juive représentant le jour du Grand Pardon dans le
calendrier hébreu.
Le terme casher se dit des aliments préparés
conformément à la religion juive ; l’interdiction de
mélanger le lait et les produits à base de viande
pendant un même repas, ainsi que celle de manger
de la viande de porc et des crustacés sont des
exemples des nombreuses règles que régit la religion juive. Par ailleurs, le terme halal renvoie à la
terminologie alimentaire islamique (où l’interdiction de consommer la viande de porc est aussi l’une
des nombreuses règles de ce régime alimentaire).
11.2
Q
uestion de suivi
Quelle méthode de collecte
de données privilégeriezvous pour évaluer si les
apports alimentaires de
monsieur Savard sont
adéquats ?
Q
uestion de suivi
Calculez le pourcentage de
poids perdu de monsieur
Savard.
238
Partie 2
Objectifs et composantes de
l’évaluation nutritionnelle
L’état nutritionnel peut être apprécié à l’aide d’outils d’évaluation non invasifs, standardisés et
validés pour des populations générales ou
particulières.
Les buts de l’évaluation nutritionnelle sont :
1) de reconnaître les personnes souffrant de malnutrition, de décience ou de carence nutritionnelle
ou à risque d’en être atteintes ; 2) de fournir des
données pour la conception d’un plan thérapeutique inrmier (PTI) relatif aux besoins nutritionnels permettant de prévenir ou de minimiser la
malnutrition ; 3) d’établir des données de référence
pour l’évaluation de l’efficacité des soins
nutritionnels.
Le dépistage nutritionnel est la première étape
à réaliser dans l’évaluation de l’état nutritionnel ;
il peut se faire à différents endroits, par exemple à
domicile, dans une clinique, un CLSC, un centre
hospitalier, un CHSLD. Basé sur des données objectives et subjectives, le dépistage nutritionnel permet de reconnaître rapidement les personnes à
risque de troubles nutritionnels, comme ceux liés
à la perte pondérale, à un apport alimentaire inadéquat ou à une maladie récente. Il permet également de déterminer si une évaluation nutritionnelle
complète est nécessaire. Les paramètres utilisés
pour le dépistage sont : l’évaluation du poids actuel,
du poids habituel, du pourcentage de poids perdu ;
Connaissances préalables à l’examen clinique
les conditions associées au risque de malnutrition,
comme la présence d’un état inammatoire, d’une
dysphagie ou d’une hospitalisation prolongée ; le
régime alimentaire de la personne évaluée ; les
résultats des analyses de laboratoire. Plusieurs
outils ont été créés an de permettre l’évaluation
de différentes populations. Par exemple, le Mini
Nutritional Assessment est un outil d’évaluation
nutritionnel validé pour usage par les inrmières
auprès de personnes hospitalisées FIGURE 11.1.
Les personnes reconnues à risque de malnutrition au cours du dépistage doivent faire l’objet d’une
évaluation nutritionnelle complète, comprenant
l’histoire alimentaire, les données cliniques, l’examen physique selon les signes observés, les mesures
anthropométriques et des examens paracliniques.
Cette évaluation nutritionnelle est effectuée par la
nutritionniste clinicienne, qui établira ensuite le
plan de traitement nutritionnel, un acte réservé aux
nutritionnistes selon le Code des professions du
Québec (L.R.Q., c. C-26, articles 37c, 37.11 a et b).
Les habiletés nécessaires pour recueillir l’information portant sur les antécédents alimentaires, l’histoire médicale et les données cliniques pour
effectuer l’examen physique et l’évaluation nutritionnelle sont décrites plus loin dans les sections
Données subjectives et Données objectives.
Il existe plusieurs méthodes de collecte de données portant sur l’apport alimentaire. Le rappel des
24 heures est un questionnaire évaluant l’alimentation pour une journée complète. C’est la méthode la
plus simple et la plus utilisée pour obtenir des renseignements sur les ingesta quotidiens. La personne
évaluée (ou un membre de sa famille ou un proche)
remplit le questionnaire ou est interrogée, et l’inrmière lui demande de se rappeler tout ce qu’elle a
mangé et bu au cours des 24 dernières heures.
Toutefois, avec cette méthode, certaines erreurs
peuvent se produire : 1) la personne ou le membre de
sa famille (ou le proche) peut ne pas être en mesure
de se rappeler le type ou la quantité d’aliments
consommés ; 2) l’apport des ingesta dans les 24 dernières heures peut ne pas être représentatif de ses
habitudes alimentaires ; 3) la personne ou le membre
de sa famille (ou le proche) peut altérer la vérité
pour diverses raisons ; 4) les collations et la consommation de certains aliments, comme les sauces et des
condiments, peuvent être sous-évaluées.
Pour contrer certaines des difcultés inhérentes
à la méthode du rappel des 24 heures, un questionnaire sur la fréquence alimentaire peut être utilisé.
Celui-ci permet de recueillir de l’information sur
la fréquence de consommation de certains aliments
et de certaines boissons par la personne : le nombre
de fois par jour, par semaine ou par mois. Toutefois,
comme pour le questionnaire du rappel des
24 heures, il se base sur la mémoire de la personne
ou du membre de sa famille ou d’un proche pour
évaluer si un aliment est consommé.
11
FIGURE 11.1
Mini Nutritional Assessment
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
239
Q
uestion de suivi
Pour quelle raison devriezvous évaluer la présence de
signes de dysphagie chez
monsieur Savard ? Quels
signes tenterez-vous d’observer pendant les repas ?
Le TABLEAU 11.1W,
Grille d’évaluation globale
subjective, fournit un exemple
d’éléments d’évaluation
permettant de recueillir des
données subjectives portant
sur l’évaluation nutritionnelle.
Le journal des aliments ingérés ou l’enregistrement des données alimentaires exigent de la personne (ou d’un membre de sa famille ou d’un
proche) qu’elle consigne tous les aliments et toutes
les boissons consommés pendant une certaine
période de temps. Trois jours non consécutifs sont
habituellement utilisés, soit deux jours de la
semaine et une journée de la n de semaine. Le
journal alimentaire est sans aucun doute le mode
d’évaluation le plus précis et le plus complet, surtout si la personne chargée de consigner l’information le fait immédiatement après les repas.
Cependant, des problèmes potentiels sont associés
à cet outil : 1) le non-respect des consignes ; 2) l’enregistrement d’une information inexacte ; 3) la façon
aléatoire dont les journées utilisées pour répondre
au questionnaire peuvent être choisies d’une
semaine à l’autre ; 4) le changement volontaire d’alimentation pendant la période d’enregistrement ;
5) une mauvaise évaluation des quantités d’aliments ou des boissons consommés.
L’observation directe de l’alimentation et du processus nutritionnel peut aider à la détection des
240
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
problèmes difciles à percevoir avec la grille d’évaluation ou le journal des aliments ingérés. Par
exemple, l’observation des techniques alimentaires
utilisées par les parents ou par un proche aidant
peut être utile au cours de l’évaluation du retard de
croissance chez un enfant ou d’une perte de poids
non intentionnelle chez une personne âgée.
L’observation effectuée pendant le repas permet
aussi de détecter des signes de dysphagie, une
condition pouvant nuire à la prise alimentaire.
Le Guide alimentaire canadien est un outil de
référence couramment utilisé pour valider la justesse d’un régime alimentaire. La dernière version du Guide, qui fournit des lignes directrices
nutritionnelles, a été publiée en 2007 ENCADRÉ 11.1
et FIGURE 11.2. Ce guide constitue une référence
qui permet d’aider la personne à choisir les aliments et à comprendre comment planier des repas
équilibrés. Les apports nutritionnels de référence
(ANREF) fournissent des recommandations sur les
quantités de nutriments nécessaires an de prévenir une décience ou une carence nutritionnelle ou
de réduire le risque de maladies chroniques. En
plus de recommander les apports nutritifs adéquats,
l’ANREF fournit des précisions quant aux quantités
de nutriments à ne pas dépasser an d’éviter le
ENCADRÉ 11.1
risque de toxicité. Avec l’utilisation accrue des suppléments alimentaires, de vitamines, de minéraux
ainsi que de produits de santé naturels, ce risque
est en hausse.
Recommandations nutritionnelles quotidiennes selon le Guide alimentaire canadien
1. Consommer de 7 à 10 portions de fruits et de légumes par jour. Opter
pour des fruits et des légumes variés. Manger au moins un légume vert
foncé et un légume orangé chaque jour. Préférer les légumes et les fruits
à leurs jus.
5. Choisir des viandes maigres et des substituts préparés avec peu ou pas de
matières grasses ou de sodium. Consommer deux portions de poisson par
semaine au moins.
2. Consommer de 6 à 8 portions de produits céréaliers par jour, dont la moitié
sous forme de grains entiers. Choisir des produits céréaliers plus faibles en
lipides, en sucre ou en sodium.
7. Consommer le moins de sucre possible (ou autres édulcorants à teneur calorique élevée).
3. Consommer au moins deux portions de lait et substituts par jour, en favorisant les produits faibles en matières grasses.
6. Consommer moins de 2 300 mg (approximativement 1 c. à thé) de sel par jour.
8. Faire au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée chaque jour.
4. Consommer une petite quantité (de 30 à 45 mL ou de 2 à 3 c. à table)
de lipides insaturés chaque jour. Limiter la consommation de gras saturés et de gras trans autant que possible.
11
FIGURE 11.2 Guide alimentaire canadien. © Sa Majesté la
Reine, Chef du Canada, représentée par le ministre de Santé Canada,
2007. Cette publication peut être reproduite sans autorisation. Toute
modication est interdite.
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
241
11.3 Données subjectives
4
11.3.1
Histoire de santé
Les outils mnémotechni­
ques AMPLE et PQRSTU
sont dénis dans le cha­
pitre 4, Regard global sur
l’histoire de santé.
Le fait de recueillir les données subjectives permet
de savoir ce que le client dit à son sujet. Ces éléments d’information sont ensuite combinés aux
données objectives provenant de l’examen physique et des examens paracliniques. L’ensemble des
données sert à poser un jugement clinique sur l’état
de santé du client et à formuler un constat d’évaluation. An de reconstituer l’histoire de santé,
l’inrmière peut utiliser l’outil mnémotechnique
AMPLE. Lorsque le client présente des symptômes
particuliers ou de la douleur, l’inrmière évalue
4 .
ceux-ci à l’aide de l’outil PQRSTU
Séquence d’évaluation
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Habitudes alimentaires
• Combien prenez-vous de repas et de collations par jour ?
• Quels sont les aliments que vous mangez dans une journée et
en quelle quantité ?
• Où prenez-vous vos repas ?
• Quelles sont vos préférences alimentaires ?
• Quels sont les aliments qui vous déplaisent ou pour lesquels
vous éprouvez du dégoût ?
• Êtes-vous capable de vous alimenter seul ?
La plupart des personnes ont une
bonne connaissance de leur alimentation. Cependant, il arrive
qu’elles entretiennent de fausses
idées à ce sujet ; il s’agit alors
d’amener la personne à les corriger
progressivement en lui donnant
l’information nécessaire sur une
alimentation saine et équilibrée.
• Avez-vous des restrictions alimentaires associées à votre
religion ?
Des restrictions alimentaires liées
à la religion ou à certaines cultures
peuvent inuer sur la consommation d’aliments en particulier et
ainsi entraîner une insufsance
d’apports en certains nutriments.
• Suivez-vous un régime particulier ?
Plusieurs régimes dont l’efcacité et la sécurité ne sont pas prouvées scientifiquement peuvent
nuire à une saine alimentation.
Poids habituel
• Quel est votre poids habituel ?
• Votre poids a-t-il changé récemment ?
• Combien de kilos avez-vous perdus ou gagnés ? Sur quelle
période de temps cette modication pondérale s’est-elle produite ? Y a-t-il une raison particulière expliquant cette perte
ou ce gain pondéral ?
242
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
La personne qui a récemment
perdu ou gagné du poids, de façon
involontaire ou volontaire, est à
risque d’altérer son état nutritionnel. La personne ayant un poids
sous la normale est vulnérable
parce que ses réserves énergétiques peuvent être épuisées ; par
contre, l’excès pondéral est associé à un certain nombre de problèmes de santé, allant de l’HTA
au cancer. Il faut garder en tête
qu’une personne en excès pondéral ou obèse peut également être
dénutrie.
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Modication de l’appétit, du goût, de l’odorat,
de la capacité de mastication et de déglutition
Quel changement avez-vous remarqué ? Quand avez-vous
remarqué ce changement ?
La ↓ de l’appétit, une modication du goût ou de l’odorat, ainsi
que des difcultés à mastiquer ou
à déglutir peuvent interférer avec
la capacité de la personne à se
nourrir adéquatement, ce qui
accroît le risque de dénutrition.
De telles altérations peuvent également diminuer le plaisir lié à
l’alimentation et ainsi entraîner
une baisse des apports qui pourrait mener à une dénutrition ou à
une déshydratation.
Chirurgie récente, trauma, brûlure, infection
11
• Avez-vous récemment subi une chirurgie ? Quand avez-vous
subi cette chirurgie ? Quel type de chirurgie avez-vous eu ?
Les personnes qui ont récemment
subi une intervention chirurgicale, un trauma, une septicémie
ou qui ont vécu des situations
entraînant des pertes nutritionnelles peuvent avoir des besoins
en calories et en nutriments qui
sont deux ou trois fois supérieurs
à la normale.
• Quels traitements ou soins avez-vous reçus (nutrition entérale/parentérale, antibiothérapie) relativement à cette
chirurgie ?
Les chirurgies touchant le système
digestif peuvent altérer les capacités de digestion et d’absorption
des aliments. Ces personnes
doivent parfois prendre des suppléments de vitamines et minéraux à vie, comme les celles qui
ont subi une chirurgie bariatrique
malabsorptive, par exemple.
Maladies chroniques
• De quels problèmes de santé chronique souffrez-vous ? Quand
le diagnostic a-t-il été posé ? Quelle sorte de traitement recevez-vous pour ces problèmes de santé ? Avez-vous dû modier votre alimentation ?
• Avez-vous récemment été atteint de cancer ou avez-vous reçu
des traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie ?
La personne atteinte de problèmes
de santé chroniques qui nuisent à
l’utilisation des nutriments
(p. ex., le diabète ou tout autre
problème diminuant la capacité
d’absorption des nutriments
comme une cirrhose, une pancréatite ou une maladie inammatoire
de l’intestin) et celle qui reçoit des
traitements contre le cancer sont
à risque de dénutrition.
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
243
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Nausées, vomissements, diarrhée, constipation
(autres problèmes)
Comment ce problème se manifeste-t-il chez vous ? En connaissez-vous la cause ? Depuis combien de temps avez-vous ce
problème ?
• Plusieurs symptômes gastrointestinaux tels que nausées,
vomissements, diarrhée ou constipation peuvent interférer
avec un apport adéquat en nutriments ou avec leur absorption.
• De plus, ces symptômes augmentent les pertes d’ions tels
que le potassium et plusieurs
autres nutriments, ce qui peut
engendrer d’autres problèmes,
entre autres l’arythmie cardiaque et la déshydratation.
Allergies ou intolérances alimentaires
Avez-vous déjà eu des réactions indésirables après avoir
consommé certains aliments ? De quels aliments s’agissait-il ?
Quelles ont été ces réactions ? Quand est-ce arrivé et combien de
temps cela a-t-il duré ?
• Les allergies alimentaires, en
particulier les allergies aux
arachides, sont en hausse et
peuvent causer d’importants
problèmes de santé. Il est bon
de se reporter aux publications
sur le sujet concernant les directives à suivre ou pour avoir plus
d’information sur la gestion des
allergies alimentaires.
• Une intolérance alimentaire
peut entraîner le retrait complet
de l’aliment intoléré par la personne, sans que l’aliment ne
soit substitué (p. ex., un client
intolérant au lactose qui retirerait tous les produits laitiers
de son alimentation sans les
remplacer par de la boisson de
soya ou des produits laitiers
sans lactose). Un tel retrait
pourrait entraîner à long terme
une décience ou une carence
nutritionnelle.
Médicaments ou suppléments nutritionnels
• Prenez-vous des médicaments sous ordonnance ou offerts en
vente libre ? Quels sont les médicaments que vous prenez ?
Depuis combien de temps les prenez-vous ?
244
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Les analgésiques, antiacides,
anticonvulsivants, antibiotiques,
diurétiques, laxatifs, agents antinéoplasiques, corticostéroïdes et
contraceptifs oraux sont des médicaments pouvant interagir avec
l’absorption des nutriments, et ils
peuvent altérer le métabolisme.
QUESTIONS
• Quelle sorte de suppléments vitaminiques prenez-vous ? Quelle
en est la posologie ? Depuis combien de temps les
prenez-vous ?
• Consommez-vous des produits naturels ? Lesquels ? Comment
les utilisez-vous ? Qui vous les a recommandés ? Ces produits
vous ont-ils aidé d’une quelconque façon ?
JUSTIFICATIONS
• Les vitamines et les produits
naturels peuvent provoquer
des effets secondaires s’ils sont
consommés en grandes quantités. Certains peuvent mutuellement nuire à leur absorption
s’ils sont consommés en même
temps (p. ex., le calcium nuit à
l’absorption du fer.)
• Certains produits naturels
peuvent aussi nuire à l’absorption et à la digestion de certains
aliments en plus de causer des
interactions avec la médication
sous ordonnance (p. ex., le millepertuis nuit à l’action des
anovulants).
Il est donc essentiel de questionner le client à cet effet.
11
Activités de la vie domestique
• Êtes-vous autonome dans la préparation de vos repas ?
Des facteurs socioéconomiques
défavorables peuvent nuire au
maintien d’un régime alimentaire
équilibré.
• Êtes-vous capable d’aller faire seul votre épicerie ? Avez-vous
un revenu sufsant pour acheter les produits alimentaires
dont vous avez besoin ? Qui fait votre marché et prépare vos
repas ?
Une perte d’autonomie peut également nuire à la prise alimentaire
ou à la préparation des repas. Par
exemple, la perte de dextérité
chez une personne âgée peut lui
rendre la préparation des repas
difcile.
• Votre environnement est-il propice à la prise de vos repas ?
Consommation d’alcool ou de drogues illégales
• À quand remonte votre dernière consommation d’alcool? Combien
de consommations avez-vous prises à cette occasion ? Quelle
est votre consommation journalière et hebdomadaire ? Depuis
combien de temps consommez-vous de l’alcool ?
• (Reprendre ces questions et les adapter an d’évaluer l’usage
de drogues.)
La prise régulière d’alcool ou de
drogues peut être substituée à
l’alimentation et entraîner une
dénutrition par insufsance d’apports ou par malabsorption, ou des
déciences en certains nutriments
(p. ex., la thiamine est souvent
déciente chez les grands alcooliques). Les femmes enceintes qui
fument, consomment de l’alcool
ou des drogues illicites donnent naissance à un nombre important d’enfants de faible poids, ou
ayant un retard de croissance,
ou qui éprouvent d’autres complications graves.
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
245
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Exercice et activité physique
• Depuis combien de temps faites-vous de l’activité
physique ?
• Quel type d’activité physique pratiquez-vous ? À quelle
fréquence ?
Les besoins en calories et en nutriments s’élèvent avec l’augmentation de l’activité physique, en
particulier dans les sports de compétition et le travail physique.
L’inaction ou la sédentarité peut
conduire à un excès de poids ou
à l’apparition de certains problèmes de santé, même en l’absence de gain pondéral.
Histoire familiale
Quels sont les problèmes de santé dans votre famille immédiate ?
La présence de un ou de plusieurs de ces antécédents familiaux
a-t-elle modié vos habitudes de vie ?
Exemples : alimentation, activité physique.
Une carence nutritionnelle présente depuis longtemps peut être
le symptôme d’un problème de
santé (p. ex., la maladie de Crohn,
une colite ulcéreuse). Le dépistage précoce permet de contrer les
effets qu’aurait ce problème à long
terme sur la personne et ses activités. Il favorise aussi une récupération plus rapide en diminuant
les risques d’effets permanents
causés par une carence nutritionnelle à long terme.
PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT
Nourrissons et enfants
L’histoire nutritionnelle du nourrisson et de l’enfant est généralement obtenue auprès des parents, du tuteur, de la gardienne ou
de l’éducatrice en service de garde. Habituellement, la personne
responsable de la préparation des aliments peut fournir une histoire nutritionnelle assez précise. Cependant, la meilleure façon
d’obtenir une évaluation complète est la rédaction d’un journal
répertoriant l’alimentation sur une période de 24 heures pendant
laquelle le nourrisson ou l’enfant est gardé en observation.
Nutrition et grossesse
• La mère a-t-elle fait usage d’alcool, de tabac ou de drogues illicites pendant sa grossesse ?
• La mère a-t-elle eu des complications liées à son alimentation
pendant sa grossesse ?
• Quel était le poids de l’enfant à sa naissance ?
246
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
Un faible poids à la naissance
(< 2 500 g) est un facteur important de morbidité et de mortalité
infantiles.
QUESTIONS
• Y a-t-il présence de signes ou de symptômes laissant présupposer un retard de croissance physique ou mental chez
l’enfant ?
JUSTIFICATIONS
• Une mauvaise alimentation
chez la mère, la faible prise de
poids chez celle-ci et la consommation d’alcool, de tabac ou de
drogues sont autant de facteurs
pouvant augmenter le risque
de malformations congénitales
et de retard de croissance et de
développement.
• Dans certains cas, des nausées
persistantes en début de grossesse peuvent, si elles ne sont
pas traitées, entraîner une baisse
de la prise alimentaire et, ainsi,
une prise de poids insufsante
ou même une perte de poids, ce
qui n’est pas recommandé chez
une femme enceinte, et ce,
même si elle est obèse.
11
Nourrissons alimentés au sein ou au biberon
• Comment le nourrisson est-il alimenté, à quelle fréquence, en
quelle quantité et quelle est la durée de l’allaitement ? Quelles
sont les difcultés éprouvées ?
La croissance et le développement
du nourrisson se feront normalement si celui-ci est bien nourri. La
mère inexpérimentée peut éprouver des problèmes au cours de l’allaitement maternel ou au biberon.
De plus, elle se demande souvent
si son enfant reçoit les quantités
sufsantes de nutriments.
• Quel est le calendrier de sevrage et quelle est la méthode
utilisée ?
Attitudes de l’enfant à l’égard de l’alimentation
• Quels aliments votre enfant préfère-t-il ou déteste-t-il ?
• Que mange votre enfant comme collation ?
• Votre enfant s’est-il déjà étouffé avec de la nourriture ? Que
faites-vous pour éviter une aspiration alimentaire chez votre
enfant ?
La période préscolaire est l’étape
de la croissance où s’acquièrent les
habitudes alimentaires. Servir de
petites portions, préparer des repas
simples, offrir une alimentation
variée et proposer des collations
nutritives sont des stratégies visant
à améliorer l’apport alimentaire
chez l’enfant.
Il faut éviter les aliments susceptibles d’être bronchoaspirés
(p. ex., les saucisses à hot-dog
non coupées dans le sens de la
longueur, les noix, les raisins
non coupés, les bonbons ronds
ou le maïs soufé).
Chapitre 11
Évaluation nutritionnelle
247
QUESTIONS
JUSTIFICATIONS
Adolescents
Poids actuel
• Comment percevez-vous votre poids actuel ?
• Suivez-vous un régime amaigrissant ?
• Avez-vous déjà suivi d’autres régimes amaigrissants ? Si oui,
combien de poids avez-vous perdu ? Avez-vous repris le poids
perdu ?
• Pensez-vous constamment que vous avez un surplus
pondéral ?
• Après les repas, vous arrive-t-il de vous faire vomir intentionnellement ? Prenez-vous des laxatifs ou des diurétiques ? Faitesvous de l’activité physique plusieurs heures par jour ? Évitez-vous
de manger ? Vous sentez-vous coupable après avoir mangé ?
Un surplus pondéral, en particulier chez les filles, peut inciter
l’adolescente à suivre des régimes
amaigrissants qui pourraient nuire
à son développement. Comme elles
sont préoccupées par l’apparence
de leur corps, les adolescentes sont
plus facilement sujettes à des
troubles alimentaires (anorexie
mentale, hyperphagie boulimique,
orthorexie ou boulimie). L’image
de la femme promue par les médias
peut entraîner l’adolescente à entretenir une obsession de son image
corporelle.
Consommation de substances
248
Partie 2
• Avez-vous déjà fait usage de stéroïdes anabolisants, de suppléments de protéines ou d’autres substances ayant comme
effet d’augmenter la taille des muscles et la performance physique ? Quand ? À quel dosage ? Cela vous a-t-il causé des
problèmes ?
Chez les athlètes (plus souvent les
hommes), l’utilisation de stéroïdes
anabolisants ou d’autres agents
an d’augmenter la taille des muscles et la performance physique
(p. ex., suppléments de protéines,
créatine, acides aminés à chaine
ramiée) est fréquente. Cette tendance peut s’étendre aux adolescents ; ils connaissent mal les
effets de ces produits.
• Consommez-vous de la caféine ou des boissons énergisantes ?
À quels moments ? Quelle sorte ? À quelle fréquence ?
Consommer des boissons énergisantes comme Red Bull MD, Full
ThrottleMD, ÉnergieMD et RockstarMD,
riches en caféine et autres stimulants, ou certains produits à base
de plantes peut entraîner des
effets indésirables. Les plus fréquents sont la déshydratation,
l’HTA, l’arythmie cardiaque et des
troubles du sommeil.
• Avez-vous recours à la restauration rapide ? De quel type ? À
quels moments optez-vous pour la restauration rapide ? Combien
de fois par semaine ?
Une histoire alimentaire détaillée
peut être difcile à obtenir avec
précision en raison des collations
prises entre les repas et des repas
consommés sur le pouce. Ces éléments sont souvent omis ou
oubliés pendant l’évaluation ou la
rédaction du journal alimentaire.
• Combien de repas par semaine prenez-vous au restaurant,
tous types confondus ?
Les repas pris au restaurant, peu
importe le type, sont souvent riches
en sodium, en gras et en sucre.
Connaissances préalables à l’examen clinique
QUESTIONS
• À quel âge avez-vous eu vos premières menstruations ? Qualiez
votre ot menstruel : peu abondant, normal ou abondant ?
JUSTIFICATIONS
Le premier cycle menstruel
(ménarche) est souvent retardé en
présence d’une insufsance pondérale. Le ot menstruel peut aussi
être diminué, et les symptômes
d’aménorrhée sont fréquents.
Femmes enceintes
• Combien de grossesses avez-vous eues ? À quand remonte cette
dernière grossesse ? Durant cette dernière grossesse, avez-vous
éprouvé des problèmes particuliers ? Éprouvez-vous des problèmes particuliers pendant la grossesse actuelle ?
• Quels aliments préférez-vous pendant la grossesse ? Quels aliments évitez-vous de consommer ? Éprouvez-vous du dégoût
pour des aliments en particulier ?
Une femme enceinte multipare
dont la dernière grossesse remonte
à moins de un an court un risque accru d’épuisement de ses réserves
nutritionnelles. Il faut noter les problèmes survenus pendant les grossesses précédentes, comme les
vomissements excessifs, l’anémie
ou le diabète gestationnel. Le ralentissement de la motilité gastrointestinale et la pression du fœtus
dans l’abdomen peuvent causer de
la constipation, des hémorroïdes et
de la dyspepsie. Des antécédents
de naissance avec un nourrisson de
faible poids suggèrent des problèmes nutritionnels antérieurs.
Donner naissance à un bébé pesant
4,5 kg ou plus peut être un indice
latent de diabète chez la mère.
11
La future mère est vulnérable à l’inuence que peuvent avoir sur elle
la famille, la culture et les traditions
quant aux choix alimentaires. Les
fringales ou les aversions pour certains aliments sont fréquentes ; il
faut évaluer leurs conséquences sur
l’apport nutritionnel nécessaire à la
femme enceinte.
Adultes vieillissants
• Votre régime alimentaire est-il différent de celui que vous aviez
auparavant ? Pourquoi ? Quels sont les facteurs qui inuent
sur votre alimentation ?
• Il est recommandé de remplir, avec l’adulte vieillissant, le
questionnaire présenté dans la FIGURE 11.1.
Il faut noter tout changement physiologique ou psychologique lié à
l’âge ou aux changements socioéconomiques susceptibles d’inuer sur l’apport nutritionnel de
l’adulte vieillissant.
L’initiative de dépistage nutritionnel de White, Ham et Lipschitz
(1991) est une approche en trois
étapes qui est utilisée pour le
dépistage de la dénutrition chez
l’adulte vieillissant. La grille de la
FIGURE 11.1 révèle les principaux
facteurs de risque et les indicateurs d’un état nutritionnel altéré.
Chapitre 11
Q
uestion de suivi
Depuis son hospitalisation,
monsieur Savard se déplace
péniblement avec son déambulateur pour se rendre à la
toilette ; il vous a coné qu’il
mange moins qu’auparavant
puisque ses dentiers sont
mal ajustés depuis qu’il a
perdu du poids. À partir des
données dont vous disposez
jusqu’à présent, remplissez
le Mini Nutritional Assessment de monsieur Savard
FIGURE 11.1.
Évaluation nutritionnelle
249
11.4 Données objectives
Schéma séquentiel résumant
les étapes de l’examen clinique.
11.4.1 Préambule
L’observation de l’état général de la personne – obésité, cachexie, atrophie musculaire, œdème – peut
fournir des indices globaux sur son état nutritionnel. L’examen physique permet aussi de déceler des
signes et des symptômes évocateurs de malnutrition et de déshydratation. Comme ces symptômes
sont lents à apparaître, l’inrmière privilégie l’évaluation de la densité du tissu cutané, comme la
peau, les cheveux, la bouche, les lèvres et les yeux ;
ce sont des endroits où les carences nutritionnelles
sont détectables. Comme ces symptômes ne
constituent pas uniquement des signes de carences
nutritionnelles, il est nécessaire d’effectuer des analyses sanguines an d’établir un diagnostic précis
(celles-ci seront examinées plus loin dans ce chapitre). Le TABLEAU 11.3 présente les principaux
signes cliniques de malnutrition.
Matériel nécessaire
• Ruban à mesurer
• Pèse-personne avec règle à mesurer
• Crayon ou stylo
• Grille d’évaluation de l’état nutritionnel
Signes cliniques de malnutrition
TABLEAU 11.3
RÉGION OU SYSTÈME
EXAMINÉ
APPARENCE NORMALE
SIGNES ET SYMPTÔMES ASSOCIÉS
À LA MALNUTRITION
CARENCE EN NUTRIMENTS
Peau
Souple, coloration rosée,
aucun signe d’éruption cutanée, d’ecchymose ou de desquamation
Dermatose squameuse
Riboavine, biotine, zinc, manganèse, acides
gras essentiels (AGE)
Pétéchies, ecchymoses
Vitamines C et K
Hyperkératose folliculaire (hyperplasie de
la couche cornée de l’épiderme)
Vitamine A, acide linoléique, malnutrition
protéinoénergétique
Dermatite séborrhéique nasolabiale
Niacine, riboavine, vitamine B6
Dermatose eczématoïde
Acide linoléique, biotine
Xanthome (taches de petite taille, jaunes
ou brunâtres, riches en dépôt lipidique,
localisées surtout aux plis de exion et sur
les faces latérales du cou)
Taux élevé de triglycérides
Ternes, secs, clairsemés
Acide linoléique, malnutrition protéinoénergétique
Changement de couleur
Zinc, cuivre ou protéines
Trichorrhexie noueuse (formation de nodosités et de boules multiples sur les cheveux séparés par des portions de tige
normale)
Cuivre
Taches nacrées (taches de Bitot)
Vitamine A
Xérosis conjonctival et cornéen
Vitamines A et C, biotine
Ramollissement de la cornée
(kératomalacie)
Vitamine A
Pâleur des conjonctives
Fer, folacine
Blépharite angulaire
Vitamines B6 et B12, thiamine, riboavine,
niacine
Cheveux
Yeux
250
Lustrés, ne s’enlèvent pas
facilement, cuir chevelu d’apparence saine
Cornées claires, brillantes ;
membranes rosées et
humides ; aucune plaie aux
coins des paupières
Partie 2
Connaissances préalables à l’examen clinique
TABLEAU 11.3
Signes cliniques de malnutrition (suite)
RÉGION OU SYSTÈME
EXAMINÉ
APPARENCE NORMALE
SIGNES ET SYMPTÔMES ASSOCIÉS
À LA MALNUTRITION
CARENCE EN NUTRIMENTS
Lèvres
Souples, sans gerçures ni
œdème
Chéilite (ssures, gerçures aux lèvres)
Vitamine B6, riboavine, niacine
Perlèche
Vitamine B 6 , riboflavine, niacine, fer,
malnutrition protéinoénergétique
Apparence rosée ; lisse, sans
œdème ni lésions
Glossite (irritée, rouge vif)
Vitamines B6 et B12, folacine, niacine, riboavine, pyridoxine, fer
Pâle
Vitamine B12, fer, biotine
Atrophie des papilles linguales
Vitamine B12, niacine, folacine, riboavine, fer
Fissure, œdème
Niacine
Couleur magenta/pourpre
Riboavine, biotine
Langue
Gencives
De rougeâtre à rosée, fermes,
sans œdème ni saignement
Gonées et saignantes
Vitamine C
Ongles
Souples, rosés
Cassants, striés ou de forme concave
(koïlonychie)
Fer, chrome
Ongles en coquille d’œuf
Vitamine A
Lignes de Muehrcke (deux arcs blancs
parallèles à la lunule)
Protéines
Lunule bleutée
Excès de cuivre
Maintien postural droit,
aucune malformation, bon
tonus musculaire, peut marcher ou courir sans douleur
Ostéomalacie
Vitamine D, calcium
Rachitisme
Vitamine D
Atrophie musculaire
Malnutrition protéinoénergétique
Réflexes normaux, affect
normal
Paresthésie périphérique
Vitamines B 6 et B12, thiamine, biotine, acide
panthoténique
Convulsions
Vitamine B6, cuivre, manganèse
Irritabilité ou confusion
Vitamine B12,, thiamine, niacine, malnutrition
protéinoénergétique
Système musculosquelettique
Système neurologique
11
Sources : Isselbacher, Braunwald, Wilson et collab. (1995) ; Lugate, Pitre, Houde-Nadeau et collab. (1996) ; McDonald (1994) ; Stallings et Fung (1998)
11.4.2
Examen physique
OBSERVATIONS NORMALES
ANOMALIES
MESURES ANTHROPOMÉTRIQUES
L’anthropométrie est la mesure et l’évaluation de la croissance,
du développement et de la composition du corps. Les données
les plus couramment utilisées sont les mesures anthropométriques
de la taille, du poids, du pli cutané tricipital, la largeur du coude,
la circonférence du bras et de la tête
9 .
La FIGURE 11.3 fournit un exemple
de courbe de croissance.
Mesures du poids
La mesure de la masse corporelle est une donnée qui permet de
recueillir de l’information sur la variation pondérale de la personne. Cette dernière peut être liée à un apport énergét
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