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B. Fiche Chapitre 1

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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 1
ECONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE DU MONDE
CONTEMPORAIN
CHAPITRE 1 - LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE MODERNE
I) UN PHÉNOMÈNE RÉCENT À L’ÉCHELLE DE L’HISTOIRE LONGUE
A - LA CEM DÉBUTE À LA FIN DU 18e SIÈCLE EN OCCIDENT AVEC LA RI
1) La rupture avec un monde malthusien
a) La problématique malthusienne
• Thomas Malthus est un des membres éminents de l’économie classique
 Situer l’économie classique
Notion développée par les mercantilistes. S’étend de la fin du 18e à la première
moitié du 19e.
C’est à Marx que l’on doit l’appellation d’économie politique classique («
toute économie qui cherche à pénétrer l’ensemble réel des rapports de
production dans la société bourgeoise »). Il a un respect pour les classiques, par
opposition à l’“économie politique vulgaire“ qui ferait une apologie du
capitalisme.
Marx (acceptation de la valeur travail) et Keynes (acceptation de la loi des
débouchés de Say) ont une approche conceptuelle de l’économie classique.
 Les classiques vont affirmer les bases doctrinales du libéralisme
Le libéralisme est antérieur aux classiques :
Il a émergé vers 1690 : Dudley North en Angleterre, Pierre de Boisguilbert en
France (ce n’est pas l’État qui doit résoudre les problèmes économiques).
Les Physiocrates (1750-1770, F. Quesnay). Les physiocrates croient en l’existence
d’un équilibre naturel (liberté de l’économie et de l’agriculture). Ils prônent le
principe du « laisser-faire, laisser passer ». Ils montrent l’efficacité économique de
la concurrence (la main invisible), du commerce international
(que c’est un jeu
à somme positive où chacun va gagner à échanger)
• Malthus, un pasteur anglican professeur d’économie politique et opposé
aux poor laws
Élargissement des poor laws en 1795 : Les paroisses accordent un complément de
revenu aux plus pauvres en échange de travail dans des workhouses. Il dépend du
cours du blé et du nombre d’enfants.
Malthus s’y oppose car : - Baisse des salaires agricoles
- Elles encouragent le mariage et la reproduction
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• Une théorie de la population
 Une dépendance rigide entre croissance de la population et offre de nourriture
Essai sur le principe de population (1798) : Il compare l’accroissement de la
population et celui des produits de la Terre. Selon lui, sans obstacle la population
doublerait tous les 25 ans, donc plus vite que les productions des terres (il se base
sur les rendements décroissants de la terre).
Deux obstacles pour limiter la croissance démographique :
- Obstacles destructifs : l’augmentation des décès (trilogie famine-guerre-maladie)
qui ramène la population à un niveau compatible avec les moyens de la
subsistance.
- Les obstacles préventifs : découlent de l’intentionnalité de l’homme. Le contrôle
des naissances (mais Malthus pasteur le réprouve) et le célibat/abstinence par
contrainte morale de l’Église (dissuader la population de se marier et de
procréer).
 Une croissance du niveau de vie ne peut accompagner une croissance de la
population. La croissance démographique efface les gains potentiels de niveau de
vie en absorbant les hausses de la production.
b) C’est seulement à partir du 19e siècle que la croissance devient perceptible à
l’échelle humaine
• Jusqu’au XVIIIe siècle, la pauvreté se perpétue de générations en
générations
 Jusqu’au XVIe, le niveau de vie stagne
Le PIB/hab mondial stagne jusqu’en 1500, du fait des hausses successives de la
population.
 Du XVIe au XVIIIe, le niveau de vie augmente imperceptiblement :
l’augmentation est tellement faible qu’elle n’est pas visible.
Delang : 1500-1700 : +0,1% par an
1700-1820 : +0,2% par an
• C’est à partir du XIXe siècle que les choses changent
Début de la 1e Révolution Industrielle. Croissance du NDV de 248% sur le siècle
(~1,25%/an, Delang).
Angus Maddison : 1600-1820 : +0,05%/an
1820-1913 : +0,09%/an 1913-2000 :
+1,6%/an
 De plus, cette croissance a eu lieu au moment de l’explosion démographique
Au R-U : 7 millions d’hab (1701) puis 8,5 millions (1801) et 15 millions (1841)
La hausse de la population se fait sans baisse du NDV, bien au contraire.
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Kuznets parle de CEM : il y’a un accroissement simultané du produit par tête et de
la population dans les pays développés.
2) La RI : un démarrage et des voies qui diffèrent selon les pays
Période de démarrage à la fin du XVIIIe en Angleterre, d’une croissance d’un type
nouveau auquel correspondent des innovations techniques et une profonde
transformation de la production industrielle.
a) Certains pays ont été pionniers, à commencer par le Royaume-Uni
• Pourquoi le début de la Révolution Industrielle au Royaume-Uni ?
Divergences sur le début (1750 pour Verley, 1760 Mantoux), mais les historiens
s’accordent pour dire qu’elle débute dans la 2e partie du XVIIIe siècle.
Ce n’est pas la naissance de l’industrie (selon Mendels, la proto-industrie
dominait).
En Grande-Bretagne, esprit culturel/religieux favorable à l’esprit d’entreprise et à
l’innovation (bourgeoisie et noblesse multiplient les relations d’affaires et les
mariages). Les entreprises sont protégées par des barrières douanières jusqu’en
1840, tout comme par les coûts de transport élevés au sein du R-U (Bairoch).
→ 1. Les progrès de l’agriculture britannique ont sans doute été un préalable à la
Révolution Industrielle
Pour Bairoch et Rostow, cette révolution agricole est une condition préalable à la
RI.
Overton (1998) constate une hausse des rendements : on passe de 18 (1700) à 30
boisseaux l’acre (1850)
Alors même que la pop. rurale passe de 70 % (1700) à 36% de la pop. du R-U (1800)
Explications :
- Enclosure Acts et remembrement des propriétés : elles sont regroupées
- Fin de l’open field, l’usage communautaire de la jachère
- Alternance des cultures sur les parcelles
- Croisements des meilleures races animales : Selon Bairoch, entre 1710 et
1795 on passe de 38 à 80 lbs pour les ovins, de 370 à 800 lbs chez les
bovins.
Conséquences : Développement de la demande de biens manufacturés, en
métallurgie pour les outillages, charrues, clôtures, machines et en vêtements.
Baisse de la mortalité, hausse de la natalité et meilleure sécurité alimentaire.
→ Les innovations se propagent avec des effets d’entraînement
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D. Cohen : rupture avec le monde malthusien qui va se faire grâce à des
innovations qui en entraînent d’autres.
2. Industrie textile
1733 : Navette volante (J. Kay) : toiles plus larges (-> La productivité et la demande
de fil doublent)
1764 : Spinning Jenny (J. Haregreaves) : file simultanément plusieurs fils
1769 : Water frame (R. Ankwright) : file grâce à la force hydraulique
1769 : Mule Jenny (S. Crompton) : fils plus fins et résistants pour les indiennes
1784 : Métier à tisser mécanique (E. Cartwright) : utilise la machine à vapeur
1790 : Blanchiment par la soude (Nicolas Leblanc) puis par le chlore en 1798
 Le progrès technique est un processus cumulatif
La science n’est pas à l’origine de la RI mais elle s’est fait par tâtonnements grâce
à des “techniciens géniaux“ (ex : Darby produit de la fonte avec du charbon en
1709/ J. Watt n’était pas scientifique mais a inventé la machine à vapeur en labo à
Glasgow)
→ 3. Troisième facteur à souligner: la “révolution des transports“
- Amélioration du réseau routier (années 1760) : John L. Macadam et le
revêtement.
- Construction de canaux: 2.500km à la fin du XVIIIe, 3.500 en 1835 et 4.000 en
1890.
- Chemin de fer (qui n’est pas une cause mais une conséquence de la 1e RI) à partir
des années 1850
• Les grands traits de l’industrialisation britannique
→ Une destruction de la proto-industrie
Proto-industrie : dispersion, dans la campagne périurbaine, d’une partie de la
production. Un marchand installé en ville fournit les matières premières à des
paysans pauvres qui vont travailler (tisser, filer, etc.) et avoir un revenu d’appoint.
La population rurale diminue (66% en 1700 et 36% en 1800), les paysans pauvres
migrant vers la ville où ils travaillent désormais en usines.
En France elle résiste et décline dans les années 1880.
→ Une mécanisation plus rapide
Au R-U, la filature du coton est le premier secteur dans les 30 dernières années du
XVIIIe. Puis, le tissage dans les années 1830.
En Europe continentale, le tissage mécanique débute vers 1870-1871
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→ Une polarisation de l’industrie, à la fois sectorielle et géographique
- Polarisation sectorielle (leading sector) :
- Le textile explique 50% de la croissance et 2/3 des exportations du R-U
dans les années
1830 (dont 75% pour le cotonnier, leading sector)
- Industrie mécanique : fabrique des machines performantes et pour
l’export
- Sidérurgie : machines, ponts, charpentes des manufactures, ferroviaire
 L’abolition des Corn Laws (1846), qui leur permet d’exporter, dope leur
croissance
- Polarisation géographique : concentration des infrastructures, de la main
d’œuvre (« Les secrets de l’industrie sont dans l’air » Marshall). Par ex :
Région Manchester-Liverpool
→ Une difficile adaptation de l’économie britannique à la fin du XIXe siècle
Le R-U a manqué sa deuxième RI (±1880-1910). Infrastructures moins bien
adaptées:
ex : Tunnels ferroviaires, chantiers navals et industries en milieu urbain trop petits.
Retard sur les innovations (Nouveau métier à tisser de Northrop en 1894 aux USA)
• Une révolution moins intense en France
→ Les débats entre historiens pour situer les débuts de la RI en France
Pour J. Clapham et les historiens anglo-saxons, elle débute en 1815. Selon Rostow,
le take-off a lieu sur 1830-1860. D’autres la font débuter avant, comme le
cliométricien Richard Roehl.
→ Une démographie atypique
Vieillissement rapide : la natalité a diminué plus tôt et plus vite, la mortalité
diminue moins vite.
Entre 1800 et 1900, hausse de la pop. de 43% (x2,3 en Allemagne, x2,6 au R-U)
(sans doute volonté de préserver les partages successoraux alors que la densité
de population est forte).
→ Un progrès agricole plus tardif qu’en Grande-Bretagne
Pas de mouvement des enclosures en France ni de hausse importante de la
productivité agricole dès le milieu du XVIIIe : pas le même intérêt pour les
innovations.
→ Une épargne insuffisamment productive ?
L’épargne existe, mais elle est thésaurisée en or, prêtée à l’État ou investie à
l’étranger (Rondo Cameron) faute de développement intérieur. « Et c’est ainsi
que, n’ayant pas voulu élever d’enfants, les Français ont aidé les autres à élever
les leurs.» (Alfred Sauvy)
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Cameron (+ nuancé) : les exportations de capitaux sont celles de forte croissance
en France. Et le développement du chemin de fer au R-U a aidé les exportations
françaises. Le manque de capitaux en France est surtout dû au fonctionnement du
système bancaire.
→ Les industries motrices sont les mêmes qu’en Grande-Bretagne
Comme au R-U, textile et métallurgie. Mais la proto-industrie a duré plus
longtemps. 200 machines ) vapeur en France en 1810, 5.000 au R-U.
Voyages d’industriels (Kay transmet la navette volante à Paris en 1747, Holker
introduit la Spinning Jenny en 1771).
Insuffisance du charbon à partir de 1850 qui ralentit la sidérurgie (production de
41 Mt contre 265 au R-U).
b) Les « late comers » présentent certaines caractéristiques communes
Alexander Gerschenkron, Le retard économique dans une perspective historique
(1962) : pas un seul modèle de développement, les différences s’expliquent par les
degrés de retard économique des pays
Certains pays ont un démarrage retardé mais l’industrialisation y est plus rapide
(Allemagne, Russie, Bulgarie)
→ Des facteurs de blocage
En Russie : le servage immobilise la main d’œuvre, l’inflation endémique déprécie
le rouble et les transports sont peu développés sous Nicolas Ier (le chemin de fer
émerge vers 1870 sous Alexandre II)
→ Comment les pays en retard ont-ils pu surmonter ces blocages ?
Les handicaps ont incité des acteurs à jouer un rôle positif :
- En Allemagne : les banques universelles financent les “industries dans l’enfance“
(A. Hamilton)
- En Russie : C’est l’État qui finance, construit les infrastructures (transports) et
importe les technologies de l’étranger (et il lance les emprunts russes sur les
marchés parisiens).
- Japon (cf. Ch.9)
→ Les techniques utilisées vont être d’emblée plus modernes
Émigration d’ouvriers qualifiés britanniques et voyages d’entrepreneurs, illégales,
avant 1843. Dès 1843, les industriels exportent plus facilement leurs technologies.
Les late comers économisent du temps et des coûts importants.
Absence de problèmes de taille qui permet les gains de productivité et le
rattrapage des précurseurs.
Gerschenkron «un système ordonné de déviations graduelles» par rapport à
l’industrialisation du RU.
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• L’unité de l’Allemagne a favorisé son développement industriel
→ Le rôle moteur de la Prusse et du “Zollverein“
En 1815, une quarantaine d’États coexistent. La Prusse cherche à favoriser le
développement de l’industrie (Christian Peter Beuth)
1834 : Union douanière, le Zollverein, entre 6 États (qui sera élargi) dont la Prusse.
Le Zollverein adopte le tarif extérieur de la Prusse et la Prusse se charge des
négociations avec les pays tiers.
1857 : Monnaie unique, le thaler (monnaie de la Prusse). Empire crée en 1871
(Bismarck)
En 1849, 5.500 km de chemin de fer contre 3.000 en France.
→ La phase de décollage se déroule des années 1830 aux années 1860
La Prusse importe et envoie des ingénieurs au R-U. Économie orientée vers
l’industrie lourde (leading sector des chemins de fer qui naît en 1841).
Protectionnisme éducateur défendu par Friedrich List.
En 1853, dernières locomotives importées production de 95% des rails.
1910 : 2e puissance industrielle (16% de la prod. manufacturière, 35% aux USA, 15%
au R-U, 6,5% Fra).
CONCLUSION : Retour sur les explications de la Révolution Industrielle
Abandon des modèles d’explications monocausales (Verley).
La RI est beaucoup plus progressive qu’on ne le pensait. Heaton « Une révolution
qui a continué 150 ans et qui a été en gestation pendant au moins 150 ans semble
bien devoir mériter un nouveau label »
• Problématique du progrès technique
Les progrès de l’agriculture ont été plutôt un préalable, en tout cas au R-U.
Approches en terme de “systèmes techniques“ qui, à leur apogée, ne sont plus
perfectibles et en appellent de nouveaux (Bertrand Gille): textile/charbon/fer au
XVIIIe (et chemins de fer vers 1830-40)
• Les facteurs de production
Pour Marx, les Enclosure Acts ont provoqué un exode rural de pauvres qui a fourni
une main d’œuvre bon marché. Avant la RI, période d’ « accumulation primitive du
capital » avec émergence d’un “capitalisme commercial“, une richesse concentrée
entre un petit nombre et alimentée par la piraterie, le commerce des esclaves et
le pillage colonial.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 8
Rostow, Les étapes de la croissance économique (1960) : 1. Société traditionnelle, 2.
Préparation au décollage, 3. Phase du take-off (taux d’investissement >10%), 4.
Marche vers la maturité, 5. Ère de la consommation de masse.
• Les nouvelles approches
→ Le rôle de la proto-industrialisation
Franklin Mendels (1972) : la proto-industrie a fourni à l’industrie moderne ses
entrepreneurs, ses capitaux (accumulés par ces marchands-entrepreneurs), sa
main d’oeuvre et ses savoir-faire.
→ Les approches en termes de demande
Pour Verley, elle a été un stimulant de l’offre qui a été sous-estimé. Il s’appuie sur
deux exemples :
- Le ratage hollandais : main d’œuvre et production de qualité (draperie,
teinture, porcelaine, brasserie) mais pas de marché intérieur important, et
extérieurs restreints de surcroît en période de guerres. La Hollande a persu
son dynamisme au début du XIXe
- L’exemple britannique : hausse préalable de la D de produits
manufacturés, et notamment des biens de Veblen pour les classes
moyennes (habillement ostentatoire avec les indiennes)
Marché extérieur qui représente 10% du PIB en 1750 et 16% fin XVIIIe
B - LES GRANDES PHASES DE LA CROISSANCE DEPUIS LE DÉBUT DU
19e SIÈCLE
Selon Angus Maddison, 3 phases de la CEM depuis ses débuts :
- 1820-1950 : +0,9% de NDV/an en moyenne
- 1950-1973 : après la reconstruction, pic de croissance à 2,9%
- 1973-2010 : +1,8%/an
Toutes les régions du monde ne sont pas concernées au même moment et avec la
même intensité, donc des écarts se forment.
1) Au 19e siècle et durant la 1ère partie du 20e siècle, la croissance
économique s’installe en Occident
- 1750 : Le PNB des PED est de 112Mds (76%) contre 35Mds (24%) pour les pays
développés (en $ de 1960). Pas d’écarts de niveau de vie selon Bairoch (resp. 188 $
et 182 $)
- 1950 : PNB des PED de 338 Mds (28%), 889 Mds (72%) pour les pays développés
(x25)
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 9
a) 1820-1870 : L’Europe occidentale et le Nouveau Monde entrent dans l’ère de la
croissance
Croissance de 1,0% en moyenne en Europe de l’Ouest (contre 0,3% R-U, 0,2 Fra sur
1700-1820).
Le R-U domine avec 1,3% : le NDV passe de 1706 $ (1820) à 3190 $ (1870), 30% > NDV
US
Ailleurs, croissance imperceptible : +0,3% en Afrique, 0% en Amérique L. et baisse
au Moyen-Orient.
b) 1870-1913 : une croissance plus vigoureuse, et qui gagne d’autres régions du
monde
Accélération en Allemagne (1,1%1,6%) et en France (1%1,5%), essoufflement au
R-U (1,0%).
C’est aux USA que le NDV est le plus élevé. Le Japon connaît désormais la
croissance (0,2%1,5%)
La croissance touche aussi les autres régions : l’Asie&M-O (-0,10,5%), l’Afrique
(0,6%) et l’Amérique Latine (0%+1,9%) : le PIB/hab PPA est plus fort en 1913 en
Argentine (3904$ de 1990) qu’en France (3485$) et en Allemagne (3648$).
c) 1913-1950 : une croissance ralentie et plus heurtée
La croissance ralentit partout, surtout en Allemagne (1,6%0,2%) du fait des
récessions (Guerres mondiales et crise des années 1930).
Ralentissement en Amérique Latine (1,9%1,4%), Asie&M-O (0,5%0,1%) mais
hausse en Afrique (0,6%0,9%).
2) Les Trente Glorieuses et l’âge d’or de la croissance pour les PDEM
a) Un rattrapage de la productivité américaine par les pays européens et le
Japon
Rupture avec la Seconde Guerre mondiale. Croissance forte et durable.
Le niveau de vie augmente de 4% en France, 4,4% en Europe de l’Ouest, de 5% en
Allemagne et de 8,1% au Japon. Au R-U (+2,4%) et aux Etats-Unis (+2,5%), la
croissance est plus faible.
Le NDV double en France en 18 ans, en 14 ans en Allemagne et en moins de 10 ans
au Japon.
Le niveau de vie moyen des USA était 5 fois celui du Japon en 1950, il est 50%
supérieur en 1973.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 10
• Des gains de productivité sans précédent
La PGF explique en majorité la croissance sur la période 1950-73 (entre 55 et 70%
en France, Allemagne et au Japon). La croissance est intensive, sauf aux EtatsUnis.
 Un rattrapage progressif du pays leader
Rattrapage de la productivité des Etats-Unis (+2,7%/an) par la France (+5,1%),
l’Allemagne (+6%) et le Japon (+7,7%) sur la période 1950-1973.
En termes de revenus, le NDV français passe d’un tiers à 75% du NDV des EtatsUnis (D.Cohen).
Effet d’imitation des Etats-Unis, sur la frontière technologique (économie de
temps et de dépenses). La reconstruction, poussée par le Plan Marshall, permet
de moderniser les appareils productifs.
b) Une croissance moins vigoureuse dans les autres régions du monde
Progression, mais moins importante, dans les autres régions.
Sur la même période, le PIB s’accroît de 5% en France mais la croissance de la
population est de 1%.
3) Depuis 1974, une nouvelle géographie de la croissance
a) Une croissance réduite dans les PDEM
• La croissance du niveau de vie diminue sensiblement
Allemagne
France
Royaume-Uni
Europe de l’Ouest
(30 pays)
USA
Japon
Monde
TCAM 1973-2008
1,6%
1,5% (rythme divisé
par 2,7)
2% (-28%)
1,9%
TCAM 1950-73
5%
4%
1,8%
2% (rythme divisé
par 4
1,8%
2,5%
8,1%
2,4%
4,4%
→ Mais il faut relativiser cette impression de faiblesse de la croissance
C’est plutôt la croissance entre 1950 et 1973 qui est atypique.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 11
La croissance est plus élevée que pendant la 1e RI et sont comparables à la période
1870-1913.
Samuelson « La croissance des années 1960 fut une sorte de miracle économique ; la véritable
question n’est pas de savoir pourquoi les choses vont si mal aujourd’hui, mais comment elles ont
pu aller aussi bien à cette époque »
→ La création de richesse demeure importante
Entre 1950 et 1973, le NDV a augmenté de 6 800$ PPA 1990 en Europe de l’Ouest.
La hausse est de 6.700$ entre 1973 et 1998).
Entre 1976 et 2011, le niveau de vie a doublé au R-U, augmenté de 90% aux EtatsUnis, de 80% en Espagne et de 60% en France.
b) Le monde en développement prend le relais de la croissance
Progression constante depuis 1980. C’est dans les années 2000 que tous
deviennent des relais.
CONCLUSION : Les périodes et les rythmes de croissance sont différents entre les
régions.
Bairoch : L’écart de NDV est inexistant en 1750, de 2 (1860) puis 3 (1900) 5,5 (1950)
et 8 (1990)
P.N. Giraud : Les inégalités sont d’abord internes aux sociétés (XVIIIe) puis moins
internes et entre pays (XXe) et elles redeviennent internes dans les PDEM avec le
rattrapage des PED (depuis 1970s)
Maddison : bouleversements de la hiérarchie mondiale (ex. Argentine-Espagne
entre 1913 et 1998, Corée du Sud-Ghana (1945-1998) et Italie-Irlande (1970-1998)).
II - CERNER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
A - DÉFINIR LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
1) Distinguer la croissance économique du développement
a) Quelques définitions canoniques de la croissance économique
Plusieurs définitions de la croissance économique :
- Kuznets: « augmentation à long terme de la capacité d’offrir une diversité
croissante de biens, cette capacité croissante étant fondée sur le progrès de la
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 12
-
technologie et les ajustements institutionnels et idéologiques qu’elle
demande.» 1971  S’intéresse aux sources
Paul Bairoch: «C’est un processus cumulatif d’interactions qui se traduit par
une hausse continue de la productivité.» 1977.
F. Perroux: «La croissance économique correspond à l’augmentation soutenue
pendant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de dimension: pour
une nation, le produit global brut ou net en termes réels» 1961
 Différenciation du développement
b) La notion de développement tarde à s’émanciper de la notion de croissance
économique
• Une analogie durable entre croissance du niveau de vie moyen et
développement
Analogie car : - La CEM s’est traduite par une hausse du NDV moyen
- La croissance est simple à mesurer
- Approche “utilitariste“ des macroéconomistes (Bentham) : « ce qui est conforme
l’intérêt d’une communauté, c’est ce qui tend à augmenter la somme totale du
bien-être des individus qui la composent »
Limite : la richesse peut être répartie plus ou moins égalitairement au sein de la
société.
• Le développement résulterait de la croissance économique ?
→ Dépendance ou interdépendance des deux notions ?
F. Perroux (1961) inverse la relation: «le développement c’est la combinaison des
changements mentaux et sociaux d’une population qui la rendent apte à faire croitre
cumulativement et durablement son produit réel et global»
- Croissance et développement sont interdépendants. La croissance génère du
développement. Et le développement permet une croissance cumulative et
durable.
- Le développement a une dimension qualitative et la croissance une dimension
quantitative
• Une croissance sans développement ?
Pour les économistes des années 1960, la croissance doit conduire au progrès
dans les pays en retard de développement. Idée que c’est la croissance qui
conduit au développement, critiquée par les économistes du développement,
notamment les Tiers-mondistes.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 13
2) Approches de courte période et de longue période
a) Croissance potentielle et croissance effective
• La croissance potentielle, une tendance de long-terme
- Croissance effective = croissance réelle. Mesurée par l’INSEE sur une période
(année) donnée.
- Croissance potentielle: construction de long-terme. Résulte d’une utilisation
optimale de K et L sans tensions inflationnistes (au NAIRU). Permet de savoir si on
peut stimuler une plus forte production.
• Toute la difficulté est de mesurer le PIB potentiel
Deux méthodes :
- Dériver le PIB potentiel de la tendance passée, le trend.
- Intégrer l’emploi potentiel, la productivité et le stock de K dans une fonction de
production
• Les “output gap“ positif/négatif
Lorsque 𝐺𝐸 > 𝐺𝑃 : Économie en sous-capacités de production : tensions
inflationnistes
Lorsque 𝐺𝐸 < 𝐺𝑃 : Économie en surcapacités : hausse du chômage
La croissance peut influer durablement sur la croissance potentielle (cf. croissance
stochastique)
b) Différencier les déterminants de long-terme de ceux de court-terme
Pour accroître la croissance effective à court-terme, jouer sur les facteurs de
demande (C,I, Ex)
Pour accroître la croissance potentielle à long-terme, jouer sur les facteurs d’offre
(Stock de K/L, PGF)
B) LA MESURE DE LA CROISSANCE S’APPUIE SUR LES AGRÉGATS DE
LA COMPTABILITÉ NATIONALE
1) L’approche « production » : le PIB comme résultat d’une activité
productive
a) Production et croissance économique en CN
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 14
• La mesure de la production en comptabilité nationale : la production est
à la fois un processus et le résultat d’un processus.
Production : processus de combinaison des facteurs de production pour créer des
biens/services
C’est un flux. Certaines productions sont naturelles (↗stocks de poissons) mais
pas économiques.
 La comptabilité nationale distingue trois types de production
- La production marchande : destinée à être vendue sur un marché à au moins 50%
de son coût de production. Évaluée au prix de base, prix reçu par le producteur
(hors TVA, etc.)
. 81% du PIB en 2014.- - La production finale pour emploi
propre (PEFP) : destinée aux producteurs. Vient à 86% des ménages (autoconsommation, auto-équipement, services (h/f de ménage, loyers).
Évaluée aux prix de marché. 276Mds € en 2014
- Autre production non marchande : production gratuite ou quasi-gratuite par des
agents à d’autres (vendue à moins de 50% des coûts). Essentiellement des APU et
des ISBLSM. 444Mds € en 2014.
Estimée aux coûts de production.
Économie non-observée (activités illégales et légales illégalement) marchande ou
non-marchande.
 La valeur ajoutée d’une branche d’un Secteur Institutionnel
À l’échelle de l’agent, la VA est la richesse qu’il a crée.
Pour la mesurer plus efficacement : 𝑉𝐴𝑁 = 𝑉𝐴𝐵 − 𝐶𝐶𝐹
(avec CCF :
amortissements)
Mais plus difficile à mesurer (quelles normes d’amortissements ?), donc on
privilégie le PIB.
On peut agréger les VA des branches :
𝑉𝐴𝐵(𝐵) = 𝑃𝐵 − 𝐶𝐼𝐵
 Le PIB
C’est l’agrégat de la production, donc un flux de richesses. Privilégié au PIN,
somme des VAN.
On calcule la croissance en termes de volume, en déflatant par l’indice des prix à
la production.
• La mesure de la croissance économique en comptabilité nationale
 Elle se mesure en “volume“ par le taux de croissance du PIB à prix constants
Sur longue période, les historiens lui préfèrent la croissance du PIB par tête.
Temps nécessaire au doublement du PIB (si croissance régulière) : 70/Taux de
croissance
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 15
 Elle se mesure souvent en PPA lors des comparaisons internationales (OCDE
depuis 1954)
On exprime tous les PIB dans la même devise. L’OCDE fixe des taux de change
fictifs à partir des prix de paniers de produits dans chaque pays.
b) Un débat ancien sur ce qu’est la richesse d’une nation
• Un sujet de prédilection de l’économie politique depuis ses débuts
Smith (1776) évoque les 2 systèmes qui, avant lui, ont réfléchi aux moyens
d’enrichir le peuple :
- Le système mercantile : « Le plus connu dans le pays et le siècle où j’écris » (Smith)
- Le système de l’agriculture (les Physiocrates).
Smith va vivement s’opposer au mercantilisme et souligner les forces/faiblesses
chez les Physiocrates.
 Pour les mercantilistes : « Le bonheur des hommes [...] consiste
principalement en la richesse » (Antoine de Montchrestien, 1576-1621)
Le mercantilisme n’est pas un corps de doctrines unifiées : les Français/Allemands
mettent l’accent sur le rôle de l’industrie dans l’enrichissement. Les espagnols
s’inquiètent de la dépopulation et dés déficits commerciaux (sorties des métaux
précieux) dans un contexte de décadence de l’Espagne (déroute de l’Invincible
Armada en 1588 et deux banqueroutes)
1) L’enrichissement est la fin de la vie sociale (il n’est plus blâmable), et
l’enrichissement du roi est compatible avec celui des marchands, qui développent
la puissance du royaume par l’économie.
2) Populationnisme : l’enrichissement se fait par le développement de la
population
Jean Bodin (1577) : « Il ne faut jamais craindre qu'il y ait trop de sujets, trop de
citoyens vu qu'il n'y a de richesse, ni force que d'hommes » : ↗Population  ↗Main
d’œuvre dans l’industrie et ↘Salaires  ↗Exportations  Possibilité de nourrir
plus d’hommes
3) L’enrichissement par le commerce, pour permettre l’entrée de richesse
(métaux). Ils sont souvent accusés de “bullionisme“ mais il est difficile de savoir si
ils confondaient monnaie et richesse (Blaug)
Pourquoi attirer les métaux précieux ? Pour faciliter l’emprunt, les travaux les
affaires donc les profits, mais aussi pour faire face à des dépenses exceptionnelles
(plus facile de lever l’impôt en guerre).
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 16
On veut aussi limiter la sortie des métaux par le commerce international: Thomas
Mun « Vendre plus aux étrangers chaque année que nous ne consommons, en valeur,
de biens produits par eux »
Comment ? Par les débouchés (ex : conquête coloniale). L’État doit aussi créer des
manufactures dans les secteurs défaillants.
Ex : le colbertisme. Colbert a mis en place des compagnies de commerce (des
Indes Orientales, du Levant, etc.), des manufactures (Gobelins, Glaces de SaintGobain, etc.), des droits de douane quasi-prohibitifs (Provinces Unies, Angleterre).
Mais les compagnies ont souffert, et les autres pays ont instauré des barrières.
Mais avant tout, le colbertisme a négligé l’agriculture : crises agricoles dans tout le
royaume.
 Les Physiocrates estiment que seule l’agriculture crée la richesse
Smith rend hommage aux Physiocrates qui ont montré que les richesses d’or et
d’argent ne se consomment pas mais leur reproche de rendre stériles les activités
manufacturières et marchandes.
Idée de circuit, d’un organisme vivant (un ordre et des flux) : Quesnay publie son
Tableau économique en 1758. Il souligne que les dépenses des uns sont les revenus
des autres. Des marchandises et de l’argent circulent entre trois grandes classes
de la société :
- Les cultivateurs (ou fermiers) : produisent les richesses
- Les propriétaires fonciers : perçoivent la rente et décident de sa dépense entre
les 2 autres classes
- Les artisans : transforment la richesse extraite et la vendent aux deux classes (ils
sont donc utiles)
Quesnay : « Les ministres [...] n’ignorent pas que ce sont les richesses des habitants
de la campagne qui font naître les richesses de la nation. Pauvres paysans, pauvre
royaume »
 Les classiques et la délimitation des activités productives
- Les travailleurs :
perçoivent le fruit de leur travail
- Les propriétaires fonciers : perçoivent une rente
- Les détenteurs de capitaux :
reçoivent des profits
Pour Smith est productive toute activité qui produit de la valeur et se fixe dans un
objet : les services, comme le travail des domestiques, sont donc improductifs : ils
disparaissent quand on les rend.
Il évoque la théorie de la valeur travail: la valeur d’un objet provient de la quantité
de travail apportée
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 17
À la valeur de la matière, le travailleur ajoute celle de sa subsistance et le profit de
son maître : le profit est une déduction, prise par le maître, en contrepartie des
avances de capital.
Smith souligne ainsi un rapport de force favorable au capitaliste : difficulté de la
condition ouvrière.
Say : les services sont productifs parce qu’ils satisfont un besoin (théorie de la
valeur utilité).
• La comptabilité nationale n’a pas mis fin aux débats sur la frontière du
champ de la production
 Les services ont été intégrés tardivement
3 exemples :
- Les services ne sont intégrés dans la comptabilité de l’URSS qu’en 1991
- Les services des administrations (publiques et privées) ne sont intégrés qu’en
1976 en France
- Les services d’intermédiation financière des banques (SIFIM) n’étaient pas
comptés (et la VA du secteur financier était négative)
 Le PIB néglige des activités pouvant être légitimement considérées comme
productives
Il néglige la production domestique de services.
Alfred Sauvy : « Épousez votre femme de ménage et vous ferez diminuer le PIB »
Logique de les comptabiliser car :
- La sphère domestique se marchandise (d’où ↗PIB non justifiée)
- Les productions domestiques de biens sont comptabilisées
Mais problème de mesure: Quels périmètre (jouer avec ses enfants?) et
valorisation (SMIC net/brut?)
CONCLUSION (critique du PIB comme indicateur de richesse) :
1. Le PIB est un flux. Or la richesse est un stock, un patrimoine
2. Le PIB ne tient pas compte des destructions (notamment de capital naturel)
3. C’est une mesure très matérialiste (sociale, environnementale) de la richesse
d’une population, dénoncée par Méda, Gadrey, etc.
Gadrey : « On sait que le
beaucoup-avoir n’est pas le bien-être »
Mais ce n’est pas le but du PIB selon les comptables nationaux :
Kuznets: «La mesure du revenu national peut difficilement servir à évaluer le bienêtre d’une nation»
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 18
2) L’approche « demande » du PIB : l’utilisation de la richesse créée
a) De l’équilibre ressources-emplois d’un produit à l’équilibre général ressourcesemplois
 L’équilibre ressources-emplois d’un produit
𝑷 + 𝑰𝑴 + 𝑴𝑪 + 𝑴𝑻 + (𝑰𝑷 − 𝑺𝑷) = 𝑫𝑪 + 𝑪𝑰 + 𝑭𝑩𝑪𝑭 + 𝑬𝑿 + ∆𝑺𝒕𝒐
 L’équilibre général ressources-emplois
𝚺𝑷 + 𝚺𝑰𝑴 + 𝚺𝑴𝑪 + 𝚺𝑴𝑻 + 𝚺(𝑰𝑷 − 𝑺𝑷) = 𝚺𝑫𝑪 + 𝚺𝑪𝑰 + 𝚺𝑭𝑩𝑪𝑭 + 𝚺𝑬𝑿𝑷 + 𝚺𝑽𝑺
Or la production des branches commerciales (et de transport) correspond à leurs marges MC
et MT.
D’où 𝛴𝑃𝐵 = 𝛴𝑃𝑃 + 𝛴𝑀𝐶 + 𝛴𝑀𝑇
 𝜮𝑷𝑩 + 𝜮𝑰𝑴 = 𝑫𝑪 + 𝑭𝑩𝑪𝑭 + 𝑽𝑺 + 𝑬𝑿
Aussi, 𝛴𝑃𝐵 − 𝛴𝐶𝐼 = 𝛴𝑉𝐴𝐵
et 𝛴𝑉𝐴𝐵 + 𝛴(𝐼𝑃 − 𝑆𝑃) = 𝑃𝐼𝐵
d’où :
 𝑷𝑰𝑩 + 𝑰𝑴 = 𝑫𝑪 + 𝑭𝑩𝑪𝑭 + 𝑽𝑺 + 𝑬𝑿
• Les principaux agrégats des “emplois“
 Les agrégats de consommation
Consommation : Utilisation d’un bien ou d’un service qui entraîne sa destruction
-Consommation finale: acquisition de biens/services pour satisfaction directe d’un
besoin (Mén., APU)
- CF collectives : non imputables à un Secteur Institutionnel (ex : Défense)
- CF individuelles : au bénéfice ultime des ménages (ex : Éducation, Justice)
-Consommation effective : dépenses individualisables directes (DC) et indirectes
(Éducation, Santé)
𝐶𝐸 𝑚é𝑛𝑎𝑔𝑒𝑠 = 𝐶𝐹 𝑖𝑛𝑑𝑖𝑣𝑖𝑑𝑢𝑒𝑙𝑙𝑒𝑠 𝑑𝑒𝑠 𝑚é𝑛𝑎𝑔𝑒𝑠 +
𝐶𝐹 𝑖𝑛𝑑𝑖𝑣. 𝑑𝑒𝑠 𝐴𝑃𝑈 (𝑡𝑟𝑎𝑛𝑠𝑓𝑒𝑟𝑡𝑠 𝑠𝑜𝑐𝑖𝑎𝑢𝑥 𝑒𝑛 𝑛𝑎𝑡𝑢𝑟𝑒)
• La FBCF
Ce flux représente des investissements pouvant être matériels ou immatériels
(depuis le SEC 95 la FBCF, par ex. la pub, les logiciels, la prospection minière, les
œuvres récréatives littéraires ou audiovisuelles, etc.)
Le SEC 2010 intègre aussi la R&D.
La FNCF traduit l’évolution de la valeur des capacités de production : 𝑭𝑵𝑪𝑭 =
𝑭𝑩𝑪𝑭 − 𝑪𝑪𝑭
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 19
b) L’équilibre ressources-emplois permet d’analyser les « moteurs » de la
croissance
Approche demande du PIB :
𝑃𝐼𝐵 = 𝐶𝐹 + 𝐹𝐵𝐶𝐹 + ∆𝑆𝑡𝑜 + 𝐸𝑋 + 𝐼𝑀
• L’approche demande du PIB permet d’analyser la conjoncture
À l’aide de cette équation, on peut calculer les contributions des différentes
composantes du PIB à la croissance, en pondérant leur taux de croissance à la
part de la composante dans le PIB.
• L’approche demande du PIB permet aussi des analyses sur plus longue période
On peut déterminer les moteurs de la croissance sur longue période, en
déterminant quelles composantes de la demande (inv., exp., conso. des ménages)
pèsent le plus.
Par exemple, le modèle de croissance de la Chine reposait sur le commerce
extérieur depuis 1970. Aujourd’hui, elle en dépend et c’est un facteur de
récession. Depuis 2010 : ↗Salaires ↗C.F.
3) L’approche « revenu » du PIB : la production est aussi source de
distribution de revenu
a) Les bénéficiaires du partage de la valeur ajoutée (VA)
• La valeur ajoutée correspond à une richesse nouvelle qui est la source de
tous les revenus
La VA est distribuée sous forme de revenus primaires (revenus issus de
participations à la production).
Le PIB est donc aussi un agrégat de revenus : tous les revenus versés aux unités
résidentes
• Le partage de la VA des SNF
La VAB (au prix de base) est répartie entre :
- Impôts sur la production (nets des subventions): proportionnels, excluent les
impôts sur les produits
- Rémunération du travail : Rémunérations de base (salaire), annexes (primes,
nature) + indirectes (épargne salariale et cotisations sociales).
- Rémunération du capital (EBE) : Intérêts d’emprunt + impôts sur les sociétés +
dividendes + épargne brute (amortissements et bénéfices mis en réserve).
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 20
• Les revenus primaires des principaux secteurs institutionnels
- Le SI des ménages peut avoir trois revenus :
- Revenus du travail
- Revenu du patrimoine/capital
- Revenus mixtes (pour les ménages qui ont des EI)
- Les revenus primaires des SNF :
- Uniquement des revenus du capital (dividendes, intérêts de prêts)
b) Les agrégats de revenu de la CN
• L’approche revenus du PIB permet d’analyser la répartition de la
richesse produite
𝑷𝑰𝑩 = 𝑹é𝒎𝒖𝒏é𝒓𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒅𝒖 𝒕𝒓𝒂𝒗𝒂𝒊𝒍 + 𝑬𝑩𝑬 (𝒆𝒕 𝒓𝒆𝒗𝒆𝒏𝒖 𝒎𝒊𝒙𝒕𝒆 𝒃𝒓𝒖𝒕) + 𝑰𝒎𝒑ô𝒕𝒔
− 𝑺𝒖𝒃𝒗. 𝒔𝒖𝒓 𝒍𝒂 𝒑𝒓𝒐𝒅𝒖𝒄𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒆𝒕 𝒍𝒆𝒔 𝒊𝒎𝒑𝒐𝒓𝒕𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏𝒔
En 2014 : Salariés (53% du PIB), EBE (33,9%), Impôts nets sur la production
• Le RNB (ancien PNB depuis SN 93)
Les revenus primaires reçus par les unités productives résidentes Meilleure idée
du revenu national
𝑹𝑵𝑩 = 𝑷𝑰𝑩 − 𝑹𝒆𝒗𝒆𝒏𝒖𝒔 𝒑𝒓𝒊𝒎𝒂𝒊𝒓𝒆𝒔 𝒗𝒆𝒓𝒔é𝒔 𝒂𝒖 𝑹𝑫𝑴
+ 𝑹𝒆𝒗𝒆𝒏𝒖𝒔 𝒑𝒓𝒊𝒎𝒂𝒊𝒓𝒆𝒔 𝒓𝒆ç𝒖𝒔 𝒅𝒖 𝑹𝑫𝑴
France : RNB = 1,02 PIB
Irlande : RNB = 0,85 PIB
Luxembourg : RNB = 0,74 PIB
(en 2014)
c) Les évolutions du partage de la VA sur longue et moyenne périodes
• Une étonnante stabilité du partage de la VA sur très longue période
Déjà sur la période 1800-1900 au Royaume-Uni (Bowley), 1899-1922 (Cobb).
Saez, Piketty : En France et aux USA, le taux de marge reste stable autour de 30%
dans le XXe siècle
En général : 2/3 pour le travail, 1/3 pour le capital
• Cette constance n’empêche pas certaines déformations temporelles
importantes
Philippe Askenazy, Gilbert Cette : « La science économique est encore loin de disposer d’une
théorie satisfaisante du partage de la valeur ajoutée, que ce soit d’un point de vue normatif ou
d’un point de vue positif »
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 21
Avant la crise de 2008, la question du partage de la VA suscitait des inquiétudes
quant aux inégalités.
Dans les années 1970, taux de marge à 30%. Puis, maintien des règles de ↗ des
salaires et ↘croissance  ↗Part des salaires (taux de marge de 24% en 1982).
Puis, modération salariale mais ↗VA  69% en 1990.
Dans les années 2000, il s’érode en France, mais pas en Allemagne, car ↗ CSU
𝑆𝑎𝑙𝑎𝑖𝑟𝑒 ℎ𝑜𝑟𝑎𝑖𝑟𝑒
(coût salarial unitaire = 𝑃𝑟𝑜𝑑𝑢𝑐𝑡𝑖𝑣𝑖𝑡é ℎ𝑜𝑟𝑎𝑖𝑟𝑒), mais aussi car ↘ prix de la VA en France
mais ↗ en Allemagne (comp. hors-prix)
III-LA FIN DE LA CROISSANCE ?
A - VERS UN ÉPUISEMENT DE LA CROISSANCE ?
1) La problématique de la fragilité de la croissance n’est pas nouvelle
a) Les économistes classiques sont les premiers à aborder la question d’un « état
stationnaire »
• Une théorie de la répartition des revenus entre rentes, salaires et profits
Ricardo (1817) : « Déterminer les lois qui règlent cette distribution, voilà le principal problème en
économie politique »
 Le montant de la rente dépend “du prix du blé et de la qualité de la terre“
Rente: revenu du propriétaire foncier versé par les fermiers car ils sont en
concurrence (↗population)
Le prix du blé dépend des coûts de production de la terre marginale, c’est-à-dire la
moins fertile en culture et qui nécessite plus de travail que les autres.
Rente foncière = Prix du blé - Coûts de production
 Elle est différentielle:
dépend de la qualité
La terre marginale ne paie pas de rente : elle est de qualité moindre donc n’est pas
“rare“. On paiera une rente dessus seulement lorsque des terres moins fertiles
seront utilisées
Ricardo « Le blé n’est pas “cher parce que l’on paie une rente“ mais “on paie une rente
parce que le blé est cher“ »
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 22
 Le salaire “de marché“ a tendance à se conformer au salaire naturel (/de
subsistance)
Pour Ricardo, c’est un salaire de subsistance : il dépend « du prix du blé ». Lorsque
le salaire de marché est momentanément inférieur, ↗mortalité ↘Offre de
travail  ↗ Salaire de marché.
(Même ajustement si le salaire est momentanément supérieur)
 Le profit est un revenu résiduel
Agricole ou manufacturier, il est la différence entre le prix de vente et le salaire
versé
 Conflit d’intérêt entre travailleurs et capitalistes.
Les taux de profit, rapport entre profit et capital, ont tendance à s’égaliser entre
les branches (car mobilité des facteurs de production). Conditionne
l’investissement : il est essentiel chez les classiques.
• Baisse du taux de profit et état stationnaire
 Une analyse de (très) long-terme de la dynamique de la répartition
Ricardo : la croissance est limitée dans le temps, la société va entrer dans un état
stationnaire
 Crainte d’un retour à un monde malthusien
↗Conditions de vie ↗Population  ↗Demande  Mises en culture de terres
moins fertiles
↗Prix des ressources alimentaires ↗Salaires nominaux et rente ↘ Taux de
profit  ↘Investissements (surtout des inv. de remplacement)  Niveau de vie
stationnaire
 Des incertitudes quant à l’échéance
Les fertilités ne sont pas les mêmes : l’état stationnaire n’arrivera pas partout en
même temps.
On peut le retarder par:
-L’importation de produits agricoles moins chers: il
est contre les Corn Laws
-Améliorations des facultés productives de la terre: ↘Travail
nécessaire
b) Les « stagnationnistes » réactualisent cette problématique dans les années
1930
En 1937 rechute aux US: resserrement monétaire de Roosevelt pour lutter contre
inflation et déficits
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 23
Alvin Hansen: pressions déflationnistes car raréfaction des occasions d’investir.
On ne peut plus compter sur trois stimulants de l’investissement :
- Les innovations technologiques
- La découverte de nouveaux territoires
- La croissance de la population (EU & USA)
Hansen: stagnation menace les USA. Les dépenses gouv. peuvent stimuler, mais
contre la libre-entreprise. Il critique Keynes (dont il s’inspire) dont le contrôle
social de l’investissement mènerait au socialisme.
2) La CEM, parenthèse dans l’histoire de l’humanité ?
a) Le retour du spectre de la « stagnation séculaire »
 Vers un épuisement de l’innovation et de la croissance ?
Gordon, Is US economy growth over ?: « pourrait bien être un épisode dans l’histoire
de l’humanité »
- Baisse de la croissance de la productivité horaire aux Etats-Unis :
+2,36%/an (1891-1972)  +1,36% (1972-1996)  +2,54% (1996-2004)  +1,33% (20042012)
Gordon : la croissance va ralentir et devenir quasi-nulle d’ici la fin du siècle (il
l’estime à 0,2%/an)
Causes : baisse de l’innovation et “vents contraires“ (vieillissement, climat,
déficits, inégalités, etc.)
Il ne dessine aucune piste pour éviter ou retarder cet épuisement de la croissance.
 Une croissance potentielle réduite par une demande durablement déprimée
Summers : Les pays développés connaitraient une “stagnation séculaire“. Les
bulles spéculatives (internet, immobilier, etc.) ont stimulé artificiellement la
demande. La crise de 2008-2009 est un retour à la normale. Demande insuffisante
 sous-investissement  ↘ Croissance potentielle
La politique monétaire ne parvient alors plus à stimuler la demande (taux déjà
bas)
Depuis 1974, ralentissement dans les PDEM: en Fra: 3,4% (1974-83) 2,0% (9403) 0,6% (2004-13)
Artus, Virard : Entre les années 1990 et 2000-13, TCAM divisé par 2 aux USA, 3 en
Allemagne et par 5 au RU.
5 explications: - Perte d’efficacité de la R&D (rendements décroissants. Ex : nombre
de médicaments par milliards investis divisé par deux en 9 ans)
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 24
- L’augmentation du coefficient de capital : dans les pays développés,
deux fois plus de capital pour produire la même quantité. Ex : Baril
conventionnel coûte 23 dollars à produire, l’offshore profond 52 dollars, le
schiste 72 dollars et le schiste bitumineux 115 dollars.
- L’augmentation du poids des services : leurs gains de productivité
sont plus faibles
- Insuffisant niveau de qualification de la pop. active : 7% des 18-65 ans
illettrés
- L’insuffisance d’innovations majeures, de rupture : on est
préoccupés par leurs risques
Il faut trouver selon eux les moyens de jouer sur le PIB potentiel.
b) « La prévision est un art difficile, surtout quand elle concerne l’avenir » (Pierre
Dac)
Alvin Hansen prédisait une stagnation séculaire en 1950 : il s’est trompé. Pour les
“technoptimistes“ :
- Les statistiques négligent les effets qualité (ex : gains de temps avec Internet).
Comment les mesurer ?
- Il faut un certain temps pour voir les innovations dans les statistiques de
productivité
Paradoxe de Solow (1987): « you can see the computer age everywhere except in the
productivity statistics »
À partir des années 1990, les gains de productivité sont devenus réels : Solow
reconnaitra son erreur.c
Autre problème: la compatibilité de la croissance avec la préservation de
l’environnement Kenneth E. Boulding: «Celui qui croit que la croissance peut être finie dans
un monde fini est soit un fou, soit un économiste»
•Joël MOKYR (Is technological progress a thing of the past ?, 2013) et MC AFEE (The
second machine age, 2014) : les deux pensent que nous sommes à l’aube d’une
révolution technologique qu’ils appellent un point d’inflexion technologique
(2020). À l’origine de la croissance des Trente Glorieuses on a eu les gains de
productivité : entre 1945 et 1974, 2 fois plus de brevets que sur les 150 dernières
années.
Pour Mc AFEE, les secteurs qui peuvent apporter des innovations majeures :
l’imprimante 3D, la voiture sans conducteur, les biotechnologies, les
nanotechnologies, la big data et, vers 2070, la fusion nucléaire.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 25
CCL : la tertiarisation est-elle une bonne nouvelle pour l’avenir de la croissance ?
Jusqu’en 1975, TOUS les pays développés ne cessent d’être en industrialisation
(augmentation du poids de l’industrie dans la production). 1975 est l’apogée du
poids de l’industrie (40% du total des emplois en France. 12 aujourd’hui. 10 aux US
(le moins industrialisé) et 19 % en Allemagne (max)).
En France : Secteur secondaire (19%) = Industrie (12%) + BTP (7%).
Or, c’est dans les 30 dernières années de notre industrialisation que la croissance
française est la plus forte. Et l’accélération de la tertiarisation coïncide avec la
baisse de la croissance et la désindustrialisation. Faut-il s’inquiéter de la
tertiarisation ?
•
 Les inquiétudes de la tertiarisation sur la croissance ne sont pas nouvelles
Classiques libéraux comme socialistes n’expliquaient la croissance que par
l’accumulation du capital dans l’industrie.
 Baumol : théorie de la productivité différentielle (1988). Elle repose sur deux
constats incompatibles l’un avec l’autre : 1/ Les gains de productivité dans
l’industrie ont tendance à être plus élevés donc à mesure que les emplois
industriels se déversent dans le tertiaire, la croissance s’essouffle (car pour
Krugman à LT, gains de productivité = croissance. Pourquoi ? Parce que les PmK et
PmL sont décroissantes, donc à LT il ne reste plus que les gains de productivité) 2/
Les salaires dans le tertiaire ont tendance à augmenter autant que dans l’industrie
Antinomique : donc il y’a un grand risque que les salaires augmentent plus vite
que la productivité dans le tertiaire. Or, en France, c’est 78% des emplois. 80% aux
US.
La conséquence ? L’inflation ! le seul moyen de maintenir la marge bénéficiaire
pour une entreprise.
Donc la tertiarisation ferait naître une double peine : ralentissement de la
croissance et dérapage inflationniste.
• Mais il y’a des raisons d’être mois inquiet :
 il y’a une part de la désindustrialisation qui est une illusion : une part de la
désindustrialisation, selon Ronald Coase, concerne l’externalisation de services
qui jusque là étaient internalisés (restauration, nettoyage, secrétariat, etc.). On
estime que cela représente 25% de la désindustrialisation.
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 26
 Le processus de désindustrialisation pour un pays développé n’est pas
inéluctable.
Car depuis 10 ans (US) et 15 ans (Allemagne), on cesse de perdre des emplois
industriels et on en regagne. En 2007, c’était 9% aux US (remontée grâce aux
schistes).
Et en Allemagne, les lois Hartz ont redonné de la compétitivité à l’industrie.
Et c’est le premier excédent commercial au monde. Alors même que c’est un
PDEM.
Krugman La mondialisation n’est pas coupable (1994) : la concurrence entre PDEM
et PED n’existe pas sur le secteur de haute technologie (nocléaire, aéronautique)
et sur le secteur de faible technologie (textile). Elle n’existe que sur les moyennes
technologies (automobile).
Et la condition sur les secteurs de moyenne technologie pour être compétitif,
c’est que le rapport productivité/coût salarial du nord égale celui du Sud. Et c’est
par la R&D et le système social que ce rapport peut changer. C’est ce qu’a fait
l’Allemagne, avec la TVA sociale (2007, 3 pts de TVA qui financent la sécurité
sociale) et les Lois Hartz (2005)
• Voire d’être optimiste
 L’école de la croissance endogène : la croissance n’est plus redevable à
l’accumulation de capital fixe, mais plutôt de capital technologique et humain :
donc l’accumulation de connaissances. Il y’a pas de raison pour qu’elle soit moins
importante. De plus, le tertiaire favorise la diffusion gratuite de connaissances.
L’économie la plus tertiarisée au monde (les états-Unis) retrouve même un pleinemploi des facteurs, en dépit d’une croissance moins forte. Et l’objectif n’est pas
un taux de croissance fort, mais le plein-emploi
 L’impact sur l’environnement : l’industrie ne sait pas créer sans détruire. Ni
émettre/rejeter des déchets, donc polluer. Les activités tertiaires pourraient alors
être moins énergivores (en non renouvelables). Mais pas forcément moins
polluantes : si le premier émetteur mondial de CO2 est la Chine (la plus
industrialisée), le premier par tête est les US (la plus tertiarisée).
D’où la nécessité de marchés de droits de pollution : or en Europe, le transport
routier en a été exempté.
B - DE LA RICHESSE AU BONHEUR ?
1) La croissance n’apporte pas forcément un gain de bien-être
a) Le développement humain ne peut être assimilé à la hausse du niveau de vie
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 27
• Les insuffisances d’une approche uniquement par le seul niveau de vie
- Law income economies : RNB/hab < 1.045$
(31 en 2015, de moins en moins
nombreux)
- Lower-middle income economies : entre 1.046 $ et 4.135 $
(51 pays
dont Inde, Indonésie)
- Upper-middle income economies : entre 4.136 $ et 12.735 $
(53 pays
dont la Chine)
- High-income economies : RNB/hab > 12.736 $
(80 pays en 2015)
• Une vision très sommaire du développement
- Le RNB sous-estime la production de richesse des PED (autoconsommation,
économie informelle)
- Le RNB dissimule la répartition des richesses et donc les inégalités
- Le développement est un phénomène multidimensionnel, pas seulement de
niveau de vie
• Le bien-être humain comme finalité du développement
Amartya Sen : « Le point de départ de ce que l’on peut appeler approche du développement humain consiste à
percevoir les être humains en terme de leur bien-être, et que cela diffère notablement d’une approche par le
développement qui se concentre sur les revenus, la richesse et les biens matériels »
« processus qui conduit à l’élargissement de la palette des choix qui s’offre aux
individus » (PNUD)
Amartya Sen : notion de capabilities, capacité à choisir sa vie, accomplir ses
objectifs. Certains obstacles (illetrisme, maladie, manque de libertés politiques)
réduisent les capabilities.
b) La dégradation de l’environnement générée par la croissance menace le bienêtre des présentes et à venir
• La croissance peut résulter d’activités qui n’accroissent pas le bien-être
Le PIB intègre des dépenses qui correspondent davantage à des compensations
de perte de bien-être, des dépenses défensives (J.Tobin, W.Nordhaus, 1983), ex:
dépollution, lutte contre le tabac, sécurité
• Pire, la croissance économique s’accompagne de dégâts environnementaux
Dès 1970 les économistes tirent la sonnette d’alarme (Georgescu, rapport
Meadows) : épuisement des ressources naturelles et pollution provoquerait la
rupture.
Rapport Brundtland (1987): l’activité humaine menace le futur de la croissance.
Sustenable development avec 3 dimensions: - Économique
- Écologique Humaine et sociale
2) L’économie à la recherche de la nature et des causes du bonheur
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 28
Keynes (1930) : Dans 100 ans le niveau de vie sera tel que le problème économique
sera résolu.
Aujourd’hui, la question du niveau de vie se pose toujours ( pourquoi vouloir
toujours plus ?)
a) La “science lugubre“ s’intéresse désormais au bonheur
Paradoxe d’Easterlin (PDEM): la hausse du PIB/hab ne s’est pas traduite par une
satisfaction accrue.
Les économistes cherchent à mesurer le lien NDV-bien-être, mais aussi les
déterminants du bonheur.
Limites: -Flou conceptuel (utility, satisfaction, happiness) -Ils s’appuient sur des
déclarations
-Différences (linguistiques, d’échelle) entre pays: on ne peut pas exporter
cette notion partout
Mais on remarque des faits stylisés en confrontant les enquêtes.
b) Un niveau de vie élevé correspond en général à un degré de bien-être accru
On remarque que dans un même pays les riches se disent plus heureux. L’argent
ferait le bonheur ?
Même entre pays, on remarque que les pays riches ont un niveau de bonheur plus
élevé.
La plupart des économistes reconnaissent qu’il existe un seuil au-delà duquel la
satisfaction marginale est nulle. Pour Richard Layard, 15.000 $ par an. Pour Angus
Deaton, 75.000 $ par an.
c) Mais la croissance ne rend pas toujours plus heureux
Easterlin : la satisfaction n’a pas augmenté aux USA, en EUR et au Japon entre
1974 et 1995, en dépit de la croissance (même si certains résultats sont infirmés
pour l’EUR).
 Pourquoi des pays arrivent mieux à transformer la croissance en bienêtre ?
Cohen pose la question du rôle du rythme de croissance dans le bien-être. « La
croissance donne à chacun l’espoir, même éphémère, de sortir de sa condition, de rattraper
les autres, de dépasses ses attentes. […] Mieux vaut vivre dans un pays pauvre qui s’enrichit
très vite »
Les faits stylisés en économie du bonheur :
- L’utilité marginale de l’argent diminue
- Effet d’adaptation : dans les pays développés, les habitants s’habituent
aux ↗NDV et en veulent plus
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Chapitre 1 – La Croissance Économique Moderne 29
- Aversion pour la perte : les individus sont beaucoup plus sensibles à une
baisse de NDV
- Effet de comparaison : Des études montrent que les individus priorisent
de gagner plus que les autres
- L’effet d’information (de signal, C. Senek) : Dans les pays de l’Est, on voit
dans les ↗NDV des opportunités de promotion sociale.
Mais dans les pays de l’Ouest l’effet de comparaison l’emporte.
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