Bulletin paroissial du camp d'Ohrdruf. Rédigé par des prêtres français Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France . Bulletin paroissial du camp d'Ohrdruf. Rédigé par des prêtres français. 1915-11-14. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF. Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : - La réutilisation non commerciale de ces contenus ou dans le cadre d’une publication académique ou scientifique est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source des contenus telle que précisée ci-après : « Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France » ou « Source gallica.bnf.fr / BnF ». - La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. 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Fêtes de la Semaine (Mois de^Novembre) i Aussi nombreux furent ceux qui se pressèrent vers notre modeste chapelle qui connut l'affluence des grandes fêtes. A la messe de 7 heures plus de 350 répondirent à l'appel du divin Jésus en s'approchant de la Sainte-Table ; le si beau et si pénétrant cantique — Mardi 16. — Saint Edme. dans Le voici l'Agneau si doux les Mercredi 17. — Saint Grégoire'le Thaumaturge. la communion et les suivit dans accompagna leurs méditations Jeudi 18. — Dédicace deslBasiliques de saints et leurs actions de grâces. Combien éloquente fut Pierre et Paul. cette manifestation de vive foi et quelles espérances Vendredi 19. — Sainte Elisabeth. .,,,, elle promit pour l'avenir. Samedi 20. — Saint Félix de Valois. Une seconde messe fut célébrée à 8 heures et Dimanche 21. — 26° après la Pentecôte. offrit à d'autres camarades le bonheur de recevoir la Sainte-Communion. LES FETESDE Lfl TOUSSANT Bien avant l'heure indiquée pour la grand'messe une animation inaccoutumée régnait aux abords de la chapelle ; de nombreux groupes, guidés par la même pensée, se pressaient..vers ;la tente ; une au Camp d'Ohrdruf joie secrète animait tous les coeurs ; une douce gaieté remplissait l'air et rayonnait de tous côtés. Les prisonniers, bien que éloignés de leur église, C'était la Fête, à laquelle tous étaient appelés. de leur ville ou village, n'ont pas failli à la tradiC'est pour se rendre à cette invitation que dès tion, à leurs sentiments, à leurs devoirs religieux 9 heures beaucoup pénétraient dans la chapelle, Dimanche 14. — 25° après laiPentecôte. Lundill5. Sainte Gertrude* Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf 2 — poussés par l'ardent désir de ne rien perdre de la touchante cérémonie. La nombreuse aîîluence ne put contenir dans la chapelle et plusieurs camarades ne perçurent les chants qu'à travers la tente. La clochette invita les fidèles à se recueillir et ce fut au milieu d'un solennel et imposant silence que le prêtre, M. l'abbé Richard, accompagné du diacre, M. l'abbé Salendres, et du sous-diacre, M. l'abbé Sapet, se plaça devant l'autel pour célébrer la messe solennelle. La Chorale entonna à pleine voix lé Kyrie. Le Gloria particulièrement bien interprété plongea l'assistance dans une heureuse satisfaction et lui procura une bien douce joie intime. A l'évangile, M. l'abbé Richard développa le mystère de la fête, et rappela le souvenir du Ciel, des Saints, nos intercesseurs près de Dieu. A la fin : de la cérémonie, la foule véritablement impressionnée, se retira lentement, accompagnée par les joyeuses notes d'une marche entraînante lancées d'une, main sûre par l'organiste, dont la réputation n'est plus à faire; Célébrées à 2 heures, les vêpres réunirent aussi une nombreuse affluence. La bénédiction du Très Saint-Sacrement, suivie des prières pour les défunts, nos familles et les soldats tombés au champ d'honneur, fit sur tous une grande impression. . Aux accents du Magnificat, on se retira pour former la procession d'usage eh pareille circonstance. En tête s'élevait la Croix, une modeste croix de bois, peinte en noir. De chaque côté de la route, le cortège fut formé par les différentes délégations des Compagnies, le Comité de Secours, la Chorale, les anciens du camp venus de Zella pour prendre part à nos fêtes, de nombreux soldats catholiques allemands, le R. P. Nicolaus, aumônier du camp, accompagné des prêtres français et des séminaristes. Pendant le parcours, notre Chorale chanta le Miserere à quatre voix et le De Profundis. Mais, tout le monde ne pouvant suivre ces chants — notre procession n'avait pas moins d'un kilomètre de longueur — soldats français et soldats allemands récitaient à haute voix le chapelet. Chacun, pénétré de la gravité du devoir qu'il allait remplir, se recueillait, et dépouillant tout respect humain, priait sincèrement, priait pour les vieux parents reposant au cimetière du village, pour les amis tombés. Arrivé au cimetière le cortège se rangea autour de la Croix, placée sur le tertre. M. l'abbé Lafforgue nous rappela le motif de cette visite à nos chers morts. C'est parce que la mort n'est pas le néant, mais le rendez-vous où nous retrouverons nos chers disparus, que cette démarche a été faite au nom des camarades du camp, des familles de ceux qui reposent dans le cimetière, éternellement exilés, i L'assistance fut profondément émue et bien des yeux se mouillèrent pendant cette impressionnante cérémonie. Les prières de l'absoute et plusieurs Pater et Ave furent ensuite récités pour les défunts, les soldats amis et ennemis tombés sur les champs de bataille. Les soldats allemands prièrent à leur tour ; la Chorale chanta le cantique Beau Ciel et, après une dernière invocation^ on se retira en ordre. Une palme et trois couronnes furent déposées sur les tombes. Le lendemain 2 Novembre nous célébrâmes la Commémorationdes Morts. Comme la veille, nombreuses communions à la messe de 7 heures. La messe de Requiem fut solennellement célébrée à 9 h. 30 par M. le R. P. Nicolaus, avec diacre et sous-diacre, et chantée par la Chorale sûrement dirigée par un chef qui, dans ces deux jours de fête, dut trouver la récompense méritée de ses efforts incessants. Par cette messe se termina la double solennité de la Toussaint et de la Commémoration des Morts qui laissera dans tous les coeurs un souvenir ineffaçable. L'Egliseet la Sociétéhumaine (Suite.) L'Eglise et les Ouvriers. est superflu de décrire le mal social qui, depuis plus de cinquante ans surtout, agite la classe ouvrière. Quel est celui qui ne connaît pas les revendications des travailleurs? Augmentation de salaire, diminution des heures de travail, repos hebdomadaire, interdiction du travail pour les enfants, réglementation du travail des femmes et des mères de famille; telles sont les principales et les plus urgentes. Les Gouvernements ne sont pas restés sourds à leurs réclamations; et nous pourrions étudier avec intérêt leurs diverses réponses; mais, outre que la tâche serait un peu lourde, nous voulons seulement nous borner à l'action de l'Église. Le Souverain Pontife Léon XIII a mis en pleine lumière la pensée de l'Eglise et l'a, pour ainsi dire, codifiée dans son encyclique Rerum Novarum. Déjà dans une lettre précédente il avait affirmé que la question sociale était "avant tout une question morale et religieuse ". il ajoutait même " qu'à moins de faire appel à la religion et à l'Eglise, il est impossible de lui trouver jamais une solution Il efficace. Dans l'Encyclique sur la condition des ouvriers, il détermina avec une grande netteté les droits et Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf les devoirs réciproques des ouvriers et des pa- trons; avec une connaissance parfaite de son siè; cle il fit des principes de la morale chrétienne la plus judicieuse application. Dès lors le chemin était largement ouvert à l'action ouvrière Catholique et Léon XIII, après l'avoir sanctionnée et stimulée, en bénit et encouragea les zélés propagateurs. Il poussa le clergé lui-même à entrer, avec beaucoup de précautions, dans ce champ d'activité. En France, le Comte de Mun traçait les grandes lignes du programme social des Catholiques,dans son célèbre discours à Saint-Etienne, le 14 décembre 1892. Il indiquait les deux formes principales qui devaient assurer au peuple ouvrier la jouissance de ses droits essentiels:, l'organisation professionnelle et la législation. La première, pour laquelle il demandait la liberté la plus large, permettra la représentation publique du travail dans les corps élus de la nation, là fixation du juste salaire dans chaque profession industrielle ou agricole, la garantie d'indemnité aux victimes d'accidents, de maladies ou de chômages, la création d'une caisse de retraite pour la vieillesse, l'établissement des conseils permanents d'arbitrage, l'organisation corporative de l'assistance contre la misère. La deuxième forme — la législation — protégera le foyer et la vie de famille parla restriction du travail des enfants et des femmes, l'interdiction du travail de nuit, la limitation de la journée de travail, l'obligation du repos dominical; dans les campagnes, en rendant insaisissable la maison et les champs du cultivateur, les instruments et le bétail de première nécessité. Elle facilitera la vie de l'ouvrier et du paysan par la diminution et la réforme des charges fiscales, particulièrement des impôts qui frappent la subsistance, Elle favorisera la participation aux bénéfices, la constitution des sociétés coopératives de production ; dans les campagnes, l'association du métayage. Tel fut et tel est encore le programme adopté par les grands chefs de nos oeuvres sociales Catho iques. Evêques, prêtres et laïques chrétiens se 'sont dbnnés la main pour créer, dans nos centres industriels et dans nos campagnes, ces cercles d'ouvriers, ces mutuelles, ces syndicats, ces coopératives, ces instituts populaires, ces caisses rurales, dont les bienfaits incontestés constituent le meilleur éloge. Les chefs Catholiques n'en ont pas le monopole; mais leur oeuvre est importante. C'est une mission toute nouvelle que s'est donnée l'Eglise. Sans parler de l'action privée, son oeuvre a donné naissance à une organisation puissante comprenant divers services, Commissions, Associations, Cours et Conférences. Et c'est aussi toute une bibliothèque qu'on pourrait former avec les nombreux ouvrages et publications de sociologie Catholique. Comme l'Eglise Catholique de France, celle d'Angleterre, d'Allemagne, d'Amérique, de Belgique, — 3 d'Italie ont fait de l'action sociale leur oeuvre de charité privilégiée; A côté des noms du Comte de Mun; de M. Kellefj il faut citer ceux de Manhingj Gibbons, Keteller, Mercier* Rodinij Tedeschi. Il faudrait aussi, après avoir nommé les grands organisateurs de l'action sociale Catholique, demander aux chefs immédiats de ces diverses associations ouvrières quelle a été par elles, l'influence bienfaitrice de la religion. Alors, nous serions, convaincus de l'intime connexion qui relie la question sociale à la. question religieuse. Mais notre Bulletin n?est pas une Revue, et nous oblige à résumer. Toutefois, quand la série de nos articles sur l'Eglise et la société humaine sera close, nous donnerons, comme supplément à nos courtes études, quelques pages autorisées sur les associations populaires Catholiques. L'^umônerie pilaire Deux années avant la guerre dans une grande revue française paraissait un article intéressant sous ce titre: " Revendication " et était signé d'un officier français. Il s'agissait du droit absolu qu'ont les soldats en temps de paix et surtout en temps de guerre d'avoir à leur service un aumônier. Comment donc? lorsque des jeunes gens sont partis pour l'armée afin de maintenir et soutenir... fut-ce au prix de leur sang... les droits de leur pays, on leur a donné pour soigner leurs corps malades ou blessés, des médecins et des infirmiers; c'était justice. Mais les soldats ont-ils seulement un corps périssable? N'ont-ils pas aussi à sauver, surtout à l'heure du danger et de la mort, une âme immortelle ? Ils ont donc également droit d'avoir, près d'eux, pour les assister, les réconforter, les aider, s'il le faut à mourir chrétiennement, des médecins spirituels, des prêtres, des aumôniers. Les ont-ils ? Oui. Comment est réglementée l'aumônerie militaire dans chacun des états belligérants, c'est ce qui nous intéresse ici. En France. Avant la guerre il n'y avait point chez nous d'aumôniers militaires officiels, nommés par le Ministre de la guerre d'accord avec l'autorité religieuse, et rétribués par l'Etat. En 1912 cependant une aumônerie militaire coloniale avait été créée en vue d'assurer aux soldats catholiques qui exposaient leurs vies aux colonies le secours de la religion. C'est donc en dehors de l'Etat qu'existait depuis plusieurs années, une aumônerie de garnison, - 4 ftullctln Paroissial du Camp d'Ohrdruf fondée par un comité catholique sur la demande des évêques. Beaucoup ont connu la " Maison du soldat " ; dans les garnisons, et destinée à offrir aux militaires, pendant les heures inoccupées des soirées et des dimanches, aux lieu et place des cabarets où ils sont tentés d'abriter leur oisiveté, un abri où ils trouveraient d'honnêtes distractions. La Ligue patriotique des Françaises encourageât cette oeuvre, et demanda à l'Etat la nomination officielle d'aumôniers. Des listes de prêtres volontaires et exempts du service militaire, furent dressées par les évêques. Au commencement de 1914, pour le temps de guerre seulement, les aumôniers divisionnaires furent nommés par l'Etat. Donc au commencement de la guerre le corps d'armée possédait deux aumôniers ce qui était naturellement bien insuffisant. niers militaires volontaires compte plus de 300 prêtres. Pour la marine l'aumônerie avait été créée par le décret du 7 août 1914. François Veuillot obtint que ce même décret fut appliqué aux armées de terre. Actuellement le nombre des aumôniers désignés par l'Etat, ayant grade de capitaine, est assez élevé. Nous apprenons que le frère du R. P. Richard vient d'être nommé officiellement aumônier d'une Le Cardinal Amette, archevêque de Paris, délibérait sur ce point avec le Comte Albert de Mun, et déplorait cet état de chose. Celui-ci consentit aussitôt au plan de former un corps d'aumôniers, en dehors même des unités militaires et avec l'ardeur de sa grand'âme il travailla à la réalisation de cette idée. Pour cela il n'hésita pas à aller jusqu'au Ministère de la guerre où il obtint gain En Angleterre. de cause. A sa mort François Veuillot exécutait l'idée du Comte de Mun. Aujourd'hui le corps des aumô- nouvelle formation. Mais avant même cette nouvelle organisation, par suite de l'appel des ecclésiastiques sous les drapeaux, chaque unité en France, presque chaque compagnie possédaient un prêtre qui à l'occasion pouvait exercer son ministère auprès de ces camarades. L'aumônerie militaire ou " The army chapelains", a été de tout temps organisée, pour les protestants et les catholiques, et possède une véritable hiérarchie. A la mobilisation un chapelain général, membre de l'état-major général, indépendamment de l'autorité épiscopale a réglementé le service religieux dans l'armée. Pour les catholiques l'aumônier général a sous ses ordres 30 aumôniers de première classe ayant Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf le rang de colonel, 13 de deuxième classe avec le rang de lieutenant-colonel, 6 de troisième classe avec le rang de major, 68 de quatrième classe avec le rang de capitaine. Donc l'aumônerie catholique anglaise comprend 118 prêtres, nommés aumôniers par l'Etat d'accord avec l'autorité religieuse' —. 5 Sainte-Communion ; elle fut également distribuée après la inesse à ceux que la maladie retenail encore au lit (1). Que le Bon Dieu rende la santé à nos chers malades, à nos braves blessés. et chapelets furent donnés aux malades offrirent qui en retour le produit d'une quête (13 marks 32) qui seront versé au Comité de Secours. (1) Des livres En Russie. On n'a pas d'aumônerie catholique officiellement reconnue. Dans les hôpitaux est tolérée la présence d'un prêtre catholique. En Italie. Le journal Italien " Eco di Bergamo " nous donne quelques renseignements au sujet de l'au- mônerie durant le temps de guerre. Depuis quelques années les aumôniers dans les régiments d'infanterie et cavalerie avaient été supprimés, seuls étaient encore reconnus 60 aumôniers dans les hôpitaux. Pendant la guerre italoturque et surtout pendant les opérations militaires en Tripolitaine ce nombre de 60 aumôniers d'hôpitaux appelés au service de l'armée en campagne fut très insuffisant. Un corps d'aumônerie officiellement reconnu fut donc formé; en dehors des hôpitaux par corps d'armée furent nommés 8 aumôniers. Ils eurent tous le rang de capitaine. A la déclaration de guerre à l'Autriche le Souverain-Pontife désigna un évêque, aumônier-général, qui officiellement devint membre de l'Etat-major général. (A Suivre). Les Fêles Je la Toussaint ta les Hôpitaux Ainsi que nous l'avions annoncé, nos malades et nos blessés ont eu leur fête de la Toussaint. Le jour de la solennité il nous fut impossible d'aller dans les hôpitaux, mais nos malades s'unirent à nos prières, et pendant la belle procession au cimetière leur pensée était avec nous. Pendant la semaine qui a suivi la Toussaint, nous nous sommes donnés tout entiers à nos blessés. Dans chaque hôpital, dans quatre salles, une messe a été dite à laquelle tous les malades ont assisté. Les infirmiers avaient bien voulu préparer l'autel ; un prêtre français disait la messe pendant que M. l'Aumônier lisait les prières à haute voix, et qu'on chantait des cantiques. Dans chacune des salles quelques-uns de nos camarades ont reçu la HORAIRE DE NOS OFFICES Dimanche : Messe de communion à 7 heures. Messe solennelle à 9 h. 30. Pendant la semaine, la messe est dite à 7 h. 30. En raison des travaux pour la construction de notre nouvelle chapelle, tous les matins la messe sera dite au camp B, baraque M B IX. Le dimanche seulement nos offices auront lieu comme à l'ordinaire dans la tente. A L'INSTAR Les poilus parisiens ont gardé le cher souvenir de leur ville. Sur le front, à l'extrême Nord, un commandant fait les honneurs de son home, abri de quelques pieds carrés protégé par des sacs de terre. — Je suis installé comme à Paris, dit-il. Nos soldats sont fiers des boyaux de communication qu'ils ont creusé : on y circule comme dans l'avenue de l'Opéra. Une route s'étend derrière nos premières lignes, très près de l'ennemi; elle est spacieuse et protégée contre les balles par le talus d'un canal ; on peut s'y promener à l'aise dans les moments de trêve où l'artillerie l'épargne; on y a apporté des tables, des chaises, enlevées aux ruines des maisons voisines ; cela s'appelle " Le Boulevard des Italiens ". Même, un soldat a trouvé plaisant d'y installer quelques chevaux de bois, débris d'un manège, " comme à Neuilly ". Tout près de là, dans la grande rue du village, on a percé les cloisons mitoyennes des maisons; on passe ainsi de l'une à l'autre sous une série d'arcades : " c'est le Palais-Royal ". Mais, il arrive qu'un projectile détruise l'arcade et défonce les fondations: pour les poilus ce sont " les trous de Paris". CARNET NÉCROLOGIQUE Jean Chappus, à pied, né le 20 Avril 1890 à Pulvières (Puy-de-Dôme), décédé 14'' chasseurs le 31 Octobre 1915. R. I. P. Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf — 6 PENSEES " ...Et marchant à la mort, il meurt à chaque pas 11 11 ; meurt dans ses amis, dans son îils, dans son père, meurt dans ce qu'il pleure et dans ce qu'il espère... " Pauvre mère, ne pleurez pas ! A qui perd tout, Dieu reste encore, Dieu là-haut, l'espoir ici-bao. " — (A. de M.) La mort d'une mère est le premier chagrin qu'on pleure sans elle. SAINTE-ELISABETH (1231) , Le- 19 de ce mois, l'Eglise célèbre la fête de Sainte-Elisabeth, patronne de notre paroisse du Camp d'Ohrdruf. Fille du roi André de Hongrie, elle fut transportée à l'âge de 4 ans au château de Wartburg,. près Eisenach, que plusieurs d'entre nous ont aperçu en venant à Ohrdruf.Selon l'usage de ce temps, elle fut, la même année, fiancée par ses parents au. prince Louis, landgrave de Hesse et de Thuringe. Ils furent élevés ensemble dans la crainte et l'amour de Dieu. Après son mariage, Elisabeth se consacra entièrement à ses devoirs d'épouse et de princesse. Elle s'employait surtout aux oeuvres de miséricorde, secourant les veuves, les orphelins, les malades, les indigents. Pendant une grande famine elle distribua libéralement tous les produits de ces domaines. Elle donnait l'hospitalité aux lépreux, et allait même, par pénitence, jusqu'à baiser leurs mains et leurs pieds. Elle fonda un magnifique hôpital pour les pauvres. Après la mort de son mari, voulant servir Dieu plus librement, elle déposa ses parures et ses bijoux pour revêtir la tunique grossière de l'ordre de la Pénitence Franciscaine et fut la première soeur en Allemagne. Dépouillée de ses biens, chassée de sa propre maison, abandonnée de tout le monde, elle supporta avec un invincible courage les affronts et les calomnies. Elle rendait aux pauvres les services les plus humiliants et se contentait pour sa propre nourriture d'herbes et de légumes. Toute sa vie se passa dans l'exerciee de ces oeuvres de charité. Enfin elle annonça à ceux qui l'entouraient que sa dernière heure approchait; puis, munie des Sacrements, elle mourut les yeux levés au ciel, dans la contemplation des choses célestes. De nombreux miracles s'étant accomplis sur son tombeau, le pape Grégoire IX l'inscrivit au nombre des saints. Elle est pour nous un excellent exemple de la souffrance chrétienne vaillamment supportée. Dans l'amertume de la captivité qui nous sépare de tous ceux qui nous sont chers, de nos camarades, frères et amis tombés sur le champ de bataille, ne désespérons pasl Courage! Répétons avec les Saints : " Deus dédit. Deus abstulit!... Dieu nous les avait donnés, il nous les a retirés, que son nom soit loué „. Les souffrances de ce monde ne sont rien à côté de la gloire que nous aurons plus tard: Per crucem adlucem! KETTELER (Suite), Evêque de Mayence. Revenu à Hopsten, Ketteîer y resta quelques mois. Bientôt, il était nommé à l'importante paroisse de Sainte-Edwige, à Berlin. Il y partit à regret, ce qui ne l'empêcha pas de déployer dans ce milieu nouveau et difficile une activité qui le mit encore plus en vue. Il y demeura peu. L'évêque de Mayence étant mort, le nom de Ketteîer fut mis en avant pour ce siège. On n'avait pas oublié ses célèbres sermons sociaux. En vain essaya-Ml de décliner cette lourde charge ; Pie IX, qui avait écrit au cardinal de Reisach : " Dans la personne de Ketteîer, je voudrais donner aux Mayençais. un évêque selon le coeur de Dieu ", l'obligea d'accepter l'épiscopat. Ketteîer se mit aussitôt résolument à l'oeuvre, et ce diocèse de Mayence, " si malade ", suivant le mot d'un prêtre, revint bientôt à une vie nouvelle. Les premières paroles de l'évêque furent pour ceux qui peinent et qui souffrent ; il se donne tout à eux. Il visite d'abord les hôpitaux, les prisons, puis il se met à parcourir son diocèse. Il rend au moindre village une visite pastorale. Et ce n'était point un rapide passage. Il prêchait, entrait dans les écoles, allait au chevet des malades, organisait des processions au cimetière. " Vos morts sont mes morts ", disait-il aux paysans ; et sur la terre encore humide qui recouvrait ces morts, devenus sa propre famille, Ketteîer parlait encore. Lorsqu'une mission se donnait dans quelque bourgade, un confesseur survenait pour aider les missionnaires; de cinq heures du matin à neuf heures du soir, il moissonnait et brûlait l'ivraie des péchés : et ce confesseur n'était autre que l'évêque Ketteîer. Le clergé attire spécialement sa sollicitude. Il institue un grand séminaire modèle à Mayence, organise des retraites pour ses prêtres, établit des examens, des concours. Ce travail d'organisation n'empêche pas Ketteîer de se prêter à des négociations avec le gouvernement de Hesse. Il obtint de précieuses libertés (A suivre.) pour l'Eglise. Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf fuvrier Feuilleton du Bulletin Paroissial Confessions d'un Jiî 17 par Emile SOUYESTRE Le maître maçon retenu depuis plusieurs mois en Bourgogne, était revenu pour affaires à Paris, d'où il repartait le soir même. Il me fit entrer chez le marchand de vin, et, quoique je pusse dire, il fallut redéjeuner avec lui. La prospérité avait engraissé Mauricet, qui était vêtu d'une superbe veste d'Elboeuf à petits pans, d'un castor à longs poils et d'une cravate de soie cerise. Le coeur était toujours le même, mais le ton avait haussé d'un cran : Mauricet ne doutait plus de rien depuis qu'il se trouvait à la tête de cinquante ouvriers. Je l'avais toujours vu si raisonnable que son aplomb me païut seulement la conscience de sa prospérité. Dès son arrivée à Paris, il avait vaguement appris ma débâcle, et voulut tout savoir. Quand je l'eus mis au fait, il frappa la table avec la bouteille de Bordeaux cacheté qu'il avait fait venir malgré mes objections. Mille tonnerres1 pourquoi ne m'as-tu pas écrit la chose? s'écria-t-il ; je t'aurais trouvé assez de pièces de six livres pour faire marcher ton affaire. Que fais-tu, maintenant? Voyons, où en es-tu? Ne peut-on pas mettre un peu de chaux dans ton mortier? Je lui fis connaître ma position, en disant un mot de l'affaire qui se présentait. Et tu n'aurais besoin que de 500 francs? demanda Mauricet. Je lui répondis que cette somme me suffirait et au-delà. Il appela aussitôt; un garçon entra. Une plume et de l'encre ! cria le maître maçon. Je regardai avec surprise. Tu ne comprends pas ce que je veux faire de ces drogues-là, pas vrai ? me dit-il en riant ; au fait, je ne suis guère plus partisan du blanc et du noir que par le passé; mais il faut bien braire pour les baudets. Quand j'ai vu qu'on ne pouvait brasser les affaires qu'avec les bouts d'aile et l'écritoire, ma foi ! j'ai dit: En avant l'arrière-garde! et aujourd'hui j'en use tout comme un autre. Vous avez appris à écrire! m'écriai-je. Tu vas. voirl dit Mauricet en clignant de l'oeil. Il avait retire d'un portefeuille un papier timbré sur lequel il me fit rédiger une obligation de 500 francs. Quand j'eus achevé, il signa son nom en lettres inégales et imitant l'impression. — 7 — Maintenant, me dit-il, quand la pénible opération fut achevée, présente-moi ça chez Périgeux, et tu aura ton argent d'aplomb; le seing du père Mauricet est connu dans leur boutique, et je peux battre monnaie à discrétion. — On me remit, en effet, les fonds sans aucune difficulté, et, dès le lendemain, j'avais l'entreprise à laquelle ils étaient destinés. Tout marcha d'abord à souhait. Les travaux furent vivement conduits et achevés avant le terme. J'avais pu, sur les premiers paiements, rendre à Mauricet son argent ; de nouveaux marchés me ramenèrent dans le îlot et je commençais à me sentir remonter, quand un procès intenté à notre principal entrepreneur vint tout arrêter. Mon sort et celui de dix autres était forcément lié au sien; nous nous trouvions les mains prises, sans aucun moyen d'agir ni de nous retirer. Pendant ce temps, les obligations particulières de chacun restaient entières ; l'époque du paiement arrivait pour les marchandises non employées ; les soldes d'arriérés se succédaient impitoyablement : il fallait faire face à toutes les attaques, l'arme au bras, comme on dit ; trouver chaque jour quelque nouvel expédient ; obtenir des termes, effectuer des reports, compenser des dettes et des créances! Mes journées entières étaient employées à ce stérile travail. Je ne gagnais rien, et mes ressources s'épuisaient de plus en plus: tandis que j'employais mon temps à me sauver de la faillite, Geneviève et l'enfant manquaient du nécessaire. Je me mangeais la cervelle sans pouvoir faire avancer les choses. Le procès était toujours près d'être jugé, et reculait sans cesse. Un jour, quelque pièce avait été oubliée ; un autre jour l'avocat se trouvait absent; le tribunal prenait des vacances, ou l'adversaire avait demandé une remise ! Pendant ce temps, les semaines et les mois s'écoulaient. Notre pauvre ménage ressemblait à ces équipages pris par un calme plat au milieu de la mer, qui réduisent chaque jour la ration et regardent en vain à l'horizon si les nuages leur annoncent le retour du vent. J'ai eu de rudes épreuves dans ma vie, mais aucune qui soit comparable à celle-ci. D'ordinaire, les malheurs qui nous frappent laissent place à l'action ; on peut chercher le soulagement ou le salut; mais ici tous nos efforts étaient inutiles ; il n'y avait qu'à se croiser les bras et à attendre. A la longue, cette agitation clans l'impuissance me rendit sombre et hargneux. Ne sachant plus qui accuser, je m'en prenais à Geneviève; je ne tenai point compte à la pauvre créature de ses efforts pour me déguiser notre misère, de son travail pour l'amoindrir, on eût dit que je lui en voulais des privations qu'elle supportait. Au fond, mon irritation était encore de l'amitié : elle venait de mon chagrin de la voir souffrir. J'aurais donné mon sang goutte à goutte pour lui acheter de l'aisance et du repos d'esprit ; mais ma bonne — 8 — Bulletin Paroissial du Camp d'Ohrdruf volonté était de mauvaise humeur faute d'avoir réussi : c'était comme une haie d'épines à laquelle je la déchirais, par dépit de n'avoir pu ert. faire une enveloppe pour la défendre.: Un jour surtout ' je rentrai plus aigri, j'avais passé trois heures chez l'avoué qui causait avec des amis et que j'entendais rire, tandis que je me rongeais lé coeur. Il avait fallu attendre la fin de leurs histoires plaisantes ;. puis, quand mon tour était venu, j'avais trouvé ' un homme qui m'avait écouté en baillant, qui ne savait rien de mon affaire, et m'avait renvoyé à son premier clerc alors absenteJe revenais donc gonflé de rancune contre les gens dé justice, qui emmagasinent dans leurs cartons notre fortune, notre repos, notre honneur, et qui, le plus souvent, ne savent pas même ce qu'on leur a- donné à garder. Pour m'àchever, j'avais vu refuser le paiement de mon dernier billet! — - : .'<[} ' ' :Comme .si tout. devait irriter, ma tristesse,,je trouvai à Geneviève un air de fête. Elle rangeait en chantant, et ' me reçut. par, une exclamation joyeuse. .Je-lui-demandai brusquement ce qu'il était arrivé d'heureux depuis mon départ, si nous avions reçu une '.succession d'Amérique. Elle répondit en plaisantant, me prit par le cou, et me conduisit en ' face de l'almanach suspendu contre la cheminée, Eh bien? lui demandais-je. " Eh bien ! vous ne voyez point la date, monsieur! dit-elle gaiement : c'est aujourd'hui le 25. Oui, répliquài-je en me dégageant avec humeur ; et bientôt ce sera le 30, jour d'échéance. Que l'enfer confonde les billets et les almanachs! Elle eut un air de douloureux étonnement. Qu'y a-t-il donc encore, Pierre Henry ? repritelle inquiète; avez-vous appris quelque mauvaise nouvelle? Je n'ai rien appris, comme d'habitude. Alors, reprit-elle en passant un bras sur le mien, remettons les inquiétudes à demain, et gardons ce jour-ci pour être heureux. Je la'regardai de manière à lui prouver que je ne comprenai pas. Allons.' vilain homme ! dit-elle d'un ton de bou. derie amicale, ne savez-vous donc plus que c'est l'anniversaire de notre mariage? Je l'avais effectivement oublié. .Les années précédentes, cet anniversaire était pour moi une occasion de réjouissance et d'attendrissement; mais cette fois il en fut tout autrement. Le souvenir du bonheur passé me rendirent les souffrances présentes plus amères. La comparaison que j'en fis, . dans ma pensée, excita chez moi une sorte de désespoir, et je me laissai tomber sur une chaise avec de sourdes malédictions. Geneviève, effrayée, voulut savoir ce que j'avais. Fur die Redaktionverantwortlich : Ce que j'ai ! m'écriai-je ; Dieu me pardonne ! on dirait que vous n'en avez jamais entendu parler! Ce que j'ai ! eh bien, parbleu ! j'ai des- dettes que je ne puis pas payer, et des créances qui ne rentrent pas ; j'ai un procès qui me ruine en attendant que je le gagne; j'ai trois bouches à nourrir tous les jours, sans autre ressource que deux bras qui ne peuvent travailler... Ah ! ce que j'ai, demandez-vous? J'ai le regret de ne pas m'être cassé les reins le jour où je suis tombé d'un troisième, parce qu'alors je n'étais qu'un ouvrier sans obligation et sans famille, et qu'une bière de quatre francs eût réglé mes comptes! Tout cela était dit avec un emportement qui fit trembler la chère femme; elle me regarda^ et les larmes lui vinrent dans les yeux. Au nom de Dieu ! ne parlez pas ainsi, Pierre Henri, me dit-elle ; ne me dites jamais que vous regrettez de vivre, à moins que vous ne vouliez aussi me faire mourir. Vous avez été tourmenté tout le jour, pauvre homme, et vous me -revenez outré; mais oubliez pour aujourd'hui: les affaires, et ne pensez qu'à ceux qui vous aiment. . (SI suivre.) Arrivée de Blessés Susses aux hôpitaux Le lundi 8 Novembre ont été transportés dans nos hôpitaux 300 blessés Russes. Ils viennent du front ; ils sont restés quelque temps dans les hôpitaux de campagne où ils reçurent les premiers soins. Nous demandons à nos lecteurs une prière pour ces braves, et faisons des voeux pour leur prompte guérison. Office pour les Polonais Désormais, tous les dimanches, à 3 heures, à l'issue des Vêpres, aura lieu un service religieux pour les Polonais. Après la récitation du chapelet par l'un d'eux, on donnera la bénédiction du Très Saint-Sacrement. Il est permis d'envoyer le Bulletin Paroissial en France et en Belgique. POUR NOS DISPARUS Les soldats originaires des départements du Cher et de l'Indre sont priés de donner leur nom au sergent Arcadias, 6° compagnie, baraque M 49. Militarpfarrer J. Nicolaus, zu Ohrdruf. — Druck von H. Lucas. Ohrdruf.