Vibrations des structures industrielles par Jean-François BOISSEAU Docteur-Ingénieur Ancien Chef de Groupe de Recherches à l’Office National d’Études et de Recherches Aérospatiales (ONERA) Expert près la Cour d’Appel de Paris et Bernard GARNIER Ingénieur civil de l’École Nationale des Ponts et Chaussées Directeur Commercial à la société METRAVIB RDS 1. 1.1 1.2 Généralités................................................................................................. Secteurs concernés ..................................................................................... Rôles et conséquences des vibrations structurales.................................. 1.2.1 Définitions ........................................................................................... 1.2.2 Normes sur les vibrations et les chocs ............................................. 1.2.3 Effets négatifs des vibrations ............................................................ 1.2.4 Aspects positifs des vibrations structurales..................................... 2. 2.1 Les outils de l’ingénieur et leur mise en œuvre .............................. Représentation des phénomènes vibratoires ........................................... 2.1.1 Impédance dynamique et fonctions de transfert ............................. 2.1.2 Schématisations masses-ressorts..................................................... 2.1.3 Calculs en éléments finis ................................................................... 2.1.4 Maquettages et lois de similitude ..................................................... 2.1.5 Méthodes énergétiques ..................................................................... 2.1.6 Rayonnement acoustique des structures ......................................... Approche expérimentale............................................................................. 2.2.1 Accès aux vibrations des structures ................................................. 2.2.2 Essais structuraux sous excitation artificielle .................................. 2.2.3 Post-traitement et obtention des résultats ....................................... 2.2 3. 3.5 La maîtrise des vibrations et des bruits induits. Exemples de cas industriels.................................................................. Actions correctives ...................................................................................... Diffusion des techniques d’analyse ........................................................... Première étude de cas : suppression des vibrations indésirables lors de la mise au point d’une machine de série ...................................... Deuxième étude de cas : remède à la dégradation structurale causée par les vibrations d’une installation industrielle .......................... Troisième étude de cas : amélioration d’un découplage antivibratile .... 4. Conclusion ................................................................................................. 3.1 3.2 3.3 R 3 140 7 - 1991 3.4 Pour en savoir plus........................................................................................... R 3 140 - 3 — 3 — 3 — 3 — 4 — 4 — 5 — — — — — — — — — — — — 5 6 6 9 10 12 13 14 16 17 20 25 — — — 33 33 36 — 36 — — 37 39 — 40 Doc. R 3 140 outes les structures et installations industrielles sont sujettes à des vibrations, qu’il s’agisse de celles qu’elles génèrent ou de celles qu’elles subissent de la part de leur environnement. T Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 1 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ ■ Le paragraphe 1 présente, outre une description qualitative des principaux phénomènes vibratoires, un panorama des normes concernant les vibrations et les chocs. ■ Le paragraphe 2 expose un certain nombre de représentations des phénomènes vibratoires (§ 2.1), aidant à interpréter les observations, souvent fort complexes, de l’état vibratoire d’une structure industrielle, à prédire le cas échéant l’effet de modifications, et à guider ainsi le concepteur, l’installateur et l’exploitant. Il présente ensuite (§ 2.2) les moyens de mesure et d’essai offerts par le marché, et quelques critères de choix. ■ Le paragraphe 3 présente des stratégies de maîtrise des vibrations et du bruit induit, à différentes étapes du développement et de la vie d’une installation ou d’un produit industriel. Cinq qualités, techniques et humaines, sont menacées par les vibrations des structures ; ce sont : — la régularité du produit ou du service rendu ; — la sûreté ou au moins la sécurité de fonctionnement ; — la tranquillité de marche ; — la durée de vie de la structure et de ses composants ; — l’endurance au poste de travail. Ces qualités, qui doivent pouvoir être quantifiées, sont à prendre en compte dès le projet, lors de la mise au point et durant l’exploitation de la structure, jusqu’à sa révision ou sa mise en réforme. Du bilan complet de fonctionnement d’une structure, il est possible d’estimer la part technique et le coût correspondant imputable aux effets vibratoires indésirables. Des exemples d’intervention des vibrations sont présentés au paragraphe 3. Ils pourraient être beaucoup plus nombreux, car les vibrations sont omniprésentes. En effet, toute fluctuation de charge, de débit, de vitesse, toute irrégularité de mouvement des pièces d’une installation, constituent une source d’excitation vibratoire des structures avoisinantes, d’autant plus riche et intense que cette fluctuation est rapide. En termes de traitement du signal, le spectre vibratoire (f ) correspond à la transformée de Fourier de la fluctuation temporelle F(t) relative au système : 1 2π F ( t ) → (f ) = ----------- ∞ –∞ F ( t ) exp ( – 2 i π f t ) d t La transformée de Fourier d’une impulsion infiniment brève (Dirac) contient en égale proportion toutes les fréquences f du spectre : des chocs brefs peuvent donc exciter toutes les fréquences propres d’une structure. Les réponses structurales, utiles à connaître, dépendent de la situation des fréquences dans ce spectre, mais : — d’une part, les paramètres descriptifs d’une structure ne sont pas toujours faciles à dénombrer : évalués par excès, ils font état de modes physiquement inexistants ; évalués par défaut, ils omettent l’existence de modes moins manifestes relatifs à des paramètres cachés ; — d’autre part, le modèle représentatif, unique avec une structure linéaire, reste à déterminer, cas par cas, dans le cas de non-linéarités, faibles ou fortes, mais souvent présentes. De telles difficultés rencontrées en pratique sont rappelées au paragraphe 3, ainsi que les solutions mises en œuvre. R 3 140 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES 1. Généralités 1.1 Secteurs concernés Les techniques vibratoires ont été appliquées aux sciences mécaniques, au génie civil, aux transports, etc. Il existe donc une diversité de situations visant à contrôler les vibrations, éventuellement à les générer, le plus souvent à les isoler, ou mieux encore à les réduire à la source, en vue d’atténuer ces vibrations ainsi que les bruits qu’elles génèrent. Le tableau 1 donne divers exemples de vibrations soit indésirables, soit, au contraire, utilisées pour obtenir une réponse ou procéder à une analyse. 1.2 Rôles et conséquences des vibrations structurales 1.2.1 Définitions 1.2.1.1 Vibrations structurales On conviendra d’appeler ici vibrations structurales toutes les déformations élastiques de structure quelconques dont la moyenne dans le temps est nulle, par opposition aux déformations permanentes (ou statiques). Elles sont le résultat d’efforts eux-mêmes fluctuants, qui s’exercent sur la structure tantôt en son sein (par exemple, efforts imposés à une machine tournante par un rotor mal équilibré, ou efforts dus à la combustion des gaz d’un moteur thermique), tantôt sur ses frontières ou conditions aux limites (rafales de vent sur un immeuble, vibrations transmises par le sol à un équipement, par les points d’accrochage du moteur à un véhicule automobile, etc.). 1.2.1.2 Amplitudes et fréquence À un instant donné, si l’on admet que les phénomènes en jeu restent linéaires, les vibrations de la structure sont proportionnelles aux efforts qui les génèrent : si, toutes choses égales par ailleurs, l’intensité de ces efforts double, la vibration double aussi, qu’on la représente en termes de déplacement vibratoire (ou de vitesse, ou d’accélération) ou de contrainte dynamique dans le matériau constitutif. Par contre, l’amplitude de la vibration dépend considérablement de la forme de l’effort excitateur en fonction du temps, ou, si l’on préfère raisonner dans l’espace dual auquel on a accès par la transformée de Fourier du signal temporel, en fonction du contenu fréquentiel de l’effort excitateur. On serait tenté de dire que la susceptibilité de la structure aux vibrations est une fonction extrêmement variable relativement à la fréquence de l’effort appliqué : telle structure pourra être pratiquement insensible à un effort important qu’on lui applique en tel point au rythme de 100 Hz, et prendre des mouvements cinquante à deux cents fois plus grands si le rythme (c’est-à-dire la fréquence de cet effort) augmente ou diminue de quelques pour-cent (figure 1). (0) Tableau 1 – Exemples de domaines d’intervention des vibrations Secteurs ou thèmes Aéroélasticité Amortissement Analyse vibratoire Appropriation Biomécanique Cavitation Centrales thermiques et nucléaires Contrôles Couplages Émission acoustique Énergétique Excitation Équilibrage Fatigue Géomatériaux Hydraulique Identification Instabilités Non-linéarités Prévention Roulements Séismologie Spatial Surveillance Thermovibrographie Transitoires Transports Turbulence Viscoélasticité Sujets Flottements : aubages de turboalternateurs ; avions Lanceur spatial ; automobile ; laser de puissance Analyse modale ; ralentissement de machines tournantes ; SEA Interprétation de fonctions de transfert à pas de fréquence variables Malaises dus aux très basses fréquences ; modélisation de la pompe cardiaque Turbomachines, hélices, génération d’ultrasons Réfrigérants atmosphériques ; effets éoliens Bornes d’alternateurs contrôlés par vélocimétrie laser Structures coques vibrant dans l’eau ; matériaux poreux Fissuration de voûtes ; détection de fuites ; contrôles continus Écoulements de fluides caloporteurs ; modèles semi-empiriques Barrage ; lâcher par fil coupé Grands balourds accidentels ; rotor de turbopompe spatiale « Écoute » de matériaux ; suivi de l’état de fatigue ; matériaux composites Prospective de calculs d’ouvrages sous sollicitations extrêmes Butée hydrostatique, rigidité et amortissement en fréquence Recherche des paramètres structuraux, méthodes proposées Suppression par contrôle actif sur avions Structures présentant des jeux et des limiteurs Mesures vibratoires des turboalternateurs, des pompes Localisation des défauts par résonances en haute fréquence Reproduction « fine » de séismes ; comportement de ponts roulants Effet Pogo sur lanceurs ; qualification de satellites Surveillance vibratoire des aubages à risques ; acoustique des calages d’alternateurs Éprouvettes pratiquement « adiabatiques » sous contraintes vibratoires Démarrages et arrêts de pompes ; commande en régime transitoire Bruits de contacts de pneumatiques ; bruits d’écoulements d’aéronef Flammes : dynamique des fronts de réactions laminaires et turbulentes Propriétés de matériaux en vibration (en fréquence et température) Référence [1] [2] [5] [3] [6] [7] [4] Ce tableau est une sélection, par secteurs et par sujets, de quelques faits figurant au rang des préoccupations actuelles. Certains d’entre eux seront repris ou complétés par d’autres dans le cours du texte. Les références sur les sujets cités renvoient à des revues et des colloques, récents, ce qui n’exclut pas la consultation d’ouvrages généraux, tels que ceux rappelés dans la fiche documentaire [Doc. R 3 140]. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 3 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 1 – Cylindre de compresseur. Transfert /F 1.2.1.3 Modes propres Il est très utile de caractériser cette « susceptibilité aux vibrations » d’une structure donnée, qui est donc une propriété intrinsèque de la structure, dépendant de la fréquence et de l’espace (au sens des coordonnées des points d’observation que l’on souhaite définir sur cette structure). Cette susceptibilité se caractérise par un certain nombre de comportements extrêmes à des fréquences particulières, que l’on nomme modes propres, et peut se réduire à une somme de fractions rationnelles dont les modes sont autant de pôles (§ 2.2.3.3). Cette propriété est commode, puisque l’on dispose ainsi d’un moyen d’exprimer, dans le domaine linéaire, la susceptibilité aux vibrations d’une structure quelconque à partir d’un nombre minimal de paramètres qui sont : — les fréquences propres, c’est-à-dire les fréquences de chacun de ces pôles où la structure est susceptible de prendre des oscillations d’amplitude extrémale ; — l’amortissement modal, qui contrôle l’amplification vibratoire correspondante ; — les modes propres, c’est-à-dire les déformations particulières ou déformées modales de ces oscillations de forte amplitude associées à chaque fréquence propre. L’identification modale est la procédure qui permet d’extraire ces caractéristiques à partir de mesures des vibrations de la structure. On reviendra sur ces caractéristiques fondamentales (§ 2.2.3.3). Il importe de retenir à présent le double aspect fréquentiel et spatial de ces singularités qui signent l’excitabilité dynamique de toute structure. Bien sûr, les vibrations que l’on observe à un instant donné et pour un point donné sont le produit (mathématiquement, on dira plutôt la convolution) de l’effort excitateur et de la susceptibilité aux vibrations de la structure pour ce point d’excitation ; on dira qu’un mode propre entre en résonance si l’effort excitateur présente des composantes à la fréquence propre du mode ; les mouvements (et contraintes mécaniques) prennent alors des valeurs considérables, que seul l’amortissement vient limiter, en se conformant à l’allure géométrique du mode propre. Nota : pour schématiser, on parlera souvent ci-après d’installations excitées par des machines, qui donnent un caractère plus concret à ces notions de structures et d’efforts dynamiques excitateurs. Que le lecteur n’y voie pas une limite à la généralité des raisonnements et mécanismes physiques qui seront présentés ! 1.2.2 Normes sur les vibrations et les chocs Les normes françaises (AFNOR et UTE – Union technique de l’électricité) de ce recueil sont en correspondance ou non avec les normes de l’ISO (Organisation internationale de normalisation) et de la CEI (Commission électrotechnique internationale). Le degré de conformité, qui est précisé, est : identique, équivalent ou non équivalent entre les normes françaises et internationales sur les mêmes sujets. Le Comité technique 108 de l’ISO (ISO TC/108) traite : — la classification des conditions d’environnement vibratoire ; — l’équilibrage (y compris les machines à équilibrer) ; — la mesure et l’évaluation des vibrations et chocs mécaniques intéressant les machines, les véhicules et les structures ; — l’utilisation des matériaux pour les structures vibrantes ; — la mobilité mécanique ; — les machines d’essais au choc ; — les méthodes de mesurage et de présentation des résultats des vibrations et de la résistance aux chocs des appareils sensibles aux mouvements. En outre, le CEN (Comité européen de normalisation) a lancé en 1988 la création d’un environnement technique sur la sécurité des machines qui prévoit l’existence de normes – référencées B1 – portant sur les aspects des vibrations et du bruit intéressant la conception et l’utilisation d’un grand nombre de machines. Nota : enfin, bien que ne se rapportant pas à une activité industrielle, il peut être utile de citer la norme interarmées (guerre, air, marine) GAM-EG13 du ministère de la Défense. Des études, connexes à la partie normative de l’environnement vibratoire, traitent des questions suivantes : — interactions dynamiques entre porteur et matériel ; transmission des vibrations par voies mécanique et acoustique ; interactions mécaniques aux basses fréquences ; — roulage de chars ; identification des sources vibratoires ; étude et simulation de l’environnement par excitateurs électrodynamiques ; — tir en vol sur avion ; méthode de calcul prévisionnel de l’ambiance vibratoire due au tir au canon en vue du dimensionnement du matériel ; mesures à bord du Mirage 2000 ; — missile en vol d’emport ; flexibilité offerte par la simulation en laboratoire de l’environnement vibratoire sur des missiles en vol porté. 1.2.3 Effets négatifs des vibrations 1.2.3.1 Mise en résonance entretenue La mise en résonance entretenue de modes propres de structures est une source de désordres graves, du fait des contraintes et des déplacements excessifs qui en résultent : les efforts alternés sont une source de fatigue structurale sévère, en raison du nombre de cycles rapidement cumulés (fréquence propre × temps d’excitation), et les niveaux importants de vibrations sont une source de désordres multiples (initiation de fissures, desserrage des assemblages mécaniques, des connexions électriques, bruits intenses, etc.). Exemple : des phénomènes naturels peuvent être à l’origine de tels problèmes de mise en résonance : c’est ainsi qu’une plate-forme de forage pétrolier en mer de Beaufort a dû être évacuée à la suite d’importantes vibrations d’ensemble provoquées par les chocs d’une plaque de glace d’environ 2 km2 de surface [8]. Lorsque le hasard fait coïncider une raie d’excitation particulière (vitesse de rotation d’un arbre et premiers harmoniques, fréquence de passage des pales d’un ventilateur devant des aubages fixes, fréquence de passage des billes d’un roulement devant un défaut, efforts d’engrènement de trains d’engrenages, etc.) avec une fréquence propre d’un bâti, d’un arbre ou d’une structure voisine, on observe donc des usures précoces, des ruptures, des pannes fréquentes, qui ne trouveront de solution que dans une redéfinition de l’installation (§ 3.3). Exemple : l’étude de cas développée au paragraphe 3.4, à propos de la fissuration de tours d’aéroréfrigérants industriels qui présentaient des fréquences propres à 23 Hz, excitées conjointement par deux raies à 24 Hz (harmonique 12 des pales) et 24,75 Hz (harmonique 1 du moteur), est tout à fait typique. L’Association française de normalisation (AFNOR) a publié un recueil en deux ouvrages des normes sur les vibrations et chocs mécaniques [Doc. R 3 140]. R 3 140 − 4 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES 1.2.3.2 Mise en résonance transitoire Moins grave, et plus fréquente, est la mise en résonance passagère d’une structure lors d’un état de fonctionnement transitoire : c’est, par exemple, le cas de toutes les fréquences propres balayées lors de la montée en vitesse ou de l’arrêt d’une machine tournante rapide, ou encore lors de chocs, d’à-coups de couple, etc. Il est préférable de connaître cet état de fait pour vérifier que l’on en contrôle bien les paramètres et que la mise en résonance est transitoire et suffisamment peu fréquente. Moyennant ces précautions, de telles occurrences pourront être acceptées par l’ingénieur. Exemple : une machine à grande vitesse de rotation, telle que la turbopompe du premier étage de la future Ariane 5, tourne en conditions nominales à une vitesse dite « hypercritique », en l’occurrence entre la deuxième et la troisième vitesse critique. Lors de la montée en vitesse, l’arbre (commun à la partie pompe et à la partie turbine) vibre donc successivement selon son premier puis son second mode propre, avant de se stabiliser. 1.2.3.3 Instabilités Un cas plus complexe, rare heureusement car souvent catastrophique, est celui où l’effort excitateur est lui-même modulé par la vibration de la structure et concentre son énergie à la fréquence propre au fur et à mesure que la structure entre en résonance. Si aucun phénomène physique ne vient modérer cette instabilité, appelée parfois accrochage, elle conduit très rapidement à la rupture. Exemples ■ Des rafales de vent peuvent faire vibrer une structure élancée, mais réciproquement les oscillations de cette dernière modifient l’écoulement aérodynamique. Ce couplage est à l’origine de la spectaculaire destruction du Pont de Tacoma aux États-Unis, en 1940 [9]. Ce type de couplage a été à l’origine aussi de la rupture des échangeurs de chaleur de l’usine de liquéfaction de gaz de Skikda. Par la suite, les constructeurs d’échangeurs de chaleur à faisceaux de tubes ont introduit des dispositifs de pincement des tubes et de butées mécaniques, qui empêchent une telle mise en résonance généralisée des tubes par couplage à l’écoulement. ■ Les fluctuations dynamiques de volume et de pression dans un réservoir influent sur le débit des pompes ou turbines en amont ou en aval. L’instabilité qui en découle, pour un lanceur spatial, est connue sous le nom d’effet Pogo : une fluctuation de poussée du moteur fait résonner le fluide dans le réservoir, ce qui accroît la fluctuation de poussée du moteur, etc. Ce problème a affecté le lanceur Diamant mais a pu être résolu par l’amortissement structural de la paroi du réservoir. Face à de tels risques d’instabilité, il est indispensable de modéliser la boucle de rétroaction entre vibration structurale et effort excitateur, d’identifier les paramètres qui permettent d’en contrôler le gain, et de se placer en dehors des zones instables avec un coefficient de sécurité raisonnable, ce qui peut demander un important investissement en termes de modélisation et de connaissance physique des phénomènes en jeu, ainsi que de leurs possibilités de couplage (l’exemple c du § 3.1). 1.2.3.4 Conclusions Attirons l’attention sur le fait que l’on peut très rarement incriminer, dans tous les problèmes cités ici, un composant particulier de l’installation : c’est la conjonction de tous les éléments qui rend globalement l’installation malencontreuse, et ce n’est pas toujours l’élément dont le mauvais dimensionnement entraîne la mise en résonance qui présente pour autant les vibrations les plus intenses ou les signes de ruine les plus précoces. Avant tout, face à de tels problèmes, il faut incriminer un manque d’analyse de l’installation sous ses aspects dynamiques et un manque de cahiers des charges explicites en termes dynamiques pour les divers fournisseurs ; les précautions à prendre, qui peuvent être souvent sous-traitées à des ingénieries spécialisées, sont d’un coût fort modeste face à l’avantage qu’en retirera le futur exploitant en termes de fiabilité et de longévité de son installation. 1.2.4 Aspects positifs des vibrations structurales De nombreux dispositifs industriels utilisent la génération de vibrations comme principe actif : en particulier, dès que l’accélération vibratoire approche l’accélération de la pesanteur, on peut, en général grâce à des moteurs à balourd, mouvoir et ordonner des petits objets (bols vibrants), tasser ou au contraire égrener des pulvérulents, homogénéiser des suspensions (vibrage du béton). À des niveaux plus intenses, on peut fracturer des matériaux à rupture fragile (perceuses à percussion, marteaux pneumatiques), relaxer les contraintes internes de matériaux ou d’assemblages, désincruster des dépôts solides (décalaminage). Le bon fonctionnement de ces systèmes suppose une maîtrise suffisante des vibrations propres de leur structure sous l’effet des vibrations qu’ils doivent générer. Le fait de soumettre une structure, qui ne vibre pas par elle-même, à des vibrations peut être également un moyen de connaître un certain nombre de ses propriétés. On développera largement dans cet article (§ 2.2.2) l’analyse dynamique des structures par excitation artificielle, mais on peut citer d’autres cas où la génération locale de vibrations fait partie intégrante d’un capteur actif performant pour le contrôle non destructif : par exemple, le contrôle de niveau dans les enceintes fermées. Enfin, l’observation des vibrations d’une machine ou d’une installation en fonctionnement est une source d’informations d’une richesse considérable sur son état mécanique et fonctionnel, dont l’exploitation ne fait que commencer (surveillance vibratoire – ou monitoring – et maintenance prédictive). Cette richesse tient : — à la bonne propagation des vibrations dans les structures, permettant de recueillir, sur un seul capteur fixe, des informations de n’importe quel élément de la machine ou de l’installation ; — à la cadence élevée des informations délivrées par un capteur dynamique (accéléromètre ou microphone dont la bande passante est de plusieurs kilohertz) ; — à la multiplicité des traitements du signal que l’on peut appliquer pour interpréter les signaux et leurs changements. Nota : la croissance considérable de ce domaine de la surveillance et de la maintenance des machines et installations à partir d’un suivi vibratoire (ou acoustique) demanderait un développement spécifique dépassant le cadre du présent article. 2. Les outils de l’ingénieur et leur mise en œuvre On décrit ci-après un ensemble d’« outils », qu’il s’agisse d’outils conceptuels, donc de méthodes, ou d’outils matériels, donc de moyens d’analyse et d’essais, sachant que l’ingénieur, appelé en général à titre curatif, doit non seulement constater un désordre bien précis (diagnostic ), mais aussi spécifier des solutions correctives : il lui faut alors faire appel à des schémas de représentation des phénomènes vibratoires qui lui permettront, qualitativement ou quantitativement, d’identifier les phénomènes physiques à maîtriser et d’évaluer l’efficacité des solutions techniques correspondantes, avant toute modification. Les paramètres en jeu sont en effet nombreux : cela interdit de rechercher des palliatifs à force d’essais qui se révèlent infructueux, comme l’attestent encore trop souvent les retards et les surcoûts finalement considérables de la mise au point de certains prototypes, lorsqu’une analyse dynamique appropriée n’est pas conduite en temps opportun. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 5 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ 2.1 Représentation des phénomènes vibratoires On obtient alors la matrice de transfert globale de la structure assemblée en faisant la synthèse des transferts élémentaires des diverses sous-structures. 2.1.1 Impédance dynamique et fonctions de transfert 2.1.1.1.3 Couplage faible 2.1.1.1 Définitions 2.1.1.1.1 Fonctions de transfert L’analogie entre la transmission des vibrations dans des structures et la transmission des courants électriques dans des réseaux quelconques a été un apport très fécond. On peut, en effet, décrire la propagation des vibrations entre une source et un récepteur quelconque à travers un ensemble de structures, si complexe et hétérogène soit-il, en termes d’un réseau équivalent dont chaque branche est caractérisée par une matrice de transfert reliant forces (et moments) et déplacements vibratoires (ou vitesses, ou accélérations) d’une section « entrée » à une section « sortie ». La dénomination normalisée de ces fonctions de transfert est donnée au tableau 2. Si cette structure est indéformable aux fréquences considérées (masse pure M ), ou au contraire déformable (raideur pure K ) et de masse négligeable, un seul paramètre suffit pour exprimer son comportement en tout point, et le transfert sera une matrice purement réelle et diagonale de masse (F = M γ ) ou de raideur (F = Kx ), les déplacements (respectivement forces) étant identiquement égaux à chaque extrémité. En général, la matrice de transfert n’est pas diagonale, ses coefficients sont complexes et variables en fonction de la fréquence, et seul le « bon choix » des points d’entrée et de sortie (pattes de la machine, plots élastiques dans un massif, etc.) permet de l’expliciter de manière précise avec un nombre de paramètres raisonnable. On se reportera à l’article Vibrations [A 410] du traité Sciences fondamentales pour les développements mathématiques traduisant et illustrant cette notion d’impédance dynamique et de fonction de transfert. Dans le domaine de la représentation des vibrations, retenons les propriétés essentielles suivantes : — les fonctions de transfert de systèmes linéaires contiennent toute l’information nécessaire à la caractérisation des échanges vibratoires et acoustiques entre leurs points d’entrée et de sortie ; — elles sont invariantes lorsqu’on échange entre les mêmes points les rôles « entrée » et « sortie » (réciprocité). 2.1.1.1.2 Couplage de diverses structures Chaque structure i étant décrite par une matrice de fonctions de transfert entre m i points d’entrée et n i points de sortie, il est possible de représenter l’assemblage réalisé en couplant des points de sortie de la structure i – 1 à des points d’entrée de la structure i, etc. On dira que le couplage est faible si l’assemblage ne modifie que très légèrement les propriétés initiales du transfert dans les sousstructures supposées isolées. Dans ce cas, le transfert global est simplement le produit, fréquence à fréquence, des fonctions de transfert élémentaires. Cette situation de faible couplage se traduit par le caractère diagonal des matrices. 2.1.1.1.4 Couplage fort Dans le cas où l’assemblage modifie significativement la réponse aux vibrations des diverses sous-structures, le formalisme mathématique se complexifie (§ 2.2.3.4) : il apparaît des termes de couplage qui expriment la façon dont chaque élément influe sur le comportement dynamique de ses voisins. Cette mathématique reste accessible au projeteur, sous forme de logiciels de synthèse de structure désormais disponibles commercialement, et permet également de simuler certaines modifications structurales et d’en observer le résultat. Numériquement, les termes de couplage sont les termes non diagonaux des matrices. 2.1.1.2 Remarques 2.1.1.2.1 Critère d’appréciation du couplage Pour choisir la méthode appropriée, il est facile de vérifier si le couplage entre deux éléments est faible : il suffit de superposer fictivement leurs impédances ponctuelles respectives en leur point de liaison, et de vérifier qu’un facteur minimal de 3 à 10 (10 à 20 dB) les sépare à toutes les fréquences susceptibles d’être excitées. On trouve en particulier cette règle dans la norme d’installation des machines de bord sur supports élastiques pour la construction navale militaire (IT 1570), comme critère de qualité des carlingages dans un objectif de discrétion acoustique. De manière similaire, le projet de norme ISO/ DIS 9611 sur la mesure, au niveau des supports élastiques, du bruit d’origine vibratoire caractéristique d’une machine propose d’exciter mécaniquement la fondation de la machine, celle-ci étant arrêtée, et de vérifier que l’écart entre les niveaux vibratoires respectivement en aval et en amont des plots élastiques dépasse 10 dB. Numériquement, on comparera le module des termes non diagonaux vis-à-vis de celui des termes diagonaux, qui devra respecter ce même écart pour que l’on puisse les négliger. Dans le cas contraire, on tiendra compte de tous les termes de couplage. (0) Tableau 2 – Dénominations normalisées des relations entrée/sortie ponctuelles en analyse vibratoire (d’après ISO 7626/1) Relation Dénomination Relation Dénomination x Déplacement ----- = --------------------------------------Force F Compliance F Force ------ = --------------------------------------x Déplacement Raideur dynamique v Vitesse ------ = ---------------------F Force Mobilité (ou admittance) F Force ------ = ---------------------v Vitesse Impédance γ Accélération ------ = ------------------------------------F Force Accélérance Force F ----- = ------------------------------------Accélération γ Masse dynamique R 3 140 − 6 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES 2.1.1.2.2 Rôle des résonances des sous-structures Dans tous les cas (couplage fort ou faible), le résultat final est dégradé dès qu’un élément de la chaîne présente cette sensibilité particulière aux vibrations qu’est la résonance d’un mode propre (§ 1.2.1) : un élément mal conçu peut de plus, lorsqu’il est mis en série, dégrader les caractéristiques de ses voisins ; lorsque plusieurs éléments sont montés en parallèle, la notion de court-circuit ou de pont vibratoire illustre bien que l’élément défaillant l’emporte et fait perdre le bénéfice de toutes les autres précautions antivibratiles de type découplage. Les valeurs courantes de l’amortissement des vibrations dans les structures industrielles – qui contrôle seul l’amplification créée par ces mises en résonance – étant faibles, l’effet final sur la transmission des vibrations correspond à des remontées de niveau considérables, un facteur 100 (soit + 40 dB) étant chose commune (figure 2). Il est alors intéressant, dans une situation un peu complexe, d’exprimer la participation de chaque mode propre impliqué au niveau de telle ou telle sous-structure dans la fonction globale de réponse en fréquence : plus cette participation sera forte, et plus il sera simple de définir des remèdes, qui seront spécifiques à cette sous-structure-là et à ce mode-là. Ce sont, là encore, des résultats, que fournissent les logiciels de synthèse dynamique de structures, et que l’on explicitera dans le cadre des schématisations du type masse-ressort (§ 2.1.2). 2.1.1.3 Analyse en fonction de la fréquence Figure 2 – Amplification des vibrations et du bruit par les résonances structurales L’allure générale de la réponse dynamique d’une structure excitée ponctuellement est donnée par la figure 3. ■ Zone I : comportement en raideur ou en masse En deçà de la première fréquence propre, on doit observer en tous points d’une structure un comportement dynamique traduisant : — la souplesse statique de la structure, si ses mouvements d’ensemble sont bloqués (fondation rigide, conditions aux limites encastrées ) : on reproduit alors un mouvement forcé dont la forme est similaire à la flèche statique que prend la structure sous l’effort exercé ; — la masse et les inerties propres de la structure, si elle est retenue souplement (conditions aux limites libres ) : la structure bouge en bloc sous l’effet de l’effort qu’on exerce, avec six degrés de liberté (3 translations et 3 rotations, souvent couplées), associés chacun à une fréquence propre de suspension (figure 4). Ces comportements basse fréquence sont donc en général faciles à prévoir avec les outils courants du bureau d’études. Ils correspondent à la zone I de la figure 3. La notion de conditions libres ou bloquées se retrouve lors de la définition des paramètres des essais dynamiques des structures (impédance libre ou bloquée, norme ISO 7626/1). Dès qu’apparaissent les premiers modes propres, le comportement dynamique (c’est-à-dire les impédances et les fonctions de transfert) devient plus complexe, mais il reste possible d’en dégager des tendances générales : zones II, III et IV de cette même figure 3. ■ Zone II : comportement modal La zone II de la figure 3 correspond à un comportement modal bien marqué. La dizaine de premiers modes propres intéresse l’ensemble de la structure et fait participer une fraction importante de sa masse totale et de sa raideur statique ; la mise en résonance de ces premiers modes est aisée, conduisant à des maximums aigus, les amortissements structuraux étant encore faibles à ces fréquences « basses », sauf dispositions technologiques particulières. La longueur d’onde vibratoire λ se définit comme la distance parcourue par l’onde en une période : λ = c /f, où c est la célérité de l’onde et f la fréquence. La figure 5 présente les ondes vibratoires susceptibles de se propager dans les structures mécaniques de type plaque ou poutre et leurs célérités aux fréquences habituelles d’étude des vibrations. Figure 3 – Allure générale de la réponse dynamique d’une structure à une excitation ponctuelle Une structure présente un mode propre dès lors que l’onde vibratoire peut se réfléchir sur ses bords sans changement de phase : le premier mode d’une poutre ou d’une plaque encastrée libre se produit lorsque la demi-longueur d’onde de flexion égale sa plus grande dimension L, soit f 0 = 1/2 (cf /L), où cf est la célérité de l’onde de flexion (puis f1 = cf /L, etc.). Il en est de même pour toutes les structures : les longueurs d’onde de flexion associées aux premiers modes sont à l’échelle de leur plus grande dimension. On comprend alors que les détails de conception ou d’aménagement influent peu, et que n’importe quelle automobile, par exemple, présente des premiers modes similaires dans la même bande de fréquence. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 7 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 4 – Identification des fréquences de suspension d’un massif de machinerie (pour II, se reporter à la figure 3) De même, des objets géométriquement homothétiques se correspondent par des lois de similitude en général bien vérifiées par l’expérience (tableau 3), la fréquence à considérer pour observer un comportement semblable variant à l’inverse de l’échelle géométrique, de façon à conserver le même rapport longueur d’onde/taille de l’objet. (0) Tableau 3 – Rapports de similitude. Maquettes en similitude géométrique, de même matériau Grandeur Longueur Masse Inertie Raideur Facteur d’amortissement Fréquence Accélération Vitesse Déplacement Force Pression Impédance Réceptance ou compliance Inertance ou accélérance Mobilité ou admittance Déformation Contrainte Bruit rayonné par une force F Bruit rayonné par une force F ramené à 1 m Échelle 1 (réel) Échelle 1/n (maquette) L M I K η f γ v x F P F /v x /F γ /F v /F ε T P /F L /n M /n 3 I /n 5 K /n η nf nγ v x /n F /n 2 P F /n 2 v nx /F n 3 γ /F n 2 v /F ε T 2 n P /F (1) P /F à 1 m n P /F à 1 m (1) Pour une observation faite au point homothétique. Figure 5 – Différents types d’ondes vibratoires dans les plaques ou poutres homogènes R 3 140 − 8 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Bien entendu, les structures les plus étendues vont présenter les fréquences propres les plus basses. Toutefois, comme elles sont conçues avec plus de robustesse vu leur élancement, leur résistance à la flexion est supérieure à celle d’objets plus petits, ce qui, au sens des modes propres, compense leur taille plus grande. La plage des premières fréquences propres des structures industrielles courantes n’est donc pas aussi large que celle de leur taille ; la plupart présentent leurs premiers modes entre 10 et 100 Hz (par exemple 16 Hz, figure 4), comme le lecteur pourra le vérifier dans la plupart des exemples du paragraphe 3. ■ Zone III : comportement modal diffus La zone III de la figure 3 voit les modes devenir de plus en plus complexes (nœuds et ventres nombreux), et, bien que la densité modale augmente, leur mise en résonance par les excitations naturelles des structures est plus improbable et limitée en tout état de cause par l’amortissement naturel. Ce dernier augmente avec la fréquence dans les structures métalliques courantes, car : — la longueur d’onde des vibrations diminuant, l’amortissement structural est d’autant plus opérant, toutes choses égales par ailleurs ; — l’efficacité du rayonnement acoustique des structures augmente et l’amortissement par rayonnement devient souvent important ; — les assemblages jouent un rôle toujours prépondérant. La connaissance précise de ces modes est de peu d’utilité, ils dépendent trop des détails de réalisation des objets, des dernières interventions mécaniques (montages, démontages), des cartes de température dans la structure, etc. C’est pourquoi une connaissance statistique de ces modes suffit dans la plupart des cas (méthode statistique SEA, § 2.1.5), et l’on évaluera seulement le comportement moyen de la structure. On devra en outre vérifier qu’un élément particulier n’entre pas en résonance, dans certains cas, dans cette gamme de fréquence – surtout s’il se trouve au voisinage immédiat, soit d’un élément actif source de vibrations, soit d’un élément particulièrement sensible aux vibrations (ou particulièrement efficace pour les convertir en bruit gênant). ■ Zone IV : comportement local La zone IV de la figure 3 correspond aux fréquences telles que les vibrations subissent une atténuation importante d’un bout à l’autre de la structure, et les réponses dynamiques n’expriment plus alors qu’un comportement très local. L’analyse expérimentale devient donc délicate, il en serait de même pour l’analyse par les éléments finis, mais il est rare que l’on ait à observer précisément ces comportements haute fréquence dans le cadre des structures industrielles courantes. La manière la plus élémentaire de représenter ces échanges est de considérer l’oscillation d’une masse rigide M (énergie cinétique pure) supportée par un ressort de raideur K sans masse (énergie de déformation pure). Il suffit alors d’écrire l’équilibre du système pour trouver l’équation élémentaire bien connue, en notant : ẋ˙ la dérivée seconde du déplacement x (t ) : Mẋ˙ + Kx = 0 si le système est isolé ; Mẋ˙ + Kx = F ( t ) si le système est soumis à une force extérieure F variant en fonction du temps. On vérifie que l’équation du système isolé est identiquement satis1 faite si x (t ) est une raie de fréquence --------- K / M , qui est alors la 2π fréquence propre du système conservatif (§ 1.2.1). On est amené à tenir compte des pertes énergétiques inhérentes à tout système réel (frottements, amortissement du ressort) par un amortisseur exerçant un effort proportionnel à la vitesse vibratoire ẋ dans le cas le plus simple (viscosité C ), d’où le schéma classique de la figure 6 régi par l’équation : Mẋ˙ + C ẋ + Kx = F ( t ) (1) Nota : bien entendu, ce système peut être couplé à d’autres pour représenter un comportement plus complexe. C’est ainsi, par exemple, que la réponse d’un être humain debout à des vibrations basse fréquence peut être déterminée avec un modèle à sept degrés de liberté (figure 7) développé dans le cadre d’études de biomécanique. L’avantage principal des schématisations masses-ressorts-amortisseurs linéaires est de conduire, dans tous les cas, à un ensemble d’équations aisément déterminables et solubles analytiquement. 2.1.2.2 Transmissibilité Certains rapports de grandeurs ont un intérêt particulier pour apprécier le fonctionnement d’un système suspendu sur plots élastiques : il s’agit des transmissibilités dynamiques respectivement en force (force transmise/force imposée), en déplacement (déplacement transmis/déplacement imposé), ou croisées (déplacement transmis/force imposée ou vice versa). Elles représentent en effet le filtrage des vibrations associé au montage considéré. Ce classement par zones est valable pour toutes les structures mécaniques ; seules la position fréquentielle et l’étendue de chacune de ces zones dépendent des objets considérés. Le premier souci de l’ingénieur sera bien sûr de situer vis-à-vis de ces zones la position fréquentielle des principales raies excitatrices : — si elles sont toutes situées dans la zone I, une analyse statique suffit ; — si elles sont situées dans la zone II, un soin tout spécial doit être apporté pour éviter la résonance de tel ou tel mode de structure ; — si elles sont situées dans la zone III, des précautions générales de filtrage par plots élastiques isolants suffisent. 2.1.2 Schématisations masses-ressorts 2.1.2.1 Équation de base Dans tous les cas, les vibrations mettent en jeu un échange permanent entre de l’énergie cinétique (associée à la vitesse vibratoire et à la masse des éléments en mouvement) et de l’énergie de déformation (associée aux contraintes dynamiques liées à la rigidité des éléments déformés par le mouvement vibratoire). Figure 6 – Système masse-ressort-amortisseur élémentaire (à un degré de liberté) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 9 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ l’énergie de déformation de la structure. C’est ainsi que les éléments en porte-à-faux ont souvent une forte contribution en masse, les assemblages une forte contribution en raideur, etc. On s’aidera, pour cette identification, de la carte des vitesses vibratoires mesurées sur la structure, en particulier de ses discontinuités (qui révèlent les éléments très déformés, donc à caractère de raideur concentrée). Bien sûr, pour modifier la fréquence propre, il faudra modifier en priorité ces éléments, en allégeant les masses et en rigidifiant les raideurs pour élever la fréquence, et vice versa pour la réduire. ■ On veillera à choisir la grandeur la plus pertinente de la structure et du montage considéré, pour exprimer globalement leur capacité à transmettre les vibrations : — au niveau d’une liaison avec un élément de plus grande impédance (plus raide ou plus massif), on exprimera une transmissibilité en force ; — au niveau d’une liaison avec un élément de plus faible impédance (moins raide, moins massif), on exprimera une transmissibilité en déplacement. 2.1.2.3 Absorbeur dynamique Figure 7 – Modèle biomécanique de l’homme (d’après [29]) Ces fonctions sont précisées au § 2.2.3.2. Aux très basses fréquences, la transmissibilité en force vaut 1, et la transmissibilité en déplacement correspond à la déformation statique du système. Cela revient à dire que l’énergie de déformation prédomine sur l’énergie cinétique en tous les points du système. En haute fréquence, la transmissibilité devient inférieure à 1, et l’énergie cinétique prédomine sur l’énergie de déformation. On dit alors que les différentes masses sont découplées les unes des autres. Aux fréquences intermédiaires, chaque fois que, pour une des masses du système, les ressorts qui la portent renvoient une énergie de déformation égale à son énergie cinétique, il apparaît un mode propre à la fréquence correspondante. La transmissibilité est alors supérieure à 1, le système amplifie les vibrations. Pour le système simple masse-ressort et amortisseur, le lecteur vérifiera aisément l’expression suivante, identique, dans ce cas, pour la transmissibilité en force ou en déplacement : C ω 1 + i -------------------- ⋅ -------K M ω0 T (ω ) = ---------------------------------------------------------------C ω ω2 1 – -------2- + i -------------------- ⋅ -------K M ω0 ω0 (2) 2.1.3 Calculs en éléments finis où ω 0 = K /M , et ω = 2 π f. Le rapport C /2 K M est appelé amortissement réduit , C c = 2 K M étant appelé amortissement critique. Toutes ces expressions sont développées dans les ouvrages sur les vibrations et dans d’autres articles des Techniques de l’Ingénieur (en particulier, article Vibrations [A 410]). Aussi nous limiterons-nous ici à attirer l’attention sur les points suivants. ■ Il est important de savoir bien identifier, dans une structure réelle présentant des risques de problèmes vibratoires, ce qui est masse et ce qui est raideur à la fréquence d’intérêt , au sens d’une contribution prédominante respectivement à l’énergie cinétique et à R 3 140 − 10 Une application particulièrement intéressante du système masseressort élémentaire est de l’utiliser en absorbeur dynamique pour dériver sélectivement de l’énergie vibratoire d’une structure : autour de sa fréquence de résonance f 0 , il fonctionne en effet en « puits d’énergie » du fait de sa très grande susceptibilité aux vibrations de cette fréquence et localise dans ses battements de grande amplitude l’énergie vibratoire qui était antérieurement diffuse sur la structure principale (figure 8). Réciproquement, puisqu’il introduit un degré de liberté supplémentaire à la structure initiale, l’absorbeur dynamique introduit un mode supplémentaire, tandis qu’il décale le mode initial. Si bien qu’en pratique il provoque une amplification dans deux zones fréquentielles voisines, respectivement en deçà et au-delà de sa fréquence f 0 (figure 8c ). De ce fait, et compte tenu des fortes amplitudes vibratoires qu’il doit accepter en fonctionnement nominal, sa conception reste une affaire de spécialistes en raison des technologies à mettre en œuvre, même si son principe est très simple à mettre en équations. Des applications souvent citées des absorbeurs dynamiques sont : — la réduction de l’amplitude de paliers à balourds centrifuges suivant la direction perpendiculaire à l’axe utile ; — la réduction d’amplitude du premier mode de flexion de tubes d’échangeurs de chaleur ; — la réduction des forces d’inertie dans des mécanismes à transformation de mouvement, tels qu’un rasoir à couteau vibrant doté d’un ou de deux absorbeurs au sein du boîtier, ou l’ensemble pistons-vilebrequin d’un moteur d’automobile. La méthode des éléments finis est appliquée en dynamique et permet de déterminer par calcul les modes propres et les fonctions de transfert nominales d’une structure, si complexe soit-elle. Certains logiciels (fiche documentaire [Doc. R 3 140]) permettent même de simuler une excitation quelconque (vibrations de la machinerie, séisme, etc.) et de prédire la réponse vibratoire en tout point du maillage [15] [35]. Outre l’aide qu’elle apporte au projeteur, cette méthode offre une référence utile à l’expérimentateur, aussi bien pour optimiser son plan d’expérience en le simulant que pour interpréter ses essais et confirmer ses diagnostics et ses conclusions. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES 2.1.3.1 Définitions Dans les résultats fournis par les codes de calcul par éléments finis, il existe une grande disparité dans la terminologie, la formulation et la normalisation des grandeurs dynamiques. C’est pourquoi il est utile de se ramener aux grandeurs suivantes pour caractériser les différents modes (indicés i ) : — les fréquences propres f i ou les pulsations ω i ; — les déformées modales correspondantes Φi (vecteurs) et leurs T transposées Φ i . M étant la matrice de masse et K la matrice de raideur de la structure modélisée, il vient : — la masse modale : T m i = Φ i M Φ i (ou masse généralisée du mode i ) — la raideur modale : T k i = Φ i K Φ i (ou raideur généralisée du mode i ) et l’on doit vérifier : 2 k i = m i ω i = mi 4 π 2 f 2 i Par contre, Φi n’est définie qu’à une norme près (maximum des amplitudes posé égal à 1, norme du vecteur Φi égale à 1, ou masse modale m i égale à 1, etc.), que les auteurs de chaque logiciel doivent préciser. On notera aussi que la masse et la raideur modales ont la dimension ML2 et non la dimension d’une masse ou d’une raideur stricto sensu (elles représentent, au produit T –2 près, l’énergie cinétique et l’énergie de déformation du mode). Lorsque l’on calcule la réponse vibratoire de la structure dans une configuration donnée par cette méthode, il est extrêmement intéressant de détailler au point d’observation retenu P la contribution C P, i des divers modes i : c’est un nombre obtenu par le produit scalaire entre la déformée modale et la transmissibilité statique ΦP de la structure vis-à-vis du point P : T C P, i = Φ i M Φ P C’est là encore un guide très utile pour orienter l’intervention de l’ingénieur et choisir les modifications les plus opérantes sur les modes propres prédominants. 2.1.3.2 Cartes d’énergie On choisira de préférence des logiciels permettant de tracer graphiquement les cartes d’énergie cinétique et d’énergie de déformation associées à un mode, qui matérialisent finement les contributions respectivement en masse et en raideur des éléments de la structure dans ce mode, et permettent de définir des modifications efficaces en suivant les indications du paragraphe 2.1.2.2. Exemple : c’est ainsi que l’on a pu mettre en évidence le rôle insoupçonné d’une cloison pare-feu, pourtant peu épaisse, dans le contrôle du premier mode de torsion d’une caisse de char d’assaut : la figure 9 met en évidence la concentration d’énergie de déformation dans cette cloison, tandis que le terme de masse est principalement apporté par la caisse à munitions à l’arrière. L’exemple présenté au § 3.5 illustre une autre utilisation de la modélisation en éléments finis pour permettre l’extrapolation de mesures dynamiques à des parties inaccessibles de la structure (figure 50 p. 40). Figure 8 – Application industrielle d’un système résonnant en absorbeur dynamique Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 11 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 9 – Analyse dynamique de la caisse de char AMX 30 B 2.1.3.3 Recalage des modèles et optimisation Plus récemment, les logiciels de recalage d’une modélisation dynamique par éléments finis vis-à-vis d’une expérimentation offrent une approche rationnelle là où l’ingénieur en était réduit à l’intuition et au tâtonnement : ces logiciels permettent d’exprimer objectivement la distance (au sens mathématique) entre les déformées modales calculées et mesurées, puis d’identifier les zones du modèle les plus impliquées dans cet écart, et enfin de guider la reprise de la modélisation dans ces zones, jusqu’à obtenir une représentation satisfaisante des modes de la structure réelle. D’autres logiciels permettent d’optimiser par éléments finis une structure de forme donnée (par exemple un rotor de machine) pour répartir ses modes propres dans des plages de fréquence spécifiées (en dehors des plages de fréquence de rotation, etc.), par le biais d’algorithmes mathématiques d’optimisation, en jouant par exemple sur l’épaisseur de la matière dans les divers éléments du modèle. R 3 140 − 12 Tout cela concourt à donner à la méthode des éléments finis une place essentielle dans l’analyse des vibrations structurales et à conjuguer étroitement calculs et essais dans un même projet. 2.1.4 Maquettages et lois de similitude Malgré les progrès de la simulation numérique, il reste de nombreuses situations où l’expérimentation reste indispensable, sans pour autant qu’on puisse la pratiquer sur la structure réelle : la solution est alors de constituer un objet simplifié, éventuellement à une échelle plus commode ou conduisant à une réalisation plus économique, ou à partir de matériaux meilleur marché et plus faciles à mettre en œuvre. On demandera alors exclusivement à cet objet simplifié, ou maquette, de présenter les mêmes propriétés dynamiques que son homologue réel. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Nota : c’est ainsi que des raisons de sécurité évidentes conduisent à étudier la dynamique de propulseurs à poudre avec des maquettes en matériaux inertes dynamiquement semblables. De même, des raisons de disponibilité et d’indépendance vis-à-vis des contraintes opérationnelles conduisent à étudier la dynamique des structures navales sur des maquettes ou tronçons parfois à l’échelle 1, plutôt que sur des unités en service à la Marine. Les structures réelles ne font l’objet que des quelques tests dits de référence, pour garantir la pertinence des travaux conduits sur les maquettes. ■ Lois de similitude La plupart des phénomènes vibratoires sont indépendants de la pesanteur (exception faite des oscillations pendulaires, de la houle ou du ballottement des fluides dans des réservoirs), et la similitude géométrique est a priori l’approche qui garantit le mieux l’identité des comportements entre la structure réelle et la maquette en matière de vibrations et de bruit. Nous donnons au tableau 3 les facteurs de similitude à appliquer sur les diverses grandeurs vibratoires en fonction du facteur de similitude géométrique. Cette approche suppose de conserver les mêmes matériaux que ceux de la structure réelle. Toutefois, seuls le module d’Young E , la masse volumique ρ et le coefficient de Poisson ν importent en fait ; on peut alors, sauf pour des travaux de vérification de la tenue ultime au séisme ou en fatigue, utiliser des nuances d’alliages plus communes (en particulier, de moindre limite élastique). ■ Simplifications de la maquette, échelle et matériaux En dehors de cette simplification quant aux matériaux, la similitude géométrique conduite avec un souci d’exactitude trop poussée ne conduit à aucune économie de réalisation dans nombre de cas où la complexité des détails l’emporte sur la quantité de matière en jeu (laquelle est réduite évidemment au cube du facteur d’échelle) : il faut donc s’autoriser à bon escient des simplifications supplémentaires dans la forme et dans les détails de réalisation. Dans le cas de structures raidies par de nombreux goussets, il est possible de raisonner en inertie équivalente, mais il faut veiller à ne pas trop perturber conjointement la répartition de masse. On peut ainsi réduire le nombre de goussets et simplifier leur géométrie pour se ramener à des profilés standards ou à des tôles pliées. Le maquettage de tôles minces est difficile, du fait de l’impossibilité de tendre correctement des tôles et clinquants trop minces en construisant la maquette. La contribution en membrane de ces tôles ne peut plus alors être reproduite correctement ! C’est ainsi qu’on a dû renoncer à maquetter en similitude dynamique une caisse de TGV à l’échelle 1/20... D’une manière générale, la fidélité dynamique est d’autant plus facilement obtenue que l’échelle de similitude est faible, et les échelles de l’ordre de 1/4 représentent souvent le meilleur compromis technique/économique. D’autre part, les phénomènes dissipatifs (amortissement structural, dissipation dans les liaisons) échappent à la similitude géométrique, à l’exception de l’amortissement par rayonnement acoustique. Il faut donc les transposer à l’aide de matériaux présentant des caractéristiques dissipatives décalées vers les hautes fréquences. Exemple : pour les études en soufflerie du couplage entre les vibrations de tours d’aéroréfrigérants de centrales nucléaires EDF et le vent, on a pu ainsi ajuster la composition d’une résine de synthèse pour reproduire au 1/200 les caractéristiques dynamiques des tours réelles en béton, et ce en jouant sur diverses charges introduites dans la résine. La similitude fut très satisfaisante, malgré ce grand rapport d’échelle. Le travail du modeleur a été des plus délicats puisqu’il lui a fallu obtenir une épaisseur de 0,8 mm au col, sans défaut de répartition de la résine lors du moulage... Dans le cas des structures qui reçoivent un grand nombre de machines et d’équipements divers, une approche intéressante pour le maquettage est de les figurer d’une manière plus ou moins statistique avec des lests distribués irrégulièrement. On a pu montrer, en effet, que ces équipements jouent vis-à-vis de la structure principale qui les porte, plus continue, un rôle capital de diffusion et de diffraction des vibrations, similaire à celui que jouent les impuretés dans un réseau cristallin. Le résultat global est à la fois un effacement des modes propres de la structure et une localisation de l’énergie vibratoire à proximité des sources excitatrices. Le lecteur trouvera dans l’article Méthodes d’études des problèmes classiques de dynamiques stochastiques [A 1 346] dans le traité Sciences Fondamentales un développement mathématique approprié pour décrire de tels comportements vibratoires. Moyennant ces précautions, le maquettage apparaît comme une approche encore irremplaçable lorsqu’on veut maîtriser les aspects vibratoires et acoustiques d’un projet dont ils conditionnent le succès, malgré les progrès des approches numériques évoquées au paragraphe 2.1.3. 2.1.5 Méthodes énergétiques 2.1.5.1 Principe des différentes méthodes Les approches évoquées précédemment sont toutes déterministes, au sens où elles visent à caractériser précisément l’état vibratoire d’une structure à un instant donné. En général, cette information est plus détaillée que l’ingénieur ne le souhaite : peu importe finalement la fréquence précise des modes (le plus souvent entachée d’incertitude), il lui faut seulement déterminer un niveau vibratoire caractéristique de tel ou tel état de fonctionnement. Il est alors intéressant de raisonner en termes de flux d’énergie entre les divers composants de la structure. On fait ainsi l’économie d’une description point à point des vibrations, tout en s’attachant à une grandeur significative sur le plan physique et appelée à vérifier des lois simples de conservation et d’additivité. Il est de plus aisé, en connaissant la répartition surfacique de la masse de la structure, de relier l’énergie cinétique d’un élément de masse m à la vitesse vibratoire moyenne <u > dont il est animé : 1 E c = ----- m < u 2 > 2 Des développements sont en cours (principalement à Électricité de France (EDF), à Métravib RDS et au Centre technique des industries mécaniques CETIM, de manière coordonnée) pour donner une traduction expérimentale directe des flux d’énergie vibratoire dans les structures mécaniques, en combinant quelques points de mesure et des informations sur la structure dans la zone de mesure (épaisseur, inertie, etc.). Nota : l’énergie est portée par les ondes naturelles de la structure (figure 5), qui interfèrent avec leurs propres réflexions sur les bords de la structure, recréant ainsi les aspects modaux. Certaines de ces méthodes restent déterministes vis-à-vis du domaine des fréquences, comme la méthode power flow développée par Goyder et White à l’ISVR en Angleterre [10] ou la méthode des coefficients d’influence énergétiques publiée par le professeur Lesueur de l’INSA de Lyon [11]. La plus usuelle reste la méthode connue sous le sigle SEA (Statistical Energy Analysis, ou méthode d’analyse statistique de l’énergie) [12], du fait de sa grande simplicité. 2.1.5.2 Méthode SEA La méthode SEA fournit des résultats moyens dans des bandes de fréquences plus ou moins larges selon l’application. Le principe de cette méthode est de décrire la propagation et la répartition de l’énergie vibratoire dans une structure quelconque à la manière d’un flux de chaleur. Cette analogie n’est pas fortuite, la chaleur n’étant elle-même qu’une forme de vibrations, à l’échelle moléculaire cette fois. On pourra donc décrire l’état vibratoire moyen à partir : — de la connaissance du flux d’énergie injecté par la source interne (bruit ou vibrations d’une machine) ou par le milieu environnant (écoulement tourbillonnaire, par exemple) ; — des propriétés modales de chaque partie élémentaire homogène de la structure : densité modale (nombre de modes dans une bande de fréquence donnée) ; Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 13 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ — de l’évaluation des coefficients de couplage entre chacune des sous-structures ; — de la masse et de l’amortissement global de chaque sousstructure. L’amortissement est dit global car il inclut non seulement les effets dissipatifs au sein du matériau, mais aussi la déperdition d’énergie par rayonnement acoustique. La perte dans les liaisons est, par contre, difficile à prendre en compte, les coefficients de couplage entre sous-structures supposant des échanges sans pertes. Pour des structures simples, comme des plaques ou des poutres, ces différents paramètres sont approchés par voie analytique et tabulés [12]. Ils sont également mesurables par des essais assez simples (décréments logarithmiques pour les amortissements, etc.). 2.1.5.3 Limites de la méthode SEA Les seules limitations intrinsèques à cette méthode sont dues aux hypothèses que sa formulation amène à présumer : — l’énergie vibratoire est réductible à la somme des énergies modales, donc le comportement modal est prédominant pour toutes les sous-structures : cela signifie que l’amortissement global reste faible et que la propagation vibratoire vers la périphérie de chaque sous-structure est quasi complète ; la méthode n’est donc pas applicable, en particulier, aux structures remplies d’équipements irrégulièrement répartis (§ 2.1.4), ni à des cas de très fort couplage acoustique ; — la bande de fréquence d’analyse doit être assez large pour que toutes les sous-structures présentent assez de modes propres dans cette bande, au sens d’une vérité statistique ; c’est d’ailleurs cette hypothèse qui détermine le choix des bandes de fréquence ; — les phénomènes excitateurs sont supposés régulièrement répartis fréquentiellement dans la bande d’analyse, ce qui induit une équipartition de l’énergie vibratoire globale entre les différents modes de chaque sous-structure ; cette hypothèse conduit en général, au contraire de la précédente, à réduire la largeur des bandes de fréquence d’analyse, le spectre de l’excitation étant rarement indépendant de la fréquence ; — le couplage entre les sous-structures doit rester faible, c’est-à-dire que leur comportement après assemblage doit rester similaire à leur comportement intrinsèque en conditions libres ; cela implique que la propagation vibratoire d’une sous-structure à une autre est modérée ; on se reportera sur ce point au paragraphe 2.1.1.2. 2.1.5.4 Cas d’applications L’énergie vibratoire se diffuse, bien entendu, des sous-structures à forte énergie vibratoire vers les sous-structures à plus faible énergie : les structures à grand nombre de modes, donc de grande envergure, jouent alors le rôle de récepteurs vis-à-vis de structures plus petites ou plus raides, donc à moindre nombre de modes. Par conséquent, dans le cas, par exemple, d’une structure de type plaque ou coque raidie, l’énergie diffuse des raidisseurs vers la peau, ce qui va d’ailleurs en général accroître le bruit rayonné. Exemple : une modélisation SEA a pu fournir un guide sûr et précis dans un travail de réduction des bruits parasites affectant un sonar sousmarin et dus aux vibrations de son enveloppe (ou dôme) du fait des turbulences de l’écoulement. Sans modifier le profil hydrodynamique, on a pu les réduire de plus de 6 dB en modifiant la structure mécanique : suppression des raidisseurs, abandon de l’acier pour des composites résine-fibre de verre et accroissement de l’amortissement structural par introduction d’une feuille viscoélastique au sein du composite. La prévision, par le modèle SEA, du gain moyen dans la bande de fréquence du sonar a été vérifiée à 1 dB près lors des essais de recette du système modifié. La référence [12] présente de nombreux autres exemples, notamment dans le domaine spatial, qui a été un promoteur essentiel de cette méthode. R 3 140 − 14 2.1.6 Rayonnement acoustique des structures Bien que l’étude des problèmes d’acoustique industrielle ne soit pas l’objet de cet article, les préoccupations de bruit induit accompagnent assez souvent le besoin de minimiser les vibrations pour nous amener à rappeler les traits essentiels du couplage entre vibrations et bruit. Le lecteur désireux d’approfondir ce sujet pourra se reporter à la référence [11], ou à l’ouvrage de L. Beranek [13] qui reste l’un des meilleurs ouvrages de base pour l’ingénieur sur ce sujet. 2.1.6.1 Mécanisme du rayonnement Le premier élément important à rappeler est que, même si toute vibration structurale ébranle les molécules du fluide environnant (il y a égalité des vitesses à l’interface), il n’y a qu’une fraction de cette agitation du fluide qui se propage au loin (bruit rayonné, champ lointain). La zone immédiatement voisine de la structure (champ proche) est donc le siège d’un réarrangement important entre le champ vibratoire et le champ acoustique ; les mouvements de fluide non rayonnants acoustiquement sont souvent appelés pseudo-son , ou encore champ évanescent . Ces mouvements ne sont pas négligeables pour autant, car, vus de la structure, ils contribuent à l’accroissement d’inertie qu’apporte le fluide (masse ajoutée ) à la structure, d’où un ralentissement des ondes vibratoires par rapport à une situation dans le vide (quelques pour-cent dans l’air, mais près de 50 % dans l’eau dans un cas typique de coque de navire). Une méthode approchée pour déterminer la masse ajoutée sur une plaque a été proposée par Lord Kelvin : elle revient à évaluer la masse du ou des fluide(s) contenu(s) dans le cylindre circonscrit à la plaque qui vibre. Le deuxième élément important est que le son se propage sans déformation dans le fluide, à une vitesse constante caractéristique de celui-ci (340 m/s dans l’air, 1 450 m/s dans l’eau, à température ambiante et pression atmosphérique normale), tandis que la propagation dans la structure est beaucoup plus complexe (les différentes ondes présentées sur la figure 5 interviennent concomitamment, déforment le signal et créent de multiples interférences). Les ondes qui sont plus rapides que la vitesse du son dans le fluide environnant sont dites supersoniques , celles qui sont plus lentes subsoniques , et la situation transsonique intermédiaire, rare, d’égalité, est dite de coïncidence . Formellement, sur une structure d’étendue infinie et sans amortissement, les ondes mécaniques subsoniques ne produisent aucun rayonnement acoustique et créent seulement un écoulement le long de l’interface qui s’inverse à chaque demi-période (figure 10a ). Les ondes mécaniques supersoniques , au contraire, se couplent avec un rayonnement très directif, dans la direction déterminée par l’égalité des projections des longueurs d’onde respectives (loi de Snell, figure 11). L’onde mécanique coïncidente , elle, rayonne intégralement au point de s’amortir complètement sur la structure. Le rayonnement acoustique des structures apparaît ainsi sous l’aspect d’un phénomène tout à fait simple : cela est vrai, mais il s’applique malheureusement à des objets infiniment plus compliqués que la structure idéale, infinie et non amortie qu’on vient de décrire. Le résultat pratique reste alors que les conditions aux limites et les effets de bord déterminent le bruit effectivement rayonné, beaucoup plus que les mécanismes décrits ci-dessus dans une situation idéalisée. On pourrait expliquer simplement le mode habituel de génération du bruit dans les mêmes termes, par le fait que les bords ou les singularités de la structure créent des dissymétries qui ne permettent pas à l’écoulement pariétal de compenser les effets de vibrations subsoniques : il subsiste des zones excédentaires ou déficitaires, qui se comportent alors en sources de bruit efficaces (figure 10b ). Une telle source de fluctuations de volume, géométriquement localisée, correspond à un « monopôle » acoustique et rayonne également dans toutes les directions. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES structure : en particulier, dans le cas de rayonnements intenses, on reconnaîtra souvent une situation singulière de coïncidence spatiale entre l’étendue du mécanisme et la longueur d’onde acoustique. C’est ainsi que l’on a pu expliquer le rayonnement important d’équipements électriques tels que des transformateurs ou des réactances par le fait que, sur les premières raies générées par les effets magnétiques au sein des noyaux, il y avait coïncidence entre le tiers de la longueur d’onde acoustique et la distance entre chaque noyau : s’agissant de noyaux alimentés en triphasé, il y avait alors coïncidence entre la pseudo-onde de dilatation des noyaux par magnétostriction et l’onde acoustique, coïncidence qui se renouvelait bien sûr pour chaque harmonique. D’une manière générale, les ondes mécaniques supersoniques, bien que rayonnantes sur toute la surface de la structure (figure 11), ne contribuent pas significativement au rayonnement acoustique, car elles mettent en jeu des déplacements des parois sur la normale qui ne sont que du deuxième ordre vis-à-vis de la réponse élastique de la structure. À l’inverse, bien que le plus souvent subsoniques, les effets de flexion induisent de grands déplacements radiaux et contribuent au rayonnement de façon majeure du fait des effets de bord et autres singularités que révèle l’imagerie acoustique décrite au paragraphe 2.1.6.2 ou les essais décrits sur la figure 12. Minimiser spécifiquement le bruit rayonné conduira en général à concevoir des enveloppes extérieures pour la structure qui soient aussi continues que possible, et les raidisseurs seront ou évités, ou découplés mécaniquement. L’introduction d’amortissement structural est loin d’être systématiquement le moyen de réduire le bruit, car il est inopérant précisément sur les effets de bord et les singularités, et il amortit surtout la part non rayonnante du champ vibratoire : c’est là l’origine de bien des déconvenues apparemment paradoxales qui justifient le recours à des spécialistes. Figure 10 – Rayonnement acoustique d’une onde vibratoire subsonique Figure 11 – Rayonnement acoustique d’une onde vibratoire supersonique. Cas d’une plaque infinie L’association de plusieurs monopôles avec des relations de phase stables correspond à des sources d’ordre plus élevé (dipôles, quadripôles, etc.), cette fois directives, mais moins efficaces acoustiquement puisqu’une partie de leurs fluctuations de volume élémentaires peut encore se compenser par un écoulement pulsé. Il reste toujours très utile d’évaluer les longueurs d’onde mécaniques et acoustiques respectivement en jeu dans un problème précis, et de les apprécier aussi en relation avec la taille de la 2.1.6.2 Imagerie acoustique Une technique expérimentale très puissante a été développée depuis quelques années pour identifier les éléments de la structure dont la vibration contribue directement au bruit rayonné : il s’agit de l’imagerie acoustique (souvent appelée aussi holographie acoustique). Le principe est le suivant : partant de mesures acoustiques, il est possible, puisque la propagation du son obéit à des lois simples, de « rétropropager » mathématiquement les fronts d’ondes acoustiques observés, pour retrouver le champ de sources dont ils sont issus. L’analogie avec l’holographie acoustique tient au fait que cette image de la source est obtenue comme l’interférence des divers fronts rétropropagés. On obtient alors une image des points brillants acoustiques sur la structure observée, qui permet par exemple d’identifier : les ponts phoniques d’un capotage, l’effet amplificateur sur le bruit de la résonance de tel ou tel élément, ou les effets de bord et de singularités évoqués précédemment, plus souvent que l’emplacement effectif des sources internes. Cela est illustré par la figure 12, d’origine expérimentale, où le moteur de la torpille rayonne surtout indirectement par la singularité que constitue la jonction mécanique entre deux tronçons de coque bien au-delà de la tranche moteur. La figure 13 donne un autre exemple d’une application de cette technique pour identifier les sources de bruit sur un moteur automobile. Alors que la carte des pressions acoustiques brutes reste très confuse, l’image holographique identifie clairement à cette fréquence trois sources prédominantes, qu’il est facile de repérer ensuite sur le plan. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 15 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 12 – Rayonnement d’une coque de torpille aux fréquences de son sonar Il est possible enfin de combiner mesures vibratoires et mesures acoustiques pour améliorer la résolution de ce genre d’analyse, par exemple par des techniques de corrélation. 2.1.6.3 Conclusion Malgré la complexité des mécanismes de rayonnement acoustique des structures mécaniques, l’ingénieur peut disposer de moyens très sûrs pour diagnostiquer les sources vibratoires les plus bruyantes et les modifier à bon escient. Ces moyens sont accessibles sous forme d’une association entre capteurs appropriés (sondes et antennes acoustiques) et logiciels de traitement (imagerie acoustique), tels que MALICE de Métravib RDS. 2.2 Approche expérimentale Des lois ont été énoncées, dès le XVII e siècle, concernant la mécanique des manifestations périodiques des cordes tendues, des pendules, des poutres, des plaques. Les figures vibratoires, même R 3 140 − 16 de haut rang modal, sont visualisées aisément par le regroupement de grains fins dessinant les lignes nodales, lieu des amplitudes vibratoires minimales (figure 14). Cette approche expérimentale remonte au physicien allemand Chladni (1756-1827). Le fonds des travaux traitant de modèles théorico-expérimentaux raffinés est tel aujourd’hui que tout problème convenablement posé, moyennant l’introduction des quelques grandeurs physiques nécessaires, peut trouver sa solution par calcul, l’essai n’étant bien souvent effectué qu’à titre de contrôle ou encore substitué au calcul parce que plus économique. Mais, dans le cas où un doute subsiste entre prévision et réalité, le résultat expérimental, s’il peut être atteint et n’est pas contestable, doit constituer la référence. Une structure industrielle étant un assemblage souvent complexe formé d’éléments eux-mêmes plus ou moins simples ne peut être traitée par voie analytique comme le seraient systématiquement les éléments simples : cordes, chaînes, tuyaux, barres, plaques et coques [14]. Hormis l’essai, le calcul par éléments finis (§ 2.1.3) s’impose pour cerner la réalité, toutefois avec des points faibles sur le choix de modèles d’amortissement ou de non-linéarités pour lesquels on dispose rarement, a priori, de guide rationnel. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Figure 13 – Application de l’imagerie acoustique au diagnostic des sources de bruit sur un groupe motopropulseur (V6-3 litres) Les sujets traités aux paragraphes 2.2.1, 2.2.2 et 2.2.3 sont limités à l’approche expérimentale du contrôle et de la mesure des vibrations structurales dans son ensemble, en renvoyant à des références bibliographiques : à titre d’exemple, citons les centaines de communications présentées en langue anglaise pratiquement chaque année depuis 1982 à l’IMAC [15]. 2.2.1 Accès aux vibrations des structures Ce paragraphe traite des techniques expérimentales des capteurs de vibrations considérées dans leur ensemble, la vibration étant la grandeur de sortie à mesurer et non une grandeur d’entrée artificielle imposée à la structure, comme plus loin au paragraphe 2.2.2. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 17 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Un capteur de vibration est bien défini par : la grandeur à mesurer, le domaine de mesure exprimé en niveau absolu ou relatif, la précision requise et les conditions d’environnement. Son optimisation est à la fois un problème de mesure et de coût qui ne sera pas développé ici. 2.2.1.1 Capteur inductif et capteur piézoélectrique Les techniques classiques de mesure absolue et relative de la vitesse et de l’accélération sont fondées sur les lois de l’inertie, de l’induction et de la piézoélectricité. Nous donnons ci-après l’exemple d’une disposition technologique originale de capteur accélérométrique utilisé pour les essais de vibration au sol. Exemple : accéléromètre à barreaux piézoélectriques Le relevé simultané des points caractéristiques d’une déformée d’une grande structure, telle qu’un avion ou un engin, nécessite un nombre important de capteurs (plusieurs centaines pour un essai complet). Ces capteurs de précision suffisante (≈ 3 %) sont réparables, mais pas toujours récupérables, aussi doivent-ils être d’un coût raisonnable. La solution accélérométrique retenue utilise directement des barreaux piézo-électriques enserrés dans un support rigide (quasisuppression de l’effet de contrainte de la base). Quatre barreaux de même longueur aux extrémités libres/encastrées sont disposés symétriquement par rapport à l’axe de mesure pour privilégier la sensibilité aux mouvements de translation. La fréquence propre du capteur est fixée par le choix de . La masse du capteur (7 g) est compatible avec le genre d’application de ces accéléromètres suivis de chaînes associées à gains alignés (conditionneur de signaux) [16] (Origine ONERA, industrialisation PRODERA). 2.2.1.2 Capteur à jauges résistives Pour rester sur l’idée qui tend à montrer à la fois l’évolution importante des moyens, mais aussi le maintien en usage d’un certain nombre d’entre eux quant aux principes de base, citons l’extensométrie dynamique par jauge résistive, qui donne accès aux déformations en rapport avec les courbures, les contraintes, les dimensions et les matériaux. Exemple : la figure 15 est un résultat de calcul portant sur le mode 2 (deux nœuds) de flexion d’une barre encastrée/libre, de section constante et d’épaisseur 2 h. Deux courbes sont représentées en fonction de l’abscisse réduite ξ : — la déformée y (ξ ) du mode propre, qui serait donnée par un capteur de déplacement situé en ξ ; — la courbure de la barre, approximée par la dérivée seconde y ′′ (ξ ) exprimant l’allongement superficiel ε (ξ ) = h y ′′ (ξ ), qui serait donnée par un capteur à jauge résistive collée sur l’une des faces de la barre à l’abscisse ξ . Il est possible de passer, par double intégration, de y ′′ (ξ ) donnée par une jauge résistive à la valeur que délivrerait un capteur de déplacement ou d’accélération situé à l’abscisse ξ . Ce traitement effectué sur des signaux vibratoires peut être intéressant sur le plan technologique. Un exemple d’application est le suivant. Des capteurs à jauges extensométriques ont été proposés comme transducteurs de vibration grâce à des dispositions géométriques originales des jauges associées en pont qui respectent, sur plaques et sur barres, les dérivées spatiales, permettant ainsi, dans certains cas, de remonter par voie indirecte à l’accélération vibratoire avec une surcharge structurale des jauges inférieure à celle d’un accéléromètre. La discussion des erreurs introduites dans les deux cas ainsi que des confirmations expérimentales sont présentées dans la référence [17]. 2.2.1.3 Capteur à électronique intégrée Figure 14 – Lignes nodales expérimentales des six premiers modes propres d’une plaque carrée aux limites libres (d’après [14]) Figure 15 – Déformée y ( ) et courbure y ′′ ( ) d’une barre encastrée/libre sur le mode 2 de flexion Pour être opérationnel dans des ambiances électromagnétiques parfois sévères, l’élément sensible du transducteur et ses moyens d’acquisition et de traitement associés doivent être d’autant plus rapprochés que la taille des composants s’amenuise (figure 16). Le gain est conditionné pour fixer la sensibilité à 10 mV/(m · s–2), à titre indicatif pour cet accéléromètre, en vue d’en simplifier l’étalonnage. La courbe d’étalonnage montre clairement la résonance de la contremasse sur la raideur de la céramique en très haute fréquence. La rapidité d’acquisition et de traitement des mesures incite à augmenter le nombre P de points retenus pour le problème traité soit P = 10n avec 1 n 3 , ce qui est également rendu possible par l’abaissement du coût des capteurs. Un transducteur de vibration à usage industriel appelle les commentaires suivants. R 3 140 − 18 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Figure 16 – Accéléromètre à quartz piézoélectrique, à électronique intégrée Métravib. Fonctionnement en compression Chaque problème a sa spécificité et ses caractéristiques. Les transducteurs sont nombreux et diversifiés, permettant de satisfaire à des normes particulières. Exemples de vibrations répondant à des normes ■ La valeur efficace V f de la vitesse vibratoire est la grandeur de référence des machines tournantes ayant une fréquence de rotation entre 10 et 200 s–1 (NF E 90-300, mai 1978). Les mesures de V f effectuées sur les chapeaux de paliers de machines sont prévues dans les limites 0,28 < V f (mm · s–1) < 45 et pour les fréquences 10 < f (Hz) < 1 000. ■ L’accélération équivalente a eq , qui tient compte d’un effet de cumul des vibrations tridirectionnelles, est la grandeur utilisée pour l’évaluation de l’exposition des individus aux vibrations transmises aux membres supérieurs. Il s’agit de mesurer les vibrations intenses qui peuvent être transmises par les machines-outils et pièces vibrantes aux mains et aux bras des personnes qui les utilisent (NF E 90-402, octobre 1986). Les limites de la cote d’alerte dues à a eq , soit 6 < a eq (m · s –2 ) < 20, dépendent aussi de la durée t d’exposition journalière aux vibrations, soit 0,5 < t (heure) < 6, et de la gamme de fréquence dans les limites 5 < f (Hz) < 1 500. ■ Exemple d’une chaîne de microcapteurs Dans la perspective d’une réduction importante des coûts d’une chaîne de mesure accélérométrique, alliée à une compacité et une légèreté accrues qui multiplient les possibilités d’utilisation, il est intéressant de signaler l’apparition sur le marché de microcapteurs sur substrat silicium (figure 17). L’élément sensible, de quelques micromètres seulement, est réalisé avec les techniques habituelles de production des circuits électroniques intégrés (micro-usinages par voie liquide ou par bombardement ionique, dépôts alternant des strates isolantes et des strates conductrices ou semi-conductrices, etc.). Le même cristal de silicium peut recevoir divers circuits de conditionnement et de traitement, d’où le concept de capteur intelligent, c’est-à-dire délivrant une information (par exemple, « le moteur présente du cliquetis »), et non plus une simple mesure d’accélération (origine Vectavib). Figure 17 – Cellule accélérométrique Vectacell (d’après doc. Vectavib) 2.2.1.4 Vibromètre à laser La vibrométrie laser s’est développée sur le marché de la mesure avec la mise au point de vibromètres sans contact qui viennent compléter la gamme des capteurs procédant par liaisons mécaniques avec les structures en essai. Les vibromètres à laser présentent deux avantages sur ces derniers : — l’absence de contact physique, à la différence d’un capteur de type classique qui est, soit maintenu à courte distance de l’objet vibrant (quelques millimètres par exemple dans le cas d’un capteur de proximité inductif ou électrostatique), soit fixé sur l’objet en le surchargeant de la masse du capteur, donc de 1 à 100 g dans le cas d’un accéléromètre ; Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 19 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ — l’étalonnage par construction, essentiellement lié à la longueur d’onde du rayonnement servant de référence. Le principe de fonctionnement de ces vibromètres est fondé sur les franges d’interférences produites par les rayons incidents et les rayons rétrodiffusés, dans une même direction, par l’objet : — le déplacement vibratoire est déduit du comptage des franges ; — la vitesse vibratoire de l’objet est proportionnelle à la variation de fréquence d’un signal de référence modulé par l’effet Doppler. Suivant la technologie des composants optiques mis en œuvre (laser, diode laser, fibre optique, filtre, objectif, ...), les particularités de divers vibromètres industriels diffèrent, ainsi que : — les limites mesurables de déplacement, de vitesse et, le cas échéant, d’accélération vibratoire ; — l’étendue de mesure en fréquence ; — les limites de la distance opératoire séparant le vibromètre de la cible en un point de l’objet vibrant. 2.2.1.5 Interférométrie holographique À titre d’extension des procédés de mesures vibratoires sans contact, il faut mentionner l’existence de l’interférométrie holographique qui a donné lieu à des réalisations intéressantes conduisant, par exemple, après expositions photographiques successives à des mesurages de déformées précises à 0,1 µm près sur des structures d’échelles très variées (de quelques millimètres carrés à quelques dizaines de mètres carrés). L’ISL (Institut de Saint-Louis), qui travaille de longue date ces problèmes, envisage la mesure de déplacement 3D en temps quasi réel sur sites industriels, avec la possibilité de mise en œuvre de la cinéholographie interférométrique. Remarque : ces travaux, ainsi que d’autres analogues, sont délicats à rationaliser. Simplifiés au niveau des normes pour en vulgariser la diffusion, ils n’en restent pas moins fort complexes. Sur un plan plus général, la diversité des besoins peut se mesurer à l’importance des manifestations internationales : citons le Salon International des Capteurs de mesure. 2.2.1.6 Caractéristiques des transducteurs de vibration Le tableau 4 situe les principes auxquels il est fait appel ; les capteurs sont décrits en détail dans différents articles du présent traité : Capteurs [R 410], Accélération [R 1 812], Extensométrie [R 1 850] et Capteurs à jauges extensométriques [R 1 860]. Ce tableau 4 classe les variables vibratoires détectées par l’élément sensible (déplacement, déformation, vitesse, accélération, saccades et chocs, en translation et en rotation) selon le domaine physique d’appartenance, mécanique, électrique ou optique. Les cas de couplage entre ces trois domaines existent, mais ne sont pas détaillés pour éviter d’allonger l’exposé. Nota : la saccade (jerk ) est la dérivée γ̇ de l’accélération, soit la dérivée troisième du déplacement ẋ˙˙ . En conclusion de ce tableau, on voit que le nombre de principes appliqués aux éléments sensibles reste très limité, alors que les dispositions technologiques sont considérablement diversifiées. Pour mener à bien le choix d’un capteur de vibration, il convient de préciser : — les conditions d’emploi, avec ou sans contact matériel et ajout de masse tolérés entre le capteur et la structure, etc ; — l’étendue du domaine de mesure ; — la classe de précision requise. Les tableaux 5 , 6 , et 7 montrent, pour différents principes constructifs, l’ordre de grandeur des limites pouvant être atteintes, respectivement en déplacement, vitesse, accélération, dans une bande de fréquence également indiquée. 2.2.2 Essais structuraux sous excitation artificielle Les techniques de mesure qui viennent d’être développées permettent de réunir de nombreuses informations sur la structure, à travers sa réponse aux vibrations dont l’origine et le contenu fréquentiel sont multiples : — les machines que supporte la structure l’excitent principalement sinusoïdalement à leur vitesse de rotation et à ses premiers multiples. Lors des montées ou descentes en vitesse, on peut balayer tout le spectre des fréquences intermédiaires ; — le vent, la houle créent des sollicitations basse fréquence partiellement aléatoires ; — les bruits aérauliques (systèmes de ventilation, etc.) ont un spectre très large. Il est par contre difficile de mesurer l’énergie injectée, donc de déterminer des fonctions de transfert, et parfois l’énergie présente dans une bande de fréquence donnée est trop faible pour permettre une mesure. (0) Tableau 4 – Capteurs de vibration : classement des principaux types (1) Domaine de référence de l’élément sensible du capteur Variable détectée Déplacement Mécanique Linéaire Angulaire Règle divisée, comptage N ( ) ● Électrique Linéaire ou angulaire Optique Linéaire ou angulaire Capteur résistif, à piste, A ou N ( ) ; capteur inductif à transformateur différentiel, A ( ) ; capteur capacitif, à signal A ( ) Holographie et interférométrie laser, N ( ) ● Disque divisé, comptage N ( ) ● ● ● ● Déformation Vernis craquelants, moirés, A Extensométrie par jauges résistives, A ( ) ; jauges piézorésistives, A ( ) Photoélasticimétrie dynamique, A Vitesse Stroboscopie, A ou N ( ) Induction d’un conducteur dans un champ magnétique, A ( ) Effet Doppler sur lumière laser réfléchie, N ( ) Accélération Masse sismique asservie en position neutre, servoaccéléromètres, A ( ) Accéléromètre piézoélectrique avec système masse-ressort à fréquence propre f 0 f , A ( ) Systèmes vibrant à fréquence propre élevée (105 à 106 Hz), capteur d’émission acoustique, A ( ) Induction avec système masse-ressort à fréquence propre f 0 f , d’où ẋ˙˙ (t ) , signal A ● ● ● ● ● Saccades, chocs ● ● ● (1) (●) Industrialisation du transducteur, A : analogique, N : numérique. Remarque : en règle générale, sauf rare exception, pour les mesures 2D (à deux dimensions) et 3D, deux ou trois transducteurs monodirectionnels (1D) sont associés. (0) R 3 140 − 20 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Tableau 5 – Ordre de grandeur des limites atteintes au moyen de capteurs de déplacement industriels (1) Principe Grapho-mécanique (vibrographes) Résistif — à piste • linéaire • angulaire — extensométrique Déplacement (m) Fréquence (Hz) 10–3 à 10–2 10–1 à 103 10–2 à 1 0 à 10 0 à 350o 0 à 10 tours/s fonction du support Inductif — linéaire — angulaire 10–7 à 10–2 0 à 360o 0 à 102 0 à 102 tours/s Électrostatique 10–8 à 10–3 0 à 104 Optique et optoélectronique — à traits • linéaire • angulaire — photométrique — interférométrique — à effet Doppler 10–7 à 1 0 à 360o 10–4 à 10–3 10–7 à 10–1 10–8 à 10–3 0 à 102 0 à 102 tours/s 0 à 104 0 à 102 ≈ 0 à 104 Mise en œuvre Stylet sur papier ciré Pistes bobinées ou moulées Jauges à fil collées Transformateur différentiel ou inductance mutuelle Métrologie capacitive Règle ou disque gravés ou codés Fibres optiques et réflexion Comptage de franges Intégration du signal vitesse (1) Une ligne de ce tableau ne correspond pas à un capteur déterminé, mais indique une performance réalisable par ou moins un capteur fondé sur le principe énoncé. (0) Tableau 6 – Ordre de grandeur des limites atteintes au moyen de capteurs de vitesse industriels (1) Principe Électrodynamique — linéaire — angulaire Optoélectronique à effet Doppler Vitesse (m · s–1) Fréquence (Hz) ≈0à1 ≈ 0 à 102 tours/s ≈ 0 à 103 0 à 102 tours/s 10–5 à 1 ≈ 0 à 104 Mise en œuvre Champ magnétique et bobine mobile Dynamo tachymétrique Rétrodiffusion de rayons laser (1) Une ligne de ce tableau ne correspond pas à un capteur déterminé, mais indique une performance réalisable par au moins un capteur fondé sur le principe énoncé. (0) Tableau 7 – Ordre de grandeur des limites atteintes au moyen de capteurs d’accélération industriels (1) Principe Résistif — potentiométrique — extensométrique Accélération (m · s–2) Fréquence f (Hz) 10–2 à 102 10–5 à 104 0 à 102 0 à 103 Capteurs à piste moulée Jauges à fil collées Mise en œuvre Inductif 10–5 à 10 3 0 à 103 À mutuelle inductance Électromagnétique 10–3 à 102 0 à 102 À zéro asservi Électrostatique 10–9 10–8 à 10 3 ≈0 ≈ 0 à 104 En impesanteur Piézorésistif 10–4 à 105 niveau imprévisible 1 à 104 102 à 106 10–2 à 103 Sensibilité décroissante quand f croît Piézoélectrique — tous usages — émission acoustique Optoélectronique à effet Doppler à 10–7 Semi-conducteur À quartz ou à céramique Dérivation du signal de vitesse (1) Une ligne de ce tableau ne correspond pas à un capteur déterminé, mais indique une performance réalisable par au moins un capteur fondé sur le principe énoncé. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 21 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ On recourt, dans ces cas-là, à des techniques d’excitation artificielle, au sens de l’apport d’une source de vibrations auxiliaire aux seules fins de cette expérimentation. Il faut alors maîtriser les aspects suivants : — savoir faire vibrer une structure avec les moyens les plus appropriés au problème posé ; — identifier correctement le signal d’entrée délivré à la structure ; — relier l’effet à la cause : c’est-à-dire relier la réponse vibratoire à l’excitation artificielle et forcée supposée connue et en déduire le comportement vibratoire de la structure grâce aux mesurages suivants : • la réponse à une excitation transitoire, aléatoire, périodique ou autre, à définir, • l’analyse modale : les valeurs propres (fréquences et modes) des fonctions de transfert (la mobilité, l’admittance, l’impédance ou autre fonction à préciser, tableau 2), • les paramètres mécaniques d’inertie, de rigidité et d’amortissement définissables en un point de référence et pour des conditions données d’excitation de la structure. 2.2.2.1 Générateurs de vibrations Du fait de la grande variété des structures industrielles à expérimenter, il existe un arsenal important de moyens d’excitation qui permettent de générer artificiellement des vibrations. Ces moyens, au même titre que les transducteurs destinés au rôle de capteurs, sont inventoriés ici. Ce sont également des transducteurs, mais destinés aux fonctions d’excitation. Nota : en effet, selon le vocabulaire de la NF E 90-001, le même mot peut s’appliquer aussi bien aux capteurs qu’aux excitateurs : Transducteur : appareil conçu pour recevoir de l’énergie de la part d’un système et en fournir, soit sous la même forme, soit sous une forme différente, à un autre système de telle façon que les caractéristiques recherchées de l’énergie reçue apparaissent à la sortie. En général, le terme de transducteur est suivi d’un qualificatif précisant les types des énergies utilisées pour la mesure : transducteur électromécanique, électropneumatique, électro-optique... NF E 90-001 (mai 1972) Vibrations et chocs mécaniques. Vocabulaire. Ce mot de transducteur ne doit pas faire croire à la confusion des principes mis en œuvre même si certains transducteurs, relevant de principes capacitifs et piézoélectriques ou électrodynamiques, présentent la double propriété d’être indifféremment des capteurs ou des excitateurs. ■ Exemple capacitif : la réversibilité capteur-excitateur existe en ce sens qu’une variation de déplacement ∆x entraîne une variation de capacité ∆C et qu’une variation de tension ∆V entraîne une variation de force ∆F suivant la loi de conservation de l’énergie : ∆F ⋅ ∆x = ∆ V 2 ⋅ ∆C /2 L’application typique, en mode excitateur, est celle de la génération de forces faibles et, en mode capteur, de la détection de petits déplacements (du micromètre au millimètre), toutes deux utiles à des mesures vibratoires au sol ou en état d’impesanteur. ■ Exemple piézoélectrique : l’effet direct piézo-électrique résulte du développement d’une charge électrique sous l’action d’une contrainte mécanique. L’effet inverse permet de créer un déplacement par l’application d’une tension. Une utilisation classique est la production d’ultrasons, par exemple pour le nettoyage industriel ou l’échographie médicale. ■ Exemple électrodynamique : sous divers aspects de réalisation, un transducteur, très répandu et remarquable, est formé, à la manière d’un haut-parleur, d’un conducteur de longueur déployée , en mouvement par rapport à un circuit magnétique d’induction permanente B. Ce transducteur présente la double propriété d’être utilisable comme capteur et comme excitateur de vibrations, mais à partir de deux lois distinctes : — en mode capteur, il développe une tension U aux bornes de la bobine mobile proportionnellement à la vitesse relative ẋ ; la loi de l’induction U = d Φ /dt = Bẋ régit l’effet électromagnétique ; R 3 140 − 22 Nota : c’est le cas de deux écouteurs téléphoniques classiques à variation de réluctance réunis fil à fil et qui sont indifféremment excitateurs et capteurs : application réalisée avec le Généphone autogénérateur et de sécurité sans pile ni source, conçu pour le Service des mines. — en mode excitateur, il délivre une force F qui résulte de l’interaction de l’induction B , de valeur constante, et d’un courant i circulant dans une bobine mobile ; la relation F = Bi régit l’effet électrodynamique ; ce principe est celui de l’excitateur électrodynamique. ■ Le tableau 8 présente les générateurs de vibrations fonctionnant selon différents principes. Un choix sérieux ne peut être entrepris qu’au regard du problème posé dont les principales données à considérer sont : — la gamme de fréquence d’emploi ; — le modèle du signal d’excitation délivré à la structure ; — les limites de force, de déplacement, de vitesse, d’accélération nécessaires et admissibles ; — les perturbations apportées à la structure par le générateur de vibrations et dues à son impédance motionnelle électromagnétique, ou à toute autre cause. Il serait intéressant de présenter des exemples de réalisation référencés du tableau 8, lequel est toutefois insuffisant pour conclure, le générateur n’étant qu’un maillon de la chaîne complète (§ 2.2.2.2) au travers de laquelle passe toute l’information vibratoire communiquée à la structure. 2.2.2.2 Choix et analyse du signal vibratoire d’excitation 2.2.2.2.1 Buts de l’excitation artificielle Les moyens à réunir pour l’étude d’une structure vibrante dans l’un de ces cas les plus complexes sont indiqués globalement sur la figure 18. Le signal appliqué à la structure par l’intermédiaire du générateur de vibrations doit être connu et contrôlable à tout instant. Le choix, sur la partie supérieure du schéma, qui concerne l’ensemble du générateur doit être examiné avec soin pour éviter d’altérer, par des interactions inadéquates, les propriétés de la structure en essai. La définition des signaux appliqués au générateur de vibrations dépend de l’objectif à atteindre. Utiliser des mouvements vibratoires pour dégager des zones d’accumulation d’amas pulvérulents, réduire le coefficient de frottement de mécanismes divers, homogénéiser un agrégat ou répartir le béton dans les moules de préfabrication, etc, ne paraît pas nécessiter de produire un signal aux qualités exceptionnelles, bien que ces processus justifieraient sans doute d’être approfondis. A contrario, la connaissance du comportement de certaines structures hautement élaborées (domaine de l’énergie, de l’aéronautique et de l’espace) ne se conçoit, sur le plan vibratoire, qu’à partir de signaux d’entrée et de sortie identifiables et corrélables entre eux dans un sens déterministe, voire probabiliste. À la limite, tout signal d’entrée peut convenir pour déterminer les caractéristiques d’une structure linéaire, encore faut-il le connaître ! L’analyse de la réponse passe par cet impératif, c’est un point important parfois négligé. Il est banal de pouvoir exciter une structure, mais plus rare est de bien connaître la sollicitation réellement introduite : une force, un déplacement, une vitesse, une accélération, ou une combinaison inconnue de ces différentes grandeurs. Cette remarque, vraie pour les vibrations, l’est peut-être plus encore pour les chocs. 2.2.2.2.2 Cas des chocs Une machine de choc à chute de masse (ligne 6, tableau 8) peut fournir F, x, ẋ, x˙˙ , pour une impulsion en accélération conformée suivant une demi-sinusoïde, par exemple. (0) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Tableau 8 – Exemples de principes constructifs de générateurs de vibrations Principe Mécanique Repère (1) Réalisation et usage 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 L A A L L L L L A A, L Électrique 11 12 13 14 15 16 L L L A L A Excitateur capacitif, force faible, spectre large Piézoélectrique et piézorésistif, force modérée, spectre large Électromagnétique, large dynamique, spectre étendu, usage répandu Électromagnétique, large dynamique, spectre étendu, peu usité Électrodynamique, large dynamique, spectre large, usage répandu Électrodynamique, large dynamique, spectre large, peu usité Magnétique 17 18 L A Magnétostrictif, induction forte et faible déformation Rotor et stator munis d’aimants permanents, vibrations de torsion [18] Fluidique 19 20 21 22 L A L A Portance aérodynamique d’une palette tournant dans le vent Portance aérodynamique de deux palettes tournant dans le vent 23 24 25 L A L Impulseur simple modes et amortissements d’un avion en vol Impulseur en couple Attache explosive, essai de lâcher (voir aussi 8) Détonique Réaction vibratoire inertielle, remplace la réaction sur appui fixe Balourd rotatif, engendre une vibration circulaire Balourds contrarotatifs, engendrent une vibration rectiligne Choc, chute de masse : analyse spectrale d’un ouvrage Choc calibré, machine d’essai de choc sur échantillons Percussion, coup de marteau sur structure, spectre large Lâcher simple, excite les premiers modes structuraux de flexion Lâcher en couple, excite les premiers modes structuraux de torsion Liaisons cinématiques diverses (came, excentrique, etc.), L ↔ A Débit alternatif d’un fluide (air ou huile) ; vérins oscillants Remarque : les limites de force, de fréquence et de déplacement ne sont pas précisées ici, pour deux raisons : — l’étendue du marché est limitée à des besoins précis ; — les spécificités techniques sont très diverses suivant les besoins (tables d’étalonnage de capteurs, essais d’avions, etc.). (1) Déplacement L : linéaire, A : angulaire. Par contraste avec cette machine de choc bien instrumentée, on peut opposer le test impulsionnel (ligne 7, tableau 8) beaucoup moins reproductible, mais réalisé couramment par de nombreux expérimentateurs, pour faire apparaître globalement, en quelques millisecondes, le spectre d’une structure. Le défaut de répétabilité de la percussion d’un marteau actionné à la main tient principalement, à notre avis, au défaut de conception de l’outil, dépourvu de panne, qui ne respecte pas la position convenable du centre de percussion par rapport au centre de masse, laquelle position permet d’annuler la réaction du manche dans la main de l’opérateur. Ce contrecoup non supprimé est une des causes premières de l’infidélité couramment constatée. Une impulsion provoquée par un moyen mécanique à commande électrique (lignes 13 ou 15, tableau 8) est plus avantageuse, car reproductible et continûment dosable en grandeur et en durée. La dérivée de l’accélération, ou saccade, est parfois l’information la plus représentative à considérer. C’est le cas dans l’étude de la sécurité et du confort des passagers dans les moyens de transport. 2.2.2.2.3 Tête d’impédance Un moyen pratique et bien connu pour mesurer la force introduite dans une structure est d’intercaler, entre celle-ci et la prise de force du générateur, une tête d’impédance mesurant ẋ˙ et F au même point. Un accéléromètre est monté aussi près que possible d’un capteur de force dont la raideur est élevée, pour éviter la naissance des modes parasites. L’insertion d’une tête d’impédance dans la commande mécanique crée une discontinuité de raideur et de masse. La discussion des erreurs introduites doit être entreprise, cas par cas, déjà en basse fréquence (≈ 10 à 102 Hz) [19]. De 102 à 103 Hz environ, les attelages mécaniques d’insertion de la tête d’impédance posent eux-mêmes des problèmes de rupture d’impédance. La crédibilité des résultats doit être démontrée dans tous les cas d’emploi et, a fortiori, pour des fréquences atteignant ou dépassant 103 Hz. 2.2.2.2.4 Moyens d’excitation calibrés Deux moyens, aux applications spécifiques, sont indiqués ci-après pour montrer qu’il existe d’autres cas pour lesquels les signaux d’entrée sont étalonnés ou mesurés séparément sur la structure à analyser, avant de procéder aux essais. Exemples ■ Le signal d’entrée est une force (lignes 23 et 24, tableau 8). Des impulseurs pyrotechniques sont mis au point et étalonnés en poussée F (t ) au banc. L’évolution, proche du créneau (figure 19) est connue, reproductible d’un impulseur à l’autre et adaptée à la recherche des fréquences et amortissements d’avions en vol. Ces impulseurs, dont les tirs peuvent être synchronisés, sont aptes à générer des déformées en flexion (ligne 23 du tableau 8) ainsi qu’en torsion (ligne 24). ■ Le signal d’entrée est un déplacement (lignes 8 et 25, tableau 8). En vue de l’analyse expérimentale du comportement sol/structure des éléments d’une ligne EDF (63 kV), un pylône de cette ligne a été expérimenté par essai de lâcher. Un câble mis sous tension mécanique est judicieusement dirigé pour solliciter statiquement trois déformées à la fois (flexion, torsion, pilonnement). Le créneau de force F (t ) est libéré par une attache explosive montée sur le câble tendu dont l’autre extrémité est ancrée avec un dynamomètre au sol. La fonction de réponse fréquentielle (qui est le rapport des transformées de Fourier de la réponse sur l’excitation) se déduit de F (t ) et du résultat du lâcher (figure 20). L’auteur précise « qu’en pratique on obtient de meilleurs résultats en calculant le rapport du spectre croisé entre l’entrée et la sortie au spectre de puissance du signal d’entrée. Ce calcul présente l’avantage de fournir la fonction de cohérence qui signale la présence des bruits vibratoires et des effets de non-linéarité » [20]. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 23 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 20 – Essai de lâcher effectué sur un pylône électrique, (d’après [20]) Avec plus ou moins de facilité, toutes les solutions adoptées en essai passent par un asservissement à des grandeurs données (tableau 9) ou à une combinaison pondérée de ces grandeurs. Des techniques de commande spécialisées pour les essais de gros ensembles sur tables vibrantes sont mises en œuvre par voie hydraulique ou électrodynamique. Pour plus de précision sur les essais fondamentaux relatifs à la robustesse mécanique, où les vibrations interviennent directement, il est intéressant de consulter les normes de 1987 : NF C 20-706 et 20-734 à 20-747, relatives aux moyens et aux méthodes d’essais actuellement normalisés. À une échelle plus modeste et pour clore ce paragraphe, deux exemples complémentaires appliqués à l’aéronautique sont donnés. Figure 18 – Ensemble d’excitation et de mesure vibratoires d’une structure S Exemples ■ Le déplacement vibratoire structural est illimité (lignes 10 et 15, tableau 8). Une technique d’asservissement en courant, combinée à une cinématique de transformation (rotation/translation), a conduit à la réalisation d’excitateurs imposant la force quel que soit le mouvement de la structure (avions, figure 21). La liaison cinématique est composée de deux crémaillères et de deux pignons calés sur les arbres de servomoteurs contrarotatifs (de préférence). Ces derniers reprennent, par leur inertie propre en translation, la réaction des forces vibratoires introduites dans la structure. Cette solution se distingue du type « haut-parleur » classique (§ 2.2.2.1), dont la course admissible est très limitée, et du type à balourds contrarotatifs (ligne 4, tableau 8), dont la force délivrée à la structure excitée dépend du mouvement de celle-ci, au point de présenter des instabilités lors de balayages en fréquence dans certaines zones près des résonances [21]. Figure 19 – Force F (t ) délivrée par un impulseur pyrotechnique (origine ONERA, commercialisé par PRODERA) 2.2.2.3 Récapitulatif Le problème posé revient, en pratique, à imposer un signal d’excitation à une structure parmi les cinq cas présentés (sous forme instantanée ou non) au tableau 9. Ce tableau sépare les essais de vibration en deux catégories : — les uns, conduits en valeurs instantanées, pour lesquels les modules et les phases sont retenus (régime sinusoïdal) ; — les autres, conduits à partir de valeurs résultant d’intégrations en fonction du temps, sous forme de densité spectrale de puissance par exemple, pour lesquels les modules sont seuls retenus (régime aléatoire, entre autres). Nota : pour la définition de la densité spectrale de puissance, se reporter à l’article Paramètres caractéristiques d’un signal [R 300] dans le présent traité. R 3 140 − 24 ■ La fréquence est imposée et la force utile est une portance aérodynamique (ligne 21, tableau 8). Deux ailettes identiques, calées également sur le même arbre d’un moteur pas à pas, tournent dans le vent. La vitesse angulaire ω = 2πν du moteur est pilotée par un générateur de fréquence ν. Monté sur avion, cet excitateur (figure 22) est soumis en vol aux forces aérodynamiques instationnaires de portance et de traînée. La fréquence fondamentale d’excitation, f = 2ν, est égale au double du nombre de tours par seconde des ailettes [22]. La force introduite F (t ) est mesurée à l’aide d’une semelle dynamométrique à trois capteurs fixée sur la partie de l’avion à exciter. L’utilisation d’un moteur électrique pas à pas a été rendue possible parce que l’entraînement des ailettes en rotation ne nécessite pas beaucoup de puissance et convient bien à l’instrumentation d’un avion léger. Cela est un avantage considérable pour les essais d’avions qui ne disposent pas d’une installation hydraulique à bord. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle (0) _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Tableau 9 – Signal d’excitation imposé à une structure Grandeurs Valeurs Déplacement (1) Vitesse (1) Accélération (2) Saccade (2) Force x ẋ ẋ˙ ẋ˙˙ F Φx Φv Φγ Instantanées (fonction du temps t ) Non instantanées (fonction de la fréquence f, densité spectrale de puissance par exemple) ΦF (1) La mesure est obligatoirement relative (par rapport à un repère fixe). (2) L’accélération, et sa dérivée, sont définies en valeur absolue. transfert, etc. Aussi l’industrie de la mesure a-t-elle été largement mobilisée pour développer des matériels utilisables pour des besoins diversifiés et pour établir des logiciels adaptés, selon le cas, à la maintenance, l’exploitation, l’étude ou même la recherche avancée. Figure 21 – Générateur de vibrations rectilignes à deux servomoteurs équilibrés Un effet de cette croissance en matière de traitement du signal se traduit aussi sur le marché par l’existence de sociétés dont l’objet est la prestation de services avec des matériels et des logiciels appropriés, ou la simple location de moyens pour des actions ponctuelles, d’expertise par exemple. Il nous serait difficile de citer tous les protagonistes en ces matières. Consulter pour cela les organisations professionnelles et les réunions techniques spécialisées. Les paragraphes ci-après concernent l’exploitation et la présentation de résultats de mesures vibratoires issues : — d’un signal isolé (§ 2.2.3.1) ; — d’un couple de signaux liés par leur fonction de transfert (§ 2.2.3.2) ; — de multiples signaux en vue de procéder : • à l’analyse modale (§ 2.2.3.3), • à la synthèse structurale (§ 2.2.3.4). 2.2.3.1 Signal isolé La reconnaissance d’une vibration par sa signature temporelle ou spectrale n’est pas nouvelle. Le temps et la répétition des intervalles de temps (fréquence) ont été naturellement choisis comme références pour procéder à l’analyse d’un signal d’origine inconnue. Exemples de mouvements vibratoires ■ Le simple tracé d’un stylet sur un papier qui se déplace régulièrement fait apparaître la fonction f (t ). C’est le cas typique d’un sismographe de la première génération où le mouvement relatif, entre la terre localement et une lourde masse suspendue à très basse fréquence ( 1 Hz ) est enregistré directement. Figure 22 – Excitateur aérodynamique rotatif pour essais de vibration en vol 2.2.3 Post-traitement et obtention des résultats Le terme « post-traitement » sous-entend qu’une acquisition des signaux originaux soit opérée lors de l’essai et disponible en mémoire, pour pouvoir se prêter à toute analyse et interprétation des résultats. L’étape de mémorisation peut être évitée dans certains cas répétitifs de traitement en ligne bien établis mais, en période de tâtonnements (alors que le protocole d’analyse reste à mettre au point), il est préférable, voire indispensable en cas de non-reproductibilité de l’expérience, de disposer, pour des traitements en temps différé, de l’ensemble des informations acquises au cours de l’essai original. Les techniques du post-traitement des signaux vibratoires sont souvent issues des méthodes mathématiques applicables au traitement du signal : transformées de Fourier, de Laplace, fonctions de ■ Un fréquencemètre (dû à Frahm) fut aussi appelé tachymètre : il est en effet apte également à mesurer, avec le balourd résiduel des machines tournantes, leurs vitesses angulaires. Ce vibromètre, de conception purement mécanique, constitue un véritable analyseur spectral direct. Il a été réalisé sous forme d’un peigne dont les dents sont des lames accordées sur des fréquences propres f 0 en progression arithmétique (figure 23). Chaque lame répond pratiquement dans le domaine spectral (0 à f 0) sur son mode fondamental comme un système à un degré de liberté, linéaire, du second ordre. La double amplitude qui est apparente sur la vue de gauche de la figure 23 n’est autre qu’une analyse spectrale du signal à travers les multiples filtres à lames, résonnant à des valeurs de f 0 décalées et répondant aux composantes du signal d’entrée e. Si cet « analyseur » est réduit à une seule lame de profil constant et de longueur variable, il devient un fréquencemètre qui permet de déceler l’existence d’une composante f du signal d’entrée e par la mesure à la résonance de la lame, d’où f déduite de la loi de variation en –2 et du rang modal excité. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 25 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Le signal vibratoire isolé considéré ici est durable ou passager. Le but est d’abord sa reconnaissance par une ou plusieurs signatures caractéristiques, puis, à travers ces signatures, la recherche des causes possibles de son origine. Les processus d’investigation d’un tel signal isolé, qui sort d’une boîte noire, portent sur la variable évolutive (le temps T ) ou sur le spectre de cette variable évolutive (la fréquence). Ces deux signatures, dimensionnellement inverses (T et T –1) l’une de l’autre, se correspondent par la transformée de Fourier (directe et inverse). Elles peuvent donner lieu à d’autres représentations R1 , R2 , ..., Rn significatives selon les cas et très appréciées à partir de différents traitements mathématiques A1 , A2 , ..., An portant sur des fonctions s (t ) du temps et/ou g (f ) de la fréquence (figure 24). Toutes les représentations Rn étant formulées par valeurs discrètes, elles sont limitées par le compromis en résolution temporelle et fréquentielle à adopter. La transformée de Fourier n’échappe pas à cette difficulté. Parmi les variétés techniques Rn mises en œuvre, quatre exemples sont donnés ci-après. Figure 23 – Fréquencemètre à lames vibrantes L ■ Analyse spectrale évolutive Une manière synthétique de présenter une vibration évolutive consiste à disposer des plans parallèles entre eux représentant les spectres vibratoires g k (f ) aux différents instants t k . Diverses présentations sont possibles, selon que l’analyse spectrale contenue dans chacun de ces plans est effectuée à partir du temps origine t = t 0 (zero filling ) ou dans l’intervalle court (t k + 1 – t k ) de deux instants successifs t k + 1 et t k . La plupart des analyseurs de l’industrie disposent de cette dernière option permettant de présenter les spectres en cascade (waterfall ) pour faire ressortir les fréquences de résonance. De manière similaire, le diagramme de Campbell fournit la carte spectrale de montée ou de descente en régime d’une machine tournante, mettant clairement en évidence les vitesses critiques traversées. La figure 25 est un exemple de séquence de ralentissement du bol tournant d’une décanteuse centrifuge, dont la région vibratoire est analysée de 0 à 12,5 Hz par intervalles de temps de 1 s durant 80 s. Les raies subharmoniques correspondent au ballottement du fluide. Figure 24 – Représentations diverses Rn d’un signal déduites de voies temporelle s (t ) et /ou spectrale g (f ) Figure 25 – Analyse spectrale évolutive : séquence de ralentissement naturel d’une machine R 3 140 − 26 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES ■ Enveloppe des réponses maximales Comme dans l’exemple précédent, les variations des paramètres à analyser (fréquences, niveaux, etc.) entre deux séquences sont supposées modérées, pour pouvoir en suivre la trace. Il est alors intéressant de contrôler les fluctuations de ces paramètres en vue d’assurer la maintenance d’un matériel en service. L’échelle de temps appropriée au problème peut aller de la fraction de seconde à l’année ou au-delà. L’enveloppe des réponses maximales, disponibles sur la plupart des analyseurs, est une signature (peak-hold ) utile notamment à une « vue de face » de la représentation précédente (figure 26). Conduite lors de la phase de démarrage ou d’arrêt d’une machine, elle permet d’établir, très simplement, la présomption d’une contribution modale de la structure de la machine en fonctionnement à la vibration qui en résulte. ■ Cepstre énergétique EDF [23] a suivi sur plusieurs années le calage des barres conductrices dans les encoches de stators des alternateurs, susceptible de se dégrader au cours du temps. Les sources de bruit d’origine magnétique excitent la vibration des barres, d’où la présence du fondamental à 100 Hz accompagné d’un nombre important d’harmoniques. La technique de traitement particulière, le cepstre énergétique [24] défini comme étant le spectre du logarithme du spectre d’énergie, a été validée en 1983 après expertise et recalage de l’alternateur (centrale hydraulique de Beaumont). La double transformée de Fourier permet de visualiser, sur une seule raie du cepstre, l’ensemble de la raie et de ses harmoniques ; la répartition logarithmique fait mieux apparaître la contribution relative des harmoniques de rang élevé. Figure 26 – Représentation de la même séquence de ralentissement naturel que figure 25, en peak hold entre 0 et 50 Hz ■ Spectre de choc Un choc tel qu’un séisme peut être représenté par un tracé de l’évolution de l’accélération en fonction du temps, mais il est difficile d’établir sur de telles bases la nocivité de tel ou tel choc sur telle ou telle structure. Pour exprimer le potentiel qu’a ce bloc d’exciter une fréquence structurale, on a recours, en analyse sismique, à la méthode des spectres d’oscillateurs, qui permet de tracer le spectre de choc de la manière suivante : l’excitation sismique est appliquée à un ensemble fictif de résonateurs élémentaires à un degré de liberté (système masse-ressort et amortisseur, § 2.1.2 et figure 6). On trace à chaque fréquence l’amplitude maximale du mouvement de résonateur correspondant lors du choc, en supposant l’amortissement égal à une valeur donnée (en général 10 %), qu’il s’agisse de déplacements, de vitesses ou d’accélérations. Ces données sont tabulées dans des ouvrages spécialisés pour les séismes types retenus lors du dimensionnement des ouvrages de génie civil (figure 27). Des méthodes similaires sont employées pour vérifier la tenue des structures à des explosions sous-marines, des chocs pyrotechniques, etc. ■ Évolutions récentes Les études dans le domaine des vibrations et de l’acoustique bénéficient des progrès relatifs au traitement du signal. Citons : — la représentation de Wigner-Ville filtrée ou non [25], qui est une variante de l’analyse spectrale évolutive utilisée en vibrosismique pour la représentation pétrolière ; — la transformation en ondelettes, qui consiste à découper le signal en une somme de fonctions élémentaires du temps, plus adéquate que la transformée de Fourier pour analyser des phénomènes discontinus ou chaotiques (couches géologiques distinctes traversées lors des recherches pétrolifères ; vibrosismique ; thèmes musicaux ; médecine [26] [27]) ; de récents travaux montrent son intérêt pour le diagnostic de défauts affectant des moteurs d’automobiles, etc. 2.2.3.2 Fonction de transfert entre deux signaux ■ Définitions Selon la norme française NF E 90-001 (3-1972) du vocabulaire des vibrations et chocs mécaniques (en large concordance avec la norme internationale ISO 2041), la fonction de transfert, liée à la fréquence, est définie par la relation mathématique entre une grandeur de sortie et une grandeur d’entrée d’un système. Cette définition, qui est très Figure 27 – Exemple de spectre de choc générale, recouvre dans la même norme celle de deux autres termes susceptibles de s’appliquer aussi à des grandeurs vibratoires non précisées : ● réponse d’un système : expression quantitative de la réaction de sortie d’un système à une excitation (définition 1.17 de la norme NF) ; ● transmissibilité : rapport sans dimension de l’amplitude de la réponse d’un système en régime établi de vibrations forcées à l’amplitude d’excitation. Ce rapport peut être celui de forces, de déplacements, de vitesses ou d’accélérations (définition 1.18 de la norme). D’autres définitions se rapportent exclusivement à des grandeurs précisées (tableau 2) : Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 27 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ ● impédance mécanique d’un système : rapport complexe de la force à la vitesse, la force et la vitesse pouvant être mesurées au même point (impédance directe) ou dans des points différents du même système animé d’un mouvement harmonique (impédance de transfert) ; Nota : dans le cas d’une impédance mécanique en torsion, les mots « force » et « vitesse » doivent être remplacés par « couple » et « vitesse angulaire » (définition 1.44 de la norme NF E 90-001) ; ● admittance d’un système mécanique, inverse de l’impédance (définition 1.50 de la norme NF) ; ● mobilité (parfois appelée admittance mécanique) [29] : rapport complexe de la vitesse mesurée en un point d’un système mécanique à la force mesurée en un même point, ou en un autre point, du même système en mouvement harmonique. La mobilité est équivalente, sur le plan mécanique et formel, à l’admittance (définition 1.51 de la norme NF). En dehors de cette norme, divers néologismes apparaissent ici et là : c’est ainsi que des auteurs américains [28] appellent transmittance le rapport de l’amplitude de la force mesurée à « la sortie » d’un support antivibratile à l’amplitude de la force appliquée à « l’entrée ». Retenons, pour la suite, le terme global de fonction de transfert qui recouvre tous ces cas particuliers (précédentes définitions 1.17 – 18 – 44 – 50 – 51). ■ Mesure expérimentale des fonctions de transfert Il est toujours possible de mesurer expérimentalement les fonctions de transfert caractéristiques d’une structure. On devra toutefois être attentif à la qualité de la mesure des minimums et des maximums, qui correspondent tantôt à de grandes réponses sous faibles excitations (résonances, § 1.2.1) – et dans ce cas la mesure de l’effort excitateur peut être très bruitée – ou, inversement, à des déplacements très faibles quel que soit l’effort appliqué (antirésonances) – et dans ce cas la mesure des déplacements (ou vitesses ou accélérations) est entachée d’incertitude. Il est également souvent possible de représenter par un modèle mathématique ces mêmes fonctions de transfert, en admettant une schématisation a priori des effets dissipatifs [amortissement local ou réparti, représenté par un effort proportionnel à la vitesse (modèle visqueux ) ou à l’accélération (modèle hystérétique ), et en phase avec la vitesse]. C’est par exemple le cas du modèle de transmissibilité T (ω ) donné au (§ 2.1.2). Les calculs modaux (§ 2.2.3.3) et par éléments finis (§ 2.1.3) ne peuvent se comparer aux relevés expérimentaux que pour une structure présentant des forces d’amortissement faibles devant les forces d’inertie (masses) et de rigidité (raideurs). Dans le cas contraire, il est nécessaire de procéder à l’analyse et à la représentation spécifique des phénomènes mécaniques effectivement en jeu et de créer ainsi le modèle particulier de la structure en question. ■ Exemple d’une fonction de transfert modélisée À titre d’exemple modélisable d’une fonction de transfert, formulons l’hypothèse d’une structure répondant à un schéma différentiel linéaire reliant la grandeur de sortie s (t ) à la grandeur d’entrée e (t ), donc de la forme : an s (n ) + an – 1 s (n – 1) + ... + a0 s = cm e (m ) + cm – 1 e (m – 1) + ... + c0 e les symboles (n) et (m) en exposant représentant l’ordre de dérivation en fonction du temps ; an ... et cm ... des coefficients constants. La transformée de Laplace de l’égalité précédente (en supposant le système au repos à l’origine des temps) est l’équation suivante : (an p n + an – 1p n – 1 + ... + a0)s (p) = (cm p m + cm – 1p m – 1 + ... + c0)e (p) avec p variable de Laplace, et la fonction de transfert, définie par le quotient s /e, s’explicite en régime quelconque : c m p m + c m – 1 p m – 1 + ... + c 0 s (p) H ( p ) = --------------- = ---------------------------------------------------------------------------------e (p) a n p n + a n – 1 p n – 1 + ... + a 0 La réponse en régime harmonique s’obtient en posant p = jω . La fonction de transfert H (jω ) = H ′ (ω ) + jH ′′ (ω ) est alors une grandeur complexe qui ne dépend plus du temps, mais de la fréquence f = ω /2 π. Le module de la fonction de transfert est (H ′ 2 + H ′′ 2)1/2 et le déphasage Φ de la sortie par rapport à l’entrée est arctan (H ′′/H ′ ). Remarque : pour les calculs précédents, la transformée de Fourier aurait conduit au même résultat que la transformée de Laplace, cette dernière étant plus générale et d’un emploi parfois plus commode. Cependant, le spectre de Fourier, par extension des séries de Fourier aux phénomènes non périodiques, se prête bien à l’interprétation physique des vibrations de nature quelconque, périodiques ou non. ■ Représentation graphique La représentation graphique des fonctions de transfert la plus appropriée est choisie selon la nature de la structure et les lois de comportement des matériaux et des assemblages en fonction de la fréquence. La représentation peut en être faite dans le plan réel, en module et phase, ou dans le plan complexe, en partie réelle et imaginaire. Une telle représentation est donnée en exemple pour l’impédance Z = F/v d’un modèle à deux masses m 1 et m 2 , à deux rigidités k 1 et k 2 et à deux amortisseurs b 1 et b 2 disposés en série/parallèle (figure 28), F étant l’amplitude de la force harmonique imposée et v celle de la vitesse de réponse au même point. Il est aisé de construire la fonction de transfert d’un modèle masses-ressorts-amortisseurs donné, comme dans cet exemple ; inversement, il n’est pas évident de déterminer le modèle correspondant à une fonction de transfert donnée. Tel est l’un des buts de l’analyse modale. 2.2.3.3 Analyse et représentation modale L’analyse modale permet d’établir une représentation analytique des mesures vibratoires. Un avantage important est la réduction du nombre de paramètres permettant de représenter le comportement dynamique de la structure, à toutes fins d’analyse (simuler un comportement, mettre au point un prototype, suivre un risque d’instabilité). Certes, dans un certain nombre de cas, les fonctions de transfert seules peuvent suffire : mais, spécialement dans le cas des structures continues et peu amorties, le nombre de points fréquentiels requis est très élevé, et la manipulation des fonctions de transfert impose celle de fichiers informatiques importants. La réduction permise par l’identification modale facilite aussi la comparaison avec des modèles ou des résultats de calculs, l’exploitation des données mesurées dans des schémas de synthèse dynamique (§ 2.2.3.4) ou des modèles d’instabilité, etc. ■ Modèle mathématique La représentation modale consiste à utiliser la base des fréquences et des formes propres de vibration de la structure supposée tout d’abord sans amortissement (structure conservative associée). Le modèle mathématique dans son ensemble est matriciel d’ordre (m × m) pour m degrés de liberté et m modes propres. Il est représenté par le système matriciel d’équations différentielles linéaires du second ordre à coefficients constants [µ], [β ], [γ ], qui s’écrit : [ µ ]q̇˙ + [ β ] q̇ + [ γ ]q = [ F ] avec [µ] [β ] [γ ] R 3 140 − 28 (3) ML2), matrice des masses généralisées (dimension matrice des amortissements généralisés (dimension ML2T –1), matrice des raideurs généralisées (dimension ML2T –2), Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES colonne des forces généralisées (dimension ML2T –2 ), q, q˙, q˙˙ coordonnées généralisées, fonction du temps, et leurs dérivées première et seconde par rapport au temps. Par hypothèse, si [β ] = [0], le système [ µ ]q̇˙ + [ γ ]q est conservatif et les matrices [µ] avec µkk ≠ 0 et [γ ] avec γ kk ≠ 0 sont diagonales, k étant l’indice de rang modal. Ce système, alors découplé de son amortissement, est défini par : — ses valeurs propres (fréquences propres f k ) ; — ses vecteurs propres (formes propres Φk ). Les modes propres sont bien indépendants entre eux et peuvent être traités comme des systèmes masse-ressort conservatifs à un seul degré de liberté. Il en est encore de même en présence d’amortissement structural [β ] à condition : — que cet amortissement suive le modèle rhéologique visqueux proportionnel à q̇ (hypothèse restrictive qui n’a rien d’évident a priori ) ; il est d’usage courant de rapporter l’amortissement par équivalence à ce modèle ; — que, selon l’hypothèse de Basile déjà avancée par Rayleigh, les termes de la matrice d’amortissement soient proportionnels à ceux des matrices de masses et/ou de rigidités imposant que [β ] soit diagonale, ce qui n’est pas le cas général. La pratique des essais industriels montre que ces deux conditions tant bien que mal respectées sont acceptables si les forces d’amortissement [ β ] q̇ restent faibles devant celles d’inertie [ µ ]q̇˙ et de rigi[F ] Figure 28 – Fonction de transfert (b ) de l’impédance Z du système (a ) dité [γ ]q . Or, au voisinage des résonances de phase de fréquences f k , la somme de ces deux derniers termes s’annule et la règle du rapport des forces n’est plus satisfaite : les forces dissipatives [ β ] q̇ l’emportent sur la somme des forces conservatives [ µ ]q̇˙ + [ γ ]q ≈ 0 . C’est donc près des résonances que l’amortissement devient prépondérant et c’est donc dans le voisinage de f k que les termes βk k peuvent être obtenus avec la meilleure précision possible. L’accès aux termes non diagonaux β k avec k ≠ , encore plus difficile que l’accès aux termes βkk , ne semble pas présenter un intérêt pratique important, au moins dans le cas de structures faiblement amorties. Le nombre de modes significatifs m à retenir pour caractériser une structure en vibration est indéterminé a priori, certains modes étant accessibles, d’autres cachés. D’où une hésitation sur le choix de l’entier m à introduire dans le calcul. Cette difficulté se présente pour toutes les méthodes de traitement global multimodes. Dans l’exemple de la figure 30, m = 3. Le fait d’oublier un mode physique, soit (m – 1), ou d’introduire un mode fictif, soit (m + 1), peut conduire à des erreurs d’interprétation importantes, notamment aux extrémités de la plage des fréquences explorées. Dans les paragraphes suivants, quelques exemples et remarques générales sont donnés se rapportant à l’analyse modale et à ses représentations, plus particulièrement dans le domaine aéronautique. ■ Flottement des avions À la base des calculs de risque de flottement d’avions en vol est l’hypothèse que l’avion, bien que structure continue, peut être assimilé à un système ne présentant qu’un nombre réduit de degrés de liberté et que toute déformation harmonique d’un avion en vol est bien combinaison linéaire d’un nombre restreint de formes propres relevées au sol. Exemple : le souci de vérifier cette hypothèse de la combinaison des formes a donné lieu à des essais en vol limités ici à cinq des modes relevés au sol (figure 29). La participation de la torsion antisymétrique en vol dans cet exemple est de 45,6 % dans la combinaison linéaire des modes au sol introduite au sens des moindres carrés. Il est intéressant de rappeler le principe de vérification expérimentale d’une des hypothèses de base des calculs de flottement toujours appliquée par les constructeurs d’avions français et étrangers. Figure 29 – Torsion antisymétrique suivie en vol, précédée de relevés sur avions au sol (d’après [30]) ■ Appropriation des modes Faire vibrer une structure sur un seul de ses modes propres suppose son appropriation par l’excitation. Cet état d’appropriation est vérifié par le critère de phase : le déphasage entre la référence de l’excitation et les réponses en tout point de la structure doit être égal à 0 ou à π. Ce critère peut être élaboré de diverses façons. Des méthodes d’appropriation itératives par modifications successives des forces d’excitation et de la fréquence, élaborées en France et en Angleterre, sont restées semi-automatiques. L’utilisation de critères du cumul arithmétique des écarts de phase par rapport à 0 ou π conduit le plus souvent à atteindre des minimums relatifs sans avoir la certitude de converger vers le minimum absolu et sans pouvoir démontrer qu’il est atteint. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 29 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Hormis ces difficultés, il doit être précisé que les techniques d’appropriation comme celles des balayages harmoniques sont d’exploitation longue mais souvent reprises à titre de référence dans les essais vibratoires, par exemple pour lever le doute en cas de nonlinéarités. ■ Logiciels d’analyse modale Nous ne saurions décrire les logiciels existants, publiés ou non, ceux du marché étant déjà fort nombreux et donnant accès aux fréquences propres et aux paramètres directs ou généralisés de masse, de rigidité et d’amortissement. Il existe des logiciels généraux qui fournissent les solutions du modèle linéaire tel que l’équation (3) avec la matrice d’amortissement [β ] diagonale. C’est le cas le plus fréquent. Il existe aussi les logiciels adaptés aux usages particuliers des vibrations non linéaires à variations rapides ou lentes. À titre d’exemple, la non-linéarité porte soit sur la masse (masse variable au cours du temps : fusées), soit sur la rigidité (perte de raideur par fissuration d’une structure), sur l’amortissement (modification due à la contrainte, à la température, à la fréquence, à l’histoire des sollicitations, etc.). Devant de telles difficultés, qui excluent une solution générale, il faut mettre à profit les processus de la simulation numérique permettant de déterminer par calcul excitation et réponse de structures. La fonction de transfert est disponible et les limites de validité de l’analyse modale sont évaluées indirectement sur un tel modèle, que l’on peut utiliser ensuite pour simuler des modifications portant sur des points sensibles [31]. Revenant aux fonctions de transfert expérimentales, les possibilités du matériel de traitement informatique conditionnent l’importance du logiciel admissible. La bonne mesure consiste à équilibrer les deux. Un matériel sous-exploité entraîne des immobilisations excessives ; s’il est insuffisant, il ne permet pas d’effectuer un traitement unique et global des données qui seul peut pourtant garantir la cohérence du processus d’identification (suppression des effets de modes latéraux, atténuation des effets de bruits, et meilleur conditionnement de la matrice à inverser). Les essais de vibration s’orientent aujourd’hui davantage vers l’obtention rapide des fréquences modales issues de chocs non contrôlés (percussion au marteau) ou de chocs contrôlés (action électrodynamique à force ou déplacement imposés), plutôt que vers des balayages harmoniques complets, mais lents. Des microbalayages peuvent être resserrés seulement autour des raies modales ainsi dégagées et le temps gagné est important pour explorer les caractéristiques d’une structure. Exemple : la figure 30 n’est pas celle d’une mesure réalisée dans les meilleurs temps, mais elle montre la qualité de la méthode de lissage : une structure, en majeure partie métallique, de type aéronautique répond bien à un modèle linéaire. Sur la figure, les trois boucles appartenant à trois modes successifs se distinguent bien [32]. Enfin, le pas relatif en fréquence ∆f /f est variable avec le taux d’amortissement structural α (ou amortissement réduit, § 2.1.2.2. Les valeurs suivantes conviennent en pratique : • α ≈ 0,1 % pour une structure peu amortie ; • α ≈ 1,0 % pour une structure moyennement amortie ; • α ≈ 10 % pour une structure fortement amortie. ■ Comparaison des résultats Il est indispensable, pour toute épreuve métrologique, de disposer d’une référence définissable, reproductible et fidèle. Les techniques vibratoires n’échappent pas à cette règle, fort difficile à appliquer même si l’on se contente d’une incertitude relative de l’ordre de R 3 140 − 30 Figure 30 – Représentation modale et fonction de transfert d’un avion au sol (d’après [32]) quelques 10–2. Aussi des comparaisons et des références sont-elles assurées par des laboratoires publics ou privés dont certains sont agréés en France par le BNM (Bureau national de métrologie). Sans remonter aux sources métrologiques en usage dans le domaine des vibrations, nous nous contenterons d’indiquer ci-après des expériences d’intercomparaisons menées sur un plan industriel. Ces exemples sont donnés pour souligner que la diversité des principes de mesure et de méthodes de traitement et d’analyse modale, librement choisis par les participants, conduit parfois à des écarts cumulés assez importants dans les résultats, alors que les moyens considérés isolément peuvent être bien adaptés. Il y a aussi une part importante de savoir-faire et d’interprétation qui intervient dans l’élaboration des résultats et dans les différences constatées. La figure 31 est un schéma synoptique des résultats obtenus par des voies différentes. Exemples ■ Des résultats de mesure coopératifs obtenus sur une maquette de référence sont partiellement reproduits sur le tableau 10. La maquette est une plaque rectangulaire, en matériau sandwich (tôles métalliques et feuilles amortissantes), suspendue en fréquence basse (1,3 Hz). Les mesures contradictoires ont été effectuées en 1977 par deux industriels et les calculs aux éléments finis (EF) par un laboratoire, permettant ainsi un certain nombre de recoupements sur les fréquences propres, les masses généralisées µ et les taux d’amortissement α . Des comparaisons reprises aujourd’hui avec les moyens perfectionnés actuels ne fourniraient pas nécessairement des résultats plus groupés. Certains facteurs extérieurs qui ne dépendent pas exclusivement du matériel métrologique contribuent aux dispersions (notamment la température de la maquette qui demanderait à être stabilisée). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES ■ Une opération d’intercomparaison a été lancée par la DRET (Direction des Recherches et Études Techniques, DGA) en 1978. L’initiative en revient à D.J. Ewins de l’Imperial College de Londres qui a préparé l’opération sous l’égide de l’AMTE (Admiralty Marine Technology Establishment) et a proposé à la France de s’y associer, l’ensemble réunissant une trentaine de participants. Des structures mécaniques ont été mises en circulation dans différents laboratoires qui ont procédé à des mesures de mobilité selon une règle imposée et ont remis leurs résultats sous forme normalisée à l’organisme technique centralisateur. Un extrait de résultats publiés [33] [34] est donné sur la figure 32. Il s’agit d’une structure en flèche réalisée en assemblage boulonné (masse 6,8 kg). Pour les résultats remis par l’ensemble des participants, les écarts relatifs maximaux atteignent approximativement les valeurs suivantes : • 10 % sur les fréquences ∆f /f ; • 10 dB sur les mobilités ∆Y /Y ; • 20 dB sur les amortissements ∆ α /α. Comme pour l’exemple précédent, les causes de dispersion d’un essai à l’autre sont nombreuses (suspension de la maquette ; attaque en régime transitoire, aléatoire, harmonique ; moyens d’excitation et de mesure qui modifient les fréquences propres, les mobilités et les amortissements) ; ces causes d’erreurs, ajoutées, peuvent justifier l’importance des dispersions constatées et doivent conduire l’expérimentateur à multiplier les précautions et à comparer si possible plusieurs montages et protocoles expérimentaux. 2.2.3.4 Sous-structuration et synthèse dynamique La représentation du comportement dynamique de structures quelconques en termes de fonctions de transfert (calculées, mesurées, identifiées au sens de l’analyse modale, etc.) ouvre la possibilité de prédire le comportement dynamique (= calculer la fonction de transfert globale) d’un assemblage de diverses structures décrites chacune par leur fonction de transfert propre (= mesurée ou calculée sur les sous-structures isolées). Pour être plus précis, il est nécessaire de disposer des matrices de transfert constituées par les différentes fonctions de transfert ponctuelles et croisées aux points d’entrée et de sortie de la structure, donc à tous les points où l’on souhaite connecter un autre élément. (0) Figure 31 – Résultats obtenus numériquement N , physiquement P ou théoriquement T . Écarts et erreurs sur les résultats Tableau 10 – Caractéristiques vibratoires d’une maquette déduites de diverses opérations Mode Fréquence propre (Hz) Masse généralisée (kg · m2) Raideur généralisée (kg · m2 · s–2) Taux d’amortissement Excitations — créneau (3,6 ms) — bruit blanc — harmonique 36,5 36,5 35,6 – – 8,8 – – 445 × 103 12,6 × 10–3 13,4 × 10–3 9,6 × 10–3 Calcul par éléments finis 1 122 degrés de liberté 37,1 8,5 470 × 103 – Excitations — créneau (3,6 ms) — bruit blanc — harmonique 39,1 39,2 38,7 – – 31,4 – – 1 880 × 103 15,4 × 10–3 10,2 × 10–3 6,7 × 10–3 38,8 32 1 820 × 103 – Opération Calcul par éléments finis 1 122 degrés de liberté, 188 nœuds, 80 triangles à 6 nœuds E : point d’excitation – : le résultat ne peut être obtenu. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 31 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 32 – Exemple de dispersion du module de la mobilité sur une structure métallique Il existe au minimum trois approches mathématiques pour déterminer le comportement dynamique de la structure assemblée : — la synthèse modale à partir des bases modales des sousstructures dont les points de jonction ultérieurs sont bloqués (Craig et Bampton) ; cette méthode est rarement appliquable dans le cas d’expérimentations, vu la difficulté pratique que l’on rencontre pour réaliser des montages encastrés sur une plage de fréquence suffisamment étendue ; — la synthèse modale à partir des bases modales des sousstructures complètement libres dans l’espace (Mac Neal) ; cette méthode est, à l’inverse, commode pour l’expérimentateur, car des suspensions très souples (sandows ou chambres à air, etc.) offrent facilement ces conditions libres dès que la fréquence dépasse quelques hertz ; — la synthèse impédancielle, qui revient à coupler directement les impédances ou admittances des structures, mais qui, nécessitant diverses inversions de matrices d’assez grande taille, apparaît plus difficile numériquement et demande de sérieuses précautions, en termes d’analyse numérique, lorsque les données sont d’origine expérimentale. Ces méthodes sont diffusées sous forme de logiciels, le plus souvent en complément optionnel de logiciels d’analyse modale. Les principales applications de ces méthodes de sousstructuration et de synthèse dynamique dans le domaine industriel sont typiquement les suivantes : — la simulation de modifications de la structure analysée, en couplant à la structure de départ des éléments simples (masses, poutres permettant de rigidifier la structure, etc.) ; c’est une manière souvent élégante et rapide d’évaluer le glissement de fréquence propre qu’on va pouvoir obtenir sur une structure par des modifications simples ; elle suppose seulement que l’on mesure les fonctions de transfert (puisqu’on étend la base modale) aux points où l’on songe appliquer ces modifications ; — la conduite des projets importants où l’on va assembler des éléments originaires de fournisseurs différents ou de technologie différente, pour constituer l’ensemble final. La sous-structuration permet alors : • d’identifier la contribution dynamique propre de chaque élément dans le comportement final, • de ne reprendre qu’une fraction des notes de calcul ou des essais si un seul élément vient à être modifié, R 3 140 − 32 Figure 33 – Application de la méthode de sous-structuration et synthèse dynamique à un projet de plate-forme pétrolière offshore • de coupler des données expérimentales acquises sur des sousensembles existants (par exemple, des machines déjà construites ou des éléments similaires à des réalisations antérieures) avec le résultat de calculs (le plus souvent en éléments finis) sur d’autres éléments encore en projet. Ces méthodes sont ainsi appliquées depuis des années avec succès pour l’optimisation de prototypes de véhicules automobiles, ou pour concevoir ou modifier des plates-formes de forage offshore (figure 33) [35]. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES 3. Maîtrise des vibrations et des bruits induits. Exemples de cas industriels 3.1 Actions correctives À ce stade, les mesures et leur interprétation ont permis d’identifier les mécanismes vibratoires à l’origine de la gêne. Suivant le cas, cette constatation est faite lors des premiers essais d’un prototype ou sur une installation déjà ancienne présentant des problèmes de vieillissement. Ces vibrations sont inacceptables à court ou à long terme, quelle qu’en soit la raison (risques d’endommagements irréversibles, nonconformité des produits) : l’ingénieur doit donc imaginer des remèdes durables, sans pour autant remettre en cause le produit ou l’installation. Ce paragraphe illustre les solutions ou, à défaut, les palliatifs les plus efficacement employés dans divers domaines de l’industrie. Cela implique successivement deux démarches : 1. remonter aux causes situées le plus en amont ; une analyse plus ou moins complexe fera découvrir les sources (par exemple, le balourd d’une machine tournante) ; 2. agir surtout sur les causes premières ainsi détectées (dans cet exemple, procéder à l’équilibrage dynamique de la machine). Exemple : les vibrations et bruits dus au roulage et perçus à l’intérieur d’un véhicule routier sont fonction de la transmissibilité de la suspension et de la qualité de l’interface pneumatiques/route. Aussi les constructeurs et équipementiers étudient le spectre de fréquence lié à la vitesse de roulage, à la sculpture des pneumatiques et à la rugosité de la route. La démarche 1 ayant abouti à localiser la source à l’interface, la démarche 2 revient à étudier le mouvement relatif pneumatiques/route, compte tenu de la réaction du véhicule et en fonction des principaux paramètres (vitesse, trajectoire, pression de gonflage, rôle de la sculpture des pneumatiques) influant sur la génération des vibrations et bruits, sur l’adhérence et la tenue de route. Une solution d’amélioration apportée à un état vibratoire donné doit être particularisée au cas traité. Les exemples ci-après nous invitent à distinguer sept actions distinctes, sans que ce chiffre constitue une limite ! D’autres exemples nous amèneraient peutêtre à compléter la liste suivante, qui a déjà une grande généralité : — réduire une puissance ; — déplacer une fréquence d’excitation ; — écarter un risque d’instabilité ; — amortir les résonances et les chocs ; — isoler les structures ; — agir par contrôle actif ; — surveiller et analyser au moyen des vibrations. a) Réduire une puissance Des détériorations de dentures ont été constatées sur plusieurs réducteurs de pompes de centrales nucléaires. Une campagne d’essais a été menée lors de démarrages et d’arrêts. Les couples, poussées et chocs ont été mesurés pour diverses conditions de démarrage. Le remède a été de réduire la puissance transmise, trop élevée (figure 34), en allongeant le temps de démarrage du moteur par interposition d’une auto-inductance, le nouveau régime transitoire étant acceptable. b) Déplacer une fréquence d’excitation Un véhicule, confortable en régime normal sur route, peut se révéler bruyant et trépidant lorsque le moteur tourne au ralenti (900 tr/min) dans les embouteillages. Pourtant la puissance a considérablement baissé, mais le système mécanique n’est plus le même : — seule tourne la partie en amont de l’embrayage avec une inertie et un balourd différents ; Figure 34 – Accélération au démarrage d’un réducteur de pompes (EDF Saint-Laurent) après étalement de la puissance sur t = 0,3 s — la raie vibratoire fondamentale est à plus basse fréquence, typiquement 15 Hz si le moteur tourne à 900 tr/min, au lieu de 70 Hz pour 4 200 tr/min, excitant alors les premiers modes de la caisse, plus perceptibles physiologiquement. c ) Écarter un risque d’instabilité Le suivi d’instabilités par calculs sur modèles mathématiques procure l’avantage d’être plus économique et plus rapide à mettre en œuvre que de nouvelles constructions. Ce processus est appliqué avec succès aux études préventives d’instabilités. ● C’est le cas des avions, où existe le risque du flottement en vol par couplage de deux modes avec les forces aérodynamiques, et apparition d’un amortissement α négatif. La figure 35 est établie : — à partir d’une analyse modale expérimentale de l’avion au sol, sans vent (V = 0), et suspendu en basse fréquence (1 à 2 Hz) pour assurer un bon découplage avec les premières fréquences propres de l’avion (à cet essai de l’avion au sol peut être substitué un calcul par éléments finis si l’on dispose des moyens informatiques nécessaires) ; — à partir d’un calcul de la vitesse critique Vc résultant de coefficients théoriques des forces aérodynamiques instationnaires (Kussner) aux fréquences de l’avion ; la méthode des tranches indépendantes bidimensionnelles en fluide incompressible est appliquée à Vvariable . Écarter un risque d’instabilité, c’est-à-dire repousser la vitesse critique, conduit, par exemple pour une gouverne, à la suréquilibrer en alourdissant son bord d’attaque. ● Un son, détecté vers 140 à 150 Hz, est émis par un détachement tourbillonnaire régulier au point P (figure 36). Il s’agit d’un mécanisme aéro-acoustique qui est à l’origine des bruits éoliens des câbles de lignes électriques. Des études expérimentales d’EDF en soufflerie anéchoïque complètent une modélisation numérique du rayonnement sonore. Le remède supprimant 5 dB du bruit (déplaçant P en C) consiste à enrouler en hélice sur le câble (∅ ≈ 16 mm) un cordon (∅ 5 mm) au pas de 100 mm. d ) Amortir les résonances et les chocs La littérature est riche dans ce domaine. La notion d’amortissement, difficilement modélisable, est encore souvent issue d’une démarche semi-empirique. Amortir des chocs et des vibrations, par voie passive, en particulier les résonances, transforme la puissance mécanique, qui est dissipée intégralement en chaleur. L’élévation de température qui en résulte risque d’influer sur le point de fonctionnement et la réponse de l’amortisseur, dans la majorité des cas rencontrés. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 33 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ et de fréquence. Il existe sur le marché des feuilles « sandwiches » à base de tôles métalliques, utilisables pour la construction de capots de machines, de trémies soumises à des chocs, etc. (figure 37b ). ● Amortissement électrodynamique : le principe est de dériver une partie de l’énergie vibratoire sous forme électrique. On distingue les amortissements de type passif et de type actif, qui l’un et l’autre conduisent à des solutions plus coûteuses que les deux précédentes : — l’amortissement passif met en jeu les courants de Foucault développés par un conducteur en mouvement dans un champ magnétique permanent (figure 37c ) ; — l’amortissement actif comprend l’amortisseur passif et un amplificateur de puissance ; le résultat est un amortissement visqueux pur, indépendant de la fréquence ; — l’amortissement piézoélectrique agit de façon similaire. On couvre tout ou partie de la structure par un revêtement piézoélectrique connecté à un circuit dissipatif. On réalise alors un dispositif amortisseur actif ou passif, efficace même à très basse fréquence [37]. Figure 35 – Essai de vibration au sol et prévention du flottement en vol (origine : ONERA) e) Isoler les structures L’article Isolation antivibratoire et antichocs [B 5 140] du traité Génie mécanique développe précisément ce point. Rappelons que le découplage correspond à l’insertion d’un élément souple qui empêche les vibrations de se propager plus loin et les confine côté source (rupture d’impédance). Ce concept a un sens très large et certains exemples précédents, tels que b ) ou c ), pourraient être classés ici. Nous nous limiterons à l’exemple du découplage classique obtenu par insertion d’une raideur faible. Le résultat optimal est obtenu en se plaçant au point d’inflexion I de la caractéristique force F -allongement a de la figure 38 dans le cas de matériaux non linéaires comme le caoutchouc. Des ressorts métalliques, utilisés dans le domaine linéaire, peuvent conduire à des fréquences de suspension de 1 ou 2 Hz, ou même plus basses avec une suspension pneumatique. f ) Agir par contrôles actifs De telles solutions ont été développées dans des domaines variés, même si les applications industrielles sont encore rares (principalement faute de technologies suffisamment rustiques pour les capteurs et actionneurs). Figure 36 – Exemple de découplage acoustique par désorganisation d’un détachement tourbillonnaire aéro-acoustique (pic P supprimé en C) Nous limiterons cette présentation à des réalisations fondées sur trois principes différents (figure 37 ) : les amortissements par frottement sec, viscoélastique, électrodynamique. Les termes d’amortissement α ou C sont accompagnés de termes de raideur non linéaires ∆ F /∆ x ou K , tous plus ou moins fonction de la fréquence et/ou de la température. ● Frottement sec : il est à réserver aux cas de vibrations d’amplitude importante ; bien maîtrisé, il est mis en œuvre pour limiter le débattement des cuves de lave-linge, et utilisé dans les amortisseurs à câble métallique pour assurer la protection d’équipements embarqués (exemple : figure 37a ). En deçà du seuil de glissement, il est inopérant ; les vibrations sont alors entièrement transmises. ● Amortissement viscoélastique : pour amortir des structures à forte rigidité, les meilleurs résultats sont obtenus par des revêtements viscoélastiques contraints travaillant en cisaillement. Leur mise en œuvre doit être précédée par une sélection rigoureuse des matériaux et une modélisation des cas précis d’application : il n’y a pas de matériau amortissant « universel » et les élastomères ne sont très amortissants que dans des plages étroites de température R 3 140 − 34 Exemples — Stabilisation de navires en roulis au moyen de systèmes actifs antiroulis. Un couple antagoniste est créé par le déplacement de masses commandé à partir de la détection de l’angle de roulis θ et de ses dérivées θ˙ et θ̇˙ . — Roulement d’avions sur terrains inégaux par détection « avancée », de 0,5 m par exemple, à l’aide d’un rayon laser émis à bord et réfléchi sur l’obstacle ; puis action de contrôle agissant à l’instant convenable sur le vérin du train d’atterrissage. Le même résultat peut être atteint par détection et action concomitantes sur le servovalve du vérin, à condition que le temps de réponse des commandes soit beaucoup plus court que dans la solution précédente agissant par signal précurseur en boucle ouverte. — Paliers et amortisseurs magnétiques. Ces dispositifs, sans lubrifiant ni frottement, sont applicables dans de très larges plages de température et de pression (article Paliers magnétiques [B 5 345] dans le traité Génie mécanique). EDF a vérifié sur un palier magnétique d’une capacité de portage de 40 000 N (réalisation S2M) une bonne concordance de la raideur mesurée et calculée pour différents gains de la boucle d’asservissement des électroaimants. Ce palier actif, fonctionnellement porteur, peut aussi être utilisé en amortisseur magnétique s’il est inséré sur une ligne d’arbre déjà supportée. Les vitesses critiques peuvent alors être franchies sans inconvénient. Un banc d’essai existe à EDF pour en démontrer la faisabilité jusqu’à une force centrifuge de balourd de 105 N. De tels paliers sont également envisagés pour rendre indétectable le balourd de la machinerie de sous-marins. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Figure 38 – Suspension souple (1 à 2 Hz) par câble élastique g) Surveiller et analyser au moyen des vibrations Les vibrations des structures sont, dans de nombreux cas, significatives de l’état de celles-ci ; les réponses vibratoires, convenablement analysées, sont riches d’enseignement. Le suivi structural peut s’exercer en considérant deux natures distinctes de signaux : — les signaux vibratoires internes émis lors du fonctionnement structural normal et appelés signaux vibratoires naturels ou plus simplement vibrations naturelles ; — les signaux des réponses vibratoires dues seulement à des vibrations forcées extérieures, appelées vibrations artificielles . Dans le cas le plus banal (vibrations naturelles d’une machine tournante courante), un accéléromètre associé à un équipement de collecte et de surveillance suffit dans la plupart des cas rencontrés, dont un exemple est donné ci-après. Au contraire, dans le cas des vibrations artificielles, l’entrée est imposée, connue et définissable. Le traitement, plus complexe, est celui de l’acquisition des fonctions de transfert structurales et demande des moyens plus importants dépassant le stade de la surveillance pour atteindre celui de l’analyse. Deux exemples sont donnés ci-après. ● Équipement de surveillance de vibrations naturelles : la détection d’anomalies de fonctionnement d’un parc de machines ou d’une machine isolée peut être assurée par des installations fixes ou des appareils portables qui réalisent commodément, dans les cas courants, l’ensemble des fonctions requises : collecte, analyse et traitement de données issues de capteurs vibratoires, gérées par des logiciels appropriés [Movilog et Moviscope de Framatome Diagnostic]. De tels moyens permettent des auscultations variées (transformées de Fourier rapides, statistiques de tendance, moyennes quadratiques, facteurs de crête, etc.) opérées sur des signaux de capteurs fixes ou sur ceux du capteur mobile du rondier. ● Vibrations forcées : contrôle de l’état de fatigue d’une structure : la figure 39a schématise le cas d’une structure en essai sous sollicitation mécanique (ici éprouvette en fatigue, équipée d’un accéléromètre). Pour établir l’évolution mécanique de l’échantillon, il importe de mesurer à intervalles réguliers une grandeur qui puisse caractériser l’état de fatigue traduisant globalement, par exemple, des fissures ou des dislocations imperceptibles. Cette grandeur est ici la fréquence propre f 0 significative de l’état mécanique structural. Des tests, opérés sous vibrations forcées de courte durée, avec ou sans interruption de la sollicitation de fatigue, peuvent être, s’ils sont bien choisis, significatifs de « l’état de fatigue » structural recherché. C’est l’objet de la figure 39b . La structure sollicitée en fatigue par une force extérieure F est assimilée à un système à 1 degré de liberté à constantes localisées (m, c, k ) répondant au modèle : Figure 37 – Amortissement : différents principes [36]. mẋ˙ + cẋ + kx = λ ẋ Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 35 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ — de la durabilité opérationnelle effective de ces mêmes équipements, dans un souci de rendement accru ; — de la satisfaction de la demande de plus en plus impérieuse de confort vibratoire et acoustique, dans les sites de production, les moyens de transport, l’habitat. Figure 39 – Contrôle de l’évolution mécanique d’une structure par voie vibratoire On établit une contre-réaction de vitesse ẋ , dosée par un facteur réel λ tel que F = λ ẋ et λ ≈ c . Cela rend l’amortissement quasi nul, et la structure oscille alors sur son mode propre tel que : 2 ( – m ω 0 + k )x ≈0 f0 = ω0 ⁄ 2 π On observe l’abaissement de cette fréquence propre f 0 , dû à l’état d’endommagement de la structure, qui en est un critère quantitatif. ■ Analyse du comportement vibratoire d’un barrage : mise en vibrations forcées (action EDF) du barrage-voûte de Laparan par un ensemble de forces vibratoires de 50 kN dans la bande de fréquences de 2 à 50 Hz. Le but de cet essai est de suivre le comportement dynamique du barrage par sensibilité modale, qui peut traduire un défaut. Un tel défaut peut être localisé à l’aide d’un modèle 3D de la voûte et de la retenue, réalisé à cette fin. Les vibrations artificielles (ou forcées) sont donc susceptibles de faire ressortir de manière sensible et de traduire quantitativement des modifications structurales. La principale difficulté est de pouvoir discriminer des modifications ténues, mais suffisamment précoces relativement à une ruine majeure de l’ouvrage, pour que cette approche soit intéressante et sûre : de ce fait, son application industrielle reste limitée. 3.2 Diffusion des techniques d’analyse Les principaux concepts de l’analyse vibratoire sont formulés depuis plusieurs générations. Mais la maîtrise des aspects vibratoires ne connaît son développement actuel que grâce à la diffusion concomitante : — de logiciels d’analyse par éléments finis enfin bon marché et ne demandant plus une spécialisation particulière pour leur mise en œuvre ; — d’analyseurs de signaux dynamiques par transformée de Fourier rapide (FFT – Fast Fourier Transform), également de plus en plus économiques et simples d’emploi. L’avènement d’une révolution technologique similaire dans le domaine des capteurs (qui, jusqu’à présent, n’avaient que peu évolué), grâce aux technologies du silicium en couche mince déjà évoquées (figure 17), va probablement contribuer à accélérer encore ce mouvement de diffusion. Les enjeux sont considérables, puisque cette maîtrise des aspects vibratoires et acoustiques est à la fois la clef : — de l’allègement des structures et des machines, visant à l’économie des matières premières et de l’énergie ; R 3 140 − 36 Comme d’autres évolutions technologiques, la maîtrise des vibrations est d’abord passée par la demande des constructeurs aéronautiques et d’engins spatiaux, et l’enjeu des systèmes d’armes les plus évolués, tels les sous-marins des forces stratégiques. Ce sont ces secteurs qui ont motivé et soutenu financièrement le développement de la plupart des outils et méthodes tels que ceux développés au paragraphe 2 et continuent d’inciter à des développements nouveaux et complémentaires. Le relais a été ensuite pris par des industries fortement innovatrices et soucieuses de la performance de leurs produits et de leurs coûts, comme l’industrie automobile et ses réseaux d’équipementiers. Les exemples ci-après (§ 3.3, 3.4 et 3.5) visent à démontrer que le stade de diffusion à tout le tissu industriel est maintenant atteint. Cette perspective optimiste ne doit pas pour autant se traduire par un excès de naïveté qui ferait réduire cet objectif de maîtrise des vibrations des structures à l’acquisition de quelques logiciels et d’un analyseur de fréquences. Quelques vérités fondamentales doivent être rappelées : — il faut apporter autant de soin à prévoir les excitations dynamiques engendrées au sein d’une structure qu’à contrôler les modes propres de cette dernière ; or beaucoup de phénomènes dynamiques inhérents au fonctionnement des machines restent peu élucidés et appelleraient des travaux d’analyse de la part de mécaniciens au sens strict du terme ; — les conditions aux limites et les assemblages, dont une part notable des amortissements est issue, ont un poids considérable dans la qualité et la véracité des calculs dynamiques de structure, et là encore la connaissance rationnelle est lacunaire ; qu’importent alors la précision de calcul des algorithmes et la qualité graphique des « déformées animées » ! — le coefficient d’amortissement que l’on définit pour une structure mode par mode dépend physiquement de phénomènes aussi variés que les réarrangements microgranulaires à l’échelle microscopique, le rayonnement acoustique, les jeux mécaniques, la viscoélasticité, le fluage, etc. ; on devra donc garder une certaine prudence avant d’en supputer la valeur ou de conclure qu’un apport de matériau viscoélastique est l’universelle panacée face à une vibration ou à un bruit excessif ! La maîtrise des vibrations restera donc encore durablement un art de l’ingénieur, avec tout le sens du diagnostic, l’intuition raisonnée et l’expérience que cela comporte, au-delà des facilités numériques qui n’en sont qu’un instrument. De là l’importance des publications d’études de cas, des colloques et toutes autres formes de diffusion, qui, dans le domaine expérimental, restent trop peu nombreux, probablement du fait de la réticence des industriels concernés à autoriser de telles publications, malgré les précautions prises pour respecter les exigences légitimes de confidentialité. Les exemples que nous avons retenus ont avant tout pour objet d’éclairer les diverses stratégies de contrôle des vibrations que notre activité de consultant nous amène à mettre en œuvre, sans souci d’entrer ici dans tous les détails techniques de ces applications. 3.3 Première étude de cas : suppression des vibrations indésirables lors de la mise au point d’une machine de série Ce premier exemple illustre une démarche typique pour faire face à l’apparition tardive de problèmes de nature vibratoire dans le processus de développement d’un produit. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Il s’agissait d’outillages pneumatiques de type ponceuse orbitale, destinés à des usages professionnels, mais produits malgré tout en assez grande série. Alors que les prototypes avaient présenté un comportement vibratoire tout à fait normal pour ce type de matériel, il est apparu rapidement, lors de la production de série, que plus de la moitié de l’outillage s’avérait inutilisable en raison de vibrations excessives. C’est alors que nous avons été appelés à intervenir, avec le degré d’urgence que l’on imagine. Le premier test a été de contrôler la qualité de l’équilibrage de la partie tournante. Il est apparu qu’un gain significatif pouvait être obtenu en remplaçant l’équilibrage statique antérieur par un équilibrage dynamique en deux plans (figure 40) (ces méthodes d’équilibrage des rotors sont précisées dans le traité Génie mécanique). Toutefois, les vibrations restaient élevées et nombre de machines dépassaient encore la norme actuellement fixée à 3 g . C’est pourquoi nous avons décidé de rechercher si des phénomènes de résonance mécanique n’étaient pas impliqués. Une analyse modale sommaire, à partir d’excitations par chocs, a été conduite dans la bande 0 à 500 Hz. Il est apparu que le plateau de la ponceuse présentait un mode dit de basculement à 112 Hz, qui semblait effectivement se coupler malencontreusement à un harmonique de la fréquence de rotation (le mouvement cinématique orbital induit en effet des raies harmoniques nombreuses et intenses). Toutefois, cette seule observation, si elle expliquait le caractère élevé des niveaux vibratoires, n’expliquait pas pourquoi telle ponceuse était bonne et telle autre inutilisable. Un examen plus attentif de ces essais modaux a révélé des comportements largement non linéaires et peu répétitifs de ces machines. À partir de cette observation, on a pu mettre en évidence un jeu important entre l’axe de la turbine (l’élément moteur) et le corps de la machine, qui ne se révèle que lorsque la mécanique est chaude, après un certain temps de fonctionnement. Une nouvelle analyse en fonctionnement a permis de confirmer le rôle fondamental de ce jeu dans le phénomène vibratoire gênant. Le délai d’apparition de ce dernier est probablement lié à la fois à des dilatations différentielles des pièces en regard et à la réduction de l’amortissement visqueux du film d’huile, lorsque la température de la machine s’élève et se stabilise en fonctionnement. Le couplage vibratoire entre le fouettement de l’arbre et le mode propre du plateau apparaît alors, et les vibrations deviennent intenses. Dès lors, la solution de ce problème devenait évidente : il a suffi de modifier la procédure de montage de ces paliers et le couple de serrage pour réduire la valeur du jeu et les tolérances de fabrication correspondantes. En quelques jours, ces modifications mineures du processus de fabrication et de montage ont permis de reprendre normalement la commercialisation de la totalité de la production. Remarque : l’élargissement des tolérances constructives lors du passage du stade prototype à la production de série n’est qu’un des nombreux paramètres liés au choix des technologies de construction des objets mécaniques. Le bureau des méthodes vérifie en général avec le bureau d’études que ces choix ne jouent ni sur la résistance mécanique des pièces, ni sur les performances fonctionnelles (rendement, étanchéité, etc.). Mais les vibrations et le bruit des objets fabriqués peuvent dépendre aussi, indirectement, de ces choix de technologie de production, comme cet exemple le montre ; et ce caractère indirect rend en général un tel risque imprévisible, en dépit des conséquences financières considérables tant directement qu’en termes d’image du produit nouveau : en effet, quelque soin qu’on apporte à analyser le bon fonctionnement des prototypes, on ne peut déceler avant l’heure ces aléas de la montée de la production aux grandes séries... Du moins cette expérience peut-elle inciter à réagir plus rapidement dans des circonstances similaires. Figure 40 – Étude des niveaux vibratoires de ponceuses 3.4 Deuxième étude de cas : remède à la dégradation structurale causée par les vibrations d’une installation industrielle Après quelques années d’exploitation, la plupart des six unités d’aéroréfrigérants d’une importante unité industrielle (figure 41) présentaient des états de fissuration jugés alarmants par l’exploitant et nécessitaient, par ailleurs, des coûts d’entretien anormalement élevés pour parvenir tant bien que mal à satisfaire aux exigences de fiabilité et de disponibilité requises par les unités de transformation chimique qui en dépendaient. Nous avons donc été appelés à procéder à une expertise approfondie. Des mesures en fonctionnement ont d’abord permis de mettre en évidence un groupe de raies fréquentielles fortement émergentes entre 23 et 26 Hz, ainsi qu’entre 5 et 8 Hz (figure 42). L’analyse de la cinématique du système moteur-réducteur-ventilateur met en relation ces vibrations avec les excitations provoquées par, d’une part, le fondamental de rotation h1 du moteur et l’harmonique H12 du ventilateur, de fréquence très voisine, d’autre part les harmoniques H3 et H4 du ventilateur. S’agissant d’un ventilateur à 3 pales tournant devant quatre obstacles fixes (les deux poutres en croix qui tiennent son axe) (figure 40), l’émergence de ces raies H3, H4 et H12 n’avait rien de surprenant. Mais cela n’expliquait pas leur niveau si élevé pour du matériel de cette qualité mécanique et aérodynamique. Nous avons alors procédé à une analyse vibratoire synchrone, c’est-à-dire que les mesures en divers points sont référencées en phase (par l’emploi d’un tachymètre) à la position angulaire des mobiles correspondants. Il est ainsi possible de tracer les mouvements et les déformations de la structure spécifiquement provoqués par ces raies harmoniques, et même de les animer sur l’écran de l’analyseur. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 37 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 43 – Déformée modale des poutres à 23 Hz Figure 41 – Schéma d’une unité d’aéroréfrigérants Figure 42 – Spectre d’accélération en fonctionnement Ce procédé a permis de mettre en évidence en particulier, dans le plan horizontal, une flexion importante des poutres en croix, associée à une rotation du nœud central tout à fait synchronisée à la raie H12 du ventilateur à 23,5 Hz (figure 43), ainsi que diverses déformations de la cheminée de l’aéroréfrigérant et de la dalle supérieure. Pour expliquer ce fort couplage, nous avons alors procédé à une analyse modale à partir d’une excitation par chocs de la structure, moteur et ventilateur arrêtés. Parmi les modes déjà nombreux qui ont été révélés, trois d’entre eux présentaient des fréquences propres et des déformées voisines de celles observées en fonctionnement : — deux modes en festons de la cheminée associés à des flexions de la dalle, respectivement à 5,6 et 7,9 Hz (figure 44) ; — un mode de flexion des poutres dans le plan horizontal, associé à la rotation d’axe vertical de la plate-forme moteur, à 23 Hz. Le diagnostic était alors clair : le choix d’un rapport de réduction voisin de 12, qui rapproche h1 moteur et H12 ventilateur, alors même qu’H12 est la raie ventilateur prépondérante (3 pales × 4 éléments fixes dans la veine aéraulique) est en soi déjà malencontreux ; cette R 3 140 − 38 Figure 44 – Déformées modales mesurées de la dalle et de la cheminée proximité est rendue catastrophique par la quasi-coïncidence avec des résonances structurales majeures des éléments qui leur sont directement couplés. L’état de fissuration du bâtiment et les coûts de maintenance des parties mécaniques étaient tels qu’une solution rapide et définitive devait être apportée. L’importance de l’enjeu (économique et fonctionnel) de cette installation ne permettait de plus aucun tâtonnement. C’est pourquoi nous avons étayé par des calculs en éléments finis la définition d’une solution pour en garantir l’efficacité. Un modèle assez simple a permis de retrouver les formes propres observées (figure 45, en relation avec les figures 44a et b ). Les écarts sur les fréquences, dus aux approximations sur les conditions aux limites et aux détails structuraux négligés, ne dépassent pas 10 % et ont dispensé de procéder à un recalage du modèle. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES Nous avons ensuite simulé diverses modifications structurales et retenu avec notre client un raidissement par huit bracons (figure 46). Cette solution est la seule à garantir un glissement suffisamment important des fréquences propres de la structure vis-à-vis des raies excitatrices. Des modifications sur la partie mécanique de l’installation (modification du rapport de réduction) n’étaient, par contre, pas envisageables, mais, en principe, elles auraient pu permettre de réduire tout autant les vibrations de l’installation. Le résultat final mesuré sur l’installation modifiée est présenté sur la figure 47 ; il se passe de tout commentaire. Figure 45 – Déformées modales calculées (modèle de calcul en éléments finis) 3.5 Troisième étude de cas : amélioration d’un découplage antivibratile Ce troisième référer exemple est emprunté au domaine ferroviaire. Nous avons été appelés par la RATP pour remédier à des ruptures fréquentes affectant les supports des capteurs magnétiques de signalisation implantés en porte-à-faux sur les bogies de matériels roulants ; il est à noter que cette rupture intervenait malgré l’effet filtrant attendu des découplages mécaniques (anneaux d’élastomère) interposés entre le corps du bogie et la poutre porte-capteurs (figure 48). Il convenait d’abord de caractériser l’ambiance vibratoire présente sur le corps de bogie dans les conditions normales d’opération. Le spectre de ces vibrations est apparu beaucoup plus timbré que l’on ne l’aurait attendu, en raison probablement d’une réponse modale du corps de bogie aux chocs de roulement (figure 49). Parallèlement, on a procédé à l’analyse dynamique des poutres porte-capteurs en conditions libres (puisqu’elles sont découplées mécaniquement). Compte tenu de ces deux données, il est apparu nécessaire de modifier les éléments de découplage proprement dits, qui déterminent le transfert effectif entre les vibrations des bogies et les poutres. On a préconisé une nouvelle suspension et vérifié par un calcul de synthèse que la réponse vibratoire de la poudre serait, cette fois, très en deçà de ses limites de résistance en fatigue. Les essais finals l’ont confirmé. Il est intéressant de signaler que l’on s’est servi du modèle par éléments finis pour déduire, des accélérations mesurées, les niveaux de contraintes mécaniques dans les éléments trop difficiles à instrumenter en jauges de contraintes (figure 50). Figure 46 – Solution de renforcement retenue (par huit bracons) Figure 48 – Emplacement du capteur sur le bogie Figure 47 – Comparaison des niveaux vibratoires en fonctionnement avant et après mise en place des bracons (pour I se référer à la figure 42) Figure 49 – Mesures d’accélération sur le bogie en roulage normal, au droit du support de poutre, poutre enlevée Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 3 140 − 39 VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Figure 50 – Redimensionnement des colliers porte-capteurs. Calcul des contraintes dynamiques 4. Conclusion Les vibrations, les chocs et les bruits rencontrés sur les structures industrielles ont des conséquences internes et externes dans des domaines variés. Il est donc nécessaire de les prendre en considération : — en théorie, à partir du projet de structure ; — en pratique, durant tout l’intervalle d’exploitation de la structure, depuis la mise en œuvre jusqu’à la mise en réforme. En simplifiant, trois actions principales marquent les étapes à franchir : — concevoir la structure ; au niveau du projet, déterminer par calcul les zones sensibles et l’importance des vibrations significatives ; c’est l’étape prédictive ; R 3 140 − 40 — essayer la structure en vibration ; comparer les résultats d’essais à ceux du calcul ; interpréter les écarts en reprenant, si besoin est, les hypothèses de travail pour assurer l’accord essai/calcul ; apporter les modifications qui s’imposent : c’est l’étape corrective et de mise au point ; — contrôler par les vibrations produites ou provoquées la réponse de la structure tout au long de sa vie, la signature de sa réponse ; c’est l’étape de la surveillance vibratoire. Au-delà, faisant profit de l’expérience de ces trois étapes, il est possible d’imaginer une nouvelle disposition structurale plus performante que la précédente, c’est l’étape prospective qui valorise les résultats de calculs et d’essais obtenus et permet un progrès technologique continu. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R3140doc.fm Page 1 Mercredi, 4. juillet 2001 2:13 14 P O U R Vibrations des structures industrielles E N par Jean-François BOISSEAU Docteur-Ingénieur Ancien Chef de Groupe de Recherches à l’Office National d’Études et de Recherches Aérospatiales (ONERA) Expert près la Cour d’Appel de Paris et Bernard GARNIER Ingénieur civil de l’École Nationale des Ponts et Chaussées Directeur Commercial à la société METRAVIB RDS Références bibliographiques [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10] 7 - 1991 [11] [12] [13] Doc. R 3 140 [14] [15] [16] STRUCOME 88 Congrès international, Paris, Hermès 2 vol. : vol. 1, p. 568, nov. 1988. STRUCOME 88 Congrès international, Paris, Hermès 2 vol. : vol. 1, p. 291, nov. 1988. STRUCOME 88 Congrès international, Paris, Hermès 2 vol. : vol. 2, p. 841, nov. 1988. STRUCOME 88 Congrès international, Paris, Hermès 2 vol. : vol. 2, p. 833, nov. 1988. Mécanique, Matériaux, Électricité, Journal du GAMI, ISMCM Saint-Ouen : no 415, p. 65. Mécanique, Matériaux, Électricité, Journal du GAMI, ISMCM Saint-Ouen : no 424, p. 7. Mécanique, Matériaux, Électricité, Journal du GAMI, ISMCM Saint-Ouen : no 424, p. 30. DUVAL (P.). – Iceberg contre plate-forme offshore. Le courrier du CNRS no 71, p. 79, été 1988. ROCARD (Y.). – L’instabilité en mécanique. Masson (1954). GOYDER (H.G.D.) et WHITE (R.G.). – Vibrational power flow from machines into built-up structures. Journal of Sound and Vibrations (JSV), 68 (1) (1980). LESUEUR (C.) et al. – Rayonnement acoustique des structures. 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R 3 140 − 1 S A V O I R P L U S R3140doc.fm Page 2 Mercredi, 4. juillet 2001 2:13 14 P O U R VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES _____________________________________________________________________________________________ Normalisation Normes françaises Association française de normalisation AFNOR — méthodes d’essais applicables aux composants électroniques ; — méthodes d’essais applicables aux composants et matériels électriques. Recueil : E N S A V O I R Chocs et vibrations mécaniques. Recueil de normes françaises, tomes 1 et 2, troisième édition 1987. Ce recueil regroupe l’ensemble de 46 normes nationales portant sur les sujets suivants : tome 1 : Vocabulaire, instrumentation et mesure, exposition des individus : — vocabulaire (index alphabétique, français-anglais) ; — isolation mécanique ; — équilibrage ; — instrumentation de mesurage ; — mesure des vibrations ; — évaluation de l’exposition des individus aux vibrations ; tome 2 : Moyens d’essais, méthodes d’essais applicables aux matériels et composants électriques : — machines pour essais ; — guides pour essais ; — méthodes d’essais applicables aux matériels électriques ; De plus, de nombreux travaux sont actuellement en cours sur : — l’instrumentation de mesurage (dans les bâtiments et pour l’étalonnage des accéléromètres) ; — l’extension des codes d’essais particuliers de machines portatives vibrantes ; — l’évaluation de l’exposition des individus aux vibrations ; — la standardisation de la caractérisation des plots élastiques destinés à filtrer les vibrations ; — la mesure de la puissance vibratoire qu’une petite machine peut transmettre à son environnement, par la méthode de la « plaque réverbérante ». Norme du ministère de la Défense Norme interarmées GAM.EG 13. Personnalisation des essais en environnement. Symposium (7-8 juin 1989). ASTE, Paris. Normes internationales Organisation internationale de normalisation ISO ISO 7526/1 1986 Vibrations et chocs. Détermination expérimentale de la mobilité mécanique. Partie 1 : Définitions fondamentales et transducteurs. Fabricants et distributeurs de matériels et de logiciels ■ Générateurs de vibrations, bancs de test, pilotage Capteurs, excitateurs, équipement d’analyse (0) ■ Capteurs Électrodynamiques Hydrauliques (0) P L U S Déplacement Vitesse Accélération BETA (Bureau d’Étude et de Technologie Appliquée) Brüel et Kjaer France SA...... Mécaptélec (matériel Columbia) ............. CSI (Capteurs Systèmes Instrumentations) ................ Druck Sarl ............................. Endevco France .................... Entran Sarl ............................ FGP Instrumentation ........... Fogale-Nanotech Sarl .......... Framatome Diagnostic ........ International Service............ JPB......................................... Kaman Instrumentation (distribué par Le Groupe Scientifique).......................... Lennartz Electronic GmbH (distribué par Vibrations Mesures) ............................... MCB (Éts) .............................. Métravib RDS ....................... Optilas Sarl ........................... PCB (distribué par PEP Techdis SA)........................... Phytrans ................................ PM Instrumentation (Schaevitz) ............................ Prodéra (Sté)......................... Schenck SA. Division HBM Mesures................................. Sensorex SA ......................... Sextant Avionique ............... Vectavib SA .......................... Vibro Meter (Sté) ................. Doc. R 3 140 − 2 ..................... ..................... ........... x ..................... x ..................... ........... x ..................... ..................... ..................... ..................... ..................... x ..................... x ..................... ........... ........... ........... ........... ........... x x x x x ........... x ........... x x x Force x x x x x Brüel et Kjaer France SA...................................... x G & Watson (distributeur : Systèmes Indust.)... x Latécoère (Sté Industrielle d’Aviation) .............. .................... Ling (distributeur : Systèmes Industries)........... x Métravib RDS ....................................................... x x ..................... x ........... x x ..................... ........... ........... x x x x x ..................... x ........... ........... ........... ........... ........... ..................... x x x x x Prodéra (Sté)......................................................... x Sereme .................................................................. .................... x Servotest............................................................... .................... x Intespace Ingénierie Tests en Environnement Spatial ................................................................... x x Sopemea (Sté pour le Perfectionnement des Matériels et Équipements Aérospatiaux) .......... x x ■ Analyseurs de signaux, acquisition, traitement x ........... x TESTS À FAÇON SUR GROS MOYENS D’ESSAIS x ..................... x ..................... x Bertin et Cie (Sté)................................................. x Acutronic France SA. Brüel et Kjaer France SA. CCRC (Conseil Commercialisation Regroupement Compétences). Corriaz Mesures Sarl. Elexo (Sté). Endevco France. Euro Physical Acoustics (Sté). Genrad (Sté). Gould Électronique SA. Hewlett-Packard France. Lecroy (Research Systems) Sarl. LMS Sté (Leuven Measurements and Systems France). Masscomp distributeur : Concurrent Computer France. MEIRI (Mesure Électronique Informatique Régulation Industrielle). Nicolet Instrument Sarl. Philips Industriel et Commercial (Sté) Division Science et Industrie. Racal-Dana (Département Marine). Schlumberger Technologies. Scientific Atlanta. SM2I (Sté de Mesure Industrielle Informatisée). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R3140doc.fm Page 3 Mercredi, 4. juillet 2001 2:13 14 _____________________________________________________________________________________________ VIBRATIONS DES STRUCTURES INDUSTRIELLES TAD (Traitements Analogiques et Digitaux). Techniphone SA. Tekelec Airtronic SA. Vishay Micromesures. Location de moyens Leasamétric (Sté). Locadif SA. Locamesure. TAD (Traitements Analogiques et Digitaux). Technomesure. ■ Logiciels d’analyse modale Acutronic France SA. Brüel et Kjaer France SA. Hewlett-Packard France. LMS Sté (Leuven Measurements and Systems France). Métravib SA. Scientific Atlanta. Laboratoire de Mécanique Appliquée LMA. Université de Besançon. ■ Surveillance vibratoire des machines Bentley-Nevada Campagna et Varenne S.A. Framatome Diagnostic. Métravib RDS. MVI Technicatome Vibro Meter (Sté). ■ Supports antivibratiles ● Fabricants Activ Sarl (Agence de Contrôle et de Traitement industriel des Vibrations). Bayoux (Éts). Céfina Industrie. CF2I. Domange Jarret. Effbe France. Gamma (Sté). Gerb SA. Hutchinson SA. Ikas France (Sté). James Walker France. Kléber Industrie. Linatex France SA (Anti Abrasion). Lisega. SA. Métraflex. Mupro France. Pincet et J. Baratte. Roseaux du Languedoc et de Provence (Sté des). Serac (Sté). SIRA (Sté Industrielle de Réalisations Acoustiques). Someca. Syntexill Industrie SA. Teknomatic. Vibrachoc SA. Wattelez Gabriel Usines SA. ● Distributeurs ■ Plaques antivibratiles ● Fabricants Bayoux (Éts). Céfina Industrie. Comprifalt France. Couvraneuf SA. E N ● Distributeurs Angst et Pfister SA. Clamagirand (Éts). Décibel France Sarl. Freudenberg SA. Stenflex (Sté). Vulcain (SA Le). ■ Amortisseurs de vibrations et de chocs Équipements et dispositifs antivibratoires Angst et Pfister SA. Décibel France Sarl. Freudenberg SA. Stenflex (Sté). Effbe France. Enac (Sté). Fadier Automation. Illbruck France SA. James Walker France. Kléber Industrie. Liégisol. Liégibois. Linatex France SA. (Anti Abrasion). Marmonier (Sté). Métraflex. Mupro France. Optac (Sté). Roseaux du Languedoc et de Provence (Sté des). Serac (Sté). Someca. Syntexill Industrie SA. 3m France. Vibrachoc SA. Wattelez Gabriel Usines SA. ● Fabricants Acaplast (Sté). Acla France Polyuréthane. Apex. Bayoux (Éts). BDF Tesa (Sté Beiersdorff France). Céfina Industrie. Domange Jarret. Dynatest Sarl. Effbe France. Gamma (Sté). Gerb SA. Ikas France (Sté). IPSO (Isolation et Protection du Sud-Ouest). Kléber Industrie. Lénisol (Sté). Lifta Sud (Sté). Linatex France SA. (Anti Abrasion). Marmonier (Sté). Martin Merkel France (Sté). Métraflex. Mupro France. NSI (Nouveaux Sols Industriels). Sandow Technic. SIRA (Sté Industrielle de Réalisations Acoustiques). SNPE (Sté Nationale des Poudres et Explosifs). Socitec SA. Socitec international. Sonairtec (Sté). Teknomatic. Teroson SA. Vibrachoc SA. Wattelez Gabriel Usines SA. ● Distributeurs Angst et Pfister SA. CEF (Comptoir Européen des Fabriques). Clamagirand (Éts). Doga (Sté). France Air. Freudenberg SA. Stenflex (Sté). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle P O U R Doc. R 3 140 − 3 S A V O I R P L U S